Carcinomes spinocellulaires

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Carcinomes spinocellulaires
Introduction :

Les carcinomes cutanés sont les cancers les plus fréquents chez l’adulte puisqu’ils représentent environ 30 % des tumeurs malignes.

Parmi ces carcinomes, 80 % sont des carcinomes basocellulaires (CBC) d’évolution essentiellement locale et 20 % sont des carcinomes spinocellulaires (CSC), encore appelés carcinomes épidermoïdes, en particulier sur les muqueuses, qui sont beaucoup plus agressifs et associés à un risque non négligeable de métastases.

Les carcinomes cutanés représentent donc un véritable problème de Santé publique du fait de leur fréquence, de leur morbidité et, pour les CSC, de leur mortalité.

Incidence :

L’incidence exacte des CSC est difficile à évaluer car la plupart des cas ne sont pas collectés dans les registres du cancer.

L’ incidence annuelle standardisée (par rapport à la population mondiale) en France et dans les principaux pays européens est de 10 à 20/100 000 habitants chez l’homme et 5 à 10/100 000 chez la femme.

Aux États- Unis, le risque de survenue d’un CSC a été estimé de 9 à 14% chez l’homme et de 4 à 9 % chez la femme.

Malgré le sous-enregistrement de ces tumeurs, une augmentation nette de leur incidence a été documentée en Amérique du Nord puisque leur incidence aurait augmenté de 50 à 200 % dans les 10 à 30 dernières années.

Dans la population blanche nord-américaine, l’incidence ajustée à l’âge est de 100 à 150/100 000 personnes et ce chiffre est multiplié par dix dans la population de plus de 75 ans.

Cette incidence augmente encore de façon très nette en fonction de la latitude.

Ainsi, en Australie, en 1990, elle était estimée à 250/100 000 habitants.

Chez les migrants, la fréquence augmente avec la durée de vie en Australie et est maximale pour les Européens qui y sont nés et pour les zones proches de l’équateur où le taux peut atteindre 1/100.

Étiologie :

Les facteurs carcinogènes impliqués dans le développement des CSC sont multiples : l’irradiation par les ultraviolets (UV), les radiations ionisantes, la PUVAthérapie, les infections par les human papillomavirus (hPV), l’exposition à différentes substances chimiques comme l’arsenic ou les hydrocarbures polycycliques, mais aussi les génodermatoses, l’immunosuppression et les dermatoses ulcérantes ou cicatricielles chroniques.

A – RAYONS ULTRAVIOLETS :

Le facteur étiologique le plus fréquemment retrouvé est le soleil, en particulier l’irradiation solaire chronique, ce qui explique la plus grande fréquence de localisation sur les zones photoexposées et chez les sujets de phototype clair.

Dans le spectre solaire, l’effet carcinogène des UVB (290 à 320 nm) est le plus documenté mais plus récemment, le rôle des UVA a été également rapporté.

Les arguments épidémiologiques prouvant le rôle des UV dans ces tumeurs sont essentiellement descriptifs mais ont été confirmés dans quelques études cas/témoins récentes.

– Quatre-vingts pour cent des carcinomes surviennent au visage, au cou, au dos des mains, aux avant-bras (zones les plus photoexposées).

– Dans les populations blanches, il existe une relation inverse entre l’incidence des cancers cutanés et la latitude.

– L’incidence augmente avec l’âge et témoigne indirectement d’un effet dose cumulé.

– L’incidence des CSC est fortement augmentée chez les sujets atteints de trouble de la réparation de l’acide désoxyribonucléique (ADN) (xeroderma pigmentosum) qui entraîne une importante photosensibilité cutanée.

– Le taux des cancers de la peau est plus bas dans les populations pigmentées.

Malgré la difficulté et le peu d’études menées visant à quantifier le rôle des UV, les relations exposition UV, phototype cutané et CSC peuvent être résumées ainsi :

– les phototypes les plus susceptibles sont ceux ayant une faible fabrication d’eumélanine (sujets roux) et ceci est directement lié à certains variants génétiques du récepteur de la mélanocortine, le MC1R ;

– la durée d’exposition aux UV joue un rôle important avec un effet seuil (et non pas une relation purement linéaire) à partir duquel il est observé une forte augmentation de risque ;

– les lésions cutanées UV induites : éphélides, télangiectasies, élastose, kératoses, nævus, sont des marqueurs de risques avec un risque relatif (RR) de 5 à 10.

L’épidémiologie moléculaire a confirmé le rôle des UV en montrant la présence de mutations de signature UV-induite (transitions C-T et surtout doubles transitions CC-TT, spécifiques des UV) sur de nombreux gènes, en particulier le gène suppresseur de tumeur p53 qui est le gène le plus fréquemment muté dans ces cancers.

Enfin, de nombreuses expérimentations animales ont permis de confirmer le rôle des UV dans la carcinogenèse cutanée.

B – PUVATHÉRAPIE :

La PUVAthérapie augmente le risque de développement de carcinomes cutanés, en particulier CSC, d’où l’importance du contrôle médical de son utilisation.

C – RADIATIONS IONISANTES :

Les radiations ionisantes, en particulier X et c, autrefois utilisées pour traiter diverses maladies cutanées ou non (acné, teigne, hémangiome, arthropathies, etc), sont aussi responsables de la formation de carcinomes cutanés.

D – CARCINOGÈNES CHIMIQUES :

Le rôle carcinogène d’agents chimiques a été décrit pour la première fois en 1775 par Percivall Pott en rapportant l’augmentation de l’incidence des CSC du scrotum chez les ramoneurs exposés aux goudrons de houille.

