Dilatations des bronches

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Les dilatations des bronches restent fréquentes, les mécanismes en cause mieux compris.

Leur approche diagnostique a largement bénéficié des progrès de l’imagerie venant compléter une histoire et une présentation clinique souvent très évocatrice.

Elles restent idiopathiques dans près de 50% des cas même si les affections associées ou responsables sont aujourd’hui mieux appréhendées.

Le traitement est actuellement bien codifié et repose pour l’essentiel sur la prise en charge des éléments du cercle vicieux décrit par Cole.

Définition :

Dilatations des bronchesLes bronchectasies sont définies par une augmentation permanente et irréversible du calibre des bronches.

Leurs fonctions sont altérées dans des territoires plus ou moins étendus.

Les mécanismes physiopathologiques intervenant dans la genèse de la maladie et sa pérennisation font intervenir des facteurs infectieux, mécaniques, environnementaux, toxiques ainsi que des facteurs liés à l’hôte.

Cette maladie est fréquente, s’observe chez des patients de plus de 50 ans dans 75%des cas et prédomine chez la femme.

Elle est, à tort, confondue avec la bronchite chronique.

Physiopathologie :

Les bronchectasies sont la conséquence de phénomènes essentiellement locaux : agression de la muqueuse bronchique, favorisant les infections et la colonisation bactérienne, réponse inflammatoire de l’hôte.

Les dommages tissulaires en sont la conséquence, responsables d’une accumulation de sécrétions purulentes.

Ces phénomènes constituent les principaux éléments du cercle vicieux de Cole, avec la pérennisation de l’inflammation locale et le développement des dilatations des bronches.

La charge bactérienne permet le relargage in situ de facteurs chimiotactiques pour les polynucléaires.

Ceux-ci libèrent des protéases (dont l’élastase neutrophile) qui ont un rôle délétère sur la muqueuse bronchique et contribuent à l’entretien de l’inflammation et de l’hypersécrétion bronchique.

L’altération de la clairance mucociliaire, constitutionnelle ou secondaire, retrouvée au cours des bronchectasies, est aggravée au moment des poussées infectieuses par les toxines bactériennes et par les protéases relarguées par les polynucléaires neutrophiles.

Différents facteurs contribuent à la pérennisation de ces phénomènes : l’hypersécrétion de mucus, les lésions épithéliales avec altération des battements ciliaires, l’abrasion de l’épithélium cilié…

Ces perturbations mucociliaires expliquent l’encombrement et l’obstruction au niveau des voies aériennes périphériques.

Classification anatomopathologique :

A – Aspects macroscopiques :

Les bronches atteintes sont comprises entre le quatrième ordre et le huitième ordre de division et appartiennent préférentiellement aux lobes inférieurs.

Quand elles sont bilatérales, elles prédominent souvent à gauche.

Elles sont macroscopiquement tortueuses et ramollies.

Le poumon de voisinage peut être fibreux. En aval, les bronchioles sont obstruées.

Trois présentations sont visibles, de gravité croissante :

– les bronchectasies cylindriques (ou fusiformes) se repèrent par la dilatation régulière des lumières bronchiques, en amont d’un bouchon muqueux brutalement obstructif.

En distalité, le nombre de bronchioles est à peine réduit ;

– les bronchectasies variqueuses (ou moniliformes) se caractérisent par la succession de dilatations irrégulières des lumières bronchiques et de sténoses incomplètes.

L’obstruction est plus distale.

Le nombre de bronchioles est significativement réduit ;

– les dilatations sacciformes ou kystiques qui touchent la partie proximale de l’arbre bronchique.

Les bronches augmentent progressivement de diamètre et se terminent en cul-de-sac au niveau des bronches de quatrième et cinquième génération. Au-delà, il y a obstruction, destruction ou absence de ramification bronchique et bronchiolaire.

B – Aspects microscopiques :

L’atteinte inflammatoire touche la paroi bronchique.

La destruction de tous ses constituants (tissu élastique, cartilage, muscle lisse) est maximale dans les bronchectasies variqueuses.

La cicatrisation laisse en place du tissu fibreux.

La muqueuse peut être ulcérée (par contiguïté).

Une hypervascularisation systémique est constamment observée à l’origine d’hémoptysies fréquentes.

C’est le jeu des anastomoses artérielles bronchiques et pulmonaires qui rend l’hémoptysie potentiellement grave.

