Dermatologie néonatale (Suite)

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Dermatoses néonatales rares du prématuré :

A – DERMATOSE ÉROSIVE ET VÉSICULEUSE CONGÉNITALE AVEC CICATRICES RÉTICULÉES :

Il s’agit d’une dermatose très rare de cause inconnue touchant les prématurés.

Les lésions peuvent débuter dès la naissance par des vésicules et des bulles diffuses parfois hémorragiques et des érosions recouvertes de croûtes.

Le visage, les paumes et les plantes semblent épargnées.

L’enquête infectieuse est négative.

La guérison est spontanée en 2 mois et laisse des cicatrices réticulées et atrophiques caractéristiques.

Aucune nouvelle lésion n’apparaît après la période néonatale.

Dermatologie néonatale (Suite)Plusieurs anomalies neurologiques et ophtalmologiques associées ont été rapportées mais elle peuvent être dues à la prématurité.

L’histologie cutanée au stade initial a mis en évidence un infiltrat neutrophilique aseptique dermique dans un cas et un aspect de spongiose à éosinophile dans l’autre cas.

Il est possible que ce tableau clinique soit dû à une infection bactérienne ou virale in utero mais aucune observation n’a été documentée en ce sens.

Il n’y a pas d’argument pour une origine héréditaire.

B – DERMOPATHIE RESTRICTIVE :

Cette affection est une génodermatose très rare et létale de cause inconnue.

Le mode de transmission semble être autosomique récessif.

Cliniquement, le nouveau-né est recouvert d’une peau très fine et adhérente aux plans profonds.

Le faciès est figé avec micrognathie, hypertélorisme et bouche ouverte.

Les vaisseaux cutanées sont apparents. Les membres inférieurs sont fixés en flexion.

L’histologie retrouve toujours un derme très mince contenant des annexes très peu différenciées.

Des malformations squelettiques associées sont fréquentes.

Cette affection est létale en quelques heures à quelques jours par insuffisance respiratoire restrictive.

Aplasies cutanées congénitales :

Le terme d’aplasie cutanée congénitale (ACC) décrit une absence congénitale et localisée de peau dont l’origine peut être variable.

Les ACC du cuir chevelu sont les plus fréquentes.

A – APLASIES CONGÉNITALES SIMPLES :

80 % des lésions d’ACC sont localisées au niveau du cuir chevelu, essentiellement sur la ligne médiane, près du vertex.

La transmission est autosomique dominante dans certaines familles mais la majorité des cas sont sporadiques.

Il s’agit de lésions alopéciques souvent uniques, recouvertes d’une fine membrane translucide ou siège d’une érosion qui cicatrisera dans les premières semaines de vie sous forme d’une lésion atrophique ou plus rarement hypertrophique.

L’alopécie résiduelle pourra être traitée chirurgicalement par plastie à distance.

B – APLASIES CONGÉNITALES COMPLIQUÉES :

Dans de rares cas, l’ACC du cuir chevelu est complète et s’associe à un défect osseux et parfois méningé.

Il faut le suspecter en cas d’ACC étendue, ulcérée et hémorragique.

Le bilan doit être complété en urgence par une imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale.

La prise en charge est neurochirurgicale. Une ACC peut également être l’un des éléments de plusieurs syndromes polymalformatifs dans le cadre notamment d’anomalies caryotypiques (trisomies 13 et 18).

On peut observer un ACC chez le nouveau-né survivant d’une grossesse gémellaire avec décès tardif d’un foetus (foetus papyracé).

L’un des diagnostics différentiels de l’ACC est le syndrome de loges (syndrome de Volkmann) en cas d’atteinte de l’avant-bras.

Érythrodermies et troubles de la kératinisation :

A – ÉRYTHRODERMIE NÉONATALES :

La prise en charge d’une érythrodermie néonatale pose d’une part un problème étiologique car de nombreuses affections cutanées, métaboliques, immunologiques, nutritionnelles peuvent se manifester par un tableau d’érythrodermie et d’autre part un problème de traitement qui a pour but immédiat de prévenir les complications infectieuses et hydro-éléctrolytiques.