L’arsenic, qui était autrefois utilisé dans diverses préparations et qui revient sur la scène thérapeutique aujourd’hui pour le traitement de diverses hémopathies malignes, est également carcinogène.

L’effet de l’arsenic est dose-dépendant et est associé à un risque de cancers viscéraux.

L’arsenic est responsable de la formation de CSC in situ ou invasifs et de kératoses, en particulier des paumes et des plantes.

Son effet carcinogène semble indépendant des UV et des mutations de p53 sont peu retrouvées dans les tumeurs des sujets exposés.

E – PAPILLOMAVIRUS :

Le rôle des papillomavirus (hPV) dans la carcinogenèse de la peau glabre est moins bien connu que celui plus évident dans la carcinogenèse des muqueuses génitales.

Les hPV de types oncogènes (en particulier 16 et 18) sont retrouvés dans la plupart des carcinomes muqueux (col, anus) et dans un certain nombre de carcinomes génitaux (vulve, verge) et dans une forme particulière de CSC cutanés : les CSC périunguéaux.

Les hPV oncogènes inactivent la protéine codée par le gène suppresseur de tumeur p53 par interaction entre les protéines E6 des hPV et la protéine P53.

Un polymorphisme du gène p53, qui est retrouvé dans une proportion de la population, serait plus susceptible à la dégradation par la protéine E6 d’hPV mais sa conséquence sur la susceptibilité à développer un carcinome génital n’est pas claire.

F – IMMUNOSUPPRESSION :

L’immunosuppression, en particulier celle observée chez les greffés d’organes, s’accompagne d’une augmentation de l’incidence des carcinomes cutanés, surtout CSC.

En effet, le rapport CBC/CSC est inversé dans ces populations.

Les facteurs de risque sont majorés chez les transplantés rénaux en fonction du phototype (clair), d’une exposition solaire élevée et de la durée de la transplantation.

Ceci illustre l’interaction chez ces malades entre différents facteurs : infection à hPV, UV et déficit immunitaire.

G – GÉNODERMATOSES :

Il existe plusieurs génodermatoses prédisposant au développement de CSC.

La plus fréquente et la mieux connue est le xeroderma pigmentosum, maladie autosomique récessive caractérisée par un défaut de réparation de l’ADN.

Elle associe une extrême photosensibilité et le développement précoce de multiples tumeurs cutanées (CBC, CSC et mélanomes).

Les anomalies génétiques portent sur les gènes codant pour les enzymes impliquées dans la réparation par excision de nucléotide (NER).

Selon l’enzyme touchée, le phénotype est plus ou moins marqué.

On distingue ainsi sept groupes de complémentation dans le xeroderma pigmentosum classique.

L’albinisme oculocutané de type II est l’albinisme le plus fréquent dans le monde.

Il est responsable d’une grande morbidité avec d’importantes séquelles visuelles et le développement de tumeurs cutanées, principalement des CSC.

Il s’agit d’une maladie autosomique récessive due à des mutations du gène P, localisé en 15q11-q13, entraînant une réduction de la synthèse d’eumélanine et une altération des mélanosomes.

L’épidermodysplasie verruciforme est une maladie extrêmement rare caractérisée par le développement de verrues planes, de lésions pityriasis versicolor-like, et plus tardivement de CSC sur les zones photoexposées.

Une infection par les hPV oncogènes de type 5 ou apparentés est fréquemment associée, de même qu’un déficit de l’immunité à médiation cellulaire.

Le gène a été récemment localisé sur le bras long du chromosome 17.

Enfin, la maladie de Ferguson-Smith, autosomique dominante, donne des lésions CSC-like spontanément régressives.

Son gène a été localisé en 9q22-31.

La dyskératose congénitale, de transmission autosomique récessive liée à l’X (Xq28), associe une leucoplasie orale avec dystrophie unguéale, atrophie cutanée, hyperpigmentation et pancytopénie.

Il existe une instabilité chromosomique associée au risque de survenue de plusieurs cancers dont des CSC.

Le gène impliqué code pour la dyskérine qui pourrait agir sur le cycle cellulaire et l’activité télomérase.

Présentation clinique :

Le CSC survient souvent sur une lésion précancéreuse telle que la kératose actinique (KA).

La KA est une lésion squameuse, de quelques millimètres, couleur de peau normale ou légèrement rosée ou pigmentée, qui se palpe plus qu’elle ne se voit, et siège principalement sur les zones photoexposées.

Les malades ont le plus souvent de multiples KA qui peuvent, soit persister, soit involuer.

Seul un petit nombre de KA vont évoluer vers un CSC.

Le risque de développement d’un CSC chez les malades atteints de KA multiples serait autour de 6 à 10% et dépend du nombre de lésions et de leur délai de persistance.

La KA peut prendre un aspect de corne cutanée. Les signes qui doivent faire craindre la transformation d’une kératose sont : l’étalement de la lésion, son bourgeonnement en surface, son infiltration, son ulcération, son caractère saignotant.

Un contrôle histologique est alors indispensable. Le risque de transformation d’une KA justifie que l’on surveille régulièrement (au moins une fois par an) les malades atteints de KA multiples et que l’on emploie divers traitements destructeurs pour les faire disparaître (cryothérapie, électrocoagulation, 5-fluorouracil (5-FU) topique, laser, photothérapie dynamique, etc).

Le CSC invasif peut aussi se développer à partir d’une lésion cancéreuse in situ ou maladie de Bowen qui forme une plaque érythémateuse ou rosée bien limitée, persistante, plus ou moins squameuse, située sur les zones photoexposées.

