Insuffisance rénale chronique du sujet âgé et traitement par dialyse et transplantation Cours de Néphrologie
Introduction
:
Nombre des néphropathies chroniques vont évoluer vers
l’insuffisance rénale chronique (IRC), puis vers l’insuffisance rénale
chronique terminale (IRCT).
Nombre d’entre elles sont découvertes
par hasard, à l’occasion d’un bilan pour une toute autre affection, et
c’est probablement une des raisons du fait que, plus que dans tout
autre groupe d’âge, le recours au spécialiste néphrologue est tardif
et le traitement institué dans des conditions précaires.
Pourtant,
aujourd’hui, toutes les options du traitement de l’urémie sont
ouvertes : dialyse, hémodialyse ou dialyse péritonéale, aussi bien
que transplantation.
Quand elles sont convenablement planifiées, ces
méthodes permettent d’obtenir souvent un allongement substantiel
de la durée de vie dans des conditions de confort convenables.
Plus
souvent que dans tout autre groupe de dialysés se pose cependant
la question de l’arrêt de la dialyse.
Dans cet article, sont envisagées les manifestations et complications
de l’insuffisance rénale, les modalités de dialyse et leur application
aux personnes âgées, et la mise en oeuvre de la transplantation dans
cette population.
Une rubrique est particulièrement consacrée à la
transplantation rénale à partir de rein de donneurs âgés.
Nombre des maladies rénales précédemment évoquées voient
malheureusement leur évolution se faire vers l’IRC.
Celle-ci présente
quelques caractères particuliers chez les personnes âgées, de même
que la dialyse et la transplantation mises en oeuvre à la phase
terminale.
Insuffisance rénale chronique
et insuffisance rénale chronique
terminale :
A - ÉPIDÉMIOLOGIE DE L’IRC
:
Les données concernant l’épidémiologie et l’histoire naturelle de
l’IRC de la population âgée sont rares et incomplètes.
Trois études d’incidence ont été menées au Royaume-Uni au cours
des 10 dernières années.
L’incidence varie de 172 à 450 IRC
modérées par million d’habitants et par an (créatinine : 300 µmol/L)
et de 61 à 148 cas par million d’habitants et par an d’IRC sévères
(créatinine : 500 µmol/L).
Dans l’étude de N Drey, l’incidence
suit un gradient d’âge, puisqu’elle est de 20 par million d’habitants
et par an pour les moins de 20 ans, et de 1 200 par million
d’habitants et par an pour les plus de 80 ans.
La maladie concerne
surtout les hommes et les personnes de faible niveau
socioéconomique.
IH Khan fait le constat que seulement un tiers
de ces patients (36 %) est adressé en consultation néphrologique.
Dans une étude prospective impliquant tous les centres
néphrologiques d’Île-de-France durant l’année 1991, P Jungers
établit une incidence de 260 cas par million d’habitants et par an
(créatinine : 200 µmol/L) dont 53 % ont plus de 60 ans.
Elle est de
523 cas par million d’habitants et par an dans la tranche d’âge 60-
74 ans et de 619 cas par million d’habitants et par an de sujets de
75 ans et au-delà.
Les hommes sont deux fois plus nombreux que
les femmes (sex-ratio : 1,9).
Ainsi, l’incidence est-elle de 739
insuffisants rénaux chroniques par million d’habitants et par an pour
les hommes de 60 à 74 ans et de 1 124 pour les plus de 75 ans, et
pour les femmes, respectivement de 354 et 356 par million
d’habitants et par an.
Les IRC sévères (créatinine > 500 µmol/L)
comptent presque pour un tiers (31 %).
La prévalence de l’IRC est plus difficile encore à estimer.
Dans la
population nord-américaine étudiée par le Third National Health
and Nutrition Examination Survey entre 1988 et 1994, la prévalence
d’une créatininémie supérieure à 15 mg/L est de 21,25 % des
hommes de 60 à 69 ans et de 32,26 % chez les plus de 70 ans.
Pour
les femmes, les données sont respectivement de 5,7 % et 9,28 %.
Pour
la population totale, quel que soit l’âge, la prévalence est de 9,74 %
pour les hommes et de 1,78 % pour les femmes.
La créatininémie est
supérieure ou égale à 20 mg, témoignant donc d’une insuffisance
rénale notable, chez 1,68 % des hommes de la soixantaine et chez
5,03 % de ceux de plus de 70 ans ; la fréquence est moindre chez les
femmes, respectivement de 1,27 % et 0,71 %.
La prévalence est
plus élevée chez les Américains d’origine africaine.
Cette estimation
de l’insuffisance rénale est imparfaite, car la sensibilité du dosage de
la créatinine est, surtout chez les sujets âgés, médiocre.
En Europe, il
n’existe pas d’évaluation comparable à celle menée sur le continent
nord-américain.
Les observations de Kesteloot et al en Belgique
montrent que la clairance mesurée moyenne des hommes de 60 à
64 ans est de 91,8 + 27,6 mL/min et celle des plus de 70 ans de 82,2
+ 23,2 mL/min ; les femmes ont des valeurs moindres : 76,8 +
21,6 mL/min et 67,9 + 19,7 mL/min respectivement.
Le calcul à
partir de l’écart-type de ces données indique que 2,5 % des hommes
âgés de 60 à 64 ans ont une clairance inférieure à 65 mL/min, et
inférieure à 59 mL/min pour les plus de 70 ans ; les valeurs de
clairance étaient de 65 et 48 mL/min pour 2,5% des femmes dans
les mêmes tranches d’âge.
1- Étiologies de l’IRC
:
On ne possède pas de données étiologiques sur les IRC modérées à
sévères.
Seuls les registres de traitement de l’IRCT permettent
d’approcher ces informations.
Ils nous apprennent que les IRC
secondaires à l’hypertension artérielle (HTA), aux maladies
vasculaires rénales et au diabète, sont actuellement les causes les
plus fréquentes de l’IRC.
La fréquence et l’importance des comorbidités, peu abordées dans
la littérature, doivent être prises en compte, au même titre que l’âge.
IH Khan, après avoir réparti une population d’insuffisants rénaux
en trois classes de risque croissant définies par l’âge (< 70 ans, entre
70 et 80 ans, > 80 ans) et/ou l’existence de maladies associées
(diabète, maladies cardiovasculaires, pulmonaires, hépatiques)
observe que la fréquence en est respectivement de 13 %, 23 % et
64 %.
Vingt-deux pour cent des sujets n’ont pas de comorbidité
associée à l’IRC, et ils sont tous parmi les plus jeunes.
2- Histoire naturelle de l’IRC
:
Elle est peu documentée.
* Mortalité
:
Certaines des études précédemment citées ont réalisé un suivi partiel
de la population identifiée et attestent d’une lourde mortalité.
N Drey, en 5 ans et demi, constate le décès de 69 % des 1 076
insuffisants rénaux d’un âge médian de 77 ans.
Le risque de décès
est multiplié par 2,23 pour les plus de 60 ans. IH Khan, au terme
de 2 ans de suivi, établit une relation avec les comorbidités et
constate un taux de survie de 100 %, 48 % et 14 % pour les classes
de risque faible, moyen et élevé chez les malades non suivis par un
néphrologue et un taux de 100 %, 63 % et 27 % pour ceux qui ont
bénéficié d’une prise en charge néphrologique.
Dans la cohorte
de P Jungers, 1 an après l’inclusion, 18 % des plus de 75 ans sont
morts et 28 % dialysés (5 % et 48 % pour les plus jeunes).
La cause
première du décès est cardiovasculaire (46 % et 63 %), suivie par des
accidents infectieux (11 %).
La mortalité par affection néoplasique
ou hématologique est également importante.
* Fonction rénale
:
L’évolution de la fonction rénale et ses déterminants n’ont
pratiquement pas été étudiés.
La diminution physiologique de la
filtration glomérulaire et de la réserve rénale devrait accélérer le
processus de dégradation fonctionnelle.
L’HTA, si fréquente à cet
âge, est un possible facteur d’aggravation évolutive.
D Acone montre
une réduction tensionnelle plus importante et une dégradation
rénale moins rapide avec un inhibiteur calcique qu’avec un
inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA)
(respectivement -0,62 et -1,03 mL/min/mois).
L’absence d’une
période témoin ne permet pas d’apprécier le bénéfice fonctionnel
du traitement antihypertenseur, et le possible infléchissement de la
courbe évolutive par l’intervention thérapeutique.
L’importance
du rôle du débit de protéinurie est suggérée par le suivi durant 4
ans d’un groupe de 82 sujets atteints d’IRC, de plus de 65 ans, dont
la filtration diminuait de -0,34 ± 0,46 mL/min/mois, et chez qui une
protéinurie de débit supérieur à 1 g/j était un facteur péjoratif pour
la mortalité et le cours évolutif de l’IRC.
3- Complications de l’IRC
:
Les complications de l’IRC sont dominées par les accidents
cardiovasculaires et les désordres nutritionnels.
Une étude
rétrospective d’une cohorte de sujets en IRC montre que la durée de
vie sans hospitalisation était de 31,5 mois pour les moins de 65 ans,
et de 11,6 mois pour les plus âgés.
Les causes cardiovasculaires
rendaient compte de 33,7 % des séjours hospitaliers.
En analyse multivariée, l’âge avancé (1,012/an), l’angor (1,9), l’artériopathie des
membres inférieurs (1,64) et l’anémie étaient les variables
indépendantes reliées à la fréquence d’hospitalisation de cause
cardiovasculaire.
Le début non électif de la dialyse pour 22 %, les
infections pour 8,4 % étaient les autres causes.
– Une altération de l’état nutritionnel est très fréquente chez
l’insuffisant rénal chronique âgé, et cet état s’aggrave avec le niveau
et la progression de l’IRC.
