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Réanimation-Urgences
Thrombose veineuse : diagnostic et traitement
Cours de réanimation - urgences
 

 

 

Introduction :

La maladie veineuse thromboembolique est une maladie qui reste fréquente et grave.

L’incidence du premier épisode de thrombose veineuse profonde (TVP) est d’environ 2-4/ 1 000 habitants/an aux États-Unis, mais elle est difficilement estimable compte tenu du nombre d’épisodes thrombotiques passés inaperçus, le diagnostic clinique manquant souvent de sensibilité et de spécificité.

Sa gravité est liée à la survenue d’une embolie pulmonaire (EP), principale complication en phase aiguë de la TVP responsable de 5 000 à 10 000 décès par an aux États-Unis.

En dehors de cette complication aiguë, le pronostic à moyen et long terme de la TVP est également étroitement lié au risque de récidive et à la survenue d’un syndrome post-thrombotique qui représente un coût élevé de santé publique.

La prévention d’une EP ou d’une récidive est la principale justification d’un diagnostic et d’un traitement adapté.

Le diagnostic clinique repose sur un interrogatoire et un examen clinique soigneux et la reconnaissance de situations à risque.

Ce diagnostic clinique doit ensuite être confirmé par des examens paracliniques dont essentiellement l’échodoppler.

Le traitement anticoagulant initial (héparine non fractionnée ou héparine de bas poids moléculaire) doit être poursuivi par un anticoagulant oral débuté en même temps.

La durée du traitement anticoagulant n’est pas encore résolue, mais peut être guidée par la présence de facteurs de risque persistants ou réversibles, ou la notion d’épisodes thrombotiques récidivants.

Il ne faut pas oublier les traitements non médicamenteux, notamment la contention élastique qui permet de diminuer de moitié la survenue du syndrome post-thrombotique. Le bilan étiologique ne doit pas être négligé tout en évitant les excès.

Il doit être complet, à la recherche d’une thrombophilie ou d’un cancer en cas d’antécédents personnels ou familiaux de thrombose ou en cas de récidive précoce après l’arrêt du traitement, voire, afortiori, sous traitement anticoagulant bien conduit.

Diagnostic positif :

A - SIGNES CLINIQUES LOCAUX :

Même si le diagnostic de TVP ne peut être porté sur le seul examen clinique, il reste capital dans la démarche diagnostique car il permet d’établir un diagnostic de présomption qu’il faudra ensuite confirmer par des examens paracliniques.

Il est important d’intégrer ces signes dans le contexte clinique, car ils n’ont pas la même signification suivant qu’ils surviennent chez un patient sans terrain à risque ou un patient à risque tel que : le patient cancéreux, le patient paralysé ou porteur d’une immobilisation plâtrée, le patient alité, le patient aux antécédents thromboemboliques, ou le patient revenant d’un voyage prolongé.

Chacun de ces signes cliniques peut être isolé, mais associés, leur valeur diagnostique est majorée.

L’absence d’un diagnostic de rechange est également un élément important en faveur du diagnostic de TVP.

DOULEUR SPONTANÉE

Elle représente souvent le premier signe d’appel. Elle n’a pas de caractère spécifique et son intensité est variable.

Elle peut aller d’une simple sensation de pesanteur à une véritable impotence fonctionnelle.

Elle est plus évocatrice lorsqu’elle siège sur un trajet veineux ou au niveau du mollet, mais elle peut se situer également au niveau de l’aine ou de la cuisse.

B - EXAMEN CLINIQUE :

1- OEdème :

Son siège est dépendant de celui de la thrombose.

Il est dur et ne « prend pas le godet ».

Son importance est appréciée par la mesure comparative des deux membres.

Cette mesure sert de référence pour le suivi évolutif.

2- Douleur provoquée :

Il s’agit du classique signe de Homans qui correspond à une douleur apparaissant à la dorsiflexion du pied.

Le patient est examiné en décubitus dorsal, les jambes fléchies à 90°.

La douleur peut également être provoquée par la compression du mollet dans le sens antéropostérieur.

Parfois, la palpation permet de retrouver un cordon veineux induré et douloureux.

3- Augmentation de la chaleur cutanée :

Elle s’apprécie avec le dos de la main.

Son caractère localisé est très évocateur d’une thrombose veineuse.