Ici encore, l’étalement de la lésion, son induration, son bourgeonnement, son ulcération, l’apparition d’un nodule doivent alerter et imposer un contrôle histologique.

Toute maladie de Bowen doit être traitée efficacement.

Le meilleur traitement est la chirurgie, mais des alternatives (cryothérapie, laser, photothérapie, etc) sont également possibles.

Enfin, le CSC peut se développer sur d’autres lésions précancéreuses comme les cicatrices de brûlures, les radiodermites, les ulcérations chroniques.

La plupart des CSC se développent sur la tête et le cou.

Le tronc est ensuite le deuxième site le plus atteint.

La lésion la plus fréquente est ulcérovégétante.

Il s’agit d’une tumeur saillante, volumineuse, infiltrée, de surface irrégulière, bourgeonnante et ulcérée.

Elle saigne facilement.

Son bord est dur, épais et la base infiltrée de la lésion dépasse les limites visibles.

Parfois, la lésion prend un aspect nodulaire, symétrique, croûteux en son centre qui peut simuler un kératoacanthome dont le diagnostic différentiel n’est pas toujours aisé.

La lésion peut être essentiellement bourgeonnante, sans ulcération, formant un nodule rouge rosé plus ou moins volumineux ou des masses charnues condylomateuses, souvent de grande taille.

Les formes débutantes peuvent se présenter sous forme de papules fermes, couleur de peau normale ou rosée, parfois hyperkératosiques et persistantes.

Une biopsie s’impose.

Les formes superficielles peu infiltrées, ulcérées ou non, sont plus rares et souvent confondues avec une maladie de Bowen.

Des symptômes peuvent être associés et doivent alerter comme l’existence d’un prurit, une sensation douloureuse ou un saignement.

En particulier, il faut toujours suspecter une transformation en CSC d’une plaie chronique qui devient douloureuse et qui saigne.

Histopathologie :

Le CSC est une prolifération épithéliale maligne développée aux dépens des kératinocytes.

Selon le dégré d’infiltration du derme et de franchissement de la membrane basale, on parle de carcinome in situ, de carcinome micro-invasif ou de carcinome invasif.

Le CSC invasif correspond à une prolifération de cellules de grande taille, organisées en lobules ou en travées plus ou moins anastomosées, de disposition anarchique.

Une différenciation fonctionnelle (ou maturation) sous forme de globes cornés est fréquente.

Cette maturation est variable, allant des formes très différenciées aux formes quasiment anaplasiques.

Dans ces cas, les cellules prennent un aspect fusiforme difficile à différencier des cellules de mélanome ou de sarcome.

Les immunomarquages à la recherche des marqueurs kératinocytaires sont alors utiles pour le diagnostic.

Il existe fréquemment de nombreuses mitoses et des atypies cytonucléaires.

La tumeur envahit plus ou moins profondément le derme, voire l’hypoderme au sein d’un stroma inflammatoire.

L’atteinte du derme réticulaire, le caractère peu différencié et l’existence d’un certain degré de neurotropisme sont des facteurs de mauvais pronostic.

Formes cliniques particulières :

A – CARCINOME SPINOCELLULAIRE VERRUQUEUX :

La forme verruqueuse est plus rare et se caractérise par une malignité essentiellement locale.

C’est un CSC de bas grade de malignité.

Les tumeurs ressemblent à de larges verrues exophytiques, en « choux-fleurs ».

Elles peuvent siéger n’importe où mais leur site de prédilection est la cavité buccale, le larynx ou les parties génitales.

On rattache à cette entité le carcinome cuniculatum qui siège électivement sur le membre inférieur, souvent sur une plaie chronique du pied, la papillomatose orale floride et la tumeur de Buschke-Loewenstein aux organes génitaux et à la région périanale.

Ces tumeurs évoluent classiquement en trois stades : le stade 1 où l’aspect clinique inquiétant contraste avec un aspect histologique bénin ; le stade 2 où cet aspect histologique reste bénin sans franchissement de la basale mais l’infiltration en profondeur par refoulement des tissus est très marquée et s’associe à une récidive quasi constante en cas de chirurgie limitée.

Aux stades 1 et 2, le diagnostic histopathologique sur prélèvement biopsique est souvent très difficile, voire impossible devant des lobules épithéliaux très bien différenciés sans atypie architecturale ou cytologique.

Une ou plusieurs biopsies chirurgicales profondes sont bien souvent nécessaires pour faire le diagnostic différentiel avec une hyperplasie épithéliale pseudocarcinomateuse ; enfin, le stade 3, où la biopsie retrouve un carcinome invasif avec anomalies cytonucléaires, désorganisation architecturale et franchissement de la membrane basale.

À ce stade, le pronostic est celui d’un carcinome épidermoïde classique.

L’envahissement locorégional peut être très important, en particulier au niveau du petit bassin.

Une atteinte ganglionnaire est peu fréquente.

Une atteinte osseuse par contiguïté peut se voir.

Les métastases viscérales sont exceptionnelles.

Le rôle de divers facteurs carcinogènes, dont les hPV, est suspecté.

B – CARCINOME SPINOCELLULAIRE MUQUEUX :

1- Carcinome des lèvres buccales :

Les CSC des lèvres représentent 90 % des cancers des lèvres, près de 10 % des cancers cutanés et 1,7 % des cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS).

Ils siègent dans 88 à 98 % des cas sur le vermillon de la lèvre inférieure et atteignent préférentiellement l’homme de plus de 60 ans.

