Dermatoses professionnelles (Suite)

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Première partie

3- Enquête étiologique, pratique des tests et aspects chimiques :

Le diagnostic orienté par la clinique et la connaissance du poste de travail sera confirmé par des tests spécifiques épicutanés (batterie spécialisée d’allergologie « plastique » et produits apportés testés à des concentrations convenables pour éviter les réactions caustiques).

Rappelons d’abord quels sont les composants de ces matières plastiques époxydiques.

Dermatoses professionnelles (Suite)La résine elle-même appelée époxy (ou époxyde ou encore éthoxylique) a été découverte peu avant la Seconde Guerre mondiale par un dentiste suisse qui a vendu son brevet à la firme bâloise CIBA.

Il s’agit de macromolécules linéaires résultant de la polycondensation d’un groupement époxyde (le plus souvent l’épichlorhydrine qui en représente la forme la plus simple) avec un diol (comme le bisphénol A ou le bisphénol F de poids moléculaire légèrement plus faible, mais il existe souvent des mélanges de plusieurs composants).

Un durcisseur ou un catalyseur est ajouté (deuxième composant) permettant la formation d’une molécule tridimensionnelle par création de ponts intermédiaires entre des chaînes linéaires.

La réunion de ces deux produits forme un monomère qui est chimiquement un diglycidyléther du bisphénol A (DGEBA).

Les allergènes sont avant tout la résine elle-même sous forme monomère (contenant donc toujours dans des formules différentes le groupement époxyde), mais également ses constituants de base, à savoir l’épichlorhydrine et le bisphénol A.

Le monomère est très sensibilisant (beaucoup plus que ses constituants de base en particulier l’épichlorhydrine et le bisphénol A) alors que les polymères le sont beaucoup moins.

Plus le poids moléculaire est élevé, moins la résine est allergisante.

Le poids moléculaire habituel du diglycidyléther de bisphénol A est de 385, alors que celui du polymère obtenu est au minimum de 980.

Il faut savoir que dans le polymère obtenu il peut persister 10 à 15 % du monomère et même des constituants de base comme l’épichlorhydrine (moins de 1 ppm en général et toujours moins de 10 ppm).

Différents glycidyléthers sont présents dans les résines : selon un poids moléculaire décroissant, on retrouve :

– allylglycidyléther : C6H10O2 PM = 114 ;

– butylglycidyléther : C7H14O2 PM = 130 ;

– phénylglycidyléther : C19H10O2 PM = 150 ;

– crésylglycidyléther : C10H12O2 PM = 164 ;

– diglycidyléther de bisphénol F, 10 à 20 % : C19H20O4 PM = 312 ;

– diglycidyléther de bisphénol A, 50 à 60 % : C21H24O4 PM = 340. Pour compliquer encore le problème, il convient d’indiquer que les résines époxydiques sont souvent mélangées à d’autres résines sensibilisantes (urée-formol ou phénol-formol).

Les durcisseurs des résines sont d’autre part souvent responsables de dermatoses du fait de leur caractère caustique, notamment certains durcisseurs aminés, favorisant alors une sensibilisation à la résine époxy elle-même (l’irritation « fait le lit » de l’allergie).

Les durcisseurs le plus couramment utilisés sont les durcisseurs basiques comme la triéthylènetétramine, la diéthylènetriamine, la triéthanolamine, l’hexaméthylènetétramine ou l’éthylènediamine.

Citons aussi l’isophoronediamine.

On peut y ajouter des aromatiques comme le diaminodiphénylméthane ou des aminophénols (3 et 4 aminophénols).

Tous ces produits sont caustiques ou sensibilisants. Les durcisseurs acides, parfois utilisés, sont fréquemment des phtalates (dibutyl- ou dioctylphtalates) qui ont également un pouvoir sensibilisant éventuel. On tend actuellement à utiliser d’autres durcisseurs dont le pouvoir pathogène est moins bien connu : diaminodiphénylsulfones (DDS), dicyadiamide (DICY),1-1’(4 méthylphénylène) bis 3-3 diméthylurée (CA 150).

En fait, cette liste est loin d’être exhaustive et il arrive très fréquemment que l’on dilue dans l’eau, la vaseline ou l’acétone des durcisseurs dont la nature chimique complexe n’est pas connue dans l’immédiat mais dont le caractère soluble dans tel ou tel solvant est seulement expérimenté par le testeur.

Les tests sont habituellement très positifs, entraînant une réaction érythémato-oedémato-vésiculeuse très intense, dans plus de trois quarts des cas à la résine elle-même.

L’observation de trois cas d’allergie indéniable à une résine époxydique avec des tests négatifs à tous les allergènes classiques des résines époxydiques nous a conduit à mettre au point une batterie complémentaire avec des molécules époxydiques nouvelles ne donnant pas d’allergie croisée avec le diglycidyléther de bisphénol A.

Les allergènes en cause sont les monomères de deux nouvelles résines époxydiques à savoir la tétraglycidylméthylènedianiline (TGMDA), et le triglycidylpara-aminophénol (TGPAP).

Ces deux produits doivent être conservés au congélateur et doivent être testés à 20 % dans l’acétone.

Il faut savoir enfin que ces données chimiques et toxicologiques classiques sur les dermatites aux époxy sont susceptibles de subir des modifications importantes en raison de l’apparition de nouvelles molécules à la base de la résine elle-même ou constituant les durcisseurs ou accélérateurs.

Les batteries de tests actuellement utilisées devront donc prochainement être modifiées et complétées.

En fait, la guérison après éviction de l’allergène responsable vient seule confirmer avec certitude le diagnostic.

Toutefois, pour être significative, cette éviction doit être totale (le simple passage dans un atelier « époxy » du salarié sensibilisé peut redéclencher les lésions).

La guérison se fait donc souvent au prix d’un changement de poste de travail (rôle du médecin du travail), voire d’un changement d’emploi.

4- Mesures de prévention :

Il est souhaitable que le médecin du travail de l’entreprise soit averti afin qu’il puisse, dans la mesure du possible, prendre les dispositions de prévention nécessaires (prévention avant tout collective, notamment meilleure aspiration des poussières et vapeurs, choix de durcisseurs moins caustiques).

