Dermatite atopique

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La dermatite atopique, auparavant appelée eczéma constitutionnel, est une affection assez commune touchant 2 a 3% de la population. Elle débute, dans la plupart des cas, dans la première enfance et guérit alors le plus souvent avant l’age adulte. L’évolution est chronique avec des poussées entrecoupées de rémissions. Des surinfections sont fréquentes.

Cette dermatose est fréquemment associée, simultanément ou successivement, a d’autres manifestations atopiques: asthme, rhinite allergique, conjonctivite allergique.

Il existe une prédisposition génétique, attestée par la fréquence des antécédents familiaux d’atopie et la concordance entre jumeaux homozygotes.

Dermatite atopiqueDes facteurs d’environnement jouent un rôle dans le déclenchement des poussées. Le rôle déclenchant ou aggravant de certains allergènes aéroportés comme dans l’asthme (acariens, pollens, moisissures), ou alimentaires est probable mais difficile a identifier.

Le traitement, essentiellement local, consiste a traiter chaque poussée par des dermocorticoides et une antisepsie cutanée. En dehors des poussées, un traitement hydratant doit être poursuivi très régulièrement.

Aucun examen complémentaire n’est nécessaire pour le diagnostic. Il faut expliquer aux parents que cette affection guérira spontanément en quelques années dans la majorité des cas.

Diagnostic :

SIGNES CLINIQUES :

Age de début: la dermatite atopique apparaît le plus souvent a partir de 2ou 3 mois.

Le diagnostic est avant tout clinique et repose:

* sur l’examen clinique:

– notant l’aspect des lésions et leur topographie.

– en tenant compte de l’age du patient.

* sur l’interrogatoire recherchant:

– la notion d’antécédents familiaux d’atopie.

– et d’un prurit, qui est un signe fonctionnel constant. Celui-ci peut tre parfois insomniant.

Avant l’age de deux ans

* Aspect des lésions:

– pendant la poussée, les lésions d’eczéma sont des plaques érythémateuses (rouges), avec une phase microvésiculeuse transitoire (car les microvésicules sont vite érodées par le grattage).

– Les plaques sont mal limitées avec une bordure émiettée (signifiant qu’il existe quelques lésions de plus petite taille en périphérie des plaques) contrairement au psoriasis.

– puis, les lésions deviennent suintantes et enfin croéteuses.

– en fin de poussée, les lésions sont érythémateuses et sèches, avec une fine desquamation.

* Topographie des lésions:

– les lésions prédominent sur les zones convexes du visage: joues, front, menton épargnant la région centrofaciale et sur les faces d’extension des membres. le pouce sucé est souvent atteint.

– le cuir chevelu peut être atteint avec quelques plaques érythématosquameuses.

Après l’age de 2 ans

* Aspect des lésions: elles prennent un aspect lichénifié (avec un aspect épaissi de la peau, secondaire au grattage) et sont plus fixes.

* Topographie des lésions:

– les lésions se localisent aux plis de flexion: creux poplités, plis des coudes, plis rétro-auriculaires, ainsi que sur le cou-de-pied et aussi sur le dos des mains, la région péribuccale. Les mamelons, le pubis peuvent être atteints chez l’adulte.

– des formes très discrètes sont limitées a des eczématides qui sont des petites zones de peau sèche un peu rugueuses a la palpation, parfois dépigmentées (eczématides achromiantes) et non prurigineuses.

Signes associés

* La xérose cutanée (sécheresse de la peau) est quasi constante, variable, parfois très prononcée. Elle persiste entre les poussées et nécessite un traitement. Parfois, il s’agit d’une véritable ichthyose vulgaire. La peau est facilement irritée par le contact avec la laine, la sueur, les détergents chimiques.

* Une fissure sous-auriculaire située sous la zone d’attache du lobule de l’oreille.

* Signe de Dennie-Morgan ou double pli de la paupière inférieure.

