Indications de l’arthroscopie du poignet

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Introduction :

L’arthroscopie du poignet est indiquée lorsque la clinique et les examens complémentaires ne permettent pas d’affirmer ou d’éliminer formellement une pathologie intracarpienne.

Elle constitue fréquemment le dernier examen complémentaire avant une éventuelle arthrotomie, surtout dans le cadre des poignets douloureux chroniques.

Il convient de rappeler, devant une pathologie du poignet, l’importance de l’interrogatoire et d’un examen clinique minutieux, bilatéral et symétrique.

Le bilan radiographique reste l’examen complémentaire de base et comprend incidences de face et profil strict du poignet, auxquels sont ajoutés, en fonction des données cliniques, clichés dynamiques en inclinaisons radiale et ulnaire, face en supination poing fermé ou incidences spécifiques.

En pathologie chronique, la scintigraphie osseuse constitue un examen de débrouillage devant l’absence d’éléments objectifs cliniques et radiographiques.

Sa négativité fait stopper le plus souvent tout bilan complémentaire.

Une hyperfixation diffuse évoque une algodystrophie ; une hyperfixation localisée est complétée par un scanner ou une imagerie par résonance magnétique (IRM) centrée sur cette région.

L’amélioration de la définition des images tomodensitométriques et de l’IRM limite progressivement les indications de l’arthroscopie diagnostique.

Le scanner reste une excellente technique d’exploration des structures osseuses du carpe.

La précision souhaitée pour l’IRM n’est apportée que par les appareils les plus récents et dépend des séquences, des incidences et de l’immobilisation du patient.

Le couplage arthroscanner ou arthro-IRM peut révéler une solution de continuité ligamentaire, mais en aucun cas ses conséquences biomécaniques, c’est-à-dire l’existence ou non d’une instabilité.

Herbert, sur 60 arthrographies bilatérales de poignet, retrouve 74 % de fuites ligamentaires identiques sur le poignet asymptomatique.

Cantor note qu’en cas de poignet douloureux chronique, 88 % des fuites du ligament triangulaire, 59 % du ligament lunotriquétral et 57 % du ligament scapholunaire sont bilatérales, sans caractère prédictif de l’examen clinique.

Indications de l’arthroscopie du poignet

La constatation d’une fuite ligamentaire à l’arthrographie ne signe pas son caractère pathologique.

L’arthrographie pèche également par les faux négatifs : cicatrices fibreuses biomécaniquement incompétentes ou brèche non révélée par phénomène de valve.

L’arthroscopie diagnostique lui est supérieure pour la pathologie ligamentaire, car elle réalise une étude statique et dynamique, avec une sensibilité de 67 % et une spécificité de 100 %, tout en évitant une fois sur deux l’arthrotomie.

Bien qu’invasive, l’arthroscopie du poignet n’a aucune morbidité dans les équipes entraînées.

Cependant, c’est un examen difficile qui exige une courbe d’apprentissage.

Son rôle thérapeutique se heurte aux difficultés de miniaturisation de l’ancillaire.

Le débridement à la pince manuelle ou au shaver motorisé reste la technique la plus utilisée.

Les indications de l’arthroscopie de poignet varient selon l’expérience du chirurgien et la qualité de l’imagerie disponible.

Les poignets post-traumatiques récents (premières semaines après l’accident) sont différenciés des poignets douloureux chroniques, les rôles diagnostique et thérapeutique de l’examen étant étroitement liés lors d’une exploration.

Poignet post-traumatique précoce :

A – PATHOLOGIE LIGAMENTAIRE :

1- Lésions scapholunaires :

L’exploration scapholunaire représente l’indication majeure de l’arthroscopie sur un poignet post-traumatique précoce.

L’instabilité scapholunaire doit être précisée au plus tôt afin de poser l’indication chirurgicale de réparation ligamentaire.

L’indication repose sur un faisceau d’arguments : violence du traumatisme initial, douleur élective de l’interligne scapholunaire, test de Watson avec ressaut douloureux, fracture de la styloïde radiale.

L’examen n’a pas d’indication devant une instabilité scapholunaire statique, où la rupture complète du ligament est évidente.

Les radiographies sont parfois douteuses, avec un élargissement modéré de l’espace scapholunaire, et il existe de véritables instabilités scapholunaires prédynamiques ou préradiographiques, avec un bilan radiographique statique et dynamique normal.

S’il existe suffisamment d’arguments, l’arthroscopie peut intervenir immédiatement après le bilan radioclinique, compte tenu des limites de l’arthrographie.

