Dermatoses liées à Malassezia furfur

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Introduction :

M. furfur est une levure, appelée autrefois Pityrosporon (P.) ovale.

Si les affections à M. furfur sont fréquentes et banales, leur physiopathologie est encore l’objet de débats animés.

Parmi les affections liées à M. furfur, deux prédominent nettement : le pityriasis versicolor, où M. furfur paraît directement pathogène, et la dermatite séborrhéique, où le mode d’intervention de cette levure n’est pas clair.

Le diagnostic de ces affections est essentiellement clinique mais peut être appuyé par des examens complémentaires.

Le traitement est essentiellement, mais pas exclusivement, antifongique.

Historique de la taxonomie des levures du genre Malassezia :

Dermatoses liées à Malassezia furfurUn rappel historique paraît nécessaire pour expliquer la confusion qui entoure l’isolement de M. furfur.

En 1801, Willan identifie le pityriasis versicolor.

En 1846, Eichsted montre qu’un agent fongique est cause du pityriasis versicolor.

En 1853, Robin le nomme Microsporon furfur.

La nature dermatophytique était alors admise.

Le nom Microsporon, était d’ailleurs mal orthographié‚ car il aurait fallu écrire microsporum furfur (grain de blé en latin, correspondant à l’aspect des squames).

En 1874, Malassez reconnaît un agent levuriforme inconnu au sein des squames et sur les cheveux des patients atteints de pityriasis capitis.

En 1884, Bizzozero le nomme Saccharomyces ovalis. Baillon, en 1889, décrit le genre M. et identifie le microsporum malassezii comme agent du pityriasis capitis.

En 1904, Sabouraud décrit le genre P. (du grec pityron : grain de blé).

Ainsi, naît le P. malassezi en lieu et place de microsporum malassezii.

Castellani et Chalmer, en 1913, débaptisent P. malassezii et le nommeront P. ovale. Weidman, en 1925, isole et cultive à partir de squames de peau de rhinocéros P. pachydermatis qui sera par la suite isolé sur la peau de nombreux animaux (mammifères et oiseaux) mais aussi d’êtres humains et dont la similarité biologique avec P. ovale est très importante.

Panja en 1927, cultive pour la première fois P. ovale.

En 1939, Benham montre qu’il s’agit d’une levure lipophile et que la culture est favorisée par l’apport d’acide gras.

Gordon, en 1951, crée le terme P. orbiculare et rattache aux P. ovale et orbiculare pityriasis versicolor et pityriasis capitis.

Ces deux levures sont considérées comme anthropophiles et lipodépendantes ; P. pachydermatis est considéré comme une espèce zoophile non lipodépendante.

Par la suite, sera isolé P. canis.

Finalement, en 1995, Guillot et Gueho pourront identifier sept espèces génétiques de M. appartenant à la famille des basidiomycètes : M. furfur (ex-P. ovale et ex-P. orbiculare), M. pachydermatis (ex-P. pachydermatis et ex-P. canis), M. sympodialis, M. globosa, M. obtusa, M. restricta, M. sloofiae.

Cette classification repose sur l’étude des séquences de l’acide ribonucléique (ARN) ribosomial 26S et de l’acide désoxyribonucléique (ADN) nucléaire de ces levures lipophiles saprophytes obligatoires de la peau humaine ou d’animaux (mammifères et/ou oiseaux) et jamais isolées dans l’environnement.

Pathologie liée à Malassezia furfur :

A – PITYRIASIS VERSICOLOR :

Il s’agit d’une affection cosmopolite, fréquente, de l’adolescent et de l’adulte jeune des deux sexes, favorisée par l’humidité, la chaleur, l’exposition au soleil, l’hypercorticisme, l’application de topiques gras et la grossesse.

Les lésions sont habituellement localisées sur le thorax, le cou, la racine des membres.

Des formes plus diffuses peuvent être observées.

Classiquement, les paumes et les plantes ne sont jamais atteintes mais le visage peut parfois l’être.

L’aspect clinique est évoqué par le nom même de cette affection : pityriasis = desquamation fine, versicolor = atteinte variable.

Il s’agit de lésions maculeuses, très rarement en relief, à desquamation furfuracée, que l’on peut mettre en évidence par le signe du « copeau » : lorsque le frottement appuyé, détache sans hémorragie un lambeau épidermique adhérent.