Ils sont essentiellement liés à deux facteurs de risque représentés par l’exposition solaire chronique (comme les autres CSC du visage) et par le tabac, en particulier au niveau de la zone de contact avec la cigarette.

Ils sont souvent précédés d’un état précancéreux représenté, soit par une chéilite actinique, soit par une chéilite tabagique, les deux pouvant s’associer et augmenter le risque de carcinome.

Toute lésion leucoplasique, érosive ou indurée et fixe doit être biopsiée.

Beaucoup plus rarement, le CSC peut survenir sur une chéilite glandulaire chronique, ou des lésions de lupus chronique et de lichen plan.

Le CSC se présente le plus souvent sous forme d’une ulcération à bords irréguliers, reposant sur une base indurée.

L’aspect de tumeur végétante ou bourgeonnante est plus rare.

L’examen clinique comporte la recherche d’adénopathies dans les territoires sousmentaux, sous-maxillaires, jugulocarotidiens, spinaux et susclaviculaires, et la recherche, chez les fumeurs, d’une deuxième localisation au niveau des VADS par un examen complet de la cavité buccale, de l’oropharynx, du larynx et de l’hypopharynx : une panendoscopie peut être proposée.

Une radiographie pulmonaire et une échographie hépatique complètent ce bilan.

Pour les tumeurs de grande taille (> 2 cm), ou en présence d’adénopathie, on demande une tomodensitométrie de la région cervicale pour mieux juger de l’extension locorégionale.

2- Carcinome spinocellulaire de la vulve :

Ces carcinomes sont des tumeurs rares (3 à 5 % des cancers génitaux de la femme) et surviennent dans la plupart des cas sur une lésion ou un état précancéreux représentés par :

– soit des lésions de dysplasie sévère, « étagée », appelée par l’International Society for the Study of Vulvar Disease (ISSVD) « dysplasie indifférenciée » ou « carcinome in situ », liées à une infection à hPV oncogène (hPV 16 ++).

Cliniquement, ces lésions correspondent à une maladie de Bowen génitale leucoplasique ou érythroplasique (anciennement dénommée érythroplasie de Queyrat) qui survient préférentiellement chez la femme ménopausée, plus rarement à des papuloses bowénoïdes (PB) qui atteignent la femme jeune et qui n’évoluent vers une invasion qu’exceptionnellement, en l’absence d’immunodépression associée ;

– soit des lésions épithéliales associées et secondaires à un lichen scléreux (LS) vulvaire généralement mal ou non traité : elles sont appelées « dysplasies sévères différenciées » par l’ISSVD et réalisent une hyperplasie épithéliale associée à des atypies cytonucléaires qui restent à la partie inférieure de l’épithélium.

Cliniquement, ces lésions réalisent des plaques leucoplasiques ou érythroplasiques.

Après contrôle histologique et en l’absence de traitement médical du LS sous-jacent, un traitement local par un dermocorticoïde de niveau 1 (clobétasol) peut être proposé pendant 1 à 3 mois sous surveillance stricte.

En cas de non-régression, une exérèse de ces lésions s’impose.

Les CSC vulvaires surviennent généralement chez les femmes âgées (moyenne d’âge de 70 à 80 ans) et peuvent se présenter cliniquement sous forme d’une ulcération indurée, d’une lésion végétante ou bourgeonnante, saignant au contact.

Un scanner abdominopelvien est proposé en présence d’adénopathie palpable ou chez une patiente difficile à examiner. Une radiographie pulmonaire complète ce bilan.

3- Carcinome spinocellulaire de la verge :

Ce carcinome est rare dans les pays d’Europe et d’Amérique du Nord (1 % des cancers de l’homme), mais beaucoup plus fréquent en Amérique latine, en Asie et en Afrique (15 à 20 %).

Cette différence est liée au rôle des hPV dans l’étiologie de ces cancers dans les zones de forte incidence.

Comme à la vulve, le LS favorise aussi les CSC du pénis et il n’est pas sûr que les balanoposthites chroniques associées à un phimosis, cause classique des CSC de la verge, ne soient pas dues en partie à un LS non reconnu et non traité.

Le rôle étiologique des UV chez les patients de phototype clair, traités par PUVAthérapie, est aussi reconnu, bien que cet événement soit rare dans les cohortes de malades traités.

Le rôle du contact avec des hydrocarbures dans certaines professions (ramoneurs, métallurgistes…) est devenu plus rare du fait de règlementations protectrices.

Les lésions précancéreuses hPV induites ou liées à un LS sont les mêmes qu’à la vulve.

Ce carcinome se présente cliniquement comme une tumeur souvent ulcérée, mais peut aussi se révéler par un phimosis acquis, irréductible, qui doit toujours être l’objet d’une exploration chirurgicale.

L’évaluation de l’extension locale nécessite une image en résonance magnétique (IRM) du pénis ; une radiographie pulmonaire et un scanner abdominopelvien à la recherche de métastases viscérales et ganglionnaires complètent le bilan.

4- Carcinome spinocellulaire du scrotum :

Son intérêt est historique, puisqu’il s’agit du premier cas de CSC professionnel rapporté. Le rôle des carcinogènes chimiques est prépondérant.

Il a été initialement décrit chez les ramoneurs.

Les mesures de protection actuelles en ont beaucoup diminué la fréquence.

Les professions les plus exposées sont les ouvriers travaillant dans la métallurgie.

Typiquement, il s’agit d’une lésion verruqueuse infiltrée du scrotum qui s’étend et s’ulcère.

