Anomalies de la miction

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Physiologie de la miction :

Anomalies de la mictionLa miction se définit comme un acte volontaire (déclenché et interrompu à la demande), indolore, facile et complet (sans résidu post-mictionnel).

Elle nécessite une contraction vésicale associée à une bonne synergie vésico-sphinctérienne.

Lors de la phase de remplissage, l’activation du système sympathique entraîne un relâchement des fibres musculaires du détrusor par les récepteurs b (remplissage à basse pression) et une contraction du sphincter lisse par les récepteurs a (continence).

Lors de la miction, l’activation du système parasympathique entraîne une contraction du détrusor et une inhibition du sympathique avec relâchement du sphincter lisse (synergie vésico-sphinctérienne) assurant une bonne ouverture du col vésical.

La coordination du système sympathique avec le système parasympathique permet un remplissage à basse pression vésicale, phénomène indispensable au respect du haut appareil.

Cela permet d’obtenir une contraction vésicale satisfaisante avec un sphincter relâché assurant une miction normale et une continence parfaite entre les mictions.

Le débit urinaire maximal normal est de 25 mL/s.

Le sujet normal urine 3 à 5 fois dans la journée (variable selon la ration hydrique) et jamais la nuit, avec un volume de 300 à 400 mL pour chaque miction.

Au total, une miction normale nécessite l’intégrité du cortex cérébral (commande volontaire), de la moelle épinière, des plexus nerveux somatiques et végétatifs pelviens, du détrusor et de l’appareil sphinctérien ainsi qu’un urètre normalement perméable.

Explorations cliniques et paracliniques :

Devant toute anomalie de la miction, un interrogatoire complet permet d’apprécier l’ancienneté et l’importance du symptôme, de rechercher d’autres signes susceptibles d’orienter l’examen clinique et de hiérarchiser les examens paracliniques.

A – Interrogatoire :

  • Recherche des antécédents :

– urologiques : chirurgie, infection, sondage ou endoscopie ;

– gynécologiques : chirurgie, radiothérapie ;

– chirurgie rectale ;

– neurologiques : sciatique, sclérose en plaques, maladie de Parkinson, accident vasculaire cérébral ;

– généraux : diabète, maladie cardiaque ou vasculaire.

  • Traitements médicaux actuellement prescrits.
  • Évaluation des symptômes :

– nombre de mictions nocturnes, diurnes (préciser l’intervalle entre 2 mictions) ;

– qualité du jet ;

– poussées abdominales ;

– recherche de signes associés : hématurie, brûlures mictionnelles, pertes d’urine, de selles, présence d’une fièvre, de douleurs lombaires ou pelviennes.

B – Examen clinique :

  • Palpation et percussion de l’hypogastre à la recherche d’un globe vésical.
  • Examen périnéal :

– chez l’homme, toucher rectal (tonus du sphincter anal, palpation de la face postérieure de la prostate), examen des organes génitaux externes ;

– chez la femme, examen de la vulve, recherche d’un prolapsus lors d’un effort de toux, de poussée abdominale, testing des releveurs de l’anus, toucher vaginal.

  • Examen neurologique du périnée : sensibilité, réflexes cutanéo-muqueux.

C – Examens paracliniques :

Ils sont adaptés en fonction des symptômes.

  • Débitmétrie : objective le débit instantané lors d’une miction volontaire.

Elle est faite au cours de la journée, après un court effort physique, dans une pièce isolée des regards. Plusieurs éléments sont évalués : le débit maximal (Qmax), le volume total uriné (doit être O 100 mL), la durée de la miction.

  • Bandelette urinaire : la présence d’une leucocyturie et (ou) d’une nitriturie, sur des urines mictionnelles, impose la réalisation d’un examen cytobactériologique des urines.
  • Mesure du résidu post-mictionnel par échographie sus-pubienne.
  • Les autres examens sont programmés en fonction des éléments mis en évidence :

– urétro-cystoscopie ;

– échographie vésico-prostatique ;

– urographie intraveineuse ;

– bilan urodynamique, permettant l’étude du comportement vésical au cours de la phase de remplissage, de la contraction vésicale et des pressions sphinctériennes.

Pollakiurie :

Elle est définie comme l’augmentation de la fréquence des mictions sans augmentation de la diurèse totale (volume uriné par 24 h).

La pollakiurie nocturne (plus d’une miction pendant la phase de sommeil) est facilement rapportée par le patient et précède, souvent, la pollakiurie diurne dans la pathologie obstructive du bas appareil urinaire.

Le diagnostic différentiel est la polyurie : l’augmentation de la diurèse totale est responsable de l’augmentation de la fréquence des mictions (par ex. : traitements diurétiques).

A – Distinction par l’interrogatoire et l’examen clinique :

1- Pollakiurie-symptôme :

Elle est rarement isolée, évoquant une pathologie organique vésicale ou sous-vésicale.