Il est a noter que plusieurs dermatoses débutent par un érythème localisé avant de se généraliser (érythrodermie) secondairement.

1- Dermatite atopique et dermite séborrhéique :

La DA se manifeste rarement par un tableau d’érythrodermie néonatale.

En faveur de ce diagnostic, on retiendra surtout la topographie des lésions au début (convexités, face d’extension des membres, respect du siège) mais aussi la notion d’un intervalle libre par rapport à la naissance, les antécédents familiaux d’atopie, un état général souvent conservé et une réponse rapide au traitement symptomatique (dermocorticoides).

Le prurit est évalué difficilement chez le nouveau-né.

Le diagnostic différentiel principal est la dermite séborrhéique (forme érythrodermique de Leiner-Moussous) : les lésions débutent au contraire au niveau du siège et du visage (dermite bipolaire).

Les squames sont grasses, jaunâtres et plus abondantes que dans la DA, elles touchent en particulier la région médiofaciale. Le prurit est absent.

Les plis rétro auriculaires et le cuir chevelu sont touchés dans les deux affections.

Le traitement de la dermite séborrhéique comprend de soins locaux d’hygiène (changes fréquents, toilette avec syndets rincés) et des antimycosiques topiques (imidazolés, ciclopiroxolamine) en prenant garde à la toxicité des traitements locaux appliqués sur de grandes surfaces cutanées, sur peau inflammatoire et sous occlusif.

2- Ichtyoses :

Certaines formes d’ichtyoses héréditaires de transmission autosomique récessives se présentent à la naissance dans un tableau d’érythrodermie avec squames fines : il s’agit des érythrodermies ichtyosiformes congénitales sèches (EICS). Parfois, ce tableau est précédé d’un état de bébé collodion.

L’érythrodermie ichtyosiforme congénitale bulleuse (EICB), de transmission autosomique dominante, associe une érythrodermie à une fragilité cutanée avec bulles.

D’autres ichtyoses congénitales rares avec signes extracutanés peuvent se révéler par une érythrodermie : KID syndrome (surdité, ichtyose, kératite), syndrome de Sjögren-Larsson (retard mental, paraplégie spastique), syndrome de Dorfman-Chanarin, trichothiodystrophies.

3- Syndrome de Netherton :

Il s’agit d’une génodermatose de transmission autosomique récessive due à des mutations du gène SPINK 5.

Le phénotype est de gravité variable et associe une érythrodermie néonatale avec lésions eczématiformes et squames fines, un prurit intense, un retard staturopondéral fréquent, des symptômes d’allergie alimentaire sévères, des troubles hydroéléctrolytiques (hypernatrémies graves), des complications infectieuses.

Le diagnostic est posé sur la présence d’une dystrophie pilaire (trichorrexis invaginata) parfois mise en évidence en période néonatale.

4- Déficits immunitaires congénitaux :

* Syndrome d’Omenn :

Il s’agit d’un tableau associant une érythrodermie néonatale résistante aux traitements locaux, un retard staturopondéral, des adénopathies diffuses siège d’une prolifération de cellules de type histiocytaire, une hyperéosinophilie, une anémie, une hypogammaglobulinémie.

L’évolution était fatale avant la greffe de moelle osseuse. Cette affection est due à des mutations des gènes Rag1 et Rag2.

* Autres déficits immunitaires congénitaux :

Un tableau d’érythrodermie peut également s’observer au cours des affections suivantes : hypogammaglobulinémies, déficits immunitaires combinés sévères, réaction du greffon contre l’hôte, syndrome de Di George.

5- Troubles nutritionnels :

De nombreux désordres nutritionnels (carences d’apport, malabsorption ou maladies métaboliques) peuvent s’exprimer par une dermatose érythématosquameuse à début périorificiel secondairement généralisée.

