Atrophies (dégénérescences) cérébelleuses tardives (Suite)

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Première partie

Atrophies cérébelleuses acquises :

A – ATROPHIES CÉRÉBELLEUSES SECONDAIRES :

Atrophies (dégénérescences) cérébelleuses tardives (Suite)Les atrophies cérébelleuses secondaires constituent un groupe hétérogène.

L’interrogatoire et l’examen clinique ont une place essentielle dans la démarche diagnostique.

En effet, la survenue tardive des troubles cérébelleux, l’absence d’antécédents familiaux, la présence d’antécédents personnels évocateurs, et l’association avec d’autres troubles neurologiques, peuvent permettre de faire suspecter une origine secondaire et d’orienter le diagnostic étiologique.

Les atrophies cérébelleuses d’origine toxique, représentées en premier lieu par l’éthylisme, et en corollaire les atrophies carentielles, sont le plus fréquemment rencontrées.

Les syndromes cérébelleux d’évolution subaiguë doivent faire évoquer un syndrome paranéoplasique.

Certaines causes plus rares nécessitent cependant d’être éliminées.

Par ailleurs, plusieurs hypothèses étiologiques peuvent parfois être évoquées.

1- Atrophies cérébelleuses d’origine toxique :

* Alcoolisme chronique :

L’alcoolisme chronique est la cause d’atrophie cérébelleuse probablement la plus fréquente.

Dans les cas d’alcoolisme évident et de carence nutritionnelle marquée, les symptômes cérébelleux débutent dans deux tiers des cas avant la cinquantaine et sont rarement isolés.

Le patient présente habituellement un syndrome cérébelleux tardif, progressif et symétrique, caractérisé par des troubles de la marche et de la statique.

Le syndrome cérébelleux cinétique est généralement modéré comparativement aux troubles de la marche.

La responsabilité directe de l’éthylisme chronique dans la survenue de lésions cérébelleuses est toujours débattue.

D’autres facteurs interviennent, en particulier la carence en vitamine B1 (thiamine), ainsi que les antécédents de traumatismes et d’épilepsie.

Les études IRM permettent de mettre en évidence une atrophie corticale prédominante à la partie antérosupérieure du vermis.

Il existe également une réduction de la substance blanche souscorticale.

L’atrophie peut toucher également la partie des hémisphères cérébelleux adjacente au vermis antérosupérieur et les lobes flocculonodulaires.

Les premières lésions neuropathologiques sont la perte des cellules à grain, puis celle des cellules de Purkinje, associées à une prolifération astrogliale.

L’importance de la disparition des cellules de Purkinje paraît corrélée à la quantité d’alcool consommée.

Seul le sevrage peut quelquefois permettre d’obtenir une amélioration de la symptomatologie.

* Causes iatrogènes :

Trois traitements médicamenteux ont principalement été impliqués dans la survenue d’atrophies cérébelleuses.

+ Phénytoïne (diphénylhydantoïne) :

Elle peut être responsable d’atrophie cérébelleuse dont l’importance est corrélée à la durée du traitement.

La posologie employée se révèle également déterminante.

En cas d’intoxication chronique, une étude portant sur 73 patients souffrant d’un retard psychomoteur a montré que 25 % des sujets présentaient des troubles de la marche persistants, après une durée moyenne de 2 ans de traitement environ.

La fréquence des crises, pouvant impliquer une hypoxie éventuelle, et la ou les pathologies sous-jacentes, notamment en cas de processus lésionnels étendus, sont considérées comme des facteurs favorisants.

Une atrophie cérébelleuse symptomatique peut également survenir en cas d’intoxications aiguës.

L’atrophie cérébelleuse est le plus souvent irréversible, mais l’arrêt de la phénytoïne permet d’obtenir quelquefois une amélioration clinique progressive.

Au sein des structures cérébelleuses, les cellules de Purkinje apparaissent particulièrement sensibles aux fortes doses de phénytoïne.

Proche de la phénytoïne, la nitrofurantoïne est susceptible de provoquer un syndrome cérébelleux après une utilisation prolongée.

Cependant, aucune atrophie cérébelleuse n’a été décrite dans les cas de syndromes cérébelleux induits par la nitrofurantoïne.

+ Lithium :

Il peut provoquer, en cas d’intoxication, un tremblement, des troubles cognitifs et cérébelleux, voire des troubles de vigilance, des crises comitiales, des myoclonies, des syndromes extrapyramidaux et des fasciculations.

Des cas d’atrophies cérébelleuses accompagnées de troubles cérébelleux axiaux ou cinétiques persistants ont été rapportés.

Ils constituent les séquelles neurologiques le plus fréquemment rencontrées.

Leur installation peut être insidieuse et les troubles parfois définitifs.

Une prévention et un suivi clinique et biologique régulier sont nécessaires.

L’intérêt des hémodialyses en cas d’intoxications sévères est discuté.

L’IRM permet de mettre en évidence une atrophie à la fois hémisphérique et vermienne.

Une perte des cellules de Purkinje est habituellement retrouvée.

Les facteurs favorisants sont, outre le surdosage, les interactions médicamenteuses, favorisant les surdosages en lithium, et l’hyperthermie, susceptible de favoriser l’afflux du calcium et l’excitotoxicité.

Les facteurs favorisants plus discutés sont l’utilisation concomitante des neuroleptiques, le sexe féminin et le type d’affection psychiatrique (schizophrénie).