Étiologies et facteurs prédisposants :

La dilatation des bronches n’est jamais congénitale.

Les formes diffuses s’expriment sur des terrains prédisposants : mucoviscidose, déficit immunitaire humoral ou cellulaire, dyskinésies ciliaires primitives.

Des infections bronchopulmonaires sévères de l’enfance, une coqueluche ou une infection virale (virus respiratoire syncytial [VRS]) sont incriminées bien qu’il soit toujours difficile d’en faire la preuve rétrospectivement.

Les formes localisées sont plutôt liées à une compression ou à une obstruction bronchique.

A – Facteurs infectieux :

Des antécédents d’infection respiratoire sévère (coqueluche, infection virale…) sont retrouvés dans plus de 50% des cas.

La diminution de la prévalence de la dilatation des bronches avec l’antibiothérapie et les vaccinations constitue un argument supplémentaire pour leur responsabilité présumée.

Divers mécanismes sont imputés dans la tuberculose : compression bronchique par une adénopathie, destruction parenchymateuse ou traction par les tissus cicatriciels. La rougeole, les infections à Mycoplasma pneumoniae, à VRS ou à adénovirus et plus récemment l’infection au virus de l’immunodéficience humaine (VIH) sont incriminées.

Au cours de l’aspergillose bronchopulmonaire allergique (ABPA), les bronchectasies sont classiquement proximales liées à la coexistence d’obstructions bronchiques (bouchons muqueux constitués de feutrage mycélien et de polynucléaires) et de réactions allergiques contre les antigènes aspergillaires.

Le diagnostic d’ABPA est évoqué devant la triade asthme, bronchectasies proximales et hyperéosinophilie.

B – Facteurs mécaniques :

L’inhalation d’un corps étranger, une compression bronchique d’origine ganglionnaire, une tumeur bronchique ou un traumatisme peuvent favoriser le développement de bronchectasies localisées.

Le traitement chirurgical doit être discuté dans certaines circonstances.

C – Facteurs associés :

Le reflux gastro-oesophagien et l’inhalation de produits toxiques variés sont incriminés.

Les observations consécutives à l’injection intraveineuse d’héroïne sont plus exceptionnelles et ont la particularité de se constituer en quelques semaines.

D – Facteurs liés à l’hôte :

1- Pathologies malformatives et génétiques :

Elles sont rares.

– Le syndrome de Williams-Campbell s’exprime par une déficience cartilagineuse.

Ce syndrome, décrit pour la première fois en 1960, est une cause rare de dilatations des bronches, liée à une absence, une réduction ou une altération du cartilage des bronches.

Des formes familiales ont été décrites.

– Le syndrome de Mounier-Kühn associe une dilatation de la trachée et des bronches principales, et une polypose nasosinusienne.

Il apparaît relativement tardivement. Des ectasies trachéobronchiques s’observent en endoscopie et en tomodensitométrie haute résolution (TDM-HR).

– L’existence d’un déficit immunitaire, congénital ou acquis, favorise le développement de bronchectasies.

Si les déficits de l’immunité cellulaire peuvent être en cause, les déficits de l’immunité humorale sont les plus fréquents. Il peut s’agir d’une hypo- ou pan-hypo-gammaglobulinémie, d’un déficit touchant une classe d’immunoglobulines (IgA, IgG, IgM), ou une sous-classe d’immunoglobulines.

Ils peuvent justifier un traitement substitutif.

Dans le syndrome de Good qui associe thymome et déficit de l’immunité humorale, des dilatations des bronches sont notées au décours d’infections pulmonaires à répétition.

– Des anomalies de la fonction ciliaire peuvent favoriser l’apparition de dilatation des bronches : les dyskinésies ciliaires primitives constituent un groupe hétérogène de maladies associant des infections récurrentes des voies aériennes supérieures ou inférieures avec des bronchectasies, une stérilité masculine et des anomalies de la structure ciliaire en microscopie électronique.

Un situs inversus peut être associé (syndrome de Kartagener).

On en rapproche le syndrome de Young qui associe une azoospermie obstructive, des infections bronchiques avec bronchectasies et une diminution de la clairance mucociliaire.

Plus que des anomalies ciliaires, des anomalies de sécrétion de mucus expliqueraient les signes cliniques au cours de ce syndrome qui pourrait être lié à une intoxication mercurielle.

– Au cours du syndrome de Marfan, la présence de bronchectasies est décrite.

