Bronchopneumopathies chroniques obstructives (Suite)

0
2338

Première partie

Explorations fonctionnelles respiratoires :

A – Exploration des petites voies aériennes (BPCO débutantes) :

Bronchopneumopathies chroniques obstructives (Suite)Les modifications anatomopatologiques à l’origine de la limitation des débits expiratoires chez les fumeurs semblent être localisées principalement au niveau des petites voies aériennes.

Au stade de début de la maladie, les débits expiratoires maximaux ne sont pas ou peu réduits, alors qu’existent déjà des anomalies notables des voies aériennes périphériques.

Plusieurs tests sensibles permettent néanmoins de les mettre en évidence.

1- Augmentation du volume de fermeture :

Pour la mesure du volume de fermeture, on enregistre la concentration de gaz radioactif expiré pendant une expiration lente à partir de la capacité pulmonaire totale (CPT), après une injection d’une bouffée de xénon 133 en début d’inspiration.

Le volume de fermeture est alors déterminé par le volume pulmonaire au-dessus du volume résiduel à partir duquel apparaît une inflexion brusque de la concentration de gaz radioactif expiré.

Chez les sujets jeunes non fumeurs, le volume de fermeture est habituellement égal à 5 à 10% de la capacité vitale (CV) et augmente jusqu’à 25 à 30 % de la CV à un âge avancé. Son augmentation, rapportée chez des sujets jeunes fumeurs asymptomatiques ayant une spirométrie normale, a fait proposer cette mesure pour la détection des MPVA.

2- Diminution « fréquence-dépendante » de la compliance dynamique :

Contrairement aux sujets sains non fumeurs, les valeurs de la compliance dynamique (Cdyn) chutent au fur et à mesure que la fréquence respiratoire augmente chez les sujets fumeurs asymptomatiques.

Selon le concept de « constante de temps mécanique », ce résultat est attribué à l’obstruction des petites voies aériennes, du fait d’une modification de la mécanique ventilatoire par les différences régionales de la résistance bronchiolaire.

Le test de diminution « fréquence-dépendante » de la compliance dynamique présente d’importantes contraintes techniques (acceptation par le sujet, contraintes météorologiques), mais reste un test de référence pour la mesure de l’obstruction des petites bronches.

3- Tests basés sur les débits expiratoires (comparaison des courbes débit-volume en air et en hélium-oxygène) :

Du fait de la réduction de calibre des petites voies aériennes au début de la maladie chez les BPCO, la diminution du débit expiratoire devrait également survenir précocement sur la partie terminale de la courbe débit-volume proche du volume résiduel.

Cependant, compte tenu de leurs grandes variations, il semble plus intéressant de comparer ces courbes débit-volume mesurées à l’air et après équilibration avec un gaz de basse densité (80 % hélium-20 % air) pour évaluer une obstruction débutante.

Chez le sujet normal, avec un mélange à 80 % d’hélium, le débit expiratoire maximal à 50 % de la CV (V? max 50) dépasse de 40 à 60 % le V max 50 en air, traduisant une augmentation des débits expiratoires avec une réduction de densité du gaz.

Chez certains fumeurs asymptomatiques, la différence des V max 50 entre hélium et air (DV max 50) est inférieure à la normale, suggérant que les turbulences sont plus faibles dans le segment bronchique amont (prédominance d’un flux laminaire indépendant de la densité du gaz).

Néanmoins, ce test ne semble pas très fiable pour la détection des BPCO débutantes, car il reste parfois normal en cas de BPCO déjà non négligeable.

4- Test de rinçage d’azote :

Le test de rinçage d’azote (single breath N2 test) a été employé pour la détection d’anomalies des petites voies aériennes.

La mesure de concentration d’azote pendant l’expiration qui suit une inspiration maximale d’oxygène permet de déterminer le « gradient alvéolaire d’azote », ou pente de la phase III, qui est élevé chez le fumeur asymptomatique avec spirométrie normale.

Récemment, l’intérêt porté initialement à ces tests de dépistage précoce a diminué, car, lors d’atteintes modérées des voies aériennes, certaines anomalies liées au tabac et dépistées par ces tests semblent réversibles peu après l’arrêt du tabac.

La proportion de la résistance du flux due aux petites voies aériennes inférieures à 3 mm est probablement plus élevée que celle initialement estimée et les variations du VEMS semblent fournir un index finalement assez adapté de la progression d’une atteinte modérée chez les fumeurs.

B – Explorations fonctionnelles chez les BPCO établies :

Chez les patients présentant une dyspnée d’effort, les tests classiques appréciant la mécanique pulmonaire de façon globale sont perturbés.

Le VEMS et la résistance des voies aériennes sont anormaux et il existe une augmentation du volume résiduel (VR) et de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF).

Chez certains patients, on observe aussi une augmentation de la capacité pulmonaire totale (CPT) et de la compliance statique, ainsi qu’une diminution de la force de rétraction élastique.

Enfin, l’augmentation de la CRF met en position inadéquate les muscles respiratoires dans leur travail mécanique, avec une augmentation de leur charge de travail, notamment par le raccourcissement de leur longueur au repos.

1- Tests d’expiration forcée :

En pratique clinique, les modifications de la mécanique pulmonaire sont habituellement évaluées par des mesures effectuées lors de manoeuvres forcées dans la CV, surtout pendant le temps expiratoire. Une spirométrie simple permet la mesure du VEMS et de la CV.

La définition de l’obstruction bronchique repose sur la diminution du rapport VEMS/CV (rapport de Tiffeneau).

L’appréciation de sa sévérité est évaluée sur l’importance de la baisse du VEMS par rapport à la valeur théorique du patient (pourcentage de la valeur théorique du VEMS).

Selon ce pourcentage du VEMS théorique, l’obstruction est faible (supérieure à 60 %), modérée (40 à 60 %) ou sévère (inférieure à 40 %). Un autre paramètre, le débit expiratoire médian (DEM 25 à 75 %), correspond au débit dans la partie médiane de la CV.

Il est en général lié au VEMS, mais peut être diminué alors que le VEMS est encore normal.

Les courbes débit-volume permettent l’analyse rapide des conditions mécaniques d’un patient BPCO.

Le volume pulmonaire est en abscisse, correspondant à la CV allant de la CPT à la CRF.

Les débits sont en ordonnée, positifs expiratoires et négatifs inspiratoires.

Au cours des obstructions bronchiques débutantes apparaît une convexité vers l’axe des X avec réduction du débit expiratoire prédominant sur la portion de la courbe proche du volume résiduel VR, alors que le débit au pic expiratoire n’est pas modifié.

À ce stade, les formes des courbes restent assez conservées par rapport au sujet normal, avec, sur la portion expiratoire, des débits les plus élevés à haut volume pulmonaire.