Pour certains, la prescription de neuroleptiques en association doit être évitée et arrêtée en cas de troubles cérébelleux.

+ Cytarabine (cytosine-arabinoside ou ara-C) :

C’est la principale thérapeutique anticancéreuse responsable d’atrophies cérébelleuses.

Elle présente une toxicité cérébelleuse essentiellement liée à la voie intraveineuse et à la dose utilisée.

Une toxicité cérébelleuse a été observée jusque dans 14 % des cas.

Elle survient de façon aiguë, 3 à 8 jours après l’injection.

Dans environ un tiers des cas, les patients conservent un syndrome cérébelleux séquellaire.

Les sujets de plus de 60 ans ou souffrant d’une insuffisance rénale ou hépatique ont un risque plus important de présenter un syndrome cérébelleux définitif.

L’IRM peut montrer, chez les patients symptomatiques, une atrophie cérébelleuse et des hypersignaux de la substance blanche en séquences IRM pondérées T2.

L’atrophie est classiquement retardée de plusieurs mois par rapport aux symptômes.

D’autres antimétabolites peuvent être responsables de syndromes cérébelleux.

Le 5-fluorouracile (5-FU) peut être responsable de troubles cérébelleux dans 2 à 4% des cas, et le méthotrexate responsable de leucoencéphalopathies avec syndrome cérébelleux, notamment en cas de traitements intrathécaux.

* Toxiques industriels et environnementaux :

Différents toxiques ont été impliqués dans la survenue d’atrophies cérébelleuses.

Les toxiques le plus fréquemment rencontrés sont le mercure, le toluène, le plomb et le monoxyde de carbone.

+ Intoxications au mercure :

Il s’agit principalement du mercure organique ou du méthylmercure.

Les troubles neurologiques surviennent généralement après la consommation prolongée d’aliments contaminés (poissons, fruits de mer, céréales), mais de rares cas d’intoxications ont été rapportés à la suite d’une seule contamination, dans le cas du diméthylmercure, produit industriel extrêmement toxique.

Outre un syndrome cérébelleux, les patients souffrent également d’une atteinte des lobes occipitaux avec constriction du champ visuel, d’une atteinte du cortex sensoriel, de myoclonies et de tremblements posturaux et d’action.

Les examens radiologiques mettent notamment en évidence une atrophie cérébelleuse diffuse, plus marquée au niveau du vermis inférieur et central. Le traitement repose sur l’utilisation d’un chélateur par voie orale (succimer 10 mg/kg/8 heures).

+ Intoxications au toluène (méthylbenzène) :

Elles sont fréquemment en rapport avec des inhalations volontaires de solvant ou une exposition professionnelle qui impose une enquête par le médecin du travail. Les troubles neurologiques habituellement retrouvés sont les suivants : troubles cognitifs, syndrome pyramidal, troubles oculomoteurs, opsoclonus, neuropathies optiques, surdités, hyposmies, tremblements, dysarthries, nystagmus et ataxies cérébelleuses.

L’IRM met en évidence une dédifférenciation substance blanche-substance grise, une atrophie cérébrale, du corps calleux, du tronc cérébral, du cervelet et notamment du vermis. Les lésions neuropathologiques sont caractérisées par une démyélinisation, une gliose réactionnelle et une diminution des cellules de Purkinje.

La possibilité d’une amélioration de la symptomatologie cérébelleuse et visuelle sous amantadine a été rapportée.

+ Intoxications au plomb :

Elles peuvent être également responsables de syndromes cérébelleux, en plus des tableaux classiques de neuropathies, d’encéphalopathies, de crises comitiales et d’une baisse des performances auditives et visuelles.

Dans les cas d’encéphalopathies graves, sont retrouvés une atrophie focale du cortex cérébelleux avec disparition des cellules de Purkinje et des cellules granulaires, des infiltrats lymphomonocytaires, des zones de nécrose et une prolifération capillaire au niveau de la couche moléculaire.

Il existe également une possible atteinte de la substance blanche cérébelleuse.

+ Intoxications au monoxyde de carbone :

Elles sont responsables d’une anoxie cérébrale touchant la substance grise des noyaux gris centraux et du cortex cérébral, en particulier temporal interne, mais également le cortex cérébelleux.

Elles sont également responsables d’une démyélinisation touchant notamment le cervelet.

Alors que les troubles cérébelleux sont rares, on retrouve plus fréquemment en IRM une atrophie cérébelleuse associée à un hypersignal en séquence pondérée T2 de la substance blanche des hémisphères cérébelleux.

La substance blanche et les cellules de Purkinje apparaissent particulièrement sensibles à l’hypoxie.

+ Intoxications au bromure :

Elles peuvent, au long cours, être responsables de troubles cérébelleux associés à une atrophie cérébelleuse diffuse.

Les explorations radiologiques mettent en évidence une atrophie corticale sus-tentorielle.

+ Intoxications au thallium :

Elles sont rares. Employé essentiellement comme raticide, le thallium est quelquefois responsable d’encéphalopathies avec troubles cérébelleux.

On observe une démyélinisation et une destruction des cellules de Purkinje, responsables d’une atrophie cérébelleuse secondaire.

2- Atrophies cérébelleuses d’origine carentielle :

Les carences en vitamines E et B1 ont surtout été incriminées dans la survenue d’atrophies cérébelleuses.

Les carences en folates et vitamine B12 sont aussi susceptibles de provoquer une atteinte cérébelleuse. Toutefois, les cas d’atrophies cérébelleuses en rapport avec une carence en acide folique restent exceptionnels.

