Manifestations dermatologiques de l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine

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Introduction :

La responsabilité des virus de l’immunodéficience humaine (VIH) dans la survenue du syndrome d’immodéficience acquise (sida) est certaine.

Les VIH (le VIH 1, découvert en 1983, et le VIH 2, découvert en 1985) sont des rétrovirus à acide ribonucléique ayant un tropisme pour les cellules CD4+.

Le sida est la phase ultime de l’infection par le VIH.

Manifestations dermatologiques de l’infection par le virus de l’immunodéficience humaineIl succède à une longue période de latence clinique pendant laquelle se constitue progressivement un déficit immunitaire portant essentiellement sur l’immunité à médiation cellulaire, avec baisse des lymphocytes T-CD4+, cible privilégiée du VIH.

Cependant, d’autres anomalies immunologiques sont induites par ces rétrovirus : expansion des lymphocytes T-CD8+, infection des cellules de la lignée monocyte-macrophage CD4+ ou –, stimulation polyclonale des lymphocytes B avec possibilité de manifestations auto-immunes, enfin déficit de la fonction anticorps vis-à-vis d’antigènes nouveaux.

Les manifestations cutanées sont possibles quel que soit le stade de l’infection par le VIH.

Elles sont fréquentes, polymorphes, parfois révélatrices de l’infection.

Certaines sont très évocatrices de l’infection par le VIH (maladie de Kaposi [MK], leucoplasie orale chevelue [LOC]…), d’autres sont plus banales, mais particulières par leur fréquence, leur gravité ou leur aspect clinique (dermatite séborrhéique [DS], molluscum contagiosum, zona, dermatophytie, exanthèmes médicamenteux…).

La plupart de ces manifestations cutanées ont en commun une évolution chronique ou prolongée et un caractère volontiers rebelle aux traitements classiques.

La majorité de ces lésions cutanées est d’origine infectieuse, secondaire à l’immunodépression qui favorise l’émergence d’infections opportunistes majeures (lorsque le déficit immunitaire est profond, par exemple en dessous de 200 cellules CD4+/mm3) ou mineures (lorsque le déficit immunitaire est plus modéré).

Les agents pathogènes sont des bactéries, des mycobactéries, des virus, des champignons ou des parasites, parfois associés chez un même patient.

Les affections néoplasiques sont également souvent induites par des virus opportunistes (papillomavirus humains [HPV] et cancers génitaux, virus Epstein-Barr [EBV] et lymphomes, MK et human herpes virus [HHV8]).

Aucune de ces manifestations cutanées (sauf la primo-infection par le VIH et l’érythrodermie CD8+) n’est directement liée au VIH.

L’histoire naturelle des manifestations dermatologiques du sida a été profondément modifiée par l’apparition de traitements antirétroviraux efficaces.

L’introduction de ces traitements peut parfois s’accompagner de l’apparition de certaines dermatoses liées à la reconstitution immunitaire (zona, folliculites, sarcoïdose, réaction paradoxale au cours des infections à mycobactéries…), mais elle entraîne habituellement l’amélioration spontanée de la plupart des dermatoses opportunistes (MK, candidoses, dermatophyties…..).

Malheureusement, ces traitements sont aussi associés à la survenue d’effets indésirables (exanthèmes médicamenteux, syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse, syndrome lipodystrophique) qui compliquent de plus en plus la prise en charge des patients infectés par le VIH.

Éruption de la primo-infection par le virus de l’immunodéficience humaine :

La primo-infection par le VIH s’accompagne plus fréquemment de manifestations cliniques que l’on ne pensait initialement.

Cette fréquence est encore très discutée du fait du petit nombre d’études prospectives.

Elle semble se situer autour de 50 % (de 5 à 90%).

La primo-infection symptomatique débute brutalement et associe, par ordre de fréquence décroissant : fièvre (de 80 à 100 % des cas, volontiers élevée : autour de 39 °C), asthénie, sueurs, somnolence, myalgies et arthralgies (de 30 à 90 % des cas), pharyngite douloureuse (de 50 à 100 % des cas, simple énanthème du voile et des piliers, purpura palatin, érosions buccales, aphtose, voire véritables ulcérations buccales et plus rarement oesophagiennes), éruption cutanée, adénopathies (de 40 à 80 % des cas, cervicales, axillaires, plus rarement inguinales et volontiers retardées par rapport aux autres symptômes), signes digestifs à type de diarrhée (de 30 à 60 % des cas), nausées, vomissements, anorexie, perte de poids (de 20 à 60 % des cas), et céphalées (de 30 à 60 % des cas, volontiers rétro-orbitaires).

Plus rarement sont présents des signes neurologiques (méningite lymphocytaire, neuropathie périphérique, paralysie faciale périphérique, polyradiculonévrite, myélite aiguë ou encéphalite), une pneumopathie, une splénomégalie, une hépatomégalie, une conjonctivite et, exceptionnellement, une aplasie médullaire, une vascularite, une rhabdomyolyse, voire des infections opportunistes.

L’exanthème de la primo-infection par le VIH est le plus souvent maculeux ou maculopapuleux, plus rarement érythématosquameux ressemblant à une syphilis secondaire ou à un pityriasis rosé de Gibert, voire urticarien, hémorragique, nécrotique ou pustuleux.

Il existe dans 25 à 100 % des cas (en moyenne 50 %).

Le plus souvent non prurigineux, il prédomine toujours sur le tronc, les épaules, le cou, plus rarement sur le visage.