Les résultats de l’étude NHANES III
permettent de constater que 31 % des personnes âgées incluses dans
l’enquête et dont la clairance était inférieure à 60 mL/min étaient
dénutris.
Une clairance inférieure à 30 mL/min est un
déterminant de la dénutrition en analyse multivariée (OR : 3,6 ; IC
95 % : 2-6,6), de même que l’insuffisance cardiaque (OR : 2,1-3,7).
L’âge en revanche n’a pas d’influence (OR : 1,1 pour les 70-79 ans et
1 pour les plus de 80 ans).
La consommation de protéines
alimentaires se réduit au cours de la progression de l’IRC, et atteint
des niveaux bas quand s’aggrave la fonction rénale (0,66 g/kg/j
pour une clairance inférieure à 24 mL/min).
Les guides de
pratique clinique nord-américaine (Kidney Dialysis Outcome
Quality Initiative [KDOQI]) recommandent un suivi trimestriel de
l’état nutritionnel sur les critères du poids (en comparaison aux
références nationales), de l’albuminémie, de la consommation
protéique. Un apport calorique de 30 à 35 kcal/kg/j est recommandé
pour les plus de 60 ans qui ont une activité physique limitée.
Pour
les plus actifs, un apport identique aux plus jeunes (> 35 kcal/kg/j)
est souhaitable.
La dénutrition est un indice défavorable de
l’évolution en dialyse.
L’apparition de signes témoignant de son
installation est une indication à la mise en dialyse.
– L’anémie de l’insuffisant rénal chronique âgé est très souvent en
relation avec un déficit ferrique.
Il est possible que, compte tenu de
la faible activité des patients âgés, les signes en relation avec
l’anémie soient absents, et que celle-ci soit moins traitée que chez
des sujets plus jeunes.
Ceci n’est cependant pas confirmé par les
données de l’United States Renal Data System (USRDS) qui
montrent que les pourcentages des nouveaux dialysés de 65 à 74 ans
et de plus de 74 ans recevant de l’érythropoïétine sont
respectivement de 24,6 % et 23,9 %, identiques aux plus jeunes.
– On sait peu de chose de l’ostéodystrophie rénale chez les sujets âgés.
L’ostéodensitomérie met en évidence un déficit de minéralisation,
aussi bien sur l’os spongieux que l’os cortical, qui est corrélé à la
concentration de parathormone.
Il existe chez les personnes âgées
dialysées une hypoparathyroïdie en relation avec la diminution de
l’apport protéique et phosphorique dont la contribution, associée
aux autres anomalies liées à l’âge, a augmenté les risques
d’ostéodystrophie adynamique.
Cette hypoparathyroïdie serait
également un facteur de risque de fracture du col fémoral.
– Un suivi régulier de l’évolution par un néphrologue est hautement
souhaitable.
IH Khan en a établi l’efficacité sur la réduction de la
mortalité, mais cette surveillance n’abolit pas les hospitalisations
dans la période précédant la dialyse.
Dans une étude
rétrospective de 7 ans, DC Holland et al ont constaté que, sur une
cohorte de 362 patients suivis, une hospitalisation avant ou au
moment de la mise en dialyse fut nécessaire chez 208 patients
(57,5 %).
En analyse univariée, l’âge avancé, les comorbidités
cardiovasculaires, une néphropathie d’origine vasculaire, une
anémie et une insuffisance rénale sévère sont les prédicteurs
significatifs.
En analyse multivariée équilibrée pour la créatininémie,
l’âge, ainsi que la présence d’un angor, d’une artériopathie des
membres inférieurs, et de l’anémie, conservent leur significativité.
La mortalité au cours de cette période prédialytique est élevée,
puisque 10 % des patients de la cohorte décédèrent.
B - DÉMOGRAPHIE ET ÉTIOLOGIES DE L’IRCT
:
1- Épidémiologie
:
L’incidence et la prévalence de l’IRCT traitée par dialyse ou
transplantation ont considérablement augmenté au cours des 15
dernières années.
Ainsi, de 1983 à 1993, l’incidence s’est accrue de
80 % (de 44,3 à 79,6 par million d’habitants et par an), et la
prévalence s’est multipliée par un peu plus de deux (de 255 à 541
par million d’habitants et par an).
Cette croissance s’est développée
au profit des patients de plus de 65 ans ; au cours de la période
1982-1990, il s’est produit un triplement de l’effectif des plus de
65 ans.
Au Canada, entre 1982 et 1994, le nombre des 65-74 ans
dialysés a augmenté de 146 %, et celui des sujets de la tranche d’âge
supérieure de 241 %.
Aux États-Unis, l’incidence pour les 65-74 ans
était, en 1993, de 1 000 par million d’habitants et par an et de 680
par million d’habitants et par an pour les plus vieux.
Cinq ans plus
tard, elle était de 1 200 par million d’habitants et par an pour chaque
groupe. L’âge moyen est de 65 ans pour les entrants en dialyse.
Le
taux moyen d’accroissement des dialysés prévalents de 1993 à 1997
est de 4 % pour les 20-44 ans, de 6 % pour les 45-64, de 5 % pour les
65-74 et de 8 % au-delà.
En Europe, l’incidence des nouveaux dialysés est moins élevée,
allant de 72 par million d’habitants en Grèce à 163 par million
d’habitants en Allemagne.
En Île-de-France en 1998, l’incidence de l’IRCT a été de 108 par
million d’habitants et par an, et l’incidence des dialysés pour la
première fois (excluant les retours de greffe) de 100 par million
d’habitants et par an.
Elle était de 252 et de 441 par million
d’habitants et par an pour les hommes de 60-74 ans et les plus de
75 ans et, respectivement, de 139 et 163 pour les femmes.
L’observation des chiffres montre une augmentation de 5 % par an,
les plus de 65 ans formant la tranche d’âge ayant la plus forte
croissance.
En Île-de-France, la prévalence pour les plus de 60 ans était de 367
par million d’habitants en 1995 et de 436 par million d’habitants en
1999, de 788 et 980 par million d’habitants pour les plus vieux.
Dans la région Rhône-Alpes, la prévalence globale des dialysés a
augmenté de 6,1 % par an de 1993 à 1999, pour la population de
65-74 ans de 6,7 %, de 75 à 84 ans de 13,7 % et pour les plus de
85 ans de 11,4 %.
2- Étiologies
:
Les données relevées par l’USRDS permettent d’obtenir des
indications, valables seulement pour les États-Unis, sur la fréquence
des diverses étiologies de l’IRCT du sujet âgé.
La néphropathie survenant au cours du diabète rend
compte de 37, % (7,3 % pour le diabète type 1 et 30 % pour le type
2) des nouveaux dialysés de plus de 64 ans pour la période 1993-
1997, les néphropathies vasculaires de 35,4 % (31 % pour la néphroangiosclérose), les glomérulopathies de 8,8 % (7,6 % pour les
néphropathies glomérulaires primitives), les néphropathies
interstitielles de 4,4 %, les pathologies tumorales de 2,2 % et les
causes héréditaires de 1,6 %.
Les courbes évolutives établies par
ce même organisme démontrent l’incidence croissante parmi les
sujets de plus de 65 ans, du diabète et des causes vasculaires depuis
1988. On ne dispose pas pour la France d’une telle description des
causes.
C - RECOURS TARDIF AUX SOINS SPÉCIALISÉS
ET CONSÉQUENCES :
Une des caractéristiques de l’évolution de l’IRCT du sujet âgé est le
recours tardif au néphrologue ou au système de soins.
1- Causes du recours tardif
:
Le recours tardif peut être défini lorsque la première intervention
du néphrologue a lieu moins de 4 mois avant la mise en dialyse.
L’importance de ce phénomène varie de 14 à 57 % ; il peut même
atteindre des chiffres aussi élevés que 66 %.
Les personnes âgées
ayant de lourdes comorbidités ou, aux États-Unis, dénuées
d’assurance maladie, sont particulièrement représentées dans ce
groupe.
La réticence des médecins praticiens à faire appel au néphrologue
pour certains types de malades est la cause principale de l’absence
de consultation néphrologique préalable ; le sentiment de
l’impuissance du néphrologue participe de cette démarche.
Deux
enquêtes éclairent cette attitude.
Pour les médecins praticiens, un
âge avancé, la multiplicité et la gravité des comorbidités, en
particulier neuropsychiatriques, considérés comme des contreindications
à la dialyse, sont des obstacles à une consultation. Une
mauvaise interprétation de la valeur indicative de la créatininémie participe également à ce phénomène.
Les médecins anglo-saxons
adressent leurs malades au néphrologue lorsque la créatininémie se
situe entre 260 et 340 µmol/L, ce qui correspond à une clairance
comprise entre 33 et 25 mL/min pour un homme de 40 ans et pesant
70 kg, mais seulement de 23 et 18 mL/min pour un homme âgé de
70 ans de même corpulence.
Campbell apporte des explications
d’une autre nature : le retard à la prise en charge par le néphrologue
serait dû à la crainte du médecin praticien d’un jugement négatif de
celui-ci à son égard (43 % des cas), à une absence ou une mauvaise
communication entre les deux (37 %), à une absence de critères
spécifiques pour les malades en IRCT (31 %), à une sous-estimation
de la nécessité de la dialyse et à une ambivalence sur l’utilité de la
dialyse dans les groupes à haut risque.
2- Conséquences du recours tardif
:
Les conséquences de non-recours précoce se jugent sur l’état clinique
au moment de la dialyse, la morbidité, le choix de la technique
appropriée, la mortalité, la qualité de vie, la réhabilitation et l’impact
économique.
– L’état des malades non préalablement suivis et arrivant à la dialyse est
médiocre.