EXAMENS COMPLEMENTAIRES :

Les examens complémentaires sont inutiles en pratique courante, le diagnostic devant être clinique.

* Des anomalies biologiques reflétant le terrain atopique sont fréquemment retrouvées, mais elles ne sont pas constantes ni spécifiques:

– une hyperéosinophilie.

– une augmentation des IgE totales.

* L’enquète allergologique par la recherche d’IgE spécifiques, d’allergènes alimentaires ou de pneumoallergènes (RAST), ainsi que la recherche d’allergie immédiate par « prick tests » ne sont pas nécessaires en pratique courante. On les réservera aux cas sévères.

* La biopsie cutanée ne doit pas être pratiquée en routine. Elle montrerait une histologie d’eczéma.

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL :

* Chez le nourrisson, le principal diagnostic est la dermite séborrhéique, mais qui est plus précoce, débutant dès le premier mois. Elle atteint les plis du visage, les sourcils et le cuir chevelu avec des squames grasses. Cette dermite guérit sans récidive, mais des formes étendues avec atteinte du tronc et du siège (maladie de Leiner-Moussous) pourraient évoluer vers une dermatite atopique ou vers un psoriasis.

* Chez l’adulte, en cas d’eczéma de contact  on retrouve un facteur déclenchant comme l’application d’un cosmétique ou d’une crème. La guérison définitive est obtenue après l’éviction de l’allergène.

ASSOCIATIONS :

* Manifestations atopiques:

– asthme, surtout dans un tiers des cas, qui peut être simultané ou apparaître secondairement, parfois même après guérison de l’eczéma. Il serait plus fréquent en cas de dermatite atopique sévère.

– rhinite allergique.

– conjonctivite atopique.

* Certains déficits immunitaires congénitaux sont accompagnés de lésions de dermatite atopique: maladie de Buckley, syndrome de Wiskott-Aldrich. Dans ces cas, la dermatite atopique est associée à un cortège d’infections sévères.

Évolution :

* L’évolution se fait par poussées entrecoupées de rémissions:

– plus de 50% des cas disparaissent avant l’age de 2 ans.

– la disparition complète avant l’age adulte est fréquente (80% des cas).

* Les facteurs faisant redouter la persistance a l’age adulte sont:

– la sévérité de l’atteinte pendant l’enfance.

– le début précoce.

– les antécédents familiaux de dermatite atopique.

– l’atteinte des mains.

Complications :

COMPLICATIONS INFECTIEUSES :

Les complications infectieuses locales sont fréquentes.

* L’impétiginisation:

– est la surinfection des lésions au stade érosif et suintant par des staphylocoques ou des streptocoques.

– est favorisée par la rupture de la barrière cutanée au niveau des lésions, le grattage, la colonisation des lésions d’eczéma par le staphylocoque doré.

– se traduit par l’apparition de pustules, de croétes jaunatres, d’adénopathies.

* La surinfection par le virus de l’herpès est grave, aboutissant a une dissémination du virus sur la peau, appelée syndrome de Kaposi-Juliusberg qui doit être traité par aciclovir (Zovirax*) IV. Le contact avec des sujets souffrant d’un herpès doit être évité impérativement.

* D’autres infections virales sont fréquentes:

– verrues liées aux Papillomavirus.

– et Molluscum contagiosum liées aux Poxvirus.

ABUS DE DERMOCORTICOIDES :

Les complications du traitement sont rares. Elles sont parfaitement évitables si le traitement est bien conduit.

* Les complications locales surviennent au site d’application des dermocorticoides:

– atrophie cutanée (télangiectasies, peau fine et très fragile, vergetures).

– hypertrichose.

– infections cutanées.

– granulome glutéal: lésions papuleuses et nodulaires du siège, survenant quand le dermocorticoide est appliqué sous occlusion sous les couches.

* Les complications générales liées a l’absorption percutanée sont secondaires a un abus massif et prolongé des dermocorticoides et sont les mêmes que celles de la corticothérapie générale avec syndrome cushingoide, retard de croissance, insuffisance surrénale, diabète, ostéoporose.

