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Néphrologie
Insuffisance rénale chronique du sujet âgé et traitement par dialyse et transplantation
Cours de Néphrologie
 


 

Introduction :

Nombre des néphropathies chroniques vont évoluer vers l’insuffisance rénale chronique (IRC), puis vers l’insuffisance rénale chronique terminale (IRCT).

Nombre d’entre elles sont découvertes par hasard, à l’occasion d’un bilan pour une toute autre affection, et c’est probablement une des raisons du fait que, plus que dans tout autre groupe d’âge, le recours au spécialiste néphrologue est tardif et le traitement institué dans des conditions précaires.

Pourtant, aujourd’hui, toutes les options du traitement de l’urémie sont ouvertes : dialyse, hémodialyse ou dialyse péritonéale, aussi bien que transplantation.

Quand elles sont convenablement planifiées, ces méthodes permettent d’obtenir souvent un allongement substantiel de la durée de vie dans des conditions de confort convenables.

Plus souvent que dans tout autre groupe de dialysés se pose cependant la question de l’arrêt de la dialyse.

Dans cet article, sont envisagées les manifestations et complications de l’insuffisance rénale, les modalités de dialyse et leur application aux personnes âgées, et la mise en oeuvre de la transplantation dans cette population.

Une rubrique est particulièrement consacrée à la transplantation rénale à partir de rein de donneurs âgés.

Nombre des maladies rénales précédemment évoquées voient malheureusement leur évolution se faire vers l’IRC.

Celle-ci présente quelques caractères particuliers chez les personnes âgées, de même que la dialyse et la transplantation mises en oeuvre à la phase terminale.

Insuffisance rénale chronique et insuffisance rénale chronique terminale :

A - ÉPIDÉMIOLOGIE DE L’IRC :

Les données concernant l’épidémiologie et l’histoire naturelle de l’IRC de la population âgée sont rares et incomplètes.

Trois études d’incidence ont été menées au Royaume-Uni au cours des 10 dernières années.

L’incidence varie de 172 à 450 IRC modérées par million d’habitants et par an (créatinine : 300 µmol/L) et de 61 à 148 cas par million d’habitants et par an d’IRC sévères (créatinine : 500 µmol/L).

Dans l’étude de N Drey, l’incidence suit un gradient d’âge, puisqu’elle est de 20 par million d’habitants et par an pour les moins de 20 ans, et de 1 200 par million d’habitants et par an pour les plus de 80 ans.

La maladie concerne surtout les hommes et les personnes de faible niveau socioéconomique.

IH Khan fait le constat que seulement un tiers de ces patients (36 %) est adressé en consultation néphrologique.

Dans une étude prospective impliquant tous les centres néphrologiques d’Île-de-France durant l’année 1991, P Jungers établit une incidence de 260 cas par million d’habitants et par an (créatinine : 200 µmol/L) dont 53 % ont plus de 60 ans.

Elle est de 523 cas par million d’habitants et par an dans la tranche d’âge 60- 74 ans et de 619 cas par million d’habitants et par an de sujets de 75 ans et au-delà.

Les hommes sont deux fois plus nombreux que les femmes (sex-ratio : 1,9).

Ainsi, l’incidence est-elle de 739 insuffisants rénaux chroniques par million d’habitants et par an pour les hommes de 60 à 74 ans et de 1 124 pour les plus de 75 ans, et pour les femmes, respectivement de 354 et 356 par million d’habitants et par an.

Les IRC sévères (créatinine > 500 µmol/L) comptent presque pour un tiers (31 %).

La prévalence de l’IRC est plus difficile encore à estimer.

Dans la population nord-américaine étudiée par le Third National Health and Nutrition Examination Survey entre 1988 et 1994, la prévalence d’une créatininémie supérieure à 15 mg/L est de 21,25 % des hommes de 60 à 69 ans et de 32,26 % chez les plus de 70 ans.

Pour les femmes, les données sont respectivement de 5,7 % et 9,28 %.

Pour la population totale, quel que soit l’âge, la prévalence est de 9,74 % pour les hommes et de 1,78 % pour les femmes.

La créatininémie est supérieure ou égale à 20 mg, témoignant donc d’une insuffisance rénale notable, chez 1,68 % des hommes de la soixantaine et chez 5,03 % de ceux de plus de 70 ans ; la fréquence est moindre chez les femmes, respectivement de 1,27 % et 0,71 %.

La prévalence est plus élevée chez les Américains d’origine africaine.

Cette estimation de l’insuffisance rénale est imparfaite, car la sensibilité du dosage de la créatinine est, surtout chez les sujets âgés, médiocre.

En Europe, il n’existe pas d’évaluation comparable à celle menée sur le continent nord-américain.

Les observations de Kesteloot et al en Belgique montrent que la clairance mesurée moyenne des hommes de 60 à 64 ans est de 91,8 + 27,6 mL/min et celle des plus de 70 ans de 82,2 + 23,2 mL/min ; les femmes ont des valeurs moindres : 76,8 + 21,6 mL/min et 67,9 + 19,7 mL/min respectivement.

Le calcul à partir de l’écart-type de ces données indique que 2,5 % des hommes âgés de 60 à 64 ans ont une clairance inférieure à 65 mL/min, et inférieure à 59 mL/min pour les plus de 70 ans ; les valeurs de clairance étaient de 65 et 48 mL/min pour 2,5% des femmes dans les mêmes tranches d’âge.

1- Étiologies de l’IRC :

On ne possède pas de données étiologiques sur les IRC modérées à sévères.

Seuls les registres de traitement de l’IRCT permettent d’approcher ces informations.

Ils nous apprennent que les IRC secondaires à l’hypertension artérielle (HTA), aux maladies vasculaires rénales et au diabète, sont actuellement les causes les plus fréquentes de l’IRC.

La fréquence et l’importance des comorbidités, peu abordées dans la littérature, doivent être prises en compte, au même titre que l’âge. IH Khan, après avoir réparti une population d’insuffisants rénaux en trois classes de risque croissant définies par l’âge (< 70 ans, entre 70 et 80 ans, > 80 ans) et/ou l’existence de maladies associées (diabète, maladies cardiovasculaires, pulmonaires, hépatiques) observe que la fréquence en est respectivement de 13 %, 23 % et 64 %.

Vingt-deux pour cent des sujets n’ont pas de comorbidité associée à l’IRC, et ils sont tous parmi les plus jeunes.

2- Histoire naturelle de l’IRC :

Elle est peu documentée.

* Mortalité :

Certaines des études précédemment citées ont réalisé un suivi partiel de la population identifiée et attestent d’une lourde mortalité. N Drey, en 5 ans et demi, constate le décès de 69 % des 1 076 insuffisants rénaux d’un âge médian de 77 ans.

Le risque de décès est multiplié par 2,23 pour les plus de 60 ans. IH Khan, au terme de 2 ans de suivi, établit une relation avec les comorbidités et constate un taux de survie de 100 %, 48 % et 14 % pour les classes de risque faible, moyen et élevé chez les malades non suivis par un néphrologue et un taux de 100 %, 63 % et 27 % pour ceux qui ont bénéficié d’une prise en charge néphrologique.

Dans la cohorte de P Jungers, 1 an après l’inclusion, 18 % des plus de 75 ans sont morts et 28 % dialysés (5 % et 48 % pour les plus jeunes).

La cause première du décès est cardiovasculaire (46 % et 63 %), suivie par des accidents infectieux (11 %).

La mortalité par affection néoplasique ou hématologique est également importante.

* Fonction rénale :

L’évolution de la fonction rénale et ses déterminants n’ont pratiquement pas été étudiés.

La diminution physiologique de la filtration glomérulaire et de la réserve rénale devrait accélérer le processus de dégradation fonctionnelle.

L’HTA, si fréquente à cet âge, est un possible facteur d’aggravation évolutive.

D Acone montre une réduction tensionnelle plus importante et une dégradation rénale moins rapide avec un inhibiteur calcique qu’avec un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) (respectivement -0,62 et -1,03 mL/min/mois).

L’absence d’une période témoin ne permet pas d’apprécier le bénéfice fonctionnel du traitement antihypertenseur, et le possible infléchissement de la courbe évolutive par l’intervention thérapeutique.

L’importance du rôle du débit de protéinurie est suggérée par le suivi durant 4 ans d’un groupe de 82 sujets atteints d’IRC, de plus de 65 ans, dont la filtration diminuait de -0,34 ± 0,46 mL/min/mois, et chez qui une protéinurie de débit supérieur à 1 g/j était un facteur péjoratif pour la mortalité et le cours évolutif de l’IRC.

3- Complications de l’IRC :

Les complications de l’IRC sont dominées par les accidents cardiovasculaires et les désordres nutritionnels.

Une étude rétrospective d’une cohorte de sujets en IRC montre que la durée de vie sans hospitalisation était de 31,5 mois pour les moins de 65 ans, et de 11,6 mois pour les plus âgés.

Les causes cardiovasculaires rendaient compte de 33,7 % des séjours hospitaliers.

En analyse multivariée, l’âge avancé (1,012/an), l’angor (1,9), l’artériopathie des membres inférieurs (1,64) et l’anémie étaient les variables indépendantes reliées à la fréquence d’hospitalisation de cause cardiovasculaire.

Le début non électif de la dialyse pour 22 %, les infections pour 8,4 % étaient les autres causes.

– Une altération de l’état nutritionnel est très fréquente chez l’insuffisant rénal chronique âgé, et cet état s’aggrave avec le niveau et la progression de l’IRC.

