Chirurgie des traumatismes faciaux
(Suite) Cours de Chirurgie
* Fracture du condyle
:
Quel qu’en soit le type, la fracture du condyle peut être uni- ou bilatérale,
associée à d’autres fractures de la mandibule ou à d’autres fractures
faciales.
Cela modifie l’attitude thérapeutique.
Cette attitude peut être
aussi influencée pour chacun des types de fracture par le déplacement
du fragment condylien qui peut :
– ne pas être déplacé ;
– être dévié s’il présente une angulation par rapport au fragment distal
sans le chevaucher.
Cette angulation peut être mesurée, elle est
considérée comme importante au-delà de 30° ;
– être déplacé s’il y a chevauchement des fragments.
Au-delà de 5 mm,
le chevauchement est considéré comme important ;
– être séparé complètement d’autres fragments ;
– le fragment proximal peut être luxé, le plus souvent en antéro-interne
dans la cavité glénoïde.
L’usage est de privilégier les traitements conservateurs et fonctionnels,
et, dans la mesure du possible, d’éviter les voies sanglantes.
Mais il faut
reconnaître avec Lambert que l’attitude thérapeutique face aux
fractures du condyle mandibulaire est encore incertaine et qu’il y a des
partisans du traitement fonctionnel et des partisans de la chirurgie.
Le but du traitement conservateur est de permettre une bonne fonction
sans réduction anatomique parfaite des fragments grâce à une
mobilisation rapide.
Le traitement chirurgical cherche au contraire à
restaurer une position anatomique aussi parfaite que possible.
Les
partisans de la chirurgie évoquent les syndromes algodysfonctionnels de
l’appareil mandicateur (SADAM) postopératoires, non retrouvés dans
l’étude rétrospective à long terme de Pecheur.
Ils évoquent aussi la
rapidité de mobilisation peropératoire, l’absence ou la réduction du
BIM, son intérêt dans les fractures complexes ou associées.
Les
partisans du traitement fonctionnel évoquent les difficultés de la
chirurgie : risque facial, risque de dévascularisation de la tête
condylienne, ouverture de l’articulation temporomandibulaire (ATM) et
risque discal, nécessité malgré tout d’une rééducation, caractère souvent
imparfait de la réduction qui s’avère toujours difficile.
Le traitement fonctionnel conservateur débute soit d’emblée, si
l’occlusion est bonne et la fracture pas ou peu déplacée, soit après un
blocage de 5 à 8 jours avec arcs et élastiques, qui aboutit à un
repositionnement du corps de la mandibule en occlusion.
Ce BIM a en
outre un effet antalgique et myorelaxant.
La mobilisation débute après
ce temps de blocage.
Il s’agit d’une mécanothérapie active et passive.
Les séances sont quotidiennes ou biquotidiennes pendant 2 à 3 mois et
durent 30 à 40 minutes.
Elles débutent par des massages avec application
de chaleur humide (compresses) et sèche (infrarouges) qui diminuent la
douleur et la contracture.
On effectue ensuite une mécanothérapie
passive par cale et ouvre-bouche sans aller jusqu’à la douleur.
On fait
effectuer ensuite une mobilisation active en utilisant la ventilation
abdominale pour obtenir une décoaptation articulaire : protraction,
diduction, ouverture/fermeture rectilignes, proglissement et diduction
du côté opposé à la fracture, en série de 10 à 20 en maintenant chaque
contraction 10 secondes.
Une mobilisation active contrariée termine la
séance.
L’idéal est de faire réaliser cette thérapeutique par un
kinésithérapeute maxillofacial.
Delaire a proposé un traitement
fonctionnel débuté immédiatement après la fracture, qui se fait après
mise en place d’arcs aux deux maxillaires.
Des élastiques sont mis
horizontalement entre les canines supérieures et les molaires inférieures
et entraînent un proglissement dirigé du côté sain en cas de fracture
unilatérale.
Par ailleurs, les exercices de mécanothérapie sont effectués
de la même manière.
Une plaque de libération occlusale maxillaire est
portée ensuite pendant plusieurs semaines, jour et nuit.
En cas de
fracture bilatérale, le proglissement obtenu par traction élastique et
mécanothérapie active est rectiligne.
On aboutit ainsi à un remodelage
et à une bonne fonction condylienne, avec une modification des schémas
de travail musculaire.
Pendant la durée du traitement, l’alimentation sera semi-liquide et sans appui molaire.
Dans les fractures condyliennes bilatérales, le blocage intermaxillaire
initial est plus long que dans les unilatérales, soit 3 à 4 semaines.
Le
traitement fonctionnel débute ensuite par des protractions médianes.
Le
blocage peut, en cas de déplacement important, être effectué sur des
cales de désocclusion molaire.
Le traitement chirurgical est toujours techniquement difficile.
Les voies
d’abord sont préauriculaire ou sous-mandibulaire.
La voie endobuccale offre un accès très étroit, et semble réservée aux fractures
sous-condyliennes basses et à certaines techniques de vissage.
On
peut aussi utiliser la voie rétromandibulaire.
La réduction du petit
fragment condylien est difficile, surtout s’il est luxé en position interne
et il faut alors tracter le grand fragment vers le bas pour le décoapter, et
quelquefois désinsérer le muscle ptérygoïdien latéral.
Cette réduction
nécessite l’utilisation d’une pince préhensile mais elle reste toujours
difficile, ainsi que le maintien du fragment en bonne position pendant
les manoeuvres d’ostéosynthèse.
Inutile pour certains, le BIM est pour
d’autres indispensable une fois l’ostéosynthèse faite.
Il empêche la
traction du grand fragment vers le bas si on le fait auparavant.
Certains
auteurs le maintiennent pendant une période qui va de 5 jours pour
Franc à 2 semaines.
La durée du blocage est en fait fonction de la
rigidité et de la solidité de la contention.
Néanmoins, il ne dispense pas
d’une rééducation fonctionnelle postopératoire.
L’ostéosynthèse est
réalisée à l’aide de plaques vissées, miniplaques plutôt que
microplaques, fixées par des vis mono- ou bicorticales.
Le fil d’acier est
insuffisant pour une ostéosynthèse rigide et stable.Wilk propose une
ostéosynthèse des fractures sous-condyliennes hautes et basses par une
plaque rectangulaire tridimensionnelle renforcée et cintrée, mise par
voie sous-angulomandibulaire avec de meilleurs résultats dans les
fractures basses.
Le développement des techniques d’ostéosynthèse
traduit bien les difficultés techniques rencontrées. Mikkonen propose un accès à l’ATM par un abord sous-mandibulaire
et une ostéotomie sous-condylienne allant de l’échancrure sigmoïde à la
base du ramus.