Une atteinte palmoplantaire n’est pas rare, rendant le diagnostic différentiel avec une syphilis secondaire très difficile, d’autant qu’une dizaine d’observations font état de lésions génitales, d’érosions, de chancres multiples, d’ulcérations coronales.

Les ulcérations génitales et buccales seraient plus fréquentes en cas de transmission sexuelle du VIH. L’incubation séparant le contact supposé infectant et le début des signes cliniques se situe entre 3 jours et 3 mois, en moyenne 2 semaines.

La phase aiguë dure de 3 jours à 4 semaines (en moyenne de 1 à 2 semaines) avant la guérison spontanée.

Les examens biologiques montrent, dans plus de la moitié des cas, une thrombopénie modérée (de 50 000 à 150 000 plaquettes/mm3), plus rarement une lymphopénie (CD4 abaissés de manière variable, mais parfois très profondément, attestant de la possibilité de survenue d’infections opportunistes), une leucopénie, une neutropénie, un syndrome mononucléosique.

La vitesse de sédimentation est élevée.

La lignée rouge est normale. Une discrète augmentation des transaminases et/ou des phosphatases alcalines est possible, voire une augmentation des enzymes musculaires.

La séroconversion pour le VIH (apparition des anticorps dirigés contre les glycoprotéines d’enveloppe et la protéine P25) se situe entre le huitième jour et le soixantième jour après le début de la fièvre (en moyenne vers le 21e jour).

Elle est précédée par une virémie dont attestent la positivité de l’antigénémie P24 (maximale entre le septième et le 15e jour de la primo-infection) et la détection du virus en culture ou par polymerase chain reaction (PCR) dans le sang et parfois le liquide céphalorachidien.

La durée de la primo-infection, l’intensité des symptômes, l’existence même des signes cliniques, la durée de la virémie, la précocité d’apparition des anticorps dépendent de la charge virale inoculée, de la virulence de la souche et de l’efficacité des défenses de l’hôte (lymphocytotoxicité CD8 et anticorps cytotoxiques).

Une virémie persistante, une primo-infection prolongée sont de pronostic défavorable, avec progression plus rapide du déficit immunitaire.

Après la chute initiale des lymphocytes CD4+ circulants, certains patients récupèrent une immunité cellulaire en apparence intacte, d’autres gardent un déficit majeur.

L’histologie des lésions cutanées est peu spécifique : infiltrat lymphocytaire et/ou plasmocytaire périvasculaire dermique ou muqueux (constitué de cellules CD4+) ; vacuolisation de la membrane basale ; exocytose lymphocytaire ; parakératose ; nécrose kératinocytaire ; spongiose ; absence de vascularite.

Les immunofluorescences directes sont négatives.

Les recherches virales en microscopie électronique, rarement effectuées, sont négatives.

Les diagnostics différentiels le plus souvent discutés sont les autres éruptions virales (en particulier, les arboviroses, en zone d’endémie, la rubéole, la mononucléose infectieuse, le cytomégalovirus [CMV] dont la primo-infection concomitante pourrait rendre compte des syndromes mononucléosiques accompagnant parfois la primoinfection par le VIH), la syphilis secondaire (diagnostic différentiel majeur), le pityriasis rosé de Gibert et les toxidermies. Peu de choses sont connues sur le tropisme cutané du VIH.

Les éléments bien établis sont la possibilité d’infecter in vitro les cellules de Langerhans par le VIH, la présence des rétrovirus au sein de ces cellules chez les patients infectés, la disparition progressive des cellules de Langerhans cutanées lors de la progression du déficit immunitaire.

Les cellules de Langerhans muqueuses jouent probablement un rôle important dans la pénétration du virus à l’intérieur de l’organisme.

Mais la disparition de la fonction « sentinelle » des cellules de Langerhans infectées pouvant participer à l’aggravation du déficit immunitaire et à l’émergence de diverses dermatoses est encore hypothétique.

Dans le modèle expérimental du macaque infecté par le simian immunodeficiency virus, un exanthème maculopapuleux est facilement reproduit.

Pathologies tumorales cutanées et muqueuses :

A – MALADIE DE KAPOSI :

Le terme de MK doit être préféré à celui de sarcome de Kaposi.

La MK n’est pas un sarcome. Ni la morphologie des cellules, ni leurs caractères en culture, ni leurs caryotypes ne rapprochent d’un sarcome cette hyperplasie endothéliale ou mésenchymateuse polyclonale, multifocale, qui ne métastase pas.

1- Épidémiologie :

La survenue très inhabituelle de cas de MK chez de jeunes homosexuels masculins en Californie et à New York à partir de 1979 a permis, dès 1981, de rapporter cette affection à l’épidémie de ce qui devait ensuite être baptisé sida.

La MK du sida (ou MK épidémique) est clairement la même maladie que celle qui fut décrite en 1872 par Kaposi chez des patients âgés, de confession juive, originaires d’Europe centrale et identifiée ensuite chez des patients d’origine méditerranéenne.

Cette forme dite MK classique a une incidence faible : 0,04 pour 100 000 habitants aux États-Unis avec un sex-ratio de 9 à 15 hommes pour une femme.

Même si globalement la MK du sida se comporte de manière plus agressive, plus disséminée que la MK classique, la lésion élémentaire est cliniquement et histologiquement la même dans les deux formes.

Des formes agressives de MK, même si elles sont rares, sont bien connues dans la forme classique, en particulier chez les patients traités par immunosuppresseurs.

