Amyotrophies focales

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Introduction :

Une amyotrophie est dite focale lorsqu’elle est localisée à un muscle ou à un groupe de muscles.

Une telle topographie exclut les amyotrophies localisées mais distribuées symétriquement (par exemple une amyotrophie péronière bilatérale, une atrophie des muscles des deux épaules), à l’ exception des amyotrophies paravertébrales focalisées sur les muscles spinaux.

En revanche , elle n’exclut pas les amyotrophies multifocales, c’est-à- dire distribuées, selon des territoires disséminés, à divers muscles ou groupes de muscles.

Plusieurs modes de classification sont possibles.

Amyotrophies focalesLe premier est une classification topographique (atrophie des muscles de la jambe, de la cuisse, du tronc, de la main, de l’ épaule, éventuellement d’une hémiface).

Il est également envisageable d’opposer les atrophies d’un muscle, d’un groupe de muscles et de muscles disséminés.

Une classification étiologique sépare les formes traumatiques, mécaniques, inflammatoires ou infectieuses, vasculaires, métaboliques, congénitales.

La classification présentée ici énumère, dans un but de simplicité , selon leur point de départ, les atteintes d’ origine musculaire , tronculaire, plexulaire, radiculaire, médullaire ou centrale.

Reconnaître une amyotrophie focale est parfois malaisé.

Les erreurs les plus communes tiennent aux lipodystrophies et aux phacomatoses.

Il est courant que des patients consultent avec le diagnostic d’amyotrophie localisée, surtout de la fesse ou de la cuisse, plus rarement de l’épaule ou de l’abdomen, alors que la lésion est limitée à la graisse sous-cutanée.

La morphologie est souvent en « entonnoir ».

Parfois la lésion est plus étendue, et l’absence de graisse sous-cutanée se répartit sur plusieurs centimètres avec des contours à bords nets.

Cependant, le muscle sous-jacent est normal. Son volume est conservé.

Sa contraction est indemne . Parfois une cause locale antérieure est mise en évidence, surtout l’ injection locale de cortisone ou chez les diabétiques d’insuline.

La panniculite nodulaire lipoatrophiante débute par des nodules inflammatoires évoluant par poussées, laissant des zones lipoatrophiques de localisation distale et d’extension progressive.

La graisse disparaît totalement, laissant voir un réseau veineux et le muscle sous-jacent.

Il s’agit d’une nécrose graisseuse progressive, d’origine vraisemblablement dysimmune, mais pas d’une amyotrophie.

Les phacomatoses sont souvent à l’origine de zones atrophiques des membres auxquelles participent les tissus sous-cutanés et en particulier les vaisseaux, avec une dysplasie artérielle ou veineuse ou une angiomatose sous-cutanée.

La sclérodermie localisée, si l’on excepte certaines formes de myosite focale sclérodermique, s’accompagne, de même, de zones d’atrophie musculaire, sous-jacentes à la lésion cutanée.

Enfin, les ruptures musculaires sont un cas particulier.

Survenant après un effort brusque, connu ou méconnu, elles siègent souvent sur le biceps brachial ou le quadriceps.

Elles se traduisent par une perte du relief musculaire formant une sorte de « coup de hache ».

À la contraction, les deux bouts rompus s’écartent, et seul le reste du muscle, si une portion profonde est respectée, se contracte normalement.

Tardivement, un certain degré d’amyotrophie peut compliquer la rupture.

L’échographie musculaire affirme le diagnostic s’il en est besoin.

Atteintes musculaires pures :

Elles sont rares.

A – Agénésies musculaires :

Les agénésies musculaires s’expriment par l’absence ou par l’insuffisance de développement d’un muscle : trapèze , sternocléidomastoïdien, triangulaire des lèvres et autres.

Certaines localisations sont moins rares.

1- Agénésie du grand pectoral :

Elle est rarement totale.

Il s’agit le plus souvent d’une hypoplasie prédominant sur le chef inférieur du muscle.

Une agénésie du petit pectoral est fréquemment associée.

La gêne fonctionnelle est très modérée, portant essentiellement sur la rotation interne.

L’agénésie pectorale est tantôt isolée, tantôt intégrée dans le cadre d’un syndrome de Poland associant des malformations de la main homolatérale, plus souvent du côté droit , et plus fréquente chez l’homme.

Ces malformations sont de trois degrés.

Le type I est une syndactylie avec brachyphalangie de la deuxième phalange des quatre derniers doigts . Cette anomalie, la plus fréquente, atteint surtout le médius. Le type II est une syndactylie avec biphalangie par absence de la deuxième phalange.

Ce type est plus rare . Le type III est l’ectrodactylie ou absence de doigts.

La plus rare, cette forme est marquée par l’absence totale ou subtotale des doigts médians. Aux malformations de la main s’ajoutent des malformations diverses : surtout absence ou agénésie de la glande mammaire et du mamelon homolatéraux, atrophie du sternum, absence de cartilages costaux, anomalies des dermatoglyphes, rarement malformation globale du membre supérieur.

Enfin, une leucose aiguë serait parfois associée.

2- Aplasie des muscles thénariens :

L’aplasie des muscles de l’éminence thénarienne, parfois méconnue, répond cependant à une sémiologie évocatrice, associant à une hypoplasie musculaire localisée, des anomalies osseuses et vasculaires.

Souvent, l’aplasie est découverte lors d’un examen systématique, parfois à l’ occasion d’entorses récidivantes de la première articulation métacarpophalangienne pour lesquelles le diagnostic de syndrome du canal carpien a été posé.

L’affection est plus fréquente dans le sexe féminin.

L’amyotrophie est souvent unilatérale, parfois bilatérale.

Il s’agit d’un aplatissement diffus de l’éminence thénarienne alors que les espaces interosseux sont normaux.

Les mouvements d’opposition et, à un moindre degré, d’abduction sont limités, mais le déficit des muscles du pouce est souvent masqué par des mouvements compensateurs essentiellement dus au long fléchisseur et aux extenseurs du pouce.

La gêne fonctionnelle est minime.

La dysplasie prédomine sur l’opposant et le court abducteur du pouce.

Le court fléchisseur, surtout son chef superficiel, est quelquefois atteint.

En revanche, l’adducteur est constamment épargné.

Cette sélectivité pourrait évoquer un trouble de l’innervation : on sait que le court abducteur, l’opposant et le chef superficiel du court fléchisseur du pouce sont innervés par le nerf médian, alors que l’adducteur et le chef profond du court fléchisseur du pouce le sont par le nerf cubital.

Cependant, aucun signe de dénervation n’est présent, et les vitesses de conduction motrice et sensitive du nerf médian sont normales.

L’absence de pouls radial est un élément fréquent et oriente à tort vers un syndrome de la traversée thoracobrachiale, surtout si une côte cervicale est associée.

L’atteinte osseuse, constante, porte surtout sur le scaphoïde, le trapèze, le premier métacarpien et les phalanges du pouce.