4- Dilatation des veines superficielles et cyanose :

L’hypertension veineuse superficielle secondaire à l’obstruction du réseau veineux profond par la thrombose est responsable d’une dilatation du réseau veineux superficiel.

Elle peut toutefois être difficile d’interprétation chez les patients présentant une insuffisance veineuse avec varices.

La cyanose peut apparaître en position déclive en raison de la stase veineuse.

C - SIGNES CLINIQUES GÉNÉRAUX :

Une hyperthermie aux environs de 38 °C, une sensation d’angoisse, une accélération du rythme cardiaque (pouls grimpant de Mahler) sont fréquemment observées.

D - FORMES CLINIQUES :

1- Thromboses veineuses des membres inférieurs :

Toute jambe douloureuse peut être une TVP.

La douleur spontanée ou provoquée par la palpation peut être d’intensité variable.

Il faut rechercher les autres signes cliniques qui sont parfois absents (oedème, augmentation de la température cutanée, dilatation veineuse superficielle...).

L’examen doit être comparatif, ces signes étant fortement évocateurs quand ils sont asymétriques. Le contexte clinique de survenue de ces symptômes est important.

2- Thromboses veineuses des membres supérieurs :

Elles n’ont rien de spécifique, mais on retrouve fréquemment une thrombose veineuse superficielle ou une lymphangite, notamment à proximité d’un abord veineux.

Les circonstances d’apparition de cette thrombose veineuse sont souvent évocatrices (pose d’un cathéter ou d’une chambre implantable, voire d’un pacemaker).

L’oedème de l’avant-bras ou du bras est associé à une douleur à type de pesanteur ou névralgie.

Une circulation collatérale peut se développer rapidement et un syndrome cave supérieur peut apparaître en cas d’extension à la veine cave supérieure.

Si aucune voie d’abord n’a été réalisée, il faut alors rechercher une pathologie médiastinale souvent tumorale ou un syndrome du défilé thoracique.

3- Thromboses pelviennes :

Elles surviennent dans un contexte particulier de chirurgie pelvienne, de grossesse ou de post-partum.

Chez la femme, il s’agit de thrombose des veines ovariennes détectable par certains examens paracliniques tels que le scanner ou l’imagerie par résonance magnétique (IRM).

Le tableau clinique est représenté par des douleurs abdominales, des troubles urinaires ou digestifs.

Parfois, la seule manifestation clinique est celle d’une migration embolique pulmonaire.

4- Phlébite bleue :

Il s’agit d’une urgence thérapeutique, car au tableau de TVP se surajoute celui d’une ischémie aiguë du membre inférieur atteint.

Elle associe une douleur intense localisée ou diffuse, un oedème, une cyanose, une ischémie avec pied froid, abolition du pouls et déficit sensitivomoteur.

Elle est souvent confondue avec une occlusion artérielle aiguë.

E - EXAMENS PARACLINIQUES :

Si la clinique permet d’orienter le diagnostic, les examens paracliniques restent cependant indispensables pour confirmer le diagnostic.

Suivant l’importance de la probabilité clinique, on débute ou non un traitement anticoagulant en attendant cette confirmation paraclinique.

1- Échodoppler veineux :

Cet examen s’est largement développé au cours de ces dernières années en raison de son caractère non invasif et de sa bonne accessibilité pour la plupart des praticiens.

Il associe la technique du doppler complétée par l'exploration échographique bidimensionnelle.

Le doppler couleur peut faciliter l’examen dans des zones anatomiquement difficiles.

Il fournit des informations morphologiques, les critères diagnostiques étant l’incompressibilité veineuse à l’appui de la sonde ou la visualisation d’une zone échogène endoveineuse représentant un thrombus.

En prenant la phlébographie comme « étalon or », cette technique a une très bonne sensibilité (97 %) et une très bonne spécificité (97 %) pour la détection des thromboses veineuses proximales (veine poplitée et veine fémorale).

La sensibilité serait en revanche moins bonne (# 50 %) pour la détection des thromboses surales, mais ceci dépend de la technique utilisée.

La technique habituellement utilisée en France permet d’améliorer grandement cette sensibilité pour les thromboses surales.

Certains auteurs proposent la réalisation d’un doppler de contrôle à 1 semaine en cas de forte suspicion clinique et de négativité de l’examen, afin de détecter l’extension proximale d’une éventuelle thrombose surale passée inaperçue.