A contrario, si les carences en vitamine B12 peuvent être responsables d’anomalies de signal en IRM, les atrophies n’ont pas été décrites.

* Carences en vitamines E :

Les carences en vitamines E secondaires peuvent être observées au cours de dénutritions, de troubles d’absorption ou du transport des lipoprotéines (cholestase chronique).

Les troubles cérébelleux sont d’instauration progressive et débutent par des tremblements et des troubles de la marche.

L’examen révèle un syndrome cérébelleux statique et cinétique, une dysarthrie, un nystagmus horizontal, une hypotonie diffuse et un tremblement pouvant également toucher le chef.

Une atrophie cérébelleuse peut apparaître de façon diffuse.

Une supplémentation peut permettre une amélioration des troubles cérébelleux.

* Carences en vitamine B1 :

En dehors du cadre d’un alcoolisme chronique, les carences en vitamine B1 (thiamine) peuvent être également responsables du béribéri, de l’encéphalopathie de Gayet-Wernicke, du syndrome de Korsakoff ou d’une dégénérescence cérébelleuse.

L’encéphalopathie de Gayet-Wernicke comporte fréquemment un syndrome cérébelleux.

Les critères diagnostiques actuels de l’encéphalopathie de Gayet-Wernicke sont les suivants :

– carence d’origine alimentaire ;

– troubles oculomoteurs ;

– troubles cérébelleux ;

– syndrome confusionnel ou troubles mnésiques modérés. Deux critères sur quatre sont nécessaires pour évoquer le diagnostic.

Caine et al retrouvent un syndrome cérébelleux chez 81 % des patients présentant une encéphalopathie de Gayet-Wernicke et un syndrome de Korsakoff.

Les données neuropathologiques sont en faveur d’une vulnérabilité particulière des cellules de Purkinje au cours des carences en vitamine B1.

Une atrophie cérébelleuse similaire chez les patients carencés en vitamine B1 et les patients présentant une atrophie cérébelleuse liée à l’alcool a été retrouvée.

Le syndrome cérébelleux est susceptible de régresser dans les deux cas lorsqu’est réalisée une supplémentation en vitamine B1, ce qui constitue un argument en faveur d’un trouble du métabolisme de la vitamine B1 chez les sujets alcooliques.

* Carences en acide folique :

Les carences en acide folique ont rarement été impliquées dans le cadre d’atrophies cérébelleuses progressives. Wevers et al rapportent le cas unique d’un patient, sans déficit sérique ni intraérythrocytaire, mais présentant un trouble de la sécrétion de folate dans le liquide céphalorachidien (LCR) et un syndrome cérébelleux avec atrophie cérébelleuse, une amyotrophie spinale, une atteinte pyramidale et une surdité.

3- Atrophies cérébelleuses d’origine inflammatoire ou auto-immune :

Différentes affections d’origine inflammatoire et/ou auto-immunes ont été impliquées dans la survenue d’atrophies cérébelleuses.

* Maladie coeliaque :

La maladie coeliaque est responsable d’une intolérance au gluten et se caractérise cliniquement par un amaigrissement, une distension abdominale, une diarrhée et une stéatorrhée.

Elle peut être responsable de troubles neurologiques multiples : encéphalopathie, leucoencéphalopathie multifocale, démence, épilepsie, calcifications pariéto-occipitales, myélopathie, neuropathie périphérique, ataxie myoclonique progressive, et surtout ataxie cérébelleuse.

Une ataxie d’installation progressive est la complication neurologique le plus fréquemment observée au cours de la maladie coeliaque.

Avant l’apparition des troubles digestifs, l’ataxie peut être le premier signe clinique de la maladie, auquel peuvent s’associer un nystagmus et secondairement une dysarthrie, une dysphonie, une diplopie et un tremblement.

Les mécanismes en cause ne sont peut-être pas univoques.

D’éventuelles carences vitaminiques et des mécanismes toxiques ont été incriminés. Cependant, les études anatomocliniques donnent une place prépondérante aux troubles d’ordre immunitaire.

L’atrophie est diffuse et peut être accompagnée en IRM d’hypersignaux des pédoncules et des hémisphères cérébelleux en séquence pondérée T2.

Il n’existe pas de test diagnostique spécifique.

Un diagnostic définitif repose sur la mise en évidence :

– d’une malabsorption ;

– d’anomalies des villosités jéjunales avec modifications épithéliales à la biopsie ;

– d’une amélioration clinique, biochimique et histologique après introduction d’un régime sans gluten.

Les anticorps antigliadine et antiendomysiaux sont utilisés, mais une confirmation histologique apparaît nécessaire.

En absence de tout symptôme digestif, la présence d’anticorps antigliadine, associée à un génotype HLA DQ2 ou DR4 DQ8 chez des patients présentant une ataxie cérébelleuse parfois tardive, isolée ou associée à un nystagmus ou à une neuropathie périphérique, doit faire évoquer une ataxie liée au gluten (gluten ataxia).

Le traitement repose sur le régime sans gluten et la correction des déficits vitaminiques éventuels. Une amélioration des troubles neurologiques sous corticoïdes et régime est également possible.

Dans certains cas, l’atrophie cérébelleuse peut persister, voire s’aggraver progressivement malgré la stabilisation des troubles cliniques.

* Sclérose en plaques :

Au cours de la sclérose en plaques, l’accumulation de lésions démyélinisantes et axonales peut être responsable à long terme d’une atrophie cérébelleuse.

