Affections des gaines synoviales

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Introduction :

Les tendons sont entourés d’une gaine protectrice quand ils sont menacés par un changement de direction sur une saillie osseuse ou leur passage dans les tunnels ostéofibreux, notamment au poignet, à la main et à la cheville.

Ces gaines peuvent être le siège de lésions tumorales bénignes ou malignes mais surtout de lésions dégénératives, comme les tendons, liées à un surmenage fonctionnel, ou de lésions inflammatoires du fait de leur structure synoviale.

Les gaines ont partie liée avec les articulations, au point que leur atteinte révèle parfois et accompagne souvent un rhumatisme inflammatoire aigu ou chronique.

La démarche diagnostique doit donc s’apparenter à celle d’une arthropathie avec le même souci de ne pas passer à côté d’une infection.

L’examen clinique garde son importance mais l’imagerie moderne apporte une aide précieuse dans les cas difficiles ; les examens biologiques et histologiques apportent la certitude étiologique.

Données générales :

A – Anatomie générale :

Les gaines synoviales ne peuvent être séparées des tendons qu’elles entourent sur une partie de leur trajet.

La gaine proprement dite (feuillet pariétal) est fermée à ses deux extrémités où elle se réfléchit sur le tendon et se continue avec une enveloppe adhérente au tendon (feuillet interne ou viscéral de la gaine tendineuse).

Affections des gaines synoviales

Les deux feuillets ménagent une véritable cavité synoviale contenant un mince film de liquide très voisin du liquide synovial normal dont la viscosité est assurée par l’acide hyaluronique.

Les deux feuillets de la gaine du tendon sont aussi unis entre eux, le long de l’axe du tendon et sur sa face squelettique, par une mince cloison porte-vaisseau : le mésotendon.

La gaine ténosynoviale assure au tendon un glissement doux en le protégeant, mais l’atteinte de la gaine, selon sa forme anatomique, empêchera le glissement du tendon ou finira par l’altérer jusqu’à son éventuelle rupture.

La structure de la gaine tendineuse est voisine de celle de la synoviale articulaire dont elle partage les atteintes.

Une ténosynovite peut donc accompagner ou révéler une atteinte articulaire de même étiologie.

B – Anatomie pathologique :

Les affections des gaines sont de nature tumorale, dégénérative ou inflammatoire.

On distingue parmi les atteintes inflammatoires :

– les ténosynovites exsudatives caractérisées par un épanchement dont l’analyse permet de préciser la cause ;

– les ténosynovites sténosantes caractérisées par un épaississement du feuillet pariétal de la gaine qui gêne le glissement du tendon.

Elle peut être primitive ou être le terme évolutif de la phase exsudative.

C – Anatomie régionale :

Les anciennes dénominations sont indiquées entre parenthèses.

1- Gaines synoviales de la main et du poignet :

Les gaines passent dans des tunnels ostéofibreux formés par le plan osseux profond et soit le ligament annulaire antérieur du carpe en avant, soit le ligament annulaire dorsal du carpe en arrière.

* À la face palmaire du poignet et de la main :

On retrouve :

– la gaine digitocarpienne externe (ou radiale) qui entoure le tendon du long fléchisseur du pouce.

Elle s’étend sur 12 à 14 cm de la base de la phalange unguéale à l’avant-bras, débordant de 3 à 4 cmle bord supérieur du ligament annulaire antérieur du carpe ;

– la gaine digitocarpienne interne (ou cubitale) qui entoure les tendons les plus internes des fléchisseurs profond et superficiel des doigts (ou fléchisseur commun superficiel et profond).

Elle s’étend sur 13 à 14 cm de la base de la phalange unguéale du cinquième doigt à l’avant-bras, plus haut que la gaine radiale, dépassant de 3 à 5 cmle bord supérieur du ligament annulaire ;

– la gaine du fléchisseur radial du carpe (ou grand palmaire) à la partie externe du canal carpien.

* À la face palmaire de la main :

– Les gaines digitales des trois doigts moyens entourent les deux tendons fléchisseurs superficiel et profond dans le trajet digital.

Elles s’étendent de la base de la phalange unguéale à la paume de la main remontant à 10 ou 15 mm au-dessus de la métacarpophalangienne.

– Les gaines carpiennes moyennes sont deux gaines inconstantes annexes au tendon de l’index.

* À la face dorsale du poignet :

Six gaines sont disposées, de dehors en dedans, dans des tunnels ostéofibreux :

– gaine du long abducteur et du court extenseur du pouce, partiellement divisée, située à la face externe du radius ;

– gaine des court et long extenseurs radiaux du carpe (ou radiaux), partiellement divisée parfois, située en arrière de la précédente à la face externe du radius ;

– gaine du long extenseur du pouce située à la face postérieure du radius ;

– gaine commune à l’extenseur commun et à l’extenseur propre de l’index ;

– gaine de l’extenseur propre du cinquième doigt répondant à l’interligne radiocubital ;

– gaine de l’extenseur ulnaire du carpe (ou cubital postérieur) située entre la styloïde et la tête du cubitus.

2- Gaines synoviales de la cheville :

Chaque tendon musculaire entourant la cheville est enveloppé d’une gaine synoviale l’isolant des gouttières ostéofibreuses sur lesquelles les gaines sont appliquées par les retinaculi (épaississement du fascia profond qui enveloppe la région).

Les gaines synoviales antérieures comprennent la gaine du tibial antérieur (ou jambier antérieur), du long extenseur de l’hallux (ou extenseur propre du gros orteil) et du long extenseur des orteils (ou long extenseur commun des orteils).

Ces gaines débordent les retinaculi supérieurs et inférieurs des extenseurs.

Les gaines synoviales médiales (ou internes) comprennent la gaine du tibial postérieur (ou jambier postérieur) qui commence à 4 cm au-dessus de la malléole et se termine près de l’insertion du tendon, la gaine du long fléchisseur de l’hallux (ou long fléchisseur propre du gros orteil) qui commence au niveau de la malléole interne et se termine à la base du premier métatarsien, la gaine du long fléchisseur des orteils (ou long fléchisseur commun des orteils) qui s’étend de la malléole interne à l’os naviculaire (ou scaphoïde tarsien).

Les gaines synoviales latérales (ou externes) comprennent :

– la gaine commune des muscles fibulaires (ou péroniers latéraux) qui se divise en bas pour accompagner le tendon du court et du long fibulaire (long et court péronier latéral) jusqu’à la face latérale du cuboïde ;

– la gaine plantaire du long fibulaire (ou long péronier latéral), indépendante de la précédente, entoure le tendon de ce muscle dans son trajet plantaire.

