Cellules de la réponse immunitaire dans le poumon. Interactions entre les cellules accessoires et les lymphocytes T

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Cellules de la réponse immunitaire dans le poumon. Interactions entre les cellules accessoires et les lymphocytes T
Introduction :

Le poumon est un organe largement ouvert sur le milieu extérieur et, de ce fait, fortement exposé aux agressions exogènes.

Pour assurer sa défense, il dispose d’un système immunitaire particulièrement développé.

Cependant, d’emblée il est important de souligner qu’à l’état normal toute une série de mécanismes sont en place pour inhiber la survenue de réponses immunitaires inadéquates et assurer ainsi l’intégrité des structures parenchymateuses pulmonaires.

À ce titre, de nombreuses maladies du poumon profond sont directement le fait de réponses immunitaires incontrôlées. Parmi les cellules impliquées dans les réponses immunitaires pulmonaires, les lymphocytes T occupent une place centrale.

Ils constituent une population cellulaire hétérogène qui exerce une variété de rôles essentiels pour l’immunité.

Ainsi, une fois activés, les lymphocytes T peuvent induire la sécrétion d’anticorps par les lymphocytes B (fonction auxiliaire), exercer une activité cytotoxique directe, réguler l’activité fonctionnelle d’autres lymphocytes T ou encore recruter et activer les cellules inflammatoires (monocytes/macrophages, polynucléaires notamment).

L’activation du lymphocyte T est donc au coeur de la réponse immunitaire.

Physiologiquement, cette activation est spécifique d’antigène.

La reconnaissance d’un déterminant antigénique (épitope) par le lymphocyte T qui lui est spécifique met en jeu un récepteur membranaire présent à la surface de tous les lymphocytes T : le récepteur d’antigène ou récepteur T.

Celui-ci est intimement associé, à la surface du lymphocyte T, aux molécules CD3 nécessaires à la transduction des signaux membranaires déclenchés par l’interaction entre l’antigène et le récepteur T.

L’activation du lymphocyte T est un phénomène complexe.

Contrairement au lymphocyte B, qui reconnaît les antigènes sous leur forme native, le lymphocyte T reconnaît des fragments peptidiques d’une vingtaine d’acides aminés (épitopes T).

Une étape d’apprêtement (ou processing) de l’antigène est donc le plus souvent nécessaire.

Le lymphocyte T ne reconnaît pas l’antigène sous sa forme soluble.

Le fragment peptidique doit être présenté à la surface d’une autre cellule (dite cellule présentatrice d’antigène ou cellule accessoire) en association avec les molécules de surface du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de l’hôte.

Cette étape d’activation antigénique spécifique du lymphocyte T est retrouvée à tous les niveaux de la réponse immunitaire.

En effet, elle permet non seulement l’initiation de la réaction immunitaire mais est aussi à la base des interactions entre lymphocyte T et lymphocyte B (fonction auxiliaire), et entre lymphocyte T et cellule cible (fonction cytotoxique).

La présentation antigénique est assurée par des cellules spécialisées (macrophages, cellules dendritiques notamment) qui doivent être capables de capter l’antigène, de l’apprêter et le présenter à leur surface avec les molécules du CMH.

Plus qu’une description détaillée et systématique des cellules impliquées dans les réponses immunitaires pulmonaires, ce chapitre est une mise au point sur les interactions dynamiques entre les cellules accessoires et les lymphocytes T ainsi que leurs rôles dans l’initiation et la régulation des réactions immunitaires pulmonaires.

Les aspects suivants seront successivement abordés :

– un rappel schématique des données concernant l’activation des lymphocytes T par l’antigène ;

– une revue succincte des cellules accessoires pulmonaires ;

– une analyse des conséquences de l’activation du lymphocyte T sur le déroulement des réactions immunitaires ;

– et enfin une brève discussion concernant la localisation des interactions entre cellules accessoires et lymphocytes T au cours des réponses immunitaires pulmonaires.

Activation des lymphocytes T :

A – Reconnaissance antigénique par les lymphocytes T :

L’unité fonctionnelle qui, à la surface du lymphocyte T, permet la reconnaissance d’un antigène présenté par une cellule accessoire en association avec les molécules du CMH est le complexe CD3/récepteur T.

Tous les lymphocytes T portent à leur surface un récepteur d’antigène, spécifique d’un épitope donné, appelé récepteur T.

La majorité des lymphocytes T portent à leur surface un récepteur T constitué de deux chaînes transmembranaires alpha et bêta qui sont constituées de régions constantes et de régions variables qui réagissent avec l’antigène.

Un autre type de récepteur T constitué de deux chaînes delta et gamma a été mis en évidence à la surface d’une sous-population de lymphocytes T.

Ce type de lymphocytes, dont les fonctions ne sont que partiellement comprises, ne représente néanmoins qu’une très faible minorité des lymphocytes T pulmonaires.

L’association de l’antigène aux molécules du CMH de l’hôte est nécessaire à sa reconnaissance par le récepteur T (type alpha/bêta).

Deux types de molécules du CMH(système HLA[human leukocyte antigen] chez l’homme) existent : les molécules de classe I (HLAA, B, C) et de classe II (HLADR, DP, DQ).

Dans une population donnée, ces molécules sont hautement polymorphes, en particulier au niveau des régions de la molécule qui se lient à l’antigène.

La liaison entre antigène et molécules duCMHest lente, mais une fois établie est stable.

Enfin, la densité d’expression des molécules du CMH à la surface des cellules accessoires varie au cours de la réponse immunitaire.

La plupart des antigènes protéiques notamment bactériens doivent subir une étape de protéolyse partielle pour être reconnus par le récepteur T.

Plusieurs voies d’apprêtement antigénique existent, qui varient avec la nature de l’antigène et le type de cellules accessoires impliquées dans la réponse immunitaire.

Schématiquement, les protéines exogènes sont d’abord internalisées dans la cellule présentatrice par pinocytose ou par endocytose, et dans ce dernier cas peuvent mettre en jeu des récepteurs membranaires variés (présents à la surface des macrophages et des cellules dendritiques) ou les immunoglobulines de surface (lymphocytes B).