Les résultats de l’étude NHANES III permettent de constater que 31 % des personnes âgées incluses dans l’enquête et dont la clairance était inférieure à 60 mL/min étaient dénutris.

Une clairance inférieure à 30 mL/min est un déterminant de la dénutrition en analyse multivariée (OR : 3,6 ; IC 95 % : 2-6,6), de même que l’insuffisance cardiaque (OR : 2,1-3,7). L’âge en revanche n’a pas d’influence (OR : 1,1 pour les 70-79 ans et 1 pour les plus de 80 ans).

La consommation de protéines alimentaires se réduit au cours de la progression de l’IRC, et atteint des niveaux bas quand s’aggrave la fonction rénale (0,66 g/kg/j pour une clairance inférieure à 24 mL/min).

Les guides de pratique clinique nord-américaine (Kidney Dialysis Outcome Quality Initiative [KDOQI]) recommandent un suivi trimestriel de l’état nutritionnel sur les critères du poids (en comparaison aux références nationales), de l’albuminémie, de la consommation protéique. Un apport calorique de 30 à 35 kcal/kg/j est recommandé pour les plus de 60 ans qui ont une activité physique limitée.

Pour les plus actifs, un apport identique aux plus jeunes (> 35 kcal/kg/j) est souhaitable.

La dénutrition est un indice défavorable de l’évolution en dialyse.

L’apparition de signes témoignant de son installation est une indication à la mise en dialyse.

– L’anémie de l’insuffisant rénal chronique âgé est très souvent en relation avec un déficit ferrique.

Il est possible que, compte tenu de la faible activité des patients âgés, les signes en relation avec l’anémie soient absents, et que celle-ci soit moins traitée que chez des sujets plus jeunes.

Ceci n’est cependant pas confirmé par les données de l’United States Renal Data System (USRDS) qui montrent que les pourcentages des nouveaux dialysés de 65 à 74 ans et de plus de 74 ans recevant de l’érythropoïétine sont respectivement de 24,6 % et 23,9 %, identiques aux plus jeunes.

– On sait peu de chose de l’ostéodystrophie rénale chez les sujets âgés.

L’ostéodensitomérie met en évidence un déficit de minéralisation, aussi bien sur l’os spongieux que l’os cortical, qui est corrélé à la concentration de parathormone.

Il existe chez les personnes âgées dialysées une hypoparathyroïdie en relation avec la diminution de l’apport protéique et phosphorique dont la contribution, associée aux autres anomalies liées à l’âge, a augmenté les risques d’ostéodystrophie adynamique.

Cette hypoparathyroïdie serait également un facteur de risque de fracture du col fémoral.

– Un suivi régulier de l’évolution par un néphrologue est hautement souhaitable.

IH Khan en a établi l’efficacité sur la réduction de la mortalité, mais cette surveillance n’abolit pas les hospitalisations dans la période précédant la dialyse.

Dans une étude rétrospective de 7 ans, DC Holland et al ont constaté que, sur une cohorte de 362 patients suivis, une hospitalisation avant ou au moment de la mise en dialyse fut nécessaire chez 208 patients (57,5 %).

En analyse univariée, l’âge avancé, les comorbidités cardiovasculaires, une néphropathie d’origine vasculaire, une anémie et une insuffisance rénale sévère sont les prédicteurs significatifs.

En analyse multivariée équilibrée pour la créatininémie, l’âge, ainsi que la présence d’un angor, d’une artériopathie des membres inférieurs, et de l’anémie, conservent leur significativité.

La mortalité au cours de cette période prédialytique est élevée, puisque 10 % des patients de la cohorte décédèrent.

B - DÉMOGRAPHIE ET ÉTIOLOGIES DE L’IRCT :

1- Épidémiologie :

L’incidence et la prévalence de l’IRCT traitée par dialyse ou transplantation ont considérablement augmenté au cours des 15 dernières années.

Ainsi, de 1983 à 1993, l’incidence s’est accrue de 80 % (de 44,3 à 79,6 par million d’habitants et par an), et la prévalence s’est multipliée par un peu plus de deux (de 255 à 541 par million d’habitants et par an).

Cette croissance s’est développée au profit des patients de plus de 65 ans ; au cours de la période 1982-1990, il s’est produit un triplement de l’effectif des plus de 65 ans.

Au Canada, entre 1982 et 1994, le nombre des 65-74 ans dialysés a augmenté de 146 %, et celui des sujets de la tranche d’âge supérieure de 241 %.

Aux États-Unis, l’incidence pour les 65-74 ans était, en 1993, de 1 000 par million d’habitants et par an et de 680 par million d’habitants et par an pour les plus vieux.

Cinq ans plus tard, elle était de 1 200 par million d’habitants et par an pour chaque groupe. L’âge moyen est de 65 ans pour les entrants en dialyse.

Le taux moyen d’accroissement des dialysés prévalents de 1993 à 1997 est de 4 % pour les 20-44 ans, de 6 % pour les 45-64, de 5 % pour les 65-74 et de 8 % au-delà.

En Europe, l’incidence des nouveaux dialysés est moins élevée, allant de 72 par million d’habitants en Grèce à 163 par million d’habitants en Allemagne.

En Île-de-France en 1998, l’incidence de l’IRCT a été de 108 par million d’habitants et par an, et l’incidence des dialysés pour la première fois (excluant les retours de greffe) de 100 par million d’habitants et par an.

Elle était de 252 et de 441 par million d’habitants et par an pour les hommes de 60-74 ans et les plus de 75 ans et, respectivement, de 139 et 163 pour les femmes.

L’observation des chiffres montre une augmentation de 5 % par an, les plus de 65 ans formant la tranche d’âge ayant la plus forte croissance.

En Île-de-France, la prévalence pour les plus de 60 ans était de 367 par million d’habitants en 1995 et de 436 par million d’habitants en 1999, de 788 et 980 par million d’habitants pour les plus vieux.

Dans la région Rhône-Alpes, la prévalence globale des dialysés a augmenté de 6,1 % par an de 1993 à 1999, pour la population de 65-74 ans de 6,7 %, de 75 à 84 ans de 13,7 % et pour les plus de 85 ans de 11,4 %.

2- Étiologies :

Les données relevées par l’USRDS permettent d’obtenir des indications, valables seulement pour les États-Unis, sur la fréquence des diverses étiologies de l’IRCT du sujet âgé.

La néphropathie survenant au cours du diabète rend compte de 37, % (7,3 % pour le diabète type 1 et 30 % pour le type 2) des nouveaux dialysés de plus de 64 ans pour la période 1993- 1997, les néphropathies vasculaires de 35,4 % (31 % pour la néphroangiosclérose), les glomérulopathies de 8,8 % (7,6 % pour les néphropathies glomérulaires primitives), les néphropathies interstitielles de 4,4 %, les pathologies tumorales de 2,2 % et les causes héréditaires de 1,6 %.

Les courbes évolutives établies par ce même organisme démontrent l’incidence croissante parmi les sujets de plus de 65 ans, du diabète et des causes vasculaires depuis 1988. On ne dispose pas pour la France d’une telle description des causes.

C - RECOURS TARDIF AUX SOINS SPÉCIALISÉS ET CONSÉQUENCES :

Une des caractéristiques de l’évolution de l’IRCT du sujet âgé est le recours tardif au néphrologue ou au système de soins.

1- Causes du recours tardif :

Le recours tardif peut être défini lorsque la première intervention du néphrologue a lieu moins de 4 mois avant la mise en dialyse.

L’importance de ce phénomène varie de 14 à 57 % ; il peut même atteindre des chiffres aussi élevés que 66 %.

Les personnes âgées ayant de lourdes comorbidités ou, aux États-Unis, dénuées d’assurance maladie, sont particulièrement représentées dans ce groupe.

La réticence des médecins praticiens à faire appel au néphrologue pour certains types de malades est la cause principale de l’absence de consultation néphrologique préalable ; le sentiment de l’impuissance du néphrologue participe de cette démarche.

Deux enquêtes éclairent cette attitude.

Pour les médecins praticiens, un âge avancé, la multiplicité et la gravité des comorbidités, en particulier neuropsychiatriques, considérés comme des contreindications à la dialyse, sont des obstacles à une consultation. Une mauvaise interprétation de la valeur indicative de la créatininémie participe également à ce phénomène.

Les médecins anglo-saxons adressent leurs malades au néphrologue lorsque la créatininémie se situe entre 260 et 340 µmol/L, ce qui correspond à une clairance comprise entre 33 et 25 mL/min pour un homme de 40 ans et pesant 70 kg, mais seulement de 23 et 18 mL/min pour un homme âgé de 70 ans de même corpulence.

Campbell apporte des explications d’une autre nature : le retard à la prise en charge par le néphrologue serait dû à la crainte du médecin praticien d’un jugement négatif de celui-ci à son égard (43 % des cas), à une absence ou une mauvaise communication entre les deux (37 %), à une absence de critères spécifiques pour les malades en IRCT (31 %), à une sous-estimation de la nécessité de la dialyse et à une ambivalence sur l’utilité de la dialyse dans les groupes à haut risque.

2- Conséquences du recours tardif :

Les conséquences de non-recours précoce se jugent sur l’état clinique au moment de la dialyse, la morbidité, le choix de la technique appropriée, la mortalité, la qualité de vie, la réhabilitation et l’impact économique.