Examen clinique :

A – Diagnostic positif :

L’examen vise d’abord à reconnaître la ténosynovite.

1- Ténosynovite exsudative :

Elle est en général reconnue dès l’inspection.

La ténosynovite exsudative des fléchisseurs des doigts est celle dont l’aspect peut le plus souvent être aigu ou chronique selon l’étiologie qui est parfois infectieuse.

Dans les cas aigus, la flexion d’un ou plusieurs doigts est irréductible (signe du « crochet »).

La douleur est traçante sur tout le trajet de la gaine.

L’oedème est diffus à la totalité du ou des doigts affectés et parfois à l’ensemble de la paume de la main.

La fièvre peut être élevée et les signes généraux importants.

Des adénopathies sus-épitrochléennes ou axillaires peuvent être observées.

L’évolution peut être marquée par la diffusion de l’infection localement aux autres gaines, aux espaces celluleux, aux articulations ou, à distance, entraînant un adénophlegmon axillaire ou une septicémie.

Dans les cas chroniques, elle se traduit par une tuméfaction molle, mal limitée, soit à la partie basse de l’avant-bras, au-dessus du pli de flexion du poignet, soit à la paume comblant le creux de la main de façon plus ou moins nette et n’apparaissant parfois que par comparaison avec le côté opposé, soit au niveau digital sous forme d’un gonflement localisé à la face palmaire d’une phalange à cause de la présence de la gaine fibreuse.

La tuméfaction peut être en « bissac » à la paume et à l’avant-bras, à cause de la présence du ligament annulaire antérieur du carpe.

À l’inspection, on peut observer aussi des ressauts lors de la mobilisation active des doigts.

La ténosynovite exsudative des extenseurs des doigts se traduit par une tuméfaction médiane allongée à la face dorsale du poignet et à la partie basse de l’avant-bras prenant parfois un aspect en « bissac » lié à la présence du ligament annulaire dorsal.

La ténosynovite exsudative des tendons cubitaux se traduit par un gonflement de la région radiocubitale inférieure qui contribue à majorer la saillie de la tête cubitale.

Au minimum, elle entraîne un comblement de la dépression normalement observée sur le versant cubital du poignet, sous l’épiphyse cubitale inférieure.

La ténosynovite exsudative des muscles fibulaires est visible sous forme d’une tuméfaction molle, allongée, sous- et rétromalléolaire externe.

La ténosynovite exsudative du tibial postérieur est moins visible sous forme d’une tuméfaction rétromalléolaire interne allongée dans l’axe du tendon.

2- Ténosynovite sténosante :

Elle peut aussi se traduire par une tuméfaction, moins nette, mais surtout par une douleur locale réveillée par la pression locale, par le mouvement contre résistance qui met en tension le tendon (maître-symptôme de la tendinite) et par l’étirement passif du tendon.

B – Diagnostic étiologique :

Il faut ensuite préciser la cause par l’examen clinique aidé par les examens complémentaires.

L’examen articulaire doit être complet.

Il faut d’abord vérifier que les signes locaux sont bien dus à la ténosynovite et non à une inflammation de l’articulation voisine qui peut lui être associée.

Ensuite, on doit examiner les autres articulations axiales et périphériques à la recherche de signes d’un rhumatisme inflammatoire chronique tel que la polyarthrite rhumatoïde (PR) ou la spondylarthrite ankylosante, la goutte ou la chondrocalcinose.

L’interrogatoire précise les antécédents récents (surmenage fonctionnel professionnel, sportif ou de loisir, traumatisme direct ou indirect) ou lointains, notamment tuberculeux, du malade lui-même et un antécédent familial de rhumatisme inflammatoire.

L’examen extra-articulaire recherche d’autres localisations tuberculeuses, des signes d’une autre infection ou d’une maladie systémique, en particulier des signes de syndrome sec ou un syndrome de Raynaud et d’autres atteintes viscérales.

La démarche diagnostique doit être la même que celle d’une arthrite au début.

C – Évolution :

Elle est marquée par le risque de rupture tendineuse traduite par la perte du mouvement actif et le maintien du mouvement passif.

Pour les fléchisseurs, les ruptures prédominent sur le bord radial du canal carpien ou à la partie distale de la paume.

Les extenseurs sont classiquement les plus atteints, surtout ceux des deux derniers doigts.

Plusieurs tendons peuvent être atteints simultanément ou successivement.

Examens complémentaires :

A – Radiographie standard :

Elle a peu d’intérêt dans l’étude des affections des gaines synoviales.

Elle peut montrer une calcification d’une ou plusieurs gaines et une réaction osseuse de voisinage dans certaines localisations (tendinite de de Quervain).

Elle a surtout l’intérêt d’éliminer une affection osseuse ou articulaire de proximité.

La calcification de la gaine oriente vers un rhumatisme à hydroxyapatite ou une chondrocalcinose articulaire.

B – Ténographie :

Même couplée au scanner, elle est de moins en moins utilisée.

C’est, en effet, une méthode invasive qui expose au risque septique et traumatique car la ponction de la gaine n’est pas toujours facile.

Le produit de contraste moule le tendon qui est vu en négatif.

Ses bords sont réguliers et parallèles.

Les fissures intratendineuses sont parfois difficiles à déceler.

Les contours de la gaine sont bien analysés et la ténographie met bien en évidence les communications éventuelles avec les articulations voisines.

C – Arthrographie de contraste :

Elle n’a pas pour objectif l’étude des tendons périarticulaires.

Néanmoins, ceux-ci peuvent parfois être opacifiés de façon physiologique au cours de cet examen.

D – Échographie :

Technique non invasive, très accessible, peu coûteuse, rapide et facilement répétée, elle est sous-utilisée car elle devrait être un complément régulier de l’examen clinique des gaines tendineuses.

Pour l’examen des poignets, des mains et des chevilles, l’appareil à 10 MHz convient mieux que celui à 5 MHz, mais d’excellents résultats ont été obtenus à l’aide d’appareils à haute fréquence (13 MHz) dans l’étude des tendons de la PR.

Les meilleures images sont obtenues lors des épanchements et il est possible de distinguer l’épanchement (hypoéchogène) et la prolifération synoviale, sauf si le taux de fibrine du liquide synovial est élevé.

Les tendons normaux sont toujours visualisés sous forme d’une zone assez hyperéchogène, à contours parallèles, présentant une structure fibrillaire bien décelée par les sondes de haute définition.