Elle est généralement plus importante dans les formes rémittentes secondairement progressives que dans les formes rémittentes seules.

L’atrophie cérébelleuse est corrélée à l’atrophie du tronc cérébral et de la moelle cervicale.

Elle se majore avec la durée de la maladie.

* Maladie de Behçet :

La maladie de Behçet est une affection inflammatoire notamment responsable d’une vascularite touchant les vaisseaux de petits calibres.

Elle est responsable, dans 20 à 30 % des cas, de lésions diffuses du système nerveux central. Une symptomatologie en rapport avec une atteinte du tronc cérébral est la plus fréquente des atteintes du système nerveux central.

Cependant, une atrophie cérébelleuse est peu souvent décrite, et la survenue d’un syndrome cérébelleux isolé est rare.

* Lupus érythémateux disséminé :

Le lupus érythémateux disséminé est responsable de syndromes cérébelleux dans seulement 2 % des atteintes du système nerveux central.

Une atrophie cérébelleuse peut être retrouvée.

La présence d’anticorps dirigés contre les cellules de Purkinje a été rapportée, en association avec une atrophie cérébelleuse et en absence de lésion démyélinisante.

* Maladie de Wegener :

La maladie de Wegener est une granulomatose nécrosante qui atteint le système nerveux central dans 2 à 8% des cas.

Une atrophie cérébelleuse, généralement associée à une atrophie cérébrale plus diffuse, a été rarement mentionnée.

* Anticorps antiglutamate décarboxylase (GAD-Ab) :

Depuis sa première description en 1990, plusieurs études ont permis de rapporter une atrophie cérébelleuse diffuse à la présence de GAD-Ab, notamment au cours de polyendocrinopathies autoimmunes, mais également au cours d’atrophies cérébelleuses progressives et d’atrophies tardives isolées d’allure dégénérative.

À ces troubles cérébelleux peuvent s’associer des troubles de l’oculomotricité et une neuropathie périphérique démyélinisante.

Plus récemment, les cas cliniques de 14 patients souffrant d’ataxie cérébelleuse en rapport avec la présence de GAD-Ab sériques et intrathécaux, semblables aux anticorps retrouvés dans le syndrome de « l’homme raide » (stiff person syndrome), ont été décrits.

Treize patients sont des femmes.

La plupart souffrent d’un diabète insulinodépendant de début tardif et présentent des antécédents personnels ou familiaux de troubles auto-immuns.

Le syndrome cérébelleux débute après 20 ans (âge moyen de 51 ans) et s’aggrave habituellement de façon progressive.

Une atrophie cérébelleuse habituellement isolée est retrouvée dans 50 % des cas.

Une amélioration clinique peut être obtenue grâce aux Ig intraveineuses.

4- Syndromes cérébelleux d’origine paranéoplasique :

Différents syndromes paranéoplasiques peuvent être responsables d’atrophies cérébelleuses.

Les syndromes cérébelleux paranéoplasiques constituent l’affection neurologique paranéoplasique la plus fréquente.

Ils peuvent être associés à n’importe quel type de tumeur.

Dans plus de 60 % des cas, les troubles cérébelleux précèdent de 3 mois à 2 ans la découverte du cancer.

A contrario, au cours de la maladie de Hodgkin, ils surviennent plus souvent après la découverte de la maladie.

Leur installation est habituellement subaiguë sur quelques semaines à quelques mois.

Les syndromes cérébelleux paranéoplasiques sont plus fréquents au cours des cancers gynécologiques et touchent essentiellement l’ovaire et le sein (38 %).

Les autres types de tumeurs le plus fréquemment rencontrés sont les tumeurs pulmonaires (28 %), notamment à petites cellules, et les lymphomes (16 %), hodgkiniens principalement.

Les troubles cérébelleux peuvent être du même type que ceux décrits au cours des atrophies cérébelleuses liées à l’alcoolisme chronique.

En effet, les troubles de la marche et l’ataxie peuvent prédominer, la dysarthrie est fréquente et le nystagmus plus rare.

– Au cours des syndromes paranéoplasiques liés aux anticorps anti- Yo, les sujets atteints sont à une exception près des femmes.

Un syndrome pancérébelleux d’installation aiguë sur quelques heures, ou subaiguë suivie d’une stabilisation est habituellement décrit.

Parmi les signes les plus évocateurs, on note la possibilité d’un nystagmus battant vers le bas et d’oscillopsies.

– En présence de syndromes cérébelleux et d’anticorps anti-Ri, on observe une ataxie souvent associée à un opsoclonus-myoclonus.

– Au cours des syndromes cérébelleux avec présence d’anticorps anti-Hu, le syndrome cérébelleux est rarement isolé (encéphalomyélites et encéphalo-myélo-névrites) et généralement d’installation tardive par rapport au reste des troubles neurologiques.

– En cas de maladie de Hodgkin, la présence d’anticorps anti-Tr, mais également anti-mGluR1 doit être recherchée.

La détection des anticorps antineuronaux dans le sérum ou le LCR vient conforter le diagnostic.

La recherche d’anticorps peut être négative et n’exclut pas le diagnostic de syndrome paranéoplasique.

La ponction lombaire permet de retrouver, chez environ 50 % des sujets souffrant de syndromes cérébelleux paranéoplasiques, une hyperprotéinorachie et/ou une pléiocytose lymphocytaire.