– L’état des malades non préalablement suivis et arrivant à la dialyse est médiocre.

La créatininémie et la phosphorémie sont plus élevées, l’albuminémie et la calcémie plus basses, l’acidose et l’anémie plus profondes.

Ils reçoivent moins souvent de l’érythropoïétine, des suppléments calciques et de vitamine D, des chélateurs du phosphore, leur traitement antihypertenseur est généralement moins lourd et leur pression artérielle moins bien contrôlée.

Contrairement aux sujets précocement suivis, ils n’ont pas d’abord vasculaire préparé.

– Les conditions de la mise en dialyse sont plus précaires, car celle-ci s’opère souvent dans les circonstances de l’urgence : 57 % contre 40 % pour C Roubicek, 90 % pour P Jungers.

Les causes en sont l’oedème aigu du poumon, la surcharge cardiovasculaire.

Un abord vasculaire provisoire est alors plus souvent nécessaire que dans les cas programmés : 73 % contre 29 %.

La durée d’hospitalisation initiale est prolongée : 30,24 contre 9,07 jours pour Campbell, 31 contre 7 jours pour Goransson.

Dans le travail de Roubicek, il n’est pas mis en évidence de différence de durée d’hospitalisation dans les 3 mois qui suivent la mise en dialyse : 21,1 jours pour le premier groupe et 21,5 pour le second.

– Lorsque la dialyse n’est pas préparée, les coûts de traitement sont multipliés par cinq. Ismail relève également que même quand la dialyse est débutée électivement, les coûts demeurent supérieurs si le dialysé est pris en charge depuis moins de 3 mois, car même quand le patient a consulté un néphrologue, la première dialyse s’effectue en atmosphère d’urgence dans 23 % des cas, sur un cathéter provisoire dans 29 % des cas, alors qu’un abord vasculaire n’est disponible que dans 43 % à 53 % des cas.

– Une conséquence de la mise en dialyse sans préparation technique ni psychologique ou sociale est que le choix de la méthode de dialyse est obéré. Ainsi, le choix de la dialyse péritonéale est-il moins facile à proposer et à mettre en oeuvre dans de telles circonstances, et une transplantation préemptive est-elle impossible.

– La mortalité de ces dialysés « tardifs » est supérieure à celle des patients suivis préalablement.

Dans une étude, la survie à 2 ans était de 25 % dans le premier cas et de 59 % dans le second.

Dans un second travail, la mortalité à 1 an était de 39 % pour les premiers et 6 % pour les seconds. Roubicek, en revanche, ne met pas en évidence de différence de mortalité précoce ou tardive.

– Dans une revue extensive de la littérature, Obrador a mis en revanche en évidence les bénéfices du recours précoce au néphrologue : une décision maîtrisée du moment de la dialyse, un choix informé de la modalité de celle-ci, des hospitalisations moins fréquentes et moins longues, une réinsertion plus aisée et de meilleure qualité, des coûts moins importants et, de façon générale, une moindre mortalité.

3- Recommandations :

L’absence de critères clairement définis pour le moment de la collaboration néphrologique et celui de la mise en dialyse, n’aide pas le médecin praticien dans sa programmation des soins à l’insuffisant rénal.

L’agence nationale pour l’accréditation et l’évaluation en santé (ANAES) établit les bénéfices attendus d’un recours au néphrologue, mais elle n’explicite pas la valeur de créatininémie, ou mieux, de la clairance à laquelle il doit avoir lieu.

Le National Institute for Health, dans une recommandation consensuelle (novembre 1993), estime que le contact néphrologique doit idéalement avoir lieu lorsque la créatininémie est à 15 mg/L pour une femme et à 20 mg/L pour un homme, ce qui équivaut à une clairance de 60 mL/min.

Cette recommandation ne doit pas faire oublier la nécessité d’une prévention primaire et la nécessité d’un suivi plus précoce, pour les personnes ayant une maladie rénale dont le déficit serait moindre, et pour les sujets à risque de développer une maladie rénale (hypertendus, diabétiques).

Un consensus informel semble s’établir dans la communauté francophone sur l’opportunité d’un recours au néphrologue pour une clairance de 60 mL/min, quel que soit l’âge du patient.

Dialyse du sujet âgé :

L’augmentation du nombre des dialysés âgés de plus de 65 ans est la cause principale de la croissance de la population traitée par cette technique.

L’évolution démographique (vieillissement de la population, allongement de l’espérance de vie), la grande incidence des maladies rénales, l’élargissement des critères de sélection aboutissant à la prise en charge de patients de plus en plus âgés autrefois récusés, la survie plus longue des dialysés et la greffe rapide des patients jeunes en sont les principales raisons.

L’incidence annuelle française, dans cette classe d’âge, est supérieure à 350 cas par million d’habitants et par an, et plus de 1 000 dialysés sont octogénaires.

A - MOMENT DU DÉBUT DE LA DIALYSE :

Le moment optimal de la mise en dialyse ne se limite pas à une valeur de clairance, car de multiples facteurs doivent être pris en compte.

Les recommandations de l’ANAES indiquent qu’à partir d’une clairance de 10 mL/min, la présence de manifestations digestives, neurologiques, dermatologiques, hématologiques, cardiovasculaires, d’une dénutrition et d’une altération de l’état général impose le recours à l’épuration.

En tout état de cause, une clairance inférieure à 5 mL/min est en soi une indication. Pour les diabétiques, sans qu’il soit établi de recommandation officielle, le consensus professionnel engage à débuter le traitement dès que la clairance devient inférieure à 15 mL/min.

Il n’est pas prévu d’indication spécifique pour les sujets âgés, mais une attention particulière doit être portée aux troubles digestifs et nutritionnels, et la dialyse doit intervenir dès leur apparition.

Aux États-Unis, la dialyse est commencée à un moindre degré de dégradation rénale chez les plus de 65 ans (75 mg/L de créatininémie et 7,7 mL/min de clairance) et chez les plus de 75 ans (70 mg et 8 mL/min) que dans la tranche d’âge inférieure (87 mg/L et 7,1 mL/min).

B - CONTRE-INDICATIONS DE LA DIALYSE :

Elles ne sont pas clairement définies.

Le rapport de l’ANAES fait état du peu d’intérêt d’offrir cette thérapeutique à des personnes victimes d’une maladie cachectisante et rapidement mortelle, et aux personnes démentes.

Il n’est pas prévu de contre-indication spécifique pour les individus âgés.

La National Kidney Foundation a émis des propositions à propos des situations où la mise en dialyse est peu recommandée : décès attendu dans les 60 jours d’une maladie non rénale, état végétatif persistant, démence sévère et irréversible, situation de prolongation d’un processus morbide, où le traitement n’apporte pas de bénéfice et augmente la pénibilité de la fin de vie.

L’opinion et l’adhésion de la personne susceptible d’être dialysée doivent être requises.

Une information précoce, des entretiens répétés, la recherche d’une adaptation des modalités techniques au souhait de la personne, permettent souvent de lever les réticences que les personnes âgées peuvent exprimer à l’égard de cette thérapeutique.

C - CHOIX DE LA TECHNIQUE ET DE LA STRUCTURE :

Il n’existe pas de critère rigoureux établissant le choix de la méthode d’épuration.

Les alternatives hémodialyse ou dialyse péritonéale, traitement en centre ou à domicile (ou en autodialyse, substitut du domicile,) imposent la prise en compte de nombreux critères :

– volonté informée du patient ;

– critères médicaux : statuts cardiovasculaire et neuropsychiatrique, possibilités d’accès vasculaire ou péritonéal, facilité d’utilisation des voies d’abord, tolérance physique et psychique de la technique de dialyse, antécédents respiratoires ou digestifs (cicatrices, diverticulose), adhésion au traitement ;

– conditions sociales : autonomie physique, entourage familial ou social, possibilité de prise en charge à domicile ou en institution, proximité du domicile.

Les données disponibles montrent une certaine similitude des choix dans différents pays.

Le rapport de l’USRDS aux États-Unis procure une vision claire de la distribution de sujets âgés prévalents au cours de l’année 1997 selon l’une ou l’autre technique.

L’hémodialyse est très largement majoritaire, puisque 89 % des plus de 65 ans sont pris en charge en centre d’hémodialyse, et moins de 1 % sont traités à domicile.

La dialyse péritonéale est utilisée dans 8 % des cas, dont un peu plus de la moitié en dialyse ambulatoire.

Dans le Piémont italien, où l’incidence des plus de 65 ans a plus que doublé dans la période 1986-1996, l’hémodialyse est mise en oeuvre chez 68 % d’entre eux, l’hémodiafiltration chez 8 % et la dialyse péritonéale chez 21 %.

En Île-de-France, en janvier 1999, l’hémodialyse en centre traitait 67 % des patients, la dialyse autonome (dialyse à domicile ou autodialyse) 25 % des patients et la dialyse péritonéale 8 % des patients.

La technique adoptée (hémodialyse ou dialyse péritonéale) génère ses nécessités spécifiques, ses complications particulières, son propre taux de mortalité.

D - CONTRAINTES ET COMPLICATIONS DE L’HÉMODIALYSE :

Pour l’hémodialysé, l’abord vasculaire, les complications liées à la séance de dialyse, la dose de dialyse et la malnutrition prennent une importance particulière chez la personne âgée.

1- Abord vasculaire :

La qualité de l’abord vasculaire conditionne les performances de la session de dialyse, la survenue de complications propres, le confort et la qualité de vie.