Lorsque la maladie progresse, on observe une réduction à la fois de l’axe des débits (diminution des débits maximaux comme conséquence de l’obstruction) et de l’axe des volumes (baisse de la CV et augmentation du VR).

Au total, on observe une réduction globale de l’enveloppe expiratoire et inspiratoire au cours des BPCO évoluées.

Lors des maladies évoluées, la courbe expiratoire au volume courant peut dépasser celle observée lors d’une expiration forcée.

Ceci traduit un collapsus des voies aériennes plus précoce, dû au fait que l’augmentation de la pression pleurale lors de l’expiration forcée majore davantage la compression sur les voies aériennes que l’effet de la pression motrice.

Ces courbes DEMV traduisent en réalité la résultante de plusieurs facteurs incluant la résistance des voies aériennes, la force de rétraction élastique du poumon et les forces appliquées à la surface du poumon par les muscles respiratoires, tous ces facteurs étant par ailleurs influencés par les changements de volume pulmonaire.

L’utilité des courbes DEMV et de ses mesures dérivées telles que VEMS ou VEMS/CV traduit probablement leur capacité à intégrer tous ces paramètres dans des mesures simples et faciles à utiliser.

2- Tests de réversibilité bronchique :

La réversibilité peut être définie comme une amélioration d’un index d’obstruction bronchique ; elle est généralement évaluée sur la réversibilité de la réduction du VEMS après inhalation de bêta-2-mimétiques ou d’anticholinergiques (aérosols doseurs).

Les critères de réponse retenus associent généralement une augmentation du VEMS supérieure à 15 % de la valeur de base et supérieure à 200 mL en valeur absolue (ou encore une augmentation du VEMS supérieure à 12 % de sa valeur théorique et supérieure à 200 mLen valeur absolue).

L’intérêt d’un test de réversibilité, pour prédire l’efficacité d’un traitement bronchodilatateur et pour sélectionner les patients pouvant clairement être améliorés sur le plan symptomatique (tolérance à l’effort, réduction des symptômes), n’est néanmoins pas clairement démontré.

Afin d’identifier les patients BPCO répondeurs aux corticoïdes oraux, un « test aux corticoïdes » peut être pratiqué, consistant à mesurer un gain potentiel du VEMS après un traitement de 15 jours de 0,6 mg/kg/j de prednisolone.

Les critères de réponse sont généralement identiques à ceux retenus pour les bronchodilatateurs inhalés.

3- Changement des volumes pulmonaires statiques :

L’augmentation duVR et de la CRF a été observée depuis longtemps chez les patients porteurs de BPCO, grâce à des techniques d’équilibration de gaz inerte.

L’introduction du pléthysmographe a confirmé ces données, en mesurant des augmentations de CRF encore supérieures.

Les différences observées entre les deux types de méthodes semblent en partie attribuables à des zones d’air trappé, ne communiquant pas avec les voies aériennes, et donc sous-estimées par les méthodes de dilution de gaz inerte à l’équilibre.

La prolongation suffisante des méthodes de dilution des gaz permet d’ailleurs de retrouver des valeurs équivalentes à celles de la pléthysmographie.

De même, la CPT est fréquemment augmentée chez les patients emphysémateux et semble parfois être surestimée en pléthysmographie par les conditions techniques d’enregistrement des variations de pression au niveau de la bouche.

4- Mesure de l’élasticité pulmonaire : courbes pression élastique-volume et compliance statique

L’emphysème est caractérisé par une distensibilité accrue du poumon qui peut être visualisée sur une courbe pression élastique-volume.

Comparé à un sujet normal, on observe chez les emphysémateux une augmentation de la compliance statique représentée par l’augmentation de la pente de la courbe et une diminution de la pression transpulmonaire statique à un volume déterminé (courbe déplacée en haut et à gauche).

Classiquement, la compliance est la pente de la courbe dans la région de la CRF.

La mesure de la pression élastique à la CPT (diminuée chez l’emphysémateux) permet une mesure indépendante de la taille et du volume pulmonaire.

5- Résistance des voies aériennes :

La résistance des voies aériennes (Raw) est proportionnelle à la différence de pression entre la bouche et l’alvéole (P) et inversement proportionnelle au débit aérien (V).

Elle est augmentée au cours des BPCO.

Elle peut être mesurée par différentes méthodes, dont la pléthysmographie corporelle ou avec un ballonnet oesophagien (mesure pendant une respiration normale à partir d’un enregistrement de la pression pleurale).

Toutefois, dans ce dernier cas, la résistance visqueuse des tissus est également enregistrée.

La Raw est dépendante du degré d’inflation pulmonaire et augmente à bas volume pulmonaire. L’inverse de la Raw, la conductance des voies aériennes (Gaw) est beaucoup moins influencée par le volume pulmonaire et présente une relation quasi linéaire avec le volume pulmonaire.

On utilise donc souvent la conductance spécifique (SGaw), c’est-à-dire le rapport entre la conductance et le volume, qui est indépendante de la taille et de l’âge chez l’adulte, permettant de mieux comparer les patients.

Chez les BPCO, la résistance des voies aériennes inférieures à 3 mm de diamètre semble contribuer à plus de 50 %de la résistance pulmonaire totale, comparée à seulement 25 %chez les sujets normaux.

Par rapport aux tests mesurés à partir d’une expiration forcée (VEMS), la Raw possède l’avantage d’être mesurée à faible débit et de constituer une mesure des voies aériennes non comprimées.

Néanmoins, une relation assez étroite est observée entre la diminution du VEMS et l’augmentation de la Raw.

En pratique clinique, la mesure des résistances des voies aériennes chez les patients porteurs deBPCO offre peu d’avantages sur la mesure duVEMS et semble moins reproductible.

6- Diffusion alvéolocapillaire (capacité de transfert de l’oxyde de carbone [TLCO]) :

Les tests à l’oxyde de carbone (CO) permettent l’étude de la résistance des structures alvéolocapillaires au transfert des gaz qui dépend de la nature du gaz, de son gradient de pression entre les deux milieux, de la surface de la zone d’échange, des structures alvéolocapillaires et du volume sanguin capillaire.

Du fait de propriétés physicochimiques proches de l’oxygène, et pour des raisons méthodologiques, c’est le CO qui est utilisé pour l’étude de la diffusion alvéolocapillaire.

Deux méthodes de mesure de la TLCO sont couramment utilisées : la méthode en état stable (TLCO steady-state [TLCOss]) et la méthode en apnée (TLCO single breath [TLCOsb]).

La méthode en apnée a l’avantage de ne dépendre que de la diffusion alvéolocapillaire et de la qualité de la perfusion sanguine capillaire, et non des inégalités ventilation-perfusion fréquentes chez les BPCO. Rapportée au volume alvéolaire (TLCOsb/VA), c’est un reflet du transfert du CO par unité de volume pulmonaire.