Le scaphoïde peut être absent, mais il est le plus souvent déformé : diminué de volume, aminci avec disparition de son tubercule.

Le trapèze est hypoplasique avec quelquefois une forme allongée inhabituelle.

Les diaphyses du premier métacarpien et des phalanges du pouce sont amincies.

Dans certains cas, les anomalies plus étendues intéressent la styloïde radiale.

Cette topographie évoque une atteinte distale du rayon radial qui comprend radius, scaphoïde, trapèze, premier métacarpien et phalanges du pouce.

La coexistence de malformations musculaires, nerveuses et vasculaires est signalée au cours des anomalies osseuses du rayon radial, dont l’hypoplasie de l’éminence thénarienne représente une forme mineure.

La fonction d’opposition du pouce définit, dans la hiérarchie animale , l’existence de la main : les animaux incapables d’opposition ont des extrémités supérieures et non des mains.

L’hypoplasie de l’éminence thénar pourrait reproduire chez l’homme des dispositions anatomiques habituelles aux espèces inférieures.

3- Aplasie des muscles scapulaires :

Une aplasie du trapèze ou du rhomboïde est présente dans le syndrome de Sprengel, associée à une surélévation de l’omoplate et à une faiblesse des muscles de l’épaule.

Les masses musculaires sont souvent rétractées, fixant la tête dans une attitude de torticolis. Parfois, diverses formations voisines participent à la malformation, ce qui évoque une dysplasie régionale.

4- Absence des muscles abdominaux :

L’absence des muscles abdominaux caractérise le syndrome du « ventre pruneau » (prune belly ) et donne un aspect plissé à la peau de l’abdomen.

Le défaut de contraction de ces muscles expliquerait les autres éléments du syndrome : hydronéphrose avec méga-uretère, cryptorchidisme.

Ces diverses anomalies de développement musculaire sont d’origine embryologique et s’installent dès les premières semaines de la vie foetale.

De la première à la septième semaine , une masse de cellules mésenchymateuses fusiformes comporte les précurseurs des myoblastes présomptifs. Rien ne distingue ces derniers des autres cellules mésenchymateuses, si ce n’est un aspect plus fusiforme.

Ils ne sont pas capables de fusion ni de production de protéines contractiles.

Secondairement, ils deviennent myoblastes et ont un aspect effilé, contenant de nombreux ribosomes synthétisant les protéines contractiles.

La prolifération des myoblastes devient intense.

Les événements de transcription nécessaires à la cytodifférenciation débutent.

La fusion est alors possible.

À ce stade, les cellules mésenchymateuses sont donc pluripotentielles, produisant aussi bien du tissu conjonctif que des myoblastes.

C’est alors que surviennent des maladies locales du mésoderme expliquant à la fois l’agénésie d’un ou de plusieurs muscles, et parfois l’arrêt de développement d’une partie correspondante du corps.

Une nécrose focale embryonnaire rendrait compte des structures multiples atteintes et de leur répartition focale dans l’aplasie des muscles thénariens.

B – Atrophie des muscles paravertébraux :

Ces formes, mal classées nosologiquement, comportent une atrophie et une faiblesse des muscles paravertébraux dorsolombaires.

On les nomme parfois myopathies axiales, ou camptocormie, ou syndrome « de la colonne vertébrale fléchie » (bent spine syndrome).

Elles diffèrent de la chute de la tête en avant (dropped head syndrome) qui comporte habituellement peu d’atrophie musculaire.

Le début est progressif chez un adulte ou un sujet âgé, marqué par la chute du tronc en avant lors de la station debout et à la marche.

Cette attitude cyphotique est réductible en décubitus.

L’examen montre souvent un pli cutané longitudinal au-dessus des muscles paravertébraux atrophiques.

Le scanner musculaire met en évidence une hypodensité des masses paravertébrales dont le contour est respecté.

La biopsie des muscles paravertébraux est habituellement de technique difficile, et les résultats sont peu significatifs et variables : altérations inflammatoires parfois, lésions de type myopathique, anomalies mitochondriales.

De ce fait, la nature même du syndrome est en discussion bien que le terme de myopathie axiale soit parfois retenu.

C – Myosites inflammatoires primitives focales :

1- Polymyosites focales :

Les polymyosites localisées s’expriment plus souvent par une tuméfaction musculaire que par une atrophie.

On connaît cependant des cas de myosites inflammatoires primitives focales avec amyotrophie localisée.

Ces formes siègent surtout sur le quadriceps.

On signale aussi une atrophie associée des muscles de l’avant-bras et du long supinateur dans laquelle la gêne fonctionnelle est modérée, l’électromyogramme (EMG) comporte des aspects myogènes et des fibrillations, la biopsie montre des signes inflammatoires, et la corticothérapie entraîne une discrète amélioration, surtout biologique, avec diminution des activités de la créatine-kinase sérique.

L’amyotrophie reste toujours localisée. Sont également connues des amyotrophies du membre supérieur, proximal ou distal, et de la loge antéroexterne de la jambe. Dans ces cas, la biopsie du muscle symétrique était normale.

Enfin, une atrophie monomélique s’observe également.

2- Myosites à inclusions :

Les myosites à inclusions, de définition morphologique (vacuoles bordées en microscopie optique sur la biopsie musculaire, inclusions de 18 nm de diamètre en microscopie électronique), s’expriment souvent au début par une amyotrophie focale, asymétrique.

Dans ces cas, la localisation à certains muscles d’une amyotrophie asymétrique a une grande valeur diagnostique, en particulier le quadriceps, les extenseurs ou fléchisseurs des doigts, les muscles de la loge antéroexterne de la jambe et le sternocléidomastoïdien.

Plus tardivement, une extension distale et proximale survient.

Certaines formes réalisent des amyotrophies asymétriques et multifocales.

Ces formes sont fréquentes.

Une faiblesse et une atrophie musculaires progressives atteignent progressivement le biceps, le long supinateur, les extenseurs du poignet d’un côté, les muscles péroniers, mais aussi les muscles de la ceinture pelvienne.

Chez d’autres patients, un déficit proximal est associé à une faiblesse et à une atrophie distale asymétriques. Dans de rares cas, il s’agit d’une atteinte isolée du quadriceps ou d’une atrophie d’un sternocléidomastoïdien.

Un tel tableau chez un homme adulte est assez évocateur en raison de la lente et inéluctable progression du déficit, de la répartition multifocale de l’atrophie et de la fréquente coexistence d’une aréflexie.

Cependant, un diagnostic différentiel peut se poser cliniquement, notamment avec certaines neuropathies motrices, par exemple les neuropathies avec bloc de conduction et anticorps antigangliosides, au cours desquelles la topographie de l’atteinte musculaire peut également être multifocale.

Les anomalies des vitesses de conduction nerveuse montrant des blocs persistants et l’élévation des titres d’anticorps rectifient alors le diagnostic.