Dans les années 1920, un foyer de MK dit endémique a été mis en évidence en Afrique centrale où la MK représentait, avant le sida, 10 % des cancers, touchant volontiers des sujets plus jeunes avec un sex-ratio de trois hommes pour une femme et un pronostic souvent plus grave.

La maladie de Kaposi est la conséquence de l’infection par le virus HHV8 (ou KSHV).

Les modes de transmission de ce virus sont variables selon la région du monde.

Dans les pays occidentaux, il est sexuellement transmis comme le laissait supposer des observations de cas de MK dans des couples hétérosexuels et les premières études épidémiologiques faites dans les années 1980.

Dans les pays tropicaux, ce virus est transmis dans l’enfance plutôt sur un mode oral.

Dans la population générale, la séroprévalence HHV8 varie de 0 à 1 % parmi les donneurs de sang américains et italiens et égale 51 % parmi les patients ougandais hospitalisés (non infectés par le VIH).

Dans la population américaine consultant dans des centres de maladies sexuellement transmissibles (MST), la séroprévalence est de 8 % pour l’ensemble des consultants et de 13 % pour les homosexuels.

Parmi les patients américains infectés par le VIH (et indemnes de MK), la séroprévalence est respectivement de 0 % (sujets hétérosexuels), 5 % (transfusés) et 35 % (homosexuels).

Dans une étude américaine plus récente, la séroprévalence est de 6 % parmi les patients hétérosexuels et de 39 % parmi les patients homosexuels.

Chez ces derniers, la séroprévalence augmente en fonction du nombre de partenaires sexuels au cours des 2 dernières années, de 23 % (de un à cinq partenaires) à 41 % (de 11 à 50 partenaires) et à 65 % (plus de 250 partenaires).

Dans cette étude, les antécédents de MST sont des facteurs de risque de l’infection par le HHV8 avec des odds-ratio de 3,8 (2,7-5,4) pour la gonococcie, de 2,5 (2,1-3,1) pour la syphilis et de 1,6 (1,2-2) pour les urétrites non gonococciques. Une séroconversion apparaît en moyenne 33 à 46 mois avant l’apparition de la MK.

Dans une autre étude, la probabilité de la survenue de la MK chez les patients infectés par le VIH et par le HHV8 a été estimée à 49 % (de 41 à 58 %) à 10 ans.

Ainsi, le HHV8 n’apparaît pas être un virus ubiquitaire, mais plutôt un nouvel agent transmissible dont la répartition géographique se superpose à celle de la MK.

La MK, avant l’apparition de traitements antirétroviraux efficaces, semblait apparaître à des stades de plus en plus avancés d’immunodépression, traduisant sa survenue à un stade de plus en plus avancé du déficit des lymphocytes CD4+ : d’une moyenne de 300 lymphocytes CD4/mm3 dans les années 1985 à 50/mm3 dans les années 1990.

2- Clinique :

La lésion élémentaire cutanée de la MK est une macule érythémateuse qui devient progressivement violacée et s’infiltre.

Le diagnostic clinique est facile sur peau claire.

L’absence de disparition de la coloration rouge à la vitropression, la persistance de la lésion, le caractère hémorragique et/ou pigmenté sont des éléments importants en cas de doute.

La topographie des lésions est ubiquitaire, sans la prédilection de la MK classique pour les membres inférieurs ; le visage et le tronc sont fréquemment atteints.

Rarement, la MK du sida est purement ganglionnaire ou digestive. Une atteinte de la muqueuse buccale est présente dans environ 50 % des cas des MK étendues (essentiellement sur le palais), fortement corrélée à une atteinte en général asymptomatique du tube digestif (estomac, grêle, côlon, rectum).

Les localisations ganglionnaires sont fréquentes, mais rarement dépistées du vivant du malade.

L’atteinte pulmonaire fait toute la gravité de la maladie en engageant le pronostic vital.

Tous les viscères (sauf le cerveau) peuvent être atteints (en particulier, la rate, le myocarde et l’os).

Au total, 75 à 80 % des MK du sida ont des localisations viscérales, mais la masse tumorale est en règle bien représentée par l’importance des lésions cutanées.

Il est donc inutile de faire un bilan d’extension autre qu’une radiographie thoracique sauf en cas de point d’appel clinique particulier.

L’évolution de la MK est très variable.

Environ un quart des MK du sida sont très agressives (atteinte tumorale viscérale, pulmonaire en particulier, mais aussi cardiaque et surrénalienne, oedèmes considérables du visage, des organes génitaux, des membres inférieurs) ; un quart sont et restent paucilésionnelles ; enfin, la moitié des MK cutanées sont évolutives mais ne mettent pas en jeu le pronostic vital.

Le pronostic vital est principalement engagé par les infections opportunistes selon l’importance du déficit immunitaire.

La MK était, avant l’apparition des traitements antirétroviraux efficaces (highly active antiretroviral therapy [HAART]), responsable du décès de ces patients dans 25 % des cas environ.

L’arrivée de ces traitements a transformé l’évolution de la maladie qui ne met plus très souvent le pronostic vital en jeu.

Pour tenter d’uniformiser les protocoles thérapeutiques, diverses classifications ont été proposées : celle de Krown est la plus utilisée.

3- Diagnostic :

L’histologie de la MK du sida est la même que celle de la MK classique : double prolifération vasculaire (vaisseaux dilatés et tortueux à parois propres ou fentes vasculaires) et de cellules fusiformes, accompagnée d’une extravasation d’hématies (coloration de Perls positive).