Une synthèse intrathécale d’Ig avec élévation de l’index des IgG et une distribution oligoclonale est également fréquente.

Au total, l’analyse du LCR n’est normale que dans 20 % des cas. Pendant les premiers mois, l’atrophie cérébelleuse en IRM peut manquer.

L’atrophie cérébelleuse est généralement globale et sans corrélation clinique.

L’atteinte des cellules de Purkinje est prédominante et massive.

Les troubles cérébelleux s’aggravent habituellement sur plusieurs semaines ou plusieurs mois, puis se stabilisent, mais le patient présente alors souvent une gêne majeure.

Seulement un tiers des patients environ sont susceptibles de se déplacer seuls.

Le pronostic est généralement lié aux troubles neurologiques au cours des cancers gynécologiques.

La médiane de survie est de 100 mois pour les patientes avec cancer du sein et de 22 mois avec cancer gynécologique.

Une amélioration des troubles neurologiques peut être observée après traitement de la tumeur primitive.

Cependant, ce cas de figure reste exceptionnel. Moins de 10 % des patients ont bénéficié de traitement immunosuppresseur ou immunomodulateur isolément ou en association (échanges plasmatiques, Ig intraveineuses, corticothérapie, cyclophosphamide).

5- Syndromes cérébelleux d’origine infectieuse et postinfectieuse :

* Agents conventionnels :

Différentes affections d’origine infectieuse et postinfectieuse ont été impliquées dans la survenue d’atrophies cérébelleuses.

Chez l’adulte, sont décrits des cas d’infection aux virus influenza, para-influenza, poliovirus, coxsackie, herpès simplex, cytomégalovirus (CMV), varicelle-zona-virus (VZV) et Epstein-Barr.

La persistance d’un syndrome cérébelleux et d’une atrophie se rencontre plus fréquemment après 60 ans. Un mécanisme lésionnel direct ou un processus inflammatoire indirect peuvent rendre compte de leur survenue.

La fragilité particulière des cellules de Purkinje aux processus toxiques ou immunologiques est susceptible d’expliquer l’atteinte cérébelleuse.

Trente pour cent des patients souffrant d’une démence à virus de l’immunodéficience humaine (VIH) présentent une ataxie précoce en rapport avec une atteinte des cellules de Purkinje.

La leucoencéphalopathie multifocale progressive est également parfois en cause dans les syndromes cérébelleux du sujet atteint de syndrome d’immunodéficience acquise (sida).

* Agents non conventionnels :

+ Formes sporadiques de maladie de Creutzfeldt-Jakob :

Contrairement au kuru et à la maladie de Gerstmann-Sträussler-Scheinker, le tableau clinique est habituellement caractérisé par l’installation progressive d’une démence, puis d’une ataxie.

Cette séquence est quelquefois inversée et une ataxie précoce peut être retrouvée dans 10 à 30 % des cas environ.

Le caractère homozygote (méthionine ou valine) sur le codon 129 du gène de la protéine prion est également un facteur de susceptibilité.

Le génotype valine/valine est plus fréquemment associé aux formes ataxiques, à une atteinte cérébelleuse sévère, caractérisée par une importante spongiose de la couche moléculaire, une perte neuronale et une gliose prédominante au niveau de la couche granulaire, et au type 2 de protéine prion pathogène.

En comparaison à la fréquence des atrophies du cortex cérébral, l’atrophie cérébelleuse est plus rarement visualisée en imagerie.

+ Formes acquises et iatrogènes de maladie de Creutzfeldt-Jakob :

 Le kuru, maladie transmise par cannibalisme, atteint de façon prédominante le cervelet.

Elle est responsable d’un syndrome cérébelleux précoce d’aggravation progressive.

Il existe une perte des cellules granulaires et des cellules de Purkinje, une importante gliose et des plaques amyloïdes (plaques « kuru ») prédominantes au niveau du cervelet.

Les formes iatrogènes de maladie de Creutzfeldt-Jakob sont également responsables de fréquents syndromes cérébelleux.

Elles sont généralement responsables de lésions du néocortex et du cervelet.

Au cours des formes iatrogènes secondaires aux greffes de dure-mère, il existe une nette prédominance de la perte cellulaire, de la spongiose et de la gliose dans la couche granulaire.

Une atteinte plus ou moins marquée de la substance blanche, de type panencéphalique, et de rares dépôts amyloïdes (plaques « kuru » et « florides ») ont été également décrits.

Dans les cas provoqués par l’hormone de croissance extractive, l’ataxie est un des signes cliniques les plus précoces.

Les lésions neuropathologiques sont diffuses au niveau du cervelet.

Elles prédominent dans la couche granulaire.

L’atteinte des cellules de Purkinje est variable.

Il existe également une spongiose et une gliose de la couche moléculaire et des plaques « kuru » fréquentes, notamment au niveau de l’album cérébelleux.

La PrPres de type 3 prédomine dans le cervelet.

La nouvelle variante de la maladies de Creutzfeldt-Jakob (vCJD) représente une entité clinique et pathologique distincte.

Le jeune âge de début et la présence fréquente de troubles de comportement initiaux, suivis d’un syndrome cérébelleux après quelques semaines ou quelques mois, ainsi que la survenue de troubles sensitifs (douleurs des membres inférieurs) en sont les caractères distinctifs principaux.

Les plaques amyloïdes, composées de PrPres entourées d’un halo de cellules spongieuses (plaques « florides »), sont caractéristiques de cette affection.