La richesse du réseau lymphatique explique que les atteintes ganglionnaires rapides ne sont pas rares.

Le pronostic de cette forme est mauvais (survie à 5 ans de 40 à 50 %). Son intérêt a été récemment relancé du fait de la description d’une augmentation de fréquence chez les malades traités par PUVAthérapie ayant reçu de fortes doses.

C – FORMES INHABITUELLES :

1- Carcinome périunguéal :

Son individualisation récente tient à la démonstration de la présence d’hPV oncogène type hPV 16 qui évoque une possible transmission sexuelle dans cette localisation et le rôle de ce virus dans l’étiologie de ce carcinome.

Il faut toujours se méfier des verrues périunguéales récalcitrantes et demander une biopsie au moindre doute.

2- Formes à type d’intertrigo :

Cette présentation est rare mais doit être évoquée là encore devant tout intertrigo résistant au traitement usuel, en particulier lorsqu’il est érosif, bourgeonnant et douloureux.

Pronostic :

Tout CSC doit être considéré comme agressif.

Le CSC invasif a tendance à récidiver et peut métastaser. Le taux de récidive d’une tumeur primitive à 5 ans est d’environ 8 % et celui de métastase de 5 %.

Il existe plusieurs facteurs de mauvais pronostic.

– Taille de la lésion : une lésion supérieure à 2 cm de diamètre a un taux de récidive à 5 ans de 15 % et de métastase encore plus élevé, à 30 %.

– Localisation : les CSC de la lèvre et des oreilles sont plus agressifs avec un taux de récidive entre 20 et 25 %.

D’autres localisations ont également un mauvais pronostic comme le cuir chevelu, le front, les paupières, le nez, la face dorsale des mains, le pénis, le scrotum et l’anus et les muqueuses d’une manière générale.

D’autre part, les CSC survenant sur des plaies chroniques (ulcères, épidermolyses bulleuses congénitales) ont un fort risque de métastases, avoisinant les 40 %.

– Évolutivité de la lésion : une croissance rapide ou une récidive de la lésion augmentent les risques de récidives ultérieures et de métastases.

– Immunosuppression : elle entraîne l’ apparition plus précoce des CSC (deux à trois décennies plus tôt que la population immunocompétente) dont le risque métastatique est plus élevé (10 %).

– Critères histologiques :

– la profondeur de la lésion : elle n’a été étudiée que par quelques auteurs et la gravité d’un CSC serait supérieure en cas d’atteinte du derme réticulaire (> à 4 mm) ;

– l’atteinte périneurale observée dans 2 à 7% des cas qui est souvent asymptomatique ;

– le caractère peu différencié de la tumeur.

Ainsi, si la majorité des malades atteints de CSC ont un bon pronostic, il faut rester vigilant devant tout malade atteint de CSC et procéder à un examen cutané corps entier soigneux à la recherche d’une autre lésion (environ 30 % des patients développent une deuxième lésion dans les 5 ans) ou de signes d’extension de sa lésion, en particulier dans les aires ganglionnaires.

En cas de métastase à distance, l’atteinte ganglionnaire est très fréquemment associée (85 % des cas).

En cas d’extension métastatique à distance, le pronostic est beaucoup plus réservé puisque la survie est inférieure à 20 % à 10 ans.

Diagnostic différentiel :

Certains carcinomes cutanés sont de diagnostic parfois difficile avec d’autres tumeurs.

Le diagnostic différentiel le plus difficile, tant sur le plan clinique qu’histopathologique, est celui du kératoacanthome.

L’existence d’une infiltration profonde, d’une véritable ulcération centrale, la persistance de la lésion au-delà de quelques mois sans régression doivent être considérées comme suspectes.

Une exérèsebiopsie est préférable à une biopsie partielle en raison des difficultés de l’examen histopathologique.

Il est fréquent que ce dernier ne puisse pas formellement trancher entre les deux diagnostics.

Certains kératoacanthomes géants et très destructeurs posent le problème d’une forme particulière de CSC très différencié.

Tous les cas de kératoacanthomes difficiles à classer doivent être traités comme des CSC.

D’autre part, la distinction entre CBC et CSC est parfois difficile, même pour un oeil habitué.

Ceci souligne l’intérêt de la biopsie qui permet de confirmer et de préciser le diagnostic et le type histologique.

Dans les cas indifférenciés, on peut s’aider de certains marqueurs immunohistochimiques (marquage positif des kératines, marquage négatif avec les anticorps antivimentine, PS100, HMB45, reconnaissant d’autres cellules cutanées, fibroblastes, cellules dendritiques, mélanocytes, etc).

En dehors du kératoacanthome, les autres diagnostics différentiels sont les carcinomes annexiels bénins ou malins : carcinome trichilemnal du sujet âgé, porocarcinome, carcinome sébacé, le fibroxanthome atypique, le sarcome épithélioïde, le carcinome neuroendocrine de Merkel, les métastases de carcinomes, les fibrosarcomes et le mélanome. Dans tous les cas, la biopsie permet d’orienter le diagnostic.

Traitement :

A – TRAITEMENT DE LA TUMEUR PRIMITIVE :

1- Chirurgie :

Le traitement des CSC cutanés est avant tout chirurgical.

En effet, seul ce traitement permet un contrôle histologique des marges d’exérèse et donc un meilleur contrôle de l’évolution à moyen et long termes, ce qui devient de plus en plus nécessaire du fait de l’augmentation de la durée de vie de la population.

Il n’existe pas d’étude prospective comparant la chirurgie aux autres traitements.