Un infiltrat inflammatoire lymphoplasmocytaire accompagne souvent cette prolifération nodulaire, multifocale ou diffuse.

4- Traitement :

Les indications thérapeutiques doivent maintenant tenir compte de l’efficacité des traitements antirétroviraux.

Le plus souvent, la MK ne met pas directement en jeu le pronostic vital et le choix peut alors se porter, en fonction du nombre de lésions, vers l’abstention thérapeutique, les petits moyens locaux (exérèse, cryothérapie), la radiothérapie, l’interféron a ou une chimiothérapie peu cytopéniante comme la bléomycine.

La grande difficulté est de comparer la réponse aux différents traitements (difficultés d’homogénéiser les groupes de malades, imperfection des classifications, efficacité de l’HAART).

L’interféron a ne peut être efficace que lorsque le déficit immunitaire est modéré (plus de 200 à 300 lymphocytes CD4/mm3).

L’efficacité est dose-dépendante (de 12 à 36 millions d’unités/j), limitée par une intolérance fréquente (asthénie, fièvre) avec une fréquence de rémissions souvent partielles, de 20 à 40 %.

Les chimiothérapies sont très efficaces, en particulier les polychimiothérapies type adriamycine-bléomycine-alcaloïde de la pervenche et les taxanes (taxol, taxoter).

Leur utilisation, limitée par la survenue de cytopénies et l’aggravation du déficit immunitaire, est réservée à des MK très sévères, en particulier pulmonaires.

Les monochimiothérapies (alcaloïdes de la pervenche, étoposide, anthracyclines) partagent, à un degré moindre, ce risque, avec une efficacité plus faible (20 à 70 % de rémissions).

La bléomycine semble la chimiothérapie de choix, car peu toxique, mais les rémissions partielles ne dépassaient pas 50-80 % des cas avant l’apparition de l’HAART.

Il peut être tentant d’envisager un traitement antiviral de la MK du fait du rôle du HHV8 dans la genèse de cette maladie.

Cette approche est limitée par le fait qu’une fois le potentiel oncogène du virus exprimé, il n’est pas évident qu’un traitement antiviral soit efficace sur l’évolution de la tumeur.

Néanmoins, un tel traitement trouverait son intérêt chez les patients indemnes de maladie de Kaposi, mais infectés par le HHV8.

Des résultats préliminaires suggèrent que les antiviraux efficaces in vitro sur le HHV8 sont le foscarnet, le ganciclovir et le cidofovir, tandis que l’aciclovir et une antiprotéase proche du ritonavir seraient inefficaces.

In vivo, des réponses partielles, voire complètes, ont été attribuées au foscarnet ou au cidofovir, mais il s’agit de cas isolés et le fait que les patients recevaient en même temps une chimiothérapie et/ou un traitement antirétroviral puissant empêche d’imputer au seul anti-HHV8 le bénéfice thérapeutique observé.

On peut s’attendre à une amélioration spontanée de la MK chez les patients bénéficiant d’un puissant traitement antirétroviral, comme le suggèrent certains cas publiés et des études prospectives plus récentes.

Dans une étude de dix patients (sida avec MK) traités par antirétroviraux avec antiprotéases sans chimiothérapie ni antiviraux efficaces contre le HHV8, une réponse soit complète soit partielle est obtenue chez huit d’entre eux (taux de réponse : 80 %), et semble corrélée à l’amélioration de la fonction immunitaire (évaluée par le chiffre des lymphocytes CD4+) et à la négativation de la charge virale HHV8.

B – LYMPHOMES :

1- Lymphomes B et non T :

Les lymphomes sont fréquents au cours du sida. Ils constituent d’ailleurs un critère majeur de diagnostic.

Il s’agit, en règle, de lymphomes B ou indifférenciés, de haut grade (immunoblastiques, type Burkitt ou diffus à grandes cellules), le plus souvent extranodaux (lymphomes cérébral, digestif, médullaire, rarement leucémie aiguë lymphoblastique de type 3), plus fréquents chez les hommes, notamment les Caucasiens.

Le risque est multiplié par 60 (et par plus de 1 000 pour les lymphomes de Burkitt habituellement rares chez les immunodéprimés).

Des localisations cutanées et muqueuses ont été décrites, parfois isolées, parfois disséminées.

Elles sont rares. Dans la moitié des cas, le rôle promoteur de l’EBV semble acquis ; ailleurs, aucun facteur déclenchant n’est trouvé en dehors du déficit immunitaire T.

Quelques cas de plasmocytomes cutanés ont aussi été décrits.

2- Maladie de Hodgkin :

Des cas de maladie de Hodgkin ont également été décrits chez des patients infectés par le VIH, en règle de stade IV avec parfois une atteinte cutanée.

3- Lymphomes T :

De rares observations de lymphomes T, CD4+ et surtout CD8+ ont été publiées : une dizaine de cas d’érythrodermie (pigmentée avec parfois éosinophilie et en règle un épidermotropisme discret ou nul), des mycosis fongoïdes, des lymphomes T périphériques ganglionnaires, quelques leucémies lymphoïdes chroniques T, un lymphome cutané T anaplasique CD4+ et EBV positif.

Certains de ces patients sont co-infectés par le human T-cell lymphoma virus (HTLV) I ou le HTLV II.

D’autres présentent une infiltration pseudolymphomateuse de la peau par des lymphocytes CD8+ activés par le VIH.