Le fragment porteur de tout le condyle fracturé que l’on
libère des insertions du ptérygoïdien latéral est sorti.
L’élément fracturé est alors solidarisé au reste du condyle ostéotomisé qui est remis en
place.
Sur les neuf patients opérés, aucun n’a eu de résorption ou de
nécrose de la tête.
Les indications du traitement conservateur sont larges : chez l’enfant et
l’adolescent toujours, et chez l’adulte il a la préférence de la plupart des
auteurs, surtout en cas de fracture unilatérale peu ou pas déplacée.
Les indications des abords chirurgicaux sont mal codifiées.
Pour Gola et
Chossegros, la chirurgie se justifie dans deux cas : les fractures souscondyliennes
basses déplacées avec chevauchement et les fractures
luxations sous-condyliennes hautes (cervicales) avec bascule médiale à
90° de la tête.
Pour eux aussi, le traitement fonctionnel est l’indication
large.
Lambert retrouve dans la littérature des indications absolues
ou relatives :
– fracture avec luxation de la tête en dehors ;
– fracture sous-condylienne chez l’adulte avec déplacement majeur ou
luxation de la tête condylienne ;
– fracture bilatérale avec luxation condylienne ou grand déplacement ;
– fracture bilatérale avec fracture comminutive du tiers moyen de la
face qui empêche un repositionnement occlusal correct ;
– fracture bilatérale chez l’édenté (indication relative) ;
– luxation crâniale du fragment fracturé ;
– fracture luxation avec pénétration de corps étrangers ;
– chez certains patients où le traitement fonctionnel est impossible :
handicapé mental, toxicomane, polytraumatisé.
Pour Eckelt, les indications sont :
– les fractures avec chevauchement et contraction entraînant un
raccourcissement de 5 mm et plus ;
– les fractures avec déplacement axial de la tête de plus de 30° ;
– les fractures avec séparation des deux fragments (luxation).
3- Fracture du maxillaire supérieur et disjonction craniofaciale
:
La réduction est assurée par mobilisation au davier de Rowe et Killey ou
à l’aide de deux sondes passées dans les fosses nasales et sorties par la
bouche.
Les deux fragments du forceps sont mis dans chaque fosse nasale et dans
la cavité buccale, mais il n’est pas toujours possible de les solidariser.
La traction se fait verticalement pendant que l’aide maintient fermement
la tête en position.
Le chirurgien se tient coudes au corps et maintient
solidement les deux branches du davier en tirant progressivement et en
donnant de petits mouvements à droite et à gauche pour désengrener.
On
peut aussi utiliser les mobilisateurs de Tessier en prenant appui sur une
ou deux tubérosités du maxillaire.
* Le Fort I
:
Dans les fractures de type Le Fort I, une fois les arcs posés, la réduction
est effectuée et elle est maintenue par le blocage intermaxillaire.
Les
ostéosynthèses sont ensuite réalisées.
On utilise des miniplaques de
formes différentes, le plus souvent en L, modelées à la forme et fixées
sur les piliers canins et consolaires.
En cas de disjonction médiane, un fil
d’acier près de l’épine nasale ou quelquefois un fil ou plaque
d’ostéosynthèse palatine sont mis en place.
La plaque peut être perçue
sous la fibromuqueuse et le décollement palatin doit toujours être réduit
pour préserver la vascularisation des fragments antérieurs.
L’utilisation des plaques d’ostéosynthèse a réduit le BIM à quelques
jours et, pour certains, il est même totalement supprimé.
Si on ne dispose
pas de plaques, les ostéosynthèses peuvent être faites au fil d’acier associé à des suspensions (périzygomatiques, nasales, infraorbitaires).
Le BIM est alors laissé en place 3 à 4 semaines.
* Le Fort II et III, fractures complexes
:
Dans les disjonctions hautes, de type
Le Fort II ou III et les fractures
complexes, on associera au BIM les divers procédés de réparation des
fractures orbitofaciales et naso-ethmoïdo-orbitaires éventuellement
associées.
Les suspensions hautes frontonasales ou fronto-orbitaires ne
sont plus que rarement utilisées au profit des plaques.
En plus des
ostéosynthèses sur les piliers canins et consolaires et par les voies
d’abord des fractures n’intéressant pas l’occlusion, on fixe des
ostéosynthèses par miniplaques sur les processus frontozygomatiques,
le ou les rebords infraorbitaires et l’épine nasale du frontal éventuellement.
Les fragments osseux plus minces sont fixés ensuite avec des
fils d’acier 3/10e ou des microplaques.
En cas de fracture complexe, une
fois le BIM effectué, on reconstruit de la périphérie vers le centre
(reconstruction centripète) et de haut en bas ou de bas en haut selon les
possibilités de rétablissement occlusal et la base de départ qui semble la
plus solide.
On reconstruit donc de proche en proche à partir du cadre
facial externe frontotemporozygomatique, en terminant par les
ostéosynthèses des zones cavitaires centrofaciales plus septiques. Les
hémosinus seront drainés.
Le BIM est pour certain levé rapidement si le
montage osseux est solide, sinon il est gardé de quelques jours à 1 mois
en fonction de la stabilité de l’ostéosynthèse, de la gravité et du nombre
des fractures.
* Mandibule fracturée
:
Il faut tenter de reconstruire la mandibule par ostéosynthèse pour obtenir
une occlusion de référence.
Le cas est particulièrement délicat en cas de
fracture bicondylienne associée à une autre fracture mandibulaire ou en
cas de fracture comminutive.
On peut alors ostéosynthéser la mandibule
(condyle, angle, symphyse) et utiliser une longue plaque pour les
fractures comminutives.
On reconstruit ensuite de bas en haut.
On peut
également reconstruire de haut en bas à partir des régions frontales et
zygomatiques et régler la mandibule en fin d’intervention.
* Greffes osseuses
:
Elles sont exceptionnellement effectuées en première intention, dans le
cadre de l’urgence, et surtout si le traumatisme a un caractère septique.
Des greffes osseuses sont utilisées s’il existe des pertes de substance
osseuse au niveau des piliers canins, consolaires, zygomatiques, au
niveau des parois orbitaires, en cas de défaut de projection malaire, ou
sur une zone de comminution fracturaire importante.
On utilisera de
préférence de la corticale externe de pariétal, mince mais peu malléable.
On peut aussi utiliser de l’os iliaque monocortical ou bicortical pour les
piliers et plus rarement de la côte divisée et modelée (malaire).
L’os
iliaque et la côte se résorbent plus avec le temps.