Les amyotrophies focales myogènes sont en définitive rares et correspondent plus souvent à des anomalies de développement qu’à des lésions musculaires primitives.

Atteintes des troncs nerveux :

L’atteinte d’un ou de plusieurs troncs nerveux est, par des mécanismes très divers, à l’origine d’atrophies focales marquées morphologiquement par des signes de dénervation : fibres anguleuses se réunissant en petits groupes, fibres en cibles, puis tardivement réinnervation avec groupement des fibres de même type.

A – Neuropathies traumatiques :

Le traumatisme entraîne des lésions nerveuses de trois degrés d’intensité : neurapraxie, axonotmésis, neurotmésis.

Seuls les deux derniers modes sont à l’origine d’une amyotrophie, car la neurapraxie est une démyélinisation focale simple n’entraînant pas de dénervation et récupérant en 3 à 10 semaines.

L’axonotmésis survient surtout après écrasement, overdose chez un toxicomane ou anesthésie.

L’exemple le plus fréquent est la paralysie radiale par compression dans la gouttière humérale.

La démyélinisation focale s’associe à une lésion axonale qui respecte l’épinèvre avec dégénérescence wallérienne, fibrillations, potentiels lents positifs en 2 semaines.

La récupération est variable.

Le neurotmésis résulte d’une section ou d’un déchirement avec interruption plus ou moins complète selon trois degrés, de l’axone, de la lame basale, du tissu connectif, entraînant une dégénérescence wallérienne.

La régénération est peu efficace.

Une croissance axonale anarchique est à l’origine de syncinésies ou de névromes.

Les lésions traumatiques sont souvent mixtes en cas de lacération, de compression, d’étirement et de lésions dues au froid.

Les faisceaux nerveux sont endommagés à des degrés divers : démyélinisation focale avec bloc de conduction, dégénérescence wallérienne, altération de la perméabilité vasculaire, oedème endoneural, hémorragie de l’endonèvre et de l’épinèvre.

La récupération dépend de l’étendue du traumatisme nerveux.

Les amyotrophies définitives sont souvent importantes et correspondent parfaitement au territoire d’innervation, accompagnées ou non de troubles sensitifs ou autonomes selon le tronc nerveux atteint.

B – Compressions et constrictions nerveuses :

Les compressions nerveuses provoquent une distorsion de la myéline qui se rétracte le long des internodes.

La dégénérescence wallérienne entraîne une atrophie axonale distale avec dégénérescence rétrograde.

Le tissu connectif endo- et périneural s’épaissit avec oedème et prolifération collagénique.

Le rôle de l’ischémie est incertain.

La compression, pression continue d’une zone localisée, la constriction, réduction de calibre due aux tissus adjacents, l’entrapment ou « prise au piège », distorsion mécanique par une bande fibreuse ou des tunnels ostéofibreux, sont trois mécanismes différents.

1- Anomalies congénitales :

Des anomalies congénitales diverses sont facteurs de prise au piège : musculaires (fléchisseurs des doigts, lombricaux, muscle épitrochléen), bandes fibreuses (ligament de Struthers, dont le point de départ est un éperon osseux supracondylien, lacertus fibrosus dans l’éminence des pronateurs, arcade de Frohse étirant le nerf interosseux postérieur).

Les côtes cervicales s’accompagnent parfois d’amyotrophies thénariennes.

Ces amyotrophies sont encore dites « atrophies thénariennes partielles » de Wilson.

Cette dénomination rend compte de la sélectivité particulière de l’atrophie pour le versant externe de l’éminence thénar, car sont surtout atteints les muscles opposant et abducteur.

L’atrophie est uni- ou bilatérale.

Elle entraîne peu de gêne fonctionnelle, au maximum quelques paresthésies d’effort.

La radiologie met en évidence la côte cervicale.

La même valeur doit être accordée à une apophysomégalie de C7. Ces formes sont d’excellent pronostic.

Elles s’aggravent peu.

De ce fait, il ne convient pas de les opérer, d’autant que les résultats de ces interventions sont très aléatoires.

Au cours de l’hypersensibilité congénitale des troncs nerveux à la pression (neuropathies tomaculaires ou allantoïdiennes), l’hypermyélinisation, bien que diffusément répartie, a une expression focale par compression dans les défilés, et dans le cadre de ces atteintes focales, il n’est pas rare que des amyotrophies localisées persistent après l’épisode paralytique.

Reconnaître leur origine est possible lorsque l’on a la notion d’épisodes tronculaires récidivants (prédominant sur les troncs nerveux distaux, favorisés par un facteur postural, indolents et en général régressifs), d’un facteur familial (avec une transmission de type autosomique dominant).

L’amyotrophie séquellaire est surtout fréquente dans le territoire cubital.

L’EMG est un élément important du diagnostic.

Des tracés de dénervation sont présents dans les territoires déficitaires, parfois étendus à des territoires voisins, surtout dans les muscles distaux.

Les activités spontanées témoignant d’une dégénérescence axonale sont présentes dans ces formes amyotrophiques.

Les vitesses de conduction nerveuse motrice et sensitive sont diminuées, témoignant de l’altération de la gaine de myéline.

La diminution siège électivement dans les défilés anatomiques.

L’augmentation des latences distales motrices dans les nerfs médians contraste avec une augmentation moindre dans les nerfs cubitaux.

La latence des ondes F, affectée par les lésions segmentaires, quelle que soit leur répartition sur le motoneurone, est augmentée aux quatre membres.

Un épaississement myélinique focal en forme de « petites saucisses » (tomacules ou allantoïdes) est visible sur les coupes transversales du nerf, prélevé par biopsie.

La gaine de myéline, très épaissie, est concentrique, parfois latéralisée par rapport à l’axone qu’elle entoure avec de nombreuses boucles redondantes externes, fusionnées ou apposées, formant des spirales, avec un nombre variable de lamelles.

En microscopie électronique, l’hypermyélinisation est visible sous forme d’épaississements concentriques de myéline compacte, avec de nombreux enroulements de boucles redondantes, souvent monstrueuses, fusionnant progressivement.

Actuellement, on préfère à une biopsie nerveuse une étude de génétique moléculaire qui met en évidence une délétion de 1,5 mégabase sur le chromosome 17, le produit génique anormal étant la protéine myélinique PMP22.

2- Prise au piège dans les défilés :

L’exemple le plus caractéristique est la compression du nerf médian. Son atteinte entraîne parfois une atrophie élective des muscles de l’éminence thénarienne.

Il peut s’agir d’une fonte musculaire profonde portant sur l’opposant, le court fléchisseur et le court abducteur.

Il peut aussi bien s’agir d’un simple méplat, ce qui s’explique par une innervation commune avec le cubital. À l’examen, l’opposition et l’abduction sont surtout diminuées. Le pouce est éversé en légère adduction.

L’amyotrophie est surtout marquée par une atteinte précoce du court abducteur et de l’opposant.