L’expérience de l’opérateur est essentielle pour éviter les artefacts observés lorsque la sonde n’est pas exactement perpendiculaire à l’axe du tendon.

En effet, l’échogénicité du tendon dépend de l’angle que fait la sonde par rapport au tendon. Ce phénomène est connu sous le nom d’anisotropie.

Ainsi, lorsque la sonde (barrette linéaire) est perpendiculaire au tendon, celui-ci apparaît plus échogène que le muscle.

Lorsque l’angle se modifie, l’échogénicité du tendon décroît, devenant isoéchogène pour un angle compris entre 2 et 7°, hypoéchogène au-delà.

L’échographie permet l’étude de l’échostructure des tendons, de leur morphologie, de leur épaisseur, de leur continuité ainsi que l’analyse des gaines synoviales.

L’examen des tendons doit être fait sous tension dans les deux plans, sauf si l’on recherche une fissure sous forme d’une plage linéaire liquidienne au sein du tendon examiné détendu.

Le perfectionnement de la technique où l’image est créée, non par la réflexion mais par la transmission des ultrasons, est très prometteur pour l’étude des articulations de la main par exemple.

E – Scanner :

Idéalement couplé à la ténographie, il permet une analyse précise de la morphologie des tendons, des gaines synoviales et des parties molles environnantes.

Il permet une étude bilatérale et comparative des poignets, des mains, des chevilles et des pieds placés côte à côte le plus symétriquement possible.

Cette possibilité de comparaison est un avantage indéniable, notamment en cas d’images discrètes ou douteuses.

Il permet d’obtenir des images de très bonne qualité en résolution spatiale dans la mesure où l’on réalise des coupes de faible épaisseur (1 à 1,5 mm).

Il n’est pas nécessaire de réaliser des coupes jointives, sauf si l’on souhaite réaliser des reconstructions multiplanaires.

L’injection intraveineuse de produit de contraste peut être utile pour distinguer une lésion inflammatoire d’une lésion dégénérative de la gaine.

La radioanatomie des tendons en scanner est calquée sur celle de l’IRM.

F – Imagerie par résonance magnétique :

Méthode non invasive, non irradiante, donnant des images d’une précision proche de celle des coupes anatomiques, l’IRM serait la méthode idéale si ce n’était son coût.

On utilise des antennes de surface relativement larges qui permettent une étude synchrone des deux régions articulaires ; des antennes plus étroites, voire des antennes de contact, peuvent être utiles pour une étude plus localisée.

Un tendon s’étudie dans deux plans dont l’un au moins est perpendiculaire à son grand axe.

Le choix de l’épaisseur de coupe est un compromis entre une bonne résolution spatiale, avec un effet de volume partiel aussi faible que possible, et un rapport signal sur bruit acceptable.

En pratique, des coupes de 3 à 5 mm sont utilisées.

Les séquences en pondération T1 sont utilisées le plus fréquemment possible.

Les séquences en pondération T2 permettent une bonne visualisation des épanchements liquidiens et de l’oedème.

Les séquences rapides permettent de raccourcir le temps des séquences par rapport aux séquences classiques en écho de spin.

La saturation de graisse (STIR ou fat-sat) sensibilise l’injection de gadolinium en T1 et fait ressortir l’oedème ou l’inflammation en T2.

L’injection de contraste entraîne une fixation sur tout ce qui est richement vascularisé (ténosynovite inflammatoire ou tumorale).

En T1 comme en T2, le tendon apparaît normalement en hyposignal franc, de forme arrondie ou ovalaire, de contours et d’épaisseur réguliers.

Il est en général bien visualisé au sein du contraste naturel existant avec la graisse et les muscles adjacents.

En revanche, il est mal différencié au contact d’une corticale osseuse en hyposignal identique.

La sémiologie IRM repose sur les anomalies de signal, mais les anomalies morphologiques (anomalies de calibre, des contours ou de position) doivent aussi attirer l’attention.

Un plan de lecture systématique, au besoin comparatif, est nécessaire pour ne pas méconnaître des anomalies parfois peu évidentes.

Il faut se méfier des artefacts bien connus en IRM, et notamment celui sous le nom d’« angle magique ».

Les anomalies de l’imagerie sont détaillées lors de l’étude des ténosynovites de la cheville et du pied où elles ont davantage d’importance qu’à la main et au poignet.

G – Examens de laboratoire :

Leur choix a pour objectif de préciser la cause des affections des gaines synoviales.

Dans le sang, la recherche d’un syndrome inflammatoire comporte la mesure de la vitesse de sédimentation (VS) des hématies à la première heure tout en sachant qu’elle peut être normale ; dans ce cas, la mesure de la protéine C réactive est utile. L’électrophorèse des protides, à la recherche d’une gammapathie monoclonale, et le bilan rénal (proteinurie, créatininémie) peuvent orienter vers une amylose.

Le dosage de l’uricémie peut mettre sur la voie d’une ténosynovite tophacée.

La recherche d’un rhumatisme inflammatoire impose les mêmes examens que pour une polyarthrite : sérologie rhumatoïde, anticorps antinucléaires en immunofluorescence indirecte (IFI), anticorps anticytosquelette, plus rarement anticorps anticytoplasme de polynucléaire neutrophile (ANCA), et parfois phénotype HLA (human leukocyte antigen)-DR qui a une certaine valeur d’orientation.

Dans le liquide synovial qu’il faut ponctionner chaque fois qu’il y a un épanchement dans la gaine, on pratique un examen cytobactériologique et cristallographique.

La numération des éléments blancs permet de distinguer un épanchement mécanique (moins de 1 000/mm3) d’un épanchement inflammatoire (plus de 1 000/mm3).

La recherche de germes et notamment de mycobactéries, à l’examen direct et en culture, sera systématique.

La biologie moléculaire permet une mise en évidence plus rapide du bacille de Koch.

La recherche de cristaux est faite en lumière polarisée pour les cristaux d’urate et de pyrophosphate de calcium, et au microscope électronique pour les cristaux d’hydroxyapatite.

L’examen histologique de la gaine est parfois indispensable pour préciser l’étiologie.

Principales localisations :

A – Main et poignet :

1- Ténosynovite des fléchisseurs :

En plus de la tuméfaction décrite, elle se traduit par une raideur des doigts, surtout le matin et après une immobilisation dans la journée.

Elle est souvent responsable de paresthésies liées à un syndrome du canal carpien par compression du nerf médian dans sa traversée de ce canal fibreux, inextensible.

À l’examen, on remarque que la tuméfaction est mobile avec les tendons et on provoque une douleur à la flexion contrariée des doigts.