Le port de gants protecteurs ne met pas à l’abri des vapeurs de résines ou de durcisseurs et n’empêche donc pas les récidives sur les parties découvertes.

En outre, les gants de caoutchouc ne protègent même pas contre la résine qui finit par pénétrer à travers les gants.

Le médecin doit aussi avertir son patient qu’il peut y avoir des allergies croisées entre les résines époxy et certains oestrogènes de synthèse (diéthylstilbestrol) et que d’autre part une allergie à l’éthylènediamine (contenue dans certains durcisseurs des résines époxy) peut se révéler à nouveau lors de contacts avec des fluides de refroidissement de machines-outils ou avec des préparations pharmaceutiques diverses contenant cette éthylènediamine jouant le rôle d’agent stabilisant (crèmes, collyres ou suppositoires).

E – DERMATITES DE CONTACT AUX RÉSINES ACRYLIQUES :

Depuis de nombreuses années, les dentistes et surtout les prothésistes dentaires utilisent quotidiennement et parfois presque en permanence des colles, des ciments et du matériel de prothèse à base de résines acryliques.

Il en résulte des cas de plus en plus nombreux de dermatites de contact aiguës et répondant la plupart du temps à un mécanisme allergique plus que d’irritation.

Ce fait est retrouvé dans d’autres métiers, en particulier l’imprimerie (encres polymérisables, plaques d’impression en résine photopolymérisable, etc).

Dans de nombreux autres métiers on utilise des colles, des peintures et vernis, ou des résines acryliques destinées à fabriquer des objets durs très divers (altuglas, plexiglas).

Le méthacrylate de méthyle est le constituant le plus souvent rencontré.

Contrairement aux matières plastiques vues précédemment, les résines polyesters et époxy, qui étaient classées parmi les thermodurcissables ou thermorigides (c’est-à-dire des matières plastiques dont la rigidité ne peut plus être modifiée par des écarts de température et dont la mise en oeuvre fait essentiellement appel à des catalyseurs), les résines acryliques sont classées parmi les résines thermoplastiques (elles peuvent être modifiées par la chaleur ou le froid appliqués successivement ; leur mise en oeuvre ne repose pas essentiellement sur des catalyseurs).

On peut néanmoins utiliser de très petites quantités de peroxydes (irritants) ou de phtalates.

Le principal solvant utilisé est le méthacrylate de méthyle lui-même (employé également dans d’autres résines non acryliques), sensibilisant, mais peu ou pas irritant.

On utilise aussi dans certaines colles, peintures et vernis, du chlorure de méthylène, des cétones ou du toluène ayant une action irritative.

Les autres méthacrylates simples (méthacrylate d’éthyle, de butyle ou de propyle) ont été notés comme sensibilisants, de même que le méthacrylate d’éthylèneglycol.

Pour la polymérisation du méthacrylate de méthyle, on utilise souvent des acrylates de méthyle (CH2=CH-COO-CH3) ou d’éthyle (CH2=CH-COO-C2H5).

Il s’agit d’irritants pouvant aussi être à l’origine d’allergies. Dans certaines encres d’imprimerie à base de polyacrylates et polyméthacrylates, on utilise du pentaérythritol triacrylate (TAPE) très irritant et parfois sensibilisant ou du butylèneglycol diacrylate (DABG).

F – DERMATITES AUX POLYURÉTHANNES :

Les résines polyuréthannes sont très utilisées depuis longtemps pour fabriquer des mousses à usages divers ; on les trouve désormais dans un nombre croissant de colles, peintures, vernis, caoutchoucs synthétiques et également des matériaux solides.

Elles sont à l’origine de la majorité des asthmes chimiques, mais déterminent rarement des dermatoses.

Celles-ci sont dues à des allergies aux produits suivants : toluène di-isocyanate (TDI), méthylène diphénylisocyanate (MDI), qui constituent les noyaux autour desquels viennent se polymériser des polyols (réaction de polyaddition).

Dans cette réaction interviennent des amines pouvant être sensibilisantes (triéthylamine, éthylamine, méthylamine, triéthylène diamine, etc).

Bien souvent, le dermatoallergologiste ne connaît pas la composition chimique précise de ces réactifs secondaires dont le secret est gardé par le fabricant, et il doit se faire aider par un laboratoire de chimie.

Dans tous les cas, il convient d’effectuer les tests épicutanés avec le produit très dilué (0,5 à 2 % dans l’eau).

Comme pour les autres plastiques, divers solvants et diluants peuvent avoir un effet irritatif sur la peau (toluène, xylènes, solvants chlorés…).

G – DERMATITES AUX RÉSINES PHÉNOLIQUES :

Encore appelées résines phénol-formol, ou d’une façon plus large phénoplastes, elles sont obtenues par polycondensation de phénols (mais aussi de crésol, de résorcine), avec de l’aldéhyde formique (ou du furfuraldéhyde).

Elles sont utilisées essentiellement comme colles servant aussi bien à coller des chaussures qu’à faire des moules en fonderie (sable + résine), ou des stratifiés avec de la fibre de carbone (avions).

Ces résines sont très sensibilisantes et l’allergie peut être liée à la présence de formaldéhyde (formol), de furfuraldéhyde (produits à tester respectivement à 1 % et à 3 % dans l’eau), ou due au monomère phénolique corrosif et parfois sensibilisant, en particulier le paratertiaire butylphénol, très sensibilisant.

La résine elle-même est responsable de nombreuses allergies et il faut la tester en dilution à 10 %.

Les résines en poudre polymérisent grâce à l’action de catalyseurs basiques (hexaméthylène tétramine irritante et sensibilisante) et les colles ou résines liquides sont polymérisées par addition de durcisseurs acides et irritants pour la peau comme l’acide chlorhydrique ou l’acide paratoluènesulfonique.

On ajoute fréquemment des pigments (sels ou oxydes de chrome ou de cobalt) pouvant être sensibilisants.

H – DERMATITES AUX AMINOPLASTES :

Couramment appelées résines urée-formol ou urée-formaldéhyde, les aminoplastes résultent habituellement de la polycondensation de l’urée avec le formaldéhyde.

L’urée peut être remplacée par la thiourée ou la mélamine.