Les biomatériaux non
résorbables sont à éviter dans les reconstructions traumatologiques à
caractère septique, surtout dans les zones proches des cavités.
Fractures n’intéressant pas l’occlusion
:
A - Voie d’abord des fractures faciales
qui ne modifient pas l’articulé dentaire :
1- Voies orbitaires
:
Elles permettent d’explorer le cadre orbitaire et sa périphérie.
* Voies palpébrales inférieures
:
+ Voie conjonctivale ou transconjonctivale
:
L’incision est arciforme et se situe juste en avant du fornix dans le repli
conjonctival.
La paupière inférieure est tractée par deux crochets de Gillies, l’oeil protégé par un conformateur.
Le septum est traversé et la
dissection du rebord infraorbitaire se fait en préseptal, en arrière de
l’orbiculaire qui est respecté.
Elle permet d’inciser après un court trajet
le périoste.
Certains auteurs réalisent une dissection rétroseptale.
+ Voie sous-ciliaire
:
Elle se situe sur la paupière inférieure, 1 mm sous la ligne des cils, dans
la première ride.
Sa limite interne est en dehors de l’aplomb du point
lacrymal, alors qu’à l’extérieur, elle peut être prolongée sur 1 cmet plus
dans une ride de la « patte-d’oie ».
L’incision doit concerner la peau et
l’orbiculaire qui sont traversés en biais jusqu’au septum orbitaire qu’il
faut respecter puis suivre, sur un court trajet, jusqu’au rebord infraorbitaire où on incise le périoste.
On réalise donc un abord en trois
plans décalés.
+ Voie palpébrale moyenne
:
Elle est située 4 à 7mmau-dessous du bord ciliaire.
+ Voie palpébrale basse
:
La voie palpébrale basse ou inférieure est située dans le sillon palpébral
inférieur.
Assez masquée, elle peut être source de lymphoedème surtout
si elle est très prolongée en dehors.
Ces différentes voies orbitaires permettent l’abord du plancher du sac
lacrymal et celui de l’orbite jusqu’à la fente sphénomaxillaire qu’il faut
toujours respecter.
* Voies orbitaires externes
:
Ce sont les voies d’abord du processus frontal du malaire et de la paroi
externe de l’orbite.
Elles peuvent être horizontales, dessinées dans une
ride de la « patte-d’oie » entre le canthus externe et le sourcil et ne
doivent pas dépasser 1,5 cm pour préserver le rameau frontal du facial.
Elles peuvent être aussi obliques, dite de la « queue du sourcil », ou en S,
et autorisent alors un abord plus large facilitant la mise en place de miniplaques au niveau de la suture frontomalaire.
* Voies paranasales
:
Elles permettent d’explorer le canthus interne, la paroi interne de l’orbite
et les voies lacrymales.
La voie paracanthale interne, verticale,
légèrement arciforme est la plus utilisée.
Elle est située à mi-distance
entre l’arête nasale et le canthus interne, à la limite entre la peau de la
paupière et la peau du nez.
Elle évite ainsi les cicatrices rétractiles.
Certains pensent l’améliorer en faisant unW.
L’incision faite après une
infiltration concerne tous les plans jusqu’au périoste, détache
éventuellement le ligament canthal et permet de disséquer la paroi
interne de l’orbite depuis la crête lacrymale antérieure jusqu’à l’artère
ethmoïdale postérieure et, au-delà, la paroi externe de la cellule d’Onodi
en avant du canal optique.
Citons aussi la voie médionasale.
2- Voie coronale
:
La voie coronale de Cairn-Unterberger permet l’abord du sinus frontal,
des toits d’orbite et de la région nasoethmoïdale.
C’est aussi la voie
d’abord neurochirurgicale de l’étage antérieur du crâne.
Elle est
préférable aux voies sourcilières même étendues à la région glabellaire.
L’association aux autres incisions orbitaires en particulier sous-ciliaires
est possible.
Elle est réalisée après infiltration du scalp entre la galéa et
l’épicrâne et de tout le front.
Les cheveux peuvent être rasés sur une
largeur de 1 à 2mm, au niveau du tracé de l’incision qui s’étend d’une
racine de l’hélix à l’autre en passant par le vertex ou en suivant 4 cm en
arrière la ligne d’implantation des cheveux.
Elle doit se situer en fait sur
la ligne de changement d’innervation sensitive du scalp.
L’orientation
de la lame du bistouri respecte le sens des bulbes des cheveux pour éviter
une alopécie.
Dans le même but, on évite les coagulations électriques à
ce niveau.
Le décollement au début intergaléoépicrânien devient souspériosté
en avant à une distance variable des rebords orbitaires, selon
que l’on a besoin d’un lambeau de périoste ou non et qu’il existe une
fracture frontale.
Latéralement, on va décoller jusque et au-dessus de
l’aponévrose du temporal et jusqu’au bord supérieur du zygoma en
restant au-dessus du feuillet profond de l’aponévrose temporale
dédoublée.
On est là très près de la branche temporofaciale du nerf facial
qui reste dans le lambeau décollé.
Si on veut récliner le muscle temporal,
on l’incisera 1 à 2 mmau-dessous de son insertion sur la crête temporale,
dans le muscle, en laissant des éléments musculoaponévrotiques sur la
crête pour pouvoir suturer.
En avant, le décollement va jusqu’au rebord supérieur de l’orbite et
permet de décoller les parois supérieures, externe et interne, de celle-ci.
Il est nécessaire pour cela d’ôter la partie inférieure du canal osseux où
peut passer le nerf sous-orbitaire et de décoller largement la racine du
nez en allant jusqu’à l’aplomb des canthi internes.
On peut décoller en
partie le plancher orbitaire.
S’il est fracturé, mieux vaut l’aborder par
une voie propre.
Chez le chauve, on peut utiliser la voie sus-sourcilière.
3- Voie vestibulaire supérieure
:
Elle a déjà été vue. Le degloving facial avec incision circulaire de la
muqueuse nasale est rarement utilisé en traumatologie.
Plaies en regard des foyers de fracture.
Elles peuvent être utilisées comme voie d’abord.
B - Fractures du nez
:
Dans les fractures du nez simples, les traits peuvent être verticaux sur
l’os propre et l’auvent nasal est alors basculé sur le côté.
Le nez est tordu
ou couché, la cloison est déviée.
Les traits peuvent être horizontaux et
comminutifs et le nez est alors enfoncé, la cloison est également
déformée, elle peut être télescopée sur elle-même.
On n’intervient que sur les fractures avec déplacement prouvé
radiologiquement et modification de la forme du nez du patient.
La
radiographie reste un indispensable document diagnostique et
médicolégal.