Les carences en zinc, quel que soit leur mécanisme, sont l’exemple le plus typique (Acrodermatite entéropathique) mais il faut citer également les carences protéiques (Kwashiorkor), les carences en acide gras essentiels (au cours de la mucoviscidose par exemple), les carences en acides aminés au cours des aminoacidopathies.

6- Maladie de Leiner :

Ce phénotype associe une érythrodermie néonatale non congénitale, un retard staturopondéral et une diarrhée sévère.

Il ne s’agit probablement pas d’une entité autonome.

Les nouveau-nés atteints sont souvent porteurs de déficits immunitaires divers.

B – BÉBÉ COLLODION :

Il s’agit d’une forme clinique initiale commune à plusieurs types d’ichtyoses congénitale récessives caractérisée par la présence d’une membrane épaisse d’aspect collodionné recouvrant toute la surface corporelle.

1- Clinique :

L’aspect du nouveau-né est typique : la peau est recouverte dès la naissance d’une membrane épaisse, jaunâtre et luisante.

Il existe parfois un ectropion et un éclabion.

Les orteils et les doigts ont un aspect en saucisse et sont parfois le siège de strictions localisées avec risque de nécrose.

Paradoxalement, les mouvements sont peu limités.

La membrane se fissure à partir de la fin de la première semaine de vie et elle desquame pendant 3 semaines.

Le pronostic vital est aujourd’hui rarement en jeu grâce aux progrès de la réanimation néonatale.

La majorité des bébés collodions développent par la suite un phénotype d’ichtyose récessive (EICS ou ichtyose lamellaire), quelques-uns évoluent vers une ichtyose vulgaire ou vers un phénotype normal.

2- Diagnostic différentiel :

Le foetus arlequin est une ichtyose congénitale sévère caractérisée par un aspect monstrueux associant des plaques hyperkératosiques épaisses séparées par de profondes fissures, un ectropion et un eclabion sévères.

Le pronostic est souvent mauvais à court terme.

3- Traitement :

La prise en charge doit être réalisée en milieu de réanimation néonatale. Le traitement comprend :

– une prévention des déperditions hydriques et thermiques (la fonction barrière de l’épiderme est altérée) en maintenant le nouveau-né en milieu humide (incubateur) ;

– une réanimation hydroéléctrolytique adaptée au bilan des entrées et des sorties ;

– des soins locaux (émollients de type vaseline stérile deux fois par jour) réalisés de façon aseptique.

Prévention des brides de striction des extrémités ;

– une prise en charge précoce des infections locales cutanées et systémiques.

Dermatoses auto-immunes maternelles :

A – LUPUS ÉRYTHÉMATEUX NÉONATAL :

1- Définition :

Cette affection est due au passage transplacentaire d’anticorps anti- SS-A (Ro) ou plus rarement anti-SSB (La) ou anti-U1RNP.

La présence de ces anticorps chez la mère est parfois responsable d’une maladie connue (lupus subaigu, lupus érythémateux aigu disséminé, syndrome de Gougerot-Sjögren) mais est souvent asymptomatique : le diagnostic peut alors être difficile chez le nouveau-né.

Les anticorps anti-SS-A (Ro) ont un tropisme pour les cellules cardiaques foetales : ceci fait toute la gravité de cette maladie.

2- Clinique :

Les symptômes cutanés peuvent être présents dès la naissance ou apparaître après plusieurs semaines.

Ils touchent environ 40 % des nouveau-nés atteints de LEN et associent des lésions érythématosquameuses annulaires localisées aux régions périorbitaires et au cuir chevelu (aspect de pseudoteigne), des télangiectasies et une photosensibilisation.

L’histologie et l’immunofluorescence directe retrouvent les caractéristiques du lupus subaigu.

La présence d’anticorps anti-Ro circulants est retrouvée chez tous les nouveau-nés atteints.

Les symptômes extracutanés sont dominés par l’atteinte cardiaque.

Environ 50 % des nouveau-nés atteints de LEN ont un bloc de branche complet congénital parfois gravissime.