Chez les patients emphysémateux, le transfert du CO est abaissé du fait de la raréfaction vasculaire associée (destruction des capillaires pulmonaires).

La baisse concerne alors surtout le rapport TLCOsb/ VA, un peu moins la capacité de transfert totale TLCOsb pour laquelle la baisse de la perméabilité est partiellement compensée par l’augmentation habituelle du volume alvéolaire.

Enfin, la capacité de transfert a été rapportée pour évaluer le degré d’emphysème dont l’appréciation par mesure de densité au scanner semble corrélée à la baisse de la capacité de diffusion.

7- Gaz du sang :

La mesure des gaz du sang en air ambiant est un point essentiel de l’évaluation de la maladie en état stable, afin de connaître le degré d’hypoxémie (et l’indication d’une oxygénothérapie au long cours) et la présence éventuelle d’une hypercapnie.

Lors des décompensations aiguës, elle permet la mesure du pH et doit être répétée chez les patients instables afin d’identifier une hypercapnie avec acidose respiratoire dont les signes cliniques peuvent être tardifs.

L’équilibre acidobasique peut être approché de façon simple par l’équation d’Henderson modifiée : [H+] = k X PCO2/HCO3 – (H+ = concentration en ions hydrogène ; k = constante ; PCO2 = pression artérielle en CO2 ; HCO3 – = concentration en bicarbonates).

L’augmentation de CO2, qui est habituellement rapide, peut être compensée par la réabsorption de bicarbonates, un processus relativement lent.

Il est pratique d’interpréter les modifications de pH et de PCO2 des patients à l’aide de diagrammes acidebase de type non logarythmique, intégrant des données de patients bien caractérisés sur l’équilibre acide-base (acidose respiratoire aiguë ou chronique, acidose ou alcalose métabolique, alcalose respiratoire).

L’oxymétrie de pouls permet d’évaluer la SaO2 (saturation du sang en oxygène) avec une précision de l’ordre de 5 %par rapport à la valeur mesurée sur les gaz du sang.

Toutefois, compte tenu de la relation PaO2-SaO2 (dépendant du pH), une appréciation de la PaO2 à partir de la saturation mesurée sur l’oxymètre de pouls n’est pas fiable.

Au cours des épisodes de décompensation respiratoire, une mesure correcte de la SaO2 sur l’oxymètre ne doit donc pas faire ignorer une dégradation de l’équilibre acidobasique uniquement identifiable sur les gaz du sang.

8- Épreuves d’effort :

Les épreuves d’effort sur bicyclette ou tapis roulant permettent d’objectiver une gêne respiratoire compatible avec les plaintes du patient et de rechercher les facteurs limitatifs de l’effort (d’origine cardiaque, pulmonaire ou périphérique).

Elles sont peu pratiquées en routine.

Les patients BPCO semblent avoir la même consommation d’O2 que les sujets normaux pour un même effort.

Toutefois, la ventilation-minute nécessaire pour maintenir une PaCO2 constante est plus élevée car leur espace mort est augmenté.

Pour augmenter sa ventilation, le patient BPCO ayant une limitation des débits dans le volume courant dispose de deux voies : l’augmentation du débit inspiratoire ou la ventilation à haut volume pulmonaire (pour augmenter les débits expiratoires).

Ces deux mécanismes produisent respectivement une augmentation du travail des muscles inspiratoires, et donc une fatigue musculaire, et une hyperinflation pulmonaire progressive qui majorent les symptômes et la charge de travail.

Au total, plusieurs facteurs peuvent conditionner l’arrêt de l’effort chez ces patients :

– l’arrêt de l’effort est habituellement dû à une dyspnée intense ou une faiblesse des jambes ; la ventilation enregistrée lors du dernier palier de l’effort atteint alors souvent la ventilation maximale minute ; ceci traduit la diminution de la capacité ventilatoire due aux modifications de la mécanique pulmonaire qui provoquent une augmentation du travail et une fatigue respiratoire ;

– les effets sur l’hématose sont variables ; une désaturation peut constituer un facteur limitatif à l’effort, due à la majoration des inégalités ventilation/perfusion ; la tolérance de ces désaturations, parfois majeures chez les patients BPCO, peut être remarquable ; l’apparition d’une hypercapnie à l’effort peut également être rapide et sans signes cliniques évocateurs ;

– en général, la réponse cardiovasculaire est assez adaptée, avec un débit cardiaque adapté ; toutefois, l’augmentation du volume d’éjection peut être moindre chez le BPCO très sévère, probablement en rapport avec les effets de l’hypertension pulmonaire et de l’hyperinflation pulmonaire.

Imagerie :

A – Radiographie thoracique :

La radiographie thoracique, première approche diagnostique des BPCO, permet de suspecter un emphysème dans environ 65 à 80 % des cas avec une bonne spécificité.

L’identification radiographique repose sur la présence de signes indirects tels que distension thoracique (augmentation de l’espace clair rétrosternal sur le profil, aplatissement des deux coupoles, angle costophrénique obtus) et modifications vasculaires.

L’aplatissement du diaphragme peut être évalué objectivement sur la hauteur entre le bord supérieur du diaphragme et une ligne tracée entre l’angle costal et l’angle cardiophrénique (une hauteur inférieure à 1,5 cm indique un diaphragme aplati).

La réduction du nombre et de la taille des vaisseaux pulmonaires (oligémie) est également en faveur du diagnostic d’emphysème. Dans les formes débutantes de bronchite chronique, le cliché standard est le plus souvent normal.

L’épaississement bronchique peut néanmoins se traduire par une augmentation de la trame bronchovasculaire et, parfois, de clartés tubulées et images en anneaux parahilaires donnant un aspect de « poumon sale ».

Cet aspect n’est pas spécifique et reste très inconstant chez les patients porteurs d’une bronchite chronique. Un aspect en « lame de sabre » de la trachée visible sur les radiographies simples est rare mais caractéristique d’une BPCO déjà évoluée.

L’augmentation du calibre des artères pulmonaires sur la radiographie standard reflète le degré d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) présente. Une appréciation simple et sensible de l’HTAP est l’augmentation du diamètre de l’artère lobaire pulmonaire droite au-delà de 16 mm.

Au total, la radiographie standard permet de détecter les emphysèmes sévères, mais manque de sensibilité pour les maladies débutantes.

B – Tomodensitométrie thoracique :

La TDM, et notamment la technique en haute résolution (coupes fines de 1 mm), est le moyen le plus sensible (sensibilité de 91 %) et le plus spécifique (spécificité de 100 %) de poser « in vivo » le diagnostic d’emphysème. Les signes TDM d’emphysème associent :

– des zones de destruction emphysémateuse qui apparaissent avasculaires, hypodenses, avec des limites sans paroi propre permettant de les différencier des kystes (« zones de faible atténuation ») ;

– des modifications de la vascularisation (raréfaction vasculaire, interruption des vaisseaux lésés, refoulement des vaisseaux par l’emphysème).

