Fibrillation auriculaire

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Fibrillation auriculaire• La fibrillation auriculaire (FA) est une arythmie très fréquente dont la prévalence augmente avec l’âge et dépasse 5 % dans la population des plus de 65 ans.
• Elle est à l’origine de complications graves notamment emboliques cérébrales, parfois mortelles, souvent invalidantes, sources d’hospitalisations et de traitements coûteux et prolongés.
• Le risque embolique n’est cependant pas uniforme et varie en fonction de l’âge, de la cardiopathie sous-jacente et de différents facteurs associés. Une des étapes essentielles de la prise en charge d’un patient en fibrillation auriculaire est donc l’identification de ces facteurs de risque et l’évaluation du rapport avantages/inconvénients d’un traitement anticoagulant au long cours.
• La restauration et le maintien d’un rythme sinusal stable sont évidemment l’objectif thérapeutique idéal mais les médicaments antiarythmiques dont nous disposons ont une efficacité partielle et une tolérance médiocre.
• C’est pourquoi, en cas d’échec et en attendant la mise au point de nouvelles méthodes antiarythmiques, on laisse parfois persister une fibrillation auriculaire rebelle ou récidivante et on se contente de ralentir le rythme cardiaque.

Diagnostic :

DIAGNOSTIC POSITIF :

  1. Clinique :

  • La symptomatologie fonctionnelle varie d’un individu à l’autre dans sa forme typique, la fibrillation auriculaire paroxystique se traduit par une symptomatologie importante, avec des palpitations irrégulières d’installation brutale, accompagnées d’une polyurie per-critique. Elle peut durer quelques minutes à quelques jours, et a une fin progressive souvent mal perçue par le patient. À l’inverse, une fibrillation auriculaire permanente, surtout si elle est ancienne, peut être parfaitement tolérée et n’entraîner qu’une simple fatigue ou une dyspnée d’effort modérée. Il existe aussi des formes trompeuses se manifestant par :

– une lipothymie ou une syncope liée à une hypotension artérielle induite par l’arythmie.

– un angor spontané et prolongé rebelle à la trinitrine.

– une dyspnée aiguë voire un œdème aigu du poumon. Il existe des formes occultes pouvant se révéler par un accident thromboembolique artériel cérébral ou périphérique apparemment inexpliqué.

  • Le diagnostic clinique est donc de difficulté variable : en cas de fibrillation auriculaire permanente ou en présence d’une fibrillation auriculaire paroxystique, le diagnostic est facilement évoqué devant une irrégularité franche des battements cardiaques au pouls et à l’auscultation. Par contre, après un épisode paroxystique, le diagnostic ne peut être suspecté que sur les données de l’interrogatoire.
  1. Électrocardiographique :

  • Les moyens du diagnostic : un document électrocardiographique (ECG) est nécessaire au diagnostic :

– un électrocardiogramme 12 dérivations est facilement obtenu en cas de fibrillation auriculaire permanente ou au moment de la fibrillation auriculaire paroxystique.

– dans les autres cas, il faut recourir à un enregistrement électrocardiographique continu par système Holter de 24 à 48 heures voire, quand l’arythmie est très capricieuse, à un enregistrement électrocardiographique séquentiel ou R-test (appareil actionné par le patient en cas de palpitations et qui, appliqué sur le thorax, enregistre un lambeau d’électrocardiogramme). Cependant, en cas de fibrillation auriculaire paroxystique, un document électrocardiographique n’est pas toujours obtenu malgré la répétition des enregistrements Holter. Il faut alors, pour prendre une éventuelle décision thérapeutique, tenir compte des données de l’interrogatoire, des marqueurs électrocardiographiques d’une maladie auriculaire que sont des extrasystoles auriculaires nombreuses et un élargissement de l’onde P sinusale témoignant d’un trouble de la conduction intra¬auriculaire. Exceptionnellement (notamment en cas d’accident ischémique cérébral non expliqué) une épreuve de provocation par stimulation auriculaire endocavitaire peut être proposée pour révéler l’arythmie.

  • Le diagnostic électrocardiographique de fibrilation auriculaire repose habituellement sur 3 critères :

– la disparition des ondes P sinusales.

– la présence d’ondes f rapides (entre 350 et 600/min), irrégulières dans leur forme et leur amplitude, donnant un aspect de trémulations de la ligne de base, bien visibles dans les dérivations proches des oreillettes (DII, DIII, VF, V1).