Comme les phénoplastes, les aminoplastes sont utilisés comme colles, vernis, moules de fonderie ou pour faire des objets solides (stratifiés).

Leur originalité tient à leur utilisation fréquente pour fabriquer des agglomérés de bois et dans l’industrie textile comme apprêts pour tissus.

C’est dans ces métiers que de nombreux cas d’allergie cutanée ont été décrits.

Le facteur responsable est essentiellement la résine elle-même et parfois le formaldéhyde. L’urée ne donne pas d’allergie.

En revanche, la thio-urée peut être allergisante. Les durcisseurs utilisés peuvent être allergisants, en particulier l’hexaméthylène tétramine (à tester dans l’eau à 1 %).

Il existe aussi des irritants comme l’acide chlorhydrique ou l’acide phosphorique, le toluène et les xylènes utilisés comme solvants ainsi que certains alcools.

Dans les résines mélamine-formaldéhyde, des peroxydes très irritants peuvent être rencontrés.

I – DERMATITES AUX AUTRES RÉSINES ET MATIÈRES PLASTIQUES :

Les résines alkydes, utilisées dans des peintures, encres et vernis, sont obtenues par polycondensation d’un anhydride acide et d’un polyalcool.

Les plus connues, les glycérophtaliques sont obtenues à partir d’anhydride phtalique (pouvant jouer le rôle d’agent sensibilisant) et de glycérol.

On peut aussi voir des allergies cutanées liées à l’utilisation de la colophane comme produit de base. Parmi les solvants utilisés, l’éthylèneglycol ou le propylèneglycol sont potentiellement allergisants.

Les matières plastiques telles que les polyéthylènes, polypropylènes, polystyrènes, polymères fluorés, polyvinyliques, polyamides, polycarbonates, ou cellulosiques ne sont pas à l’origine de dermatoses allergiques dues à une sensibilisation à la résine ou à ses constituants.

On peut toutefois voir lors de leur mise en oeuvre des dermatites d’irritation aux acides et aux chromates assez souvent employés.

Des allergies au cobalt, aux phtalates, ou au phosphate de tricrésyle (plastifiant) sont possibles.

Il convient de savoir qu’actuellement beaucoup de caoutchoucs synthétiques sont en fait des produits très proches des matières plastiques avec les mêmes facteurs irritants et parfois les mêmes allergènes.

Le cas des colles au néoprène (polychloroprène) parfois sensibilisantes en est un exemple.

J – CHLORURE DE VINYLE MONOMÈRE :

Il provoque chez les sujets exposés une acro-ostéolyse indolore des phalanges distales, après 3 à 5 ans d’exposition, et rarement un phénomène de Raynaud ou une sclérodactylie.

Il existe une transparence radiologique (simulant une véritable amputation), des pseudofractures (ostéolyse en bande) ou des microgéodes, touchant surtout index et médius, puis tout disparaît en plusieurs mois.

K – AZIRIDINES POLYFONCTIONNELLES :

Les aziridines polyfonctionnelles sont des agents réticulants de colles plastiques, mais aussi de laques pour parquets, d’encres d’imprimerie, ou de produits protecteurs de bois, sous le nom de Néocryl CX100t.

Elles peuvent être allergisantes.

Imprimeurs et photographes :

Les dermatoses peuvent être dues à l’utilisation de produits acides ou basiques, avec des brûlures cutanées.

En cas de brûlure par l’acide fluorhydrique, il convient d’appliquer d’urgence un gel au gluconate de calcium qui doit faire disparaître les douleurs avant l’apparition de signes cutanés visibles, toujours graves, parce que tardifs.

Il existe de fréquentes dermatites d’irritation aux solvants utilisés largement pour laver les bacs à encres.

Les encres peuvent être elles-mêmes sensibilisantes par les colorants qu’elles contiennent ou en raison de la présence d’acrylates, irritants et allergisants.

Chez les photographes, en dehors des brûlures chimiques, on voit des allergies aux révélateurs et fixateurs, et notamment au chrome qu’ils contiennent ou à l’hydroquinone.

Mécaniciens :

Les professions de tôlier-carrossier, de peintre automobile et de mécanicien correspondent à des métiers et des gestes professionnels différents.

Toutefois, on voit de plus en plus de concessionnaires de certaines marques effectuer dans le même établissement des travaux de mécanique automobile et de tôlerie-carrosserie.

Il arrive même que certains salariés exercent personnellement plusieurs de ces activités dans un même garage, dans le cadre de la « polyvalence » de plus en plus souvent rencontrée en période de difficultés économiques.

Le travail du mécanicien consiste à diagnostiquer les pannes, effectuer les réparations nécessaires. Selon les cas, le mécanicien sera plus spécialisé dans les véhicules diesels (véhicules légers, poids lourds et transports en commun), dans les véhicules à essence, dans l’électricité automobile…

Le mécanicien travaille bien souvent à proximité du carrossier et du peintre et se trouve donc souvent exposé aux mêmes nuisances.

A – AGRESSIONS PAR AGENTS PHYSIQUES :

Les nécessités de son métier amènent le plus souvent le mécanicien à travailler sans gants.

Il en résulte des traumatismes physiques répétés entraînant des hyperkératoses des paumes des mains.

Le gonflage de pneus expose à des explosions responsables de multiples hématomes ou excoriations des mains et parties découvertes. On peut voir des réactions à corps étrangers métalliques ou des tatouages par projection d’huile sous pression.

B – CAOUTCHOUCS :

Les allergies au caoutchouc des pneumatiques sont le plus souvent des allergies à l’IPPD, se traduisant cliniquement par une dermatite hyperkératosique et fissurée des paumes des mains, pouvant s’étendre sous une forme plus eczématique au dos des doigts, des mains et même aux avant-bras.

Ce même allergène est retrouvé dans les autres caoutchoucs des véhicules (durites, tapis, joints, gants de caoutchouc, etc).

Il peut y avoir des réactions allergiques au mercaptobenzothiazole, aux carbamates ou aux thiurames.

C – CARBURANTS :

Les dermatites au gazole ou à l’essence se voient chez les mécaniciens diésélistes, mais aussi chez les mécaniciens utilisant ces carburants pour se laver les mains.