La TDM permet de distinguer les différents types d’emphysème (centrolobulaire, panlobulaire, paraseptal) surtout lorsque les lésions sont débutantes.

L’ECL est caractérisé par une distribution hétérogène de lésions intralobulaires, prédominantes dans les lobes supérieurs, avec parfois la persistance des artères centrolobulaires.

Dans l’EPL, l’atteinte est uniforme et la destruction intralobulaire est extensive, avec une disparition des artères centrolobulaires, et prédominante dans les lobes inférieurs.

L’emphysème paraseptal est caractérisé par des espaces aériens anormaux multiples à type de kyste à parois fines, situés le long du bord de l’acinus et uniquement contre une structure fixe, tels les voies aériennes, la surface pleurale, les septa lobulaires ou un vaisseau.

Le scanner permet également une quantification de l’emphysème, en utilisant une évaluation visuelle ou des mesures de densité.

L’image de la TDM est alors constituée d’une matrice de pixels représentant chacun, sur une échelle de gris, la valeur de l’absorption du rayon ou la densité du volume-élément correspondant (voxel).

Les mesures de densité sont exprimées sur une échelle linéaire en unités Hounsfield (eau : 0 ; air : -1 000).

L’évaluation quantitative d’emphysèmes modérés par laTDMsemble corrélée à l’évaluation quantitative histologique, en comparant les mesures de densités sur la TDM et les mesures histologiques d’AWUV.

D’autres études ont montré que le degré d’emphysème déterminé par TDM était corrélé avec la réduction de la capacité de diffusion, mais moins bien avec le degré d’obstruction bronchique mesuré sur le VEMS.

Par ailleurs, la TDM est l’examen de choix pour préciser l’existence de bulles (ou de système bulleux) et le caractère « hétérogène » de l’emphysème.

Elle précise la topographie exacte des lésions bulleuses, leur caractère compressif possible sur le parenchyme adjacent et l’existence éventuelle de complications (hémorragie, infection, rupture de bulle).

C’est, avec la scintigraphie, un examen clé pour discuter l’indication d’une bullectomie, voire d’une réduction de volume chirurgicale d’emphysème.

L’examen TDM en coupes fines précise enfin l’existence de dilatation des bronches (DDB) associée aux BPCO.

La connaissance de leur topographie et de leur importance permet également de préciser les indications chirurgicales éventuelles (exérèse chirurgicale de foyer localisé de DDB).

C – Scintigraphie pulmonaire :

Les scintigraphies pulmonaires de perfusion et de ventilation sont généralement anormales chez les BPCO.

Les anomalies constatées sont dues à la fois aux lésions des petites voies aériennes et aux lésions parenchymateuses et vasculaires.

La perfusion pulmonaire est réalisée habituellement avec de l’albumine marquée au technicium 99m injectée par voie intraveineuse périphérique, et la ventilation pulmonaire à l’aide d’un gaz de xénon 133.

L’aspect est habituellement hétérogène, avec de multiples zones d’activité réduite ou absente, souvent concordantes en ventilation et en perfusion, et distribuées dans l’ensemble du parenchyme pulmonaire.

En cas d’emphysème, les defects sont non segmentaires, dus aux zones de destruction parenchymateuse. Ces defects correspondent à des zones d’oligémie ou à des formations bulleuses observées sur la radiographie thoracique, mais parfois à des zones radiographiquement normales.

En cas de BPCO de type B (blue bloater), les defects sont parfois de type segmentaire, concordant en ventilation et en perfusion, et souvent moins marqué en perfusion.

Le caractère parfois systématisé pourrait être dû à un rétrécissement de calibre bronchique, avec hypoxie distale et vasoconstriction hypoxique secondaire.

Néanmoins, il est également observé des defects ventilatoires « mismatchés » (sans defect perfusionnel correspondant) au cours des décompensations aiguës, disparaissant au décours de la poussée sur les scintigraphies ultérieures.

Ce dernier aspect suggère à la fois un rétrécissement du calibre des voies aériennes « réversible » et l’absence de vasoconstriction hypoxique.

L’utilisation du xénon 133 permet l’analyse du wash in (jusqu’à l’équilibre) et du wash out (rinçage).

La période pour atteindre l’équilibre peut être allongée chez les patients BPCO.

Une clairance du xénon 133 prolongée au-delà de 3 minutes (durée habituelle d’élimination) témoigne de zones de rétention gazeuse. Plusieurs indications de la scintigraphie peuvent être retenues au cours des BPCO :

– elle permet un diagnostic d’extension des lésions au cours des BPCO évoluées ;

– en cas d’indication de chirurgie d’exérèse de résection du parenchyme (notamment lobectomie ou pneumectomie pour cancer bronchique), la scintigraphie de perfusion fait partie du bilan préopératoire chez les patients atteints d’insuffisance respiratoire chronique obstructive ; couplée aux tests fonctionnels (examen fonctionnel respiratoire [EFR] et gaz du sang), la répartition de la perfusion pulmonaire permet d’évaluer la fonction respiratoire prévisible postopératoire du patient ;

– l’analyse perfusionnelle fait partie du bilan préopératoire de la chirurgie des bulles d’emphysème et de la chirurgie de réduction de volume, permettant d’apprécier l’état du parenchyme adjacent ;

– en cas de suspicion d’embolie pulmonaire, l’interprétation des scintigraphies pulmonaires (ventilation et perfusion) est considérée comme délicate, mais des études spécifiques chez les BPCO ont rapporté son utilité ;

– elle peut, enfin, aider au dépistage des formes précoces de BPCO, avec une sensibilité équivalente aux tests spirométriques.

Explorations cardiovasculaires :

L’HTAP est une complication fréquente et potentiellement sérieuse des BPCO, caractérisée par une pression moyenne de l’artère pulmonaire supérieure ou égale à 25 mmHg au repos ou à 35 mmHgà l’effort.

Elle touche environ la moitié des BPCO de plus de 50 ans. Cette HTAP est principalement due à une vasoconstriction pulmonaire hypoxique de mécanisme mal compris.

De plus, l’hypoxie prolongée peut être responsable d’un « remodelage » vasculaire avec hypertrophie de la média et rétrécissement de la lumière.

D’autres facteurs sont également associés (perte de surface vasculaire par destruction du parenchyme, hyperviscosité sanguine par polyglobulie, insuffisance cardiaque gauche associée).