Il faut rechercher un déficit moteur et/ou sensitif dans le territoire du médian.

Sa cause peut être inflammatoire ou mécanique liée aux microtraumatismes et au gonflement des tissus à l’âge de la ménopause ou à l’occasion d’autres causes.

Son évolution est dominée par la compression du nerf médian et le risque de rupture tendineuse.

Il faut noter la fréquence des tendons anormaux responsables de la réaction synoviale, jusqu’à 12 % des canaux carpiens opérés.

Les gaines synoviales en peropératoire sont opaques et épaissies.

L’examen histologique retrouve, soit des lésions inflammatoires, soit des lésions dégénératives si le syndrome est en apparence primitif.

Le traitement est essentiellement médical et fonction de la cause.

La chirurgie n’est indiquée que dans les formes rebelles et en cas de déficit neurologique.

À la section du ligament annulaire antérieur du carpe sont associées une synovectomie péritendineuse et une épineurolyse antérieure.

2- Ténosynovite rare du fléchisseur radial du carpe :

Elle se traduit par une douleur sur le trajet du tendon accentuée par la flexion contrariée du poignet ou son extension passive, et parfois par des dysesthésies dans le territoire de la branche cutanée palmaire du nerf médian.

À l’examen, on peut observer une tuméfaction qu’il faut distinguer d’un kyste de la gouttière du pouls radial et d’une bursite de la tubérosité du scaphoïde.

Elle est souvent associée à une arthrose scaphotrapézienne qui a des rapports anatomiques étroits avec le tendon expliquant son irritation directe.

Le traitement médical suffit en règle à la guérir.

3- Ténosynovite sténosante de de Quervain :

Elle a été décrite en 1895 par de Quervain, même si des publications antérieures de Tillaux en 1892 et de Gray en 1893 ont décrit la même affection.

Elle touche surtout la femme entre 40 et 50 ans et elle est favorisée par des facteurs mécaniques qui expliquent sa fréquence dans les professions manuelles et son retentissement socioprofessionnel important.

Une cause récemment rapportée consiste en l’utilisation de certains claviers informatiques et plus encore de jeux vidéo.

Elle est favorisée aussi par des variations anatomiques telles que la multiplicité des tendons du long abducteur et du court extenseur, ou un dédoublement total ou partiel du premier compartiment dorsal de la main.

Elle se traduit par une douleur du bord radial du poignet accentuée par les mouvements d’inclinaison cubitale de celui-ci, l’abduction active du pouce et les prises pollicidigitales.

À l’examen, on peut voir une tuméfaction en regard de la styloïde radiale et on provoque une douleur par la pression locale et par deux manoeuvres : la prise pouce-cinquième doigt ou l’extension du pouce contre résistance d’une part, la manoeuvre de Finkelstein d’autre part (flexion passive du poignet en inclinaison cubitale, le pouce étant maintenu fléchi dans la paume par les autres doigts).

Il faut rechercher une pathologie associée : rhizarthrose du pouce, syndrome du canal carpien…

Il faut éliminer une tendinite des radiaux et un syndrome deWartenberg ou « névrite » de la branche antérieure du nerf radial qui reconnaît le même mécanisme que la tendinite.

La radiographie, le plus souvent normale, peut montrer un épaississement des parties molles, une réaction périostée ou une décalcification localisée.

L’échographie peut objectiver un épanchement liquidien péritendineux : image classique en « cible ».

Le traitement est essentiellement médical.

La chirurgie serait nécessaire dans 20 %des cas mais elle doit se limiter à l’ouverture partielle de la gaine sur son bord postérieur cubital et à la résection de l’arche d’entrée pour éviter une subluxation des tendons lors des mouvements du poignet et du pouce.

Ses résultats sont bons dans 90 à 95 % des cas mais au prix de 2 à 4 % de réinterventions et quelques cicatrices inesthétiques.

La caractéristique anatomique est l’hypertrophie de la gaine tendineuse qui, histologiquement, se traduit par une augmentation d’épaisseur des fibres collagènes, des aires de métaplasie myxoïde et chondroïde et la présence de cellules semblables à des myofibroblastes.

4- Ténosynovite des extenseurs :

Traduite par une tuméfaction médiane allongée à la face dorsale du poignet et à la partie basse de l’avant-bras, elle a parfois un aspect caractéristique en « bissac » lié à la présence du ligament annulaire dorsal.

Elle doit être distinguée d’un kyste synovial dorsal ou d’une synovite villonodulaire.

Elle est presque toujours secondaire à une PR ou à une tuberculose.

5- Ténosynovite des court et long extenseurs radiaux du carpe :

La douleur est voisine de celle de la ténosynovite de de Quervain mais elle est proximale à trois travers de doigt de la styloïde radiale.

À l’examen, on perçoit une crépitation et il est possible que l’« aï crépitant » de Tillaux corresponde à cette tendinite.

Due à une ténosynovite pour certains, elle le serait, pour d’autres, à une bursite située entre les tendons des radiaux et le long abducteur du pouce d’où la dénomination de syndrome du « croisement ».

Elle guérit en général sous l’effet du seul traitement médical.

6- Ténosynovite des cubitaux :

Elle se traduit par un comblement de la dépression normalement visible sur le bord cubital du poignet et par une tuméfaction de la région radiocubitale inférieure qui contribue à majorer la saillie de la tête cubitale.

Dans notre expérience, elle a toujours été associée à la PR, mais elle a été décrite chez des sportifs après des microtraumatismes répétés en supination, flexion palmaire et inclinaison cubitale du poignet pour le tendon cubital postérieur.

Il y a un risque de rupture de la cloison interne du sixième compartiment dorsal avec luxation antérieure du tendon extenseur ulnaire du carpe et instabilité dorsale de la tête cubitale.

7- Doigt à ressaut ou ténosynovite digitale sténosante :

La forme de l’adulte touche surtout la femme vers la cinquantaine et elle prédomine sur le pouce, le médius et l’annulaire atteignant parfois plusieurs doigts simultanément ou successivement.

Ses signes sont bien connus : au début, simple gêne à la mobilisation rapide du doigt, puis ressaut le plus souvent douloureux, ressenti le matin, que le malade situe en regard de l’interphalangienne proximale ; l’extension du doigt n’est parfois possible que de façon passive.

Dans les formes évoluées, un doigt peut rester bloqué en flexion ou en extension (simulant une rupture tendineuse au niveau du pouce). Un nodule, mobile avec le tendon, est palpé à la partie distale de la paume en regard des têtes métacarpiennes.