Il existe des allergies au colorant rouge du fioul ou de l’essence, mais aussi aux antiseptiques (notamment formolés) mis dans les cuves des détaillants pour éviter la contamination du gazole par des germes ou champignons.

Les allergies au colorant bleu du gazole marin sont rares et spécifiques des mécaniciens diésélistes de la marine.

D – SOLUTIONS D’ÉLECTROLYTES POUR BATTERIES :

Elles sont essentiellement constituées d’acide sulfurique, qui peut couler sur les avant-bras ou les doigts des mécaniciens qui les portent.

Il peut en résulter des brûlures chimiques « a minima », se traduisant par des hyperkératoses localisées ou de petites lésions nécrotiques multiples.

E – PRODUITS ANTICORROSION ET ANTIGEL :

Les produits anticorrosions utilisés pour les circuits de refroidissement contiennent fréquemment des dérivés chromés sensibilisants.

On a pu retrouver aussi du chrome dans des liquides favorisant le montage du pneu sur la jante (Ruglide en Grande-Bretagne).

Les produits antigel peuvent contenir du mercaptobenzothiolate de sodium ou du benzotriazole, tous deux sensibilisants.

F – MÉTAUX :

Les métaux sensibilisants le plus fréquemment rencontrés sont le chrome et le cobalt, voire le nickel.

Le chrome métal n’est habituellement pas sensibilisant, mais l’hypersudation prolongée avec contact intime avec des clés en chrome-vanadium a pu déclencher des eczémas allergiques au chrome.

G – COLLES :

Certaines colles sont utilisées en mécanique, notamment les colles aux cyanoacrylates, très caustiques et sensibilisantes (eczémas et rhinites allergiques).

Il existe aussi des colles époxydiques ou à base d’acrylates ou de méthacrylates très sensibilisants.

H – PRODUITS DE DÉGRAISSAGE DE PIÈCES OU DE MOTEURS :

Ils sont responsables de dermatites d’irritation dues à des solvants (en particulier le trichloro 1-1-1 éthane, très caustique), ou à des carburants (notamment l’essence, avec ou sans plomb), utilisés pour dégraisser les pièces ou les moteurs.

Des cas d’allergie à du chromate de sodium contenu dans des produits pour nettoyer les moteurs diesel ont été rapportés.

I – PRODUITS DE NETTOYAGE DES VÉHICULES :

La préparation des voitures neuves (qualifiée de déparaffinage ou décoconnage) est à l’origine d’un certain nombre de dermatoses professionnelles, de type essentiellement irritatif, pouvant parfois orienter faussement vers un eczéma de contact allergique.

Les produits utilisés pour enlever la couche protectrice recouvrant le véhicule sortant de l’usine ne sont pas à base de paraffine mais sont des polymères acryliques.

Pour les ôter et redonner à la carrosserie un superbe brillant, il faut pulvériser sous pression à froid ou à chaud une préparation alcaline qualifiée de produit de « déparaffinage », ou « déprotecteur ».

Cette préparation est aussi appliquée au chiffon dans certaines zones plus délicates mal « déparaffinées ».

Le véhicule est ensuite rincé au jet sous pression (Karchert).

Les dermatoses sont liées à la manipulation de ces produits déprotecteurs dont le pH se situe en général au-dessus de 12, et qui sont souvent à base de carbonates alcalins, ou d’autres composants alcalins.

Pour améliorer l’efficacité, les préparations contiennent des tensioactifs et des agents séquestrants.

Ainsi, la présence de lauryl éthersulfate ou d’ammoniums quaternaires, tout comme celle de diaminoéthane, peut être à l’origine d’eczémas allergiques.

Le lavage extérieur des véhicules s’effectue avec des shampoings (agents moussants) à base de tensioactifs divers, pouvant renfermer aussi de l’éthylènediamine, responsable d’eczémas allergiques.

Tous ces produits peuvent être responsables d’allergie au nickel, au cobalt ou au chrome, liée davantage à leur présence comme impureté dans les détergents qu’à cause de contacts directs avec les parties métalliques des véhicules, de plus en plus remplacées par du plastique (exemple des pare-chocs).

Après cette opération, le laveur utilise un produit de rinçage aprèsshampoing, destiné à éviter la formation de gouttes inesthétiques sur la carrosserie et qui peut contenir des ammoniums quaternaires, eux aussi responsables de sensibilisations cutanées.

Le lavage des vitres s’effectue avec des nettoyants liquides à base de tensioactifs et d’alcools divers, tels que l’alcool isopropylique ou, plus rarement, un mélange d’alcool éthylique et d’alcool méthylique.

Des éthers de glycol sont souvent retrouvés dans ces produits, en particulier du butylglycol.

Ces substances agissent sur l’enduit lipoacide de l’épiderme.

À côté de ces préparations neutres chimiquement (pH compris entre 7 et 8), on rencontre des préparations contenant de l’ammoniaque (pH 10 ou 11).

Le nettoyage des pare-chocs et des pièces extérieures en matière plastique s’effectue avec des solvants parfois très agressifs, pouvant contenir des quantités variables d’aromatiques qui sont considérés comme les plus irritants pour la peau dans la gamme des solvants.

Il s’agit d’hydrocarbures paraffiniques lourds. Pour les bas de caisse et les entrées de portes sont utilisés certains produits dégraissants de carrosserie pouvant contenir divers conservateurs dont du formaldéhyde ou de l’ortho-benzyl-parachlorophénol.

Ils sont essentiellement à base d’hydrocarbures aliphatiques dans lesquels on trouve moins de 5 % d’hydrocarbures aromatiques et d’abrasifs doux.

Les dégoudronnants contiennent des hydrocarbures aromatiques de type xylène ou triméthylbenzène ou des mélanges de white spirit et de butylglycol additionnés de tensioactifs.

Le nettoyage des jantes aluminium s’effectue avec un pulvérisateur puis à la brosse avec des produits dont certains sont à base de bifluorure d’aluminium et d’acide sulfurique, ce qui crée un risque particulier lié à la formation d’acide fluorhydrique.

En cas de contact cutané direct avec ce produit, et d’absence de nettoyage à grande eau pendant au moins 15 minutes, des douleurs peuvent apparaître plus ou moins tardivement, et en l’absence de diagnostic et d’application immédiate et prolongée de gel au gluconate de calcium, des nécroses cutanées et osseuses peuvent se produire, pouvant conduire à des amputations de segments de doigts.