– des complexes ventriculaires irréguliers, souvent rapides (habituellement entre 100 et 180/min) d’où le terme de tachyarythmie souvent utilisé pour désigner la fibrillation auriculaire.

  • Certaines particularités doivent être notées. Selon l’amplitude des ondes f, on distingue : –les fibrillations auriculaires à larges mailles rappelant l’aspect festonné du flutter mais sans sa régularité stricte et immuable ; elles sont observées dans les cardiopathies valvulaires congénitales avec dilatation importante des oreillettes.

– les fibrillations auriculaires à petites mailles se voient plutôt dans les cardiopathies ischémiques et hypertensives; parfois, en cas de fibrose auriculaire extensive, les ondes f sont si microvoltées qu’elles sont invisibles sur le tracé de surface et seule l’irrégularité des ventriculogrammes permet d’affirmer le diagnostic. La fréquence ventriculaire peut être plus rapide, atteignant plus de 200/min en cas de conduction nodale atténuée (syndrome du PR court en rythme sinusal) ou plus de 300/min en cas de préexcitation auriculoventriculaire liée à syndrome de Wolff-Parkinson-White (WPW) avec, dans ce dernier cas, un risque important de transformation de la fibrillation auriculaire en fibrillation ventriculaire et donc de mort subite. La fréquence ventriculaire peut être plus lente, en raison d’un trouble de la conduction auriculo-ventriculaire. Ainsi, en cas de bloc auriculo-ventriculaire (BAV) complet, le rythme cardiaque est assuré par un rythme d’échappement hissien ou idioventriculaire qui est lent mais régulier. Le diagnostic de fibrillation auriculaire repose alors sur l’absence d’onde P sinusale et la présence des ondes f. La morphologie des complexes ventriculaires pose parfois de difficiles problèmes d’interprétation électrocardiographique. Les ventriculogrammes sont le plus souvent fins en raison de leur origine supraventriculaire mais ils peuvent être élargis en raison d’un bloc de branche ou d’une pré-excitation auriculo-ventriculaire.

Lorsque tous les complexes ventriculaires sont élargis, il peut s’agir d’un bloc de branche :

– organique préexistant qui persiste même si le rythme cardiaque est ralenti par une manœuvre vagale ou une action médicamenteuse.

– fonctionnel lié à la tachycardie (bloc en phase 3). Dans ce cas, une manœuvre vagale en allongeant quelques cycles cardiaques, peut faire apparaître un ou plusieurs ventriculogrammes fins. Quand sur un fond de tachyarythmie à complexes fins surviennent des ventriculogrammes élargis, isolés ou en salves, une extrasystolie ventriculaire ou une aberration de conduction (bloc de branche fonctionnel intermittent) doivent être discutées. L’aberration de conduction classique se manifeste quand l’influx trouve une des branches du faisceau de His en période réfractaire. Son caractère intermittent s’explique par la variabilité incessante des périodes réfractaires liée à l’inégalité des intervalles ventriculaires. Elle survient volontiers selon la séquence « cycle long-cycle court » et a le plus souvent une morphologie de bloc de branche droit. Un certain nombre de critères permettant de distinguer aberration de conduction et extrasystole ventriculaire ont été proposés. En cas de fibrillation auriculaire sur syndrome de Wolff-Parkinson-White, les ventriculogrammes ont une morphologie variable : fine quand l’influx est transmis par la voie nodo-hissienne, large quand il est conduit par la voie accessoire et intermédiaire en cas de fusion des 2 ondes d’activation. Ces différents types de complexes donnent parfois le change avec un bloc de branche fonctionnel mais la haute fréquence du rythme cardiaque (> 250-300 batt/min) doit faire évoquer le diagnostic.

ÉVALUATION DE LA FIBRILLATION AURICULAIRE :

Une fois le diagnostic affirmé, il faut évaluer la tolérance, la cause, les facteurs déclenchants et le potentiel évolutif de la fibrillation auriculaire, éléments essentiels à la décision thérapeutique.