Même si cet examen comporte certaines limites liées à l’expérience de l’opérateur, et parfois aux mauvaises conditions d’examen ou d’échogénicité chez certains patients, il a totalement supplanté la phlébographie comme examen de première intention pour le diagnostic de TVP.

2- Phlébographie :

Elle est encore considérée comme l’examen de référence pour le diagnostic des TVP, mais son caractère invasif la place en deuxième intention dans la stratégie diagnostique en cas d’échodoppler veineux non informatif, ce qui n’arrive actuellement que dans moins de 5 % des cas.

Cette technique nécessite l’injection de produit de contraste iodé au niveau de la veine dorsale du pied.

Les critères directs de positivité de l’examen sont la visualisation d’une lacune radioclaire ou d’une cupule ; les critères indirects étant l’absence de segment veineux principal et la présence d’une circulation veineuse collatérale

Malgré sa supériorité diagnostique, cette technique présente cependant certaines limites.

En raison de la dilution du produit de contraste, les veines iliaques et pelviennes sont mal visualisées, et contrairement à l’échodoppler, les veines musculaires (notamment soléaires) et la veine fémorale profonde ne sont pas explorées.

La qualité et l’interprétation de l’examen sont également opérateur dépendantes.

Enfin, pour des raisons inhérentes au patient, la réalisation de cet examen est parfois impossible (insuffisance rénale, infections locales ou absence de voie d’abord veineuse).

3- D-dimères :

Les D-dimères (DD) sont des produits issus de la dégradation de la fibrine.

Il existe différentes méthodes de dosage des DD. La méthode de référence utilise la technique enzyme-linked immunosorbent assay (Elisa).

Avec cette technique, un dosage négatif (inférieur à 500 μg/L) permet d’exclure le diagnostic de TVP avec une valeur prédictive négative proche de 95 %.

En revanche, un dosage positif ne permet en aucun cas d’affirmer l’existence d’une TVP.

Deux kits de dosage utilisant des techniques différentes sont actuellement disponibles en urgence et ont montré des performances identiques à la technique Elisa conventionnelle.

L’une utilise la technique Elisa et est réalisée de façon automatisée sur plasma, l’autre utilise une technique d’agglutination et est réalisée sur sang total.

Un test Elisa négatif associé à un examen échodoppler négatif permettrait d’éviter le recours à la réalisation d’un deuxième examen au septième jour.

Diagnostics différentiels :

Il faut rechercher toutes les affections pouvant avoir une symptomatologie faisant évoquer une phlébite. Une jambe douloureuse peut évoquer un problème musculaire (hématome, déchirure musculaire), une tendinite, ou des douleurs neurologiques (sciatique tronquée).

Une poussée d’insuffisance veineuse chronique, un lymphoedème, une compression extrinsèque peuvent être responsables d’un oedème.

Un lymphoedème ou un érysipèle peuvent évoquer un syndrome inflammatoire local sans TVP.

L’élimination de ces différents diagnostics accroît la valeur diagnostique des signes cliniques observés.

Diagnostic évolutif :

A - EMBOLIE PULMONAIRE :

Il existe un lien étroit entre TVP et EP et on peut affirmer qu’il s’agit d’une seule et même maladie.

Chez les patients ayant une EP, il existe une thrombose veineuse des membres inférieurs chez 70 à 90 % d’entre eux.

Le risque embolique est différent selon la localisation de la thrombose.

En cas de TVP proximale, le risque embolique est d’environ 50 %, alors qu’en cas de TVP distale, le risque embolique est d’environ 10 %.

L’EP seule constitue un facteur pronostique péjoratif en cas d’épisode thromboembolique. L’existence d’une EP associée ou non à une TVP signe une forme clinique plus grave que la TVP seule.

Il a été en effet prouvé que le risque de faire une EP mortelle sous traitement est trois fois plus important en cas d’EP initiale qu’en cas de TVP sans EP.

Des études, impliquant la réalisation d’une scintigraphie pulmonaire systématique, réalisées chez des patients porteurs d’une TVP proximale ont montré qu’il existait un pourcentage important (environ 50 %) d’EP dont la moitié sont asymptomatiques.

– Un dépistage systématique, même en l’absence de signe clinique d’EP par une scintigraphie pourrait donc être justifié en cas de thrombose veineuse proximale.