Il semble que, conscients de ce risque, les fabricants aient choisi de proposer des produits nettement moins dangereux, à base d’acide phosphorique (pH voisin de 1) ou sous forme de gel contenant de la soude et de la triéthanolamine (pH environ 14).

Le risque de brûlures cutanées ou oculaires demeure.

Le nettoyage du moteur et des pièces mécaniques s’effectue par pulvérisation de produits très irritants renfermant un mélange de produits alcalins, de solvants et de tensioactifs (pH environ 13).

Les aérosols dispersés lors de l’opération peuvent provoquer des brûlures. Parfois sont effectuées au chiffon des opérations de nettoyage avec des produits contenant en particulier du trichloro 1-1-1 éthane, du trichloréthylène, ou de l’essence. D’importantes dermatites d’irritation peuvent en résulter.

Le nettoyage intérieur des véhicules (tissus des sièges, moquettes) fait appel à des liquides relativement alcalins dont le pH dépasse souvent le seuil fatidique de 9 et allant jusqu’à 13 pour certains fabricants.

Le nettoyage des plastiques intérieurs et du tableau de bord est effectué avec des produits irritants dont des solvants, de l’isododécane (hydrocarbure paraffinique lourd servant à ramollir les cires pour leur application) et des cires diverses, plus ou moins liquides, pouvant être sensibilisantes (térébenthine, colophane, conservateurs divers et parfums).

J – HUILES ET GRAISSES :

Les « boutons d’huile » ou élaïoconiose folliculaire se voient parfois, évoluant en quatre stades : stade d’incrustation et de ponctuation folliculaire, stade acnéiforme avec des pseudocomédons, stade papuleux puis stade pustuleux.

Ces lésions sont localisées sur le dos des bras et des avant-bras et sur les faces antérieures des cuisses, c’est-à-dire dans les régions pilaires exposées au contact des huiles et des graisses, soit directement, soit par l’intermédiaire des vêtements de travail souillés.

On peut voir des eczémas de contact aux huiles de moteurs, le plus souvent par allergie aux antiseptiques (ammoniums quaternaires, isothiazolinones, antiseptiques formolés) ou aux conservateurs contenus dans ces huiles, dont la composition précise est toujours difficile à obtenir.

K – TATOUAGES :

On peut voir des tatouages par projection intradermique d’huile (éclatement de pompes ou de tuyaux sous pression).

Tôliers-carrossiers :

Le tôlier a pour fonction de fabriquer, transformer et réparer les éléments en tôle des carrosseries des véhicules automobiles.

En pratique courante, le travail du tôlier-carrossier consiste surtout à remettre en forme les tôles endommagées et/ou remplacer les éléments irréparables par des pièces neuves.

Après le martelage, le planage (utilisation de tas, marteaux…), la découpe et l’assemblage des éléments, le soudage de la tôle, le perçage, le boulonnage, le rivetage, le vissage et à nouveau le martelage, surviennent le ponçage, le dégraissage par solvants de la tôle préalablement protégée par des produits huileux, le masticage et le passage de l’apprêt puis de la peinture.

Dans les petites entreprises, le carrossier assure aussi le travail du peintre en préparant toute la tôlerie et en peignant la carrosserie, et on peut alors rencontrer chez lui des pathologies propres au travail de peintre.

Ce travail sollicite beaucoup le membre supérieur et est à l’origine d’une pathologie professionnelle riche.

A – DÉCOUPAGE AU CHALUMEAU ET SOUDAGE :

Il existe la possibilité de dermatites causées par la sudation et la macération sous gants ou par intolérance aux gants de protection, avec notamment des allergies au chrome contenu dans le cuir des gants.

B – LAVAGE DES MAINS ET DÉGRAISSAGE :

Les dermatites d’irritation sont assez fréquentes et dues à l’utilisation de diluants pour se laver les mains (avec de l’essence en particulier) et de solvants utilisés lors du dégraissage de la tôle neuve avant sa pose sur le véhicule (les tôles neuves sont graissées lors de leur fabrication et maintenues ainsi pour une bonne conservation).

C – RÉPARATIONS DE LA CARROSSERIE ET DES PARE-CHOCS :

Des dermatites à la fibre de verre sont observées chez les tôliers à cause des opérations de ponçage des pare-chocs en polyester stratifié et des réparations de trous importants de carrosserie effectuées avec du mastic polyester renforcé de fibre de verre.

C’est toujours lors des opérations de ponçage ou de découpage de ces matériaux qu’il y a un dégagement plus ou moins fort de poussières riches en fibres de verre.

D – UTILISATION DE MASTICS :

On peut voir des eczémas de contact au peroxyde de benzoyle (utilisé comme durcisseur du mastic et de l’apprêt), à l’octoate de cobalt de l’accélérateur de réaction, ou plus rarement à la résine polyester elle-même, pouvant contenir de la colophane.

Sont plus rarement observés des eczémas aux résines époxydiques utilisées dans des mastics particuliers ou des ulcérations des extrémités liées à la présence de chromates, utilisés comme additifs de mastics, ou enfin à l’aldéhyde formique contenu dans des colles de matières plastiques.

E – UTILISATION DES PEINTURES :

Le peintre automobile enlève la peinture ancienne par grattage, abrasion ou dissolution, prépare la surface à peindre, notamment en la dégraissant, applique une couche de base dont il pratique ensuite le polissage afin d’en égaliser la surface, protège les parties chromées, les vitres et autres éléments non peints.

Il procède ensuite au mélange des peintures puis à leur application au pistolet pneumatique.

Les peintres sont souvent atteints de dermatites d’irritation liées à l’usage inapproprié de solvants pour le nettoyage des mains.

Actuellement le risque majeur pour les peintres automobiles est représenté par les isocyanates entrant dans la composition des peintures polyuréthannes, les plus utilisées dans toutes les entreprises de réparation automobile.

Les isocyanates sont des molécules de faible poids moléculaire, très réactives, caractérisées sur le plan chimique par un groupement N=C=O attaché à un radical organique.