  1. Tolérance :

Elle est avant tout fonction de la fréquence cardiaque engendrée par l’arythmie, de l’existence d’une éventuelle cardiopathie et surtout de l’état du muscle ventriculaire gauche. Elle peut être facilement évaluée par l’interrogatoire (angor ? dyspnée ? malaise ?) et l’examen clinique (insuffisance cardiaque ? hypotension artérielle voire état de choc ?). La présence d’un de ces éléments de gravité impose alors une hospitalisation immédiate en milieu spécialisé.

  1. Diagnostic étiologique :

Identifier la cause ou le facteur déclenchant de la fibrillation auriculaire n’est évidemment pas sans conséquence thérapeutique et pronostique. Un interrogatoire détaillé, un examen clinique rigoureux et l’électrocardiogramme 12 dérivations doivent être complétés par une échocardiographie transthoracique (ETT), une radiographie thoracique et un bilan thyroïdien. On distingue habituellement les fibrillations auriculaires « accidentelles » et les fibrillations auriculaires « maladies » :

  • Fibrilations auriculaires « acidentelles » : elles sont liées à un événement critique qui augmente de façon transitoire la vulnérabilité auriculaire. L’intégrité structurale des oreillettes explique le caractère éphémère de l’arythmie qui régresse le plus souvent spontanément dès la correction de la cause déclenchante. Elles ne justifient généralement aucun traitement antiarythmique (AA) au long cours. Parmi ces causes, il faut insister sur la fréquence de l’alcoolisme aigu (Holiday Heart Syndrom) et sur celle de l’hyperthyroïdie d’aspect sou-vent fruste chez les patients âgés, justifiant un dosage de la TSH (thyroid stimulating hormone) même en l’absence de signes cliniques évocateurs. Une radiographie thoracique est utile pour dépister une éventuelle pathologie tumorale bronchique ou médiastinale chez les sujets fumeurs présentant une fibrillation auriculaire apparemment isolée.
  • Les fibrillations auriculaires « maladies » : elles témoignent d’une atteinte histologique permanente des oreillettes créant un substrat arythmogène à l’origine du caractère récidivant voire permanent de l’arythmie. Ces anomalies sont le plus souvent la conséquence d’une cardiopathie bien individualisée ; dans 20 à 30 % des cas, elles sont au contraire isolées et elles entrent alors dans le cadre de la fibrillation auriculaire idiopathique. En cas de fibrillation auriculaire paroxystique, il peut être utile d’analyser le rôle du système nerveux végétatif dans le déclenchement de l’arythmie grâce à l’interrogatoire, éventuellement complété par un enregistrement Holter. Les fibrillations auriculaires à médiation vagale surviennent pendant le repos, notamment pendant le sommeil ou lors de toute circonstance favorisant l’hypervagotonie et le ralentissement du rythme sinusal (période post-prandiale, période de récupération d’un effort). Les fibrillations auriculaires à médiation catécholergique apparaissent à l’effort ou à l’occasion d’un stress, d’une émotion intense et sont précédées d’une accélération du rythme sinusal. Cette distinction peut guider le choix de la thérapeutique antiarythmique mais elle n’est toutefois pas toujours facile à reconnaître en pratique clinique. Notons enfin qu’une fibrillation auriculaire paroxystique peut alterner avec des épisodes de bradycardie sinusale ou de bloc sino-auriculaire, association définissant le syndrome bradycardie-tachycardie ou maladie de l’oreillette.
  1. Potentiel évolutif :

On distingue habituellement les fibrillations auriculaires « permanentes ou chroniques » et les fibrillations auriculaires « paroxystiques ». On définit habituellement la fibrillation auriculaire paroxystique comme une arythmie durant 2 min à 7 jours. Par conséquent une fibrillation auriculaire est « permanente » quand elle dure plus de 7 jours. Cette définition n’est toutefois pas unanimement admise puisque certains acceptent une durée de 1 mois quand le patient a déjà présenté des épisodes paroxystiques. Une classification selon la symptomatologie et le potentiel évolutif de l’arythmie a été proposée.

Complications :

COMPLICATIONS HÉMODYNAMIQUES :

Les complications hémodynamiques peuvent apparaître brutalement au moment du déclenchement de la fibrillation auriculaire ou au contraire s’installer progressivement en cas de pérennisation de l’arythmie.