Ce tableau se distingue facilement des rares ressauts articulaires qui siègent à la métacarpophalangienne mais plus difficilement du ressaut dû à une plaie partielle du fléchisseur qui peut siéger à tous les niveaux du canal digital, ce qui nécessite de rechercher une cicatrice cutanée pour le localiser.

Les infiltrations locales de corticoïdes sont efficaces dans 80 % des cas.

Sa pathogénie est en revanche mal connue : tendinite nodulaire ou ténosynovite sténosante ou sténose rétractile de la poulie A1.

La pathogénie ne repose actuellement que sur des spéculations déduites de l’anatomie et de la physiologie des tendons fléchisseurs à la main.

Citons deux formes particulières : celle associée à la rhizarthrose opérée ou non et celle associée au syndrome du canal carpien opéré car la section du ligament annulaire antérieur du carpe supprime la première poulie de réflexion des tendons fléchisseurs à la main, ce qui peut augmenter les contraintes au niveau des poulies digitales.

La forme de l’enfant est due à une anomalie congénitale, située au pouce en règle, qui consiste en un épaississement ovalaire du tendon long fléchisseur alors que la gaine fibreuse, de calibre normal, reste inextensible.

Elle se traduit par une flexion de l’interphalangienne du pouce et un nodule palpable sur la face palmaire de la métacarpophalangienne du pouce.

B – Cheville-pied :

1- Ténosynovite du tibial postérieur :

Les signes sont une douleur rétro- et sous-malléolaire interne et des paresthésies du pied traduisant un syndrome du tunnel tarsien.

À l’examen, on retrouve une tuméfaction allongée en « boudin » sous- et rétromalléolaire interne ou une crépitation à la mobilisation du tendon en cas de ténosynovite sèche.

Il existe un valgus de l’arrière-pied avec déficit du verrouillage du talon lors de l’élévation sur la pointe du pied en station unipodale. Une abduction progressive de l’avant-pied est traduite par le signe du « trop-plein d’orteils ».

Le diagnostic différentiel est parfois difficile.

La radiologie standard est utile pour objectiver les troubles de la statique du pied.

L’échographie montre l’épaississement hypoéchogène de la gaine contrastant avec l’hyperéchogénicité du tendon quand celui-ci est intact.

Le scanner objective bien les lésions de voisinage et l’épanchement de la gaine difficile à distinguer du tendon si celui-ci est atteint.

Lorsqu’il est sain, le tendon est hyperdense.

Combiné à la ténographie, il montre parfaitement le tendon sous forme d’une image en cible au sein de la gaine élargie.

L’IRM montre l’épaississement du tendon, de signal normal ou en hypersignal central T1 et T2 en cas de microrupture, entouré ou non d’un épanchement au sein d’une gaine distendue mais bien limitée dans la forme exsudative ou épaissie, et aux parois irrégulières dans la forme sténosante.

L’utilisation de la séquence T1- gadolinium, surtout en saturation de graisse, permet de dépister les composantes inflammatoires par fixation du gadolinium sur les tissus richement vascularisés.

Le traitement est d’abord étiologique.

Dans la forme dégénérative, il repose sur la mise au repos, la prescription de semelles orthopédiques, les infiltrations de corticoïdes ou les anti-inflammatoires non stéroïdiens par voie générale.

Dans la forme sténosante rebelle, la chirurgie peut être indiquée.

2- Ténosynovite du long fléchisseur de l’hallux :

Située à la réflexion du tendon sur le bord postérieur de l’astragale, elle concerne surtout le danseur.

Elle se traduit par une douleur du carrefour postérieur, augmentée par la palpation en arrière de l’astragale et la flexionextension de la métatarsophalangienne du gros orteil.

La palpation peut percevoir la pseudofluctuation de la cheville et la tension de la gaine en souset rétromalléolaire interne.

La station sur la pointe est souvent impossible et la flexion plantaire sur le pied en charge est toujours douloureuse.

La radiographie standard et, mieux, le scanner permettent d’apprécier les éléments osseux du carrefour postérieur susceptibles de favoriser la ténosynovite et de faire le diagnostic différentiel.

L’échographie est moins performante à cause de la situation anatomique de ce tendon.

L’IRM permet de distinguer la ténosynovite exsudative ou sténosante, la fissuration ou la rupture du tendon et de distinguer une vraie ténosynovite d’un épanchement dans la gaine lié à un épanchement dans la cheville en raison de la communication physiologique présente dans 20 % des cas entre les deux compartiments.

3- Ténosynovite du long fléchisseur des orteils :

Elle est rare et principalement liée à la PR.

4- Ténosynovite des muscles fibulaires :

La douleur spontanée siège au-dessous et en arrière de la malléole externe.

La douleur provoquée est obtenue par la résistance à l’éversion du pied en flexion plantaire.

Pour le court fibulaire, il faut appliquer la résistance sur le bord externe du pied et pour le long fibulaire sur la surface plantaire de la première tête métatarsienne.

En cas de ténosynovite exsudative, on peut palper une « saucisse » molle curviligne entourant la malléole externe.

Elle est parfois bifide à son extrémité.

Dans ce cas, l’échographie visualise facilement l’épanchement anéchogène et le tendon flottant au sein de la gaine distendue.

Dans la forme sténosante, l’échographie objective l’épaississement de la gaine synoviale bien visible sur les coupes transversales sous forme d’une couronne hypoéchogène autour d’un tendon qui reste hyperéchogène.

Au scanner, le tendon inflammatoire apparaît épaissi, parfois hypodense, mais reste continu et homogène.

Le tendon dégénératif apparaît épaissi et plutôt hyperdense.

Dans la ténosynovite exsudative, la gaine tendineuse apparaît augmentée de volume, hypodense, mal différenciée de l’hypodensité tendineuse, d’autant plus qu’il existe une atteinte du tendon lui-même.

Dans la ténosynovite sténosante, la gaine apparaît épaissie et il n’est généralement pas possible d’individualiser le tendon.

L’hypertrophie du tubercule des péroniers est souvent associée.

En IRM, l’aspect morphologique des anomalies est superposable à celui décrit au scanner.

En revanche, l’excellente résolution en densité de l’IRM permet de mieux différencier les composants liquidiens et les composants tissulaires, qu’ils soient sains, inflammatoires ou cicatriciels.

On recherche donc des anomalies de signal intratendineux.

On peut aussi rechercher une atteinte de la graisse adjacente et des tissus sous-cutanés qui présentent un hyposignal en T1 et un hypersignal en T2, mieux visible sur les séquences fat-sat.