La mise en évidence d’une embolie scintigraphique, si elle ne modifie pas l’attitude thérapeutique, peut en effet servir d’examen de référence en cas de suspicion de récidive embolique sous traitement anticoagulant et permettre ainsi d’exclure bon nombre de fausses récidives.

Cette attitude pose cependant un problème en termes de santé publique du fait du coût qu’elle induit.

– L’angioscanner thoracique spiralé a pris une place importante ces dernières années dans le diagnostic de l’EP.

Son accès relativement facile et son caractère faiblement invasif font qu’il est souvent utilisé en routine dans de nombreux centres, la scintigraphie pulmonaire n’étant pas toujours disponible en urgence.

Pour apprécier la valeur diagnostique de l’angioscanner spiralé, plusieurs études ont été menées en comparaison avec l’angiographie pulmonaire montrant une bonne sensibilité et spécificité (respectivement 86 à 95 % et 92 à 97 %) dans le diagnostic des EP proximales.

Le diagnostic repose alors sur la mise en évidence directe du thrombus sous la forme d’un defect intraluminal total ou partiel, ou l a mise en évidence de l'atteinte parenchymateuse en aval.

L’angioscanner permet également de participer à l’enquête étiologique à la recherche d’un diagnostic différentiel.

Sa sensibilité et sa spécificité sont en revanche trop faibles pour éliminer le diagnostic d’EP périphérique (soussegmentaire) en cas d’examen normal, faisant alors courir un risque potentiel de récidive embolique aux patients.

Les limites de cet examen sont représentées, en outre, par :

– des difficultés techniques, en rapport avec la qualité du remplissage vasculaire, nécessitant un opérateur expérimenté ;

– les artefacts liés aux mouvements respiratoires ;

– l’impossibilité pour le patient de maintenir une apnée satisfaisante.

Afin d'établir la place exacte de l’angioscanner dans la stratégie diagnostique de l’EP, une grande étude multicentrique française est en cours de réalisation.

B - RÉCIDIVES :

La maladie veineuse est une maladie chronique dont l’évolution à moyen terme est marquée par le risque de récidive.

La fréquence de récidive de TVP après 1 an de suivi chez les patients ayant eu un premier épisode varie de 6 à 13%.

Cette variation vient du fait que ce risque est étroitement lié à la présence d’un facteur de risque réversible (chirurgie, traumatisme) où la récidive sera moins fréquente (5 %).

Au contraire, en l’absence de facteur de risque réversible (thrombophilie, cancer, immobilisation prolongée), ou lorsque la TVP semble idiopathique, le risque de récidive est beaucoup plus élevé (25 %).

La qualité et la durée de l’anticoagulation sont des déterminants essentiels du risque de récidive.

Même si la durée du traitement anticoagulant est controversée, il a été montré qu’un traitement anticoagulant oral d’une durée de 6 mois par rapport à un traitement de 6 semaines permet de diminuer les récidives de 50 %.

Il est important de signaler que la récidive a, en général, la même localisation.

C - SYNDROME POST-THROMBOTIQUE :

C’est une complication chronique de la TVP qui est causée par la combinaison d’une hypertension veineuse secondaire à l’obstruction veineuse et l’altération des valvules, et à une anomalie de la microcirculation.

L’incidence varie selon les études entre 20 et 100 % en raison de l’absence de définition précise, mais ce syndrome concerne plus de la moitié des TVP proximales et un tiers des TVP distales.

Ces séquelles sont la cause majeure de l’insuffisance veineuse chronique sévère qui représente un coût de santé publique important.

Il survient dans les 2 ans après le début de la TVP.

Les différentes stratégies thérapeutiques pour prévenir ce syndrome, notamment la thrombolyse, montreraient une diminution du syndrome post-thrombotique mais au prix de complications hémorragiques notables ; ce résultat est contesté.

À l’heure actuelle, le seul traitement efficace du syndrome post-thrombotique est sa prévention reposant sur une meilleure prise en charge de la TVP à la phase aiguë, et surtout sur le port de la contention élastique qui diminuerait jusqu’à 50 % l’apparition d’un syndrome post-thrombotique.

Diagnostic étiologique :

Il est important à réaliser car il permet d’aider à la décision de la durée du traitement anticoagulant oral.