  1. Aiguës :

Elles sont directement liées à la perte de la systole auriculaire et au raccourcissement des diastoles. Elles surviennent avant tout en cas de cardiopathie sous-jacente lorsque la contribution atriale joue un rôle essentiel au maintien du débit cardiaque. Elles peuvent se manifester par une insuffisance cardiaque aiguë en cas de cardiomyopathie ischémique ou dilatée, par un œdème aigu du poumon en cas de rétrécissement mitral serré, par une insuffisance cardiaque, une hypotension artérielle voire un collapsus cardiovasculaire en cas de cardiomyopathie hypertrophique et obstructive ou de rétrécissement valvulaire aortique serré. Un état de choc peut également être observé lors du passage en fibrillation auriculaire chez les patients présentant un infarctus du ventricule droit.

  1. Secondaires ou retardées :

Elles résultent d’un remodelage du tissu myocardique induit par la fibrillation auriculaire. Ce remodelage intéresse les oreillettes entraînant des anomalies électrophysiologiques qui favorisent la pérennisation de l’arythmie mais également à plus ou moins longue échéance, des anomalies histologiques à type d’hypertrophie myocytaire et dilatation auriculaire. Ce remodelage peut également intéresser le ventricule donnant naissance à un tableau dit de « tachycardiomyopathie ou cardiomyopathie rythmique » caractérisé par l’association d’une fibrillation auriculaire avec une insuffisance cardiaque par dilatation et hypokinésie du ventricule gauche. Seule la régression de la dilatation et de l’hypokinésie ventriculaire après réduction de la fibrillation auriculaire et maintien d’un rythme sinusal stable permet de distinguer cette cardiomyopathie rythmique d’une cardiomyopathie dilatée primitive compliquée d’une fibrillation auriculaire. Cette entité physiopathologique constitue un argument important pour envisager au moins une fois la cardioversion d’une fibrillation auriculaire associée à une dysfonction ventriculaire gauche apparemment primitive.

COMPLICATIONS THROMBOEMBOLIQUES :

Par la stase sanguine qu’elle engendre, la fibrillation auriculaire constitue en soi un facteur de risque thrombogène et augmente significativement le risque d’embolies artérielles périphériques. Ces complications emboliques sont d’autant plus graves qu’elles touchent, dans 50 à 75 % des cas, le territoire artériel cérébral et peuvent entraîner le décès du patient ou laisser de graves séquelles neurologiques.

La pratique des scanners cérébraux systématiques en visualisant des cicatrices d’accidents ischémiques asymptomatiques confirme d’ailleurs la fréquence, jusqu’alors sous-estimée, de ces accidents emboliques. Le risque thromboembolique n’est pas le même pour toutes les fibrillations auriculaires. Si les patients atteints de fibrillation auriculaire valvulaire (et notamment en cas de rétrécissement mitral) ont tous un risque thromboembolique élevé (de l’ordre de 6 % par an), les sujets atteints de fibrillation auriculaire non valvulaire constituent un groupe hétérogène avec un risque qui varie de 1 à plus de 10 % par an. De nombreuses études réalisées au cours de ces dernières années ont défini des facteurs cliniques et échographiques (recueillis par échographie transthoracique) qui permettent de stratifier le risque thromboembolique pour un individu donné.

Ainsi peut-on individualiser des sous-groupes de patients à haut risque (> 5 % par an), à risque intermédiaire (2 à 5 % par an) et à faible risque (1 % par an). Seuls les sujets de moins de 65 ans présentant une fibrillation auriculaire idiopathique isolée (sans cardiopathie, ni cause extracardiaque identifiable, sans diabète, ni hypertension artérielle, sans dysfonction ventriculaire gauche, ni dilatation auriculaire gauche) ont un risque sensiblement identique à celui des sujets du même âge en rythme sinusal. La nature paroxystique ou permanente de la fibrillation auriculaire et son ancienneté ne modifient pas l’incidence des complications thromboemboliques.

Par contre, la période qui encadre une cardioversion et l’hyperthyroïdie constituent des facteurs à haut risque thromboembolique (> 5 % par an). L’échocardiographie transœsophagienne (ETO) devrait permettre une meilleure évaluation des sujets à risque mais cet examen invasif n’est actuellement pas proposé de façon systématique chez tous les patients atteints de fibrillation auriculaire ; il est en effet réservé aux sujets ayant eu un accident thromboembolique ou si l’on envisage une cardioversion après une anticoagulation de courte durée.