Cette maladie vasculaire pulmonaire est corrélée avec la sévérité de l’atteinte pulmonaire et les patients les plus hypoxémiques ont généralement les HTAP les plus importantes.

L’appréciation du degré d’HTAP chez les BPCO se fait, en pratique, par des techniques non invasives (échocardiographie) qui ont actuellement supplanté le cathétérisme droit en première intention.

A – Électrocardiogramme (ECG) :

Il doit être toujours être réalisé en cas d’anomalies évocatrices de cardiopathie, de trouble du rythme, de signes droits, ou si le VEMS est inférieur à 50 % de la théorique.

Les critères ECG pour détecter une hypertrophie ventriculaire droite (déviation axiale droite supérieure à 100°, R ou R’ supérieure ou égale à S enV1 ouV2, R inférieur à S enV6) sont peu sensibles mais assez spécifiques.

B – Échocardiographie avec examen doppler :

L’échocardiographie avec examen doppler permet une appréciation non invasive du degré d’HTAP, en estimant une mesure de la pression artérielle pulmonaire systolique grâce au jet de régurgitation triscupidienne lorsqu’il est présent.

La corrélation avec les mesures invasives est assez bonne, mais la faisabilité de cette mesure chez les BPCO est difficile.

En outre, l’échocardiographie permet d’apprécier le degré de dilatation des cavités droites et la fonction ventriculaire gauche.

Même en l’absence de cardiopathie gauche autonome, une dilatation importante du ventricule droit, avec un septum paradoxal faisant saillie dans le ventricule gauche, peut entraîner une dysfonction diastolique du ventricule gauche par l’interdépendance ventricule droit-ventricule gauche.

C – Cathétérisme cardiaque droit :

Le cathétérisme cardiaque droit avec étude hémodynamique peut être indiqué dans plusieurs circonstances chez les BPCO :

– en cas de diminution de la tolérance à l’effort sans aggravation de l’obstruction des voies aériennes, afin de caractériser la contribution cardiovasculaire à la dyspnée, notamment lorsque l’échocardiographiedoppler ne permet pas de conclure ;

– en cas de suspicion de maladie thromboembolique chronique associée, le cathétérisme étant généralement couplé à une angiographie pulmonaire ;

– pour l’évaluation de la fonction ventriculaire gauche lorsqu’une cardiopathie gauche est associée ; néanmoins, une insuffisance ventriculaire gauche peut être également due à l’interdépendance ventricule droitventricule gauche ;

– pour une évaluation hémodynamique préopératoire précise avant chirurgie de type réduction de volume ou greffe pulmonaire chez un BPCO sévère ; pour l’évaluation préopératoire d’une pneumectomie, le cathétérisme n’est plus que rarement demandé, mais il permet d’apprécier le degré d’HTAP postopératoire en occluant l’artère pulmonaire du côté atteint.

Autres investigations :

A – Fibroscopie bronchique :

La fibroscopie bronchique n’a pas d’intérêt diagnostique chez les BPCO.

Sa réalisation est indiquée pour rechercher un cancer bronchique en cas d’apparition de signe d’appel récent chez un BPCO (crachats hémoptoïques, pneumopathie récente chez un fumeur, modification persistante des symptômes bronchiques) ou d’opacité radiologique nouvelle.

À l’inverse, elle ne constitue pas un mode de dépistage du cancer bronchique chez ces patients.

B – Bilan otorhinolaryngologique (ORL) et stomatologique :

La recherche de foyers infectieux sinusiens (radiographie, TDM, examen ORL des fosses nasales) et dentaires (panorex, examen dentaire), susceptibles d’ensemencer les voies aériennes, doit être pratiquée en cas de répétition des épisodes d’exacerbations.

C – Prélèvements bronchiques microbiologiques :

Ils n’ont pas de place dans le bilan d’une BPCO en état stable.

En cas de suspicion d’acquisition d’un germe résistant aux antibiotiques usuels, de dystrophies bronchiques ou d’échec d’une antibiothérapie, ils sont effectués au mieux par des prélèvement protégés sous fibroscopie et non par l’examen cytobactériologique des crachats (ECBC) peu fiable.

Traitement à l’état stable :

Le traitement consiste, d’une part à supprimer les facteurs potentiels d’aggravation de la maladie, et, d’autre part, à améliorer la fonction respiratoire du patient.

A – Suppression des facteurs potentiels d’aggravation :

1- Tabac :

Chez les sujets fumeurs, l’arrêt du tabac est capable de freiner la chute annuelle du VEMS et de réduire l’excès de mortalité après une période de 10 à 20 ans de sevrage.

La prescription de gomme à mâcher à la nicotine semble apporter une aide significative chez les patients demandeurs d’une aide avec un soutien psychologique actif.

2- Aérocontaminants :

Différents polluants atmosphériques peuvent constituer des facteurs déclenchants ou aggravants une BPCO.

La prévention de ce risque repose sur des directives de qualité de l’air avec des normes pour les différents polluants (SO2, plomb, NO2, O3…).

En Île-de-France, la mise en place d’un système d’alerte depuis1994 permet une intervention sur l’émission des polluants et l’information des personnes à risque.

3- Infections bronchopulmonaires :

En cas d’exacerbation d’origine infectieuse, l’utilisation d’une antibiothérapie peut permettre de limiter le risque de décompensation respiratoire et donc de mortalité.

Par ailleurs, l’efficacité du vaccin antigrippe a été rapportée pour réduire les complications respiratoires des BPCO.

Le vaccin contre le pneumocoque est également recommandé.

B – Médicaments :

1- Bronchodilatateurs :

Trois types de bronchodilatateurs, les bêta-2-sympathomimétiques, les anticholinergiques et les théophyllines sont utilisés en pratique clinique, afin de réduire les symptômes (dyspnée) et d’augmenter la tolérance à l’effort.

L’évaluation de leur efficacité chez les patients BPCO repose sur des essais cliniques où des variations de paramètres fonctionnels, tels que VEMS et tolérance à l’effort, ont été étudiées sur des périodes brèves.

Leur impact sur l’évolution naturelle de la maladie (vitesse de dégradation du VEMS au cours du temps) est en cours d’évaluation.

Concernant leur voie d’administration, la voie inhalée doit toujours être préférée lorsqu’elle est disponible (bêta-2- sympathomimétiques, anticholinergiques), car elle possède toujours un meilleur rapport efficacité/tolérance que la voie systémique.

L’éducation sur l’utilisation du dispositif de la voie inhalée doit être précise, adaptée au patient et vérifiée périodiquement.

* Bêta-2-sympathomimétiques :

Les bêta-2-sympathomimétiques par aérosols doseurs à courte durée d’action provoquent une bronchodilatation rapide (en quelques minutes), maximale en 15 à 30 minutes, et se prolongeant en moyenne pendant 4 à 6 heures, ce qui nécessite une multiplication des prises.