ERYTHRODERMIE :

Complication rare, l’érythrodermie est favorisée par un effet retard lié a l’arrêt brutal d’un traitement dermocorticoide appliqué en excès ou d’une corticothérapie générale intempestive.

Traitement :

TRAITEMENT LOCAL :

Le traitement est essentiellement local.

Corticothérapie locale :

La corticothérapie locale est utilisée pendant les poussées.

Prescription

La prescription de la corticothérapie locale doit répondre à certaines exigences, qui seront détaillées sur l’ordonnance:

* être utilisée sur une peau non infectée, après la toilette, car les corticoides favorisent les infections.

* en quantité modérée:

– sur les lésions seulement (la peau saine n’étant pas traitée).

– en fine couche.

– un nombre limité de tubes sera prescrit.

– pour une durée limitée qui sera précisée, l’ordonnance n’étant pas renouvelable, sauf indication contraire.

* l’arrêt doit être progressif sous peine de rebond.

* les paupières et le siège (tant qu’il y a des couches) ne doivent pas être traités.

* le visage doit être évité dans la mesure du possible.

Choix du dermocorticoide

Le choix du dermocorticoide dépend de l’importance et du siège des lésions:

– niveau 3 pour le visage et les lésions peu importantes du corps.

– niveau 2 pour les lésions importantes du corps.

* Les dermocorticoides sont classés en quatre niveaux d’activité: du plus fort, dit « niveau 1 », au plus faible, dit « niveau 4 ».

* En respectant les modalités de prescription des corticoides locaux, les complications ne surviennent pas.

* La corticothérapie générale est contre-indiquée sauf exceptions.

Antisepsie locale :

L’antisepsie locale n’est pas obligatoire. Elle prévient les surinfections et est prescrite en période de poussées, ou elle précéde l’application des dermocorticoides.

* On peut prescrire des antiseptiques moussants (Chlorhexidine*, hexaminide, triclocarban) a utiliser purs ou dilués dans l’eau du bain et suivis d’un rinèage.

* On peut prescrire des antiseptiques en solution aqueuse ou alcoolique a utiliser purs, sans rinèage (Chlorhexidine*, hexamidine).

En dehors des poussées, les antiseptiques sont arrêtés sur les lésions.

Emollients :

Indispensables, les crèmes hydratantes seront utilisées pendant et aussi entre les poussées, pour réduire le nombre de rechutes et les démangeaisons liées a la xérose cutanée.

On utilisera pour la toilette des pains dermatologiques surgras sans savon.

TRAITEMENTS PER OS :

* Antihistaminiques anti-H1: indiqués pendant les poussées pour réduire le prurit et intéressants pour leur effet sédatif le soir, en cas de prurit nocturne.

* Antibiothérapie générale: pour traiter la surinfection, on prescrira des cures de 10 jours d’un macrolide, d’une céphalosporine de première génération ou d’une pénicilline M.

AUTRES TRAITEMENTS :

* Photochimiothérapie: administration d’UVA ou UVB. contre-indiquée avant 16 ans.

* Crénothérapie (cure thermale) dont l’efficacité n’est pas démontrée.

* Désensibilisation: non indiquée dans l’eczéma atopique (mais peut l’être pour l’asthme).

* Un régime alimentaire d’exclusion sera proposé exceptionnellement en cas d’échec des traitements locaux dans les formes sévères, si un aliment est incriminé dans le déclenchement des poussées et après enquête allergologique alimentaire positive.

* Chromoglycate disodique: en cas d’intolérance alimentaire.

* Ciclosporine dans les formes très sévères.

* Mesures de salubrité: éviction des acariens, des poussières qui peuvent aggraver l’évolution, par un ménage répété et soigneux, la suppression des moquettes et tissus muraux. Et emploi d’aérosols acaricides

* Les vaccinations ne sont pas contre-indiquées et doivent être pratiquées de préférence en dehors des poussées.

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