2- Pollakiurie-maladie :

Seul le symptôme résume la maladie :

– instabilité vésicale réflexe : correspond à l’apparition de contractions vésicales pour de faibles volumes de remplissage, responsables de la pollakiurie et d’une impériosité ;

– pollakiurie d’origine psychogène : sensorielle (contact au froid, à l’eau), émotionnelle (peur, fou rire…), obsessionnelle, par habitude.

Dysurie, rétention vésicale :

Ces symptômes témoignent d’un obstacle anatomique, sous-vésical (pathologie prostatique, sténose de l’urètre) ; ou fonctionnel : acontractilité vésicale, dyssynergie vésico-sphinctérienne.

A – Dysurie :

Elle est définie comme une difficulté à uriner.

Le jet mictionnel devient faible, obligeant le patient à utiliser la poussée des muscles abdominaux pour vider sa vessie.

La dysurie peut être initiale, avec retard à l’apparition du jet ; terminale, avec des gouttes retardataires ; totale.

Ce symptôme, difficile à mettre en évidence par l’interrogatoire, est évalué par l’observation de la miction. La débitmétrie montre un débit maximal < 15 mL par seconde.

B – Rétention vésicale :

Elle est définie comme l’impossibilité d’obtenir une miction complète.

Il faut distinguer la rétention aiguë (d’apparition brutale), et la rétention chronique (d’apparition progressive).

  • La rétention aiguë est de diagnostic clinique facile associant :

– une douleur hypogastrique violente, irradiant vers l’urètre, et les fosses lombaires ;

– un besoin permanent d’uriner (ténesme vésical), qui n’aboutit pas à une miction, parfois à seulement quelques gouttes retardataires ;

– un globe vésical : vessie distendue, dure à la palpation, mate à la percussion hypogastrique.

Il s’agit d’une urgence urologique nécessitant un drainage vésical (cathéter sus-pubien ou sondage urétral).

  • La rétention chronique est la résultante d’une distension progressive de la vessie.

L’interrogatoire retrouve un long passé de pollakiurie et de dysurie et, parfois, plus récemment d’incontinence d’urine (par regorgement).

Sur le plan clinique, un globe vésical (matité sous-ombilicale à la percussion), mou et indolent, est retrouvé.

Il est nécessaire d’apprécier le retentissement sur les voies urinaires supérieures (échographie rénale), et sur la fonction rénale.

En dehors d’une dilatation du haut appareil urinaire, il n’est pas nécessaire de drainer immédiatement la vessie qui contient des urines stériles.

Le diagnostic différentiel de la rétention vésicale est l’anurie, liée à un obstacle anatomique ou fonctionnel au niveau du haut appareil urinaire, et qui ne présente pas de globe vésical.

Étiologie :

Généralement, l’anamnèse et l’examen clinique permettent d’orienter le diagnostic étiologique.

Mictions impérieuses :

Elles sont définies comme des envies pressantes, urgentes d’uriner.

Associées à une pollakiurie, elles témoignent d’un syndrome irritatif de la vessie.

Elles sont donc retrouvées dans la pathologie infectieuse (cystite, prostatite…), dans la pathologie tumorale de vessie, ou en présence de calculs de vessie.

Mais toute obstruction sous-vésicale, et en particulier la pathologie prostatique, peut être responsable d’une irritation vésicale.

Brûlures mictionnelles :

La brûlure mictionnelle est une douleur cuisante, traçante le long de l’urètre, qui débute avec le jet, s’exagère en fin de miction et se prolonge quelques minutes après.

Elle traduit soit la présence d’une infection urinaire, haute ou basse, soit une pathologie inflammatoire de la vessie et (ou) de l’urètre.

Associée à de la fièvre, elle signe une infection d’un parenchyme de l’appareil urinaire (pyélonéphrite), et (ou) d’un parenchyme de l’appareil génital masculin (prostatite, orchi-épididymite).

Son diagnostic repose sur l’examen cytobactériologique des urines, réalisé le matin, sur des urines fraîchement émises, selon la méthode du mi-jet chez l’adulte.

En l’absence de fièvre, nous ne pouvons éliminer une infection urinaire.

La présence d’une nitriturie et d’une leucocyturie à la bandelette urinaire impose la réalisation d’un examen cytobactériologique avant toute prise d’antibiotique.

En cas de négativité, il faut rechercher une pathologie inflammatoire de la vessie et (ou) de l’urètre par un examen endoscopique, parfois associée à des biopsies de la muqueuse vésicale ou urétrale.

L’association « brûlures mictionnelles-écoulement urétral » doit évoquer une maladie sexuellement transmissible :

– en cas d’écoulement blanc laiteux, penser à une gonococcie, facilement mise en évidence dans le prélèvement de l’écoulement ;

– en cas d’écoulement « eau de roche » perlant au méat urétral, évoquer la présence de Chlamydiæ trachomatis ou de Mycoplasma genitalium.

Le diagnostic sera fait en polymerase chain reaction (PCR) sur le premier jet d’urine ; cet examen est plus sensible que la culture.

Les sérologies n’ont pas d’intérêt dans le diagnostic.

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