L’antigène internalisé subit alors une protéolyse partielle dans les vésicules lysosomiales acides puis est recyclé en partie sous forme de peptides à la surface cellulaire en association avec les molécules de classe II du CMH.

Une autre voie d’apprêtement concerne les antigènes étrangers synthétisés de façon endogène par les cellules, telles les protéines virales.

Après leur synthèse endogène, ces protéines sont dégradées dans le cytoplasme en peptides qui sont transportés dans le réticulum endoplasmique où ils se lient à des molécules de classe I récemment synthétisées, puis transitent par l’appareil de Golgi avant d’être exprimés à la surface cellulaire.

L’association des peptides aux molécules de classe I du CMH semble nécessaire à l’expression membranaire de ces dernières.

Cependant, d’autres voies d’apprêtement antigénique doivent exister pour rendre compte de la reconnaissance par les molécules de classe I des protéines internalisées ou de l’association d’antigènes endogènes à des molécules de classe II du CMH.

Un fois que le lymphocyte T a reconnu l’antigène en association avec les molécules du CMH, différents types de situations peuvent se produire :

– le lymphocyte T peut mourir par apoptose ;

– il peut devenir anergique ou tolérant (incapable de participer à la réponse immunitaire) ;

– enfin, il peut être activé et exercer un rôle central dans le développement d’une réponse immunitaire. Ainsi, la reconnaissance d’un antigène par le lymphocyte T n’aboutit pas invariablement au développement d’une réponse immunitaire.

Le type de réaction qui survient dépend de plusieurs facteurs.

En dehors de l’affinité de l’interaction entre le récepteur T et le complexe antigène-CMH, le type de signaux de costimulation (sous forme soluble ou par contact direct entre les cellules) que le lymphocyte T reçoit quand il rencontre l’antigène et l’état de différenciation du lymphocyte T au moment de cette interaction sont déterminants.

B – Signaux de costimulation :

1- Facteurs membranaires :

À côté du complexe CD3/récepteur T qui est nécessaire à l’activation antigénique du lymphocyte T, toute une série de récepteurs membranaires présents à la surface des deux types cellulaires peuvent renforcer l’interaction entre eux, délivrer des signaux de costimulation ou modifier le devenir de l’activation des deux types cellulaires induits par ces interactions.

* CD4/CD8 :

Les lymphocytesTqui expriment le récepteur antigénique de type alpha/bêta portent à leur surface de façon mutuellement exclusive les molécules CD4 (lymphocytes T auxiliaires/activateurs) ou CD8 (lymphocytes T suppresseurs/cytotoxiques) qui se lient respectivement aux régions non polymorphes des molécules de classe II (CD4) et de classe I (CD8) et renforcent l’interaction entre cellules accessoires et lymphocytes T.

Ces liaisons expliquent le fait que les antigènes présentés par les molécules de classe II stimulent les lymphocytes T CD4 alors que ceux qui se lient aux molécules de classe I mettent en jeu les lymphocytes T CD8.

* B7-CD28 :

Parmi les différentes voies de costimulation, celle qui implique le récepteur CD28 exprimé à la surface des lymphocytes T occupe une place centrale.

Ce récepteur se lie aux molécules B7-1 (CD80) et B7-2 (CD86) présentes à la surface des cellules accessoires.

Celles-ci expriment généralement B7-2 et de façon variable B7-1. Il a été montré que la stimulation des lymphocytes T par l’interaction B7-2/CD28 induit la production de nombreuses cytokines et semble importante pour la prolifération lymphocytaire.

Au cours de leur activation, les lymphocytes T expriment le récepteur CTLA-4 qui interagit, comme le CD28, avec les molécules B7.

Ces interactions modulent de façon importante le devenir de la réponse immunitaire.

2- Autres interactions membranaires :

L’interaction entre les molécules CD40 présentes à la surface des cellules accessoires et le CD40-ligand exprimé par les lymphocytes T récemment activés est aussi essentielle pour l’initiation de la réponse immunitaire T dépendante.

À côté de ces deux voies prépondérantes, de nombreuses interactions membranaires participent à des degrés divers à l’activation des lymphocytes T.

C’est le cas notamment des molécules CD2/LFA3, LFA1/ICAMs et de toute une série d’autres molécules dont le rôle est moins bien défini.

De façon intéressante, l’expression de toutes ces molécules de costimulation est modulée par des cytokines variées.

Enfin, des travaux récents ont suggéré l’existence de voies d’activation des lymphocytes T indépendantes du complexe CD3/récepteur T.

3- Facteurs solubles :

L’interaction entre le lymphocyte T et la cellule accessoire aboutit à l’activation des deux types cellulaires et résulte en la sécrétion de nombreux médiateurs solubles ou cytokines.

Il a été suggéré que la sécrétion de cytokines par les cellules présentatrices d’antigènes ou la présence à leur surface de formes membranaires de ces cytokines (exemple : IL1alpha, IL1bêta, IL6, IL12, tumour necrosis factor [TNF]) pourraient être importantes au cours de la phase d’activation des lymphocytes T.

C – État de différenciation des lymphocytes T :

Les signaux nécessaires pour activer les lymphocytes T varient selon l’état fonctionnel de ces cellules au moment de la rencontre de l’antigène.

En effet, les lymphocytes T constituent une population cellulaire hétérogène qui peut être schématiquement séparée en différents sous-groupes en fonction de leur état d’activation : les lymphocytes T « naïfs » (qui n’ont jamais rencontré l’antigène), les lymphocytes T mémoires (qui ont été antérieurement activés et qui sont revenus à un état de repos), les lymphocytes T récemment activés et les T en cours de prolifération (lignées et clones T maintenus in vitro).

Les lymphocytes T « naïfs » ont besoin de signaux d’activation qui ne sont plus nécessaires pour les lymphocytes T mémoires.