Les autres symptômes sont plus rares (hépatite cholestatique, thrombopénie, splénomégalie).

3- Prise en charge :

Nouveau-né : les lésions cutanées guérissent spontanément après 6 mois à 1 an.

Une photoprotection stricte est conseillée.

La prise en charge des troubles de conduction cardiaque est réalisée en milieu de cardiologie pédiatrique.

La mère d’un nouveau-né atteint est à risque de développer une maladie auto-immune au cours de sa vie (si elle n’est pas déjà atteinte), surtout si l’enfant atteint avait des manifestations cutanées isolées et de donner naissance à un nouveau-né atteint de LEN au cours d’une grossesse ultérieure (15 % des cas).

Un traitement par corticothérapie générale pendant la grossesse permet de diminuer ce risque.

B – PEMPHIGOÏDE GESTATIONNELLE :

Il s’agit d’une maladie bulleuse auto-immune rare de la femme enceinte.

Le passage transplacentaire d’auto-anticorps maternels dirigés contre l’antigène BP 180 de la jonction dermoépidermique est parfois responsable d’une dermatose bulleuse néonatale transitoire.

Les lésions bulleuses peuvent prendre une disposition herpétiforme chez le nouveau-né et s’associer à des maculopapules érythémateuses.

La maladie guérit spontanément en 1 mois chez le nouveau-né.

Le risque de prématurité et de retard de croissance intra-utérin est légèrement augmenté chez les nouveau-nés de mère atteintes.

Le diagnostic est évoqué par l’anamnèse maternelle mais peut être confirmé par l’histologie (clivage sous-épidermique) et l’immunofluorescence directe (dépôt de C3 et d’IgG le long de la membrane basale).

C – PEMPHIGUS NÉONATAL :

Une mère atteinte de pemphigus peut transmettre des anticorps par voie transplacentaire au foetus qui présentera une dermatose bulleuse néonatale caractérisée par des bulles fragiles parfois de grande taille guérissant spontanément en quelques jours.

Manifestations cutanées des dysembryoplasies :

Les manifestations cutanées des dysembryoplasies sont un vaste groupe de pathologie habituellement bénignes dues à des anomalies de l’embryogenèse.

A – LÉSIONS DE LA RÉGION CERVICOFACIALE :

1- Kystes et sinus préauriculaires :

Ces lésions sont dues à une anomalies de fermeture des deux premiers arcs branchiaux.

Il s’agit cliniquement d’un nodule ou d’une dépression ponctiforme situés en avant et en haut des tragus.

Il existe parfois un trajet fistuleux borgne responsable d’épisodes de surinfections à répétition qui impose une exérèse chirurgicale soigneuse.

Des cas familiaux avec transmission autosomique dominante sont fréquents.

Le traitement des lésions asymptomatiques est discuté.

2- Fibrochondromes ou tragus accessoires :

Ce sont des lésions nodulaires pédiculées de consistance ferme, cartilagineuse, situées en avant des tragus ou en regard du muscle sterno-cléido-mastoïdien.

Ils sont souvent pileux. Ces anomalies fréquentes s’intègrent exceptionnellement dans des syndromes polymalformatifs (syndrome oculoauriculovertébral de Goldenhar).

Le traitement est chirurgical.

3- Kystes dermoïdes :

Ils sont dus à une inclusion épidermique le long des lignes de fusion embryonnaires.

Il s’agit de lésions congénitales fréquentes situées souvent dans la région périorbitaire (kyste de la queue du sourcil) ou au niveau de la ligne médiane (fontanelle antérieure).

Cliniquement, le kyste dermoïde est un nodule hypodermique (parfois sous aponévrotique) de consistance ferme.

L’exérèse chirurgicale est souvent réalisée dans l’enfance.

4- Kyste thyréoglosse :

Cette lésion résulte d’une anomalie de fermeture du tractus thyréoglosse.

C’est la cause la plus fréquente de masse cervicale médiane entre 6 mois et 15 ans.