Si l’oedème et l’hématome ne gênent pas, la réduction peut
se faire dans les premières heures, pour certains d’ailleurs sous
anesthésie locale.
En fait, ce n’est que lorsque l’oedème a disparu que
l’on peut juger de la forme du nez et que l’on peut réellement intervenir.
Malgré l’usage d’anti-inflammatoires, l’intervention n’a souvent lieu
que vers le cinquième ou le septième jour, à une date où les os propres
commencent déjà à s’engluer.
Les fractures simples sont réduites en
commençant par l’os nasal enfoncé, grâce à des manoeuvres internes
aidées d’un instrument placé sous l’auvent nasal : pince deWalsham, de
Ash, ou simples ciseaux mousses protégés.
L’os nasal en valgus est
replacé par simple pression digitale contrôlée par un instrument endonasal.
Le déplacement antéropostérieur est réduit selon le même procédé à l’aide d’un instrument tractant l’auvent nasal vers l’avant et
contrôlé par le doigt.
La stabilité d’une telle réduction doit être contrôlée
par la palpation douce.
La contention est assurée par un léger
méchage maintenu 48 heures et la protection externe par une attelle
plâtrée, métallique, ou en matière thermodéformable fixée sur la face
pendant 7 à 10 jours.
L’effraction muqueuse étant quasi constante lors
du traumatisme et des manoeuvres de réduction, un traitement
antibiotique probabiliste est instauré en périopératoire.
Les hématomes
de cloison doivent être incisés, drainés et méchés ou comprimés par
plaques pendant 7 jours pour éviter leur récidive.
Les fractures complexes avec déviation septale peuvent bénéficier du
même traitement si la réduction de la cloison est stable.
La cloison est,
elle aussi, réduite par manoeuvres instrumentales (pince de Walsham).
Cette stabilité est essentielle car une déviation de cloison persistante est
responsable d’un déplacement secondaire et d’un nez dévié posttraumatique.
Il n’est pas illogique dans ces conditions de proposer une septoplastie, voire une véritable rhinoseptoplastie ou au moins une
dissection extramuqueuse du nez, lorsque la réduction primaire de la
déformation nasale avec atteinte septale est insuffisante.
Les gestes
septaux sont ceux des septoplasties : chondrotomies, exérèses de
portions fortement déviées et de réduction instable, hachurages.
Les
arguments pour une telle attitude sont les forts pourcentages d’échecs
(supérieurs à 30 %) du traitement orthopédique ainsi que la difficulté à
faire admettre une rhinoseptoplastie 6 mois après le traumatisme.
Dans les fractures comminutives, étant donné l’instabilité, il est
nécessaire de faire une contention endonasale.
Les mèches, source
d’infections, mal tolérées, difficiles et douloureuses à ôter, ne peuvent
être laissées plus de 48 heures.
La contention endonasale peut donc être
assurée au niveau de la cloison par des plaques en film radio ou en
silicone (Silastic).
Ces plaques peuvent être retournées au niveau de
l’auvent nasal pour assurer un soutien stable.
Dans ces conditions, elles
sont étayées par un méchage léger qui peut être changé tous les 2 jours.
Elles peuvent même être transfixiées au travers de l’aile narinaire.
Le
méchage peut être simplement réduit à deux fragments de gaze
résorbable, tassée haut, de façon à assurer un soutien de l’auvent.
Les
méchages gonflants type Mérocelt font l’hémostase mais peuvent
entraîner un déplacement secondaire et sont aussi difficiles à ôter que les
mèches.
Les contentions externes transnasales (plaques de
Silastic
bilatérales ou boutons maintenus par un ou deux fils transnasaux noués
sur bourdonnet) type Barret-Brown, donnent des nez étroits, pincés, peu
naturels avec risque de nécrose cutanée.
C - Fracture du malaire
:
Les fractures de l’os malaire sont des fractures évolutives par l’action
des muscles masséters qui tendent à les déplacer.
Les voies d’abord de ces fractures doivent permettre une exploration
correcte du plancher de l’orbite où il peut exister une incarcération
musculaire, un contrôle du nerf sous-orbitaire dans son canal et à la
sortie.
Elles doivent rendre possible une réduction correcte sous contrôle
de la vue et une vérification de la stabilité des fragments.
Elles doivent
permettre enfin la mise en place des procédés d’ostéosynthèse.
Le
meilleur compromis est l’association d’une voie d’abord palpébrale, infraciliaire ou infrapalpébrale et d’une voie d’abord orbitaire externe,
le plus souvent oblique permettant d’aborder la suture frontomalaire.
La
voie vestibulaire ne sera effectuée que dans les fractures instables où il
est nécessaire de mettre en place une ostéosynthèse au pied de la console
malaire.
La voie hémicoronale sera réservée aux fractures du malaire
associées à d’autres fractures type disjonction craniofaciale.
La réduction instrumentale au crochet de Ginestet est la plus utilisée.
Ce crochet est utilisé par la voie d’abord ou glissé en
percutané sous le corps du malaire.
Un élévateur introduit par voie endobuccal peut aider ou remplacer la traction externe exercée par le
crochet de Ginestet.
Le point d’appui du crochet, le sens de traction, sont
choisis en fonction du déplacement à donner.
Il est commode de placer
le crochet sous le bord inférieur du malaire au niveau du corps, en zone
osseuse solide.
Le crochet est maintenu à deux mains près du buste de
l’opérateur en évitant tout risque de dérapage incontrôlé.
L’aide
maintient fermement la tête du patient.
Une bonne réduction est
contrôlée par l’engrènement obtenu au niveau des foyers abordés.
Il est
possible que ces fractures soient stables après réduction.
Elles ne
nécessitent alors pas de contention.
Dans le cas contraire, la meilleure
contention est l’ostéosynthèse avec miniplaques vissées sur la suture
frontomalaire.
Pour certains, cette seule contention suffit et évite tout
déplacement secondaire, d’autres ajoutent, en cas de rotation du corps
du malaire, une miniplaque d’ostéosynthèse en Lau niveau de la console
maxillomalaire.
La congruence du rebord infraorbitaire assure
la bonne reconstitution de la dimension transversale de la face.
Elle peut
être réalisée au fil d’acier ou avec des microplaques.
Les miniplaques
sont souvent perçues sous la peau et il sera nécessaire de les ôter
secondairement.
D’autres enfin, mettent en place une broche transfaciale.
L’arcade zygomatique s’engrène presque toujours suffisamment, pour
éviter d’avoir à faire une contention à ce niveau où elle est délicate à
réaliser (déjà par le choix de la voie d’abord).