Il permet une analyse précise de l’oreillette gauche et surtout de l’auricule gauche (non visible en échographie transthoracique) et il identifie ainsi des patients à haut risque thromboembolique quand il visualise :

– un thrombus intra-auriculaire (masse échogène, arrondie appendue au fond ou sur la paroi latérale de l’auricule).

– un contraste spontané (lié à des agrégats de globules rouges) témoignant d’une stase sanguine importante et dont la présence est fortement corrélée au risque thromboembolique.

– une absence ou une diminution des vélocités doppler pulsé dans l’auricule gauche.

COMPLICATIONS RYTHMIQUES  :

  1. Pauses post-tachycardie :

À l’arrêt d’une fibrillation auriculaire paroxystique, on peut observer chez certains sujets une pause cardiaque plus ou moins prolongée parfois responsable d’une syncope. Ces pauses sinusales témoignent d’une maladie du sinus latente en rythme sinusal et révélée par l’effet d’overdrive de la fibrillation auriculaire. Ces pauses peuvent disparaître si la fibrillation auriculaire est parfaitement jugulée mais elles nécessitent le plus souvent la mise en place d’un stimulateur cardiaque afin de permettre l’utilisation d’un traitement antiarythmique efficace.

  1. Transformation d’une fibrillation auriculaire en fibrillation ventriculaire :

Elle est observée chez les patients atteints d’un syndrome de Wolff-Parkinson-White lorsque la perméabilité antérograde de la voie accessoire est très grande et autorise en cours de fibrillation auriculaire de hautes fréquences ventriculaires. On considère que le sujet est à risque de fibrillation ventriculaire quand la période réfractaire de la voie accessoire est inférieure à 250 ms et il est alors licite de lui proposer une ablation endocavitaire de cette voie accessoire.

Traitement :

PREMIERS GESTES THÉRAPEUTIQUES  :

Après avoir évalué la tolérance de la fibrillation auriculaire et l’indication d’une éventuelle hospitalisation, 2 mesures thérapeutiques s’imposent immédiatement.

  1. Anticoaguler à dose efficace :

L’héparine standard (intraveineuse ou sous-cutanée) est utilisée avec relais immédiat par les antivitamines K.

  1. Ralentir :

On utilise un digitalique intraveineux si le rythme cardiaque est supérieur à 90/min (sauf en cas de fibrillation auriculaire sur syndrome de Wolff-Parkinson-White où tous les médicaments bloquant électivement la conduction auriculo-ventriculaire intranodale sont contre-indiqués).

RÉDUCTION DE LA FIBRILLATION AURICULAIRE  :

La réduction de la fibrillation auriculaire (ou cardioversion) peut être spontanée (en cas de fibrillation auriculaire paroxystique) ou nécessiter une mesure thérapeutique médicamenteuse ou électrique. Dans tous les cas, il existe un risque thromboembolique important justifiant une prophylaxie efficace.

  1. Prophylaxie antithrombotique :

  • L’attitude classique consiste à assurer une anticoagulation efficace pendant 3 semaines avant la cardioversion et à la poursuivre pendant au moins 1 mois après le retour au rythme sinusal. Cette attitude permet de réduire l’incidence des accidents thromboemboliques de 5 à 7 % à 0 à 1,6 %.
  • L’échographie transœsophagienne permet de raccourcir la durée de l’anticoagulation préalable mais ne dispense pas de l’anticoagulation post-réduction car des thrombus peuvent se former après la cardioversion en raison d’une sidération mécanique de l’oreillette dont la durée est d’autant plus longue que la fibrillation auriculaire est ancienne. Cette stratégie guidée par l’échographie transœsophagienne est actuellement bien définie.
  1. Modalités de la cardioversion thérapeutique :

  • La cardioversion médicamenteuse utilise le plus souvent l’amiodarone administrée par voie intraveineuse ou par voie orale. Récemment un autre antiarythmique de classe III, l’Ibutilide intraveineux a également été préconisé dans cette indication.
  • La cardioversion électrique par choc électrique externe (CEE) nécessite une courte anesthésie générale mais permet un retour au rythme sinusal dans près de 90 % des cas surtout si le patient a bénéficié d’une imprégnation préalable par l’amiodarone. Dans les rares cas d’échecs du choc électrique externe, on peut proposer un choc électrique interne délivré par un cathéter placé dans l’oreillette droite.
  1. Indications de la cardioversion :

Elles doivent être très larges notamment en présence d’un premier épisode de fibrillation auriculaire ou après une rechute quand le patient ne cumule pas les facteurs prédictifs d’une récidive : âge supérieur à 75 ans, arythmie installée depuis plus d’un an, fibrillation auriculaire multirécidivante malgré plusieurs antiarythmiques prescrits successivement ou simultanément, dilatation importante de l’oreillette gauche (45 mm ? 50 mm ?), intolérance ou contre-indication aux antiarythmiques.