Elle est souvent précédée par des troubles sensitifs.

En fait, la sémiologie est variable et cette variabilité est fonction de plusieurs facteurs. D’abord, dans une compression nerveuse, les fibres superficielles sont les plus atteintes et elles protègent les fibres profondes qui restent intactes.

De plus, les fibres myéliniques de grand diamètre sont moins résistantes à la pression que les fibres de petit calibre. Cette notion explique la précession des paresthésies.

Les signes orientant sur l’origine carpienne de l’atrophie sont parfois très modérés.

La provocation de paresthésies par pression, percussion ou mobilisation du poignet est inconstante.

La manoeuvre du garrot a une faible valeur.

Le signe de Koppel et Thomson est parfois présent. Il s’agit de l’impossibilité de rotation de la première phalange du pouce dans la manoeuvre d’opposition.

On ne doit pas attendre la constance d’anomalies électrophysiologiques.

En effet, la diminution de la vitesse de conduction motrice implique une invagination de la gaine de myéline recouvrant les noeuds de Ranvier.

Or l’expérimentation montre que la force de compression doit dépasser 100 mm de mercure pour que cette invagination se produise.

Les formes familiales amyotrophiantes du syndrome du canal carpien s’accompagnent d’atrophie thénarienne souvent bilatérale.

La transmission est de type autosomique dominant, mais ces formes n’ont pas été étudiées du point de vue génétique.

Des causes d’erreurs sont à connaître dans le diagnostic d’amyotrophie du syndrome du canal carpien, en particulier l’existence d’amyotrophies postcarpiennes en relation avec un syndrome acromédian, ces cas comportant habituellement une atrophie et des fasciculations dues à une compression, souvent professionnelle, de la branche thénarienne du nerf médian.

Des compressions multiples portant sur plusieurs niveaux du nerf médian, décrites sous le nom de syndrome de double crush, pourraient rendre compte de certains échecs de la chirurgie.

Dans ces cas, on doit rechercher une compression en amont, par exemple sur une racine ou sur un plexus, dont l’origine est souvent un traumatisme antérieur.

Autant les amyotrophies thénariennes en relation avec une atteinte du nerf médian sont fréquentes et importantes, autant les atrophies d’origine cubitale sont modérées, entraînant surtout une perte de l’adduction du pouce extériorisée par le signe de Froment.

Une forme d’amyotrophie focale originale a récemment été observée chez un sportif dont la musculature développée avait comprimé, lors des exercices répétés, le nerf du vaste externe, à l’origine d’une atrophie de ce muscle.

La paralysie isolée du grand dentelé est à séparer de la névralgie amyotrophique de l’épaule.

Les principaux caractères sont le début aigu, après une période douloureuse de 8 à 10 jours, la constitution d’une gouttière scapulothoracique avec affaissement du moignon de l’épaule, effacement des creux axillaire et sous-claviculaire, diminution de l’abduction-rotation de l’omoplate, douleur à la pression du nerf, à l’union de la ligne axillaire et du quatrième espace intercostal, et la ténacité fréquente des troubles.

L’évolution est habituellement progressive et chronique.

Le mécanisme semble en être une compression des origines du nerf dans la traversée du scalène moyen ou une compression du nerf à son passage sur la deuxième côte.

La cause habituellement invoquée est une pression prolongée sur l’épaule par le port d’une charge, ou encore une bursite par atteinte de la bourse sous-scapulaire ou serratoscapulaire.

On conçoit cependant que des formes spontanément régressives de cette neuropathie mécanique les aient fait parfois inclure dans le cadre des amyotrophies névralgiques de l’épaule.

La paralysie douloureuse isolée du nerf sus-scapulaire est à l’origine d’une amyotrophie bifocale.

Aux douleurs des fosses sus- et sous-épineuses pouvant irradier vers le cou, s’associent une amyotrophie et un déficit des muscles suset sous-épineux, dont l’évolution, ici encore, est prolongée, l’atrophie musculaire pouvant être définitive.

L’adduction croisée des bras exalte la douleur.

C’est le cross-body adduction test.

Ce syndrome est dû à une compression du nerf sus-scapulaire dans l’échancrure coracoïdienne ; il appartient donc à la pathologie des défilés, ce que peut confirmer la diminution des douleurs par infiltration d’anesthésiques locaux et de corticoïdes.

Ce test thérapeutique justifie, si la symptomatologie se prolonge, la libération chirurgicale du nerf. Les autres formes de neuropathie par prise au piège s’expriment plus par des troubles sensitifs ou moteurs que par une amyotrophie.

C – Neuropathies focales diabétiques :

Diverses neuropathies focales ou multifocales surviennent au cours du diabète sucré.

À côté des mononeuropathies crâniennes, se situent des neuropathies des intercostaux, les neuropathies motrices proximales asymétriques, les neuropathies par compression par prise au piège.

Ces atteintes surviennent chez des diabétiques adultes ou âgés avec un diabète ancien.

De ce fait, une sémiologie polyneuropathique, sensitivomotrice ou autonome, coexiste parfois.

Dans l’ensemble, le pronostic de ces formes focales est plutôt favorable, avec une récupération plus ou moins complète.

1- Neuropathie motrice proximale :

Ce terme général préférable à celui, ambigu, souvent utilisé d’« amyotrophie diabétique », réunit les formes symétriques, non envisagées ici, et les formes asymétriques.

Le terme d’amyotrophie diabétique correspondait à une faiblesse et à une amyotrophie asymétriques avec aréflexie dans des diabètes récents.

Mais des observations très diverses ont créé une certaine confusion clinique quant à la durée des symptômes, la symétrie, l’importance de l’atteinte distale et des troubles sensitifs, la présence ou l’absence de douleur, l’importance de l’amaigrissement.

Aussi, le terme d’amyotrophie diabétique est-il remplacé par celui de « neuropathie motrice proximale ».

Cette neuropathie survient chez des adultes ayant dépassé la cinquantaine, avec un degré variable de durée et de sévérité du diabète (qui parfois même est révélé par la neuropathie) et la présence ou l’absence d’autres complications.

Le début est parfois brutal, en 1 ou 2 jours, parfois subaigu, constitué en 1 ou plusieurs semaines.

L’amyotrophie unilatérale est le signe majeur (ce qui justifiait le terme d’amyotrophie diabétique), suivant de 2 à 3 semaines une faiblesse musculaire focale.

L’amyotrophie porte sur le quadriceps, l’iliopsoas et l’adducteur de la cuisse.

L’aréflexie rotulienne est proportionnelle à l’importance de l’atrophie.

Les muscles de la loge postérieure de la cuisse et les gastrocnémiens sont atteints dans la moitié des cas.

Les conséquences fonctionnelles sont l’instabilité du genou, une difficulté au maintien de la station debout et à la marche, une gêne particulière dans les marches d’escalier.