Une canthopexie externe est faite en fixant le ligament canthal à l’apophyse orbitaire externe dans
un trou foré s’il y a déplacement de ce dernier ou si la réduction d’une
fracture intermédiaire du bord externe de l’orbite n’est pas parfaite.
Fracture du plancher orbitaire
:
Les fractures du plancher orbitaire ne sont pas toujours associées à une
fracture de la console du malaire.
Elles peuvent être isolées, c’est le
classique blow out.
C’est également la fracture en « porte de saloon »
(trap door fracture) où, sous l’effet d’un choc, le rebord antérieur ploie
mais résiste et ne se fracture pas, le plancher, lui, cède, s’ouvre et se
referme en incarcérant le droit inférieur avec éventuelle compression du
nerf sous-orbitaire.
S’il y a indication à explorer le plancher d’orbite
(anesthésie du V2, hernie musculaire visible sur le scanner, test de duction forcée montrant l’incarcération ou examen ophtalmologique par
Lancaster l’objectivant), celle-ci sera faite par la voie d’abord la plus
appropriée : voie palpébrale ou voie transconjonctivale lors d’une
fracture blow out isolée du plancher.
La réparation du plancher d’orbite peut utiliser les fragments osseux
fracturés et laissés en place à condition qu’ils soient en continuité,
appuyés sur des zones solides du plancher.
La plupart du temps, il faut le
reconstituer.
On peut utiliser différents matériaux : greffons osseux
pariétaux, greffons cartilagineux (conque), matériel synthétique comme
le treillis de Vicryl résorbable ou encore une fine lame de Silastic à
qui l’on a reproché sa tendance à l’extériorisation, fragments minces de
corail madréporique.
La mise en place de tels matériaux n’est pas
toujours simple.
Il faut réintégrer tout le contenu orbitaire dans la cavité
orbitaire, il ne faut pas ouvrir par une dissection intempestive la fente sphénomaxillaire, ne pas comprimer la voie lacrymale par la mise en
place d’un greffon trop grand, ne pas entraîner une exophtalmie par la
mise en place d’un greffon trop gros.
Il faut s’assurer de l’immobilité du
fragment mis en place.
Dans la plupart des cas, ce fragment est calé par
la convexité du rebord orbitaire antérieur, mais il est quelquefois
nécessaire de le fixer à ce rebord par des points de fil non résorbable,
passé dans des trous préalablement forés.
Si on utilise une lame de Silastic, le périoste doit être soigneusement refermé (l’indication idéale
pour ce matériel est le blow out).
Dans tous les cas en fin d’intervention,
un test de duction forcée vérifiera la bonne mobilité du globe et on
s’assurera de l’absence d’exophtalmie ou d’énophtalmie résiduelle.
Saboye propose l’ostéosynthèse des fragments du plancher avec des
microplaques.
D - Fracture de l’arcade zygomatique
:
L’arcade zygomatique n’est pas un os spécifique de la face, mais l’union
du processus temporal du malaire et du processus zygomatique du
temporal.
Cette arcade forme un contrefort latéral de la face qui, lors
d’un accident, est très exposé.
L’indication d’une réduction et d’une
contention est portée devant un enfoncement disgracieux ou surtout
devant une limitation de l’ouverture buccale.
La réduction de ces
fractures peut se faire au doigt ou avec un élévateur par voie endobuccale, au crochet par voie percutanée, ou à l’aide de fils d’acier
cerclant les éléments enfoncés du zygoma et tractés doucement vers le
dehors.
La qualité de la réduction est toujours appréciée au doigt endobuccal et sur les radiographies en Hirtz décalées à droite et à
gauche.
Rowe a mis au point un élévateur zygomatique introduit par
voie temporale, 1 à 2 cm derrière la racine des cheveux et glissé sous
l’aponévrose temporale jusque derrière le zygoma.
Cette technique est
en fait utile dans les fractures du zygoma et du malaire. Un élévateur
simple peut être utilisé par cette voie, comme il peut l’être aussi par voie endobuccale.
La contention est délicate. Le ballonnet de Franchebois est glissé par
voie endobuccale derrière l’arcade réduite et est ensuite gonflé.
Delaire
a préconisé la mise en ouverture buccale maximale pendant une dizaine
de jours avec une cale interdentaire qui permet l’interposition du
condyle et la mise en tension du muscle temporal évitant ainsi le
déplacement secondaire en dedans du fragment remis en place.
La
contention peut se faire à l’aide d’un ou deux fils d’acier introduit à
l’aide d’un passe-fil par un trajet sus, rétro- puis sous-zygomatique et
qui permettent initialement la réduction.
Les deux extrémités du ou des
fils de cerclage sont amarrés soit à une attelle prenant appui sur le
malaire en avant et le temporal en arrière et fixée à un casque, soit à une
broche de Kirschner, enfoncée dans le corps du malaire et sortant en
dehors et en arrière parallèlement au zygoma.
Les écrous fixés sur cette
broche permettent de fixer les fils en les serrant progressivement et en
contrôlant la réduction sur les radiographies.
L’abord du zygoma
pour mettre une plaque d’ostéosynthèse peut se faire par voie coronale, hémicoronale, temporale dans la « patte chevelue » ou plus difficilement
par voie endobuccale.
E - Fracture du complexe naso-ethmoïdo-maxillofronto-orbitaire (CNEMFO)
:
Merville préfère le terme de dislocation fronto-orbito-nasomaxillaire.
Il définit au sein de cette entité les dislocations orbitonasales,
orbito-naso-maxillaires et fronto-orbito-nasales qui comprennent en
plus des fractures centrofaciales, les fractures fronto-orbitaires latérales
ou orbitoptérioniques, et les fractures du sinus frontal.
La région anatomique est complexe et associe des structures osseuses
de résistances différentes.
Les structures nasales s’enfoncent dans
l’ethmoïde et ce d’autant plus que les branches montantes du maxillaire
se fracturent et s’écartent.
L’os frontal est fracturé et il peut y avoir
brèche ostéo-dure-mérienne.
L’ensellure nasale, l’élargissement de la
distance intercanthale, les problèmes orbitaires (énophtalmie, diplopie
par incarcération musculaire) et les troubles de la perméabilité des voies
lacrymales sont diversement associés.
Le traitement est différent selon
qu’il y a ou non une brèche ostéo-dure-mérienne.
En fait, trois situations
se présentent :
– absence de rhinorrhée ;
– rhinorrhée certaine ;
– possibilité de rhinorrhée.
Dans ce dernier cas il faut se résoudre à la
possibilité d’une intervention en deux temps si la brèche ostéo-dure-mérienne ne se révèle pas lors du temps de réparation
maxillofacial.