Il faut savoir que l’âge est en soi un facteur de risque important, risque qui augmente exponentiellement après 40 ans.

Il peut également permettre de détecter une éventuelle pathologie sous-jacente justifiant d’un traitement spécifique et d’envisager (en cas d’anomalie constitutionnelle de l’hémostase) une enquête familiale pouvant permettre de prévoir d’éventuelles mesures préventives.

A - RECHERCHE D’UN OU PLUSIEURS FACTEURS DE RISQUE :

Chez un patient ayant présenté une TVP, il est important de rechercher le ou les facteurs de risque qui ont pu favoriser cet épisode thrombotique.

Leur mise en évidence, dans certains cas, doit permettre de les supprimer (pilule contraceptive, hormonothérapie substitutive de la ménopause), ou de les combattre (voyages prolongés) pour éviter une récidive thrombotique.

Les situations à risque sont représentées par : une immobilisation plâtrée, un traumatisme, un alitement de plus de 4 jours, la grossesse ou le post-partum, un acte chirurgical, en particulier une chirurgie orthopédique, carcinologique, ou pelvienne.

La contraception orale, le traitement substitutif de la ménopause, le traitement hormonal des cancers augmentent le risque relatif de TVP.

Cela est également vrai en cas d’obésité, d’insuffisance veineuse, d’insuffisance cardiaque ou respiratoire, d’antécédents personnels ou familiaux de thrombose.

Les voyages prolongés en avion, en car, ou en voiture, représentent également un facteur de risque.

Certains médicaments comme le Tégrétolt augmentent le risque de thrombose veineuse, surtout s’il est associé à d’autres facteurs de risque.

En cas de suspicion clinique de TVP, la présence d’un ou plusieurs facteurs de risque renforce la probabilité diagnostique.

B - ANOMALIES DE L’HÉMOSTASE : THROMBOPHILIES :

1- Anomalies acquises :

L’anomalie le plus fréquemment rencontrée est la présence d’un anticoagulant circulant et/ou d’un anticorps anticardiolipine.

La recherche d’un anticoagulant circulant se fait par la mise en évidence d’un temps de céphaline activé (TCA) allongé par rapport au témoin en dehors de toute héparinothérapie (en pratique à réaliser avant l’héparinothérapie ou sous traitement anticoagulant oral).

Le dosage des anticorps anticardiolipines immunoglobulines G (IgG) doit toujours être associé à la recherche d’un anticoagulant circulant.

L’existence d’un anticoagulant circulant fortement positif et confirmé à plusieurs reprises justifie la prescription d’un traitement anticoagulant oral au long cours avec un international normalized ratio (INR) supérieur ou égal à 3 du fait du risque de récidives de TVP mais aussi du risque de thromboses artérielles (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral).

La découverte d’un anticoagulant circulant justifie la recherche systématique d’une maladie auto-immune sous-jacente (et avant tout d’un lupus).

Il faut également rechercher une pathologie maligne ou une pathologie iatrogène (notamment après neuroleptiques), mais ce syndrome reste le plus souvent idiopathique.

2- Anomalies constitutionnelles :

Environ 25 % des TVP sont dues à une anomalie de l’hémostase.

Le bilan d’hémostase peut être réalisé avant la mise en route du traitement anticoagulant, pendant celui-ci mais sous certaines conditions, ou enfin à l’arrêt de ce traitement.

Les dosages de l’antithrombine III (AT III) et de la résistance à la protéine C activée (RPCa) sont modifiés par l’héparine (et doivent donc être réalisés sous antivitamines K (AVK), ceux des protéines C et S étant modifiés par les AVK (et peuvent donc être réalisés sous héparine seule).

Les déficits en AT III, protéine C et protéine S sont retrouvés chez 10 % des patients ayant présenté une TVP, mais sont responsables d’un risque de récidive élevé. Les premières manifestations thromboemboliques surviennent en général chez les sujets jeunes.

Leur recherche ne doit donc pas faire partie du bilan systématique d’une thrombose veineuse mais doit être discutée en fonction du contexte.

La mise en évidence de l’un de ces déficits nécessite a priori la poursuite du traitement anticoagulant au long cours, bien que cette attitude soit discutée, notamment s’il existe un facteur déclenchant évident (chirurgie, voyage...).