C – CARCINOMES ÉPIDERMOÏDES :

Divers types de carcinomes ont été rapportés : carcinomes épidermoïdes génitaux et anaux attribués aux PVH, carcinomes basocellulaires (une cinquantaine de cas), volontiers multicentriques et superficiels, le plus souvent sur le tronc de sujets de phototype clair et s’exposant de manière importante au soleil, exceptionnellement carcinomes spinocellulaires (une dizaine de cas).

Ces carcinomes n’étaient qu’exceptionnellement induits par les PVH (deux cas).

La grande majorité était constituée par des lésions peu agressives (un seul cas d’épithélioma basocellulaire métastatique), facilement traitées (6 % seulement de récidives), en particulier par radiothérapie.

Il est actuellement impossible de savoir si la prévalence ou l’incidence des carcinomes cutanés sont augmentées chez les patients infectés par le VIH.

D – AUTRES CANCERS :

Citons quelques observations de mélanome malin quelquefois multiple ou métastatique, l’éclosion de naevi dysplasiques, quelques cancers du testicule, du côlon, du pancréas et de rares cas de myélome, léiomyome ou léiomyosarcome, rhabdomyosarcome.

Infections :

A – INFECTIONS BACTÉRIENNES :

1- Infections staphylococciques :

Les infections bactériennes staphylococciques sont fréquentes chez les patients infectés par le VIH, particulièrement chez les enfants.

Le plus souvent cutanées superficielles (folliculites surtout), elles posent de difficiles problèmes thérapeutiques par leur caractère chronique ou récidivant.

Elles s’expliqueraient par le déficit qualitatif ou quantitatif de la fonction B lymphocytaire, mais aussi par des anomalies de la fonction des polynucléaires et des monocytes-macrophages (avec, en particulier, une diminution du chimiotactisme des neutrophiles et des anomalies de l’opsonisation et de la phagocytose).

Ainsi ont été rapportées des folliculites acnéiformes chroniques (visage, thorax, fesses), des folliculites axillaires, des folliculites plus banales des membres.

Les biopsies mettent en évidence un infiltrat périfolliculaire mononucléé ou riche en polynucléaires.

Les cultures isolent parfois Staphylococcus aureus, mais sont souvent négatives.

Ces folliculites sont anormalement fréquentes, profuses et récidivantes chez les séropositifs.

Leur nature infectieuse n’est pas toujours prouvée, d’autant que les antibiotiques locaux et per os sont rarement très efficaces.

Des impétigos staphylococciques du cou et de la barbe ont été également rapportés, ainsi que des récidives d’acné, plusieurs cas de botryomycose à Staphylococcus aureus, des abcès et cellulites à staphylocoques, des ecthymas staphylococciques des membres, des intertrigos, une furonculose, des bactériémies et septicémies à Staphylococcus aureus et même deux cas de staphylococcie exfoliante.

Certaines staphylococcies cutanées des plis et du pubis, très vascularisées, peuvent ressembler à des lésions kaposiennes.

Enfin, un certain nombre de folliculites à Staphylococcus aureus pourraient rendre compte de prurit ou de prurigo en apparence inexpliqués chez les séropositifs pour le VIH.

2- Syphilis :

Les interrelations entre syphilis et infection par le VIH sont complexes.

La syphilis est un marqueur de sexualité « à risque » aussi bien chez les homosexuels que chez les hétérosexuels.

Les homosexuels VIH positifs ont des antécédents de syphilis dans 50 % des cas contre environ 20 % chez les homosexuels VIH négatifs.

À exposition égale, l’existence d’une ulcération génitale, qu’elle soit syphilitique ou non, favorise la séroconversion VIH.

Cela a été montré chez les homosexuels et en Afrique noire.

S’il n’existe pas de preuve que la syphilis modifie l’histoire naturelle de l’infection par le VIH, en revanche l’infection par le VIH peut modifier l’histoire naturelle de la syphilis.

Ainsi ont été décrites des syphilis graves, neurologiques, oculaires ou cutanées (syphilis malignes), parfois très précoces.

Des échecs de traitement par la benzathine pénicilline ont été publiés.

Des biais de publication sont certains et il est probable que la présentation ne soit pas différente de celle des patients VIH négatifs.

Malgré ces incertitudes, beaucoup d’auteurs sont partisans d’une extrême prudence : schémas thérapeutiques renforcés, ponction lombaire dès la phase secondaire.

Sur le plan sérologique, les séroréactivations illicites d’anciennes syphilis sont discutables (recontamination ?).

Les séronégativations accélérées ou au contraire les syphilis avec titres anormalement élevés des tests non tréponémiques (fausse négativité possible par phénomène de zone) sont exceptionnelles.

Une dizaine d’observations bien documentées de syphilis secondaires séronégatives ont été rapportées chez des patients infectés par le VIH.

Enfin, l’évolution sérologique sous traitement apparaît dans la grande majorité des cas comme « régulière ».

La seule exception à cette règle est la possibilité d’observer une séroréversion anormalement rapide du Treponema pallidum haemagglutination assay.

En pratique, il est indispensable de pratiquer (et de surveiller) les sérologies tréponémiques chez tous les patients infectés par le VIH et, inversement, de pratiquer une sérologie VIH à tout patient ayant ou ayant eu une syphilis.

Les modalités thérapeutiques sont encore discutées, conditionnées pour beaucoup par les résultats de la ponction lombaire.

3- Autres maladies sexuellement transmissibles :

La transmission sexuelle est actuellement le mode principal d’acquisition de l’infection par le VIH (homosexuels, hétérosexuels) : de 60 à 90 % selon les pays. VIH et autres agents responsables de MST, marqueurs de sexualité à risque, sont étroitement associés sur le plan épidémiologique et leur prévention doit être commune.