La couleur est rosâtre, jaunâtre, chamois ou fauve chez des sujets leucodermes.

Il peut y avoir au contraire une dépigmentation, surtout chez les patients dont la peau est foncée.

Il existe toutefois des formes hyperpigmentées chez les patients à peau sombre.

Enfin, des formes polychromes peuvent se voir chez un même individu.

Initialement, les macules sont périfolliculaires, puis forment de vastes macules au bord émietté pouvant ultérieurement confluer.

B – DERMATITE SÉBORRHÉIQUE :

Ce terme doit être préféré à dermite séborrhéique (pourtant plus utilisé), eczéma séborrhéique ou dermatite séborrhoïde.

1- Dermatite séborrhéique de l’adulte :

Il s’agit d’une affection très fréquente touchant 1 à 3% de la population, représentant 3 à 10% des consultations dermatologiques, débutant lors de la puberté, rare chez le vieillard, atteignant plus les hommes que les femmes, dont les poussées sont volontiers hivernales.

La lésion élémentaire est érythématosquameuse, aux bords imprécis, la squame étant grasse (d’où le terme séborrhéique).

Il s’agit d’une dermatose essentiellement faciale.

La topographie élective est le sillon nasogénien, le pli sus-labial, les sillons intersourciliers, les sourcils, la lisière du cuir chevelu, des sillons rétroauriculaires.

Parfois, il peut exister une atteinte des joues, du menton et de la lèvre supérieure, lorsque le patient est porteur d’une barbe ou de moustaches.

La dermatite séborrhéique peut ne pas être symptomatique ou être à l’origine de picotements, brûlures, prurit, ou d’une intolérance aux cosmétiques et notamment aux détergents.

L’évolution est chronique, alternant rémissions et poussées.

L’association avec un pityriasis capitis est fréquente et celui-ci est aujourd’hui considéré comme partie intégrante de la dermatite séborrhéique.

Il existe des particularités topographiques :

– lésions médiosternales d’évolution souvent centrifuge formant la dermatose figurée médiothoracique de Brocq, d’évolution parfois achromiante ;

– atteinte dorsale interscapulaire, pouvant parfois diffuser à l’ensemble du thorax mimant un pityriasis rosé de Gibert ;

– atteinte des zones pileuses pubiennes, axillaires, interfessières ;

– atteinte du conduit auditif externe occasionnant un prurit volontiers sévère entraînant des lésions de grattage, dont la surinfection peut conduire à une otite du conduit auditif externe ;

– blépharite ciliaire se manifestant sous la forme de squames grasses autour des cils sur une base érythémateuse ;

– atteinte des organes génitaux externes (dont la réalité est discutée).

Chez les malades parkinsoniens ou traités par neuroleptiques, l’hyperséborrhée est majeure et des manifestations de dermatite séborrhéique sont volontiers profuses et permettent parfois de faire le diagnostic neurologique.

Chez les sidéens, la dermatite séborrhéique se présente volontiers sous forme de lésions très diffuses, souvent aussi à distance de la tête, résistant aux traitements.

Elle est moins fréquente depuis la trithérapie.

Chez ces patients, le nombre de levures est diminué sur la peau et le rôle de M. furfur n’est donc pas évident.

La dermatite séborrhéique est plus fréquente chez les malades atteints de cancer des voies aérodigestives supérieures et les malades dépressifs.

Chez tous ces patients, une dermatite séborrhéique peut être le révélateur du diagnostic et il faut savoir y penser devant un contexte particulier.

2- Dermatite séborrhéique de l’enfant :

La dermatite séborrhéique de l’enfant est très différente de celle de l’adulte par sa topographie et son évolution.

Il s’agit probablement d’une entité autonome, mais certains la considèrent comme une variante de la dermatite atopique ou du psoriasis.

La lésion élémentaire est érythématosquameuse.

Il s’agit de larges plaques avec des squames grasses localisées au cuir chevelu (croûtes de lait) ou au visage.

Un érythème fessier est parfois associé et on parle alors d’atteinte bipolaire.

Une atteinte des grands plis ainsi que des éléments figurés peuvent s’y adjoindre.

L’état général est bon. Il n’y a classiquement pas de prurit. Enfin, on peut observer une atteinte généralisée sous la forme d’une érythrodermie desquamative de Leiner Mousous de moins en moins fréquente à l’heure actuelle.