DL Latos, aux États-Unis, établit que 14 % seulement des 173 dialysés de plus de 65 ans sont équipés d’une fistule artérioveineuse (FAV), alors que 52 % ont une prothèse et 34 % un cathéter central.

Comparés à une population jeune, les plus de 65 ans ont moins de fistule et plus de cathéter.

En Europe, il est probable que la proportion des FAV préalablement réalisées est plus grande ; les observations rétrospectives de JP Rougier et al témoignent de ce fait.

Dans une série de 81 dialysés d’âge supérieur à 60 ans, une FAV directe a été créée dans 61,6 % des cas (dont 85 % étaient radiales) et dans 38,4 % une interposition de greffon.

La durée d’utilisation de la FAV a été de 25 mois moindre que dans un groupe plus jeune (35 mois), le taux d’utilisation à 1 et 3 ans était de 58 % et 27 %.

Les greffons étaient surtout construits à partir de saphène dont le taux d’utilisation à 3 ans était de 57 % pour les autogreffes et de 12,5 % pour les homogreffes.

Dans une autre cohorte de plus de 75 ans suivie pendant 5 ans, 83 % eurent une FAV radiale et 13 % une FAV humérale en première intention, dont la durée de fonctionnement fut en moyenne de 17 mois sans reprise chirurgicale et de 21 mois après reprise.

Ces résultats indiquent que, plus que chez tout autre, il est nécessaire d’anticiper et d’organiser préalablement un abord vasculaire de bonne qualité.

Les artères du sujet âgé urémique sont profondément modifiées par l’athérosclérose ou l’artériosclérose et le vieillissement aggravé par l’influence de l’insuffisance rénale.

Les veines sont souvent fines, ont des parois et des lumières altérées par des usages antérieurs. Bien qu’entre certaines mains expertes, le taux de réussite puisse être tout à fait élevé, la classique FAV du poignet est souvent difficile à réaliser et peut être remplacée par une FAV humérale.

Dans la série de L Berardinelli, cette dernière était réalisée dans 17 % des cas dans la période 1968-1978 et 51 % entre 1990 et 1997.

Le taux d’échec initial est supérieur à 20 % pour les FAV radiales et seulement 1,8 % pour les humérales. Le bon fonctionnement à 1 an est respectivement de 60 %, de 92 % et de 57 % et 78 %, à 3 ans.

La fréquence de la thrombose est faible.

Le risque de ces accès est le syndrome de vol immédiat ou retardé quand le réseau vasculaire d’aval est de mauvaise qualité, surtout chez les diabétiques.

La possibilité d’une insuffisance cardiaque est également à envisager.

Les prothèses vasculaires exposent à la même complication, et plus fréquemment à l’infection.

Les cathéters veineux centraux offrent une solution efficace, rapide, confortable au problème de l’accès vasculaire transitoire ou permanent.

L’âge n’en modifie pas la durée de vie, qui est de 50 % à 3 ans dans les centres spécialisés.

La complication la plus fréquente est l’infection, présente dans 10 % des cas, suivie de la thrombose et du dysfonctionnement.

2- Modalités de l’hémodialyse chez le sujet âgé :

Il n’existe pas de prescription spécifique pour la pratique de la dialyse, malgré les particularités physiologiques et nutritionnelles de la personne âgée.

Les recommandations promulguées par la National Kidney Foundation (les K-Dialysis Outcomes Quality Initiative [DOQI]) n’établissent pas de prescriptions différentes de celles des adultes à savoir un Kt/V urée (valeur d’adéquation de dialyse) au moins égal ou supérieur à 1,2 et un pourcentage d’extraction de l’urée égal ou supérieur à 65 % pour trois séances hebdomadaires.

La durée de chaque séance est établie à partir de ces minima et du volume liquidien à soustraire.

Les débits sanguins rapides et les soustractions liquidiennes brutales ne sont pas bien tolérés.

3- Complications de la séance d’hémodialyse :

Les complications de la séance sont devenues plus rares depuis que les possibilités techniques des moniteurs de dialyse (contrôle d’ultrafiltration, remplacement du tampon acétate par le bicarbonate, sodium modifiable, surveillance continue de la tension artérielle et mesure répétée du volume sanguin) autorisent la modulation de la soustraction liquidienne et la modulation de l’osmolarité du liquide de dialyse.

* Hypotension artérielle :

Elle se manifeste dans 30 % à 40 % des séances.

Elle ne serait cependant pas plus fréquente que chez les plus jeunes. P Urena a réalisé récemment une revue complète et documentée du sujet.

La soustraction du volume circulant non compensée par le transfert de liquide interstitiel, et l’adaptation du débit cardiaque et des résistances vasculaires sont en cause.

La diminution de la réserve cardiaque et la dysautonomie du système nerveux sympathique du sujet âgé créent les conditions favorables à la survenue et à la gravité de ces accidents. Un déséquilibre des médiateurs vasoconstricteurs et vasodilatateurs est aussi constaté.

Perte de connaissance, convulsion, accident vasculaire cérébral, ischémie coronarienne, infarctus du myocarde, ischémie mésentérique et/ou thrombose de l’accès vasculaire en sont les conséquences possibles.

L’accident est souvent brutal.

L’hypotension artérielle en cours de dialyse peut donner lieu à des hypotensions immédiatement après la séance, et entre les séances.

La conséquence peut en être grave car la morbimortalité cardiovasculaire des dialysés semble suivre une courbe en « J » ou en « U », tout au moins en ce qui concerne la pression artérielle systolique.

Les aménagements techniques récents (profil d’ultrafiltration et mesure du volume sanguin) ont permis de réduire l’incidence de l’hypotension symptomatique à 5,7 %, comparée à 10,6 % en leur absence.

* Troubles du rythme cardiaque :

L’âge, les modifications structurelles du coeur, en relation avec l’HTA et l’IRC, expliquent la fréquence de la fibrillation auriculaire paroxystique en cours de séance.

Ces épisodes seraient présents chez 20 % des patients.

Les anomalies rythmiques ventriculaires se manifestent surtout lorsque la concentration en potassium du bain est faible (2 mmol/L), que le tampon est de l’acétate, et la membrane de dialyse composée de cuprophane.

L’hypertrophie ventriculaire gauche et un traitement par digitalique en influencent positivement l’incidence.

Les extrasystoles ventriculaires peuvent être la complication et la manifestation clinique d’une ischémie silencieuse.

* Complications coronariennes :

La séance de dialyse offre des circonstances favorables à l’ischémie myocardique.

La présence d’une hypoxie, l’augmentation de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène et de la contractilité myocardique, l’accélération du rythme, la fréquence des arythmies, la diminution de la pression artérielle produisent une diminution de l’apport coronarien d’oxygène, en période de besoin myocardique accru.

Zuber et al ont d’ailleurs noté la présence d’un sous-décalage de ST chez un quart de leur dialysés, apparaissant préférentiellement au cours de la dernière heure du traitement par dialyse.

Chez 61 dialysés d’un âge moyen de 61 ans, Nakamura et al ont enregistré un électrocardiogramme (ECG) au cours d’une séance de dialyse et ont noté une augmentation de la dépression du segment ST chez 18 d’entre eux.

Dans ce groupe, la fréquence d’une atteinte coronarienne ischémique était plus élevée que dans le groupe sans anomalie ECG en dialyse, et l’ischémie perdialytique, silencieuse ou exprimée cliniquement, était prédictive de la survenue ultérieure d’un accident cardiaque.

* Complications hématologiques :

L’anticoagulation est responsable d’une aggravation de l’anémie, car les troubles digestifs (oesophagite avec ou sans reflux, gastrite, colite diverticulaire sigmoïdienne, angiodysplasie) sont souvent présents chez le sujet âgé.

Des traitements anticoagulants ou antiagrégants sont également prescrits pour les affections cardiovasculaires et la préservation de la fonctionnalité de l’abord vasculaire.

4- Complications chroniques de l’hémodialyse :

Les complications chroniques sont dominées par les problèmes cardiovasculaires, la dénutrition et les infections, qui rendent compte d’un peu plus de la moitié des hospitalisations.

* Complications cardiovasculaires :

La consultation du registre de l’USRDS apprend que la cardiopathie ischémique est présente chez 32,8 % des néodialysés de plus de 65 ans et chez 35,6 % pour les plus de 75 ans. Dans une série d’octogénaires étudiée par PL Neves, les maladies cardiovasculaires étaient présentes chez 74 % de cette population.

Les complications cardiovasculaires sont très souvent à l’origine des hospitalisations des dialysés âgés.

Les maladies cardiaques voient leur incidence et leur prévalence augmenter au fil des ans dans la population dialysée générale.

L’état urémique conférant une accentuation des facteurs responsables de cet état, il est compréhensible que la pathologie cardiovasculaire pèse lourd dans l’existence des dialysés âgés.

La prévalence importante du diabète et des néphropathies vasculaires dans la population âgée dialysée accroît encore le risque de cette pathologie.

Les accidents ischémiques ont une incidence particulièrement élevée dans la tranche d’âge de 65-74 ans.

Au cours de la période de 1977-1995 et à partir du 90e jour de dialyse, la mortalité d’origine cardiaque était évaluée, aux États-Unis, à 29,7/100 patients/année pour les moins de 65 ans et de 58,2/100 patients/année pour les plus âgés.

L’âge et le diabète en étaient le terrain habituel.