6- Autres causes secondaires :

* Hypothyroïdie :

Chez l’adulte, plusieurs cas de syndromes cérébelleux survenant au décours d’une hypothyroïdie ont été décrits.

Aussi, une hypothyroïdie est-elle fréquemment recherchée en cas de syndrome cérébelleux inexpliqué.

Cependant, ces cas ont fait l’objet de discussions.

Chez l’adulte, en absence de lien direct établi entre l’atrophie cérébelleuse et l’hypothyroïdie et en raison du faible nombre de cas rapportés, certains sont amenés à considérer l’hypothyroïdie comme un facteur d’aggravation d’un syndrome cérébelleux préexistant (MSA), plutôt que l’étiologie véritable.

* Hyperthermies malignes :

Les hyperthermies malignes (coups de chaleur et syndromes malins) peuvent être responsables, à la phase aiguë, de syndromes confusionnels et délirants, de troubles de vigilance et de convulsions.

Les patients souffrant de séquelles sont rares.

Les signes cérébelleux sont, parmi les symptômes persistants, les troubles neurologiques les plus fréquents. Une atrophie cérébelleuse est le plus souvent rapportée.

Elle concerne l’ensemble du cervelet.

Quelquefois isolée et retardée par rapport aux signes cliniques, l’atrophie cérébelleuse est susceptible de s’aggraver dans les mois suivant l’hyperthermie.

Elle paraît liée directement à l’hyperthermie elle-même, plutôt qu’à l’acidose ou à l’hypoxémie.

* Atrophies cérébelleuses croisées :

Mentionnées pour la première fois en 1829 par Cruveilhier, les atrophies cérébelleuses croisées sont rares.

Elles n’ont généralement pas d’expression clinique.

Elles concernent habituellement l’ensemble d’un hémisphère. Une dépopulation massive des cellules de Purkinje et des cellules granulaires est habituellement décrite.

Elles sont rencontrées habituellement plus d’une dizaine d’années après la survenue d’une lésion sus-tentorielle unilatérale étendue.

La dégénérescence transsynaptique antérograde ou rétrograde des voies corticopontines ou dento-rubro-thalamiques a été évoquée.

* Épilepsie et atrophie cérébelleuse :

Une atrophie cérébelleuse peut être retrouvée dans un nombre important de cas (jusqu’à 35 % de patients épileptiques).

Cette atrophie est généralement asymptomatique, les troubles cérébelleux sont présents dans seulement 9 à 21% des cas et concernent essentiellement la marche.

L’atrophie touche plus souvent la partie supérieure du vermis que la partie inférieure ou les hémisphères cérébelleux.

Une perte des cellules de Purkinje est classiquement incriminée.

La fréquence des crises généralisées, l’âge et l’existence de troubles cognitifs sont considérés comme des facteurs corrélés à la fréquence de l’atrophie cérébelleuse.

L’influence de la durée d’évolution de la maladie reste discutée.

L’atrophie prédomine parfois dans l’hémisphère cérébelleux controlatéral à la lésion épileptogène.

Ce type d’atrophie croisée se rencontre plus fréquemment chez les patients ayant débuté précocement leur maladie et présentant une atrophie sus-tentorielle controlatérale associée.

* Hémosidérose marginale :

L’hémosidérose marginale ou sidérose superficielle du système nerveux central est caractérisée cliniquement par la survenue d’une ataxie cérébelleuse (dans 88 % des cas), d’une surdité, d’une anosmie, d’une démence et d’une myélopathie.

Elle est habituellement secondaire à la survenue d’hémorragies sousarachnoïdiennes chroniques d’origines diverses.

Ces saignements sont responsables de dépôts d’hémosidérine sous-arachnoïdiens et sous-piaux provoquant secondairement une perte cellulaire, une démyélinisation et une gliose.

Les dépôts d’hémosidérine visualisés en IRM prédominent au niveau de la partie supérieure du vermis et des régions supérieures et antérieures des hémisphères cérébelleux.

L’atrophie cérébelleuse prédomine également à la partie supérieure du vermis.

Les chélateurs du fer utilisés n’ont, jusqu’à présent, pas montré d’efficacité.

* Dégénérescence hépatocérébrale :

La dégénérescence hépatocérébrale chronique acquise est une affection hétérogène.

De nombreuses affections hépatiques chroniques peuvent en être responsables.

Elle est caractérisée par l’association de troubles neurologiques (syndrome cérébelleux, tremblement, chorée, syndrome parkinsonien, myoclonies, dystonie, myélopathie) et neuropsychiatriques (apathie, léthargie, agitation, somnolence diurne excessive).

Le syndrome cérébelleux peut être le premier signe clinique et prédominer.

Outre des anomalies de signaux au niveau des noyaux gris centraux (hypersignal en T1 par dépôts de manganèse), les explorations radiologiques mettent en évidence une atrophie cérébrale et cérébelleuse.

B – ATROPHIES CÉRÉBELLEUSES PRIMITIVES SPORADIQUES :

Ce cadre général est celui des atrophies cérébelleuses tardives de l’adulte primitivement dégénératives et survenant en dehors de tout contexte familial.

Le cervelet subit, comme d’autres structures cérébrales, un processus de vieillissement normal, avec perte neuronale plus marquée à la partie supérieure du vermis cérébelleux.

Cette atrophie vermienne liée à l’âge doit être prise en compte dans l’interprétation de l’imagerie (IRM en particulier).