La stimulation du seul récepteur antigénique n’est pas suffisante pour activer les lymphocytes T mémoires mais suffit pour faire proliférer les lignées et les clones T dans certains modèles expérimentaux.

Enfin, le critère utilisé pour parler d’activation du lymphocyte T est aussi important à envisager. Par exemple, les liposomes portant des molécules du CMH peuvent activer les lymphocytes T si l’on en juge par l’augmentation de leur taille et la sécrétion de certaines cytokines.

En revanche, ils n’induisent pas de prolifération et peuvent même rendre réfractaires les lymphocytesTaux signaux de prolifération délivrés par des cellules accessoires.

D – Conséquences de l’activation des lymphocytes T par l’antigène :

La complexité de l’activation des lymphocytes T a permis de mieux rendre compte à la fois de la spécificité et de la diversité des réponses immunitaires développées contre des antigènes variés.

La spécificité de la réaction immunitaire est à la base de la distinction entre soi et non-soi.

Les lymphocytes T spécifiques de l’antigène sont activés et leurs fonctions effectrices s’exercent électivement vis-à-vis des cellules cibles ou des lymphocytes B qui ont rencontré le même antigène.

Néanmoins, dans les réponses immunitaires chroniques, il a été montré qu’à côté des lymphocytes T spécifiques de l’antigène, est recruté un nombre important de cellules non spécifiques qui contribuent à l’amplification de la réponse immunitaire locale.

Un des éléments qui est à l’origine de la diversité de la réponse immunitaire est constitué par la forme selon laquelle l’antigène entre en contact avec le système immunitaire.

Les antigènes particulaires, qui sont internalisés par les cellules phagocytaires, sont très vraisemblablement présentés en association avec les molécules de classe II et vont donc activer les lymphocytes CD4.

Si les signaux nécessaires pour l’activation des lymphocytesTauxiliaires (CD4) sont présents, une réponse immunitaire caractérisée par la production d’anticorps par les lymphocytesBsurvient.

Inversement, les antigènes viraux produits au cours de l’infection virale vont suivre la voie d’apprêtement endogène et, par conséquent, activer essentiellement les lymphocytes CD8 et la fonction cytotoxique.

Ainsi, la nature de l’antigène et le type de cellule accessoire qui présente l’antigène vont déterminer le type de lymphocyte T qui sera activé et ainsi directement influer sur la nature de la réponse immunitaire qui va s’ensuivre.

Cellules accessoires pulmonaires :

La majorité des cellules accessoires présentes dans le poumon sont constituées par les macrophages pulmonaires et les cellules de la lignée dendritique.

A – Macrophages pulmonaires :

Les macrophages pulmonaires, en particulier les macrophages alvéolaires (MA), représentent la population de cellules accessoires pulmonaires la mieux caractérisée.

La fonction de cellule accessoire desMAa largement été étudiée dans des systèmes expérimentaux variés tels que la réponse des lymphocytes T à des antigènes solubles, des lectines mitogéniques ou des alloantigènes.

La majorité des études ont montré que le MA était moins efficace que le monocyte sanguin autologue pour stimuler la prolifération des lymphocytes T sanguins en réponse à des antigènes solubles de rappel (tuberculine).

De même, les MA, comparés à d’autres cellules accessoires, sont relativement moins efficaces pour stimuler les lymphocytes T sanguins auxiliaires CD4, qui sont nécessaires à l’induction de la production d’anticorps par les lymphocytes B.

En revanche, les MA sont aussi performants que les monocytes sanguins pour stimuler la prolifération des lymphocytes T en présence de mitogènes et activent efficacement les lignées et les clones lymphocytaires T maintenus in vitro en présence d’antigènes solubles.

De l’ensemble de ces données, il ressort que les MAsont de bonnes cellules accessoires pour les lymphocytes T déjà activés (clones) et dans les systèmes expérimentaux où les signaux de costimulation normalement délivrés par la cellule accessoire sont remplacés par les mitogènes.

En revanche, lesMAsont des cellules accessoires médiocres pour les lymphocytes T « naïfs » et les lymphocytes T mémoires au repos.

Plusieurs hypothèses ont été avancées pour rendre compte de cette inaptitude relative des MA à exercer le rôle de cellule accessoire pour les lymphocytes T non activés.

1- Inhibition de la prolifération lymphocytaire :

Un nombre excessif de MA (ratio macrophages/lymphocytes supérieur à 1/10) a un effet suppresseur sur la prolifération lymphocytaire induite par d’autres cellules accessoires ou des substances pharmacologiques.

Les MA produisent des facteurs solubles qui sont connus pour inhiber la prolifération lymphocytaire tels que l’anion superoxyde (O2-), les leucotriènes et prostaglandines, les dérivés de la vitamine D, l’oxyde nitrique, des cytokines immunosuppressives (TGF-bêta[transforming growth factor], IL1RA) et d’autres substances moins bien identifiées.

Cependant, le blocage in vitro d’une ou plusieurs de ces substances ne restaure que partiellement la prolifération lymphocytaire.

Enfin, selon certaines études, des facteurs cellulaires membranaires non encore identifiés semblent nécessaires pour cette inhibition. Les monocytes sanguins n’ont pas d’effet suppresseur sur la prolifération lymphocytaire dans des modèles analogues, ce qui confirme qu’il s’agit d’une fonction liée à la maturation macrophagique.

Cette inhibition est néanmoins réversible car la culture deMAen présence de GMCSF (granulocyte-macrophage-colony stimulating factor) réduit de façon substantielle leurs capacités inhibitrices sur les lymphocytes T.

Enfin, les MA inhibent aussi les fonctions d’autres cellules accessoires, principalement les cellules dendritiques.

En effet, lorsque les animaux d’expérience sont déplétés en MA, leurs capacités à développer une réponse immunitaire en réponse à un antigène introduit par voie trachéale est nettement augmentée.

2- Capacité d’apprêtement et de présentation antigénique du macrophage alvéolaire :

Les MA sont de puissantes cellules phagocytaires et sont à même d’internaliser les protéines exogènes.