La créatininémie et la phosphorémie sont plus élevées,
l’albuminémie et la calcémie plus basses, l’acidose et l’anémie plus
profondes.
Ils reçoivent moins souvent de l’érythropoïétine, des
suppléments calciques et de vitamine D, des chélateurs du
phosphore, leur traitement antihypertenseur est généralement moins
lourd et leur pression artérielle moins bien contrôlée.
Contrairement
aux sujets précocement suivis, ils n’ont pas d’abord vasculaire
préparé.
– Les conditions de la mise en dialyse sont plus précaires, car celle-ci
s’opère souvent dans les circonstances de l’urgence : 57 % contre
40 % pour C Roubicek, 90 % pour P Jungers.
Les causes en
sont l’oedème aigu du poumon, la surcharge cardiovasculaire.
Un
abord vasculaire provisoire est alors plus souvent nécessaire que
dans les cas programmés : 73 % contre 29 %.
La durée d’hospitalisation initiale est prolongée : 30,24 contre
9,07 jours pour Campbell, 31 contre 7 jours pour Goransson.
Dans le travail de Roubicek, il n’est pas mis en
évidence de différence de durée d’hospitalisation dans les 3 mois
qui suivent la mise en dialyse : 21,1 jours pour le premier groupe et
21,5 pour le second.
– Lorsque la dialyse n’est pas préparée, les coûts de traitement sont
multipliés par cinq. Ismail relève également que même quand
la dialyse est débutée électivement, les coûts demeurent supérieurs
si le dialysé est pris en charge depuis moins de 3 mois, car même
quand le patient a consulté un néphrologue, la première dialyse
s’effectue en atmosphère d’urgence dans 23 % des cas, sur un
cathéter provisoire dans 29 % des cas, alors qu’un abord vasculaire
n’est disponible que dans 43 % à 53 % des cas.
– Une conséquence de la mise en dialyse sans préparation technique
ni psychologique ou sociale est que le choix de la méthode de dialyse
est obéré. Ainsi, le choix de la dialyse péritonéale est-il moins facile à
proposer et à mettre en oeuvre dans de telles circonstances, et une
transplantation préemptive est-elle impossible.
– La mortalité de ces dialysés « tardifs » est supérieure à celle des
patients suivis préalablement.
Dans une étude, la survie à 2 ans était
de 25 % dans le premier cas et de 59 % dans le second.
Dans un
second travail, la mortalité à 1 an était de 39 % pour les premiers et
6 % pour les seconds. Roubicek, en revanche, ne met pas en
évidence de différence de mortalité précoce ou tardive.
– Dans une revue extensive de la littérature, Obrador a mis en
revanche en évidence les bénéfices du recours précoce au néphrologue :
une décision maîtrisée du moment de la dialyse, un choix informé
de la modalité de celle-ci, des hospitalisations moins fréquentes et
moins longues, une réinsertion plus aisée et de meilleure qualité,
des coûts moins importants et, de façon générale, une moindre
mortalité.
3- Recommandations
:
L’absence de critères clairement définis pour le moment de la
collaboration néphrologique et celui de la mise en dialyse, n’aide
pas le médecin praticien dans sa programmation des soins à
l’insuffisant rénal.
L’agence nationale pour l’accréditation et
l’évaluation en santé (ANAES) établit les bénéfices attendus d’un
recours au néphrologue, mais elle n’explicite pas la valeur de créatininémie, ou mieux, de la clairance à laquelle il doit avoir lieu.
Le National Institute for Health, dans une recommandation
consensuelle (novembre 1993), estime que le contact néphrologique
doit idéalement avoir lieu lorsque la créatininémie est à 15 mg/L
pour une femme et à 20 mg/L pour un homme, ce qui équivaut à
une clairance de 60 mL/min.
Cette recommandation ne doit
pas faire oublier la nécessité d’une prévention primaire et la
nécessité d’un suivi plus précoce, pour les personnes ayant une
maladie rénale dont le déficit serait moindre, et pour les sujets à
risque de développer une maladie rénale (hypertendus, diabétiques).
Un consensus informel semble s’établir dans la communauté
francophone sur l’opportunité d’un recours au néphrologue pour
une clairance de 60 mL/min, quel que soit l’âge du patient.
Dialyse du sujet âgé
:
L’augmentation du nombre des dialysés âgés de plus de 65 ans est
la cause principale de la croissance de la population traitée par cette
technique.
L’évolution démographique (vieillissement de la
population, allongement de l’espérance de vie), la grande incidence
des maladies rénales, l’élargissement des critères de sélection
aboutissant à la prise en charge de patients de plus en plus âgés
autrefois récusés, la survie plus longue des dialysés et la greffe
rapide des patients jeunes en sont les principales raisons.
L’incidence
annuelle française, dans cette classe d’âge, est supérieure à 350 cas
par million d’habitants et par an, et plus de 1 000 dialysés sont
octogénaires.
A - MOMENT DU DÉBUT DE LA DIALYSE
:
Le moment optimal de la mise en dialyse ne se limite pas à une
valeur de clairance, car de multiples facteurs doivent être pris en
compte.
Les recommandations de l’ANAES indiquent qu’à partir
d’une clairance de 10 mL/min, la présence de manifestations
digestives, neurologiques, dermatologiques, hématologiques,
cardiovasculaires, d’une dénutrition et d’une altération de l’état
général impose le recours à l’épuration.
En tout état de cause, une
clairance inférieure à 5 mL/min est en soi une indication. Pour les
diabétiques, sans qu’il soit établi de recommandation officielle, le
consensus professionnel engage à débuter le traitement dès que la
clairance devient inférieure à 15 mL/min.
Il n’est pas prévu
d’indication spécifique pour les sujets âgés, mais une attention
particulière doit être portée aux troubles digestifs et nutritionnels, et
la dialyse doit intervenir dès leur apparition.
Aux États-Unis, la
dialyse est commencée à un moindre degré de dégradation rénale
chez les plus de 65 ans (75 mg/L de créatininémie et 7,7 mL/min de
clairance) et chez les plus de 75 ans (70 mg et 8 mL/min) que dans
la tranche d’âge inférieure (87 mg/L et 7,1 mL/min).
B - CONTRE-INDICATIONS DE LA DIALYSE
:
Elles ne sont pas clairement définies.
Le rapport de l’ANAES fait
état du peu d’intérêt d’offrir cette thérapeutique à des personnes
victimes d’une maladie cachectisante et rapidement mortelle, et aux
personnes démentes.
Il n’est pas prévu de contre-indication
spécifique pour les individus âgés.
La National Kidney Foundation
a émis des propositions à propos des situations où la mise en dialyse
est peu recommandée : décès attendu dans les 60 jours d’une
maladie non rénale, état végétatif persistant, démence sévère et
irréversible, situation de prolongation d’un processus morbide, où
le traitement n’apporte pas de bénéfice et augmente la pénibilité de
la fin de vie.
L’opinion et l’adhésion de la personne susceptible d’être dialysée
doivent être requises.
Une information précoce, des entretiens
répétés, la recherche d’une adaptation des modalités techniques au
souhait de la personne, permettent souvent de lever les réticences
que les personnes âgées peuvent exprimer à l’égard de cette
thérapeutique.
C - CHOIX DE LA TECHNIQUE ET DE LA STRUCTURE
:
Il n’existe pas de critère rigoureux établissant le choix de la méthode
d’épuration.
Les alternatives hémodialyse ou dialyse péritonéale,
traitement en centre ou à domicile (ou en autodialyse, substitut du
domicile,) imposent la prise en compte de nombreux critères :
– volonté informée du patient ;
– critères médicaux : statuts cardiovasculaire et neuropsychiatrique,
possibilités d’accès vasculaire ou péritonéal, facilité d’utilisation des
voies d’abord, tolérance physique et psychique de la technique de
dialyse, antécédents respiratoires ou digestifs (cicatrices,
diverticulose), adhésion au traitement ;
– conditions sociales : autonomie physique, entourage familial ou
social, possibilité de prise en charge à domicile ou en institution,
proximité du domicile.
Les données disponibles montrent une certaine similitude des choix
dans différents pays.
Le rapport de l’USRDS
aux États-Unis procure une vision claire de la distribution de
sujets âgés prévalents au cours de l’année 1997 selon l’une ou
l’autre technique.
L’hémodialyse
est très largement majoritaire, puisque 89 % des plus de 65 ans sont
pris en charge en centre d’hémodialyse, et moins de 1 % sont traités
à domicile.
La dialyse
péritonéale est utilisée dans 8 % des cas, dont un peu plus de la
moitié en dialyse ambulatoire.
Dans
le Piémont italien, où l’incidence des plus de 65 ans a plus que
doublé dans la période 1986-1996, l’hémodialyse est mise en oeuvre
chez 68 % d’entre eux, l’hémodiafiltration chez 8 % et la dialyse
péritonéale chez 21 %.
En Île-de-France, en janvier 1999,
l’hémodialyse en centre traitait 67 % des patients, la dialyse
autonome (dialyse à domicile ou autodialyse) 25 % des patients et la
dialyse péritonéale 8 % des patients.
La technique adoptée
(hémodialyse ou dialyse péritonéale) génère ses nécessités
spécifiques, ses complications particulières, son propre taux de
mortalité.
D - CONTRAINTES ET COMPLICATIONS
DE L’HÉMODIALYSE :
Pour l’hémodialysé, l’abord vasculaire, les complications liées à la
séance de dialyse, la dose de dialyse et la malnutrition prennent une
importance particulière chez la personne âgée.
1- Abord vasculaire
:
La qualité de l’abord vasculaire conditionne les performances de la
session de dialyse, la survenue de complications propres, le confort
et la qualité de vie.