Les problèmes cutanés rencontrés avec ces résines et surtout leur support à base d’isocyanates sont sans commune mesure avec les gros problèmes respiratoires qu’elles posent.

Les rares allergies cutanées observées sont dues aux produits suivants : toluylène di-isocyanate (TDI), di-isocyanate de diphénylméthane (MDI), proche du diaminodiphénylméthane, diisocyanate de dicyclohexylméthane, triéthylhexaméthylène diisocyanate (TMDI), polyméthylène polyphényl isocyanate (PAPI), isophorone di-isocyanate (IPDI), qui constituent les noyaux autour desquels viennent se polymériser des polyols (réaction de polyaddition).

Dans cette réaction interviennent des amines pouvant être sensibilisantes (triéthylamine, éthylamine, méthylamine, triéthylène diamine, etc).

Ouvriers effectuant des traitements de surface :

Ces traitements de surface ont pour but de recouvrir des métaux oxydables pour les rendre brillants ou inoxydables : on fait ainsi du chromage ou nickelage électrolytique, à l’origine d’allergies au chrome ou au nickel, mais aussi d’ulcérations des extrémités à l’emporte-pièce, à l’acide chromique ou aux chromates, souvent dénommées « pigeonneaux », ou des ulcérations plus étendues et plus graves.

Utilisateurs de fluides de refroidissement :

Les dermatoses des utilisateurs de fluides de refroidissement représentent environ 10 % des dermatoses d’origine chimique.

Ces dermatoses sont moins fréquentes actuellement.

Cette diminution de fréquence porte surtout sur les cas de « boutons d’huile » ou élaïoconiose folliculaire, se voyant chez les utilisateurs de machines-outils (perceuses, fraiseuses, rectifieuses, tours, etc) fonctionnant avec un jet de fluide de refroidissement projeté sur les pièces à usiner mais aussi sur l’opérateur, après recyclage dans un circuit, où ces huiles sédimentent et s’enrichissent en germes divers.

L’utilisation d’antiseptiques ajoutés à ces huiles a évité ces boutons d’huile, mais a favorisé l’apparition d’allergies à des antiseptiques.

Dans toutes ces professions, il y a utilisation de machines destinées à usiner les métaux (tours, fraiseuses, machines à décolleter, perceuses…) avec projection d’huile sur la pièce usinée, afin d’éviter l’oxydation de cette pièce et l’usure anormale par échauffement des pièces actives de la machine-outil.

Lors de cette projection d’huile, l’opérateur est exposé directement sur ses mains ou avant-bras, voire sur le visage, et indirectement sur les parties du corps en contact avec les vêtements imprégnés d’huile projetée ou présente sous forme d’aérosol.

Les dermatoses observées se répartissent en eczémas de contact et dermatites d’irritation, mais on peut faire remarquer que ces distinctions sont plus théoriques que réelles car il existe souvent une intrication entre les deux.

Dans tous les cas de dermatites d’irritation, on retrouve l’utilisation intempestive soit de savons irritants, soit de solvants (trichloro 1-1-1 éthane, trichloréthylène, white-spirit, acétone).

Les facteurs le plus fréquemment à l’origine des eczémas de contact sont les suivants :

– les métaux, et surtout le chrome jouent donc un rôle principal, mais aussi le cobalt, le nickel et le cuivre.

La présence dans les huiles usagées de nombreuses particules métalliques est responsable de microtraumatismes répétés des mains de l’opérateur et favorise l’eczématisation secondaire ;

– le groupe des parfums, la colophane qui est utilisée comme agent émulsifiant, souvent à base de résine de pin, sont également allergisants ;

– enfin le contact des caoutchoucs des gants entraîne comme ailleurs des allergies cutanées au groupe des caoutchoucs.

Dans les métiers de la métallurgie où on pratique l’usinage des métaux, les fluides d’usinage sont nécessairement et régulièrement traités avec des antiseptiques.

Ceux-ci sont parfois très irritants, surtout s’ils sont utilisés à concentration supérieure à celle préconisée par le fabricant.

Ils se comportent aussi comme des allergènes à l’origine d’eczémas de contact de nature allergique.

Le groupe prépondérant est celui des bisoxazolidines : par exemple Grotan OD, Forcide 104, Forcide 104 p. Le groupe des libérateurs de formol comporte de nombreux produits : le formol est libéré en présence de bactéries uniquement, par métabolisation de l’antiseptique.

Ces antiseptiques sont progressivement abandonnés actuellement ; toutefois l’importance de la responsabilité de ces produits peut être sous-estimée du fait que ces libérateurs de formol présents dans les patch tests sont dissous, non dans l’eau, mais dans de la vaseline, ce qui ne facilite pas la libération de formaldéhyde.

Citons parmi ces produits :

– les hexahydrotriazines : par exemple Grotan BK, Grotan forte, Forcide 78 ;

– l’association 5-chloro 2-méthyl 4-isothiazoline 3-one et 2-méthyl 4-isothiazoline 3-one (kathon MW) ;

– les ammoniums quaternaires : notamment le chlorure de benzalkonium ;

– et plus récemment, le dibromodicyanobutane, commercialisé sous les noms d’euxyl K400, 135, 446, 727, de merquat 2200, tektamer 38, méthyldibromoglutaronitrile, que l’on peut tester dans la vaseline à 0,1 %.

Un des risques importants est l’addition, incontrôlée et excessive dans ces fluides industriels, par l’entreprise, d’antiseptiques destinés à éviter la prolifération microbienne.

Les mesures de prévention collective les plus efficaces sont les suivantes : capotage des machines pour éviter les projections d’huile sur les mains et les vêtements des opérateurs, changements fréquents d’huile et vérification régulière du pH de ces huiles, addition d’antiseptiques à des concentrations précises selon les recommandations des fabricants, propreté des circuits de recyclage des fluides et nettoyage des bacs de récupération, et enfin filtrage efficace des copeaux métalliques afin d’éviter à la fois les agressions mécaniques et l’allergie aux métaux.

La prévention individuelle de ces dermatoses aux fluides de refroidissement repose essentiellement sur l’abandon des mauvaises habitudes, en particulier celle du lavage des mains avec des solvants, sur le lavage fréquent des vêtements de travail adaptés, l’application d’une crème protectrice appropriée, et des gants adaptés à la tâche et doublés de coton.