5- Ténosynovite du tibial antérieur :

Le tibial antérieur est le plus fort fléchisseur dorsal du pied mais aussi adducteur et supinateur.

La douleur spontanée siège à la partie interne de la face antérieure de la cheville ou au bord interne du pied. Un défaut de fuite du pied peut être ressenti à la montée des escaliers et les chaussures à tige haute sont mal tolérées.

La douleur provoquée est obtenue par l’étirement passif du tendon en flexion plantaire et abduction du pied, et surtout par la contraction contre résistance en flexion dorsale du pied et en neutralisant les tendons extenseurs grâce à une flexion plantaire active ou, à défaut, passive des orteils.

Le tendon est alors bien visible et palpable sous la peau.

Il peut être épaissi simplement ou être le siège d’une tuméfaction avec épanchement en « sablier » ou polylobée en cas de ténosynovite exsudative.

Il peut être rompu et l’on perçoit une brèche sur le trajet tendineux.

La ténosynovite sténosante donne le signe du « aï crépitant » perceptible et audible à la mobilisation de la cheville ainsi qu’une tuméfaction locale mobile avec le tendon dont elle est indissociable.

Le diagnostic est essentiellement clinique.

Il peut être confirmé par l’échographie mais l’IRM, qui permet le mieux d’en faire le bilan, ne sera faite que si on envisage un geste chirurgical.

Cette ténosynovite est rare, y compris dans le cadre de la PR.

6- Long extenseur de l’hallux et des orteils :

Les ténosynovites sont rares.

Elles se traduisent par un gonflement douloureux du dos du pied.

Quelques cas de ténosynovite exsudative du long extenseur des orteils ont été décrits, secondaires le plus souvent à un conflit direct avec la chaussure chez les footballeurs professionnels.

Le scanner et surtout l’IRM retrouvent une distension de la gaine tendineuse au sein de laquelle sont visibles les quatre ramifications des tendons extenseurs.

Lésions tumorales des gaines :

A – Bénignes :

1- Synovite villonodulaire :

Appelée ainsi par Jaffe qui l’a décrite avec précision en 1941, elle s’observe à tout âge, chez la femme dans 65 % des cas avec une fréquence de 2 à 9 par million d’habitants.

Elle siège principalement sur les gaines des fléchisseurs des doigts et des extenseurs au poignet.

Elle se traduit par une tumeur ferme, arrondie ou polycyclique, mobile sous la peau et en général indolente, de la face palmaire de la main ou de la face dorsale du poignet.

Elle est isolée et elle est rarement responsable d’un syndrome du canal carpien.

La radiographie montre une densification des parties molles et parfois une réaction osseuse de voisinage.

L’échographie objective parfois l’hétérogénéité de la lésion.

Le scanner précise la densité des parties molles et les éventuelles lésions osseuses.

L’IRM montre un hyposignal en T1 en cas de présence d’hémosidérine et un hypersignal en cas de présence de xanthomatose. Le traitement est purement chirurgical.

L’exérèse doit être complète d’emblée car si on se contente d’une biopsie, on risque une récidive.

2- Fibromes des gaines tendineuses :

Survenant à l’âge de 30 à 50 ans, les fibromes des gaines tendineuses siègent essentiellement aux doigts et aux poignets.

La symptomatologie s’installe insidieusement et se limite à l’existence d’une masse indolore le long du trajet d’un tendon, mesurant 1 à 2 cm.

L’examen histologique retrouve un tissu fibreux. Des récidives restent possibles là aussi après exérèse dans près d’un quart des cas.

B – Malignes :

Elles se traduisent par une masse unique, sensible dans 50 % des cas, en général fixée aux plans profonds et susceptible de se révéler par des signes de compression des éléments voisins.

Des adénopathies sont observées dans 25 % des cas car la lenteur de la croissance tumorale explique que le diagnostic soit souvent tardif.

La radiographie standard montre, dans 30 % des cas, un semis de calcifications évocatrices d’un synovialosarcome qui est la tumeur la plus fréquente.

L’imagerie moderne facilite le diagnostic précoce et principalement l’IRM qui permet, en outre, de préciser l’extension.

Le diagnostic positif et différentiel du synovialosarcome est facilité par l’avènement de deux techniques : l’immunohistochimie et la cytogénétique qui permettent d’affirmer le diagnostic dans les formes monophasiques à cellules fusiformes et d’individualiser les synovialosarcomes des tumeurs apparentées.

Le pronostic dépend beaucoup de la nature de la tumeur maligne.

Il reste sombre malgré une chirurgie d’exérèse large, guidée par l’IRM, et complétée par la radiothérapie le plus souvent et parfois par la chimiothérapie.

Toutefois, il s’est amélioré au cours des 30 dernières années.

Étiologie des atteintes des gaines synoviales :

A – Ténosynovites sténosantes :

Celles des gaines sont la conséquence d’une sténose progressive de la gaine des tendons.

Elles se rencontrent fréquemment chez des patients adultes, ayant pratiqué des mouvements répétitifs dans le cadre de leurs activités professionnelles, des travaux ménagers ou des loisirs.

Parmi les sièges les plus fréquents, on trouve la sténose de la gaine des tendons du long abducteur et du court extenseur du pouce au niveau de l’apophyse styloïde radiale (ténosynovite de de Quervain), des gaines des tendons fléchisseurs en regard de l’articulation métacarpophalangienne (doigt à ressaut), de la gaine du tendon du long extenseur du pouce, de la gaine du tendon du fléchisseur radial du carpe, et plus rarement au niveau des gaines synoviales des membres inférieurs (ténosynovite sténosante des muscles fibulaires, ténosynovite sténosante du tibial antérieur).

B – Ténosynovites d’origine infectieuse :

1- Germe banal :

Les infections à germe banal peuvent atteindre les gaines synoviales.

Tous les sièges sont possibles mais l’atteinte des gaines synoviales des fléchisseurs des doigts est la plus fréquente.

Elles surviennent habituellement chez des sujets actifs, non immunodéprimés, au décours d’une plaie ou d’une griffure de la main.

Les germes les plus fréquemment retrouvés sont, par ordre décroissant, le staphylocoque doré, le streptocoque â-hémolytique, les germes à Gram négatif, les pasteurelles.

Néanmoins, de très nombreux germes peuvent être en cause et des observations ponctuelles d’infections à germes rares tels que Yersinia ou Haemophilus ont été rapportées.

Ces ténosynovites débutent habituellement brutalement et entraînent une douleur qui siège sur tout le trajet de la gaine synoviale.