Bien que certains cas aient été rapportés comme neuropathie fémorale, on estime habituellement que l’atteinte proximale est plus globale (plexulaire ou radiculaire) avec une atrophie du psoas et de l’adducteur innervé par le nerf obturateur.

La douleur est quasi constante, profonde, permanente, sévère, exacerbée la nuit avec une composante de brûlure.

Parfois, elle débute dans la région lombaire ou dans la fesse ou s’étend de la hanche au genou.

Malgré son intensité, son pronostic est favorable.

Elle ne s’accompagne habituellement pas de signes sensitifs objectifs.

On sépare parfois deux groupes selon la coexistence ou non d’une polyneuropathie sensitive.

Dans la première éventualité, le début est plus progressif, l’amyotrophie, bien qu’asymétrique, est bilatérale, la perte de poids est plus importante, le diabète est insulinodépendant, l’électrophysiologie montre une dénervation des muscles paravertébraux, tous caractères qui sont absents dans les formes sans polyneuropathie.

Bien qu’une origine myogène ait été soupçonnée, l’EMG montre une dénervation, la vitesse de conduction est réduite dans le nerf fémoral. Dans l’ensemble le pronostic est favorable et la récupération survient en 1 à 2 ans.

L’origine de cette neuropathie est mal connue.

Les autopsies, rares, montrent des micro-infarctus dans la portion proximale des troncs nerveux portant sur les faisceaux de petit diamètre, en relation avec une occlusion des petits vaisseaux de l’épinèvre.

Une origine ischémique de la neuropathie apparaît très probable et vérifiée par biopsie des nerfs sensitifs.

2- Neuropathies des intercostaux :

Elles sont essentiellement douloureuses et comportent peu d’amyotrophie.

Au maximum, une dénervation est présente dans les muscles intercostaux.

Parfois une atrophie et surtout une laxité des muscles de l’abdomen entraînent, surtout en position debout, une déformation ipsilatérale de celuici .

Une dénervation des muscles paraspinaux est quasi constante. Une origine ischémique est probable.

3- Neuropathies diabétiques par compression ou prise au piège :

Identiques aux autres neuropathies de ce type, elles sont fréquentes au cours du diabète, portant surtout sur les nerfs médian et cubital.

Enfin, sont à rapprocher des neuropathies diabétiques amyotrophiantes, les formes amyotrophiques des neuropathies ischémiques focales qui sont des vasculites des petites artères, à l’origine de dégénérescence centroaxonale.

D – Infection, inflammation, dysimmunité :

Les neuropathies zonateuses sont à l’origine d’amyotrophies unilatérales, en particulier des muscles de la main, correspondant au territoire de l’éruption et survenant quelques jours après elles.

Une algoneurodystrophie est souvent associée.

La récupération est lente, fonction de la remyélinisation.

Chez un même sujet, le degré d’amyotrophie peut varier considérablement parmi les muscles innervés par la même racine motrice.

En cas d’atteinte des derniers nerfs intercostaux dorsaux, une atteinte focale des muscles de la paroi abdominale se traduit par l’amincissement en bande unilatérale des muscles abdominaux, et par une déformation oblique de l’abdomen en position debout.

Les neuropathies par infection par le virus de l’immunodéficien humaine (VIH) sont souvent multifocales, mais plus sensitives que motrices.

Les neuropathies à virus HTLV-1 (human T-cell lymphoma virus) sont plus souvent amyotrophiantes.

La lèpre est à l’origine d’amyotrophies focales, soit au cours de la lèpre tuberculoïde atteignant les nerfs médian et cubital (avec une atrophie de type Aran-Duchenne, très évocatrice si elle s’associe à des mutilations digitales) ou sciatique poplité externe, soit au cours de la lèpre lépromateuse, en particulier dans le territoire cubital. Diverses neuropathies dysimmunes sont à l’origine d’amyotrophies focales, en particulier dans leurs formes axonales.

Au cours de la périartérite noueuse et des vasculites nécrosantes, l’amyotrophie, obéissant à une topographie tronculaire, s’associe à des troubles sensitifs.

Les séquelles trophiques sont fréquentes. Les formes les plus importantes sont les neuropathies multifocales avec blocs de conduction persistants.

Plus fréquentes, et chez l’homme, elles débutent souvent avant 45 ans.

L’atteinte motrice est paralytique ou amyotrophique ou les deux.

Elle siège dans le territoire d’un tronc nerveux : médian, cubital, radial au membre supérieur, à prédominance distale, quoiqu’à la main elle soit souvent confluente sans topographie tronculaire.

Au membre inférieur, elle porte surtout sur le nerf sciatique poplité externe avec une amyotrophie péronière. Des cas d’hémiatrophie linguale sont connus.

Crampes et fasciculations sont fréquentes.

Les réflexes tendineux sont diminués ou abolis.

Il n’y a pas de troubles sensitifs. L’étude des vitesses de conduction nerveuse montre des blocs de conduction sur les nerfs moteurs, témoignant d’une démyélinisation focale.

Les titres d’anticorps anti-GM1 sont souvent élevés. Les immunoglobulines par voie veineuse entraînent dans beaucoup de cas une amélioration de la paralysie et de l’amyotrophie avec cependant des récidives.

Atteinte des plexus :

Une atteinte plexulaire est très fréquemment le point de départ d’une amyotrophie focale, dans des circonstances très diverses.

A – Plexopathies traumatiques :

Elles sont surtout importantes pour le plexus brachial.

1- Plexus brachial :

Les traumatismes ouverts ont été observés surtout en temps de guerre, les lésions de la région sus-claviculaire atteignant les troncs primaires supérieur et moyen.

Inversement, les lésions de la région sous-claviculaire ou de l’aisselle portent surtout sur le tronc primaire inférieur ou sur le tronc secondaire du plexus brachial.

Ces dernières sont habituellement plus graves en raison de lésions importantes des gros vaisseaux à l’origine d’hémorragies elles-mêmes compressives.

L’amyotrophie est importante et souvent définitive.

Les traumatismes fermés sont le plus souvent causés par une élongation du plexus.

La répartition des lésions dépend en grande partie de la position du membre supérieur lors de l’accident.

Ainsi, les traumatismes qui abaissent brutalement le moignon de l’épaule tout en écartant la tête et le cou du côté opposé, comme par exemple au cours d’une chute de motocyclette, lèsent la 5e et la 6e racine cervicale.

C’est la raison la plus commune des paralysies partielles du plexus brachial d’origine traumatique.

Lorsque le bras est en abduction lors de la chute, ce sont surtout la 7e et la 8e cervicale ainsi que la 1re racine dorsale qui sont mises en tension.

Lorsque se produit une traction du bras en abduction, la lésion porte sur le territoire de la 8e cervicale et de la 1re dorsale.

Les fractures et les luxations sont également à l’origine de lésions importantes du plexus brachial.