De même, si les exérèses selon la technique de Mohs permettent d’évaluer la marge nécessaire pour obtenir une exérèse histologique complète à partir des limites cliniques de la tumeur, il n’y a pas, au cours de ces études, de recul évolutif supérieur ou égal à 5 ans.

L’évaluation des marges d’exérèse tient compte des facteurs de mauvais pronostic des CSC, à savoir la taille et l’épaisseur de la tumeur, la différenciation histologique du carcinome, le neurotropisme de la tumeur, sa localisation (zone à risque : sites de fusion embryonnaire [région rétroauriculaire, paupières, sillons nasogéniens] mais aussi cuir chevelu et extrémités) et ses caractéristiques évolutives (lésion primitive ou récidivante), ou l’existence d’une immunodépression.

L’étude histologique des marges d’exérèse faite par Broadland par la technique de Mohs portant sur 141 CSC montre que si, dans la majorité des cas, une marge de 4 mm serait suffisante pour obtenir une exérèse complète des petites tumeurs, une marge de 6 mm est en revanche nécessaire pour les tumeurs de 10 à 20 mm, ou mal différenciées, ou encore situées sur les zones dites à risque.

Mais pour les tumeurs supérieures à 2 cm, une marge de 9 mm est nécessaire.

Cependant, cette étude ne s’accompagne pas d’un suivi des patients.

D’après ces résultats et en tenant compte des facteurs de risque, nous préconisons pour les CSC cutanés les marges suivantes.

D’autre part, toute exérèse incomplète, tant latéralement qu’en profondeur, doit, étant donné le potentiel métastatique des CSC, être l’objet d’une reprise chirurgicale.

Pour les tumeurs de petite taille et de bon pronostic, la marge d’exérèse permet généralement une exérèse-suture sous anesthésie locale en ambulatoire.

En revanche, les tumeurs de grande taille nécessitent un temps de reconstruction (greffe, lambeau) après vérification histologique de l’absence de tumeur résiduelle sur les marges d’exérèse.

Cette analyse peut se faire pendant le temps opératoire (étude extemporanée, technique de Mohs), soit après l’intervention (chirurgie en deux temps), la lésion étant mise à plat, recouverte d’un pansement, et la reconstruction réalisée dans un deuxième temps.

La technique de Mohs comporte une fixation de la tumeur in situ généralement par congélation.

L’excision se fait par des coupes horizontales réalisées en série, dont l’étude anatomopathologique immédiate guide l’acte chirurgical.

Cette technique est longue et coûteuse et est peu utilisée en France.

L’examen extemporané en peropératoire est une technique analogue nécessitant aussi la présence d’un anatomopathologiste.

L’utilisation de l’une ou l’autre de ces techniques dépend de la pratique et des moyens de l’équipe médicale.

En l’absence d’adénopathie palpable, le traitement des CSC primitifs cutanés ne comporte pas de curage ganglionnaire.

2- Radiothérapie :

Les progrès de la chirurgie réparatrice et des techniques anesthésiques en ont limité les indications.

En dehors de la radionécrose liée à la taille (grande surface lésionnelle) et au site (cartilage), les inconvénients de la radiothérapie sont, à moyen et long termes : la radiodystrophie, la reprise chirurgicale difficile si survient une récidive et le risque carcinogène.

Il faut donc l’éviter chez des sujets de moins de 60 ans et si possible chez les immunodéprimés qui présentent des lésions multiples et multifocales.

Actuellement, ce traitement est réservé, soit à des tumeurs inopérables (atteinte d’organe vital), soit à des patients inopérables.

La décision est prise le plus souvent en consultation pluridisciplinaire (dermatologue, chirurgien, radiothérapeute, chimiothérapeute).

En cas d’exérèse incomplète, une reprise chirurgicale est toujours préférable si l’état du patient le permet plutôt qu’une radiothérapie complémentaire systématique.

Les rayons X de basse énergie (contacthérapie) sont progressivement abandonnés pour des électrons de haute énergie (6 à 13 MeV), parfois associés à des protons de basse énergie.

Le traitement est généralement fractionné à 3 à 4 Gy par séance, étalé sur 4 à 6 semaines.

Les doses utilisées sont de l’ordre de 50 à 60 Gy.

En cas d’altération importante de l’état général, rendant les déplacements difficiles, il est tentant de proposer une irradiation hypofractionnée délivrant par exemple 10 Gy ou 11 Gy à j1, j8, j15.

Mais ces schémas d’irradiation augmentent le risque de nécrose immédiate (surtout si la surface irradiée est large, supérieure à 5 cm2) et le risque de radiodystrophie.

La curiethérapie interstitielle (iridium 192) est indiquée surtout pour les lésions de la pyramide nasale ou des lèvres.

Mais il existe aussi un risque de nécrose si la tumeur est supérieure à 4 cm, ou est située près du cartilage.

Elle nécessite une hospitalisation avec une chambre isolée pouvant être à l’origine d’une décompensation chez un sujet âgé fragile.

Cette technique est à l’origine d’un risque trophique non négligeable.

Les résultats d’études rétrospectives, ne distinguant pas les CSC cutanés des CBC, montrent un taux de récidive à 5 ans qui dépend de la taille de la tumeur (5 à 10 % de récidive pour les tumeurs primitives inférieures à 5 cm et 27 % pour les tumeurs primitives supérieures à 5 cm), et de son caractère évolutif (10 à 12 % de récidives pour les tumeurs récidivantes inférieures à 5 cm et 60 % pour les tumeurs récidivantes supérieures à 5 cm).