Il existe le plus souvent un aspect inflammatoire et la douleur est très intense lors de la mise en tension du tendon ou de la palpation.

Le tableau clinique a débuté rapidement et est très parlant.

Si la notion de plaie pénétrante n’est pas retrouvée, on note habituellement une infection de voisinage, une intervention chirurgicale récente de voisinage, ou alors un contexte septicémique.

Une adénopathie peut être observée.

Les infections à gonocoques sont actuellement plus rares mais doivent aussi être évoquées.

En ce cas, l’origine est hématogène dans le cadre d’infections gonococciques disséminées.

Les gaines des tendons les plus touchées sont celles des mains, des poignets, et plus rarement des chevilles.

De la même façon, il a été décrit des ténosynovites méningococciques d’origine hématogène, le plus souvent associées à des lésions cutanées.

La confirmation du diagnostic peut être apportée par une ponction de la gaine, par les hémocultures, ou par la mise en culture lors d’une intervention chirurgicale à visée thérapeutique.

Dans le cas des infections gonococciques, il peut être utile de faire des prélèvements d’autres sièges (urétral, vaginal, rectal).

Malgré l’examen direct et la mise en culture, aucun germe n’est trouvé dans près d’un tiers des cas.

2- Infections à mycobactéries :

* Ténosynovite tuberculeuse :

Quoique rare, la tuberculose est loin d’être exceptionnelle et ce diagnostic doit être évoqué devant une ténosynovite inexpliquée.

L’origine par inoculation directe ou par dissémination de foyers à distance est actuellement discutée.

Le terrain sur lequel surviennent ces ténosynovites est le même que celui des tuberculoses d’autres sièges.

Les ténosynovites peuvent apparaître chez des patients déjà en cours de traitement ou être révélatrices de la maladie.

Elles touchent plus volontiers les poignets, mais peuvent aussi atteindre les chevilles.

Le tableau est habituellement insidieux et la ténosynovite peu inflammatoire.

L’intradermoréaction à la tuberculine ne peut avoir qu’une valeur d’orientation et c’est le plus souvent la biopsie qui apporte le diagnostic.

L’examen anatomopathologique permet en effet d’observer des granulomes avec une nécrose caséeuse, ce qui ne suffit pas au diagnostic.

En revanche, si l’examen direct de la pièce ne permet que rarement d’isoler des bacilles acido-alcoolo-résistants à l’examen direct, la mise en culture apporte le diagnostic de confirmation.

* Mycobactérie atypique :

Les gaines synoviales font partie des sièges de prédilection des infections à mycobactéries atypiques, le plus souvent à la suite d’une inoculation accidentelle à la main ou au poignet.

Quel que soit le germe en cause, la présentation clinique est en général proche de celle des ténosynovites tuberculeuses avec un début souvent insidieux et un tableau inflammatoire qui reste peu intense.

Dans tous les cas, le diagnostic peut être orienté par l’examen anatomopathologique qui met en évidence un granulome proche de celui qu’on observe dans la tuberculose mais c’est l’examen direct et plus encore la mise en culture sur milieu de Löwenstein qui permettront d’affirmer le diagnostic et d’obtenir un antibiogramme.

Quelques particularités sont propres à chacune de ces mycobactéries :

– Mycobacterium marinum peut entraîner une ténosynovite à la suite d’une plaie dans un environnement aquatique (piscine, lac, océan, aquarium) ;

– Mycobacterium avium est plus souvent à l’origine de ténosynovites chez des patients immunodéprimés, notamment dans le cas du syndrome d’immunodéficience acquise.

Les atteintes prédominent aux poignets ou aux doigts sans que l’on trouve de porte d’entrée dans de nombreux cas ;

– d’autres mycobactéries ont été trouvées dans des observations isolées.

La présentation était proche de celle des précédentes mycobactéries citées.

Il s’agit de Mycobacterium szulgai, Mycobacterium terrae, Mycobacterium xenopi, Mycobacterium chelonei, Mycobacterium kansasii et Mycobacterium fortuitum.

* Ténosynovites mycotiques :

+ Sporotrichose :

Rares, les infections à Sporothrix schenckii sont surtout transmises par les piqûres d’épine et touchent plus volontiers des patients immunodéprimés.

L’examen anatomopathologique met en évidence une synovite granulomateuse et c’est le plus souvent la culture de liquide et/ou de tissu qui permet de porter le diagnostic.

La négativité de la culture ne doit pas faire rejeter ce diagnostic.

Il est souvent souhaitable de répéter les examens lorsque le doute persiste.

+ Candida albicans :

Des synovites à Candida albicans ont aussi été observées chez des sujets immunodéprimés, réalisant là aussi l’aspect d’une synovite granulomateuse.

+ Autres :

D’autres germes ont exceptionnellement été isolés à l’origine de ténosynovite : Histoplasma capsulatum, Prototheca, Exophiala mansonii.

Le diagnostic n’est là encore porté qu’après culture sur milieu de Sabouraud.

* Ténosynovites parasitaires :

Deux cas de ténosynovites des poignets ou des chevilles à Toxoplasma gondii ont été décrits.

Le diagnostic est porté grâce à l’examen histologique qui met en évidence les parasites au sein des cellules synoviales.

C – Ténosynovites des rhumatismes inflammatoires :

1- Polyarthrite rhumatoïde :

Les ténosynovites des mains, des poignets et des chevilles sont très fréquentes au cours de la PR. Cette atteinte peut aussi être un mode d’entrée dans la maladie.

L’atteinte des gaines est initialement limitée à un épaississement de la synoviale du tendon mais progressivement apparaissent des lésions granulomateuses qui s’étendent dans le tendon avec une rupture de certaines fibres, si bien qu’une rupture tendineuse peut être observée.

En pratique, nous voyons encore régulièrement des patients consulter à ce stade alors qu’un traitement prophylactique aurait pu l’éviter.

Néanmoins, la synovite n’est pas seule responsable dans ces ruptures qui sont souvent aussi favorisées par usure du tendon lors de son frottement sur une surface osseuse.

Cette double étiologie généralement associée explique la difficulté de réparation au stade de rupture du fait de la dilacération tendineuse avec une perte de substance sur plusieurs centimètres.

2- Lupus érythémateux disséminé :

Des ténosynovites sont aussi observées au cours du lupus, plus rarement, mais on peut observer au cours de cette affection des ruptures des extenseurs des doigts, ou des tendons d’Achille.