La RPCa est due à une mutation du gène du facteur V induisant le remplacement d’une arginine par une glutamine en position 305 de la protéine (mutation du facteur V de Leiden).

Elle se transmet sur le mode autosomique dominant.

C’est la cause la plus fréquente des thrombophilies puisqu’elle est retrouvée chez 20 % des patients ayant présenté une thrombose veineuse.

Contrairement aux autres déficits, le premier épisode de thrombose peut survenir chez des sujets âgés, mais le risque de récidive semble moins élevé que dans les précédents déficits.

Sauf en cas de déficit à l’état homozygote, situation relativement rare, la découverte d’un déficit hétérozygote ne justifie donc très probablement pas d’un traitement anticoagulant au long cours après un premier épisode thrombotique.

Il est en revanche nécessaire de réaliser des mesures préventives renforcées en cas de situation à risque.

Plus récemment, un nouveau facteur de risque de maladie veineuse thromboembolique a été mis en évidence. Il s’agit d’une mutation du gène de la prothrombine (transition G à A en position 20210).

Cette mutation semble fréquemment associée à la mutation du facteur V de Leiden.

Le risque thrombotique de ce déficit est encore mal évalué.

Des études récentes suggèrent une relation forte entre l’hyperhomocystéinémie et la thrombose veineuse.

L’hyperhomocystéinémie peut être causée par des facteurs héréditaires ou être liée à l’environnement.

Les carences en vitamine B12, en B6 et en folates peuvent être à l’origine de l’hyperhomocystéinémie que l’on peut corriger par supplémentation vitaminique.

On ne sait pas encore si le fait de corriger cette hyperhomocystéinémie permet de réduire le risque thrombotique.

Il semble par ailleurs exister une interaction entre le facteur V de Leiden et l’hyperhomocystéinémie, l’association de ces deux facteurs augmentant le risque de thromboses veineuses.

Enfin, il existerait une relation entre un taux élevé du facteur VIII et la thrombose veineuse.

Des études complémentaires sont nécessaires pour connaître le lien exact.

Pour des raisons d’économie de santé, un bilan d’hémostase complet n’est donc réalisé qu’après avoir recueilli l’histoire personnelle et familiale du patient.

Schématiquement, l’enquête concerne les patients jeunes, les patients ayant récidivé, ceux ayant une histoire familiale thromboembolique, et enfin les patients présentant une TVP de siège inhabituel (thrombose cérébrale ou digestive).

En ce qui concerne la recherche d’une RPCa, les attitudes sont plus controversées et certaines équipes la réalisent de manière systématique, notamment chez les sujets âgés.

En cas de découverte d’une anomalie constitutionnelle, une enquête familiale est réalisée afin de prévenir une maladie veineuse thromboembolique chez les membres de la famille encore asymptomatiques.

L’intérêt de ce dépistage est malgré tout controversé en cas de RPCa.

C - RECHERCHE D’UNE MALADIE DE SYSTÈME :

En dehors de l’existence d’un anticoagulant circulant et/ou d’un anticorps anticardiolipine, les maladies de système peuvent en effet induire une TVP.

Il s’agit essentiellement du lupus érythémateux disséminé, de la maladie de Behçet et de la maladie de Buerger.

Le bilan immunologique ne doit pas être systématique mais doit être guidé par la clinique qui recherche la possibilité d’une pathologie de ce type.

D - RECHERCHE D’UN CANCER :

L’association entre maladie veineuse thromboembolique et cancer est connue depuis longtemps puisqu’elle a été décrite par Trousseau en 1864.

L’épisode thrombotique peut être révélateur ou annonciateur, le cancer lui succédant alors dans des délais variables, la majorité des cancers survenant en général au cours des 6 premiers mois suivant la thrombose.

Les localisations le plus fréquemment retrouvées sont : le pancréas, les ovaires, les tumeurs primitives hépatiques.

La majorité des cancers sont dépistés lors du bilan systématique.

L’enquête étiologique doit donc comporter avant tout un interrogatoire et un examen clinique soigneux comprenant notamment les touchers pelviens.

Une radiographie du thorax, une échographie abdominopelvienne, une numération-formule sanguine, une vitesse de sédimentation et un bilan hépatique viennent les compléter, mais ne doivent pas se substituer à cet examen clinique qui reste l’élément majeur du dépistage initial. Le dosage de l’ensemble des marqueurs tumoraux n’est pas justifié.