  1. Contre-indications temporaires :

Elles doivent être connues : surdosage digitalique, hypokaliémie, hyperthyroïdie en cours de traitement, valvulopathie mitrale chirurgicale.

  1. Ne pas oublier :

Le passage en fibrillation auriculaire permanente peut être un mode de guérison d’une fibrillation auriculaire paroxystique multirécidivante et il faut savoir respecter les fibrillations auriculairse anciennes et asymptomatiques des sujets âgés.

TRAITEMENT PRÉVENTIF  :

Il s’adresse à la fibrillation auriculaire « maladie ». Son objectif est de prévenir les accès des fibrillations auriculaires paroxystiques et récidivantes ou d’éviter la rechute d’une fibrillation auriculaire permanente réduite par cardioversion. Il fait appel à des moyens pharmacologiques et non pharmacologiques :

  1. Les médicaments antiarythmiques sont utilisés en première intention :

Nous disposons de différentes classes thérapeutiques :

  • classe IA (quinidiniques, disopyramide).
  • classe IC (propafénone, flécaïnide, cibenzoline) souvent associés à un bêtabloquant.
  • classeI (sotalol, amiodarone). Leur efficacité n’est cependant que partielle : sous antiarythmique de classe IC 50 % des patients restent en rythme sinusal à 1 an contre 30 % sous placebo ; avec l’amiodarone ce pourcentage serait de l’ordre de 70 % à 1 an. Chaque classe thérapeutique a des effets secondaires et des contre-indications à connaître parfaitement. Le choix du médicament dépend avant tout du terrain (respect des contre-indications de chaque produit), du mode de déclenchement de l’arythmie (médiation vagale ou adrénergique), d’une éventuelle intolérance ou d’un échec préalable avec tel ou tel antiarythmique. En l’absence de dysfonction ventriculaire gauche, on utilise plutôt en première intention un antiarythmique de classe IA ou IC ou le sotalol ; en cas d’insuffisance cardiaque, seule l’amiodarone est utilisée.
  1. Moyens non pharmacologiques :

Ils sont nombreux mais, pour certains, encore au stade de l’évaluation.

  • La stimulation cardiaque auriculaire à fréquence élevée (85/min) a été préconisée dans les arythmies à médiation vagale réfractaires au traitement médicamenteux.
  • La resynchronisation biatriale (par stimulation simultanée de l’oreillette droite et de l’oreillette gauche) est indiquée en cas de trouble de la conduction intra- ou inter-auriculaire majeure, notamment en cas de cardiomyopathie hypertrophique.
  • La défibrillation atriale endocavitaire par choc de très faible énergie délivrée par un défibrillateur implantable.
  • L’ablation chirurgicale et l’ablation par cathéter sont des techniques en cours d’évaluation ou encore réservées à des cas exceptionnels.

TRAITEMENT PALLIATIF  :

Lorsque le rythme sinusal n’a pu être rétabli, il est préférable de « respecter » la fibrillation auriculaire mais il importe de contrôler rigoureusement la fréquence cardiaque tant au repos qu’à l’effort.

  1. Moyens pharmacologiques :

Digitaliques, bêtabloquants, vérapamil et diltiazem, produits bloquant la conduction auriculoventriculaire intranodale, sont le plus souvent utilisés, seuls ou en association.

  1. Moyens non pharmacologiques :

Il s’agit essentiellement des techniques ablatives de la jonction auriculoventriculaire avec 2 modalités possibles :

  • l’ablation complète créant un bloc auriculo-ventriculaire complet mais nécessitant la mise en place d’un stimulateur cardiaque définitif réglé en mode VVIR en cas de fibrillation auriculaire permanente ou en mode DDD ou DDDR avec algorithmes de repli en cas de fibrillation auriculaire paroxystique.
  • la modulation de la conduction auriculoventriculaire qui crée un bloc incomplet évitant alors une dépendance au stimulateur cardiaque. Dans tous les cas, quel que soit le moyen utilisé, la fibrillation auriculaire persiste et la prévention du risque thromboembolique doit être envisagée.