Le kyste siège souvent en regard de l’os hyoïde et est mobile lors de la protrusion de la langue. Le traitement est chirurgical.

5- Kyste bronchogénique :

Il s’agit d’un nodule congénital parfois fistulisé à la peau localisé le plus souvent en avant du sternum ou dans les région scapulaires et deltoïdienne.

Ces lésions sont dues à des anomalies de développement de l’arbre trachéobronchique.

Le traitement doit être chirurgical afin de prévenir les surinfections.

B – SIGNES CUTANÉS DES DYSRAPHIES SPINALES FERMÉES :

Les dysraphies spinales sont des anomalies de fermeture de la partie caudale du tube neural.

Elles se manifestent dans la moitié des cas par des lésions cutanées variées souvent congénitales situées sur la ligne médiane dorsale.

Cette topographie doit systématiquement faire évoquer ce diagnostic.

Les différents signes cliniques des dysraphies spinales fermées sont énumérés dans l’encadré ci-dessous.

C – SIGNES CUTANÉS DES TUMEURS DE LA LIGNE MÉDIANE CÉPHALIQUE :

Plusieurs lésions congénitales peuvent être localisées au niveau de la ligne médiane céphalique : kystes dermoïdes, méningo- et encéphalocèle, tissu cérébral ectopique, gliome nasal.

Il est nécessaire de réaliser un bilan clinique et radiologique neurologique (IRM cérébrale) pour rechercher une communication avec le système nerveux central avant d’envisager tout acte chirurgical.

Les méningocèles et encéphalocèles sont dus à des anomalies de fermeture du tube neural encéphalique.

Ils se manifestent par des nodules souvent congénitaux de consistance molle recouverts d’une peau atrophique.

Les antécédents familiaux sont fréquents. Quatre caractéristiques doivent faire évoquer ces diagnostics :

– la topographie encéphalique médiane (plus souvent postérieure) ;

– la présence de cheveux anormaux (plus longs et de couleur différente) en couronne autour de la lésion ;

– l’augmentation de leur volume lors des pleurs et de la toux ;

– la notion de méningite à répétition. Dans le cas du gliome nasal, il s’agit de tissu cérébral hétérotopique séquestré dans la région nasale lors du développement embryonnaire.

Le nodule, de couleur bleutée ou rosée est souvent latéralisé par rapport à la ligne médiane du nez et n’est pas pulsatile.

Dans 30 % des cas il est localisé en intranasal et n’est pas visible à la naissance.

Plusieurs diagnostics doivent être évoqués devant une masse nasale médiane congénitale (voir encadré).

On peut observer du tissu cérébral hétérotopique dans des localisations diverses, en particulier au niveau du cuir chevelu.

La présentation clinique est alors proche de celle de méningocèles.

L’IRM ne retrouve pas de communication avec le contenu du crâne.

Nodules du nouveau-né :

Un nodule cutané est une lésion palpable arrondie d’un diamètre supérieur à 1 cm.

Il peut être superficiel ou profond (hypodermique).

Les étiologies des nodules du nouveau-nés sont multiples.

Il nous semble logique de les classer en fonction de leur pronostic car cela correspond à une démarche clinique pratique.

Ainsi, les nodules à pronostic malin (neuroblastomes, sarcomes, localisations cutanées des leucémies) devront être systématiquement évoqués dans cette tranche d’âge.

Les nodules à pronostic bénin ne nécessitent souvent qu’une simple surveillance clinique.

Enfin, un certain nombre de nodules sont de pronostic indéterminé (histiocytoses langerhansiennes, fibromatoses).

A – NODULES DE PRONOSTIC BÉNIN :

1- Hémangiomes :

* Hémangiomes classiques :

Les hémangiomes ou angiomes immatures sont fréquents (10 % des nouveau-nés à l’âge de 1 mois) et apparaissent après la naissance, au cours des premières semaines de vie.

Le sexe féminin et la grande prématurité sont des facteurs de risque.