La dermatite séborrhéique du nourrisson est souvent longue à traiter mais elle est moins récidivante que celle de l’adulte et disparaît avec l’âge.

Cependant Tollesson ne retrouve pas de diminution du nombre de colonies cutanées de M. furfur 1 an après guérison de dermatite séborrhéique chez 21 enfants.

C – PITYRIASIS CAPITIS :

Il s’agit en fait de la dermatite séborrhéique du cuir chevelu dont les manifestations cliniques vont du simple pityriasis capitis ou pityriasis capitis simplex, dont les squames fines poudrent les épaules et les cheveux (pellicules), jusqu’à la pseudoteigne amiantacée‚ en passant par le pityriasis gras, dont les larges squames grasses formant la classique couronne séborrhéique du cuir chevelu peuvent être malodorantes.

D – FOLLICULITES PITYROSPORIQUES :

Le terme « pityrosporique » est source de confusion et le terme de folliculite à M. furfur paraît plus approprié.

1- Folliculites des adultes :

Il s’agit d’une ostiofolliculite localisée plus particulièrement au dos et aux épaules chez l’adulte d’âge moyen.

À la différence de l’acné, il n’y a ni comédon ni microkyste. Les lésions sont généralement asymptomatiques, parfois prurigineuses.

La fréquence de cette dermatose, ne survenant pas sur un terrain particulier, est difficile à apprécier, sous-estimée pour certains, surestimée pour d’autres.

Il faut surtout savoir y penser devant une folliculite résistant aux traitements habituels.

La réponse aux antifungiques locaux est rapide.

Cependant, M. furfur a été isolé dans des follicules pileux de malades atteints d’acné vulgaire et cortisonée, ce qui rend nécessaire l’établissement de critères diagnostiques précis.

2- Pustuloses néonatales à Malassezia furfur :

Elles sont d’individualisation plus récente.

Il s’agit de pustules céphaliques, monomorphes, dont les critères diagnostiques reposent pour Taieb et al sur :

– une localisation à la face et au coude ;

– un âge inférieur à 1 mois ;

– l’isolement de M. furfur à l’examen direct ;

– l’élimination des autres causes de pustules néonatales ;

– une réponse aux imidazolés topiques.

Les diagnostics différentiels sont avant tout les pustules infectieuses néonatales (pustules à Staphylococcus aureus, Listeria monocytogenes, Streptococcus de tout type, Candida albicans, Pseudomonas aeruginosa, Treponema pallidum, herpès, gale) mais aussi les autres pustuloses que sont l’acropustulose infantile, l’érythème toxique néonatal, la mélanose pustuleuse néonatale transitoire.

Cependant, le principal diagnostic différentiel est l’acné néonatale qui, à la différence de la pustulose néonatale à M. furfur, présente des comédons ouverts et fermés.

E – DERMATOSES ASSOCIÉES À MALASSEZIA FURFUR :

1- Sébopsoriasis :

Il s’agit d’un psoriasis localisé sur les zones séborrhéiques, c’est-àdire dont la localisation est identique à celle d’une dermatite séborrhéique.

Seules d’autres localisations typiques du psoriasis permettent de poser un diagnostic de certitude car l’histologie et le traitement d’épreuve ne permettent généralement pas de trancher entre dermatite séborrhéique et sébopsoriasis.

Un phénomène de Koebner expliquerait cette topographie particulière de psoriasis.

Le rôle de M. furfur n’est pas clair.

2- Prurigo atopique séborrhéique :

Il s’agit d’un eczéma atopique de l’adulte, plus particulièrement de la femme localisé aux zones séborrhéiques avec des lésions excoriées dans les zones séborrhéiques du visage et la nuque (head and neck dermatitis).

Généralement, les prick-tests à M. furfur sont positifs.

Il y a effectivement une induction par M. furfur de la production des cytokines induisant la dermatite atopique (IL4, IL10) et de la synthèse d’IgE.

Les imidazolés, par leur effet thérapeutique tout à fait satisfaisant, confirment le diagnostic.

Toutefois, d’autres facteurs que M. furfur, sueur, chaleur, stress, exposition solaire aggravent cette pathologie.

F – AUTRES AFFECTIONS À MALASSEZIA FURFUR :

1- Papillomatose réticulée de Gougerot et Carteaud :

Il s’agit d’une dermatose bénigne, rare, dont les lésions élémentaires sont des maculopapules pigmentées disposées symétriquement en réseau autour de la zone médiane du tronc.