Souvent, ce sont les problèmes d’interprétation de l’arthroscanner ou de l’arthro-IRM qui l’imposent.

L’arthroscopie précise les lésions avec leurs conséquences biomécaniques, d’où l’importance des tests médiocarpiens dynamiques (test au crochet palpateur, test de Watson arthroscopique).

L’attitude thérapeutique est arrêtée : abstention, immobilisation, réinsertion scapholunaire à ciel ouvert, l’arthrotomie étant alors réalisée avec une certitude diagnostique.

Les gestes thérapeutiques arthroscopiques sont limités en l’absence d’ancillaire de réinsertion : régularisation d’une petite brèche sans instabilité, brochage scapholunaire multiple contrôlé sous arthroscopie pour obtenir une ankylose fibreuse.

2- Douleurs du bord ulnaire du poignet et instabilité radio-ulnaire distale :

Une lésion du compartiment interne est suspectée devant des douleurs ulnaires, une instabilité radio-ulnaire distale, un ballottement lunotriquétral, des douleurs en hyperpression interne du carpe.

Le bilan radiographique note un éventuel arrachement de la styloïde ulnaire, plus rarement un diastasis lunotriquétral.

L’arthroscanner, l’arthro-IRM, peuvent visualiser une solution de continuité triangulaire ou lunotriquétrale, avec les réserves précédentes.

* Lésions traumatiques du ligament triangulaire :

L’arthroscopie, démontrant sa supériorité par rapport à l’arthrographie, différencie les lésions traumatiques et dégénératives du ligament triangulaire selon la classification de Palmer.

La classe IA correspond à une fente antéropostérieure, proche de l’insertion radiale, sans perte de substance, de diagnostic aisé à condition de palper systématiquement l’ensemble du ligament triangulaire.

Le diagnostic arthroscopique de la classe IB, désinsertion périphérique ulnaire associée ou non à une fracture de la styloïde ulnaire, est plus difficile, car la constatation de l’atténuation de l’effet « trampoline » nécessite une grande expérience.

Dans la classe IC, ou rupture des insertions antérieures périphériques, la palpation arthroscopique recherche une brèche capsulaire palmaire, avec la possibilité d’accéder au pisiforme.

Le diagnostic arthroscopique de la classe ID, arrachement à partir de la berge d’insertion radiale, est facile par visualisation directe et/ou aide du crochet palpateur.

L’arthroscopie trouve ici ses meilleures indications thérapeutiques, permettant une récupération fonctionnelle rapide avec un bon résultat esthétique pour un traumatisme tissulaire minime.

La réparation arthroscopique d’une brèche traumatique du triangulaire est envisageable même en cas de diagnostic tardif, par réinsertion ulnaire dans la classe IB et réinsertion radiale dans la classe ID.

Les indications de débridement arthroscopique varient de la régularisation de petites brèches traumatiques jusqu’à de larges résections de la zone avasculaire du triangulaire dans la classe IA.

* Lésions traumatiques du ligament triquétrolunaire :

Les arguments radiocliniques sont rarement caractéristiques et il s’agit de découvertes systématiques ou d’exploration arthroscopique sur les indications d’une arthro-IRM ou d’un arthroscanner.

La visualisation directe du ligament triquétrolunaire est difficile (voie 4-5 ou 6R) et les tests dynamiques médiocarpiens ont une valeur essentielle.

Cette exploration est parfois complétée d’un brochage multiple lunotriquétral sous contrôle arthroscopique.

B – ARTHROSCOPIE ET FRACTURE DE L’EXTRÉMITÉ INFÉRIEURE DU RADIUS :

L’arthroscopie recherche les lésions ligamentaires associées aux fractures de radius, articulaires ou non, puis permet le contrôle visuel de la réduction articulaire.

Compte tenu de l’hémarthrose, Whipple préconise d’attendre 2 à 4 jours pour l’examen.

La réduction est facilitée par le ligamentotaxis de la traction digitale.

Le but étant d’éviter l’arthrotomie, la manipulation des fragments se fait par le crochet palpateur et des broches percutanées, plus rarement par un abord chirurgical extra-articulaire.

C – ARTHROSCOPIE ET FRACTURE DU SCAPHOÏDE :

Le contrôle arthroscopique de la réduction d’une fracture du scaphoïde autorise son vissage par un abord minimal.

Poignet douloureux chronique :

L’arthroscopie intervient après des examens complémentaires non invasifs qui n’ont pas établi ou éliminé formellement une pathologie organique, parfois après l’échec d’une immobilisation.

Ses indications ont un but diagnostique, préthérapeutique et thérapeutique.