3- Spondylarthropathies séronégatives :

Elles regroupent la spondylarthrite ankylosante, les arthrites réactionnelles, certains rhumatismes psoriasiques, certaines entérocolopathies, le SAPHO (synovite, acné, pustulose, hyperostose par ostéite).

Il existe classiquement des enthésopathies d’insertion, c’est-à-dire une inflammation de la zone d’insertion des tendons, au cours des spondylarthropathies, mais on peut aussi observer une inflammation des gaines synoviales.

4- Maladie de Still :

Deux observations exceptionnelles d’affections des gaines synoviales ont été observées au cours de la maladie de Still.

5- Pseudopolyarthrite rhizomélique :

Des ténosynovites peuvent rarement être observées au cours des pseudopolyarthrites rhizoméliques (3 % des cas pour Salvarani et al).

6- Rhumatismes microcristallins :

* Goutte :

Une accumulation de cristaux d’urate de sodium peut être observée dans les gaines synoviales et les tendons.

Les atteintes siègent préférentiellement aux mains et aux poignets mais peuvent aussi toucher la région achilléenne.

Les atteintes surviennent habituellement chez des goutteux connus.

Au poignet, les poussées peuvent s’accompagner de syndrome du canal carpien.

Il existe un risque de rupture tendineuse lorsque la symptomatologie persiste.

* Chondrocalcinose :

Elle est caractérisée par un dépôt de cristaux de pyrophosphate de calcium qui intéresse préférentiellement les cartilages d’encroûtement et les fibrocartilages.

La gaine synoviale peut aussi être le siège d’un dépôt, notamment aux tendons fléchisseurs des doigts.

* Hydroxyapatite :

Des dépôts d’hydroxyapatite ont exceptionnellement été observés dans les gaines synoviales.

D – Ténosynovites à corps étranger :

La pénétration, puis la persistance d’un corps étranger dans la gaine peut engendrer une ténosynovite chronique par réaction à corps étranger.

On l’observe volontiers avec des épines de rosiers, des épines d’oursin, essentiellement aux mains.

La symptomatologie est habituellement chronique et survient chez un sujet en bonne santé. Une surinfection peut toujours survenir.

L’examen anatomopathologique met en évidence habituellement un granulome sans nécrose caséeuse par réaction à corps étranger.

Ce dernier peut être décelé lors de l’examen anatomopathologique alors qu’il est le plus souvent invisible sur les examens complémentaires lorsqu’il est de petite taille et non métallique.

E – Tumeurs synoviales :

La synovite villonodulaire et la tumeur à cellules géantes, très proches, sont des tumeurs bénignes caractérisées par la présence de cellules géantes, de dépôts d’hémosidérine, de cellules spumeuses et d’infiltrats d’histiocytes.

L’atteinte est souvent localisée et touche plus volontiers les gaines des mains mais parfois aussi des pieds.

L’examen histologique affirme le diagnostic.

Sur le plan macroscopique, les aspects sont variables selon la prédominance de l’un ou l’autre type : formes circonscrites, nodulaires, ou diffuses avec de nombreuses villosités.

Sur le plan microscopique, il y a un important granulome avec constance des cellules géantes plurinucléées et un stroma plus ou moins dense de cellules fibreuses.

Il n’y a pas de signe de malignité. D’autres tumeurs bénignes peuvent être reconnues par l’histologie : chondrome, lipomes, fibromes, hémangiomes.

Les tumeurs malignes ont été évoquées.

F – Autres causes :

D’autres étiologies peuvent exceptionnellement être à l’origine d’affections des gaines synoviales et l’on peut citer essentiellement l’hémochromatose, l’amylose des insuffisants rénaux hémodialysés chroniques et du myélome multiple, la sarcoïdose.

Le diagnostic est habituellement aidé par le contexte et la notion d’atteinte extrasynoviale.

Traitement des affections des gaines synoviales :

Le traitement dépend de l’étiologie de la ténosynovite.

Lorsqu’il s’agit d’une ténosynovite d’origine mécanique, le traitement repose essentiellement sur l’arrêt d’une activité manuelle ou sportive durant 2 à 6 semaines avec une immobilisation relative.

Pour hâter la guérison, on peut éventuellement proposer des moyens physiques (ultrasons, utilisation du froid par glaçage dans les ténosynovites aiguës et par la chaleur dans les formes plus chroniques) mais ce sont surtout les AINS, et plus encore, la réalisation d’une infiltration de corticostéroïdes, qui permettent d’obtenir une action spectaculaire rapidement.

Dans les rhumatismes inflammatoires primitifs et les rhumatismes microcristallins, ce sont surtout les anti-inflammatoires et les infiltrations locales qui seront préconisés mais en cas de complication aiguë grave (compression neurologique essentiellement), ou surtout de persistance malgré ce traitement médical bien conduit, une intervention chirurgicale peut être proposée. Dans les formes chroniques, cette dernière a surtout pour but d’éviter les ruptures tendineuses.

Au cours des ténosynovites infectieuses, il est indispensable de faire des prélèvements pour isoler le germe en cause mais l’antibiothérapie ne suffit pas au traitement, qui doit être chirurgical, dans la grande majorité des cas si l’antibiothérapie n’a pas pu être débutée dans les premières heures d’évolution.

Lorsqu’il n’existe qu’une hyperémie de la gaine, on peut se contenter d’une excision de la porte d’entrée que l’on laissera guérir par cicatrisation dirigée et d’une contre-excision pour lavage.

Au stade suivant, avec un aspect congestif de la séreuse et un épanchement purulent sur un tendon sain, l’excision de la porte d’entrée sera plus large avec, là encore, une contre-excision pour lavage, remplacée par une synovectomie si la synoviale est d’allure pathologique.Au stade ultérieur de nécrose tendineuse, l’excision sera large et le pronostic est alors défavorable.

L’indication chirurgicale est beaucoup plus discutée lorsqu’il s’agit d’une synovite gonococcique ou même méningococcique puisque les antibiotiques peuvent alors suffire si l’antibiothérapie est débutée rapidement.

Les ténosynovites infectieuses à mycobactérie et mycosiques doivent habituellement bénéficier d’un geste chirurgical à visée diagnostique et thérapeutique, la synovectomie permettant d’obtenir à la fois le diagnostic et une grande part du traitement.

On complétera le geste d’une antibiothérapie adaptée à l’antibiogramme, en sachant cependant que ce dernier n’est pas toujours le parfait reflet des résultats obtenus in vivo pour ces germes.

Les synovites à corps étranger et les tumeurs synoviales ne peuvent être traitées que chirurgicalement par synovectomie.

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