Histologiquement, on note une hyperkératose et une papillomatose sans acanthose.

Chez quelques patients, M. furfur a été isolé.

Le diagnostic différentiel peut être discuté avec un pityriasis versicolor papillomateux mais il n’y a pas de fluorescence en lumière de Wood.

2- Septicémies :

Des septicémies à M. furfur mais aussi à M. pachydermatis ont été décrites récemment, surtout chez des nouveau-nés en réanimation recevant des lipides par voie parentérale au moyen de cathéter vasculaire.

L’isolement de Malassezia après hémocultures classiques est impossible car cette levure lipophile a besoin d’un milieu enrichi en acide gras. Une étude récente portant sur la mise en cultures systématique sur un milieu adapté de 1 609 cathéters a permis de retrouver des levures de type M. furfur sur 38 cathéters.

La contamination s’effectue a priori à partir de la peau adjacente au cathéter.

G – AFFECTIONS DUES À MALASSEZIA PACHYDERMATIS :

Il s’agit d’un saprophyte animal occasionnant des dermatoses prurigineuses et des otites externes chez de nombreux mammifères, notamment le rhinocéros et le chien mais aussi chez des oiseaux.

Il a été isolé chez l’homme sur des frottis d’oreille, de peau, de vagin mais aussi des expectorations et des hémocultures.

Cette levure a une lipophilie moins absolue que M. furfur et peut être cultivée sur un milieu de Sabouraud et donc plus facilement isolée en routine.

Examens complémentaires :

Le diagnostic est, dans l’immense majorité des cas, clinique.

Les examens décrits, hormis les deux premiers, n’ont qu’un intérêt anecdotique.

A – EXAMEN EN LUMIÈRE DE WOOD :

Il s’agit d’un examen simple et facile à réaliser au cours d’une consultation dermatologique devant un pityriasis versicolor.

Il consiste à mettre en évidence une fluorescence jaune verdâtre après éclairage par des rayons ultraviolets de 360 nm de longueur d’onde.

La synthèse de phorphyrines par les levures expliquerait cette fluorescence.

Les lésions infracliniques sont généralement révélées au cours de cet examen.

B – SCOTCH-TEST :

Cette méthode, mise au point en 1957 par Vanbrenseghem, consiste à appliquer fortement un film adhésif sur les lésions, puis à appliquer celui-ci sur une lame porte-objet et à faire un examen direct au microscope.

On peut éventuellement appliquer au préalable sur la lame une gouttelette de bleu de lactophénol afin de colorer, pour identifier plus facilement les levures.

On met en évidence des blastospores rondes, ovales, réfringentes, avec un aspect de grappe de raisin. Les spores mesurent de 2 à 5 ím de diamètre.

On observe des enchevêtrements de filaments épais tout à fait typiques.

Cette technique est pratique pour poser le diagnostic mycologique du pityriasis versicolor.

En zone pileuse, un curetage préalable est préférable.

C – EXAMEN DIRECT :

Les squames sont prélevées à la curette.

L’application de potasse à 30 % les rend transparentes et permet de visualiser les spores au microscope avec un aspect similaire à celui observé au cours du scotch-test.

D – CULTURES :

Plusieurs milieux de cultures sont à notre disposition.

Le milieu le plus utilisé est le milieu de Sabouraud recouvert d’huile d’olive vierge.

Après 1 ou 2 semaines d’incubation à 37 °C, on observe un tapis blanchâtre.

Après coloration de May-Grünwald-Giemsa, on constate la présence de petites levures de 1,5 à 4 ím de diamètre ayant l’aspect de bouchons de champagne.

Les autres milieux, réservés à des laboratoires plus spécialisés sont :

– le milieu de Sabouraud, concentré à 1 % d’huile d’olive, qui permet une identification de colonies en dôme couleur chamois ;

– le milieu de Dickson, modifié ou le corps gras est un twin inclus dans une gélose, où les cultures ont un aspect lisse, plan, en « noisette » ;

– enfin, le milieu de Leeming, habituellement utilisé pour tester la sensibilité de M. furfur aux antifongiques.