– La mucoviscidose constitue une étiologie avérée des dilatations des bronches.

Elle se rencontre de plus en plus souvent chez des adultes compte tenu de l’amélioration de l’espérance de vie des patients atteints.

Elle est de révélation plus tardive dans les formes d’expression incomplète, justifiant la recherche d’une mutation du gène CFTR devant un test à la sueur positif ou douteux chez l’adulte.

– Le déficit en alpha-1-antitrypsine est surtout responsable d’un emphysème pan-acinaire mais figure aussi parmi les étiologies possibles de bronchectasies.

Le lien de causalité n’est alors pas formellement établi.

2- Maladies systémiques :

L’existence de bronchectasies dans ce cadre est de connaissance récente grâce à la réalisation aisée de la TDM-HR.

– La polyarthrite rhumatoïde (PR) est l’exemple le plus démonstratif. Une nette prédominance féminine est observée.

La suppuration bronchique précède souvent l’apparition des manifestations cliniques de la PR.

Plusieurs facteurs sont évoqués : infectieux, suggérant des analogies antigéniques entre les tissus synoviaux et certaines membranes bactériennes, immunologiques ou génétiques. Les séries autopsiques estiment la fréquence des bronchectasies au cours de la PR entre 5,2 et 11,9 %, mais une étude en TDM-HR portant sur 84 patients retrouve des anomalies bronchiques dans 30%des cas.

– Au cours du lupus érythémateux disséminé, les mêmes anomalies sont observées (20% des cas).

Il s’agit d’anomalies radiologiques en général sans syndrome suppuratif bronchique associé.

– D’autres affections, plus rares, comportent quasi constamment des bronchectasies : granulomatose bronchocentrique, syndrome de Buckley, ou syndrome hyper-IgE, qui associe des infections répétées, une dermatite chronique eczématiforme, un syndrome dysmorphique inconstant.

Des bronchectasies peuvent aussi s’observer dans le syndrome de Sjögren et des colites inflammatoires.

Dans la rectocolite hémorragique, les bronchectasies apparaissent dans les formes sévères, parfois au cours de poussées de rectocolite.

Les stéroïdes influent sur le volume de l’expectoration.

Les bronchectasies sont décrites dans les vascularites systémiques ou cutanées, la thyroïdite d’Hashimoto, l’anémie pernicieuse ou la cirrhose biliaire primitive.

Les bronchectasies par traction observées lors des fibroses pulmonaires sont directement liées aux modifications des propriétés mécaniques du parenchyme pulmonaire.

De ce fait, leur topographie et leur substrat histologique sont différents.

Agents pathogènes :

Les enquêtes microbiologiques reposent sur l’examen bactériologique des expectorations.

Les germes les plus fréquents sont par ordre décroissant Haemophilus influenzae (HI), Pseudomonas aeruginosa (PA), Staphylococcus aureus (SA) et Streptococcus pneumoniae (SP).

Ces bactéries cohabitent avec l’hôte au point de réaliser une véritable colonisation, en particulier pour HI et PA.

Elles s’adaptent aux conditions locales en acquérant de nouvelles propriétés, comme PA qui peut se recouvrir d’une substance polysaccharidique (acide alginique) le protégeant des moyens de défense mis en jeu par l’hôte : ce sont les souches mucoïdes.

D’autres agents infectieux sont pathogènes : Mycobacterium tuberculosis et les mycobactéries atypiques.

L’infection à Mycobacterium avium intracellulare doit être suspectée devant l’association de bronchectasies et de nodules multiples au sein du même lobe.

Il est difficile d’évaluer la fréquence des germes anaérobies.

Clinique :

– L’expectoration est habituellement ancienne et quotidienne.

Cette bronchorrhée est variable quantitativement et qualitativement.

Elle peut manquer.

Son importance va de la simple toux chronique ramenant une expectoration semblable à celle de la bronchite chronique jusqu’à la bronchorrhée abondante de plusieurs centaines de millilitres par jour.

Lorsqu’elles sont abondantes, les expectorations sédimentent en plusieurs couches : spumeuse supérieure, muqueuse intermédiaire et purulente inférieure avec des débris.

L’interrogatoire permet parfois de rapporter le début de cette bronchorrhée à l’enfance ou l’adolescence.

Mais l’anamnèse peut rester pauvre, surtout si le développement de la maladie est insidieux.

– Les hémoptysies sont fréquentes et signalées par 50 à 70% des patients.