DL Latos, aux États-Unis, établit que 14 % seulement des 173
dialysés de plus de 65 ans sont équipés d’une fistule artérioveineuse
(FAV), alors que 52 % ont une prothèse et 34 % un cathéter central.
Comparés à une population jeune, les plus de 65 ans ont moins de
fistule et plus de cathéter.
En Europe, il est probable que la
proportion des FAV préalablement réalisées est plus grande ; les
observations rétrospectives de JP Rougier et al témoignent de ce fait.
Dans une série de 81 dialysés d’âge supérieur à 60 ans, une FAV
directe a été créée dans 61,6 % des cas (dont 85 % étaient radiales) et
dans 38,4 % une interposition de greffon.
La durée d’utilisation de
la FAV a été de 25 mois moindre que dans un groupe plus jeune
(35 mois), le taux d’utilisation à 1 et 3 ans était de 58 % et 27 %.
Les
greffons étaient surtout construits à partir de saphène dont le taux
d’utilisation à 3 ans était de 57 % pour les autogreffes et de 12,5 %
pour les homogreffes.
Dans une autre cohorte de plus de 75 ans
suivie pendant 5 ans, 83 % eurent une FAV radiale et 13 % une FAV
humérale en première intention, dont la durée de fonctionnement
fut en moyenne de 17 mois sans reprise chirurgicale et de 21 mois
après reprise.
Ces résultats indiquent que, plus que chez tout autre, il est
nécessaire d’anticiper et d’organiser préalablement un abord
vasculaire de bonne qualité.
Les artères du sujet âgé urémique sont
profondément modifiées par l’athérosclérose ou l’artériosclérose et
le vieillissement aggravé par l’influence de l’insuffisance rénale.
Les
veines sont souvent fines, ont des parois et des lumières altérées par
des usages antérieurs. Bien qu’entre certaines mains expertes, le taux
de réussite puisse être tout à fait élevé, la classique FAV du poignet
est souvent difficile à réaliser et peut être remplacée par une FAV
humérale.
Dans la série de L Berardinelli, cette dernière était réalisée
dans 17 % des cas dans la période 1968-1978 et 51 % entre 1990 et
1997.
Le taux d’échec initial est supérieur à 20 % pour les FAV
radiales et seulement 1,8 % pour les humérales. Le bon
fonctionnement à 1 an est respectivement de 60 %, de 92 % et de
57 % et 78 %, à 3 ans.
La fréquence de la thrombose est faible.
Le
risque de ces accès est le syndrome de vol immédiat ou retardé
quand le réseau vasculaire d’aval est de mauvaise qualité, surtout
chez les diabétiques.
La possibilité d’une insuffisance cardiaque est
également à envisager.
Les prothèses vasculaires exposent à la même complication, et plus
fréquemment à l’infection.
Les cathéters veineux centraux offrent une solution efficace, rapide,
confortable au problème de l’accès vasculaire transitoire ou
permanent.
L’âge n’en modifie pas la durée de vie, qui est de 50 % à
3 ans dans les centres spécialisés.
La complication la plus fréquente
est l’infection, présente dans 10 % des cas, suivie de la thrombose et
du dysfonctionnement.
2- Modalités de l’hémodialyse chez le sujet âgé
:
Il n’existe pas de prescription spécifique pour la pratique de la
dialyse, malgré les particularités physiologiques et nutritionnelles
de la personne âgée.
Les recommandations promulguées par la
National Kidney Foundation (les K-Dialysis Outcomes Quality
Initiative [DOQI]) n’établissent pas de prescriptions différentes de
celles des adultes à savoir un Kt/V urée (valeur d’adéquation de
dialyse) au moins égal ou supérieur à 1,2 et un pourcentage
d’extraction de l’urée égal ou supérieur à 65 % pour trois séances
hebdomadaires.
La durée de chaque séance est établie à partir de
ces minima et du volume liquidien à soustraire.
Les débits
sanguins rapides et les soustractions liquidiennes brutales ne sont
pas bien tolérés.
3- Complications de la séance d’hémodialyse
:
Les complications de la séance sont devenues plus rares depuis que
les possibilités techniques des moniteurs de dialyse (contrôle
d’ultrafiltration, remplacement du tampon acétate par le
bicarbonate, sodium modifiable, surveillance continue de la tension
artérielle et mesure répétée du volume sanguin) autorisent la
modulation de la soustraction liquidienne et la modulation de
l’osmolarité du liquide de dialyse.
* Hypotension artérielle
:
Elle se manifeste dans 30 % à 40 % des séances.
Elle ne serait
cependant pas plus fréquente que chez les plus jeunes. P Urena a
réalisé récemment une revue complète et documentée du sujet.
La soustraction du volume circulant non compensée par le transfert
de liquide interstitiel, et l’adaptation du débit cardiaque et des
résistances vasculaires sont en cause.
La diminution de la réserve
cardiaque et la dysautonomie du système nerveux sympathique du sujet âgé créent
les conditions favorables à la survenue et à la gravité de ces
accidents. Un déséquilibre des médiateurs vasoconstricteurs et
vasodilatateurs est aussi constaté.
Perte de
connaissance, convulsion, accident vasculaire cérébral, ischémie
coronarienne, infarctus du myocarde, ischémie mésentérique et/ou
thrombose de l’accès vasculaire en sont les conséquences possibles.
L’accident est
souvent brutal.
L’hypotension artérielle en cours de dialyse peut donner
lieu à des hypotensions immédiatement après la séance, et entre les
séances.
La conséquence peut en être grave car la morbimortalité
cardiovasculaire des dialysés semble suivre une courbe en « J » ou
en « U », tout au moins en ce qui concerne la pression artérielle
systolique.
Les aménagements techniques récents (profil d’ultrafiltration et
mesure du volume sanguin) ont permis de réduire l’incidence de
l’hypotension symptomatique à 5,7 %, comparée à 10,6 % en leur
absence.
* Troubles du rythme cardiaque
:
L’âge, les modifications structurelles du coeur, en relation avec l’HTA
et l’IRC, expliquent la fréquence de la fibrillation auriculaire
paroxystique en cours de séance.
Ces épisodes seraient présents chez
20 % des patients.
Les anomalies rythmiques ventriculaires se
manifestent surtout lorsque la concentration en potassium du bain
est faible (2 mmol/L), que le tampon est de l’acétate, et la membrane
de dialyse composée de cuprophane.
L’hypertrophie ventriculaire
gauche et un traitement par digitalique en influencent positivement
l’incidence.
Les extrasystoles ventriculaires peuvent être la
complication et la manifestation clinique d’une ischémie
silencieuse.
* Complications coronariennes
:
La séance de dialyse offre des circonstances favorables à l’ischémie
myocardique.
La présence d’une hypoxie, l’augmentation de
l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène et de la contractilité
myocardique, l’accélération du rythme, la fréquence des arythmies,
la diminution de la pression artérielle produisent une diminution
de l’apport coronarien d’oxygène, en période de besoin myocardique
accru.
Zuber et al ont d’ailleurs noté la présence d’un sous-décalage
de ST chez un quart de leur dialysés, apparaissant
préférentiellement au cours de la dernière heure du traitement par
dialyse.
Chez 61 dialysés d’un âge moyen de 61 ans, Nakamura
et al ont enregistré un électrocardiogramme (ECG) au cours d’une
séance de dialyse et ont noté une augmentation de la dépression du
segment ST chez 18 d’entre eux.
Dans ce groupe, la fréquence d’une
atteinte coronarienne ischémique était plus élevée que dans le
groupe sans anomalie ECG en dialyse, et l’ischémie perdialytique,
silencieuse ou exprimée cliniquement, était prédictive de la
survenue ultérieure d’un accident cardiaque.
* Complications hématologiques
:
L’anticoagulation est responsable d’une aggravation de l’anémie, car
les troubles digestifs (oesophagite avec ou sans reflux, gastrite, colite
diverticulaire sigmoïdienne, angiodysplasie) sont souvent présents
chez le sujet âgé.
Des traitements anticoagulants ou antiagrégants
sont également prescrits pour les affections cardiovasculaires et la
préservation de la fonctionnalité de l’abord vasculaire.
4- Complications chroniques de l’hémodialyse
:
Les complications chroniques sont dominées par les problèmes
cardiovasculaires, la dénutrition et les infections, qui rendent compte
d’un peu plus de la moitié des hospitalisations.
* Complications cardiovasculaires
:
La consultation du registre de l’USRDS apprend que la cardiopathie
ischémique est présente chez 32,8 % des néodialysés de plus de
65 ans et chez 35,6 % pour les plus de 75 ans. Dans une série
d’octogénaires étudiée par PL Neves, les maladies cardiovasculaires
étaient présentes chez 74 % de cette population.
Les complications
cardiovasculaires sont très souvent à l’origine des hospitalisations
des dialysés âgés.
Les maladies cardiaques voient leur incidence et
leur prévalence augmenter au fil des ans dans la population dialysée
générale.
L’état urémique conférant une accentuation des facteurs
responsables de cet état, il est compréhensible que la pathologie
cardiovasculaire pèse lourd dans l’existence des dialysés âgés.
La
prévalence importante du diabète et des néphropathies vasculaires
dans la population âgée dialysée accroît encore le risque de cette
pathologie.
Les accidents ischémiques ont une incidence
particulièrement élevée dans la tranche d’âge de 65-74 ans.
Au cours
de la période de 1977-1995 et à partir du 90e jour de dialyse, la
mortalité d’origine cardiaque était évaluée, aux États-Unis, à
29,7/100 patients/année pour les moins de 65 ans et de 58,2/100
patients/année pour les plus âgés.
L’âge et le diabète en étaient le
terrain habituel.
* Complications nutritionnelles
:
La dénutrition, plus habituelle que chez les jeunes, est présente chez
la moitié des dialysés âgés selon B Cianciaruso.