Une surveillance clinique est nécessaire durant les 6 premiers mois, en particulier lorsque la thrombose est survenue sans facteur déclenchant.

La recherche minutieuse d’un cancer est en revanche justifiée si une récidive survient peu de temps après l’arrêt des AVK (récidive précoce), ou surtout si elle se produit malgré un traitement AVK bien conduit.

Traitement :

A - HÉPARINE :

Avant la mise en route du traitement, il faut contrôler : le taux de prothrombine, le TCA afin de dépister d’éventuelles anomalies de l’hémostase et la numération-formule des plaquettes pour disposer d’un chiffre plaquettaire de référence.

1- Héparine non fractionnée (HNF) :

Il est clairement établi que le traitement héparinique est efficace en cas de maladie veineuse thromboembolique et qu’il constitue le traitement de première intention.

Ce traitement doit être administré par voie intraveineuse continue, mais l’administration par voie sous-cutanée en deux ou trois injections par jour peut constituer une alternative tout aussi fiable, sauf chez l’obèse où l’on craint un problème de mauvaise absorption.

Cette voie d’administration reste cependant peu utilisée.

L’administration d’héparine intraveineuse discontinue est en revanche abandonnée en raison d’une augmentation du risque hémorragique.

L’attitude actuelle de mise en route du traitement est de débuter par une dose d’HNF adaptée au poids du patient de 450 U/kg/j.

On la fait habituellement précédée d’un bolus de 50 U/kg, même si l’utilité clinique de ce bolus n’a jamais été clairement démontrée.

Le contrôle de l’efficacité du traitement repose sur la mesure du TCA ou de l’héparinémie (mesure de l’activité anti-Xa) qui doit être effectuée 6 heures après la mise en route de la perfusion et vérifiée 6 heures après chaque changement de posologie.

En effet, il a été démontré que le taux de récidives précoces était directement lié à la rapidité d’efficacité du traitement anticoagulant.

Le contrôle est ensuite réalisé au moins une fois par jour.

La zone thérapeutique pour le TCA se situe entre 1,5 et 2,5 fois le témoin.

Les patients ayant un TCA inférieur à 1,5 ont un risque de récidive thromboembolique significativement plus élevé, alors que le risque hémorragique est significativement diminué si le TCA est inférieur à 2,5.

Par rapport aux HBPM, l’HNF a l’inconvénient de nécessiter une adaptation posologique car il existe une grande variabilité inter- et intraindividuelle.

Elle présente cependant l’avantage de ne pas s’accumuler en cas d’insuffisance rénale.

La sensibilité des réactifs utilisés pour effectuer la mesure du TCA varie cependant de façon très importante d’un laboratoire à un autre, ce qui constitue un problème majeur, source d’accidents thérapeutiques potentiellement graves par sur- ou sousdosage.

Des niveaux très différents d’héparinémie peuvent en effet correspondre à une même valeur de TCA suivant le réactif utilisé.

Il est donc plutôt conseillé de surveiller si possible le traitement par l’héparinémie, dont la zone thérapeutique se situe entre 0,3 et 0,7 U/mL, surtout si une inefficacité du traitement est suspectée.

Au départ, il convient de demander au laboratoire les zones thérapeutiques pour le réactif du TCA utilisé, zones qui doivent correspondre à une héparinémie entre 0,3 et 0,7 U/mL.

2- Héparines de bas poids moléculaire (HBPM) :

Les HBPM sont, depuis une dizaine d’années, largement utilisées dans le traitement de la maladie veineuse thromboembolique.

De nombreuses études ont montré que l’administration d’une HBPM par voie souscutanée, à dose uniquement adaptée au poids et sans surveillance biologique, était au moins aussi efficace et aussi sûre que l’HNF en perfusion intraveineuse continue avec adaptation posologique dans le traitement des TVP.

Toutefois, l’héparinémie par la mesure de l’activité anti-Xa peut s’avérer utile, dans certains cas, pour dépister un surdosage ou un risque hémorragique (insuffisance rénale, sujet âgé, obésité, femme enceinte).

La zone thérapeutique, qui n’est pas bien validée, se situerait entre 0,5 et 1 UI anti-Xa/mL, le prélèvement devant être effectué entre la troisième et la quatrième heure après l’injection, 2 jours après le début des injections.