Elles vont du simple crachat strié de sang dû à l’érosion de la muqueuse bronchique inflammatoire, surtout à l’occasion de poussées de surinfection, aux hémoptysies massives liées à une rupture d’artère bronchique.

Elles peuvent constituer le premier symptôme de la maladie dans les formes dites « sèches ».

– La dyspnée est variable.

Elle dépend de l’étendue des lésions et du degré d’encombrement.

Elle peut se manifester uniquement à l’effort dans les formes localisées, ou traduire une insuffisance respiratoire chronique grave dans les formes étendues.

– Les signes généraux sont étonnamment absents, même chez des patients présentant une suppuration importante.

L’altération de l’état général s’observe quand la dilatation des bronches parvient au stade d’insuffisance respiratoire chronique grave ou se complique d’une infection sévère locale ou générale.

– Les signes cliniques ne sont pas spécifiques.

Les râles bronchiques persistants sont le plus souvent retrouvés, classiquement inspiratoires, mais parfois aussi présents en expiration (alors associés à des sibilants).

Les « craquements » sont caractéristiques.

Leur topographie et leur importance traduit l’étendue des lésions bronchiques.

Des foyers de râles crépitants peuvent être la traduction d’une extension alvéolaire de l’infection.

L’hippocratisme digital est observé plus volontiers dans les formes étendues et anciennes.

Les signes d’insuffisance cardiaque droite sont le témoignage d’une insuffisance respiratoire évoluée.

Des infections parenchymateuses récidivantes dans un même territoire peuvent s’expliquer par une dilatation des bronches localisée.

Une sinusite chronique peut s’y associer.

L’examen recherche des arguments extrapulmonaires pour une maladie générale.

Examens paracliniques :

Si le diagnostic de dilatation des bronches est évoqué sur les données anamnestiques et cliniques, l’imagerie confirme le diagnostic en précisant la morphologie, l’étendue, la gravité et le retentissement des bronchectasies.

A – Explorations radiologiques :

1- Radiographie thoracique :

La radiographie thoracique est habituellement anormale.

Elle ne détecte pas les petites bronchectasies et les bronchiolectasies.

Sont recherchées des anomalies directes et indirectes.

* Signes directs :

– Les bronchectasies cylindriques s’expriment par des opacités tubulées matérialisant la paroi bronchique épaissie comprise entre la clarté de la lumière bronchique élargie et le poumon aéré de voisinage.

Leur présentation varie selon l’orientation des bronches.

– Les opacités tubulées correspondent à des bronches pleines dont le contenu ne s’évacue pas.

L’impaction mucoïde et la bronchocèle en sont la traduction.

L’impaction mucoïde est un bouchon muqueux bronchectasiant qui siège avec prédilection au sein des bronches segmentaires des lobes supérieurs, plus rarement des lobes moyen et inférieurs.

Typiquement, elle réalise une opacité tubulée à bords nets, proximale, parahilaire, orientée selon l’axe des bronches, linéaire, en V ou en Y dont la pointe est tournée vers le hile.

La bronchocèle correspond à une bronchectasie mal drainée dans la lumière de laquelle s’accumulent des sécrétions en rétention.

Les aspects radiologiques sont identiques dans un cas comme dans l’autre.

Seule la répartition change, lobaire moins proximale.

– Les bronchectasies moniliformes ou variqueuses juxtaposées les unes contre les autres et vues en coupe peuvent réaliser un aspect en « pseudorayon de miel ».

– Les bronchectasies sacciformes ou kystiques réalisent un aspect multicavitaire, de topographie lobaire, plutôt de siège inférieur.

Des niveaux liquidiens témoignent d’un drainage imparfait.

* Signes indirects :

– En aval des obstructions bronchiques, le collapsus est d’importance variable touchant un ou plusieurs lobes.

Le lobe moyen est préférentiellement atteint du fait de la proximité de très nombreux éléments ganglionnaires qui peuvent provoquer une compression extrinsèque de la bronche lobaire moyenne.

2- Bronchographie :

La bronchographie n’est plus réalisée car elle est supplantée par la TDM-HR.

3- Tomodensitométrie thoracique :

La TDM-HR a transformé l’approche diagnostique des bronchectasies.

Le diagnostic peut être retenu devant :

– l’absence de réduction progressive de calibre des bronches au fur et à mesure que l’on s’éloigne des hiles.