Les circonstances
sont propices à son développement : altération de l’appétit allant
jusqu’à l’anorexie, diminution physiologique des réserves
protéiques, prise de nombreux médicaments, isolement social,
situation financière précaire, état dépressif, hospitalisations répétées,
infections, insuffisance cardiaque.
Le régime alimentaire devrait
comporter au moins 35 kcal/kg/j, dont 1,25 g/kg/j de protéines (au
moins 60 % de haute valeur biologique), apport de vitamines
hydrosolubles dont 10 mg de pyridoxine, acide folique 1 mg/j. Afin
d’éviter son installation, un suivi par une diététicienne est
souhaitable.
L’évaluation de la dénutrition est loin d’être aisée, et doit faire appel
à plusieurs types de paramètres éprouvés.
Les signes en sont la
diminution du poids sec, un taux de catabolisme protéique inférieur
à 0,8 g/kg/j, une diminution de l’urée et de la créatinine prédialytique, une albuminémie inférieure à 40 g/L.
L’hypoalbuminémie n’est cependant pas toujours en relation avec
une dénutrition, car les phénomènes inflammatoires provoquent
également la diminution de la synthèse hépatique de l’albumine.
Chez les patients à haut risque, donc chez les sujets âgés comme
chez les jeunes, une hypoalbuminémie inférieure ou égale à 35 g/L
définit un pronostic médiocre à moyen terme.
Les K-DOQI ne prévoient pas de modifications aux
recommandations générales concernant l’apport en protéines
(1,2 g/kg/j) mais, pour les personnes sédentaires âgées de plus de
60 ans, envisagent de réduire la ration calorique à
30-35 kcal/kg/j.
La dénutrition protéinocalorique, évaluée par un ensemble de
paramètres, est corrélée à une morbidité plus élevée.
Pour P Chauveau, dans une étude prospective multicentrique, la
dénutrition et l’âge sont d’importants prédicteurs de la mortalité.
L’intérêt d’une alimentation parentérale perdialytique n’est pas
clairement prouvé. Une étude de K Hiroshige, sur une cohorte de
dix dialysés de plus de 70 ans, a montré un bénéfice nutritionnel de
l’alimentation parentérale perdialytique poursuivie 1 an ; le bénéfice
sur la morbimortalité à moyen terme n’est pas évalué.
* Autres complications de l’hémodialyse
– Les épisodes infectieux, liés ou non à l’appareillage technique, sont
une complication fréquente de la situation de dialysé.
– Les états dépressifs, les difficultés liées à la solitude, la perte
d’autonomie ou à l’absence de support social sont également
rencontrés.
– L’installation de l’amylose à bêta-2-microglobuline ou amylose du
dialysé est reliée à l’âge du dialysé, sa durée de la vie en dialyse et
le type de membrane de dialyse utilisé.
Les cancers ne sont pas
plus fréquents que dans la population générale.
E - CONTRAINTES ET COMPLICATIONS
DE LA DIALYSE PÉRITONÉALE :
La dialyse péritonéale dans ses différentes variétés (dialyse
péritonéale ambulatoire continue ou dialyse péritonéale
automatisée) est considérée comme une alternative de bonne qualité
pour les patients âgés.
En France, 28 % des dialysés de plus de
75 ans seraient traités par cette méthode.
Aux États-Unis et dans
la tranche d’âge des plus de 65 ans, le pourcentage est seulement de
l’ordre de 7,7 %.
Le maintien à domicile avec ou sans aide,
possible avec cette méthode, lui confère un avantage important.
Elle
peut être également mise en oeuvre dans des structures de
réadaptation avec des résultats tout à fait excellents.
La survie en dialyse péritonéale comparée à l’hémodialyse fait l’objet
d’une controverse.
Il n’existe pas de travaux spécifiques pour le
groupe des sujets âgés.
Dans une importante étude rétrospective
d’une durée de 12 ans, MM Avram constate que les hémodialysés
ont un risque de mortalité moindre de 44 % que les dialysés
péritonéaux.
En analyse multivariée, l’âge est un faible risque
indépendant de mortalité, comparé au diabète et à la malnutrition
appréciée sur l’hypoalbuminémie.
D’autres études ne démontrent
pas de différence de mortalité, mais leur durée est moindre.
Les besoins d’épuration sont souvent modérés à cet âge, ce qui
permet d’alléger la technique en obtenant néanmoins une dialyse de
bonne qualité, mais les K-DOQI recommandent, comme pour les
adultes, une dose de dialyse mesurée par le KT/V urée de 2 et une
clairance de créatinine totale de 60 L/par semaine/1,73 m2.
Les complications spécifiques de la technique ne diffèrent guère de
celles du sujet jeune, mais elles revêtent une gravité plus grande du
fait du terrain.
Les infections du liquide péritonéal ne sont pas plus
fréquentes chez les sujets âgés.
Elles sont plus souvent la cause du
décès ou de l’abandon de la méthode.
En institution, la fréquence
des péritonites est plus grande, sans que l’âge paraisse y jouer un
rôle favorisant.
La dénutrition est souvent citée comme une
complication spécifique.
Plus que de la méthode elle-même, la
dénutrition dépend de l’état prédialytique, des comorbidités, des
infections, de l’état psychologique.
Elle représente cependant un
risque vital.
Les recommandations diététiques en matière d’apport
protéique demeurent de 1,2 à 1,3 g/kg/j, identiques à celles des
adultes.
En revanche, la ration calorique pourrait être abaissée à 30
à 35 kcal/kg/j.
La cause la plus fréquente de la mort est d’origine cardiovasculaire,
et en cela ne se différencie guère du sort des patients en
hémodialyse.
F - HOSPITALISATIONS INTERCURRENTES.
ÉVOLUTION À LONG TERME ET QUALITÉ DE VIE
:
1- Hospitalisations intercurrentes
:
Elles émaillent l’évolution des dialysés, nuisent à la qualité de leur
vie, augmentent le coût du traitement, et sont bien évidemment des
éléments pronostiques fâcheux.
Le nombre et la durée des hospitalisations intercurrentes
s’accroissent avec l’âge : environ 30 % des plus 70 ans sont
hospitalisés au moins une fois par an. Dans l’étude de Rocco et al, la
médiane pour les sujets de 60 à 69 ans était 9 jours d’hospitalisation
par an et par patient à risque, 11 jours pour ceux de 70 à 79 ans et
13,5 jours pour ceux de plus de 80 ans, opposés à 7,7 jours pour
ceux de 50 à 59 ans.
Pourtant, l’âge n’apparaît pas comme un facteur
déterminant des hospitalisations, à la différence de la dénutrition
marquée par l’hypoalbuminémie, du diabète, de la présence d’une
artériopathie, d’un angor ou d’une insuffisance cardiaque
congestive, et de la diminution d’activité : toutes circonstances que
l’on rencontre il est vrai fréquemment chez les sujets plus âgés.
Cette expérience est partagée par Becker et al qui, à l’occasion d’une
étude rétrospective de 178 dialysés âgés de 56 ± 15,4 ans, montrent
que la maladie cardiovasculaire, le diabète, l’hypoalbuminémie,
l’anémie sont significativement corrélés à la fréquence des
hospitalisations, tandis que le diabète, l’artériopathie et
l’hypoalbuminémie seuls sont liés à leur durée ; l’âge n’apparaît pas
comme un facteur de risque particulier.
Dans la population
d’octogénaires hémodialysés de Neves, les problèmes d’abords
vasculaires justifiaient 52 % des hospitalisations, les causes gastrointestinales
17 %, les causes vasculaires 13 % et les phénomènes
infectieux 12 %.
2- Résultats de la dialyse du sujet âgé
:
Les résultats de la dialyse du sujet âgé peuvent être appréciés sur la
mortalité mais aussi, de façon plus nuancée, sur l’amélioration, la
stabilité ou l’aggravation de leur état clinique.
Une équipe d’auteurs
néerlandais a apprécié ce devenir sur un ensemble de critères
incluant certes le décès, mais aussi une évaluation chiffrée des
hospitalisations et de leur durée, de la concentration en albumine
ou de la valeur d’un score de dénutrition, d’une évaluation
quantitative des possibilités physiques et psychiques et de la qualité
de vie.
Bien que les dialysés de plus de 65 ans aient une évolution
plus défavorable que les plus jeunes, les facteurs déterminant une
évolution défavorable sont l’existence en début de dialyse de comorbidités, d’une hypoalbuminémie inférieure à 30 g/L, d’une
diminution des capacités physiques et psychiques supérieure à deux
déviations standards par rapport à la population générale et d’une
clairance résiduelle inférieure à 2,5 mL/min. Pour les dialysés
péritonéaux, une pression artérielle moyenne supérieure à
107 mmHg est aussi de mauvais pronostic.
3- Qualité de vie du sujet âgé dialysé
:
Les améliorations des techniques de dialyse, la présence d’abords
vasculaires fiables, le traitement efficace de l’anémie par
l’érythropoïétine participent à l’amélioration du confort du dialysé
et de sa qualité de vie.
Dans l’étude prospective de Lamping et al,
l’appréciation des performances et de la qualité de vie psychique
par les dialysés âgés n’était pas différente de celle des personnes de
même âge en bonne santé.
En revanche, les capacités physiques
étaient éprouvées comme réduites.
G - MORTALITÉ EN DIALYSE
:
Le bon sens laisse présager que la mortalité des dialysés âgés est
supérieure à celle des plus jeunes, mais les causes de mort sont en
revanche particulières, et spécifiquement marquées par l’arrêt de la
dialyse.