Éleveurs, agriculteurs, employés d’abattoirs, vétérinaires et personnes en contact avec des animaux :

Le contact avec des animaux malades est une source persistante de zoonose, malgré toutes les précautions prises qui en diminuent néanmoins la fréquence.

A – AFFECTIONS VIRALES :

Les dermatoses dues à des virus touchent essentiellement les doigts des mains ; elles ne sont pas encore reconnues comme maladies professionnelles indemnisables.

1- Verrues :

Touchant 7 à 10% de la population générale, surtout l’enfant et l’adulte jeune, les verrues vulgaires, dont les agents responsables sont des papillomavirus (human papovavirus [HPV]), sont retrouvées avec une fréquence plus importante dans certaines professions : 25 à 50 % de verrues des mains chez les bouchers, charcutiers, employés d’abattoirs, vétérinaires.

La contagion est directe par brèche cutanée, parfois indirecte par contact d’objets contaminés et on connaît le caractère contagieux et auto-inoculable des verrues.

Cependant, l’hypothèse d’une transmission d’un papillomavirus d’origine animale n’a encore jamais été prouvée.

2- Maladie d’Orf :

Observée chez les éleveurs de moutons, la maladie d’Orf est liée à un parapoxvirus, transmis par des lésions du pis des ovidés.

L’Orf réalise une papule érythématoviolacée, pseudovésiculeuse, apparaissant à la face dorsale d’un doigt, à la suite d’une incubation de 3 à 15 jours après un contact avec un animal malade (essentiellement les ovins, généralement par contact avec lésions du pis) ; l’évolution se fait spontanément vers la disparition sans séquelle en une quinzaine de jours ; une surinfection bactérienne n’est pas rare.

La mise en évidence du virus est possible en microscopie électronique ou par effet cytopathogène sur cultures cellulaires.

3- Nodule des trayeurs :

Les nodules des trayeurs sont également dus à un parapoxvirus, avec une sémiologie proche de l’Orf. Ils réalisent au niveau d’un doigt, 5 jours à 2 semaines après un contact avec des lésions du pis de vache, des nodules (2 à 5) rouge violacé, fermes, à évolution croûteuse, qui guérissent spontanément sans séquelles en 4 à 6 semaines.

Ils touchent les trayeurs de vaches et les vétérinaires.

B – DERMATOSES D’ORIGINE MYCOSIQUE :

Les mycoses cutanées professionnelles sont transmises de l’animal à l’homme.

1- Herpès circiné :

Les épidermomycoses de la peau glabre, à type d’herpès circiné, sont caractérisées par des placards à contours géographiques, parfois vésiculeux en bordure, avec un centre plus pâle, l’extension se faisant en périphérie.

Les métiers exposés sont les suivants : le travail en laboratoire, dans des animaleries, le travail en milieu rural, au contact des bovins en particulier, les vétérinaires, les ouvriers des abattoirs, mais aussi ceux qui pratiquent le toilettage des chats et chiens.

2- Onychomycoses :

On peut voir également des mycoses des ongles, sous forme d’épidermomycoses, avec atteinte préférentielle du bord libre ou de la matrice, et des candidoses touchant la base de l’ongle et son pourtour réalisant un onyxis avec périonyxis.

3- Sycosis :

Les sycosis trichophytiques se présentent comme de grosses infections des follicules pilosébacés, pouvant confluer en un gros macaron (kérion) (rarement chez l’adulte) et dues à un deuxième contact avec des animaux contaminés par des dermatophytes auxquels le sujet s’est déjà sensibilisé, et contre lesquels il réagit de manière explosive.

Ils sont rarement localisés exclusivement à la main.

4- Candidoses interdigitales :

On a vu de véritables épidémies de candidoses interdigitales dans des abattoirs où l’hygiène était défectueuse, avec lavages énergiques à l’aide de savons très irritants et essuyage des mains sur des serviettes non jetables et insuffisamment renouvelées.

C – DERMATOSES PROFESSIONNELLES D’ORIGINE MICROBIENNE :

1- Tuberculose cutanée :

La tuberculose cutanée ou sous-cutanée d’inoculation (nodule ulcéré et torpide, avec adénopathie satellite mais aussi tuberculose verruqueuse) touche les éleveurs, les vétérinaires, les employés d’abattoirs.

Elle est devenue rare.

On a pu voir des cas de réaction locale inflammatoire dus à l’injection accidentelle de tuberculine bovine.

2- Brucellose cutanée :

La brucellose cutanée de contact, due à une réaction allergique aux antigènes des Brucella, se traduit par une réaction retardée eczématiforme ou urticarienne immédiate des zones en contact avec les viscères d’animaux contaminés et porte aussi le nom d’« eczéma des vétérinaires ».

On la voit également chez les éleveurs s’occupant du vêlage d’animaux contaminés et en contact avec des avortons brucelliens ou des zones génitales d’animaux contaminés.

Le port systématique de gants devrait éviter ce type d’affection.

3- Dermatite du rouget du porc :

La dermatite du rouget du porc ou érysipéloïde de Rosenbach atteint les bouchers, charcutiers, équarisseurs, ouvriers des abattoirs.

Il s’agit de placards locaux (au point de piqûre) inflammatoires, rouges, accompagnés par une adénopathie satellite et une petite réaction fébrile.

La guérison est obtenue grâce à la pénicilline.

4- Autres infections bactériennes :

Il faut citer, chez les personnes en contact avec des animaux contaminés ou avec leurs déjections, les formes cutanées des leptospiroses, des rickettsioses, la tularémie (transmise par les léporidés), et les syphilis et gonococcies accidentelles en laboratoire lors des manipulations de germes pour analyses.

* Pasteurellose :

Après une morsure par un animal, notamment chien ou chat, peut survenir en quelques heures sur la zone traumatisée une infection à Pasteurella multocida, bactérie commune dans la salive de ces animaux.

La région mordue, habituellement la main, devient douloureuse, oedématiée et rouge, avec une fièvre modérée.

Une suppuration apparaît sous forme de quelques gouttes de pus sur les points de morsure.