* Complications nutritionnelles :

La dénutrition, plus habituelle que chez les jeunes, est présente chez la moitié des dialysés âgés selon B Cianciaruso.

Les circonstances sont propices à son développement : altération de l’appétit allant jusqu’à l’anorexie, diminution physiologique des réserves protéiques, prise de nombreux médicaments, isolement social, situation financière précaire, état dépressif, hospitalisations répétées, infections, insuffisance cardiaque.

Le régime alimentaire devrait comporter au moins 35 kcal/kg/j, dont 1,25 g/kg/j de protéines (au moins 60 % de haute valeur biologique), apport de vitamines hydrosolubles dont 10 mg de pyridoxine, acide folique 1 mg/j. Afin d’éviter son installation, un suivi par une diététicienne est souhaitable.

L’évaluation de la dénutrition est loin d’être aisée, et doit faire appel à plusieurs types de paramètres éprouvés.

Les signes en sont la diminution du poids sec, un taux de catabolisme protéique inférieur à 0,8 g/kg/j, une diminution de l’urée et de la créatinine prédialytique, une albuminémie inférieure à 40 g/L.

L’hypoalbuminémie n’est cependant pas toujours en relation avec une dénutrition, car les phénomènes inflammatoires provoquent également la diminution de la synthèse hépatique de l’albumine.

Chez les patients à haut risque, donc chez les sujets âgés comme chez les jeunes, une hypoalbuminémie inférieure ou égale à 35 g/L définit un pronostic médiocre à moyen terme. Les K-DOQI ne prévoient pas de modifications aux recommandations générales concernant l’apport en protéines (1,2 g/kg/j) mais, pour les personnes sédentaires âgées de plus de 60 ans, envisagent de réduire la ration calorique à 30-35 kcal/kg/j.

La dénutrition protéinocalorique, évaluée par un ensemble de paramètres, est corrélée à une morbidité plus élevée.

Pour P Chauveau, dans une étude prospective multicentrique, la dénutrition et l’âge sont d’importants prédicteurs de la mortalité. L’intérêt d’une alimentation parentérale perdialytique n’est pas clairement prouvé. Une étude de K Hiroshige, sur une cohorte de dix dialysés de plus de 70 ans, a montré un bénéfice nutritionnel de l’alimentation parentérale perdialytique poursuivie 1 an ; le bénéfice sur la morbimortalité à moyen terme n’est pas évalué.

* Autres complications de l’hémodialyse

– Les épisodes infectieux, liés ou non à l’appareillage technique, sont une complication fréquente de la situation de dialysé.

– Les états dépressifs, les difficultés liées à la solitude, la perte d’autonomie ou à l’absence de support social sont également rencontrés.

– L’installation de l’amylose à bêta-2-microglobuline ou amylose du dialysé est reliée à l’âge du dialysé, sa durée de la vie en dialyse et le type de membrane de dialyse utilisé.

Les cancers ne sont pas plus fréquents que dans la population générale.

E - CONTRAINTES ET COMPLICATIONS DE LA DIALYSE PÉRITONÉALE :

La dialyse péritonéale dans ses différentes variétés (dialyse péritonéale ambulatoire continue ou dialyse péritonéale automatisée) est considérée comme une alternative de bonne qualité pour les patients âgés.

En France, 28 % des dialysés de plus de 75 ans seraient traités par cette méthode.

Aux États-Unis et dans la tranche d’âge des plus de 65 ans, le pourcentage est seulement de l’ordre de 7,7 %.

Le maintien à domicile avec ou sans aide, possible avec cette méthode, lui confère un avantage important.

Elle peut être également mise en oeuvre dans des structures de réadaptation avec des résultats tout à fait excellents.

La survie en dialyse péritonéale comparée à l’hémodialyse fait l’objet d’une controverse.

Il n’existe pas de travaux spécifiques pour le groupe des sujets âgés.

Dans une importante étude rétrospective d’une durée de 12 ans, MM Avram constate que les hémodialysés ont un risque de mortalité moindre de 44 % que les dialysés péritonéaux.

En analyse multivariée, l’âge est un faible risque indépendant de mortalité, comparé au diabète et à la malnutrition appréciée sur l’hypoalbuminémie.

D’autres études ne démontrent pas de différence de mortalité, mais leur durée est moindre.

Les besoins d’épuration sont souvent modérés à cet âge, ce qui permet d’alléger la technique en obtenant néanmoins une dialyse de bonne qualité, mais les K-DOQI recommandent, comme pour les adultes, une dose de dialyse mesurée par le KT/V urée de 2 et une clairance de créatinine totale de 60 L/par semaine/1,73 m2.

Les complications spécifiques de la technique ne diffèrent guère de celles du sujet jeune, mais elles revêtent une gravité plus grande du fait du terrain.

Les infections du liquide péritonéal ne sont pas plus fréquentes chez les sujets âgés.

Elles sont plus souvent la cause du décès ou de l’abandon de la méthode.

En institution, la fréquence des péritonites est plus grande, sans que l’âge paraisse y jouer un rôle favorisant.

La dénutrition est souvent citée comme une complication spécifique.

Plus que de la méthode elle-même, la dénutrition dépend de l’état prédialytique, des comorbidités, des infections, de l’état psychologique.

Elle représente cependant un risque vital.

Les recommandations diététiques en matière d’apport protéique demeurent de 1,2 à 1,3 g/kg/j, identiques à celles des adultes.

En revanche, la ration calorique pourrait être abaissée à 30 à 35 kcal/kg/j.

La cause la plus fréquente de la mort est d’origine cardiovasculaire, et en cela ne se différencie guère du sort des patients en hémodialyse.

F - HOSPITALISATIONS INTERCURRENTES. ÉVOLUTION À LONG TERME ET QUALITÉ DE VIE :

1- Hospitalisations intercurrentes :

Elles émaillent l’évolution des dialysés, nuisent à la qualité de leur vie, augmentent le coût du traitement, et sont bien évidemment des éléments pronostiques fâcheux.

Le nombre et la durée des hospitalisations intercurrentes s’accroissent avec l’âge : environ 30 % des plus 70 ans sont hospitalisés au moins une fois par an. Dans l’étude de Rocco et al, la médiane pour les sujets de 60 à 69 ans était 9 jours d’hospitalisation par an et par patient à risque, 11 jours pour ceux de 70 à 79 ans et 13,5 jours pour ceux de plus de 80 ans, opposés à 7,7 jours pour ceux de 50 à 59 ans.

Pourtant, l’âge n’apparaît pas comme un facteur déterminant des hospitalisations, à la différence de la dénutrition marquée par l’hypoalbuminémie, du diabète, de la présence d’une artériopathie, d’un angor ou d’une insuffisance cardiaque congestive, et de la diminution d’activité : toutes circonstances que l’on rencontre il est vrai fréquemment chez les sujets plus âgés.

Cette expérience est partagée par Becker et al qui, à l’occasion d’une étude rétrospective de 178 dialysés âgés de 56 ± 15,4 ans, montrent que la maladie cardiovasculaire, le diabète, l’hypoalbuminémie, l’anémie sont significativement corrélés à la fréquence des hospitalisations, tandis que le diabète, l’artériopathie et l’hypoalbuminémie seuls sont liés à leur durée ; l’âge n’apparaît pas comme un facteur de risque particulier.

Dans la population d’octogénaires hémodialysés de Neves, les problèmes d’abords vasculaires justifiaient 52 % des hospitalisations, les causes gastrointestinales 17 %, les causes vasculaires 13 % et les phénomènes infectieux 12 %.

2- Résultats de la dialyse du sujet âgé :

Les résultats de la dialyse du sujet âgé peuvent être appréciés sur la mortalité mais aussi, de façon plus nuancée, sur l’amélioration, la stabilité ou l’aggravation de leur état clinique.

Une équipe d’auteurs néerlandais a apprécié ce devenir sur un ensemble de critères incluant certes le décès, mais aussi une évaluation chiffrée des hospitalisations et de leur durée, de la concentration en albumine ou de la valeur d’un score de dénutrition, d’une évaluation quantitative des possibilités physiques et psychiques et de la qualité de vie.

Bien que les dialysés de plus de 65 ans aient une évolution plus défavorable que les plus jeunes, les facteurs déterminant une évolution défavorable sont l’existence en début de dialyse de comorbidités, d’une hypoalbuminémie inférieure à 30 g/L, d’une diminution des capacités physiques et psychiques supérieure à deux déviations standards par rapport à la population générale et d’une clairance résiduelle inférieure à 2,5 mL/min. Pour les dialysés péritonéaux, une pression artérielle moyenne supérieure à 107 mmHg est aussi de mauvais pronostic.

3- Qualité de vie du sujet âgé dialysé :

Les améliorations des techniques de dialyse, la présence d’abords vasculaires fiables, le traitement efficace de l’anémie par l’érythropoïétine participent à l’amélioration du confort du dialysé et de sa qualité de vie.

Dans l’étude prospective de Lamping et al, l’appréciation des performances et de la qualité de vie psychique par les dialysés âgés n’était pas différente de celle des personnes de même âge en bonne santé.

En revanche, les capacités physiques étaient éprouvées comme réduites.

G - MORTALITÉ EN DIALYSE :

Le bon sens laisse présager que la mortalité des dialysés âgés est supérieure à celle des plus jeunes, mais les causes de mort sont en revanche particulières, et spécifiquement marquées par l’arrêt de la dialyse.