Voies d’abord : on privilégie la voie coronale, surtout s’il y a
enfoncement nasal et dystopie canthale nécessitant une canthopexie
transnasale.
On peut y associer des voies orbitaires, paranasales,
médionasales ou encore des voies de rhinoplastie. La voie d’abord doit
permettre une bonne réduction et la mise en place de procédés de
contention efficaces.
La réduction de l’enfoncement nasal est obtenue par traction
instrumentale ou à l’aide de fils d’acier.
Il faudra veiller à son parfait
centrage et à sa symétrie.
La contention est obtenue par une plaque enY,
en T ou en X fixée au bandeau frontal en haut et aux os propres en bas.
Ces miniplaques ont supplanté les fils d’acier passés en X dans cette
région.
En cas de fracture comminutive des os propres, on peut ostéosynthéser les divers fragments grâce à du fil d’acier ou à des
miniplaques.
En cas d’impossibilité, on est contraint d’utiliser un
greffon osseux fixé par une plaque ou une vis à l’épine nasale du frontal.
Il faut alors remodeler la région à la fraise car le greffon à tendance à
combler l’angle nasofrontal et la pyramide nasale à s’élargir.
On utilise
un greffon calvarial ou iliaque.
Les apophyses montantes des maxillaires
(processus frontaux des maxillaires) sont ensuite reconstruites si besoin,
en utilisant des fils ou des plaques souvent perceptibles sous la peau si
l’on utilise des miniplaques, plus résistantes.
Les parois internes d’orbite sont explorées après section coagulation des
artères ethmoïdales antérieures.
Les gros déficits osseux sont réparés par
des greffons osseux minces ou des biomatériaux.
Certains utilisent des
greffons cartilagineux de conque. Les voies lacrymales seront réparées
avant que la canthopexie éventuelle ne soit serrée.
Elles peuvent être
comprimées, déchirées et il faut alors les suturer.
Si la suture est
impossible, on effectuera une dacryocystorhinostomie entre la
muqueuse du sac lacrymal et la muqueuse nasale sous le cornet moyen,
suturée sur un calibrage laissé en place 3 semaines.
La dystopie canthale est au mieux corrigée par une canthopexie
transnasale.
Cette canthopexie peut être uni- ou bilatérale. Le
télécanthus s’explique par le déplacement en bas et en dehors du
processus frontal ou d’un fragment du processus frontal du maxillaire.
Bien souvent, la remise en place de ce fragment suffit, fixé par un fil
d’acier ou une microplaque.
L’os est fin et les fils d’aciers coupent au
serrage. Ailleurs, le ligament est arraché ou la fracture trop comminutive
pour que l’on puisse faire une ostéosynthèse.
On doit donc réaliser une canthopexie transnasale.
La canthopexie transnasale unilatérale est réalisée au fil d’acier
2/10 serti.
Premier temps : on repère le chef antérieur du ligament canthal interne
auquel on amarre deux anses de fil d’acier solidement passées à travers
ce ligament selon deux axes perpendiculaires.
Les deux chefs de chaque
fil sont coupés à une longueur différente pour être ensuite facilement
repérés.
Deuxième temps : on perfore au foret ou à la pointe carrée la paroi
interne du côté controlatéral grâce à une petite voie d’abord.
Du côté
fracturé, le trou est en général déjà fait par la fracture.
On peut avoir à
perforer de ce côté une greffe osseuse.
Il faut alors le faire avant sa mise
en place définitive. Les points de forage sont symétriques le long de la
crête lacrymale antérieure près de l’insertion du canthus du côté sain,
voire légèrement au-dessus.
Troisième temps : la cloison nasale est perforée à l’aide d’un trocart et
on passe au travers du nez un passe-fil muni d’un troisième fil d’acier
recourbé en anse.
L’anse sort du côté de la canthopexie à effectuer. Les
fils précédemment fixés au ligament canthal interne sont passés dans la
boucle et tirés doucement de l’autre côté.
Leur longueur différente
permet de les identifier.
Certains utilisent une quatrième anse de fil
destinée à réappliquer les plans cutanés au relief nasal.
Quatrième temps : on serre les deux premières anses autour d’un toron
bloquant en pont l’orifice du côté sain.
Le serrage est réglé
progressivement jusqu’à obtenir une distance intercanthale idéale (égale
à la longueur de la fente palpébrale).
Il est bon d’hypercorriger. Un fil
bien serré suffit, l’autre est une sécurité.
En cas de canthopexie bilatérale, le lâchage des deux ligaments canthaux
traduit la comminution des deux parois internes des orbites qu’il faut
alors reconstruire par deux greffons osseux minces (corticale externe de
pariétal ou os iliaque monopariétal).
Les quatre fils de canthopexie (deux par côtés) sont alors passés dans les ligaments
canthaux de chaque côté.
Les trous par où passent les fils sont alors forés
dans des parois reconstruites et fragiles ou au travers des greffons.
La
bonne position est difficile à apprécier, il faut donc le faire sur les greffons mis en place.
Chacun des fils est rattrapé du côté opposé et ils
sont serrés sur la ligne médiane, la plupart du temps sur une greffe
osseuse nasale fixée solidement au frontal.
Les voies lacrymales doivent
être vérifiées avant le serrage de la canthopexie et la mobilité des globes
appréciée par des tests de duction.
On vérifiera aussi la hauteur des
globes et l’absence de dystopie, d’énophtalmie ou d’exophtalmie. On
peut réappliquer les téguments par un fil passé en transcutanéonasal et
serré sur des bourdonnets latéraux.
En cas de fracture plus complexe ou étendue du CNEMFO, ou associée
à une disjonction craniofaciale (dislocation orbito-naso-ethmoïdomaxillaire),
la reconstruction va du plus solide au plus délabré, de façon
centripète, en essayant de terminer par les régions cavitaires les plus
septiques.
On reconstruit de haut en bas et de dehors en dedans, en
partant du zygoma et des parois orbitaires latérales pour reconstruire le
cadre orbitaire avec des greffes éventuelles sur les parois orbitaires puis
le nez.
On peut reconstruire de bas en haut en se basant sur l’occlusion par un BIM en cas de fracture du CNEMFO associée à un Le Fort I.
F - Fracture de l’étage antérieur de la base du crâne
:
Ce sont les fractures du sinus frontal, les fractures du CNEMFO hautes
avec brèche ostéoduremérienne et les fractures des toits d’orbites
centrales et latérales.
Ce sont les fractures des confins craniofaciaux
exposant au risque de fuite de liquide céphalorachidien (LCR).