L’absence de traitement précoce, dans les 24 heures, de cette pasteurellose par les tétracyclines, peut conduire à l’apparition d’un phlegmon ou à une suppuration chronique, parfois suivie d’un syndrome algodystrophique non exceptionnel dans ce type d’infection.

La confirmation du diagnostic peut être obtenue par la mise en évidence de Pasteurella multocida, par examen direct et culture à partir d’une goutte de pus prélevée précocement avant traitement.

Les syndromes algodystrophiques consécutifs à une pasteurellose peuvent être améliorés par des injections répétées de pasteurelline intradermique et par des anti-inflammatoires.

* Mycobactérioses atypiques :

Les granulomes des commerçants en poissons exotiques, dus à des mycobactéries atypiques méritent d’être cités.

Appelés « granulomes des piscines » ou « granulomes des aquariums », ils sont dus à Mycobacterium marinum (encore appelé balnei), mycobactérie atypique pathogène des poissons, retrouvée dans des eaux douces ou salées stagnantes et contaminant essentiellement dans nos régions les aquariums à poissons tropicaux.

L’infection succède à une inoculation de la bactérie par effraction cutanée, après une incubation pouvant aller de 1 semaine à 2 mois (3 semaines en moyenne).

Les lésions siègent électivement aux doigts, aux mains, sont polymorphes, volontiers papulonodulaires inflammatoires, quelquefois pustuleuses, pouvant s’ulcérer ; dans certains cas, la dissémination lésionnelle se fait le long d’un axe de drainage lymphatique sous forme sporotrichoïde.

L’examen histologique de la lésion est évocateur : typiquement un granulome tuberculoïde avec cellules épithélioïdes et cellules géantes ; la coloration de Ziehl révèle la présence de bacilles acidoalcoolo- résistants et la culture sur milieu de Löwenstein identifie Mycobacterium marinum.

Le traitement repose sur une antibiothérapie par cyclines, macrolides (clarithromycine), quinolones (ciprofloxacine), Mycobacterium marinum étant peu sensible aux antituberculeux classiques, le traitement doit être prolongé jusqu’à 6 semaines après la cicatrisation.

* Maladie des griffes du chat :

Elle est transmise par les griffes, mais aussi la salive ou les poils.

* Charbon :

Le charbon, devenu exceptionnel à l’heure actuelle, se manifeste par la pustule maligne ou l’oedème malin de la face et est transmis par les animaux malades, bovins en particulier, ou par leurs déchets.

* Pyodermatites :

Il peut y avoir des pyodermatites à la suite de manoeuvres obstétricales septiques, spécialement des délivrances ou des embryotomies.

5- Parasitoses :

Les gales d’origine animale entraînent un prurit localisé, spontanément résolutif, car le facteur responsable ne reste habituellement pas chez cet hôte inhabituel qu’est l’être humain.

D – AUTRES DERMATOSES :

– De nombreuses dermatoses d’origine chimique peuvent être observées, notamment des brûlures chimiques aux produits de nettoyage des trayeuses automatiques de bovins, à base de produits très alcalins ou très acides.

La manipulation d’aliments pour animaux est responsable de nombreuses dermatoses de causes très diverses.

– Dermatites de contact aux céréales et farines de céréales.

Il s’agit surtout de dermatites prurigineuses survenant après une courte durée d’exposition aux poussières de grains, principalement provoquées par l’orge et l’avoine.

– Dermatoses aux aliments pour animaux.

Des observations d’eczéma diffus papuloérythémateux des mains, avant-bras et jambes ont été rapportées chez des éleveurs distribuant des aliments pour animaux avec projection de poussières. Les tests épicutanés étaient positifs aux aliments eux-mêmes et à la vitamine B12.

Dans certaines observations d’allergies à la vitamine B12, la concomitance d’un test positif au cobalt pouvait faire envisager le rôle potentiellement allergisant de ce métal contenu dans la molécule, mais surtout lorsque celle-ci était inhalée avec relargage du cobalt dans l’organisme.

La vitamine K3 ou ménadione est une vitamine liposoluble utilisée dans les aliments pour animaux sous une forme hydrosoluble avec addition de sulfites devenant alors de la ménadione sodium bisulfite.

Il s’agit d’un produit ayant un pouvoir irritant pour les yeux et les voies aériennes supérieures, mais aussi irritant et allergisant pour la peau.

– Dermatites de contact aux éléments minéraux, aux arômes, colorants ou sulfites : parmi les éléments minéraux, on peut retenir le sulfate de cobalt classiquement allergisant et ayant donné des eczémas allergiques dans des entreprises d’aliments pour bétail.

Des allergies au carmin d’indigo et à la tartrazine ont été rapportées.

Les allergies aux sulfites utilisés dans l’industrie agroalimentaire sont bien connues soit sous forme d’urticaire, soit plus rarement d’eczéma de contact.

C’est surtout le métabisulfite de sodium qui est rencontré.

– Dermatites de contact aux antioxydants et conservateurs. L’allergie à l’éthoxyquine est rapportée dans plusieurs observations.

– Dermatites de contact aux antibiotiques.

Plusieurs observations d’allergie aux antibiotiques contenus dans les aliments pour animaux ont été rapportées, pour la néomycine, la bacitracine et le monensin-sodium.

Il a également été rapporté des cas d’allergie à la virginiamycine contenue dans les aliments pour porcs et poules.

L’allergie à la tylosine est bien connue.

– Dermatites de contact aux anticoccidiens.

Dans les aliments pour volailles, le dinitolmide ou dinitro-3-5 toluamide (zoalene), a déclenché des eczémas allergiques.

Il en est de même pour l’amprolium et pour le clopidol (méthylchlorpindol).

Des allergies à la nitrofurazone ont été décrites, mais ce produit est actuellement interdit en France.

– Dermatites de contact aux protéines animales.

Elles sont dues à une allergie cutanée, immédiate, avec des manifestations urticariennes survenant dans les 20 minutes qui suivent le contact avec la chair crue de l’animal (viande, abats, chair de poisson, sang, face dermique de la peau de mammifères, de poissons, ou de volailles), ou retardée avec des manifestations de type eczéma survenant dans les heures ou jours qui suivent les contacts.

La guérison ne s’obtient qu’au prix d’une protection efficace par gants ou vêtement étanches.

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