Ce signe est probablement le plus fiable ;

– le diamètre intrabronchique supérieur à celui de l’artère associée ;

– les bronches visualisées au niveau du tiers externe du parenchyme pulmonaire.

Les bronchectasies cylindriques sont caractérisées par des bronches dilatées à bords épais s’étendant vers la périphérie.

Elles ont un aspect en rails quand elles sont parallèles ou presque à la coupe scanner.

La coupe transverse donne un aspect en « bague à chaton », avec une bronche élargie, à bords épais contenant de l’air, accompagnée d’une opacité ronde plus petite, l’artère pulmonaire accolée.

Les bronchectasies variqueuses ont le même aspect, mais avec des contours irréguliers.

Les bronchectasies kystiques se présentent sous forme de véritables grappes de kystes lorsque plusieurs bronches sont vues en coupe transversale ou bien comme un chapelet d’images kystiques lorsqu’une seule bronche est visualisée longitudinalement.

L’examen TDM-HR permet, en un temps, de porter le diagnostic de bronchectasies, de préciser leur type anatomique, leur extension, voire d’éventuelles complications.

En outre, il peut parfois retrouver les signes d’une affection causale.

B – Endoscopie trachéobronchique :

Elle précise la provenance de la bronchorrhée et recherche une cause locale.

Elle localise le segment bronchique vecteur d’une hémoptysie.

Elle précède alors le geste radiologique vasculaire interventionnel ou la chirurgie quand elle est grave.

Elle permet aussi la réalisation de prélèvements protégés, à visée bactériologique.

C – Examen cytobactériologique des expectorations :

Cet examen permet de suivre la colonisation bactérienne et est utile en cas de surinfection bronchique, surtout après l’échec d’une antibiothérapie.

La colonisation à PA marquerait un tournant évolutif de la maladie.

Elle est associée d’une part à une qualité de vie moins bonne que celle des patients colonisés à d’autres germes et d’autre part à une maladie plus étendue.

D – Exploration fonctionnelle respiratoire (EFR) :

Elle doit être réalisée en état stable, en dehors des poussées infectieuses.

Les patients porteurs de bronchectasies ne présentent pas de profil fonctionnel particulier.

Les anomalies observées reflètent l’extension des lésions, leur gravité et les éventuelles maladies respiratoires associées.

Un syndrome obstructif est observé chez la plupart des patients étudiés.

La réversibilité partielle de cette obstruction bronchique est rapportée, de même que l’existence d’une hyperréactivité dans 25% des cas.

L’association à un syndrome restrictif est fréquente, due en général à la présence de territoires atélectasiés ou non ventilés du fait de sécrétions obstructives.

Ces anomalies expliquent, au moins en partie, les altérations gazométriques observées à un stade évolué de la maladie.

Les phases d’exacerbations ne modifient pas de façon significative les paramètres fonctionnels respiratoires contrairement à la mucoviscidose.

La distance parcourue et les variations de saturation du sang artériel en oxygène (SaO2) au cours d’un test de marche sur 6 minutes apprécient probablement mieux le retentissement de cette affection.

E – Scintigraphie pulmonaire de ventilation et/ou de perfusion :

Il s’agit d’un examen diagnostique élégant, surtout chez l’enfant, car l’absence d’amputation du lit vasculaire isotopique exclut l’existence de bronchectasies.

Cependant, il ne dispense pas de la réalisation d’un examen TDM-HR.

Chez l’adulte, il fournit des informations indispensables pour évaluer l’opportunité d’un geste d’exérèse chirurgicale en quantifiant la ventilation et la perfusion de chaque lobe.

F – Autres examens complémentaires :

La recherche d’un foyer infectieux (dentaire ou otorhinolaryngologique [ORL]) et d’un retentissement cardiaque est nécessaire.

Complications :

L’évolution et le pronostic sont essentiellement fonction de l’étendue des lésions et du terrain.

Les formes localisées sont le plus souvent marquées par une évolution simple.

Les surinfections sont rares et bien tolérées.

Le drainage bronchique bien compris permet de limiter le retentissement de cette affection sur la vie quotidienne.

Les formes graves sont le reflet de complications ou de formes étendues et évoluées.

– Les complications infectieuses sont les plus fréquentes : colonisation bactérienne, épisodes de surinfection bronchique, infection pulmonaire (abcédée ou non) ou pleurale.

Les localisations septiques à distance (abcès du cerveau) sont devenues exceptionnelles.