1- Chiffres de la mortalité :

Le registre 1999 de l’USRDS établit la mortalité, à partir du 90e jour de dialyse, pour les patients incidents en 1996 à 19,8 %, comparée à 22,8 % 10 ans plus tôt.

La mortalité de la première année est de 29,8 % pour les sexagénaires et de 46/100 patients/an pour les septuagénaires.

Ces chiffres marquent un progrès car, 10 ans plus tôt, ils étaient respectivement de 40,2 et 52,8/100 patients/an.

La diminution de la mortalité est donc surtout notable pour la tranche 65-74 ans.

Ces données sont établies à compter du 90e jour de dialyse, et la mortalité au cours de cette période est très élevée : pour la tranche d’âge 75-80, elle serait de 18 %, et de 25 % au-dessus de 80 ans.

Comparée à l’espérance de vie de la population générale des individus entre 65-69 ans qui est de 13 ans, elle est diminuée de deux tiers (3,8 ans) pour les dialysés du même âge.

En Europe, une étude prospective sur 7 ans (1985-1991) dans sept centres de cinq pays a permis de recruter 1 407 patients dont 42,4 % avaient un risque faible (< 70 ans, sans comorbidité), 33 % un risque médian (âge entre 70 et 80 ans ou une comorbidité), et 24,7 % un risque élevé (âge > 80 ans ou deux comorbidités).

La mortalité dans les 3 premiers mois fut de 8,7 % chez des patients dont l’âge allait de 63 à 69 ans, dont un tiers avait un risque médian et deux tiers un risque élevé.

La moyenne de la survie à 2 ans est de 81,5 %, la mortalité portant à nouveau sur les groupes à risque moyen et surtout élevé.

L’analyse des facteurs de mortalité montre que le risque élevé comporte une surmortalité multipliée par 6,23 et le risque moyen par 3,85. Le risque lié à l’âge est de 1,031 pour chaque année.

Cette dernière valeur est proche de celle qui lui est attribuée dans une méta-analyse de Johnson, où l’augmentation de 1 année d’âge entraîne un risque relatif de 1,029, le diabète 1,91, une cardiopathie 1,59 et une artériopathie 1,58.

Une étude rétrospective sur une période de 4 ans par une équipe anglaise révèle que la mortalité des plus de 75 ans est importante, puisque la survie à 1 an est de 53,5 % et à 5 ans de 2,4 %, celle des sexagénaires est de 72,6 % et 18,8 %, tandis que celle des moins de 65 ans est évaluée à 90,6 % et 61,4 %.

L’analyse prospective publiée récemment par Lamping et al, qui n’étudie les malades qu’après les 90 premiers jours d’hémodialyse, est plus optimiste que la précédente, puisque la survie globale de cette cohorte de septuagénaires est de 71 % à 1 an.

Plus précisément, elle est observée à 80 %, 69 % et 54 % pour les tranches d’âge 70-74, 74-79 et 80 et plus.

La mortalité est d’autant plus élevée que le nombre de comorbidités est grand : la survie est de 88 %, 71 % et 64 % pour l’absence de comorbidité, une, deux et plus.

Un âge supérieur à 80 ans confère un risque relatif de 2,79 (1,28-6,93), et une artériopathie périphérique un risque de 2,83 (1,29-6,17).

Le registre de l’association européenne (ERA-EDTA Registry) montre, dans une étude prospective de 1990 à 1992, que la mortalité dans les 90 premiers jours de dialyse frappe surtout les plus de 65 ans, avec un pourcentage de 59,1 % des décès dans cette période et de 52,7 % dans la période ultérieure.

Les patients qui meurent au cours des 90 premiers jours de dialyse sont plus vieux que ceux qui meurent après (64,1 + 14 contre 63,1 + 14,3 ans ; p < 0,001).

La survie à 2 ans pour cette tranche d’âge est de 67,1 % si les 90 premiers jours sont inclus, et de 72,6 % s’ils ne sont pas pris en compte.

La même source met en évidence une amélioration de la survie pour tous les groupes d’âge, et donc pour les plus vieux, lorsque sont comparées les périodes 1975-1979 et 1985-1989. Pour cette dernière et la tranche d’âge la plus vieille, une survie de 53 % à 5 ans en hémodialyse et de 44 % en dialyse péritonéale est observée.

Des observations récentes de UN Peri font également état d’une amélioration de la survie des dialysés très âgés (octogénaires) au cours de la dernière décennie, puisque la survie est évaluée à 82,6 %, 64 % et 19,6 % pour les première, seconde et cinquième années de traitement ; la médiane est de 29 mois.

Plus particulièrement, pour les patients traités depuis janvier 1995, la survie à 2 ans a augmenté à 76,9 ± 8,4 %.

Il faut relever que la cohorte étudiée n’était pas particulièrement sélectionnée pour des patients à risque faible, puisqu’elle comportait 22 % de diabétiques.

La comparaison de cette série à celles précédemment publiées montre une amélioration considérable du pronostic, puisqu’en 1979 la survie médiane était de 13,8 mois, en 1994 de 19,6 mois, et en 1996 de 25,9 mois.

Le rôle de l’âge et des comorbidités est aussi mis en évidence par Keane, à partir d’un effectif considérable.

Un âge supérieur à 75 ans comporte un risque relatif de 1,53 par rapport à la tranche d’âge 61-75, celui d’un score de Karnovsky inférieur à 60 est de 1,93, l’artériopathie des membres inférieurs de 1,72 et proche de celui d’une cardiopathie, d’une insuffisance respiratoire et d’un cancer.

RN Foley et PS Parfrey avaient en 1994 étudié les déterminants de la mortalité au cours des 90 premiers jours et observaient que les comorbidités jouaient un rôle déterminant plus important que l’âge.

En dialyse péritonéale, la courbe actuarielle établie par F Mignon et al montre pour une population à faible risque, un pourcentage de 90%, à 2 ans de 60 % et à 3 de 50%. Pour une population à risque plus élevé, les pourcentages sont respectivement de 65 % et 35 %.

Dans une population d’octogénaires, un travail de NB Dimkovic et al fait état de la survie de la moitié des dialysés à 2 ans, et d’une survie technique de 91,5 % à 1 an et de 81,4 % à 2 ans.

Cette étude met l’accent sur le fait que les complications ne sont pas fréquentes et graves tant que l’état d’autonomie des patients ne nécessite pas le recours à une institution.

L’ensemble de ces travaux souligne la gravité de l’état d’hémodialysé, mais indique également que l’âge chronologique a moins de poids (statistique) que les comorbidités qui l’accompagnent.

Les observations de l’USRDS mettent cependant en évidence une amélioration constante du taux de survie pour toutes les tranches d’âge, y compris les plus élevées. M Salomone avait suggéré cette tendance qu’il attribuait à l’amélioration des techniques de dialyse et de l’environnement thérapeutique (érythropoïétine, nutrition).

2- Causes du décès :

Selon Munshi et al, les affections cardiovasculaires rendent compte de 24 % des décès, les infections de 22 %, les cancers de 7 %, les accidents vasculaires cérébraux de 5 %.

Cependant, la cause prédominante au-delà de 75 ans est l’arrêt de la dialyse, qui est responsable dans cette population de 38 % des décès.

Le registre d’USRDS note, pour les plus de 65 ans, l’arrêt cardiaque de cause inconnue comme cause première responsable de 6,95 décès/100 patients/an, puis viennent ensuite les causes cardiaques diverses (infarctus du myocarde, arythmie, cardiomyopathie, insuffisance cardiaque) pour 8,29 %, les septicémies pour 3,47 %, les maladies cérébrales et les infections pour 2 % chacune.

Le pourcentage des causes est très proche quelle que soit la technique de dialyse, hémodialyse ou dialyse péritonéale, mais l’infection est plus fréquente en dialyse péritonéale.

Le traitement a préalablement été interrompu pour un dialysé décédé sur cinq, le pourcentage d’interruption de dialyse est évalué à 4,1/100 dialysés/an.

La fréquence d’interruption pour les plus âgés est de 11,5/100/an, avec une prévalence particulière chez les dialysés de race blanche (8,9 % par an) comparés aux sujets américains d’origine africaine (3,6 % an).

En Europe, les causes de la mort au cours des 90 premiers jours de dialyse sont cardiaques pour 41,2 %, vasculaires pour 12,4 %, refus ou retrait de dialyse pour 5 % et d’origine cancéreuse pour 5 % ; au-delà de cette période, les proportions sont respectivement de 38,6 % (p < 0,009) (p < 0,00025), 15 %, 4,4 % et 6,5 %.

Les étiologies de la maladie initiale ne sont pas indépendantes du taux de mortalité, puisque la maladie rénovasculaire et le diabète, pour les deux périodes envisagées, comptent les plus grands pourcentages et nombre absolu de décès.

Les insuffisances cardiaques valvulaires et hypertensives sont plus fréquentes initialement, tandis que l’hyperkaliémie, les accidents vasculaires cérébraux et les infarctus mésentériques le sont dans la seconde période.

Eu égard à leur grande fréquence chez les sujets âgés, et aux problèmes sociaux et éthiques qu’ils soulèvent, l’abstention ou le refus et l’interruption de la dialyse nécessitent d’être traités sous une rubrique particulière.

H - ABSTENTION ET INTERRUPTION DE LA DIALYSE :

Face aux registres du traitement par dialyse ou transplantation, le panorama épidémiologique de l’insuffisance rénale chronique est bien vague, et ne permet pas de mesurer l’ampleur du phénomène de l’abstention de mise en dialyse.