L’arthroscopie diagnostique recherche ou élimine une pathologie intra-articulaire.

L’arthroscopie préthérapeutique conforte le diagnostic établi et fait le bilan du poignet pour guider l’indication thérapeutique, préciser la voie d’abord et le pronostic, rechercher les lésions associées.

A – INSTABILITÉ SCAPHOLUNAIRE CHRONIQUE :

Les critères de diagnostic sont les mêmes qu’en traumatologie récente, la double exploration radio- et médiocarpienne et les tests dynamiques étant indispensables.

En cas de rupture scapholunaire, le chirurgien recherche un résidu ligamentaire autorisant sa réinsertion.

Les signes de chondrite sont notés sur le pôle proximal du scaphoïde et la tête du grand os, signant le début d’un slac-wrist.

L’arthroscopie thérapeutique se limite au débridement d’une petite brèche ou d’un résidu ligamentaire, ou le contrôle de la réduction d’un brochage scapholunaire.

B – PATHOLOGIE CHRONIQUE DU BORD ULNAIRE DU POIGNET ET DE LA RADIO-ULNAIRE DISTALE :

L’arthroscopie est irremplaçable pour explorer les douleurs chroniques du bord ulnaire du poignet (hyperpression interne du carpe, conflit ulnocarpien, lésions dégénératives du ligament triangulaire), permettant leur classification selon Palmer.

La classe IIA est une altération avec usure de la partie centrale du ligament triangulaire.

La classe IIB y associe une chondrite en miroir sur le semi-lunaire.

Le stade IIC ajoute une perforation du ligament triangulaire, très différente de la rupture traumatique, car avec atteinte centrale avec perte de substance.

La tête de l’ulna est visible, avec ou sans chondrite.

Dans la classe IID, la rupture du ligament interosseux triquétrolunaire est dégénérative par conflit ulnocarpien.

La classe IIE est une arthrose sévère ulnocarpienne.

La régularisation au shaver des berges des ligaments triangulaire et triquétrolunaire est préconisée.

La résection partielle de la tête de l’ulna (Wafer-resection) peut être réalisée sous arthroscopie par la perte de substance du ligament, dans les stades IIC à IIE.

C – ARTHROSCOPIE DU POIGNET ET ARTHROSE :

L’arthroscopie permet un bilan préthérapeutique d’orientation entre chirurgie reconstructive et palliative, révélant une arthrose débutante, invisible sur les examens complémentaires.

Il convient d’être attentif à l’atteinte de la pointe de l’os crochu en médiocarpien.

Dans un slac-wrist, l’exploration du pôle proximal du scaphoïde permet de s’assurer qu’une arthrodèse scapho-trapézo-trapézoïde est possible.

La tête du grand os doit être contrôlée si l’on envisage une résection de première rangée du carpe.

En cas de pseudarthrose ancienne du scaphoïde, l’arthroscopie vérifie l’intégrité de l’interligne radiolunaire si une scaphoïdectomie avec arthrodèse des quatre os est envisagée.

L’exploration des surfaces articulaires, dans la maladie de Kienböck, alimente la discussion entre revascularisation osseuse, raccourcissement du radius, arthrodèse scapho-trapézo-trapézoïde ou résection de la première rangée.

Le rôle thérapeutique de l’arthroscopie associe parage de la chondrite et régularisation des résidus ligamentaires.

Autres gestes thérapeutiques :

L’excision arthroscopique des kystes synoviaux du poignet semble simplifier les suites opératoires, minimiser la rançon esthétique et diminuer le taux de récidive.

Cette technique d’arthroscopie interventionnelle reste délicate.

L’ablation de corps étrangers est une excellente indication, rare en pratique.

Différents gestes osseux ont été proposés sous arthroscopie du poignet : résection partielle de la tête de l’ulna, de la première rangée, arthrodèse radiolunaire ou radio-scapho-lunaire.

Il s’agit de techniques difficiles, mais qui constituent peut-être l’avenir.

Dans le poignet rhumatoïde, une biopsie diagnostique peut être effectuée à la demande du rhumatologue.

En revanche, la synovectomie arthroscopique à visée thérapeutique se discute, compte tenu du volume du panus rhumatoïde et de l’impossibilité de pratiquer des gestes extraarticulaires, telle la réaxation du poignet par transferts tendineux.

Conclusion :

Au total, l’arthroscopie du poignet n’est indiquée que si elle peut fournir des indications susceptibles d’influer la démarche thérapeutique, établir un diagnostic qui ne peut être obtenu par des examens non invasifs, éviter une arthrotomie et/ou réaliser un geste curatif.

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