Les localisations viscérales sont rarissimes (hémangiomatose miliaire).

La lésion débute souvent par une macule télangiectasique ou anémique qui évoluera en trois phases caractéristiques : une phase de croissance durant 6 à 12 mois pendant laquelle l’hémangiome prend l’aspect caractéristique de tumeur vasculaire en relief (« angiome fraise » ou tubéreux, angiome sous-cutané ou angiome mixte), puis une phase de stabilisation et enfin une phase de régression spontanée qui débute par le blanchiment central le l’hémangiome.

Les lésions ont disparu à l’âge de 6 ans dans 80 % des cas.

L’abstention thérapeutique est la règle, cependant quelques situations à risque nécessitent une discussion thérapeutique multidisciplinaire : il s’agit surtout des lésions périorificielles (periorbitaires, périvulvaires ou périanales) pouvant poser un problème fonctionnel ou algique en cas de lésion ulcérée.

Le traitement fait alors appel à la chirurgie et/ou à la corticothérapie générale ou locale en injection intralésionnelle.

* Hémangiome congénital :

L’hémangiome congénital est rare. Cliniquement, il s’agit d’une lésion tumorale bleutée souvent volumineuse de consistance grumeleuse et d’aspect inquiétant.

La confirmation diagnostique passe souvent par la biopsie afin d’éliminer une tumeur maligne.

Ses caractéristiques histologiques sont proches de l’hémangiome classique mais il existe des différences sur le plan immuno-histochimique (absence d’expression de GLUT-1).

L’hémangiome congénital croît rapidement en volume mais se stabilise plus tôt qu’un hémangiome classique et régresse avant 1 an.

L’abstention thérapeutique est la règle en période néonatale.

* Phénomène de Kasabach-Merritt :

Le phénomène de Kasabach-Merritt correspond à un processus de coagulation intravasculaire au sein d’un angiome congénital particulier (hémangioendothéliome kaposiforme ou angiome en touffe).

Il faut y penser devant un angiome inflammatoire augmentant rapidement de volume et douloureux.

Le diagnostic est biologique (thrombopénie, fibrinogène bas, produits de dégradation de la fibrine élevés). Le pronostic vital est parfois en jeu en cas de thrombopénies sévères.

2- Naevi congénitaux :

Les naevi mélanocytaires congénitaux géants atteignent parfois 20 cm de diamètre à la naissance et touchent souvent la région cervicodorsale.

Ces lésions ont souvent un aspect verruqueux ou nodulaire en surface et/ou une hyperpilosité traduisant l’implication de contingents non mélanocytaires dans un hamartome complexe mélanocyto-épidermique.

Le risque de voir apparaître au cours de la vie un mélanome sur ces lésions est de 2 à 10%, ce risque semble maximum pendant les premières années de vie.

De plus, les conséquences esthétiques de ces naevi géants sont majeures : le traitement de choix est donc chirurgical, il doit être précoce et nécessite souvent des interventions répétées.

Les naevi mélanocytaires de taille moyenne (inférieure à 10 cm) et petite (inférieure à 2 cm) semblent avoir un pronostic meilleur, leur exérèse chirurgicale précoce est très discutée.

3- Mastocytomes :

Les mastocytomes sont des lésions nodulaires souvent congénitales, uniques, jaune pâle dont la palpation provoque parfois une urticaire (signe de Darier) ou une bulle.

Les mastocytoses disséminées sont rares chez le nouveau-né.

L’histologie retrouve un infiltrat cellulaire dense et monomorphe dans le derme prédominant aux zones péripilaires et périsudorales.

La coloration par le bleu de toluidine permet de mettre en évidence les granulations intracytoplasmiques. L’évolution est spontanément favorable à long terme. Un bilan d’extension n’est habituellement pas justifié.

4- Hamartomes :

Les hamartomes conjonctifs sont des lésions dysembryoplasiques dermiques habituellement isolées touchant plus ou moins sélectivement une des composantes du derme (collagène, tissu élastique, tissu musculaire lisse) ou de l’hypoderme.