En termes crus, nous ignorons combien et pourquoi des patients meurent d’urémie alors qu’ils pourraient être traités et survivre.

* Abstention de dialyse

Une étude prospective menée par Sekkarie et al a tenté de mieux cerner la question.

Ils ont obtenu d’un tiers des médecins praticiens et d’une grande majorité des néphrologues de l’ouest de la Virginie qu’ils renseignent durant une année une fiche pour chaque patient auquel ils n’envisageaient pas de proposer une dialyse.

Les néphrologues envisagèrent l’abstention dans 7 % des cas (25/357), et les médecins praticiens dans 22 % des cas (42/193).

Un quart de ces derniers prirent leur décision sans consultation spécialisée et l’âge est cité comme motif dans 60 % des situations, associé à une maladie terminale (cardiaque, pulmonaire ou hépatique) dans 70 %, un cancer terminal chez 45 %.

Une démence était présente chez 35 %.

Le refus fut manifesté par le patient lui-même dans 60 % des cas et celui de la famille dans 25 %.

Ces patients avaient un âge moyen 72 ans (42-90), et bien qu’ils fussent généralement bien entourés par leur famille (80 %), ils vivaient majoritairement en résidence (84 %).

Une majorité d’entre eux n’avait pas la capacité de prendre la décision (56 %).

Les auteurs interprètent le faible taux de refus par les néphrologues par le fait qu’il est recommandé de proposer un essai de dialyse, et qu’il est généralement difficile de déterminer au cas par cas qui bénéficiera ou ne bénéficiera pas de la dialyse.

Une étude anglaise plus ancienne avait déjà montré que les néphrologues écartaient moins de patients que les médecins praticiens.

Une explication possible de cette différence est que les médecins traitants jouent le rôle d’un premier filtre à l’accession à la dialyse, écartant des malades en très mauvais état.

Une collaboration entre médecins et néphrologues serait souhaitable, dans ce domaine où l’enjeu est vital.

* Interruption de dialyse :

Dans la même étude, les auteurs ont quantifié les retraits de dialyse et investigué leurs causes.

Un arrêt de dialyse eut lieu dans 60 cas sur 822 (7 %).

Il s’agissait de personnes âgées (69,8 ans) résidant dans un tiers des cas en résidence médicalisée.

Les principaux motifs d’arrêt furent : une qualité de vie inacceptable dénoncée par le patient lui-même (41 %), une complication aiguë (21 %), une démence (12 %).

La capacité à prendre une décision était avérée chez 36 patients, dont 42 % furent d’ailleurs à l’instigation de la discussion de l’arrêt, en association avec le médecin dans 14 %.

La famille intervint seule ou avec le médecin dans 30 % des cas, et le médecin seul dans 11 %.

Chez les 21 personnes hors d’état de prendre une décision, la procédure de réflexion fut initiée par le médecin dans 62 % des cas, par la famille dans 10 % et les deux associés dans 24 %, dans 5 % des cas les infirmières intervinrent.

La moitié des patients dont la dialyse fut interrompue avaient rédigé leurs directives anticipées ; elles furent jugées utiles par 63 % des médecins, en particulier pour les personnes qui n’étaient plus en mesure de participer à la discussion.

Sur ce point, il n’existe pas dans les pays francophones, ni dans la communauté néphrologique européenne, de texte consensuel élaborant une procédure et une attitude fondées cliniquement, et répondant aux exigences sociales et éthiques.

Les néphrologues nord-américains réunis dans la Renal Physicians Association et l’American Society of Nephrology ont réfléchi et rédigé des recommandations destinées à préserver la qualité des soins en fin de vie.

Dans ce texte, le retrait de dialyse est acceptable (recommandation 6) lorsqu’un patient, en pleine capacité de prendre sa décision et pleinement informé, dans un choix volontaire, refuse la dialyse ou demande qu’elle soit interrompue, lorsque les patients qui ne possèdent plus leur capacité de décision avaient au préalable indiqué un refus de dialyse dans une directive anticipée orale ou écrite, ou dont un ou des représentants légaux préalablement et légalement désignés demandent que la dialyse soit interrompue.

Un arrêt de dialyse peut légitimement être envisagé en cas d’altération neurologique irréversible et d’une telle profondeur qu’ont disparu les signes d’activité intellectuelle, de sentiment, de comportement approprié et de la conscience de soi-même et de son environnement.

Ces recommandations sont entourées de garanties médicales et d’aide psychologique, destinées à assurer une pleine liberté et une pleine capacité à la personne en dialyse à déterminer son avenir.

Lorsque la décision est prise, une procédure de soins palliatifs est mise en oeuvre, comportant traitement symptomatique et analgésique, attention aux préoccupations psychosociales et spirituelles et identification de ce qui importe le plus à la personne mourante.

Transplantation rénale et personne âgée :

La transplantation rénale est le traitement de choix de l’IRCT.

Les sujets âgés de plus de 60 ans, il y a peu, étaient habituellement récusés en raison d’une mortalité et d’une morbidité accrues attribuées au traitement immunosuppresseur.

Les nouveaux protocoles d’immunosuppression ont permis d’élargir les indications, et l’âge en tant que tel n’est plus un obstacle à la greffe rénale.

En 1998, selon le rapport de l’établissement français des greffes (EFG), le nombre des inscrits de plus de 56 ans était de 491 personnes (soit 21,8 % de la liste), dont 83 de plus de 65 ans (3,7 % des inscrits), indiquant qu’un nombre très faible de personnes âgées dialysées est inscrit sur la liste d’attente.

Aux États-Unis, 7 % des urémiques de plus de 65 ans furent transplantés dans la période 1993-1997, représentant 8,5 % de la population greffée à la même époque.

Un second aspect de la question concerne l’utilisation de reins aux fins de greffe de personnes âgées en état de mort cérébrale.

A - SURVIE DU SUJET ÂGÉ TRANSPLANTÉ :

Dans les séries des années 1975 à 1980, la survie du patient greffé âgé de plus de 60 ans à 1 an variait entre 57 % et 75 %.

Un progrès notable a suivi l’utilisation de la ciclosporine, mais la différence de durée de survie par rapport aux receveurs adultes et en leur faveur demeure notable.

La survie des greffés de plus de 60 ans, recensée par l’EFG de 1985 à 1995 (1 350 receveurs), était de 91 % à 1 an, 80 % à 5 ans, 71 % à 8 ans et 56 % à 10 ans ; chez les 16-60 ans, elle était respectivement de 96 %, 95 %, 92 %, 92 %.

Les résultats de la Collaborative Transplant Study pour le même type de population témoignent en fait de grandes variations selon les équipes, car la survie à 1 an varie de 55 à 100 % et à 5 ans de 40 à 91 %.

Dans une même équipe ayant transplanté un grand nombre d’individus âgés, le constat d’une survie plus longue chez les plus jeunes est confirmé : 1 an après greffe, le taux de survie est de 95 % chez les moins de 60 ans et de 92 % pour les plus vieux.

À 10 ans, il est respectivement de 68 % et 46 % (p < 0,001).

La survie des greffés, comparée à celle des dialysés, permet de constater que le risque de décès diminue de 47 % en faveur des premiers, diabétiques ou non diabétiques. Le retour en dialyse des greffés est plus périlleux lorsqu’ils sont âgés.

Une étude-cas témoin de D Schaubel apporte la démonstration que la transplantation fournit une survie plus prolongée que la dialyse lorsque les patients sont appariés : le pourcentage de survie à 5 ans est de 81 % pour la greffe et de 51 % pour la dialyse. Les causes de décès sont identiques en nature, mais différentes en fréquence de celles des adultes.

Au cours de la première année de greffe, les infections sont responsables de 40,1 % des décès et les maladies cardiovasculaires de 32 %, mais, tandis que les premières décroissent les années suivantes (environ 14 %), les secondes augmentent (environ 40 %).

Aucune intervention thérapeutique n’est actuellement parvenue à réduire la mortalité cardiovasculaire en post-transplantation chez les sujets âgés.

Des mesures sont cependant couramment utilisées, comme la modification des facteurs de risque cardiovasculaire, la prescription de médicaments hypolipémiants, le contrôle de la pression artérielle, l’invitation à interrompre le tabagisme et à la pratique régulière d’une activité physique.

Les étiologies cancéreuses provoquent 7,4 % des décès dans la première année, puis 20 % ultérieurement.

Les facteurs prédictifs de la mortalité pour ces greffés âgés sont la présence d’une tumeur maligne (RR : 5), une maladie cardiovasculaire préalable à la greffe (RR : 2,2) et surtout un tabagisme (RR : 7,9).

Un âge supérieur à 70 ans est à la limite de la significativité (RR : 2,7 ; p < 0,055), ainsi que l’âge du donneur supérieur à 50 ans (RR : 1,9 ; p < 0,056).

B - SURVIE DU GREFFON RÉNAL CHEZ LE SUJET ÂGÉ :

Le devenir du greffon, les complications intercurrentes et le choix du traitement offrent des particularités chez les sujets âgés.

1- Données statistiques et facteurs de risque :

La survie du greffon du patient âgé a augmenté depuis l’utilisation de la ciclosporine.

Dans la littérature, revue par Jassal en 1997, un greffon fonctionnel à 1 an est constaté dans 49 % à 94 % des cas et à 5 ans dans 45 % à 74 %.