E – EXAMEN ANATOMOPATHOLOGIQUE :

1- Pityriasis versicolor :

Il est mis en évidence des filaments, notamment après coloration à l’acide périodique Shiff (PAS) dans la couche cornée, ainsi qu’une exocytose lymphocytaire épidermique. Mais la levure est aussi très bien observée en coloration standard du fait de sa basophilie.

2- Dermatite séborrhéique :

L’aspect est peu spécifique et peut évoquer un eczéma ou un psoriasis sans abcès de Monro, avec une acanthose et quelques points de parakératose focale.

De discrets infiltrats lymphocytaires périvasculaires peuvent être associés à une exocytose.

Physiopathologie :

A – PITYRIASIS VERSICOLOR :

Les levures M. furfur sont localisées dans la couche cornée des follicules pileux.

Le blocage de la synthèse et le transfert de mélanine des mélanocytes vers les kératinocytes explique probablement les formes achromiantes.

La synthèse d’acide azélaïque par M. furfur pourrait expliquer ce mécanisme.

Les formes hyperchromiantes sont en partie secondaires à un épaississement de la couche cornée. Pour certains, il existe probablement des effets des levures sur les mélanocytes dont la nature n’est pas connue à ce jour.

D’autre part, certaines souches de M. furfur sont capables, à partir de L-tryptophane et de lipides de fabriquer un pigment brun.

B – DERMATITE SÉBORRHÉIQUE :

L’hypothèse d’une hyperséborrhée à l’origine de la dermatite séborrhéique est actuellement abandonnée.

Elle reposait sur la topographie séborrhéique des lésions chez des patients présentant une hyperséborrhée tels que les parkinsoniens ou les patients traités par neuroleptiques, ou l’apparition de la dermatite séborrhéique à l’âge où la sécrétion sébacée est importante (période néonatale, adolescence).

Cependant, les patients acnéiques n’ont pas plus que les autres de dermatite séborrhéique.

La composition du sébum est normale lors de la dermatite séborrhéique et le flux sébacé n’est pas différent dans les zones atteintes et les zones non atteintes.

D’autres facteurs ont par ailleurs été incriminés : climatiques (hivers), hormones sexuelles (lors de la période néonatale et lors de l’adolescence), neurologiques (description de l’atteinte unilatérale associée à des lésions trigéminées unilatérales), immunologiques (dermatite séborrhéique profuse lors du sida).

Cependant, M. furfur reste l’agent étiologique actuellement le plus probable.

Les territoires atteints sont les sites électifs de cette levure lipophile (zone d’hyperséborrhée).

La concentration de M. furfur est proportionnellement beaucoup plus importante que les autres saprophytes sur les zones atteintes de dermatite séborrhéique.

L’évolution du nombre de colonies est parallèle à celle des lésions, notamment sous l’effet des traitements locaux mais aussi généraux.

On retient actuellement que M. furfur est responsable de la dermatite séborrhéique plus par l’induction d’une réaction immunitaire que par une infection cutanée vraie.

D’ailleurs, l’aspect histologique est plus proche de l’eczéma que d’une affection fongique.

La structure antigénique de M. furfur est complexe.

La réponse qu’elle induirait est difficile à appréhender car tous les individus adultes présentent des anticorps dirigés contre M. furfur et ont des tests de transformation lymphoblastique positifs.

Par ailleurs, M. furfur active le complément par la voie alterne et exerce une action lipasique.

Enfin, il a été mis en évidence que des lysats de M. furfur pouvaient induire des lésions de dermatite séborrhéique.

Traitements :

A – ANTIFONGIQUES :

Les imidazolés topiques (kétoconazole, bifonazole, fluconazole sous la forme de crème, gel, lotion, shampooing) ou le sulfure de sélénium ou la ciclopiroxolamine sont les plus utilisés.

Il a été démontré qu’ils étaient plus efficaces que leur excipient. Le taux d’efficacité thérapeutique se situe entre 70 et 100 %. Le kétoconazole peut être aussi prescrit sous forme orale à la posologie de 200 mg/j pour des durées inférieures à 15 jours dans les formes rebelles ou récidivantes.

Pour l’instant, seul le kétoconazole a reçu l’autorisation de mise sur le marché pour les infections cutanées à M. furfur.

La terbinafine semble aussi efficace et mieux tolérée.

D’autres antifongiques topiques ont une action sur M. furfur : le sulfure de sélénium, la pirythione zinc, la piroctone olamine.