Il n’existe pas de parallélisme strict entre l’amélioration spirométrique sous bêta-2-mimétique et la tolérance à l’effort ; certains patients n’ayant pas de réponse spirométrique peuvent néanmoins démontrer une meilleure tolérance à l’effort (test de marche en 6 minutes) après bêta-2-mimétiques.

* Anticholinergiques :

Les anticholinergiques induisent une bronchodilatation moins rapide que les bêta-2-mimétiques (maximale en 30 à 90 minutes), mais un peu plus prolongée (4 à 6 heures pour l’ipratropium et 6 à 8 heures pour l’oxitropium).

La voie inhalée par aérosols doseurs est dénuée d’effets systémiques aux doses usuelles et ne produit que de rares effets secondaires bénins.

De plus, il n’existe pas d’intolérance. Leur efficacité semble au moins égale ou supérieure aux bêta-2-mimétiques.

* Théophylline :

Les théophyllines sont disponibles uniquement par voie orale, ce qui limite leur efficacité sur les symptômes aigus et explique leurs fréquents effets secondaires systémiques, surtout digestifs et neurologiques.

Des formes à longue durée d’action (demi-vie de 12 à 18 heures) permettent deux prises par 24 heures.

Leur efficacité s’observe avec des concentrations sériques supérieures à 5 íg/mL et les effets secondaires augmentent très vite audessus de 15 íg/mL, rendant étroite la fourchette thérapeutique.

De nombreuses interactions médicamenteuses, augmentant (érythromycine…) ou réduisant (rifampicine…) les taux sanguins des théophyllines, doivent être prises en compte.

Leur action bronchodilatatrice chez les BPCO stables est limitée et semble égale ou inférieure à celle des bêta-2-sympathomimétiques ou des anticholinergiques.

De plus, elles augmentent l’efficacité des muscles respiratoires, notamment du diaphragme chez les BPCO, et pourraient avoir un effet protecteur contre la fatigue des muscles inspiratoires.

L’ensemble de ces actions participe à une meilleure tolérance à l’effort et une diminution de la dyspnée chez les BPCO.

2- Anti-inflammatoires :

* Corticostéroïdes oraux :

Les formes orales peuvent être utiles sur des périodes courtes dans le but de réduire rapidement l’inflammation bronchique.

Inversement, leur prescription au long cours chez les patients BPCO en état stable doit rester exceptionnelle, car leur bénéfice dans cette indication reste controversé et incertain.

Un ralentissement du déclin de la fonction ventilatoire pourrait apparaître chez un faible pourcentage de patients sous corticoïdes oraux au long cours (10 à 30 % des patients).

Dans cette optique, un test aux corticoïdes oraux (0,5 mg/kg/j pendant 15 à 21 jours), positif en cas de réversibilité de l’obtruction bronchique (amélioration du VEMS d’au moins 200 mL, ou de 10 % de la valeur théorique, ou de 20 % de la valeur initiale) pourrait aider à définir les patients « répondeurs ».

Dans tous les cas, cette prescription exceptionnelle doit être réservée aux patients les plus sévères, avec une posologie minimale efficace et en réévaluant très fréquemment son indication et sa tolérance, du fait des effets secondaires délétères des stéroïdes (ostéoporose, myopathie…).

* Corticoïdes inhalés :

Leurs indications chez les patients BPCO ne sont encore pas clairement codifiées et leur prescription ne doit pas être systématique, même si leurs effets secondaires sont moins importants que les formes orales.

Actuellement, ils semblent devoir être réservés aux patients ayant une obstruction spastique, une réversibilité de l’obstruction bronchique après test aux stéroïdes oraux, ou en cas d’HRB.

Il doit être néanmoins souligné qu’il n’existe pas de parallélisme strict entre la réponse aux stéroïdes oraux et celle aux stéroïdes inhalés.

3- Mucomodificateurs :

On distingue deux types de mucomodificateurs : les mucolytiques vrais et les mucorégulateurs.

Les mucolytiques comprennent les agents réducteurs à groupe thiol (par exemple, N-acétylcystéine) qui rompent les ponts disulfures établis entre deux fonctions thiols de protéines et les enzymes protéolytiques (par exemple, chymotrypsine) qui rompent les liaisons peptidiques des glycoprotéines.

Les mucorégulateurs (par exemple, carbocystéine, ambroxol) modifient les propriétés rhéologiques du mucus, via des modifications métaboliques des cellules secrétoires bronchiques.

Chez les patients BPCO, les caractéristiques rhéologiques du mucus sont modifiées et l’épuration mucociliaire est diminuée.

Le bénéfice des mucorégulateurs, qui faciliteraient le drainage des sécrétions bronchiques, n’est cependant pas clairement établi chez ces patients, même lors des épisodes d’exacerbation.

Il est possible de les prescrire comme traitement de confort chez les BPCO, en surveillant le volume des expectorations afin d’éviter une majoration délétère des sécrétions bronchiques.

Ils ne se substituent pas à la kinésithérapie de drainage bronchique.

C – Moyens non médicamenteux :

1- Réhabilitation respiratoire :

La réhabilitation respiratoire a pour but de limiter la morbidité et la mortalité liées à la maladie, en limitant ses conséquences fonctionnelles et psychologiques :

– kinésithérapie et exercices ventilatoires : la kinésithérapie de drainage bronchique est indiquée chez les patients BPCO bronchorrhéiques, le plus efficacement par des méthodes de contrôle du flux expiratoire ; l’impact sur l’évolution à long terme est difficile à évaluer, mais la qualité de vie semble améliorée chez certains patients ; les techniques d’exercices ventilatoires, associant une ventilation dirigée à prédominance diaphragmatique, qui tente de corriger la ventilation rapide à petit volume courant des BPCO, et une expiration à lèvres pincées, n’ont pas clairement fait la preuve de leur efficacité ;

– réentraînement à l’effort : le réentraînement à l’effort consiste à pratiquer une activité physique d’endurance (vélo, marche…) adaptée au patient, généralement à une fréquence cardiaque à laquelle apparaît la dyspnée (seuil ventilatoire) ; ces programmes, effectués dans des centres spécialisés, diminuent la dyspnée d’effort des BPCO, mais le bénéfice de l’amélioration s’estompe après la fin du protocole de réentraînement.

2- Renutrition :

Une dénutrition (généralement estimée par un poids inférieur à 90 %du poids idéal théorique) est observée chez environ 25 % des BPCO et jusqu’à 50 % des patients hospitalisés.

Elle est associée à une réduction de la fonction des muscles respiratoires et une augmentation de la mortalité.

Son mécanisme est principalement un état d’hypermétabolisme de repos lié à une augmentation de la consommation d’O2 par les muscles respiratoires.