En particulier les luxations de l’épaule sont à l’origine de lésions du plexus inférieur qui peut être étiré, comprimé, contusionné ou lacéré. Les fractures de la grande tubérosité sont souvent en cause.

Les lésions de la partie inférieure du plexus brachial (paralysie de Dejerine-Klumpke) comportent une paralysie assez globale de la main avec amyotrophie médiocubitale et évolution vers une main en « griffe ».

En matière d’arrachement, on sépare les lésions du plexus lui-même de celles des racines cervicales.

Le pronostic est plus grave si l’arrachement a porté sur les racines.

Les plexopathies postanesthésiques sont peu atrophiantes. Les plexopathies radiques entraînent souvent une amyotrophie de la main homolatérale avec fasciculations par dégénérescence wallérienne distale.

Les paralysies obstétricales du plexus brachial sont actuellement rares.

La raison en était liée d’une part à la taille du foetus, d’autre part à l’utilisation d’instruments de délivrance.

L’atteinte la plus fréquente, de type Duchenne-Erb, entraîne une atrophie des muscles innervés par la 5e et la 6e racine cervicale. Les lésions apparaissent immédiatement après la naissance.

Il est plus rare d’observer une atteinte plexulaire totale ou plexulaire inférieure.

La croissance du membre supérieur est souvent retardée, la taille du membre diminuée, le pouls de faible amplitude.

2- Plexus lombosacré :

Il est moins souvent le siège de lésions traumatiques car il est profond et bien protégé, à l’inverse du plexus brachial.

Lorsqu’un traumatisme grave du bassin se produit, l’atteinte du plexus est noyée parmi d’autres atteintes viscérales, en particulier urinaires ou intestinales.

L’atteinte plexulaire peut être méconnue si les muscles adducteurs et fessiers ne sont pas examinés, et le diagnostic peut être celui d’une simple atteinte sciatique.

Seuls les traumatismes chirurgicaux sont relativement fréquents. Ils entraînent, par un mécanisme mal connu, des lésions du plexus lombosacré.

Ainsi, lors d’une hystérectomie, une plexopathie se constitue parfois avec atteinte de la face antérieure de la cuisse.

Elle est due tantôt à un étirement ou à une compression des filets nerveux par un écarteur placé dans la région du psoas, tantôt, et c’est le cas lors des hystérectomies vaginales, par compression du crural, en particulier si la patiente est dans une attitude cuisses fléchies et en rotation externe.

De même, la chirurgie de l’articulation de la hanche est parfois en cause.

La récupération se fait en quelques mois ou en quelques années.

Lors des accouchements, le plexus lombosacré peut également être atteint.

De rares plexopathies lombosacrées postradiques entraînent une amyotrophie de la cuisse ou de la jambe avec myokymies.

B – Tumeurs :

Diverses compressions tumorales sont susceptibles d’entraîner une amyotrophie focale, en particulier atrophie des muscles de la main en cas de syndrome de Pancoast-Tobias lié à un cancer de l’apex pulmonaire.

Un hématome du psoas, après traitement anticoagulant, est à l’origine d’une amyotrophie douloureuse du quadriceps.

C – Compressions chroniques :

Certaines sont à l’origine d’amyotrophies focales.

Une amyotrophie de la main survient dans certains cas de compression du défilé cervicobrachial, dont le diagnostic doit toujours être examiné avec réserve car cette cause est rare, contrairement à une opinion commune, et est justiciable d’une ablation de la première côte.

Elle diffère des amyotrophies thénariennes en relation avec une côte cervicale, qui ne nécessitent pas de traitement chirurgical.

C – Plexites inflammatoires :

Elles sont surtout fréquentes sur le plexus brachial.

1- Atteintes secondaires :

Une amyotrophie scapulaire par atteinte du plexus brachial s’observe dans des infections très diverses, qu’il s’agisse d’infections locales comme un panaris ou une infection du membre supérieur, ou d’infections à distance, notamment amygdaliennes ou dentaires.

La tuberculose et la syphilis, rares, provoqueraient une thrombose de la veine sous-clavière.

Parmi les autres causes infectieuses, sont à retenir la mononucléose infectieuse et la toxoplasmose.

Au cours des toxicomanies, l’injection intraveineuse d’héroïne est à l’origine de douleurs et de déficit, principalement dans les muscles innervés par le tronc supérieur et le tronc antéro-interne du plexus brachial.

Les paralysies vaccinales ou sériques du plexus brachial sont rares.

L’antitoxine tétanique administrée à titre préventif est la moins rare, mais d’autres variétés de sérothérapie sont également susceptibles d’entraîner ce type d’atteinte.

La sémiologie, survenant 3 à 10 jours après l’injection de sérum est faite de douleurs importantes, de déficit et d’atrophie, notamment dans le territoire de la partie supérieure du plexus brachial.

L’atteinte est uni- ou bilatérale.

Elle ne se fait pas forcément du côté où le sérum a été injecté.

Quant aux neuropathies vaccinales, elles apparaissent soit après la première injection, soit plus souvent après la seconde ou la troisième injection.

La vaccination en cause est surtout antityphoïdique, antivariolique ou antitétanique.

La vaccination antigrippale est parfois invoquée.

2- Névralgie amyotrophiante de l’épaule :

La névralgie amyotrophiante de l’épaule ou syndrome de Parsonage et Turner est de loin la plus fréquente.

Elle survient surtout chez l’adulte entre 25 et 50 ans.

L’homme est atteint deux fois plus souvent que la femme. Dans la moitié des cas, aucun facteur apparent n’est décelé. Dans l’autre moitié des cas, un épisode traumatique ou infectieux précède le début, de 3 semaines à 1 mois.

Une douleur scapulaire aiguë apparaît brutalement, souvent la nuit ou au réveil, localisée à la région de l’épaule, irradiant souvent au bras, parfois à l’avant-bras, dans la région cervicale.

Elle est parfois bilatérale.

La douleur est intense, diurne et principalement nocturne, à l’origine d’une insomnie, profonde, lancinante.

Elle subit parfois des recrudescences, notamment lors des mouvements du membre supérieur. Sans transition après 1 à 2 semaines mais parfois avec une courte période de chevauchement, la douleur fait place à une paralysie et à une amyotrophie d’un ou de plusieurs muscles de l’épaule, qui se constituent souvent en moins de 15 jours, parfois en 3 semaines ou plus.

La paralysie, flasque, est de type périphérique, avec une amyotrophie d’installation rapide dont la distribution est élective, les muscles le plus souvent concernés étant le grand dentelé, le deltoïde, les sus- et sous-épineux, également le biceps et le triceps.

D’autres muscles sont plus rarement atteints, en particulier le trapèze, le rhomboïde, le sous-scapulaire, le grand pectoral et le sternocléidomastoïdien, parfois l’atrophie se localise à des muscles à distance de l’épaule, notamment le brachial antérieur.

L’amyotrophie est souvent massive, et le décollement de l’omoplate, parfois décelé par un proche, est dans certains cas révélateur.