Traitement antithrombotique : Un traitement par antivitamine K (AVK) efficace [INR : (international normalized ratio) entre 2 et 3] est indispensable en cas de fibrillation auriculaire valvulaire et en cas de cardioversion médicamenteuse ou électrique.

De nombreuses études réalisées au cours de ces dernières années ont par ailleurs permis de clarifier les indications et les modalités des traitements antithrombotiques dans la fibrillation auriculaire non valvulaire. Elles ont ainsi démontré :

  • la supériorité en termes de prévention thromboembolique du traitement antivitamines K à doses classiques (INR entre 2 et 3) sur le traitement antiagrégeant plaquettaire par l’aspirine au prix d’un risque hémorragique limité.
  • la très faible eficacité du traitement antiagrégant plaquettaire par l’aspirine qui n’est supérieur au placebo que de façon inconstante selon les études et uniquement chez les patients de moins de 75 ans.
  • une action antithrombotique insuffisante de l’association antivitamine K faibles doses (INR entre 1,2 et 1,5) et aspirine qui ne peut constituer une alternative raisonnable aux antivitamines K à doses classiques (INR entre 2 et 3). C’est pourquoi, on retient actuellement les recommandations suivantes.
  • Chez les patients de moins de 65 ans : –en cas de fibrillation auriculaire idiopathique et isolée (sans facteur de risque associé) le traitement antivitamine K n’est pas nécessaire et le patient peut être dispensé de tout traitement antithrombotique ou recevoir seulement un traitement antiagrégeant plaquettaire par l’aspirine ; –si la fibrillation auriculaire est associée à un facteur de risque ou si elle est secondaire à une cardiopathie ou une thyrotoxicose, le traitement antivitamine K (assurant un INR entre 2 et 3) est indispensable.
  • Chez les patients de plus de 75 ans, que la fibrillation auriculaire soit isolée ou associée à un ou plusieurs facteurs de risque, le traitement antivitamines K (INR 2-3) est recommandé mais le risque hémorragique augmentant avec l’âge, les avantages et les inconvénients du traitement antivitamines K doivent être régulièrement réévalués et il est classique de recommander un INR voisin de 2.
  • Chez les sujets entre 65 et 75 ans, le traitement par antivitamines K est recommandé quand la fibrillation auriculaire est associée à un ou plusieurs facteurs de risque mais en cas de fibrillation auriculaire isolée, le choix entre aspirine et antivitamines K est discuté selon les auteurs.
  • Lorsque le traitement par antivitamines K est recommandé mais qu’il existe une contre indication formelle, l’aspirine est habituellement proposée à la dose de 325 mg/j.

Conclusion :

  • La prévalence et le risque embolique de la fibrillation auriculaire augmentent avec l’âge.
  • Une fibrillation auriculaire « accidentelle » liée à une pathologie aiguë transitoire ne justifie habituellement pas de traitement antiarythmique au long cours.
  • Les digitaliques et tous les médicaments bloquant électivement la conduction intranodale sont contre-indiqués en cas de fibrillation auriculaire sur syndrome de Wolff-Parkinson-White.
  • La cardioversion d’une fibrillation auriculaire permanente mérite d’être tentée au moins 1 fois.
  • Les antiarythmiques utilisés à titre préventif des rechutes de fibrillation auriculaire ont une efficacité partielle et des contre-indications qu’il faut connaître pour éviter les complications iatrogéniques.
  • Le simple ralentissement du rythme cardiaque est une alternative raisonnable en cas de fibrillation auriculaire rebelle ou multirécidivante.
  • Seule la fibrillation auriculaire idiopathique et isolée du sujet de moins de 65 ans ne justifie pas de traitement par antivitamines K au long cours.
  • Dans tous les autres cas, sauf contre-indication, le traitement par antivitamines K est indiqué avec un INR cible entre 2 et 3.
  • L’aspirine à la posologie de 325 mg/j n’est une alternative antithrombotique qu’en cas de contre-indication formelle aux antivitamines K.

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