Après correction des autres facteurs de risque (type de sexualité, nombre de partenaires, ethnie, toxicomanie), les MST sont étroitement corrélées à l’acquisition de l’infection par le VIH.

Ceci est surtout vrai pour les ulcérations génitales qui favorisent la transmission du VIH par la brèche muqueuse et par la réaction inflammatoire in situ avec afflux de cellules CD4+, lymphocytes et macrophages.

Ainsi, la syphilis, le chancre mou mais aussi l’herpès génital ou anal sont des portes d’entrée importantes aussi bien en Afrique (chancre mou et syphilis) qu’en Occident (syphilis, herpès).

La gravité particulière des MST chez les patients VIH positif est bien démontrée : syphilis neurologiques précoces, herpès graves, condylomes étendus, cancers du col utérin et hépatite B d’évolution cirrhogène.

Enfin, des échecs thérapeutiques ont été publiés : benzathine pénicilline dans la syphilis, traitement minute par 250 mg de ceftriaxone dans le chancre mou, aciclovir dans l’herpès.

Les campagnes médiatiques contre le sida, enfin, ont eu pour conséquence, en particulier dans la communauté homosexuelle, de faire diminuer l’incidence des MST classiques, particulièrement de la syphilis et des gonococcies.

Mais depuis la fin des années 1990, on observe une réapparition des MST, notamment chez les patients infectés par le VIH, corrélée à la reprise de comportements sexuels à risque, phénomène connu sous le nom de relapse.

4- Angiomatose bacillaire :

La bactérie responsable (à Gram négatif), isolée à partir de sang hémolysé ou des biopsies, sur des milieux de culture spéciaux cellulaires ou non, est une Bartonella (Bartonella henselae et B. quintana).

B. henselae est transmise par les puces de chat et B. quintana par les poux de corps.

L’angiomatose bacillaire survient le plus souvent, mais non exclusivement, chez des patients infectés par le VIH, souvent, mais pas toujours, à un stade avancé.

L’angiomatose bacillaire se caractérise par des papules ou des nodules angiomateux plus ou moins profonds, parfois ulcérés, ressemblant à des botryomycomes, uniques ou multiples sur le tégument.

L’atteinte muqueuse est possible. Histologiquement, les lésions sont constituées par une prolifération cellulaire avec des cellules endothéliales turgescentes, d’aspect épithélioïde et un infiltrat riche en neutrophiles.

Des amas granuleux amorphes, correspondant aux bacilles de l’angiomatose bacillaire, sont mieux visualisés par la coloration de Warthin-Starry ou la microscopie électronique. Une atteinte multiviscérale (fièvre, altération majeure de l’état général, atteinte osseuse, pulmonaire, cérébrale, musculaire, hépatique nodulaire ou péliose), le plus souvent associée aux signes cutanés, est fréquente.

Elle est sensible à l’érythromycine, aux fluoroquinolones, aux aminosides, aux tétracyclines et à certains antituberculeux.

5- Autres infections bactériennes :

Les infections streptococciques cutanées sont également plus fréquentes chez les patients infectés par le VIH : dans l’étude de Farley, l’infection par le VIH est associée à un risque d’infection streptococcique B invasive 30 fois plus élevé que pour une population témoin non infectée par le VIH.

Ces chiffres très élevés dépassent le risque observé chez les diabétiques et les cancéreux.

Quelques observations d’adénite inguinale à streptocoque A ont été publiées.

Citons également des infections cutanées à Pseudomonas aeruginosa (plusieurs cas d’ecthyma gangrenosum), Haemophilus influenzae, Rhodococcus equi, et des cas d’ulcérations périnéales à EF4, d’arthrite purulente d’un orteil et de vascularite digestive à Neisseria gonorrhoeae, de diphtérie cutanée à Corynebacterium diphteriae non toxinogène, de folliculite du visage à Clostridium perfringens, de gangrène synergistique de Fournier (association de streptocoques anaérobies et de divers bacilles à Gram négatif) et de méningococcémies chroniques.

Des gingivites atypiques et des périodontopathies sévères, parfois mutilantes, survenant à un stade tardif de la maladie et provoquées par des anaérobies, sont également décrites.

6- Infections mycobactériennes :

* Tuberculose :

La tuberculose est l’une des infections opportunistes les plus fréquentes chez les patients infectés par le VIH, mais les localisations cutanées sont rares.

Les miliaires cutanées et les scrofulodermes semblent être les formes les plus fréquentes de tuberculose cutanée.

Dans la plupart des cas, les biopsies cutanées sont peu spécifiques, sans granulome tuberculeux, comportant seulement des microabcès dermiques riches en neutrophiles.

Le diagnostic repose sur les cultures à partir de prélèvement cutané.

* Autres mycobactéries :

Très peu de cas associant lèpre et infection par le VIH ont été publiés malgré la superposition géographique de ces deux endémies dans les pays du tiers-monde.

La prévalence de l’infection par le VIH est peut-être augmentée chez les lépreux.

Les réactions de réversion de type I sont plus fréquentes chez les patients infectés par le VIH.

Une quinzaine d’observations d’infections cutanées à Mycobacterium haemophilum a été publiée chez les patients infectés par le VIH : il s’agit en règle de nodules violacés multiples, ulcérés ou non, parfois douloureux, siégeant aux extrémités près des articulations et s’accompagnant volontiers d’arthrite, d’ostéite ou ostéomyélite, de ténosynovite.