Elles
nécessitent le recours au neurochirurgien (classifications de Fain et Péri,
XXXIIe Congrès de stomatologie et chirurgie maxillofaciale).
1- Brèches ostéoméningées
:
Le recours au neurochirurgien est nécessaire.
La voie coronale permet
la réalisation d’un volet frontal.
Ce volet peut rarement être fait
latéralement pour éviter d’ouvrir le sinus frontal.
C’est quelquefois le
cas dans certaines fractures orbitoptérioniques intéressant la portion
externe de l’os frontal, la grande aile du sphénoïde, la région
maxillomalaire.
Dans les autres cas, le volet frontal est médian, audessus
du bandeau orbitaire ouvrant le sinus frontal.
Il intéresse et peut
suivre les traits de fracture du bandeau fronto-orbitaire dans leurs parties
frontales.
L’exploration méningée est la plupart du temps extradurale, avec section
des filets du nerf olfactif et expose la lame criblée, la gouttière olfactive
jusqu’au jugum sphénoïdal, et les toits des orbites.
Les voies intradurales
permettent le traitement des lésions cérébrales associées mais ont peu
d’intérêt pour explorer les dégâts osseux de la base. Par ailleurs, le
repérage des brèches ostéo-dure-mériennes est difficile et se fait sur la
présence d’adhérences.
La réparation de la brèche durale se fait par
suture méningée, si elle est possible, doublée par un lambeau d’épicrâne
suturé avec beaucoup de soins et de façon hermétique. Alliez donne la
faveur aux lambeaux pédiculés de galéa.
On peut également utiliser du
fascia lata.
Il faut toujours faire les réductions et les premières
ostéosynthèses des fragments osseux médians enfoncés (épine nasale,
branche montante, région frontonasale) avant de réparer la brèche duremérienne.
Ce temps peut en effet les révéler.Au niveau de l’ethmoïde et
de la gouttière olfactive, il faut tout d’abord essayer de refaire un plan
nasal étanche en suturant la muqueuse nasale.
Puis la partie médiane de
l’étage antérieur est reconstituée avec de l’os corticospongieux ou avec
de la corticale externe de crâne, en utilisant le moins de fragment
possible et en s’appuyant sur des zones latérales solides et assurant une
autocontention.
On ne fait pas d’ostéosynthèse.
On double la partie supérieure, endocrânienne de cette greffe par un
lambeau pédiculé d’épicrâne à charnière antérieure.
Muqueuse nasale
et épicrâne viennent prendre en « sandwich » la greffe osseuse.
Ce
lambeau d’épicrâne vient en plus de la plastie dure-mérienne que l’on
aura pris la précaution de prendre ailleurs pour le crâne.
S’inspirant de l’exérèse par double voie des tumeurs ethmoïdales,
certains ne reconstruisent pas la partie médiane ethmoïdonasale de la base par un greffon osseux mais interposent entre la muqueuse nasale et
le lambeau d’épicrâne à charnière antérieure, de la graisse prélevée sur
l’abdomen.
En arrière, au niveau du sphénoïde, la greffe osseuse est utile car elle
peut venir caler le lambeau épicrânien rabattu sur lui-même assurant
dans cette zone le contrôle toujours difficile de l’étanchéité.
La
reconstruction du bandeau frontal utilise des miniplaques ou des plaques
tridimensionnelles, mais en cas de comminution sévère, on peut refaire
le galbe du front par des greffes osseuses de côte ou de calvaria.
2- Fractures du sinus frontal
:
Elles entraînent des désordres esthétiques au niveau du bandeau frontal,
fonctionnels par atteinte du canal nasofrontal et peuvent également avoir
des conséquences neurologiques s’il existe une brèche ostéoméningée.
Elles peuvent être associées aux autres éléments du complexe nasoethmoïdo-fronto-orbitaire.
Les fractures non déplacées de la paroi
antérieure ne nécessitent aucun geste.
Les fractures déplacées de la paroi
antérieure imposent l’exploration du canal nasofrontal et la
reconstruction du bandeau frontal.
C’est la voie bicoronale avec
dégagement des nerfs supraorbitaires qui est la plus adaptée à ce temps.
Le canal nasofrontal est exploré par voie transfracturaire ou après
réalisation d’un volet osseux.
Il est testé par du sérum physiologique
légèrement teinté dont on vérifie le passage dans les fosses nasales au
besoin grâce à une optique.
Si le canal est obstrué, il est quelquefois
possible de le désobstruer par des manoeuvres de réduction des
fragments osseux.
On peut également tenter un fraisage prudent qui
permet parfois de reperméabiliser l’orifice et de le calibrer par une sonde
ou une lame de Silastic.
On réalise alors en fait une ouverture large du
canal nasofrontal dans l’ethmoïde antérieur.
Mais cette manoeuvre peut
aboutir à une resténose.
Il est aussi possible d’abaisser suffisamment la
cloison du sinus pour que le drainage des deux sinus frontaux s’effectue
par un seul canal perméable.
Si la désobstruction du canal est
impossible, il faut impérativement prévoir une exclusion du sinus frontal
soit par comblement, soit par crânialisation.
La reconstruction de la paroi antérieure du sinus se fait par la même voie
d’abord et après exploration des canaux.
La reconstruction du puzzle est
menée de façon centripète après réduction au crochet fin des différents
fragments.
L’ostéosynthèse est assurée par des microplaques ou des
ligatures au fil d’acier.
Elle doit restaurer un galbe frontal régulier.
En cas de perte de substance osseuse, nous l’avons vu, un
greffon peut être mis en place.
Les fractures de la paroi postérieure peuvent être associées aux dégâts
de la paroi antérieure.
En l’absence de déplacement et s’il n’y a pas de rhinorrhée cérébrospinale, ces fractures sont négligées mais une
surveillance est instituée pendant au moins 15 jours avec recherche
biquotidienne d’une fuite de LCR.
Dans tous les autres cas (fracture avec
fuite de LCR d’emblée ou lors de la surveillance, fracture déplacée de la
paroi postérieure), une intervention à double équipe s’impose.
Le temps
neurochirurgical consistera en un abord endocrânien de l’étage antérieur
de la base du crâne.
Une brèche méningée peut parfois être difficile à
localiser, car elle peut se situer à distance des foyers de fracture en raison
du cisaillement lors du traumatisme.
On assure l’exclusion du sinus
frontal par crânialisation, puis on répare les dégâts osseux de la paroi
antérieure des sinus.
Si une brèche méningée se révèle secondairement
par une fuite de LCR survenant quelques jours après la réduction, il
convient alors de refaire un second temps neurochirurgical.