1- Chiffres de la mortalité
:
Le registre 1999 de l’USRDS établit la mortalité, à partir du 90e jour
de dialyse, pour les patients incidents en 1996 à 19,8 %, comparée à
22,8 % 10 ans plus tôt.
La mortalité de la première année est de
29,8 % pour les sexagénaires et de 46/100 patients/an pour les
septuagénaires.
Ces chiffres marquent un progrès car, 10 ans plus
tôt, ils étaient respectivement de 40,2 et 52,8/100 patients/an.
La
diminution de la mortalité est donc surtout notable pour la tranche
65-74 ans.
Ces données sont établies à compter du 90e jour de dialyse, et la mortalité au cours de cette période est très élevée :
pour la tranche d’âge 75-80, elle serait de 18 %, et de 25 % au-dessus
de 80 ans.
Comparée à l’espérance de vie de la population
générale des individus entre 65-69 ans qui est de 13 ans, elle est
diminuée de deux tiers (3,8 ans) pour les dialysés du même âge.
En Europe, une étude prospective sur 7 ans (1985-1991) dans sept
centres de cinq pays a permis de recruter 1 407 patients dont 42,4 %
avaient un risque faible (< 70 ans, sans comorbidité), 33 % un risque
médian (âge entre 70 et 80 ans ou une comorbidité), et 24,7 % un
risque élevé (âge > 80 ans ou deux comorbidités).
La mortalité dans
les 3 premiers mois fut de 8,7 % chez des patients dont l’âge allait
de 63 à 69 ans, dont un tiers avait un risque médian et deux tiers un
risque élevé.
La moyenne de la survie à 2 ans est de 81,5 %, la
mortalité portant à nouveau sur les groupes à risque moyen et
surtout élevé.
L’analyse des facteurs de mortalité montre que le
risque élevé comporte une surmortalité multipliée par 6,23 et le
risque moyen par 3,85. Le risque lié à l’âge est de 1,031 pour chaque
année.
Cette dernière valeur est proche de celle qui lui est
attribuée dans une méta-analyse de Johnson, où l’augmentation de
1 année d’âge entraîne un risque relatif de 1,029, le diabète 1,91, une
cardiopathie 1,59 et une artériopathie 1,58.
Une étude
rétrospective sur une période de 4 ans par une équipe anglaise
révèle que la mortalité des plus de 75 ans est importante, puisque la
survie à 1 an est de 53,5 % et à 5 ans de 2,4 %, celle des sexagénaires
est de 72,6 % et 18,8 %, tandis que celle des moins de 65 ans est
évaluée à 90,6 % et 61,4 %.
L’analyse prospective publiée
récemment par Lamping et al, qui n’étudie les malades qu’après les
90 premiers jours d’hémodialyse, est plus optimiste que la
précédente, puisque la survie globale de cette cohorte de
septuagénaires est de 71 % à 1 an.
Plus précisément, elle est observée
à 80 %, 69 % et 54 % pour les tranches d’âge 70-74, 74-79 et 80 et
plus.
La mortalité est d’autant plus élevée que le nombre de comorbidités est grand : la survie est de 88 %, 71 % et 64 % pour
l’absence de comorbidité, une, deux et plus.
Un âge supérieur à 80
ans confère un risque relatif de 2,79 (1,28-6,93), et une artériopathie
périphérique un risque de 2,83 (1,29-6,17).
Le registre de l’association européenne (ERA-EDTA Registry)
montre, dans une étude prospective de 1990 à 1992, que la mortalité
dans les 90 premiers jours de dialyse frappe surtout les plus de 65
ans, avec un pourcentage de 59,1 % des décès dans cette période et
de 52,7 % dans la période ultérieure.
Les patients qui meurent au
cours des 90 premiers jours de dialyse sont plus vieux que ceux qui
meurent après (64,1 + 14 contre 63,1 + 14,3 ans ; p < 0,001).
La survie
à 2 ans pour cette tranche d’âge est de 67,1 % si les 90 premiers
jours sont inclus, et de 72,6 % s’ils ne sont pas pris en compte.
La
même source met en évidence une amélioration de la survie pour
tous les groupes d’âge, et donc pour les plus vieux, lorsque sont
comparées les périodes 1975-1979 et 1985-1989. Pour cette dernière
et la tranche d’âge la plus vieille, une survie de 53 % à 5 ans en
hémodialyse et de 44 % en dialyse péritonéale est observée.
Des
observations récentes de UN Peri font également état d’une
amélioration de la survie des dialysés très âgés (octogénaires) au
cours de la dernière décennie, puisque la survie est évaluée à 82,6 %,
64 % et 19,6 % pour les première, seconde et cinquième années de
traitement ; la médiane est de 29 mois.
Plus particulièrement, pour
les patients traités depuis janvier 1995, la survie à 2 ans a augmenté
à 76,9 ± 8,4 %.
Il faut relever que la cohorte étudiée n’était pas
particulièrement sélectionnée pour des patients à risque faible,
puisqu’elle comportait 22 % de diabétiques.
La comparaison de cette
série à celles précédemment publiées montre une amélioration
considérable du pronostic, puisqu’en 1979 la survie médiane était
de 13,8 mois, en 1994 de 19,6 mois, et en 1996 de 25,9 mois.
Le rôle de l’âge et des comorbidités est aussi mis en évidence par
Keane, à partir d’un effectif considérable.
Un âge supérieur à 75 ans
comporte un risque relatif de 1,53 par rapport à la tranche d’âge
61-75, celui d’un score de Karnovsky inférieur à 60 est de 1,93,
l’artériopathie des membres inférieurs de 1,72 et proche de celui
d’une cardiopathie, d’une insuffisance respiratoire et d’un cancer.
RN Foley et PS Parfrey avaient en 1994 étudié les déterminants de
la mortalité au cours des 90 premiers jours et observaient que les
comorbidités jouaient un rôle déterminant plus important que
l’âge.
En dialyse péritonéale, la courbe actuarielle établie par F Mignon et
al montre pour une population à faible risque, un pourcentage de
90%, à 2 ans de 60 % et à 3 de 50%. Pour une population à risque
plus élevé, les pourcentages sont respectivement de 65 % et 35 %.
Dans une population d’octogénaires, un travail de NB Dimkovic et
al fait état de la survie de la moitié des dialysés à 2 ans, et d’une
survie technique de 91,5 % à 1 an et de 81,4 % à 2 ans.
Cette étude
met l’accent sur le fait que les complications ne sont pas fréquentes
et graves tant que l’état d’autonomie des patients ne nécessite pas le
recours à une institution.
L’ensemble de ces travaux souligne la gravité de l’état
d’hémodialysé, mais indique également que l’âge chronologique a
moins de poids (statistique) que les comorbidités qui
l’accompagnent.
Les observations de l’USRDS mettent cependant en
évidence une amélioration constante du taux de survie pour toutes
les tranches d’âge, y compris les plus élevées. M Salomone avait
suggéré cette tendance qu’il attribuait à l’amélioration des
techniques de dialyse et de l’environnement thérapeutique
(érythropoïétine, nutrition).
2- Causes du décès
:
Selon Munshi et al, les affections cardiovasculaires rendent compte
de 24 % des décès, les infections de 22 %, les cancers de 7 %, les
accidents vasculaires cérébraux de 5 %.
Cependant, la cause
prédominante au-delà de 75 ans est l’arrêt de la dialyse, qui est
responsable dans cette population de 38 % des décès.
Le registre
d’USRDS note, pour les plus de 65 ans, l’arrêt cardiaque de cause
inconnue comme cause première responsable de 6,95 décès/100
patients/an, puis viennent ensuite les causes cardiaques diverses
(infarctus du myocarde, arythmie, cardiomyopathie, insuffisance
cardiaque) pour 8,29 %, les septicémies pour 3,47 %, les maladies
cérébrales et les infections pour 2 % chacune.
Le pourcentage des
causes est très proche quelle que soit la technique de dialyse,
hémodialyse ou dialyse péritonéale, mais l’infection est plus
fréquente en dialyse péritonéale.
Le traitement a préalablement
été interrompu pour un dialysé décédé sur cinq, le pourcentage
d’interruption de dialyse est évalué à 4,1/100 dialysés/an.
La
fréquence d’interruption pour les plus âgés est de 11,5/100/an, avec
une prévalence particulière chez les dialysés de race blanche (8,9 %
par an) comparés aux sujets américains d’origine africaine (3,6 %
an).
En Europe, les causes de la mort au cours des 90 premiers jours de
dialyse sont cardiaques pour 41,2 %, vasculaires pour 12,4 %, refus
ou retrait de dialyse pour 5 % et d’origine cancéreuse pour 5 % ;
au-delà de cette période, les proportions sont respectivement de
38,6 % (p < 0,009) (p < 0,00025), 15 %, 4,4 % et 6,5 %.
Les étiologies
de la maladie initiale ne sont pas indépendantes du taux de
mortalité, puisque la maladie rénovasculaire et le diabète, pour les
deux périodes envisagées, comptent les plus grands pourcentages et
nombre absolu de décès.
Les insuffisances cardiaques valvulaires
et hypertensives sont plus fréquentes initialement, tandis que
l’hyperkaliémie, les accidents vasculaires cérébraux et les infarctus
mésentériques le sont dans la seconde période.
Eu égard à leur grande fréquence chez les sujets âgés, et aux
problèmes sociaux et éthiques qu’ils soulèvent, l’abstention ou le
refus et l’interruption de la dialyse nécessitent d’être traités sous
une rubrique particulière.
H - ABSTENTION ET INTERRUPTION DE LA DIALYSE
:
Face aux registres du traitement par dialyse ou transplantation, le
panorama épidémiologique de l’insuffisance rénale chronique est
bien vague, et ne permet pas de mesurer l’ampleur du phénomène
de l’abstention de mise en dialyse.