Le cervelet peut également être le siège d’un processus atrophique dans le cadre de nombreuses pathologies neurodégénératives du sujet âgé que nous ne détaillons pas ici.

Ainsi, l’atrophie cérébelleuse est rencontrée au stade tardif de la démence de type Alzheimer.

Plus intéressant en pratique est le cadre des AOPC dites sporadiques (sOPCA).

Il s’agit d’un terme générique qui regroupe des maladies neurodégénératives de cause inconnue affectant le tronc cérébral et le cervelet et s’exprimant sous la forme d’un syndrome cérébelleux progressif de l’adulte d’âge moyen, sans histoire familiale, ni cause secondaire évidente.

Ce terme regroupe en fait une affection parfaitement identifiée du point de vue anatomoclinique, l’atrophie multisystématisée (MSA), et un groupe d’affection hétérogène, les atrophies cérébelleuses idiopathiques tardives (idiopathic late onset cerebellar ataxia [ILOCA] ou idiopathic degenerative cerebellar ataxia [IDCA] ou idiopathic sporadic cerebellar ataxia [ISCA] des Anglo-Saxons).

Il s’agit d’une situation clinique fréquente et souvent source de frustration diagnostique et thérapeutique.

1- Atrophie multisystématisée :

Le lecteur peut se reporter au chapitre détaillé consacré à cette pathologie.

La MSA est une affection neurodégénérative sporadique survenant à l’âge moyen de la vie.

Elle est caractérisée d’une part par la mort neuronale avec gliose astrocytaire répartie de manière variable dans le système nigrostrié, olivo-ponto-cérébelleux, dans les colonnes intermédiolatérales et le noyau d’Onuf de la moelle, et d’autre part par la présence d’inclusions oligodendrogliales argentophiles marquées pour l’a-synucléine.

Cliniquement, la présentation classique combine de manière variable un syndrome parkinsonien peu ou pas dopasensible, une dysautonomie, un syndrome cérébelleux et des signes pyramidaux.

Pour individualiser les diverses expressions cliniques de MSA, on parle de MSA-P quand le syndrome parkinsonien initie et domine le tableau clinique, et de MSA-C quand il s’agit du syndrome cérébelleux.

Des critères consensuels stricts de l’affection, complétant ceux de Quinn, ont été récemment proposés.

Toutes formes cliniques confondues, 34 à 59 % des patients atteints de MSA présentent des signes cérébelleux durant leur évolution.

Dans notre cohorte (n = 50), 46 % avaient une ataxie statique et 28 % une ataxie cinétique à la première évaluation neurologique.

La totalité des patients atteints de MSA présente cependant à l’examen neuropathologique une perte cellulaire, de degré variable, dans le complexe olivaire, les noyaux du pont et le cervelet (cellules de Purkinje, surtout dans le vermis supérieur).

Dans le contexte d’une présentation clinique « complète », le diagnostic de MSA est relativement aisé et repose sur la présence de troubles dysautonomiques (hypotension posturale et troubles vésicosphinctériens) ou parkinsoniens associés.

En présence d’un syndrome parkinsonien, les signes cérébelleux ne sont pas faciles à mettre en évidence.

On peut s’aider de la présence d’un tremblement intentionnel, d’une dysarthrie mixte et de signes oculomoteurs cérébelleux (nystagmus, anomalies de fixation et des saccades).

Plus rarement, la situation clinique est plus confuse : 20 % des MSA se présentent sous la forme d’un syndrome cérébelleux prédominant, dont un quart apparaît pur.

Il est alors très difficile de faire le diagnostic différentiel avec une ataxie cérébelleuse idiopathique tardive (ACIT).

Ce diagnostic différentiel n’est cependant pas sans conséquences, car le pronostic est très différent entre une MSA où la survie moyenne est de 8 à 9 ans alors qu’elle est de 20 ans et plus dans les ACIT avec un handicap nettement moins marqué et évolutif.

Cliniquement, il faut s’attacher à la présence de signes précoces comme un polygone de sustentation peu élargi, une amimie, une rigidité inattendue, mais surtout la présence d’une dysautonomie avec hypotension orthostatique, troubles urinaires avec incontinence et impuissance.

C’est en effet cette dernière, par sa précocité et sa sévérité, qui permet d’orienter le diagnostic vers une MSA.

Quelques explorations peuvent êtres utiles pour consolider ce diagnostic : la démonstration d’une dysautonomie et de troubles vésicosphinctériens par des tests au lit du patient (dits « tests d’Ewing »), le tilt-test, par l’étude des potentiels suduromoteurs, par l’exploration urodynamique et l’EMG du sphincter anal.

L’IRM peut mettre en évidence des signes caractéristiques de MSA : atteinte pontocérébelleuse (« signe de la croix » pontique et hypersignal des pédoncules cérébelleux moyens en T2, atrophie pontique et vermienne, dilatation du IVe ventricule) et nigrostriatale (atrophie putaminale avec hyposignal postérieur et hypersignal latéral en T2).

2- Atrophies cérébelleuses idiopathiques tardives :

Il s’agit d’un cadre plus controversé car très certainement hétérogène et manquant encore de clarté nosologique en l’absence de données de corrélations anatomocliniques ou de marqueurs précis.

Le contexte clinique est celui d’une ataxie progressive de l’adulte, sans histoire familiale ni cause secondaire apparente, évoluant insidieusement dans une situation de syndrome cérébelleux « pur ».