Les fasciculations sont rares. Une hypo- ou une aréflexie dans la topographie correspondant à la paralysie sont fréquentes.

La régression survient spontanément dans un délai de l’ordre de 6 mois, sans séquelles souvent, mais parfois incomplète, laissant dans environ 10 à 20 % des cas persister le déficit d’un muscle, principalement le grand dentelé.

Les formes familiales de névralgie amyotrophiante répondent à une transmission autosomique dominante.

Elles débutent également par une phase douloureuse suivie d’amyotrophie scapulaire.

Les muscles atrophiés sont essentiellement les muscles proximaux innervés par le tronc supérieur du plexus brachial. L’évolution se fait sur des semaines et des mois.

L’amyotrophie s’accompagne parfois de fasciculations. Une lente amélioration apparaît en 1 ou 2 ans.

Cette longueur d’évolution différencie les formes familiales des formes sporadiques qui sont habituellement plus rapides dans la régression.

De même, les rechutes et récidives sont fréquentes.

Une atteinte des membres inférieurs dans le territoire du plexus lombosacré constitue exceptionnellement de véritables plexopathies lombosacrées. Des atteintes bilatérales sont également signalées.

L’élément le plus caractéristique des formes familiales est la présence de dysmorphies, épicanthus, bec-de-lièvre, syndactylie et surtout hypotélorisme.

Des facteurs étiologiques sont parfois mis en évidence : infectieux, vaccinaux.

La circonstance le plus fréquemment signalée est la grossesse.

Le plus souvent, c’est après l’accouchement, quelques heures ou quelques jours après, que s’installe l’épisode de douleur scapulaire suivi rapidement de paralysie.

L’accouchement lui-même s’est habituellement déroulé dans des conditions normales.

Le diagnostic de ces formes familiales doit impérativement être fait avec celui d’une variété assez proche cliniquement : l’hérédopathie tomaculaire du plexus brachial qui s’inscrit dans le cadre des neuropathies héréditaires avec hypersensibilité à la pression.

Ces formes diffèrent sensiblement bien qu’elles répondent également à une transmission de type autosomique dominant, liée à une délétion du chromosome 17.

Les atteintes du plexus brachial ne sont, au contraire des précédentes, que l’expression localisée de l’atteinte plus diffuse signalée précédemment.

Le début se fait souvent le matin au réveil, favorisé par une posture anormale ou par un facteur professionnel.

L’atteinte, habituellement strictement indolore, s’accompagne au maximum de paresthésies.

L’amyotrophie de l’épaule témoigne le plus souvent d’une atteinte plexique, de topographie haute C5-C6 ou encore de topographie globale.

La régression se fait de façon plus ou moins complète en quelques semaines ou quelques mois.

Le caractère familial, l’absence de douleurs et la notion d’épisodes antérieurs permettent habituellement le diagnostic.

Atteintes radiculaires :

De très nombreuses amyotrophies focales unilatérales ressortissent à la lésion d’une racine nerveuse.

Il va de soi que toute compression aiguë ou chronique d’une racine motrice est susceptible de causer ce type d’atteinte.

Les plus fréquentes sont les compressions discales et les tumeurs surtout bénignes, neurinomes, méningiomes.

La topographie de l’amyotrophie, l’association de symptômes et de signes radiculaires, la neuro-imagerie permettent habituellement le diagnostic.

Au membre inférieur, une amyotrophie persistante, en général unilatérale, souvent confluente, associée à une aréflexie achilléenne et parfois à des troubles trophiques cutanés, survient au cours de certaines dysraphies : méningocèles, anomalies de la queue de cheval et/ou filum terminale, vestiges mésenchymateux, lipomes.

Atteintes médullaires :

De ce cadre sont exclues arbitrairement les amyotrophies localisées secondaires à des lésions cervicales, myélopathies ou radiculomyélopathies cervicarthrosiques, tumeurs médullaires par exemple.

A – Sclérose latérale amyotrophique à début focal :

Il est fréquent que le début d’une sclérose latérale amyotrophique soit marqué par une atrophie précédant la faiblesse.

Les topographies le plus souvent rencontrées sont une atrophie thénarienne, ou thénarienne et interosseuse évoluant vers une main d’Aran-Duchenne, une atrophie jambière avec steppage progressif, parfois une amyotrophie plus ou moins étendue des muscles de l’épaule. Parfois, une amyotrophie distale du membre inférieur devient proximale et réalise une atrophie monomélique.

Le diagnostic est habituellement facilité par la rapidité d’évolution, la coexistence de crampes, de fasciculations, d’hyperréflexie, et la diffusion de la dénervation sur l’EMG.

B – Amyotrophie de la syringomyélie :

Elle reste parfois unilatérale et même asymétrique lorsqu’elle se bilatéralise.

Elle porte sur les muscles interosseux, thénariens et hypothénariens, évoluant vers une main en « griffe ».

La coexistence d’aréflexie et de troubles sensitivotrophiques suspendus, et l’imagerie de la moelle cervicale permettent le diagnostic.

C – Amyotrophie unilatérale de la diastématomyélie :

Une amyotrophie distale unilatérale à extension proximale d’un membre inférieur est associée à un raccourcissement du membre, à des troubles sensitivotrophiques unilatéraux comportant parfois un mal perforant plantaire.

Une hypertrichose localisée, présente dans la moitié des cas, est hautement évocatrice.

Elle forme une touffe de poils en triangle lombaire à base supérieure, avec pigmentation cutanée sous-jacente.

Un éperon osseux médian est visible sur les radiographies.

La myélographie met en évidence un cône terminal abaissé et surtout une duplication médullaire asymétrique, le côté atrophique étant ipsilatéral à l’amyotrophie.

D – Poliomyélite antérieure aiguë :

La poliomyélite antérieure aiguë est à l’origine des amyotrophies les plus variées dans leur topographie.

Après la phase initiale, elles se fixent, à l’origine de déformations.

Elles s’accompagnent d’aréflexie, de fasciculations et de tracés de dénervation sur l’EMG.

Le syndrome postpoliomyélitique, dont l’expression topographique est diverse, se traduit souvent par une amyotrophie focale, se constituant de longues années après la période initiale.

On doit remarquer que l’appellation ancienne de « poliomyélite antérieure chronique » était née de la constatation selon laquelle une atrophie musculaire progressive pouvait apparaître chez un sujet atteint, de nombreuses années auparavant, de poliomyélite antérieure aiguë.

Toutefois, le concept d’amyotrophie postpoliomyélitique tardive s’est actuellement modifié.

À côté des formes à type de poliomyélite chronique, sont décrits des tableaux proches de la sclérose latérale amyotrophique, mais d’évolution plus lente, ou encore des formes segmentaires, soit localisées au territoire initialement atteint, soit le débordant, soit même portant sur un territoire symétrique réalisant une ou des amyotrophies focales.