3- Fractures du toit orbitaire
:
Elles peuvent poser les mêmes problèmes que ceux d’une fracture des
parois du sinus frontal d’autant que celui-ci est souvent étendu audessus
des orbites.
L’abord du toit d’orbite se fait au mieux par une voie
coronale et un volet frontal médian ou latéral en fonction du siège de la
fracture.
Le rebord supraorbitaire peut être reconstitué par ostéosynthèse
au fil d’acier ou par une plaque.
En cas de déplacement important, il y a
risque de cisaillement méningé et de fuite de LCR et il est important de
s’assurer la collaboration d’un neurochirurgien.
La reconstruction du
toit d’orbite nécessite une greffe osseuse, surtout s’il existe un grand
sinus frontal avec d’importants prolongements supra-orbitaires.
La
paroi supérieure de l’orbite est en effet mince par endroits et les
ostéosynthèses par fil d’acier ou microplaques ne sont pas toujours assez
solides.
Le contenu orbitaire aura tendance à remonter dans le sinus
frontal ouvert dont la paroi mince se solidifiera difficilement.
On
aboutira ainsi à une énophtalmie dans les grands sinus frontaux.
À
l’inverse, en cas de petits sinus frontaux, le déplacement vers le bas du toit d’orbite sous la poussée cérébrale se traduit par une exophtalmie et
nécessite pour sa réparation un temps neurochirurgical avec encore
exclusion du sinus frontal s’il est ouvert.
Afin d’éviter la diplopie, il faut
réamarrer la périorbite au rebord supraorbitaire et vérifier par un test de
duction l’absence d’obstacle au mouvement du grand oblique.
4- Techniques d’exclusion du sinus frontal par comblement
:
Cette technique est réservée aux échecs ou à l’impossibilité de conserver
la perméabilité du canal nasofrontal.Après fraisage à la fraise diamantée
de toutes les parois du sinus frontal, y compris les moindres récessus
près du canal nasofrontal pour en enlever toute la muqueuse,
l’obturation du canal est réalisée grâce à un greffon osseux et de la
poudre d’os.
Le comblement proprement dit se fait avec divers
matériaux : la graisse abdominale fond, le muscle se nécrose, l’os peut
se séquestrer.
Le choix reste donc ouvert.
Le risque de laisser un îlot
muqueux est important, il aboutit à la constitution d’une mucocèle.
À
cette technique d’exclusion du sinus frontal, beaucoup préfèrent la crânialisation.
La crânialisation se fait en réséquant toute la paroi postérieure du sinus
qui est ensuite régularisée à la fraise diamantée pour aviver les parois
osseuses et ôter toute la muqueuse.
L’obturation des canaux nasofrontaux est réalisée par de l’os et ce greffon osseux ne doit
présenter aucune partie saillante.
Le contenu crânien va se réappliquer
simplement et occupera l’espace laissé libre.
5- Fractures du canal optique avec syndrome
de section physiologique du nerf optique :
Elles se voient dans les traumatismes importants avec fracture sphénotemporale et certaines fractures orbitofrontomalaires.
Le
diagnostic est porté sur l’examen clinique, ophtalmologique et sur le
scanner.
La décompression du nerf optique dans les syndromes de l’apex
peut se faire par voie transethmoïdosphénoïdale.
Cette voie d’abord
permet d’aborder la paroi interne de l’orbite et la paroi externe de la
cellule d’Onodi après avoir sectionné les deux artères ethmoïdales
antérieure et postérieure.
On rentre dans la cellule et on fraise les parois
internes supérieure et postérieure du canal optique.
On décomprime
ainsi le nerf sur sa face interne.
La décompression peut se faire
également par voie neurochirurgicale en fraisant les parois supérieures
du canal optique.
Traumatismes balistiques
:
L’urgence se situe d’emblée au niveau des fonctions vitales (hémostase,
trachéotomie).
Puis, le parage de la plaie s’effectue en étant le plus
conservateur possible.
L’écart entre les fragments osseux est maintenu
quelle que soit la perte de substance par de longues plaques, des
gouttières, des broches, des fixateurs externes.
Les reconstructions en
urgence sont à proscrire.
Secondairement, on envisage une stratégie de reconstruction qui suit les
principes suivants :
– apporter d’abord les tissus mous là où ils sont nécessaires pour
recouvrir des greffons osseux ultérieurs.
On utilise pour cela tous les
lambeaux disponibles, libres ou pédiculés, musculocutanés ou non, sans
omettre l’utilité de certains lambeaux classiques comme le lambeau
deltopectoral ;
– restaurer la continuité de l’arche mandibulaire par des greffes
osseuses (greffe libre ou lambeau ostéo-myo-cutané de péroné) ;
– fermer les perforations palatines, obtenir une bonne continence
labiale souvent au prix d’une microstomie en utilisant au maximum la
lèvre saine ;
– réparer les dégâts orbitaires et restaurer une continence palpébrale
pour une éventuelle prothèse oculaire ;
– restaurer le nez en utilisant au maximum les lambeaux locaux.
On
utilise volontiers chez ces patients les systèmes de fixateurs externes ou
le diadème de Tessier pour maintenir l’écart entre les fragments osseux
et les greffes osseuses mises en place.
Il s’avère indispensable pour qui veut traiter les fractures faciales
d’acquérir le matériel d’ostéosynthèse nécessaire au moins par miniplaques ou mieux par miniplaques et microplaques, les divers
types de vis, dans des diamètres et des longueurs variés.
L’urgence faciale a souvent été considérée comme secondaire et
traitée trop tardivement car elle était à juste titre reléguée après
d’autres urgences vitales.
Il n’en reste pas moins que les fractures
faciales sont douloureuses (les fractures mandibulaires en
particulier) et invalidantes car elles gênent ou empêchent
l’alimentation et la parole.
Il s’agit souvent de fractures mobiles et déplacées et, à ce titre
aussi, elles doivent être traitées rapidement.
La stratégie thérapeutique (anesthésie, voies d’abord,
ostéosynthèses, blocage) sera élaborée au vu d’un bilan par
imagerie. Seuls les délais d’obtention de ce bilan peuvent faire
reculer les délais thérapeutiques si l’état du malade autorise
l’anesthésie et l’intervention.
En cas de fractures multiples, la
reconstruction va du plus solide vers le plus mobile.
Par exemple,
en cas de disjonction craniofaciale associée à une fracture de la
mandibule, on effectue un blocage et les ostéosynthèses sont
mises en descendant à partir du crâne depuis l’orbite jusqu’à la
mandibule.
Rappelons enfin les dangers du blocage, surtout chez
un traumatisé, et la nécessité de la présence de ciseaux coupe-fil
(Beebee) à proximité du patient.