Une supplémentation orale importante (d’au moins 30 %de la ration calorique) et suffisamment prolongée (supérieure ou égale à 2 mois) peut améliorer les performances des muscles respiratoires et périphériques et les capacités d’exercice.

Néanmoins, ces programmes de renutrition sont difficilement réalisables en pratique chez les patients en état stable, notamment du fait de l’« intolérance » des patients aux formules d’apports hypercaloriques de supplémentation.

Chez les patients les plus sévères, une renutrition peut devenir un impératif thérapeutique, notamment chez les patients inscrits sur liste de transplantation pulmonaire, du fait du déficit immunitaire induit.

En cas d’échec de la supplémentation orale, une renutrition entérale nocturne, via une sonde de gastrostomie percutanée, doit alors être envisagée.

3- Oxygénothérapie :

Le bénéfice de l’oxygénothérapie à long terme (OLT) chez les BPCO hypoxémiques a été démontré au début des années 1980.

Chez ces patients, l’OLT augmente l’espérance de vie, et ce de façon proportionnelle à la durée quotidienne de l’oxygénothérapie.

La qualité de vie et les performances intellectuelles sont également améliorées.

Les indications de l’OLT chez les BPCO ont été définies :

– une PaO2 inférieure à 55 mmHg, mesurée à deux reprises à 3 semaines d’intervalle chez un patient en état stable bénéficiant d’un traitement optimal (arrêt du tabac, bronchodilatateurs, kinésithérapie) ;

– une PaO2 comprise entre 56 et 59 mmHg, lorsqu’elle est associée à l’un des élément suivants :

– hématocrite supérieur à 55 % ;

– signes cliniques de coeur pulmonaire chronique ;

– une pression pulmonaire moyenne supérieure ou égale à 20 mmHg.

L’OLT est habituellement délivrée par lunettes nasales, à un faible débit (généralement 1 à 2 L/min) adapté aux gaz du sang, de façon à obtenir une PaO2 supérieure à 60 mmHg.

La durée doit être supérieure à 15 heures par jour.

La source d’O2 comprend généralement un poste fixe avec un extracteur d’O2 (fonctionnant sur une source électrique) associée à des obus d’O2 gazeux permettant une autonomie d’environ 2 heures pour sortir du domicile.

Une source d’O2 liquide, à partir de laquelle des réservoirs portables sont remplis, permet une oxygénothérapie de déambulation avec une plus grande autonomie.

4- Ventilation assistée au long cours à domicile :

Elle concerne les patients les plus sévères, instables sous OLT, avec une hypoventilation alvéolaire non maîtrisée malgré un traitement médical optimal.

Sa mise en place intervient le plus souvent au décours d’une décompensation aiguë ayant nécessité une ventilation mécanique invasive (intubation endotrachéale) en réanimation, en cas d’impossibilité de sevrage.

Elle est effectuée soit par ventilation sur trachéotomie, soit par une ventilation non invasive (VNI).

La trachéotomie est une solution invasive qui n’est utilisée qu’après l’échec de la VNI.

Elle nécessite l’éducation du patient, mais semble la plus adaptée lorsque la durée de ventilation dépasse 15 heures par jour.

La VNI, via un masque nasal ou un masque moulé, est maintenant proposée comme alternative à la trachéotomie, soit en mode contrôlé volumétrique, soit en aide inspiratoire.

Son bénéfice au long cours n’est pas clairement établi.

5- Traitements substitutifs par A1-AT :

En cas de déficit en A1-AT, des traitements substitutifs semblent théoriquement appropriés.

Des taux sériques au-dessus d’un seuil « protecteur » peuvent être atteints avec l’administration parentérale de 60 mg/kg/semaine ou 250 mg/kg/mois d’A1-AT.

Toutefois, les essais thérapeutiques non contrôlés effectués à ce jour ne permettent pas de conclure sur l’efficacité de ce type de traitement qui doit donc rester réservé à des essais cliniques.

6- Saignée :

Elle reste indiquée en cas de polyglobulie secondaire, en pratique lorsque l’hématocrite dépasse 55 %.

Son bénéfice clinique reste limité.

7- Chirurgie de l’emphysème :

* Chirurgie de résection de bulles :

Devant l’existence d’une bulle unique de grande taille, la résection doit être discutée en cas d’infection, de pneumothorax ou d’hémorragie.

Dans le cas d’une insuffisance respiratoire obstructive chez un patient emphysémateux, le traitement chirurgical d’une volumineuse bulle associée (volume supérieur au tiers d’un hémithorax) est une indication fonctionnelle généralement admise, surtout s’il existe un tassement du parenchyme adjacent à la bulle.

* Chirurgie de réduction de volume pulmonaire pour emphysème diffus :

Cette chirurgie avait été proposée dès les années 1950, mais fortement critiquée notamment du fait d’une mortalité élevée.

Elle connaît actuellement un nouvel engouement depuis le résultat d’une étude récente de l’équipe de Cooper montrant une amélioration fonctionnelle clinique et spirométrique après réduction de volume chez 20 patients emphysémateux.

De nombreuses équipes pratiquent actuellement ce type de chirurgie sur les patients porteurs de formes hétérogènes d’emphysème (apprécié en TDM et en scintigraphie de perfusion pulmonaire), mais certains points restent à préciser pour cette technique en cours d’évaluation en ce qui concerne les meilleurs critères de sélection, les critères d’exclusion et la durée de l’amélioration fonctionnelle lorsqu’elle survient.

8- Transplantation :

Dans le registre de l’International Society for Heart and Lung Transplantation (ISHLT) de 1997, l’emphysème représente 56,2 % des transplantations unipulmonaires, 28,1 % des indications de transplantations bipulmonaires et 6,8 % des transplantations cardiopulmonaires.

L’indication d’une transplantation chez ces patients repose avant tout sur des critères objectifs de gravité (VEMS inférieur à 25 % de la théorique, désaturation profonde à l’exercice, hypercapnie, HTAP secondaire importante, détérioration fonctionnelle rapide), mais également sur des critères subjectifs telle une qualité de vie médiocre.

L’indication est donc posée à la fois pour la menace du pronostic vital et pour le traitement du handicap respiratoire.

Compte tenu du pronostic propre de la transplantation, les patients BPCO ne doivent être inscrits sur liste qu’à un stade avancé de la maladie, car leur espérance de vie sans transplantation peut être assez longue, malgré une invalidité sévère.

Le choix entre les deux types de transplantation (unipulmonaire ou bipulmonaire) généralement proposés aux emphysémateux reste une question actuellement débattue.

Quels que soient leurs avantages et inconvénients respectifs, il n’a actuellement pas été démontré de différence significative de survie entre greffes unipulmonaires et bipulmonaires.