En effet, ils sont capables de présenter efficacement un antigène aux clones T, ce qui témoigne d’une fonction d’apprêtement intacte.

Cependant, l’incapacité de présenter efficacement par exemple Listeria monocytogenes au lymphocyte T a été attribuée à un défaut dans la fonction d’internalisation des bactéries non opsonisées.

D’autre part, il a été suggéré que l’antigène subissait une protéolyse trop importante dans le MA.

La présentation de l’antigène en association avec les molécules du CMH est nécessaire à l’activation du lymphocyte T.

Bien qu’il existe une grande disparité entre les espèces quant à la densité d’expression des molécules de classe II à la surface des MA, ce facteur est vraisemblablement secondaire chez l’homme car plus de 90 % des MAhumains expriment fortement HLA DR et DP.

D’autre part, on ne dispose pas de données qui montrent que l’augmentation de l’expression des molécules de classes II du CMH à la surface desMAaugmente leur pouvoir de stimulation des lymphocytes T.

Il a aussi été suggéré à l’aide d’études effectuées en cytométrie en flux, que les MAnormaux exprimaient peu ou pas les molécules B7-1 et B7-2 nécessaires dans la plupart des cas à l’activation des lymphocytes T.

Cependant, dans une étude très récente, nous avons montré que les macrophages des différents compartiments pulmonaires normaux, y compris les MA, exprimaient nettement ces deux molécules in situ sur des coupes congelées de tissu pulmonaire, ce qui va à l’encontre de l’idée que l’absence de ces molécules soit responsable de la faible capacité d’induction de prolifération des lymphocytes T par les MA.

Il a aussi été rapporté que le MA, comparé au monocyte sanguin, se liait moins fortement au lymphocyte T.

À ce titre, il faut noter que la densité d’expression de la molécule d’adhésion LFA1 est diminuée sur le MA.

De plus, le traitement des MA par des anticorps antigangliosides ou du periodate de sodium, qui retirent les résidus sialiques présents sur la membrane plasmique des MA, diminue leurs activités suppressives.

3- Sécrétion de cytokines :

De nombreuses études ont tenté de corréler la faible capacité des MA à stimuler les lymphocytes T à leur faible production de cytokines lymphostimulatrices, particulièrement l’IL1.

Cependant, l’adjonction de cette cytokine n’accroît pas les capacités des MA à induire une prolifération lymphocytaire T.

D’autres cytokines sont connues pour augmenter la prolifération des lymphocytesTen réponse à des antigènes (IL6, IL12, TNF-alpha), mais leur production par le MA lors des interactions avec le lymphocyte T ou l’effet de l’adjonction de ces cytokines sur la prolifération lymphocytaire T induite par les MAn’ont pas été étudiés.

4- Activités lymphostimulatrices des macrophages alvéolaires :

Il a été récemment montré que si les MA pouvaient inhiber dans certains systèmes la prolifération des lymphocytes T, ils n’affectaient pas d’autres fonctions d’activation de ces cellules comme la mobilisation du calcium intracellulaire, l’expression de l’IL2R et la production d’IL2.

De même, il a été rapporté que les MA allogéniques humains pouvaient induire une production d’IgG par les lymphocytes B.

Ainsi, les MAsemblent être en mesure d’activer certaines fonctions effectrices des lymphocytes T tout en inhibant leur prolifération.

5- Hétérogénéité des macrophages alvéolaires :

Plusieurs compartiments pulmonaires comprennent des macrophages.

Ces cellules sont présentes dans l’alvéole, l’interstitium et les vaisseaux pulmonaires.

D’autre part, les MA d’un même compartiment sont d’une maturité cellulaire très hétérogène.

Les MA immatures, qui sont très proches des monocytes sanguins, constituent de meilleures cellules accessoires que les MA matures.

Il n’a pas été possible cependant d’attribuer ce fait à une sécrétion plus importante d’IL1 par certains MA, à l’augmentation de la densité des classes II à leur surface, ou à un autre phénomène.

Des facteurs externes peuvent influencer la capacité des macrophages à exercer la fonction de cellules accessoires.

Les MA des patients fumeurs ont une capacité réduite à internaliser certains antigènes et sécrètent peu d’IL1.

De même, le tabac influe sur la production par lesMAdes facteurs inhibiteurs de la prolifération des lymphocytes T.

Enfin, la survenue de maladies pulmonaires peut modifier la capacité des MA à présenter l’antigène.

Ainsi par exemple, les MA des patients ayant une sarcoïdose sont de meilleures cellules accessoires que les MA normaux.

6- Synthèse :

Des données précédentes, il découle que les MA peuvent inhiber l’activation des lymphocytes T de façons multiples, notamment quand leur nombre dépasse celui des lymphocytes T, comme c’est le cas physiologiquement dans les alvéoles pulmonaires normales.

Il n’est donc pas paradoxal que, comparée aux autres voies de sensibilisation, la voie aérienne soit un moyen par lequel il est difficile d’induire une réponse immunitaire contre différents antigènes.

De même, la déplétion, in vivo, des MA majore de façon considérable la réponse des animaux de laboratoire à des antigènes inhalés.

Étant donné la multitude d’antigènes auxquels le poumon est constamment exposé, les MA apparaissent donc comme des cellules dont le rôle physiologique est d’inhiber la survenue de réactions immunitaires pulmonaires inappropriées.

En revanche, une fois une réaction inflammatoire initiée dans le poumon, les MAv ont pouvoir amplifier la réponse immunitaire locale, in situ, notamment en produisant des cytokines variées.

De plus, le recrutement au niveau du poumon de macrophages plus jeunes et de lymphocytes T en nombre important va favoriser le développement de la réponse immunitaire.

B – Cellules dendritiques et cellules de Langerhans :

Plusieurs études récentes suggèrent fortement que les dendritiques (CDe) et les cellules de Langerhans (CL) constituent une population de cellules accessoires importantes dans le poumon.

Ces cellules ont été décrites sous diverses appellations qui varient avec leur localisation tissulaire et leur degré de maturation et/ou différenciation.