3- Autres techniques destructrices :

* Curetage-électrocoagulation :

Cette technique consiste à cureter la lésion jusqu’à l’obtention d’un tissu apparemment sain en profondeur et latéralement, suivi d’une électrocoagulation des berges.

Elle ne peut être utilisée que pour les petites lésions (1 cm), superficielles, non récidivantes, et n’a donc pas d’intérêt par rapport à une exérèse-suture qui est généralement indiquée pour ce type de lésion, et qui permet un examen histologique des marges d’exérèse.

* Cryochirurgie :

Elle est réservée aux patients ayant une contre-indication à la chirurgie classique.

Le taux de succès est estimé à 97,3 % dans les CSC primitifs de petite taille, inférieure à 1,2 cm.

* Laser CO2, électroporation, photothérapie dynamique (PTD) :

Ce sont des techniques en cours d’évaluation.

La PTD, qui repose sur l’utilisation combinée d’une substance photosensibilisante (ou son précurseur) et d’une lumière de longueur d’onde appropriée, semble un bonne alternative dans les formes superficielles essentiellement (KA, maladie de Bowen).

L’imiquimod, une substance immunomodulatrice en cours d’expérimentation dans le traitement des maladies de Bowen cutanées, est une autre alternative.

4- Chimiothérapie :

Il y a très peu de séries publiées étudiant la chimiosensibilité des CSC cutanés, alors que celle d’autres CSC, en particulier des muqueuses des VADS, est bien reconnue.

Le 5-FU, le cisplatine et la bléomycine sont les drogues qui ont été le plus utilisées.

La chimiothérapie est réservée aux formes inopérables d’emblée (atteinte d’un organe vital), en association éventuellement à la radiothérapie, ou pour les formes métastatiques. Son effet est essentiellement palliatif.

La chimioréduction préopératoire des CSC de grande taille (associée ou non à une radiothérapie) est intéressante, car elle peut permettre une exérèse chirurgicale secondaire, considérée initialement comme trop mutilante, avec une survie sans récidive ou un contrôle stable supérieur à 1 an chez six sur 13 patients dans une étude.

Des essais de chimiothérapie des membres isolés associant tumor necrosis factor (TNF)a, interféron (IFN), melphalan et hyperthermie ont été réalisés avec succès mais nécessitent confirmation.

B – TRAITEMENT SELON LA LOCALISATION :

1- Carcinome spinocellulaire de la lèvre :

Le traitement de ces états et lésions précancéreuses labiales repose sur la vermillonectomie qui permet un examen histologique complet des lésions.

Le laser CO2 est une alternative thérapeutique, bien que moins sûre au plan carcinologique.

Il doit être précédé de multiples biopsies si les lésions sont étendues.

Les applications de 5-FU sont abandonnées du fait des effets secondaires (irritation ++) et de leur efficacité inconstante.

Le traitement des CSC des lèvres repose sur la chirurgie ou/et la radiothérapie.

Pour les tumeurs T1, T2, N0, une exérèse chirurgicale avec une marge de 1 cm suivie d’une réparation dans le même temps opératoire est préférable (l’exérèse en deux temps n’est pas possible lorsqu’une chirurgie interruptrice est réalisée) : en l’absence d’adénopathie, la plupart des auteurs préconisent une surveillance ganglionnaire sans curage systématique.

Pour les tumeurs plus grandes, la discussion entre chirurgie et curiethérapie, associée ou non à une radiothérapie externe, se pose.

Ces traitements sont systématiquement associés à un curage sous-mento-sous-digastrique bilatéral, et une radiothérapie complémentaire des aires ganglionnaires est faite en cas d’envahissement histologique.

Dans les formes inopérables ou métastatiques, une chimiothérapie reposant essentiellement sur le 5-FU et le cisplatine est indiquée, parfois associée à une radiothérapie de la tumeur inopérable (protocole de chimioradiothérapie), permettant une exérèse chirurgicale secondaire.

2- Carcinome spinocellulaire génital :

Le traitement des maladies de Bowen génitales repose sur leur exérèse chirurgicale avec une marge de 5 mm suivie si besoin d’une greffe.

Au prépuce, on réalise une circoncision, et au gland, une exérèse superficielle avec une marge de 5 mm, suivie d’une greffe.

Ces traitements chirurgicaux sont sans conséquence sur la qualité de vie du patient.

Le traitement des papuloses bowénoïdes est identique à celui des condylomes génitaux (électrocoagulation, laser CO2…).

L’’imiquimod, un nouvel immunomodulateur aux propriétés antivirales et antitumorales, disponible sous forme de topique (crème Aldarat à 5 %) dans le traitement des condylomes, est en cours d’expérimentation dans le traitement des maladies de Bowen génitales.

Dans tous les cas, la recherche d’une autre lésion précancéreuse ou cancéreuse anogénitale hPV induite associée, présente dans un tiers des cas, s’impose avec un frottis, une colposcopie et une anuscopie.

3- Carcinome spinocellulaire vulvaire :

Le traitement des CSC vulvaires repose sur l’exérèse chirurgicale avec une marge de 1 cm et un curage inguinocrural homolatéral (si la lésion est latéralisée) ou bilatéral (si la lésion est médiane) dès que l’épaisseur de l’envahissement est supérieure à 1 mm (au-delà de la membrane basale).

Une radiothérapie complémentaire est proposée si l’exérèse est incomplète et la reprise chirurgicale impossible.

Au niveau des aires ganglionnaires, une radiothérapie complémentaire est indiquée en cas d’atteinte histologique.

En cas de tumeur inopérable, une chimiothérapie peut être proposée si l’état général de la patiente le permet (associée ou non à une radiothérapie).