L’âge moyen de survenue du premier épisode est 5 ans, celui du second est 45 ans, après un intervalle libre de plusieurs dizaines d’années.

L’évolution des formes ressemblant à la maladie de Charcot est environ deux fois plus lente que celle de la sclérose latérale amyotrophique, avec des chiffres moyens de 8,7 ans.

Les formes focales paraissent plutôt évoluer vers la stabilisation après quelques mois.

La nature du syndrome postpoliomyélitique est en discussion.

Il ne s’agit pas d’une reviviscence virale.

L’hypothèse d’un remaniement permanent des unités motrices devenant insuffisantes est soulevée.

Ces formes sont à séparer du syndrome musculosquelettique de cause mécanique survenant chez d’anciens poliomyélitiques, ne provoquant pas d’amyotrophie neurogène.

E – Amyotrophies monoméliques d’origine vraisemblablement spinale :

Leur statut n’est pas définitivement établi.

Certaines amyotrophies monoméliques prédominant chez le sujet jeune sont rattachées à une origine spinale et considérées comme des expressions monoméliques de maladie du motoneurone.

Ces formes sont parfois dites maladie d’Hirayama. La marque clinique de cette dernière est une amyotrophie très focalisée « oblique » unilatérale, ou à prédominance unilatérale, s’étendant du bord cubital de l’avant-bras au-dessous du coude aux muscles interosseux et hypothénariens.

La faiblesse musculaire prédomine sur les extenseurs des doigts, surtout des derniers doigts, et les fléchisseurs du poignet tandis que la pronation est respectée.

Il n’y a pas ou peu de troubles sensitifs. Les réflexes sont habituellement présents. L’amyotrophie est franchement monomélique dans plus de la moitié des cas.

Elle s’étend parfois aux muscles de la main controlatérale mais ne devient jamais symétrique. Un tremblement fin, rapide et dissocié des doigts survient à l’extension du membre supérieur.

Une discrète sémiologie autonome est parfois associée : troubles vasomoteurs particulièrement déclenchés par le froid, syndrome de Claude Bernard-Horner.

L’évolution se fait souvent en deux phases.

Le début est insidieux, chez un sujet jeune, par une faiblesse des doigts et une atrophie de la main et de l’avant-bras, sans facteur déclenchant apparent.

L’augmentation progresse très lentement, avec souvent une importante faiblesse des doigts. Son importance est variable selon les patients.

Le processus paraît parfois se stabiliser en 1 à 3 ans, parfois en quelques années.

Les examens complémentaires apportent quelques arguments en faveur d’une atteinte de la corne antérieure de la moelle.

L’EMG montre une dénervation avec des vitesses de conduction nerveuse motrice et sensitive normales.

Parfois la dénervation est présente dans des muscles cliniquement sains, notamment le long supinateur, le biceps, le deltoïde et surtout le triceps.

Elle est également fréquente du côté sain en l’absence de toute amyotrophie.

Les membres inférieurs sont toujours indemnes.

Le liquide céphalorachidien est normal avec parfois une légère hyperprotéinorachie.

L’épreuve de Queckenstedt est normale, sauf après hyperflexion de la nuque qui entraîne un retard d’élévation de pression.

Une biopsie du muscle grand palmaire a parfois montré des aspects neurogènes caractéristiques : petites fibres anguleuses, groupement de fibres de même type.

Les examens neuroradiologiques, surtout dynamiques, feraient apparaître un aplatissement de la moelle cervicale en hyperflexion, attribué à un déplacement en avant de la dure-mère postérieure.

Ceci entraînerait une compression de la moelle sur le corps vertébral, en particulier de la 6e cervicale, visible sur une myélographie opaque.

De même, le scanner X avec injection de métrizamide montre un aplatissement antéropostérieur ou antérolatéral de la moelle, exagéré par la flexion et surtout plus marqué du côté de l’amyotrophie.

Enfin, les images de résonance magnétique nucléaire comportent un élargissement de l’espace épidural postérieur prédominant dans la région cervicale inférieure et attribué à une hypothétique congestion du plexus veineux épidural.

Cette origine médullaire a été confirmée dans de rares cas autopsiés : aplatissement de certains segments de la moelle cervicale, raréfaction des cornes antérieures de la moelle, atrophie des racines antérieures.

L’origine pourrait en être non pas une dégénérescence, mais une compression des artères irriguant la corne antérieure de la moelle, lors de la flexion de la tête.

Mais ceci demande confirmation.

Selon certains, la maladie d’Hirayama est un syndrome pouvant relever d’un mécanisme précis, en particulier d’une neuropathie à anticorps antigangliosides.

Les immunoglobulines par voie veineuse ont été efficaces dans ces derniers cas.

F – Téphromalacie des cornes antérieures de la moelle :

Ce concept ancien définit une forme bénigne encore appelée « atrophie thénarienne diffuse non évolutive des sujets âgés ».

Cette atrophie se retrouve sous diverses dénominations dans la littérature : atrophie isolée non progressive des petits muscles de la main de Pierre Marie et Foix, amyotrophie thénarienne non évolutive du vieillard de Jean Lhermitte, téphromalacie des cornes antérieures de la moelle, atrophie thénarienne partielle de Wartenberg.

Ce type d’atrophie, isolée et indépendante de tout signe neurologique, est communément attribué à une atteinte localisée des cornes antérieures de la moelle, qui sont le siège d’une raréfaction neuronale.

L’EMG met en évidence des aspects neurogènes.

Toutefois, certains de ces cas auraient une origine carpienne.

Origine cérébrale :

De telles formes sont exceptionnelles. Parfois dites syndrome de Silverstein, elles se manifestent par une amyotrophie d’une main consécutive à une atteinte du lobe pariétal.

Elles sont interprétées comme des amyotrophies transsynaptiques.

La lésion initiale est ischémique ou métastatique.

Ainsi apparaît la complexité et la diversité des amyotrophies focales.

Il est des cas où la focalisation est véritablement anarchique (par exemple la poliomyélite antérieure aiguë, la neuropathie multifocale avec blocs de conduction, la myosite à inclusions).

D’autres fois, elle est segmentaire (atrophie monomélique).

Le plus souvent, elle est régionale et soulève alors d’importantes questions de diagnostic différentiel : amyotrophie de l’épaule (syndrome de Parsonage et Turner, paralysie plexique, atteinte sérique, paralysie du grand dentelé), amyotrophie thénarienne (canal carpien, sclérose latérale amyotrophique, syndrome du défilé thoracobrachial, côte cervicale), amyotrophie quadricipitale (compression du crural, diabète), amyotrophie péronière (neuropathie compressive, dystrophie distale).

Parfois enfin, elle se limite à un seul muscle (agénésie, myosite focale).

Dans tous les cas, au-delà du diagnostic, il convient de séparer les formes d’évolution bénigne ou sévère et d’individualiser celles justiciables d’une thérapeutique médicale ou chirurgicale.

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