Elles ont été indifféremment dénommées : cellules dendritiques, cellules voilées, cellules interdigitées, cellules de Langerhans.

Le terme de cellule dendritique est aussi utilisé pour désigner la lignée cellulaire dans son ensemble.

Il faut remarquer que de nombreux types cellulaires d’aspect dendritique n’appartiennent pas à cette lignée (exemple : cellules dendritiques nerveuses).

Sur le plan morphologique, les CDe présentent un corps cellulaire d’aspect étoilé, irrégulier avec des prolongements cytoplasmiques (dendrites) qui s’insèrent entre les éléments cellulaires adjacents.

En microscopie électronique, leur noyau apparaît irrégulier, indenté, bordé d’une fine couche d’hétérochromatine.

Le cytoplasme ne contient généralement pas d’inclusion phagocytaire.

À cette échelle, les CL se distinguent des autres CDe par la présence dans leur cytoplasme d’organites spécifiques : les granules de Birbeck.

Ces granules semblent intervenir dans l’internalisation de substances exogènes.

Les CL appartiennent à la lignée des CDe. Leur distribution tissulaire est cependant plus limitée.

D’une façon générale, les CL sont présentes dans les épithéliums de type squameux (épiderme, cavité buccale, nasopharynx, oesophage, estomac, col utérin, vessie) et dans l’épithélium des voies aériennes.

Les CL dérivent des autres CDe et un microenvironnement épithélial apparaît nécessaire pour la différenciation des CDe en CL.

Les CDe sont des cellules d’origine médullaire et constituent une lignée cellulaire proche des monocytes/macrophages.

Les CDe circulantes (environ 1 % des cellules mononucléées du sang) sont très probablement les précurseurs des CDe présentes dans le poumon et les autres tissus.

Les CDe sont présentes dans le poumon aussi bien dans le tissu conjonctif des gaines bronchovasculaires, que dans l’interstitium alvéolaire, le tissu lymphoïde associé à l’épithélium bronchique (BALT) que dans la plèvre viscérale, et y sont retrouvées avant la naissance.

Les CL sont localisées à l’état normal quasi exclusivement dans l’épithélium trachéobronchique où elles forment un réseau très développé du fait des interdigitations de leurs dendrites entre les cellules épithéliales.

Le nombre, la distribution et l’état d’activation des CDe/CL pulmonaires varient dans les situations pathologiques.

Alors que très peu de CL existent dans l’épithélium alvéolaire normal, ces cellules sont présentes en grand nombre dans les alvéoles de sujets fumeurs et des patients ayant une inflammation pulmonaire, tout particulièrement au niveau des zones d’hyperplasie épithéliale alvéolaire.

Ceci explique qu’à l’état normal, peu ou pas de CL sont recueillies par lavage bronchoalvéolaire (LBA) mais qu’elles sont retrouvées en nombre accru dans le LBA de sujets fumeurs et peuvent représenter jusqu’à 3 % de la cellularité totale.

De même, les CL infiltrent parfois de façon importante certains cancers bronchopulmonaires.

Une corrélation étroite a été mise en évidence entre la production locale de GM-CSF par les cellules épithéliales ou les cellules tumorales et la présence de CL, ce qui suggère fortement que cette cytokine exerce un rôle important dans le contrôle du recrutement et/ou de la différenciation des CLdans le poumon.

Chez l’animal, l’administration intratrachéale d’endotoxine ou d’interféron-delta (IFN) induit l’augmentation du nombre de CDe intraépithéliales (équivalent des CL dans les espèces murines).

La demi-vie tissulaire des CDe/CL pulmonaires est très rapide chez la souris (2 jours) mais beaucoup plus longue dans le poumon de rat après transplantation (> 1 semaine).

Dans les deux cas, les CDe intraparenchymateuses ont un turnover plus lent que les CDe intraépithéliales et une faible sous-population peut persister durant longtemps dans le poumon.

Les CDe et les CL sont des cellules mobiles qui, après la captation de l’antigène, migrent dans les ganglions lymphatiques et dans les organes lymphoïdes centraux.

À ce titre, il est important de noter que la quasitotalité des CDe présentes dans les vaisseaux lymphatiques afférents et dans les ganglions lymphatiques ne contiennent pas de granules de Birbeck.

Il est tout à fait vraisemblable que ces cellules circulantes dérivent à la fois des cellules de CLépithéliales qui ont ainsi perdu leurs granules et des autres CDe tissulaires.

Les CDe/CL pulmonaires expriment fortement à leur surface les molécules de classe I et II du CMH ainsi que de nombreux autres marqueurs membranaires impliqués dans la costimulation des lymphocytes T comme LFA1, ICAM1, LFA3, etc. Chez la souris, les CDe parenchymateuses pulmonaires sont B7-2 positives (et B7-1 négatives) alors que les CDe intraépithéliales ne semblent pas exprimer ces molécules.

Chez l’homme, à l’image des CL intraépidermiques, les CL intraépithéliales trachéobronchiques n’expriment ni B7-1 ni B7-2, ce qui suggère qu’à l’état normal ces cellules ne sont pas dotées d’activités lymphostimulatrices importantes.

En revanche, les CDe cultivées in vitro, notamment en présence de GM-CSF, expriment de façon intense ces deux molécules importantes pour l’activation des lymphocytes T.

De façon intéressante, bien que le nombre de CL augmente de façon notable aux sites d’hyperplasie épithéliale alvéolaire ou dans certains cancers bronchopulmonaires, ces cellules demeurent B7 négatives.

En revanche, au cours de l’histiocytose langerhansienne, affection caractérisée par la formation de granulomes à CL qui détruisent les bronchioles distales, les CLsont activées et expriment B7-1 et B7-2.

Des données préliminaires suggèrent que les cytokines produites dans le microenvironnement dans lequel ces cellules se trouvent dans le poumon influencent directement l’expression de ces molécules.