Une exérèse chirurgicale dans un deuxième temps est alors parfois possible.

Les protocoles chimio/radiothérapie utilisent le 5-FU, associé ou non à du cisplatine ou à de la mitomycine.

Des polychimiothérapies associant diversement bléomycine, méthotrexate, CCNU, vincristine, mitomycine ou cisplatine ont aussi été utilisées dans cette indication et dans les formes métastatiques inopérables.

L’indication d’une chimiothérapie adjuvante chez les patientes à haut risque de récidive est à discuter au cas par cas, ou mieux, dans le cadre de protocoles thérapeutiques.

4- Carcinome spinocellulaire de la verge :

Le traitement de référence du CSC invasif de la verge repose sur l’exérèse chirurgicale avec une marge de 1,5 à 2 cm, guidée par l’extension de la tumeur, allant de la simple circoncision pour les petites tumeurs du prépuce (permettant une marge de 2 cm), à une amputation totale en cas d’envahissement des corps caverneux. Une amputation partielle peut être proposée dans les autres cas.

Les traitements conservateurs reposent essentiellement sur la radiothérapie (curiethérapie, radiothérapie externe), mais sont surtout l’indication des petites tumeurs (qui ne nécessitent pas de traitement chirurgical extensif) et aucune étude contrôlée n’a comparé ces deux traitements, tant au niveau du taux d’échec que du retentissement sur la vie sexuelle du patient (risque de radiodermite avec sclérose et retentissement douloureux après radiothérapie).

En l’absence de ganglion palpable ou visualisé au scanner, deux attitudes thérapeutiques sont possibles : une surveillance rapprochée ou un curage inguino-iliaque prophylactique, en particulier quand la tumeur est peu différenciée, de grande taille et touche les corps caverneux (la technique du ganglion « sentinelle » est en cours d’évaluation).

En cas de ganglion palpable et persistant après un traitement antibiotique de 4 à 6 semaines, un curage s’impose, unilatéral ou bilatéral selon les auteurs.

L’extension du curage (inguinal ou ilio-inguinal) n’est pas non plus consensuelle.

Une radiothérapie postopératoire est proposée en cas d’atteinte de deux ganglions ou de rupture capsulaire.

Une chimiothérapie est indiquée dans les formes métastatiques ou inopérables.

Le cisplatine, le 5-FU, la bléomycine, le méthotrexate, la vincristine ou la vinblastine sont les produits les plus utilisés, mais sans étude contrôle.

L’association chimio/radiothérapie externe semble intéressante pour des adénopathies initialement inopérables.

L’intérêt d’une chimiothérapie néoadjuvante pour permettre un traitement conservateur, ou adjuvante pour les malades à haut risque de récidive, est en cours d’évaluation.

C – TRAITEMENT DES ATTEINTES GANGLIONNAIRES :

L’exploration chirurgicale systématique des ganglions dans les CSC a été longtemps débattue.

Actuellement, en l’absence d’adénopathie palpable, l’abstention chururgicale est la règle.

Cependant, cette attitude impose une surveillance clinique régulière et rapprochée (tous les 4 mois la première année).

En cas d’atteinte ganglionnaire clinique ou radiologique, un curage chirurgical est nécessaire.

Celui-ci est complété d’une irrradiation systématique de l’aire ganglionnaire en cas d’effraction capsulaire ou d’atteinte de plus de deux ganglions par analogie aux CSC d’autres localisations.

D – TRAITEMENT PRÉVENTIF ET SURVEILLANCE :

Le traitement préventif des CSC est possible et devrait être plus largement exploité.

Il repose sur plusieurs principes.

Le premier est la photoprotection solaire puisque le soleil est le principal agent carcinogène.

L’éducation de la population grâce aux campagnes de dépistage et d’information permet progressivement de voir un changement de comportement.

Cependant, l’augmentation du temps de loisir, le développement de vacances bon marché dans les pays exotiques et de courte durée, l’augmentation de la longévité, sont responsables d’une augmentation importante de l’incidence de ces tumeurs.

Il faut donc continuer à informer les gens des risques liés à l’exposition excessive au soleil.

L’utilisation d’écrans solaires puissants (facteur de protection solaire supérieur à 30) et couvrant UVB et UVA est à recommander.

Cependant, leur utilisation ne doit pas entraîner un comportement paradoxal, à savoir un plus long temps d’exposition solaire, l’absence de coup de soleil ne prévenant pas de la possibilité d’autres dommages cellulaires plus irréversibles et pouvant initier la transformation des cellules cutanées.

Le deuxième principe repose sur le traitement de toute lésion précancéreuse cutanéomuqueuse et le troisième principe sur la surveillance régulière des patients (deux à trois fois par an, voire tous les mois pour les sujets à haut risque).

Les rétinoïdes à fortes doses (3 à 4 mg/kg) ont un effet curatif partiel (diminution de la taille des gros CSC) mais au prix d’effets secondaires majeurs et sans que l’on connaisse l’effet à long terme.

Aux doses plus faibles (0,75 à 1 mg/kg pour l’acitrétine et 1 à 2 mg/kg pour l’isotrétinoïne), ils n’ont pas d’effet curatif mais un effet préventif qui peut être intéressant chez les patients à risques (génodermatoses, immunodéprimés).

L’intérêt de petites doses d’acitrétine chez des patients à risques est controversé.

Les rétinoïdes ont un effet essentiellement suspensif. Enfin, une publication récente a rapporté l’inefficacité d’un traitement préventif par bêta-carotène.

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