En termes crus, nous ignorons
combien et pourquoi des patients meurent d’urémie alors qu’ils
pourraient être traités et survivre.
* Abstention de dialyse
Une étude prospective menée par Sekkarie et al a tenté de mieux
cerner la question.
Ils ont obtenu d’un tiers des médecins praticiens
et d’une grande majorité des néphrologues de l’ouest de la Virginie
qu’ils renseignent durant une année une fiche pour chaque patient
auquel ils n’envisageaient pas de proposer une dialyse.
Les
néphrologues envisagèrent l’abstention dans 7 % des cas (25/357),
et les médecins praticiens dans 22 % des cas (42/193).
Un quart de
ces derniers prirent leur décision sans consultation spécialisée et
l’âge est cité comme motif dans 60 % des situations, associé à une
maladie terminale (cardiaque, pulmonaire ou hépatique) dans 70 %,
un cancer terminal chez 45 %.
Une démence était présente chez 35 %.
Le refus fut manifesté par le patient lui-même dans 60 % des cas et
celui de la famille dans 25 %.
Ces patients avaient un âge moyen
72 ans (42-90), et bien qu’ils fussent généralement bien entourés par
leur famille (80 %), ils vivaient majoritairement en résidence (84 %).
Une majorité d’entre eux n’avait pas la capacité de prendre la
décision (56 %).
Les auteurs interprètent le faible taux de refus
par les néphrologues par le fait qu’il est recommandé de proposer
un essai de dialyse, et qu’il est généralement difficile de déterminer
au cas par cas qui bénéficiera ou ne bénéficiera pas de la dialyse.
Une étude anglaise plus ancienne avait déjà montré que les
néphrologues écartaient moins de patients que les médecins
praticiens.
Une explication possible de cette différence est que les
médecins traitants jouent le rôle d’un premier filtre à l’accession à la
dialyse, écartant des malades en très mauvais état.
Une collaboration
entre médecins et néphrologues serait souhaitable, dans ce domaine
où l’enjeu est vital.
* Interruption de dialyse
:
Dans la même étude, les auteurs ont quantifié les retraits de dialyse
et investigué leurs causes.
Un arrêt de dialyse eut lieu dans 60 cas
sur 822 (7 %).
Il s’agissait de personnes âgées (69,8 ans) résidant
dans un tiers des cas en résidence médicalisée.
Les principaux motifs
d’arrêt furent : une qualité de vie inacceptable dénoncée par le
patient lui-même (41 %), une complication aiguë (21 %), une
démence (12 %).
La capacité à prendre une décision était avérée chez
36 patients, dont 42 % furent d’ailleurs à l’instigation de la
discussion de l’arrêt, en association avec le médecin dans 14 %.
La
famille intervint seule ou avec le médecin dans 30 % des cas, et le
médecin seul dans 11 %.
Chez les 21 personnes hors d’état de
prendre une décision, la procédure de réflexion fut initiée par le
médecin dans 62 % des cas, par la famille dans 10 % et les deux
associés dans 24 %, dans 5 % des cas les infirmières intervinrent.
La
moitié des patients dont la dialyse fut interrompue avaient rédigé
leurs directives anticipées ; elles furent jugées utiles par 63 % des
médecins, en particulier pour les personnes qui n’étaient plus en
mesure de participer à la discussion.
Sur ce point, il n’existe pas dans les pays francophones, ni dans la
communauté néphrologique européenne, de texte consensuel
élaborant une procédure et une attitude fondées cliniquement, et
répondant aux exigences sociales et éthiques.
Les néphrologues
nord-américains réunis dans la Renal Physicians Association et
l’American Society of Nephrology ont réfléchi et rédigé des
recommandations destinées à préserver la qualité des soins en fin
de vie.
Dans ce texte, le retrait de dialyse est acceptable
(recommandation 6) lorsqu’un patient, en pleine capacité de prendre
sa décision et pleinement informé, dans un choix volontaire, refuse
la dialyse ou demande qu’elle soit interrompue, lorsque les patients
qui ne possèdent plus leur capacité de décision avaient au préalable
indiqué un refus de dialyse dans une directive anticipée orale ou
écrite, ou dont un ou des représentants légaux préalablement et
légalement désignés demandent que la dialyse soit interrompue.
Un
arrêt de dialyse peut légitimement être envisagé en cas d’altération
neurologique irréversible et d’une telle profondeur qu’ont disparu
les signes d’activité intellectuelle, de sentiment, de comportement
approprié et de la conscience de soi-même et de son environnement.
Ces recommandations sont entourées de garanties médicales et
d’aide psychologique, destinées à assurer une pleine liberté et une
pleine capacité à la personne en dialyse à déterminer son avenir.
Lorsque la décision est prise, une procédure de soins palliatifs est
mise en oeuvre, comportant traitement symptomatique et
analgésique, attention aux préoccupations psychosociales et
spirituelles et identification de ce qui importe le plus à la personne
mourante.
Transplantation rénale
et personne âgée :
La transplantation rénale est le traitement de choix de l’IRCT.
Les
sujets âgés de plus de 60 ans, il y a peu, étaient habituellement
récusés en raison d’une mortalité et d’une morbidité accrues
attribuées au traitement immunosuppresseur.
Les nouveaux
protocoles d’immunosuppression ont permis d’élargir les
indications, et l’âge en tant que tel n’est plus un obstacle à la greffe
rénale.
En 1998, selon le rapport de l’établissement français des
greffes (EFG), le nombre des inscrits de plus de 56 ans était de
491 personnes (soit 21,8 % de la liste), dont 83 de plus de 65 ans
(3,7 % des inscrits), indiquant qu’un nombre très faible de personnes
âgées dialysées est inscrit sur la liste d’attente.
Aux États-Unis,
7 % des urémiques de plus de 65 ans furent transplantés dans la
période 1993-1997, représentant 8,5 % de la population greffée à la
même époque.
Un second aspect de la question concerne
l’utilisation de reins aux fins de greffe de personnes âgées en état de
mort cérébrale.
A - SURVIE DU SUJET ÂGÉ TRANSPLANTÉ
:
Dans les séries des années 1975 à 1980, la survie du patient greffé
âgé de plus de 60 ans à 1 an variait entre 57 % et 75 %.
Un progrès
notable a suivi l’utilisation de la ciclosporine, mais la différence de
durée de survie par rapport aux receveurs adultes et en leur faveur
demeure notable.
La survie des greffés de plus de 60 ans, recensée
par l’EFG de 1985 à 1995 (1 350 receveurs), était de 91 % à 1 an, 80 %
à 5 ans, 71 % à 8 ans et 56 % à 10 ans ; chez les 16-60 ans, elle était
respectivement de 96 %, 95 %, 92 %, 92 %.
Les résultats de la
Collaborative Transplant Study pour le même type de population
témoignent en fait de grandes variations selon les équipes, car la
survie à 1 an varie de 55 à 100 % et à 5 ans de 40 à 91 %.
Dans
une même équipe ayant transplanté un grand nombre d’individus
âgés, le constat d’une survie plus longue chez les plus jeunes est
confirmé : 1 an après greffe, le taux de survie est de 95 % chez les
moins de 60 ans et de 92 % pour les plus vieux.
À 10 ans, il est
respectivement de 68 % et 46 % (p < 0,001).
La survie des greffés, comparée à celle des dialysés, permet de
constater que le risque de décès diminue de 47 % en faveur des
premiers, diabétiques ou non diabétiques. Le retour en dialyse des
greffés est plus périlleux lorsqu’ils sont âgés.
Une étude-cas
témoin de D Schaubel apporte la démonstration que la
transplantation fournit une survie plus prolongée que la dialyse
lorsque les patients sont appariés : le pourcentage de survie à 5 ans
est de 81 % pour la greffe et de 51 % pour la dialyse.
Les causes de décès sont identiques en nature, mais différentes en
fréquence de celles des adultes.
Au cours de la première année de
greffe, les infections sont responsables de 40,1 % des décès et les
maladies cardiovasculaires de 32 %, mais, tandis que les premières
décroissent les années suivantes (environ 14 %), les secondes
augmentent (environ 40 %).
Aucune intervention thérapeutique n’est
actuellement parvenue à réduire la mortalité cardiovasculaire en
post-transplantation chez les sujets âgés.
Des mesures sont
cependant couramment utilisées, comme la modification des facteurs
de risque cardiovasculaire, la prescription de médicaments hypolipémiants, le contrôle de la pression artérielle, l’invitation à
interrompre le tabagisme et à la pratique régulière d’une activité
physique.
Les étiologies cancéreuses provoquent 7,4 % des décès
dans la première année, puis 20 % ultérieurement.
Les facteurs
prédictifs de la mortalité pour ces greffés âgés sont la présence d’une
tumeur maligne (RR : 5), une maladie cardiovasculaire préalable à la greffe (RR : 2,2) et surtout un tabagisme (RR : 7,9).
Un âge
supérieur à 70 ans est à la limite de la significativité (RR : 2,7 ;
p < 0,055), ainsi que l’âge du donneur supérieur à 50 ans (RR : 1,9 ;
p < 0,056).
B - SURVIE DU GREFFON RÉNAL CHEZ LE SUJET ÂGÉ
:
Le devenir du greffon, les complications intercurrentes et le choix
du traitement offrent des particularités chez les sujets âgés.
1- Données statistiques et facteurs de risque
:
La survie du greffon du patient âgé a augmenté depuis l’utilisation
de la ciclosporine.
Dans la littérature, revue par Jassal en 1997,
un greffon fonctionnel à 1 an est constaté dans 49 % à 94 % des cas
et à 5 ans dans 45 % à 74 %.