L’efficacité du sulfure de sélénium est similaire à celle du kétoconazole.

B – AUTRES TRAITEMENTS :

1- Corticoïdes locaux :

Leur efficacité est similaire à celle des imidazolés dans la dermatite séborrhéique mais les risques de corticodépendance réduisent leur prescription, qui est même contre-indiquée pour certains.

2- Peroxyde de benzoyle :

À 2,5 ou 5 % à raison de deux applications par semaine, il a montré une certaine efficacité avec une tolérance satisfaisante dans le traitement de la dermatite séborrhéique.

3- Acide salicylique :

Il est utilisé essentiellement sous forme de shampooing pour le traitement des pityriasis capitis. Sa concentration est alors inférieure à 2 %.

L’effet kératolytique recherché est modeste compte tenu de la brièveté de l’application du topique, mais bien réel.

Il est par ailleurs déconseillé chez le jeune enfant, en raison des risques d’absorption percutanée.

4- Autres kératolytiques :

Sous la forme de crème ou parfois de shampooing, on peut préconiser les alphahydroxyacides, le keluamide, le biolysat hafnia ou l’acide uncadécylénique.

À notre connaissance, il n’y a pas eu d’étude randomisée. Les traitements par goudrons sont désormais proscrits du fait d’une possible cancérogénicité.

5- Indications thérapeutiques en fonction des manifestations cliniques :

Le traitement du pityriasis versicolor repose avant tout sur l’utilisation d’imidazolés locaux ou de sulfure de sélénium.

Dans le pityriasis versicolor, le traitement au meilleur rapport coût/efficacité ou confort/efficacité est le kétoconazole en application unique sous forme de gel moussant.

Le traitement général par kétoconazole doit être réservé à des formes particulièrement rebelles.

Il n’existe pas de traitement schématisé de la dermatite séborrhéique de l’adulte, tant les possibilités sont nombreuses. Une étude des nombreux articles relatifs à ce sujet permet toutefois de dégager quelques tendances.

Le traitement de la dermatite séborrhéique repose avant tout sur les imidazolés locaux dont la galénique est adaptée à la topographie de la dermatite séborrhéique (crème pour le visage, shampooing pour le cuir chevelu, gel moussant pour les deux) mais d’autres antifongiques peuvent être utilisés, comme la pyrithione zinc, la piroxolamine, le sulfure de sélénium ou la ciclopirox olamine.

Tous ces traitements doivent être utilisés quotidiennement pour les crèmes, deux fois par semaine pendant 2 à 4 semaines puis une fois par semaine pour les shampooings et les gels moussants.

Les dermocorticoïdes ne doivent être appliqués que quelques jours ou même être évités.

Des kératolytiques ou des émollients doivent être proposés comme traitements d’entretien (tous les jours pour les crèmes, une ou deux fois par semaine pour les shampooings et les gels moussants).

Il existe peu d’études clairement démonstratives de leur efficacité.

Une exposition prudente au soleil est conseillée.

Certains ont proposé l’utilisation de rétinoïdes per os (isotrétinoïne) ou locaux (rétinaldéhyde).

À l’avenir, il sera probablement intéressant de prescrire des sels de lithium : succinate ou gluconate.

Chez les sidéens, qui sont parfois porteurs de dermatite séborrhéique très profuses et très récidivantes, on doit souvent proposer une PUVAthérapie ou une UVBthérapie ou le kétoconazole ou la terbinafine.

Auparavant, il faudra avoir essayé les autres traitements.

Chez des patients parkinsoniens ou traités par neuroleptiques, l’apport de DOPA ou d’antiparkinsoniens permet une réduction du flux séborrhéique et des manifestations cliniques de la dermatite séborrhéique.

Le traitement de la dermatite séborréique du nourrisson repose avant tout sur des soins d’hygiène (eau et savon) et l’application d’imidazolés locaux ou d’émollients.

Les dermocorticoïdes doivent être utilisés de façon limitée.

Les traitements classiques des folliculites à M. furfur néonatales ou de l’adulte reposent sur les antifongiques locaux de la famille des imidazolés mais des recidives sont possibles, même après un traitement oral.

La papillomatose réticulée de Gougerot et Carteaux est généralement insensible aux imidazolés, ce qui est d’ailleurs contre tout lien pathogénique avec M. furfur.

Des cas de guérison sous cyclines ou étrétinate ont été rapportés.

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