Les résultats du registre de l’ISHLT montrent une survie comparable après transplantations monopulmonaire et bipulmonaire, avec 67 % de survie à 1 an, 60 % à 2 ans, 40 % à 5 ans.

Traitement des exacerbations aiguës :

La prise en charge des exacerbations sera effectuée en milieu hospitalier, en présence de signes cliniques de gravité (polypnée supérieure à 25 par minute, tirage, tachycardie supérieure à 100 par minute, troubles de la vigilance ou de la conscience, oedèmes des membres inférieurs, cyanose, fièvre ou BPCO connue sévère sous OLT) et à proximité d’une réanimation médicale pouvant assurer une ventilation mécanique en cas de nécessité.

A – Traitement conservateur :

Le traitement est « conservateur » en première intention, incluant toujours une oxygénothérapie à faible débit par sonde nasale (1 à 2 L/min) ou masques avec Venturi (FIO2 [concentration de l’oxygène dans l’air inspiré] entre 24 et 40 %), adaptée ensuite aux gaz du sang répétés. L’objectif est d’obtenir une SaO2 supérieure à 90 %ou une PaO2 supérieure à 60 torr sans élévation de la capnie, avec majoration ou apparition d’une acidose respiratoire.

La cause de l’aggravation potentielle de l’hypercapnie sous oxygénothérapie semble multifactorielle.

L’importance respective de plusieurs mécanismes (suppression du stimulus hypoxie sur la ventilation, augmentation du rapport espace mort/volume courant) reste controversée.

L’amélioration des débits aériens doit être tentée par l’administration de bronchodilatateurs.

Les nébulisations sur haut débit d’air de bêta-2-mimétiques (dose de 5 mg de salbutamol ou de 10 mg de terbutaline) sont utilisées en raison de leur rapidité d’action et peuvent être répétées de façon rapprochée selon la tolérance.

L’administration de bêta-2-mimétiques par voie intraveineuse doit être réservée aux formes les plus sévères, en réanimation et après échec des nébulisations.

Le bénéfice obtenu par l’association à des anticholinergiques (bromure d’ipratropium 0,5 mg) lors des exacerbations n’est pas clairement démontré chez les BPCO.

L’utilisation de théophylline intraveineuse en seconde intention est parfois utile, à doses adaptées aux taux sanguins à maintenir entre 8 et 12 íg/mL pour éviter un surdosage et une toxicité.

La place des corticoïdes par voie générale (per os ou intraveineuse), dans le traitement des exacerbations, n’est pas bien codifiée. Les sujets répondeurs ont généralement une forme spastique, mais sont parfois difficiles à identifier.

De façon pratique, des doses équivalentes à 0,5-1 mg/kg/j de prednisone peuvent être prescrites dans les formes sévères, en éliminant au préalable une pneumopathie infectieuse.

Le bénéfice des stéroïdes doit être rapidement évalué (après 1 ou 2 semaines) et ceux-ci interrompus en l’absence de bénéfice clinique, afin d’éviter leurs complications.

Chez les patients encombrés, une kinésithérapie de drainage prudente, voire une aspiration trachéale « aveugle », peuvent être pratiquées.

Le bénéfice d’une aspiration trachéobronchique sous fibroscopie doit être mis en balance avec les risques d’une aggravation respiratoire « provoquée » requérant une ventilation mécanique.

Afin d’éviter une diminution de la contractilité diaphragmatique, certaines anomalies métaboliques (hypokaliémie, hypomagnésémie, hypophosphorémie) doivent être recherchées et corrigées.

En cas de surcharge hydrosodée importante ou d’insuffisance cardiaque gauche associée, des diurétiques type furosémide sont utilisés sur une courte période, en surveillant l’apparition d’une alcalose métabolique délétère.

La prévention du risque thromboembolique par anticoagulation est également utile, du fait de la dysfonction ventriculaire droite et de l’immobilisation.

Enfin, dans tous les cas, le traitement d’un facteur déclenchant identifié de l’exacerbation doit être rapide.

La présence des trois critères d’Anthonisen (augmentation du volume des expectorations, modification des crachats devenant purulents, majoration de la dyspnée), chez un patient BPCO en exacerbation, rend l’origine infectieuse probable et justifie une antibiothérapie.

Lorsque seulement un ou deux critères sont présents, l’antibiothérapie semble également justifiée en cas d’insuffisance respiratoire associée à la BPCO (hypoxémie à l’état de base), mais elle reste discutée autrement.

Le choix de première intention repose sur l’utilisation d’aminopénicilline, d’un macrolide ou apparenté, de céphalosporine de première génération orale, voire de d’association aminopénicilline et inhibiteur de bêta-lactamase, ou de céphalosporines de deuxième ou troisième génération (actives sur le pneumocoque et sur Haemophilus influenzae, sécréteurs de bêta-lactamases).

La durée de l’antibiothérapie est généralement de 7 à 10 jours.

S’il existe des signes d’atteinte parenchymateuse pulmonaire, l’obtention d’un prélèvement bactériologique protégé (brosse bronchique ou prélèvement distal protégé sous fibroscopie ou ponction transtrachéale) est utile, surtout en cas d’échec d’une antibiothérapie préalable, de situation sévère ou d’hospitalisation récente.

B – Ventilation mécanique :

Elle est indiquée d’emblée, s’il existe des signes de menace vitale à court terme (confusion, somnolence, voire coma, épuisement respiratoire avec tirage majeur et respiration abdominale paradoxale, signes de choc…) ou après échec du traitement médical « conservateur » (apparition ou aggravation d’une acidose respiratoire avec pH inférieur à 7,30, apparition de signes d’épuisement respiratoire ou de signes d’encéphalopathie…).

L’évaluation de l’échec dépend avant tout de l’expérience du praticien, car il n’existe pas de critère absolu strict (notamment gazométrique) de ventilation.

Le traitement instrumental de référence est la ventilation mécanique par intubation endotrachéale.

Elle est efficace pour le traitement des hypoventilations alvéolaires aiguës des BPCO, mais expose à plusieurs types de complications (pneumopathies nosocomiales, complications de décubitus en réanimation, hémorragie digestive, sténoses trachéales, postintubation…).

Afin d’éviter l’intubation et de pouvoir « passer un cap », s’est developpée récemment la VNI délivrée à l’aide d’un masque nasal ou facial, le plus souvent en ventilation spontanée « assistée » en pression (aide inspiratoire).

Elle nécessite une expérience pratique de l’équipe soignante (choix et adaptation du masque…) et son succès (ou son échec) doit être rapidement évalué, après quelques heures, sur l’évolution de la dyspnée et des gaz du sang (capnie et pH).

Elle permet parfois une amélioration rapide, raccourcissant la durée du séjour en réanimation et évitant la morbidité et mortalité associées à la ventilation invasive.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.