Les CDe/CL pulmonaires expriment aussi les antigènes CD1, la molécule CD4, les récepteurs pour l’IL2, les récepteurs membranaires des immunoglobulines (Ig) G, IgE et du fragment C3 du complément.

Les antigènes CD1, qui sont aussi présents sur les thymocytes et certains lymphocytes B, sont des hétérodimères composés de l’association d’une chaîne lourde peptidique variable et d’une chaîne légère constante : la bêta2- microglobuline. Cette structure les rapproche des molécules de classe I du CMH.

Bien que la fonction exacte des molécules CD1 ne soit pas connue avec précision, il a été récemment suggéré que ces antigènes pourraient servir de « présentoir antigénique » au lymphocyte T au même titre que les molécules du CMH et pourraient même présenter des substances non peptidiques.

Trois classes principales de molécules CD1 ont été définies sur la base du poids moléculaire de la chaîne lourde qui les compose : CD1a (49 kDa), CD1b (45 kDa), CD1c (43 kDa).

De nombreux anticorps ont été développés qui reconnaissent de façon spécifique ces différents CD1.

La détection des antigènes CD1 à la surface des CDe et des CL constitue un moyen précieux de reconnaissance et d’isolement de ces cellules.

L’expression des CD1 à la surface des cellules de la lignée dendritique varie avec leur degré de maturation et/ou de différenciation.

Ainsi, schématiquement, les CDe expriment fortement le CD1c parfois le CD1b et peu ou pas le CD1a. Inversement, les CL expriment intensément le CD1a et peu ou pas les autres antigènes CD1.

Tous les travaux qui ont évalué les capacités fonctionnelles des CDe/CL pulmonaires ont montré que ces cellules étaient d’excellentes cellules accessoires pour induire la prolifération des lymphocytes T.

D’une façon globale, les CDe sont, à nombre égal, dix à 100 fois plus puissantes que les monocytes/macrophages pour induire une prolifération lymphocytaire T.

Certains lymphocytesTqui reconnaissent des haptènes ou des antigènes ont besoin de la présence de CDe pour être activés.

De même, les CDe semblent les seules cellules accessoires qui puissent activer des lymphocytes T CD8 cytotoxiques en l’absence de lymphocytes CD4 auxiliaires.

Comme il a été dit plus haut, les MA à l’état normal inhibent les capacités de présentation antigénique des CDe/CL.

Il existe une certaine hétérogénéité au sein des CDe/CL quant à leur aptitude à exercer le rôle de cellules accessoires.Àce titre, il est important de souligner qu’une cellule donnée n’exprime pas toutes les fonctions de cellule accessoire au même moment, mais plutôt de façon séquentielle.

Ainsi, les CL sont très efficaces pour internaliser les antigènes exogènes, les apprêter et les exprimer à leur surface en association avec les molécules du CMH.

Mais, si ces cellules peuvent activer les lignées lymphocytaires T, elles ne font pas proliférer les lymphocytes T « naïfs ».

Inversement, les CL cultivées in vitro en présence de cytokines, tel le GM-CSF, ainsi que les CDe spléniques, induisent une prolifération importante des lymphocytes T au repos.

Ainsi, après exposition à l’antigène, les CL migrent vers les tissus lymphoïdes régionaux et durant ce temps elles perdent leur capacité d’apprêtement antigénique et acquièrent les capacités d’induction de prolifération lymphocytaire en partie liées à l’expression plus intense des molécules B7 à leur surface.

Ainsi, les CL apparaissent comme des cellules sentinelles, idéalement situées pour capter les antigènes et pour les transporter vers les relais lymphatiques ganglionnaires, où elles se transforment en cellules accessoires efficaces pour initier la réponse immunitaire.

Toute une série de cytokines comme le GM-CSF, l’IL1, l’IFN-delta, l’IL10 et le TNF-alpha influencent la survie et les capacités lymphostimulatrices des CDe/CL en culture.

Ainsi, il est très vraisemblable qu’au cours de réactions inflammatoires les CDe/CL acquièrent des capacités fonctionnelles nouvelles qu’elles peuvent exercer alors in situ.

De même, les CDe/CL peuvent sécréter de nombreuses cytokines comme l’IL1, l’IL6, l’IL8, l’IL12, le TNF-alpha, et le MIP (macrophage inflammatory protein) -1alpha. Toutes ces cytokines peuvent modifier les capacités fonctionnelles des lymphocytes T.

Synthèse :

En résumé, les cellules de la lignée dendritique apparaissent comme des cellules accessoires importantes dans le poumon.

La distribution particulière de ces cellules les met en situation privilégiée pour interagir avec des antigènes inhalés contre lesquels une réponse immunitaire est nécessaire.

À la lumière des données obtenues par l’étude d’autres tissus, ces cellules pourraient être capables d’activer les lymphocytes T CD8 classe I restreints contre les virus et aussi jouer un rôle dans l’immunité antitumorale.

Le rôle précis des CDe/CL dans l’activation des lymphocytes T dans le poumon représente une voie de recherche importante en pneumologie, en particulier dans les situations pathologiques.

C – Lymphocytes :

Pour pouvoir activer les lymphocytes T CD4, les cellules accessoires doivent exprimer à leur surface les molécules classe II du CMH.

Outre les macrophages et les cellules dendritiques, l’expression des molécules de classe II dans le poumon normal est limitée aux lymphocytes B, à un nombre très réduit de lymphocytes T et à certaines cellules épithéliales pulmonaires.

Les lymphocytes T sont de faibles cellules accessoires.

Les lymphocytes B peuvent activer les lignées lymphocytaires et les lymphocytes T mémoires, mais les données actuelles suggèrent que ces cellules sont incapables de stimuler les lymphocytes « naïfs ».

Cependant, la fonction de cellule accessoire des lymphocytes B pulmonaires n’a pas été évaluée.

D – Cellules parenchymateuses et inflammatoires :

La majorité des cellules nucléées expriment à leur surface les molécules de classe I du CMH et pourraient ainsi éventuellement servir de cellules présentatrices aux lymphocytes CD8.