Le rapport 1998 de l’EFG indique
qu’après censure pour les décès, la survie du greffon pour les plus
de 60 ans est de 88,4 % à 1 an, de 82 % à 5 ans et de 74 % à 10 ans,
les pourcentages pour les 16-60 ans s’établissant respectivement à
88 %, 76 % et 63 %.
Le constat de SE Doyle est proche, après censure
pour les décès, la survie du greffon est équivalente chez les sujets
âgés et chez les jeunes : 90 % à 1 an et 80 % à 5 ans.
Les facteurs
prédictifs de la perte du greffon sont identiques à ceux qui
déterminent la mortalité : présence d’un cancer, d’une maladie
cardiovasculaire, âge avancé du donneur et surtout tabagisme.
Quand un groupe âgé à bas risque est comparé aux plus jeunes, les
résultats en termes de survie et de durée de fonction du greffon sont
identiques.
Ces observations ne sont pas identiques à celles de Meier-Krieshe : après censure pour le décès, et à partir de 2 336
greffés d’âge supérieur à 65 ans, la survie du greffon à 8 ans est de
50,7 % alors qu’elle est de 67 % pour le groupe 18-49 ans et de 62 %
pour le groupe intermédiaire.
La différence pourrait être due à la
disparité des équipes et des patients impliqués dans cet énorme
population.
Dans cette même étude, le rejet chronique demeure une
cause notable de perte du greffon (RR : 1,29 pour les 50-64 et RR :
1,67 pour les plus de 65 ans).
Ces mêmes auteurs suggèrent que
l’âge avancé du receveur (plus de 65 ans) pourrait être un facteur de
détérioration chronique, indépendamment des causes
habituellement reconnues.
Cette hypothèse est renforcée par le
travail expérimental de Liu et al, où les lésions de rejet chronique
sont plus importantes chez les rats receveurs âgés que chez les
congénères adultes ou jeunes, ce qui met en évidence une corrélation
entre âge et poids du receveur, et lésions histologiques.
2- Sélection des receveurs
:
L’amélioration de la durée de survie du patient s’effectue au prix
d’une sélection soigneuse des receveurs potentiels d’une greffe.
Dans
une série rétrospective portant sur une longue période d’observation
(1980-1997), SE Doyle et al ont déterminé les facteurs prédictifs du
devenir de leurs 206 greffés âgés et de leur greffon rapportés plus
haut.
Peuvent donc être greffés, les sujets âgés indemnes de toute
maladie néoplasique récente ou métastatique, d’infection active, de
maladie extrarénale sévère (hépatite chronique, maladie respiratoire
chronique) et de maladie mentale ou psychiatrique.
Le bilan prégreffe comprend habituellement une consultation cardiologique,
une échographie cardiaque et un test de stress au thallium.
Si ce
dernier est positif ou si le patient a des antécédents cardiovasculaires
d’angine de poitrine ou d’infarctus du myocarde, il doit bénéficier
d’une coronarographie.
L’évaluation des artères des membres
inférieurs et de l’aorte se fait par échodoppler et artériographie si le
sujet est symptomatique.
Une maladie artérielle périphérique n’est
pas une contre-indication à la greffe rénale mais augmente la
difficulté du geste opératoire.
Certaines équipes réalisent une
échographie des voies biliaires et proposent une cholécystectomie
avant transplantation si la vésicule est lithiasique.
Une fibroscopie oeso-gastro-duodénale et un lavement baryté sont également réalisés.
La colonoscopie est réservée aux patients victimes d’une maladie diverticulaire symptomatique.
Enfin, toutes les femmes bénéficient
d’un examen gynécologique et d’une mammographie.
Pour les
hommes, si la prostate est augmentée de volume, un dosage des
prostate specific antigen (PSA) est réalisé.
La capacité d’adhésion aux
protocoles thérapeutiques peut être évaluée par l’observance au
cours des étapes antérieures à la greffe, et les tabagiques sont
informés des risques supplémentaires encourus.
3- Complications de la greffe
:
Les complications médicales les plus fréquentes sont les infections,
notamment la tuberculose et les maladies à cytomégalovirus (CMV),
dont la fréquence oscille selon les séries de 12,5 % à 33 %.
L’incidence du rejet aigu est significativement plus faible dans cette
population, en raison d’une réponse immune probablement moins
compétente.
La fréquence du diabète induit par la corticothérapie
varie également selon les différentes études (2,5 % à 20 %), mais l’âge
en est un prédicteur indépendant de son apparition et de la
survenue d’une intolérance au sucre.
Enfin, certains auteurs
rapportent la fréquence particulière des épisodes de pyélonéphrite
aiguë, des septicémies.
L’ostéonécrose de la tête fémorale a
également été rapportée.
Un peu plus de la moitié des patients
(56,2 %) ne sont pas réhospitalisés après la transplantation rénale.
Les complications chirurgicales sont surtout d’ordre vasculaire et
thrombotique.
4- Traitement immunosuppresseur
:
Le traitement immunosuppresseur optimal du greffé rénal âgé reste
à définir.
La ciclosporine a apporté une amélioration des résultats
dans cette population, supérieure à celle des plus jeunes : l’incidence
du rejet aigu est passée de 48 % à 33 %, les phénomènes infectieux
ont diminué et la corticothérapie a pu être prescrite à dose plus
faible.
Certaines équipes proposent de diminuer le traitement
immunosuppresseur chez le sujet âgé, en raison de la possibilité
d’une meilleure tolérance immunologique du greffon.
La
ciclosporine peut être utilisée en monothérapie chez les greffés
rénaux âgés ayant une fonction rénale stable, et indemnes d’épisode
de rejet aigu.
L’utilisation du sérum antilymphocytaire est
associée à un risque infectieux et à un risque de néoplasie plus
importants, mais l’efficacité sur le rejet est supérieure.
Les
nouveaux immunosuppresseurs n’ont pas encore été testés par des
études prospectives dans cette circonstance.
C - SUJET ÂGÉ DONNEUR DE REIN
:
La pénurie d’organes incite à reculer l’âge limite du donneur.
Aux
États-Unis, entre 1988 et 1995, le nombre de donneurs âgés de plus
de 50 ans a augmenté de 172 %, passant d’un taux de 12 % des
donneurs à 25 %.
Dans Eurotransplant, en 1998, les donneurs
de plus de 55 ans représentaient 25 des greffes cadavériques.
L’EFG fait état du prélèvement de 493 reins dans cette tranche d’âge
(2,7 % du total des organes prélevés) au cours de la période
1985-1995.
L’ensemble des travaux apporte la notion que la survie du greffon
est moins durable lorsque le donneur est âgé.
Le rapport de l’EFG
constate une survie du greffon à 1 an de 82,3 % et à 5 ans de 69 %
lorsque le donneur a plus de 60 ans, alors que les pourcentages sont
de 87,2 % et 72,1 % respectivement lorsqu’il est plus jeune.
SR Kerr confirme
que la survie des greffons cadavériques ou de donneurs vivants est
plus faible lorsque l’âge est supérieur à 60 ans, et fait le constat
que la survie du greffon provenant d’un donneur vivant de plus de 60
ans est identique à celle d’un greffon cadavérique venant d’une
personne de moins de 55 ans.
L’âge du donneur a été
individualisé, par une vaste analyse multivariée, comme un élément
déterminant le résultat au long terme de la transplantation.
L’existence d’une HTA ancienne et d’une diminution de la clairance
glomérulaire augure mal du devenir ultérieur.
Il en va de même de
la présence de lésions histologiques telles qu’une sclérose
glomérulaire, affectant 20 % du contingent.
Ces résultats ont été
récemment confirmés par le travail de Fijter et al, qui montre que
l’âge du donneur, le nombre de rejets aigus et le type interstitiel (type 1) du rejet déterminent la survie de la greffe.
Pour les
auteurs, ces résultats suggèrent une augmentation de
l’immunogénicité du rein âgé.
En outre, les séquelles du rejet aigu
seraient moins aisément réparées sur un rein « âgé » que sur un
« jeune » rein.
Lorsque la clairance du donneur est inférieure à 90 mL/min, le
donneur âgé de plus de 60 ans, ou la créatininémie terminale élevée,
certaines équipes proposent une double greffe et constatent que le
résultat est identique à celui des bénéficiaires d’un seul rein de
« bonne qualité ».
Après une sélection stricte, les patients âgés de 60 ans peuvent
légitimement être des candidats à la greffe rénale.
Plusieurs questions ne sont pas parfaitement résolues.
Quel est le
traitement immunosuppresseur de choix ?
Comment prévenir les
infections et les maladies cardiovasculaires ?
Faut-il réserver les reins
« âgés » aux sujets âgés ?
Si le donneur est âgé et ses reins de qualité
limite, faut-il préconiser des greffes doubles ?
Conclusion
:
La consultation de la littérature et des différents registres du traitement
de l’IRC amène à la conclusion d’une incidence plus élevée de la
majorité des néphropathies chez les personnes âgées : néphropathies
glomérulaires primitives et secondaires, néphropathies interstitielles,
vascularites rénales et surtout néphropathies vasculaires liées à
l’hypertension artérielle ou à l’athérome.
L’addition de ce fait
épidémiologique et de l’augmentation de la taille de cette population
conduit et conduira à une demande accrue de soins néphrologiques,
phénomène qui soulève un problème économique d’importance.
Il est
probable qu’une prévention, très en amont dans le cours de la vie, des
seuls facteurs du risque cardiovasculaire réduirait notablement la
fréquence de la maladie rénale.
Au plan thérapeutique, les travaux sur
la capacité de différenciation des cellules souches hématopoïétiques en
cellules rénales laissent entrevoir à très long terme la possibilité de la
régénération d’un capital néphronique fonctionnel.
Ainsi serait réalisé,
au moins dans le domaine néphrologique, le fantasme du Dr Faust.