L’hamartome élastique est une plaque allongée jaunâtre avec lésions papuleuses péripilaires, de topographie thoracique.

Il peut s’associer rarement avec une ostéopoecilie dans le cadre du syndrome de Buschke-Ollendorff.

Les hamartomes fibreux sont des lésions nodulaires de consistance ferme à surface mamelonnée.

Les hamartomes musculaires lisses sont des lésions à surface irrégulière, « gaufrée », en plaque.

On observe souvent une hyperpilosité en surface.

La palpation peut déclencher une discrète augmentation du volume de la lésion (pseudo-signe de Darier).

Les hamartomes sébacés (hamartomes sébacés de Jadassohn) sont des tumeurs fréquentes du cuir chevelu, souvent congénitales (70 % des cas).

Cliniquement, il s’agit d’une plaque alopécique ovalaire ou allongée, rose ou jaune pâle.

La lésion devient verruqueuse à partir de l’adolescence. Dans 20 % des cas, la lésion touche la face.

Des tumeurs bénignes variées et exceptionnellement des carcinomes basocellulaires peuvent se développer à partir de ces lésions à l’âge adulte : ceci justifie pour certains leur exérèse chirurgicale précoce complète.

Dans de rares cas ces lésions sont associées à un syndrome polymalformatif (anomalies cérébrales, ophtalmologiques et/ou osseuses) dans le cadre du syndrome de Schimmelpenning.

5- Cytostéatonécrose néonatale :

La cytostéatonécrose néonatale (CSN) est caractérisée cliniquement par des nodules hypodermiques fermes d’allure inflammatoire situés dans les régions dorsales hautes et cervicales et histologiquement par une hypodermite lobulaire (panniculite) avec présence de cristaux intra-adipocytaires.

Les facteurs favorisants sont principalement les situations d’hypoxie prolongée néonatale et les traumatismes locaux lors de l’accouchement.

Bien que ce tableau soit différent de la panniculite au froid de l’enfant et de l’adulte, l’hypothermie néonatale joue probablement un rôle physiopathologique important car le tissu graisseux du nouveau-né, riche en acides gras saturés, a une température de liquéfaction plus élevée que chez l’adulte, ce qui expliquerait sa cristallisation au cours des CSN.

Les nodules peuvent se fistuliser à la surface de la peau ou se calcifier.

Il est important d’évoquer ce diagnostic car il impose une surveillance clinique et biologique durant quelques mois.

En effet, des complications à type d’hypercalcémies parfois sévères ont été rapportées jusqu’à 2 mois après la naissance.

Dans ces cas le traitement doit être rapidement institué (corticoïdes, diurétiques, biphosphonates).

La présence d’une CSN impose l’arrêt du traitement prophylactique par vitamine D jusqu’à résorption complète des lésions pour limiter le risque d’hypercalcémie.

6- Histiocytoses non langerhansiennes :

Le xanthogranulome juvénile est rarement congénital.

Il s’agit d’une lésion papuleuse ou nodulaire de couleur jaune orangé localisée dans la région cervicofaciale ou sur le tronc.

Dans la moitié des cas les lésions sont multiples.

Les localisations extracutanées sont exceptionnelles : l’atteinte oculaire est la plus fréquente d’entre elles.

Aucun examen complémentaire n’est nécessaire en l’absence de symptomatologie associée excepté dans les formes profuses et géantes du nouveau-né.

Il faut signaler deux associations rares : les leucémies myélomonocytaires chroniques juvéniles (il est justifié de demander une numération formule sanguine dans les formes diffuses) et la neurofibromatose de type 1.

Les lésions régressent spontanément en quelques mois ou années : l’abstention thérapeutique est donc la règle.