Le rapport 1998 de l’EFG indique qu’après censure pour les décès, la survie du greffon pour les plus de 60 ans est de 88,4 % à 1 an, de 82 % à 5 ans et de 74 % à 10 ans, les pourcentages pour les 16-60 ans s’établissant respectivement à 88 %, 76 % et 63 %.

Le constat de SE Doyle est proche, après censure pour les décès, la survie du greffon est équivalente chez les sujets âgés et chez les jeunes : 90 % à 1 an et 80 % à 5 ans.

Les facteurs prédictifs de la perte du greffon sont identiques à ceux qui déterminent la mortalité : présence d’un cancer, d’une maladie cardiovasculaire, âge avancé du donneur et surtout tabagisme.

Quand un groupe âgé à bas risque est comparé aux plus jeunes, les résultats en termes de survie et de durée de fonction du greffon sont identiques.

Ces observations ne sont pas identiques à celles de Meier-Krieshe : après censure pour le décès, et à partir de 2 336 greffés d’âge supérieur à 65 ans, la survie du greffon à 8 ans est de 50,7 % alors qu’elle est de 67 % pour le groupe 18-49 ans et de 62 % pour le groupe intermédiaire.

La différence pourrait être due à la disparité des équipes et des patients impliqués dans cet énorme population.

Dans cette même étude, le rejet chronique demeure une cause notable de perte du greffon (RR : 1,29 pour les 50-64 et RR : 1,67 pour les plus de 65 ans).

Ces mêmes auteurs suggèrent que l’âge avancé du receveur (plus de 65 ans) pourrait être un facteur de détérioration chronique, indépendamment des causes habituellement reconnues.

Cette hypothèse est renforcée par le travail expérimental de Liu et al, où les lésions de rejet chronique sont plus importantes chez les rats receveurs âgés que chez les congénères adultes ou jeunes, ce qui met en évidence une corrélation entre âge et poids du receveur, et lésions histologiques.

2- Sélection des receveurs :

L’amélioration de la durée de survie du patient s’effectue au prix d’une sélection soigneuse des receveurs potentiels d’une greffe.

Dans une série rétrospective portant sur une longue période d’observation (1980-1997), SE Doyle et al ont déterminé les facteurs prédictifs du devenir de leurs 206 greffés âgés et de leur greffon rapportés plus haut.

Peuvent donc être greffés, les sujets âgés indemnes de toute maladie néoplasique récente ou métastatique, d’infection active, de maladie extrarénale sévère (hépatite chronique, maladie respiratoire chronique) et de maladie mentale ou psychiatrique.

Le bilan prégreffe comprend habituellement une consultation cardiologique, une échographie cardiaque et un test de stress au thallium.

Si ce dernier est positif ou si le patient a des antécédents cardiovasculaires d’angine de poitrine ou d’infarctus du myocarde, il doit bénéficier d’une coronarographie.

L’évaluation des artères des membres inférieurs et de l’aorte se fait par échodoppler et artériographie si le sujet est symptomatique.

Une maladie artérielle périphérique n’est pas une contre-indication à la greffe rénale mais augmente la difficulté du geste opératoire.

Certaines équipes réalisent une échographie des voies biliaires et proposent une cholécystectomie avant transplantation si la vésicule est lithiasique.

Une fibroscopie oeso-gastro-duodénale et un lavement baryté sont également réalisés.

La colonoscopie est réservée aux patients victimes d’une maladie diverticulaire symptomatique.

Enfin, toutes les femmes bénéficient d’un examen gynécologique et d’une mammographie.

Pour les hommes, si la prostate est augmentée de volume, un dosage des prostate specific antigen (PSA) est réalisé.

La capacité d’adhésion aux protocoles thérapeutiques peut être évaluée par l’observance au cours des étapes antérieures à la greffe, et les tabagiques sont informés des risques supplémentaires encourus.

3- Complications de la greffe :

Les complications médicales les plus fréquentes sont les infections, notamment la tuberculose et les maladies à cytomégalovirus (CMV), dont la fréquence oscille selon les séries de 12,5 % à 33 %.

L’incidence du rejet aigu est significativement plus faible dans cette population, en raison d’une réponse immune probablement moins compétente.

La fréquence du diabète induit par la corticothérapie varie également selon les différentes études (2,5 % à 20 %), mais l’âge en est un prédicteur indépendant de son apparition et de la survenue d’une intolérance au sucre.

Enfin, certains auteurs rapportent la fréquence particulière des épisodes de pyélonéphrite aiguë, des septicémies.

L’ostéonécrose de la tête fémorale a également été rapportée.

Un peu plus de la moitié des patients (56,2 %) ne sont pas réhospitalisés après la transplantation rénale.

Les complications chirurgicales sont surtout d’ordre vasculaire et thrombotique.

4- Traitement immunosuppresseur :

Le traitement immunosuppresseur optimal du greffé rénal âgé reste à définir.

La ciclosporine a apporté une amélioration des résultats dans cette population, supérieure à celle des plus jeunes : l’incidence du rejet aigu est passée de 48 % à 33 %, les phénomènes infectieux ont diminué et la corticothérapie a pu être prescrite à dose plus faible.

Certaines équipes proposent de diminuer le traitement immunosuppresseur chez le sujet âgé, en raison de la possibilité d’une meilleure tolérance immunologique du greffon.

La ciclosporine peut être utilisée en monothérapie chez les greffés rénaux âgés ayant une fonction rénale stable, et indemnes d’épisode de rejet aigu.

L’utilisation du sérum antilymphocytaire est associée à un risque infectieux et à un risque de néoplasie plus importants, mais l’efficacité sur le rejet est supérieure.

Les nouveaux immunosuppresseurs n’ont pas encore été testés par des études prospectives dans cette circonstance.

C - SUJET ÂGÉ DONNEUR DE REIN :

La pénurie d’organes incite à reculer l’âge limite du donneur.

Aux États-Unis, entre 1988 et 1995, le nombre de donneurs âgés de plus de 50 ans a augmenté de 172 %, passant d’un taux de 12 % des donneurs à 25 %.

Dans Eurotransplant, en 1998, les donneurs de plus de 55 ans représentaient 25 des greffes cadavériques.

L’EFG fait état du prélèvement de 493 reins dans cette tranche d’âge (2,7 % du total des organes prélevés) au cours de la période 1985-1995.

L’ensemble des travaux apporte la notion que la survie du greffon est moins durable lorsque le donneur est âgé.

Le rapport de l’EFG constate une survie du greffon à 1 an de 82,3 % et à 5 ans de 69 % lorsque le donneur a plus de 60 ans, alors que les pourcentages sont de 87,2 % et 72,1 % respectivement lorsqu’il est plus jeune.

SR Kerr confirme que la survie des greffons cadavériques ou de donneurs vivants est plus faible lorsque l’âge est supérieur à 60 ans, et fait le constat que la survie du greffon provenant d’un donneur vivant de plus de 60 ans est identique à celle d’un greffon cadavérique venant d’une personne de moins de 55 ans.

L’âge du donneur a été individualisé, par une vaste analyse multivariée, comme un élément déterminant le résultat au long terme de la transplantation.

L’existence d’une HTA ancienne et d’une diminution de la clairance glomérulaire augure mal du devenir ultérieur.

Il en va de même de la présence de lésions histologiques telles qu’une sclérose glomérulaire, affectant 20 % du contingent.

Ces résultats ont été récemment confirmés par le travail de Fijter et al, qui montre que l’âge du donneur, le nombre de rejets aigus et le type interstitiel (type 1) du rejet déterminent la survie de la greffe.

Pour les auteurs, ces résultats suggèrent une augmentation de l’immunogénicité du rein âgé.

En outre, les séquelles du rejet aigu seraient moins aisément réparées sur un rein « âgé » que sur un « jeune » rein. Lorsque la clairance du donneur est inférieure à 90 mL/min, le donneur âgé de plus de 60 ans, ou la créatininémie terminale élevée, certaines équipes proposent une double greffe et constatent que le résultat est identique à celui des bénéficiaires d’un seul rein de « bonne qualité ».

Après une sélection stricte, les patients âgés de 60 ans peuvent légitimement être des candidats à la greffe rénale.

Plusieurs questions ne sont pas parfaitement résolues.

Quel est le traitement immunosuppresseur de choix ?

Comment prévenir les infections et les maladies cardiovasculaires ?

Faut-il réserver les reins « âgés » aux sujets âgés ?

Si le donneur est âgé et ses reins de qualité limite, faut-il préconiser des greffes doubles ?

Conclusion :

La consultation de la littérature et des différents registres du traitement de l’IRC amène à la conclusion d’une incidence plus élevée de la majorité des néphropathies chez les personnes âgées : néphropathies glomérulaires primitives et secondaires, néphropathies interstitielles, vascularites rénales et surtout néphropathies vasculaires liées à l’hypertension artérielle ou à l’athérome.

L’addition de ce fait épidémiologique et de l’augmentation de la taille de cette population conduit et conduira à une demande accrue de soins néphrologiques, phénomène qui soulève un problème économique d’importance.

Il est probable qu’une prévention, très en amont dans le cours de la vie, des seuls facteurs du risque cardiovasculaire réduirait notablement la fréquence de la maladie rénale.

Au plan thérapeutique, les travaux sur la capacité de différenciation des cellules souches hématopoïétiques en cellules rénales laissent entrevoir à très long terme la possibilité de la régénération d’un capital néphronique fonctionnel.

Ainsi serait réalisé, au moins dans le domaine néphrologique, le fantasme du Dr Faust.

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