La colonisation bronchique par PA survient tardivement.

– Les complications hémorragiques, parfois révélatrices, peuvent survenir sans raison apparente mais sont volontiers contemporaines d’une surinfection et alors volontiers récidivantes.

Lors d’hémoptysies graves, une embolisation artérielle et/ou un geste chirurgical peuvent être nécessaires.

– L’insuffisance respiratoire est le témoignage de bronchectasies étendues, évoluant depuis de nombreuses années.

Elle ne présente pas de particularité par rapport aux autres insuffisances respiratoires chroniques type bronchopneumopathie chronique obstructive.

– L’amylose, favorisée par la suppuration chronique, est devenue exceptionnelle.

Traitement :

Le traitement repose d’emblée sur la suppression de tout irritant bronchique, en particulier du tabac, la prise en charge des foyers infectieux (dentaires et ORL), la prévention des infections respiratoires (vaccination antigrippale et antipneumococcique), et l’exclusion des antitussifs, somnifères et sédatifs dans les formes évoluées.

Il s’appuie ensuite sur les grands axes du cercle vicieux de Cole :

– permettre un meilleur drainage des sécrétions ;

– contrôler la colonisation et l’infection bactérienne ;

– réduire l’inflammation bronchique ;

– gérer les complications non infectieuses et l’insuffisance respiratoire.

A – Permettre un meilleure drainage des sécrétions :

Le drainage bronchique est prioritaire.

Le drainage de posture et l’expectoration dirigée permettent d’assurer un drainage bronchique efficace en évitant les quintes de toux asthéniantes, en limitant les complications infectieuses et en retardant l’évolution vers l’insuffisance respiratoire.

Le drainage bronchique ne se conçoit que régulier, quotidien, voire pluriquotidien, au mieux assisté par un kinésithérapeute compétent.

Les fluidifiants bronchiques sont indiqués devant des sécrétions purulentes si une bonne hydratation est insuffisante.

En ce qui concerne la désoxyribonucléase, l’étude de O’Donnell publiée en double aveugle contre placebo, multicentrique, a impliqué 349 patients porteurs de dilatations des bronches idiopathiques, stables, traités pendant 24 semaines.

Sous ce traitement les critères de jugement principaux (épisodes d’exacerbation, dégradation du volume expiratoire maximal-seconde : VEMS) et secondaires (hospitalisation, cures d’antibiotiques, déclin de la capacité vitale) se sont aggravés.

Ceci contraste avec les résultats obtenus dans la mucoviscidose.

Les bronchodilatateurs se justifient devant la forte prévalence de l’hyperréactivité bronchique et de l’asthme rapportée.

Le recours aux bêta-2-mimétiques, d’action rapide ou prolongée, per os ou par inhalation, et/ou aux anticholinergiques doit être testé.

B – Contrôler l’infection bactérienne :

L’antibiothérapie préventive au long cours a été proposée par certains.

Elle s’appuie sur des études anciennes. Une antibiothérapie prolongée, outre son coût, fait courir le risque d’une sélection de germes, du développement de résistances et d’effets secondaires.

Elle n’est pas indiquée actuellement.

L’antibiothérapie ne doit être instaurée qu’en cas de fièvre, de complications infectieuses, pulmonaires ou pleurales, ou devant les aggravations avérées de la dyspnée, du volume et de la purulence des expectorations (témoignage d’une surinfection bactérienne récente).

L’examen cytobactériologique de l’expectoration, réalisé dans des conditions rigoureuses et incluant impérativement une culture quantitative, permet de guider le choix de l’antibiothérapie.

Il est indiqué devant une surinfection persistante, récidivante ou sévère.

Il met classiquement en évidence des bactéries du genre HI, PA et SA.

La durée minimale de traitement est de 10 à 14 jours.

La voie d’administration peut être orale, en augmentant la posologie en cas d’utilisation d’une bêtalactamine (dont la diffusion bronchique est limitée).

Les fluoroquinolones peuvent avoir une place importante du fait de leurs propriétés pharmacocinétiques et de leur spectre. Une infection à PA conduit à une bithérapie (association de bêtalactamines et d’aminosides ou quinolones) visant à limiter l’émergence de souches résistantes.

Les posologies usuelles sont alors recommandées lors des phases d’exacerbation.

Des cures séquentielles d’antibiotiques ont été proposées par certains auteurs en cas de colonisation à PA à l’image de ce qui est proposé dans la mucoviscidose. Certaines équipes recommandent l’administration d’aérosols d’antibiotiques.