Le syndrome cérébelleux, le plus souvent statique et à la marche, est isolé et aucun autre signe clinique ne permet de différencier l’affection dans les 4 premières années.

L’évolution de ces patients est hétérogène et très différente du point de vue du pronostic.

Une partie des patients continue à évoluer de manière très lente avec un syndrome cérébelleux pur et une atteinte cérébelleuse isolée à l’IRM, et correspond aux atrophies cérébelleuses corticales tardives (type Marie-Foix et Alajouanine).

D’autres vont présenter une atteinte du pont, mise en évidence par exemple à l’IRM.

Un quart de ces patients va évoluer en MSA à 5 ans et un tiers à 10 ans, comme en atteste l’apparition d’une dysautonomie et de troubles vésicosphinctériens et/ou d’un syndrome parkinsonien.

Les autres vont continuer à présenter un syndrome cérébelleux progressif de bien meilleur pronostic (survie moyenne de 20,7 ans contre 7,7 ans pour les MSA dans l’étude récente de Gilman et al).

Le risque de développer une MSA semble dépendre de l’âge, la probabilité étant bien supérieure après 50 ans, et de la rapidité d’évolution des symptômes.

Il est donc important pour le clinicien de suivre ces patients, à la recherche d’une dysautonomie, de troubles vésicosphinctériens, d’un syndrome parkinsonien, d’une atrophie pontique et/ou d’une atteinte striatale à l’IRM.

Pour ceux ayant la possibilité d’une étude métabolique en PET-scan, le développement d’une atteinte extracérébelleuse, en particulier striatale, est aussi un argument fort.

Conclusion. Conduite diagnostique pratique :

Le clinicien désireux de retrouver son chemin dans le dédale des causes d’atrophies cérébelleuses dégénératives doit adopter une attitude diagnostique logique dérivée de l’approche proposée par Harding et valorisée par les progrès moléculaires et nosologiques récents.

Cette démarche peut suivre un arbre décisionnel simple dont il ne fait nul doute que la présence d’une histoire familiale constitue le premier embranchement.

A – EN CAS D’HISTOIRE FAMILIALE ÉVOCATRICE :

L’étude génétique est guidée par la fréquence des mutations identifiées dans la population considérée :

– si la transmission familiale est horizontale et évoque une ACAR, l’hypothèse d’une FRDA doit être considérée en premier lieu et la biologie moléculaire demandée, y compris devant la présence de signes atypiques. Un bilan minimal, adapté à l’âge de début de la maladie, doit compléter cette étude génétique ;

– si la transmission familiale est verticale et évoque une ACAD, une recherche d’amplification de triplets CAG dans les gènes connus est positive dans 50 à 90 % des cas.

Ce pourcentage de tests positifs varie selon l’origine géographique des familles.

SCA3 est la forme majoritaire dans la plupart des pays dont la France (84 % au Portugal, 28 % en France), devant SCA1 et SCA2.

En revanche, en Italie, c’est SCA2 qui est la forme la plus fréquente.

Lorsque l’anomalie génétique est identifiée dans une famille, les diagnostics présymptomatique et prénatal deviennent réalisables mais soulèvent des problèmes éthiques comparables à ceux rencontrés dans la maladie de Huntington.

Ils doivent ainsi être l’objet d’une prise en charge multidisciplinaire entreprise au sein d’une équipe spécialisée déclarée et se conformer aux règles internationales en vigueur dans la maladie de Huntington.

B – DEVANT UN CAS D’APPARENCE SPORADIQUE :

L’orientation des recherches va dépendre essentiellement de l’âge de début de la maladie :

– si le début est précoce, une ACAR doit être évoquée en priorité.

L’examen clinique évalue les signes associés au syndrome cérébelleux et l’IRM cérébrale permet de visualiser les structures anatomiques principalement touchées et d’éliminer une démyélinisation centrale évocatrice d’une leucodystrophie.

Un bilan biologique, comprenant un bilan métabolique, ainsi qu’une analyse du gène frataxin, sont prescrits en première intention ;

– si le début est tardif et le syndrome cérébelleux d’évolution progressive et au premier plan, la recherche d’amplification de CAG dans l’éventualité d’une SCA ne donne des résultats positifs que dans 3 % des cas, la recherche d’une cause primitive, comme une MSA, ou secondaire est alors plus fructueuse.

Des néomutations peuvent cependant expliquer quelques-unes de ces SCA d’allure sporadique et l’identification d’une SCA est primordiale pour délivrer un conseil génétique adapté.

L’absence d’informativité familiale est cependant plus généralement causée par un biais : histoire familiale inconnue (tabou familial, fausse paternité…), décès précoce du parent transmetteur avant le début des symptômes, ou encore parent transmetteur asymptomatique du fait d’une anticipation marquée.

En l’absence de suspicion de cause héréditaire, la logique veut que le praticien élimine une cause secondaire éventuellement curable d’atrophie cérébelleuse.

Les causes sont multiples, comme nous l’avons vu, mais un interrogatoire précis, orienté vers des antécédents significatifs, et un examen neurologique soigneux orientant vers des explorations paracliniques justifiées permettent de diagnostiquer la plupart d’entre elles.

Au terme de cette démarche, il reste au praticien à évoquer les causes primitives, actuellement incurables mais avec une valeur pronostique lourde.

Nous avons vu que l’important est de dépister les patients ayant une MSA ou susceptibles de la développer et de les différencier de ceux ayant une ACIT dont un évident effort de démembrement reste à accomplir.

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