Cependant, il a été rapporté que la densité membranaire des antigènes de classe I à la surface des cellules parenchymateuses pulmonaires était faible.

D’autre part, il semble que seules les CDe soient en mesure d’activer efficacement les CD8 en l’absence de CD4 auxiliaires.

Les cellules épithéliales pulmonaires normales, notamment alvéolaires, expriment les molécules de classe I et II du CMH.

Dans certaines circonstances pathologiques, une expression importante de ces molécules peut s’observer à la surface de cellules parenchymateuses pulmonaires variées telles que les cellules endothéliales, les cellules épithéliales alvéolaires et les fibroblastes.

Ces cellules peuvent activer des lymphocytesTCD4 maintenus en lignée ou récemment activés.

Dans certains modèles, les cellules des voies aériennes peuvent induire une prolifération lymphocytaire T en réponse à des antigènes mais d’une façon générale, les cellules parenchymateuses pulmonaires servent peu ou pas à initier une réponse immunitaire pulmonaire.

Les cellules alvéolaires épithéliales de type II semblent plutôt inhiber la prolifération lymphocytaire Tinduite par d’autres cellules accessoires sans modifier la sécrétion d’IL2.

À ce titre, il faut souligner que le surfactant est un facteur inhibiteur de la réponse immunitaire pulmonaire.

 En revanche, lors des réactions immunitaires/inflammatoires au cours desquelles des cytokines sont produites qui accroissent l’expression des molécules à la fois de classe I et de classe II du CMH sur les cellules parenchymateuses (exemple : IFN-delta), celles-ci peuvent acquérir un rôle de cellules accessoires.

De plus, le recrutement dans le poumon de lymphocytesTrécemment activés va faciliter ce rôle.

Ainsi, dans ces conditions, les cellules parenchymateuses pulmonaires peuvent participer à la réaction immunitaire pulmonaire à la fois en tant que cellules accessoires et en tant que cellules cibles.

Enfin, plusieurs travaux récents ont montré que les cellules épithéliales et mésenchymateuses pulmonaires étaient capables de produire des cytokines immunorégulatrices (IL6, GM-CSF, TGF-bêta…).

Ces cellules ont donc la capacité de signaler la survenue d’une lésion pulmonaire et de contribuer à diriger le type de réponse immunitaire ou inflammatoire en modifiant la production et la sécrétion de ces différentes molécules.

Conséquences des interactions entre cellules accessoires et lymphocytes T :

L’activation spécifique des lymphocytes T via le complexe CD3/récepteur T induit des modifications cellulaires qui concernent à la fois le lymphocyte T et la cellule accessoire.

A – Conséquences pour le lymphocyte T :

Au cours de son activation, le lymphocyte T connaît toute une série de modifications qui durent 7-10 jours et qui mettent en jeu plus de 70 gènes différents.

Trois conséquences importantes sont à noter. Le lymphocyte T prolifère.

Cette réplication semble nécessiter la synthèse nouvelle de récepteurs pour les facteurs de croissance lymphocytaires.

Ceux-ci peuvent agir sur le lymphocyte qui les a sécrétés (effet autocrine) ou sur un lymphocyte avoisinant (effet paracrine). De nombreux facteurs de croissance lymphocytaires T ont été identifiés (IL2, IL3, IL4, IL5, IL6, IL7, GM-CSF), dont la production varie avec l’état fonctionnel du lymphocyte T.

De même, la sensibilité des lymphocytes T à ces cytokines varie tout au long de la réaction immunitaire.

Le lymphocyte T subit des modifications de son phénotype de surface.

Certaines sont transitoires (expression de l’IL2R, des molécules de classe II du CMH), d’autres sont définitives (expression de CD29 qui témoigne du caractère mémoire du lymphocyte T).

Ces changements phénotypiques influencent la migration des lymphocytes T vers le poumon, leur capacité d’interaction avec d’autres cellules immunitaires ainsi que leur sensibilité aux signaux de prolifération ou d’apoptose.

Le lymphocyte T produit des lymphokines. Ces facteurs solubles sont essentiels pour diverses fonctions effectrices du lymphocyte T telles que le recrutement et l’activation des cellules inflammatoires (macrophages, neutrophiles).

Une avancée importante dans la compréhension des mécanismes de contrôle des réponses immunitaires a été apportée par la démonstration que les lymphocytes T CD4, y compris les lymphocytes T présents dans le poumon humain, pouvaient être subdivisés en sous-populations en fonction du profil de cytokines qu’ils produisent.

Ainsi, les lymphocytes TH1 produisent l’IL2, l’IFN-delta, le TNF-alpha et pas l’IL4 ni l’IL5, et inversement pour les lymphocytes TH2.

En tenant compte des propriétés fonctionnelles de ces différentes cytokines, il apparaît clair que les lymphocytes TH1 produisent des cytokines qui activent les macrophages et les lymphocytes cytotoxiques, stimulent la sécrétion d’anticorps IgA et IgG par les lymphocytes B et concourent aux réactions d’hypersensibilité retardée, alors que les lymphocytesTH2 favorisent essentiellement le recrutement et la différenciation de mastocytes et des éosinophiles ainsi que la production d’IgE, éléments qui caractérisent les réactions allergiques et antiparasitaires.

De plus, de nombreuses cytokines TH1 antagonisent la production ou l’activité des cytokines TH2 et vice versa, ce qui explique la tendance des réponses immunitaires à se différencier dans le temps.

Il est très vraisemblable que cette dichotomie s’applique aussi aux lymphocytes T CD8.

Il faut néanmoins souligner que la distinction TH1/TH2 est certainement trop schématique pour rendre compte des événements qui surviennent in vivo.

En effet, des proportions variables de lymphocytes TH1 ou TH2 ainsi que des cellules exprimant un phénotype intermédiaire (lymphocytes « TH0 ») sont vraisemblablement présentes au cours des réponses immunitaires dans le poumon.

De plus, il est bien établi que le type de cytokines produit par un lymphocyte T donné n’est pas préétabli mais dépend des signaux que celui-ci reçoit durant son activation.