L’étude Tobi a montré son efficacité en termes bactériologiques (concentration des germes) mais sans modifier la fonction respiratoire.

Une autre étude (avec l’association ceftazidime-tobramycine), réalisée sur 1 an, a montré un impact positif uniquement sur le nombre d’admissions à l’hôpital et le nombre de jours hospitalisés, sans variation des paramètres fonctionnels respiratoires.

Il reste à valider les indicateurs d’efficacité de ces stratégies thérapeutiques dans la prise en charge des bronchectasies.

C – Réduire l’inflammation bronchique :

Les corticostéroïdes ont un intérêt théorique.

Ils permettent de réduire les sécrétions des glandes bronchiques et le recrutement de cellules inflammatoires, de contrôler l’hyperplasie des cellules sécrétoires et de limiter l’inflammation.

Ils agissent également sur l’hyperréactivité bronchique.

Elborn, en 1992, montre que les corticoïdes inhalés réduisent le poids de l’expectoration par 24 heures, améliorent le débit expiratoire de pointe et le VEMS, et réduisent le score de toux.

Tsang, en 1998, montre que les corticoïdes inhalés réduisent la concentration des leucocytes et de l’interleukine (IL) 1b, IL8, leucotriène B4 dans les expectorations, alors que les paramètres spirométriques restent inchangés.

L’effet anti-inflammatoire des macrolides à faible dose a fait la preuve de son efficacité dans les pan-bronchiolites.

Tsang, en 1999, démontre sur un faible nombre de patients une amélioration significative du VEMS et de la capacité vitale ainsi qu’une réduction du volume d’expectoration après 8 semaines de traitement.

Celui-ci n’a eu aucun effet sur la concentration des germes pathogènes, des polynucléaires neutrophiles, d’IL ou de tumor necrosis factor (TNF)-alpha.

Ces données sont préliminaires et n’autorisent aucune recommandation actuellement.

C’est la seule étude sur les bronchectasies.

D – Traiter les complications non infectieuses :

– La chirurgie des bronchectasies est possible.

La série d’Agasthian, portant sur 130 patients opérés en raison de l’échec du traitement médical, d’hémoptysies, d’un abcès pulmonaire ou d’une masse restée sans diagnostic, fait état d’une mortalité et d’une morbidité périopératoires respectivement de 2,2% et 24,6%.

Plus de 59% des patients deviennent durablement asymptomatiques (recul de 1 à 16 ans), 29% se trouvent améliorés.

Pour 12% des patients, la chirurgie ne modifie pas leur état.

Le traitement chirurgical est proposé dans les formes localisées, mal tolérées ou compliquées.

– Le contrôle des hémoptysies n’a fait l’objet d’aucune étude spécifique dans les bronchectasies.

Les solutions vasoconstrictives (exemple : terlipressine) sont couramment utilisées et ont démontré en pratique leur utilité mais n’ont pas l’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans cette indication.

L’embolisation des artères bronchiques se justifie devant une hémoptysie grave.

Cette technique n’évite pas les récidives à long terme mais a l’avantage d’être immédiatement efficace et de pouvoir être renouvelée.

Elle n’est pas exempte de complications.

– L’aspect nutritionnel de cette affection n’a fait l’objet d’aucune étude alors même que la déperdition protidique est conséquente.

E – Gérer l’insuffisance respiratoire :

Les résultats de la ventilation nasale intermittente (VNI) dans la dilatation des bronches ont été rapportés.

Cette aide ventilatoire a permis la stabilisation des paramètres gazométriques artériels et la réduction du nombre de jours d’hospitalisation.

Dans l’étude de Gacouin, la mise en route de la VNI permet de ramener les paramètres gazométriques artériels au niveau qui prévalait avant la décompensation respiratoire, et ce durablement, sans pour autant normaliser les gaz du sang artériel.

Conclusion :

Les dilatations des bronches peuvent être confondues avec d’autres causes de suppuration bronchique.

Cette confusion peut être évitée par une analyse anamnestique et clinique correcte, et le recours à l’imagerie (TDM-HR).

Le traitement repose sur le drainage bronchique régulier complété au besoin par le contrôle des infections bactériennes.

L’évolution vers l’insuffisance respiratoire est responsable d’une diminution de l’espérance de vie chez beaucoup d’entre eux.

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