Les infections à Mycobacterium avium, très fréquentes au stade terminal de l’infection par le VIH, ne s’accompagnent qu’exceptionnellement de manifestations cutanées. D’autres formes d’infections cutanées ont été rapportées à d’autres mycobactéries : Mycobacterium bovis, Mycobacterium marinum, Mycobacterium chelonae et Mycobacterium bovis variété bacille Calmette et Guérin (BCG).

B – INFECTIONS VIRALES :

1- Herpès simplex :

Un déficit de l’immunité cellulaire est une cause classique d’herpès chronique et le sida en est un exemple de plus. Un herpès cutanéomuqueux chronique (durant plus de 1 mois) est d’ailleurs un critère de sida.

Des herpès disséminés, cutanés ou exceptionnellement viscéraux ont été rapportés.

Quant à l’herpès récidivant périoral, génital ou anal, il semble plus fréquent chez les patients infectés par le VIH.

Les herpès chroniques périanaux chez des homosexuels ont été les premières infections opportunistes (avec la pneumocystose) qui conduisirent à reconnaître la nouvelle épidémie de déficits immunitaires plus tard rapportée au VIH.

Il s’agit d’ulcérations chroniques, multiples, confluentes, dans lesquelles l’herpès simplex virus (HSV) 2 est facilement isolé par culture.

Des tableaux similaires ont été décrits sur la vulve, le gland, le visage, la jambe, la main, le cuir chevelu.

La survenue de ces lésions chroniques est péjorative, impliquant une immunodépression profonde (< 100 CD4/mm3).

Un herpès chronique justifie un traitement par aciclovir par voie intraveineuse (15 mg/kg/j), jusqu’à la guérison, obtenue en 8 à 15 jours.

Un traitement indéfini préventif par aciclovir ou valaciclovir est quelquefois nécessaire pour éviter des récidives multiples, mais peut conduire à l’émergence de souches d’HSV résistantes à l’aciclovir (thymidine kinase deficient).

De nombreuses observations d’herpès graves résistants à l’aciclovir ont été publiées chez des patients infectés par le VIH. Ces souches restent le plus souvent sensibles au foscarnet, alternative thérapeutique de choix.

2- Varicelle :

La survenue d’une varicelle est une éventualité rare chez les adultes infectés par le VIH et le plus souvent immunisés contre cette infection après une varicelle de l’enfance.

Quelques cas de varicelle grave, nécrotique, ont été publiés.

3- Zona :

Le zona thoracique ou ophtalmique est une manifestation très fréquente chez les patients infectés par le VIH.

L’incidence du zona est 17 fois plus élevée chez les séropositifs que chez des sujets séronégatifs du même âge.

Le zona peut survenir très tôt dans l’histoire naturelle de l’infection par le VIH, en moyenne pour des taux de lymphocytes CD4 de 500/mm3.

Il peut être, de manière non exceptionnelle, la première manifestation clinique de la séropositivité, amenant à faire le diagnostic d’infection par le VIH. Il s’agit le plus souvent de zonas banals, non compliqués.

En revanche, les récidives dans le même dermatome ou à distance sont plus fréquentes et très évocatrices d’infection par le VIH.

Lorsque le déficit immunitaire est sévère, des zonas extensifs, impétiginisés, graves et nécrotiques sont possibles.

La dissémination cutanée ou viscérale est rare.

Plusieurs observations de zonas disséminés chroniques ont cependant été publiées, avec des lésions cutanées peu nombreuses, papulonodulaires, hyperkératosiques, ulcérées, fourmillant de virus varicelle-zona (VZV), ces derniers pouvant être résistants à l’aciclovir, en particulier chez des patients traités au long cours par aciclovir.

La sérologie VZV est positive.

Sur le plan thérapeutique, il est difficile de distinguer les patients relevant de l’aciclovir intraveineux de ceux relevant de l’abstention thérapeutique ou d’un traitement per os.

Les indications de la voie intraveineuse sont : la varicelle, les zonas récurrents, sévères, disséminés et ceux survenant chez des patients avec une diarrhée ou un syndrome de malabsorption.

Il semble logique d’ajouter à ces indications le zona du trijumeau, le zona multimétamérique et le zona survenant chez un patient ayant moins de 200 lymphocytes CD4/mm3, car ces formes de zona exposent aux complications.

Le traitement repose alors sur l’aciclovir par voie intraveineuse, à la posologie de 30 mg/kg/j ou 500 mg/m2 de surface corporelle trois fois par jour pendant 7 à 10 jours.

Les autres formes de zona relèvent de l’abstention thérapeutique ou des dérivés de l’aciclovir per os.

Aux États-Unis, l’aciclovir a été recommandé dans le traitement des zonas non compliqués, à la posologie de 800 mg cinq fois par jour pendant 7 à 10 jours, mais, du fait d’une mauvaise biodisponibilité par voie orale (20 %), ce mode d’administration expose à l’apparition de formes résistantes en cas d’immunodépression sévère.

Quant au famciclovir et au valaciclovir, aucune étude n’a pour l’instant documenté leur efficacité sur ce terrain mais, quitte à prescrire un traitement per os, les avantages pharmacocinétiques du valaciclovir font recommander son utilisation plutôt que celle de l’aciclovir.

En cas de résistance à l’aciclovir, on recourt au foscarnet (120 à 200 mg/kg/j) intraveineux jusqu’à la guérison clinique qui peut prendre plusieurs semaines.