Plusieurs facteurs qui contrôlent la différenciation TH1/TH2 ont été récemment identifiés.

B – Conséquences pour la cellule accessoire :

Les interactions entre le lymphocyte T et la cellule accessoire ont aussi comme conséquence de moduler les activités fonctionnelles de la cellule présentatrice d’antigène. Peu de données existent cependant concernant ces effets sur les cellules accessoires pulmonaires (macrophages et cellules dendritiques pulmonaires).

Néanmoins, les études effectuées sur d’autres tissus ont clairement montré qu’au cours de l’étape de présentation antigénique, des modifications du phénotype de surface des monocytes/macrophages et des cellules dendritiques surviennent et ces cellules sécrètent des cytokines.

La sécrétion de nombreux facteurs par les MA au cours de pathologies pulmonaires d’origine très probablement immunitaire relève certainement, du moins en partie, de leurs interactions avec les lymphocytes T.

Des études complémentaires sont nécessaires pour évaluer les conséquences sur les cellules accessoires pulmonaires des interactions avec les lymphocytes T.

Localisation de la réponse immunitaire pulmonaire :

D’une façon générale, la première rencontre entre un antigène et le lymphocyte qui lui est spécifique a lieu au niveau des organes lymphoïdes secondaires (rate, ganglions lymphatiques, plaques de Peyer ou tissus lymphoïdes associés aux épithéliums).

Ainsi, les antigènes introduits dans le poumon par voie aérienne doivent être véhiculés vers les organes lymphoïdes régionaux (ganglions) ou systémiques pour y activer les lymphocytes spécifiques.

En effet, l’étude du phénotype de surface des lymphocytes T recueillis par LBAa clairement montré que ces cellules avaient un phénotype mémoire qui témoigne de leur activation préalable.

L’absence de lymphocytes T « naïfs » dans les alvéoles pulmonaires va à l’encontre de la survenue d’une réponse immunitaire primaire au niveau des alvéoles.

De plus, la distribution éparse et le faible nombre de lymphocytes T présents dans le parenchyme pulmonaire rendent très peu vraisemblable la présence, in situ, de lymphocytes spécifiques pour l’ensemble des antigènes inhalés.

Bien que les voies afférentes de transport des antigènes du poumon vers les organes lymphoïdes régionaux ne soient pas connues avec précision, les études effectuées sur d’autres organes, notamment la peau, ont montré que des voies lymphatiques afférentes intactes étaient nécessaires à la sensibilisation de l’animal contre l’antigène appliqué localement.

À ce titre, il a été montré que les lymphocytes B spécifiques d’un antigène introduit par voie respiratoire sont d’abord retrouvés sous forme activée dans le sang périphérique et les organes lymphoïdes, avant d’être identifiés dans le poumon.

Il est probable que les antigènes soient transportés par les cellules accessoires.

Les MAsont capables de capter les antigènes inhalés et de les véhiculer vers les ganglions lymphatiques de drainage.

Très récemment, il a été montré que les CDe spléniques instillées par voie trachéale chez le rat migraient et se localisaient préférentiellement dans les zones T dépendantes des ganglions lymphatiques régionaux dans les 24 heures suivant leur introduction.

De plus, les CDe mises en contact, in vitro, avec un antigène et instillées dans la lumière trachéale d’animaux d’expérience induisent, in vivo, une réponse immunitaire spécifique dans les ganglions lymphatiques.

L’importance relative des MA et des cellules de la lignée dendritique dans la stimulation des lymphocytes T au sein des organes lymphoïdes n’est pas connue avec précision et peut dépendre notamment du type d’antigène.

Une fois activés, les lymphocytes T spécifiques vont retourner dans le poumon pour y exercer leurs fonctions effectrices.

La présence ou la persistance de l’antigène à ce niveau et l’existence d’une réaction inflammatoire locale augmentent l’afflux de lymphocytes T.

Il faut souligner que le répertoire des lymphocytes T présents dans le poumon de patients atteints d’inflammation chronique présente une diversité importante témoignant du recrutement notable de lymphocytes T non spécifiques de l’antigène causal.

La circulation sanguine constitue une voie importante de recrutement des lymphocytes T vers le poumon.

L’endothélium des vaisseaux pulmonaires inflammatoires exprime de façon intense des molécules d’adhérence essentielles pour le recrutement des lymphocytes T activés circulant dans le sang périphérique.

Ceux-ci présentent à leur surface membranaire des récepteurs pour ces molécules d’adhérence.

Une fois recrutés dans le poumon, les lymphocytes T activés peuvent y rester et constituer des lymphocytes T « mémoires » ou recirculer dans le sang périphérique.

La réintroduction d’un antigène conduira à une réponse locale rapide de type secondaire.

À ce titre, il faut noter qu’une ascension rapide des lymphocytes T CD4 au décours d’une instillation intratrachéale d’un antigène est observée chez des animaux immunisés et non chez des animaux qui n’ont jamais préalablement rencontré cet antigène.

Il apparaît que les interactions entre cellules accessoires et lymphocytes T pulmonaires constituent une étape précoce essentielle pour le déroulement des réponses immunitaires pulmonaires.

Ces interactions sont rendues complexes par le fait que différents types cellulaires pulmonaires peuvent exercer la fonction de cellules accessoires (en particulier les monocytes/macrophages et les CDe/CL), dont le nombre, la distribution et les capacités fonctionnelles sont très différents.

De plus, la nature de l’antigène, ainsi que le type de cellule accessoire qui le prend en charge vont déterminer la survenue et le type de réponse immunitaire qui aura lieu.

Une meilleure caractérisation des interactions entre cellules accessoires et lymphocytes T dans le poumon représente une voie de recherche très importante pour une meilleure compréhension du rôle du système immunitaire dans la protection du poumon normal contre les agressions auxquelles il est soumis, et l’implication des réponses immunitaires inappropriées dans la pathogénie de nombreuses maladies pulmonaires.

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