7- Nodules calcifiés du nouveau-né :

Les calcifications cutanées du nouveau-né sont d’origine multiple :

– tumeur bénigne calcifiée (pilomatricome, kyste sébacé) ;

– iatrogènes : injection intradermique de solutions contenant du calcium ou de la vitamine E, perfusions répétées au niveau des talons ;

– post-traumatiques (hématomes calcifiés) ;

– idiopathiques (nodule calcifié de Winer)

Les ostéomes cutanés sont rares et peuvent révéler un syndrome d’Albright.

B – NODULES DE PRONOSTIC INTERMÉDIAIRE :

1- Histiocytoses langerhansiennes :

* Histiocytose congénitale de Hashimoto-Pritzker :

Le tableau clinique est celui de multiples papulonodules rouge sombre prédominant sur la partie supérieure du corps, apparaissant dans les premiers jours de vie et évoluant en quelques semaines vers la nécrose et la disparition spontanée.

Aucun traitement n’est nécessaire.

Les cellules de l’infiltrat expriment les marqueurs des cellules langerhansiennes (protéine S100, CD1) et la microscopie électronique retrouve des granules de Birbeck : ces caractéristiques ne permettent donc pas d’éliminer une prolifération histiocytaire langerhansienne maligne de type maladie de Lettere-Siwe : le diagnostic de certitude ne peut donc être porté qu’après la disparition complète des lésions et la surveillance clinique doit être prolongée chez ces enfants.

* Maladie de Letterer-Siwe ou histiocytose disséminée :

C’est une affection maligne caractérisée cliniquement par des intertrigos chroniques et un aspect de dermite séborrhéique atypique du cuir chevelu.

La lésion élémentaire est une petite papule kératosique brun clair, parfois purpurique : le diagnostic repose sur l’immunomarquage de l’infiltrat cellulaire cutané et impose un bilan d’extension à la recherche de localisations viscérale qui conditionneront le pronostic.

Rare chez le nouveau-né, elle touche plus souvent le nourrisson.

2- Fibromatoses :

Il s’agit d’un groupe d’affections rares de diagnostic histologique difficile et de pronostic variable.

La prolifération cellulaire est sous-cutanée et intéresse souvent les muscles.

Les lésions sont cliniquement des nodules profonds de consistance ferme, mal limités, uniques ou multiples, parfois ulcérés en surface.

Le traitement est l’exérèse chirurgicale large.

Les métastases viscérales sont exceptionnelles.

Les formes de pronostic globalement favorable sont les myofibromatoses cutanées et osseuses (formes solitaires et multiples), la fibromatose infantile digitale (malgré de fréquentes récidives postchirurgicales) et la fibromatose infantile desmoïde.

Les formes de pronostic défavorable sont les myofibromatoses disséminées avec atteinte viscérale.

C – NODULES DE PRONOSTIC MALIN :

Les localisations cutanées de processus tumoraux malins doivent être suspectés devant toute lésion nodulaire néonatale, a fortiori si les lésions sont multiples, leur évolution en volume et en nombre rapide et s’il existe des signes systémiques (mauvaise prise pondérale, adénopathies, hépatosplénomégalie).

Toute suspicion de nodule tumoral malin doit conduire rapidement à la réalisation d’une biopsie cutanée.

1- Neuroblastome métastatique :

Le neuroblastome est la tumeur maligne la plus fréquente chez l’enfant.

Un tiers des nouveau-nés atteints présentent des métastases cutanées, souvent révélatrices et congénitales : ce sont des nodules violacés et fermes, nombreux, dont la palpation fait apparaître un îlot de vasoconstriction périphérique et provoque parfois des signes systémiques (flushs, poussée hypertensive).

2- Autres tumeurs malignes :

Elles sont représentées par :

– les sarcomes (rhabdomyosarcomes, dermatofibrosarcomes, angiosarcomes) ;

– les localisations cutanées des leucémies myélocytaires (LAM4 et LAM5).

Les localisations cutanées sont présentes dans 25 à 30 % des leucémies congénitales.

Cliniquement, il s’agit de nodules violacés multiples.

Le tableau clinique peut être celui d’un Blueberry muffin baby 

Très rarement, elles peuvent précéder de plusieurs mois la leucémie.

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