4- Molluscum contagiosum :

Les molluscum contagiosum profus sont très fréquents chez les patients infectés par le VIH lorsque le taux de lymphocytes CD4 s’abaisse en dessous de 200 par mm3.

Il s’agit donc d’une infection cutanée de pronostic très défavorable.

Ce sont des molluscum contagiosum typiques, mais particuliers par leur profusion (parfois des centaines) sur le tronc, le visage, le cuir chevelu et par leur caractère récidivant.

Ces molluscum profus s’opposent aux molluscum observés chez les adultes sains (peu nombreux, surtout localisés aux régions génitales) et se rapprochent des molluscum vus chez les immunodéprimés séronégatifs pour le VIH.

Le diagnostic est parfois difficile en cas de molluscum très volumineux, profonds ou non ombiliqués.

Certaines cryptococcoses ou histoplasmoses peuvent simuler des molluscum contagiosum : en cas de doute diagnostique, un examen direct et une biopsie s’imposent.

Le traitement local (curetage ou accessoirement cryothérapie) suffit le plus souvent, mais doit parfois être répété indéfiniment dans les formes chroniques.

Le cidofovir en forme topique est peut-être efficace.

Les poxvirus (MCV 1 et 2) peuvent être isolés en peau saine adjacente des lésions, expliquant les récidives.

5- Infections à cytomégalovirus :

Les infections à CMV sont très fréquentes chez les patients VIH positifs ayant moins de 50 CD4/mm3 et constituent un critère de sida.

Il s’agit le plus souvent d’infections disséminées neurologiques, rétiniennes, pulmonaires ou digestives.

En revanche, les localisations cutanées sont exceptionnelles.

De plus, il est difficile d’en porter le diagnostic de certitude car le CMV peut être retrouvé en peau saine chez les malades virémiques pour le CMV ou dans des lésions cutanées provoquées par d’autres micro-organismes (en particulier HSV), dans des cicatrices ou au sein de lésions kaposiennes ou d’angiomatose bacillaire.

Mais les localisations muqueuses (buccales, génitales, périanales) sont plus classiques.

6- Infections par les papilloma virus humains :

Plusieurs études montrent que les infections génitales et anales (plus rarement buccales) à PVH sont plus fréquentes chez les patients séropositifs pour le VIH que chez des témoins de sexualité comparable, mais séronégatifs (condylomes génitaux chez l’homme et la femme, condylomes anaux chez les homosexuels).

Les PVH impliqués sont les PVH 6, 11, 16 et 18 le plus souvent. D’autres études ne retrouvent pas cette augmentation de fréquence.

La détection de PVH dans les voies génitales et l’anus, en l’absence de lésions cliniques, pourrait être plus fréquente chez les patients infectés par le VIH.

Par voie de conséquence, les carcinomes anaux, les dysplasies du col et les cancers du col seraient également plus fréquents.

Les cancers invasifs du col utérin sont, actuellement, considérés comme un critère de sida. Les condylomes génitaux des séropositifs sont volontiers plus profus et plus difficiles à traiter.

Condylomes et infection par le VIH sont deux MST étroitement liées sur le plan épidémiologique.

Les lésions muqueuses provoquées par les PVH favorisent également la dissémination du VIH dans la population hétérosexuelle et homosexuelle.

Par ailleurs, quelques observations de verrues disséminées (vulgaires ou planes), de papuloses bowenoïdes et d’épidermodysplasies verruciformes ont été publiées, avec de rares transformations en carcinome spinocellulaire.

7- Leucoplasie orale chevelue :

Décrite par Greenspan en 1984 chez des homosexuels séropositifs de San Francisco, la LOC n’était pas connue avant l’épidémie de sida.

Depuis 1988, une dizaine d’observations de LOC (EBV positif) ont été décrites chez des immunodéprimés non infectés par le VIH (transplantés rénaux surtout, greffés de moelle).

De rares cas de pseudo-LOC (EBV négatif) ont aussi été rapportés chez des sujets non infectés par le VIH, immunodéprimés ou non.

Elle peut atteindre tous les patients infectés par le VIH et témoigne d’une immunodépression relativement importante (en moyenne 300 lymphocytes CD4/mm3).

La LOC est constituée par des lésions blanchâtres, mal limitées, irrégulières, disposées verticalement sur les bords latéraux de la langue, s’étendant rarement sur les faces dorsale et ventrale de celle-ci, exceptionnellement sur la muqueuse jugale.

Les lésions sont adhérentes, indolores, à disposition linéaire, filiformes et s’épaississent progressivement avec un aspect hérissé (chevelu).

Elles sont facilement différenciées d’un muguet.

En règle chroniques, elles peuvent cependant subir des fluctuations, voire disparaître spontanément.

L’aspect histologique est assez particulier, proche de celui des verrues planes (acanthose, hyperkératose parakératosique exophytique, papillomatose) avec de nombreux koïlocytes (non liés à des PVH) et peu d’infiltrat inflammatoire.

L’élément capital est la présence de très nombreux virus EBV au sein des cellules épithéliales, détectés par immunohistochimie, microscopie électronique et surtout hybridation in situ qui est la technique de référence.

L’EBV est présent dans les noyaux (et/ou dans le cytoplasme) des cellules épithéliales sous forme du virion complet en réplication, fait unique dans le cadre des tumeurs liées à l’EBV.

Accessoirement, on peut trouver de manière contingente des PVH et plus rarement des levures (Candida albicans).

Le plus souvent, aucun traitement n’est nécessaire car les lésions sont peu gênantes et régressent avec le traitement antirétroviral efficace.

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