Actuellement, seule une minorité de malades porteurs d’une TVP sont encore traités par HNF : les obèses, les insuffisants rénaux, les malades avec EP symptomatique associée et pour certains les femmes enceintes, les autres étant traités par une HBPM.

Les autres situations où l’on utilise également l’HNF en perfusion intraveineuse sont les situations pour lesquelles le malade doit subir des examens complémentaires agressifs comme une gastroscopie ou une coloscopie.

Du fait de leur simplicité d’utilisation (administration sous-cutanée et absence d’adaptation posologique à un test biologique du fait d’une moins grande variabilité inter- et intra-individuelle que l’HNF), les HBPM ont peu à peu supplanté l’HNF sauf dans les situations précitées.

Trois autres arguments plaident également pour ce remplacement : le fait que le risque de thrombopénies induites par l’héparine soit plus faible sous HBPM que sous HNF, la possibilité démontrée par deux études cliniques de traiter certains malades par HBPM à domicile, et enfin le fait que pour certaines HBPM, on peut d’ores et déjà réaliser un traitement par une seule injection sous-cutanée par jour.

La surveillance de la numération plaquettaire est toujours nécessaire deux fois par semaine, même si les études ont montré que le taux de thrombopénie était inférieur sous HBPM par rapport à l’HNF.

Il pourrait même être discuté de renforcer la surveillance pendant la période à risque [24].

3- Thrombopénies induites par l’héparine :

La thrombopénie induite par l’héparine (TIH) de type II ou immunologique est sévère.

Elle associe une thrombopénie et des thromboses artérielles ou veineuses dans un cas sur deux, et s’accompagne, dans ces caslà, d’un taux de mortalité proche de 20 %.

Elle survient dans 80 % des cas entre le cinquième et le 15e jour d’héparinothérapie, plus précocement en cas d’héparinothérapie antérieure.

Elle est définie par un taux de plaquettes inférieur à 100´109/L, mais toute baisse du chiffre plaquettaire supérieure ou égale à 30 % par rapport au chiffre initial est évocatrice.

Tout épisode thrombotique survenant sous HNF ou sous HBPM à doses curatives ou préventives doit faire absolument évoquer l’hypothèse d’une TIH.

Le diagnostic de TIH est un diagnostic clinique qui peut être confirmé par des tests biologiques.

En cas de suspicion clinique forte, quel que soit le résultat des tests biologiques, l’héparinothérapie doit être immédiatement interrompue et être remplacée par un autre traitement antithrombotique, soit pour traiter une thrombose précessive ou compliquant une TIH, soit pour prévenir la survenue d’une thrombose.

Il existe actuellement principalement deux thérapeutiques à notre disposition : le danaparoïde (Orgarant) et une hirudine (lépirudine : Refludant).

– Le danaparoïde (qui est un héparinoïde) se rapproche par son mode d’action de l’héparine mais il expose à un risque de réaction croisée de l’ordre de 5 % qui justifie une surveillance plaquettaire quotidienne, voire biquotidienne.

C’est la mesure de l’activité anti-Xa qui permet d’apprécier son efficacité et de dépister un risque hémorragique.

Il s’administre en perfusion continue ou par voie sous-cutanée.

– L’hirudine est une protéine inhibant spécifiquement la thrombine. Sa surveillance s’effectue par le TCA avec une zone thérapeutique se situant entre 1,5 et 2,5 par rapport au témoin.

Il existe néanmoins un risque hémorragique important lié en partie à la difficulté de surveillance, du fait de la grande variabilité des TCA et à l’apparition dans 50 % des cas d’anticorps antihirudine responsable d’une augmentation inattendue de l’effet anticoagulant.

L’introduction des AVK en remplacement de l’héparinothérapie ne constitue pas une bonne alternative dans cette situation de thrombose en raison de leur délai d’action et de leur risque d’hypercoagulabilité initiale susceptible d’induire des complications.

La prévention des TIH passe par une réduction de la durée du traitement héparinique (en introduisant les AVK de façon précoce) et par une surveillance plaquettaire.

B - TRAITEMENT ANTICOAGULANT ORAL : ANTIVITAMINES K

L’introduction précoce des AVK dès le premier jour de traitement de la thrombose veineuse est admise.

Cette introduction doit cependant être réalisée après avoir correctement évalué le risque hémorragique potentiel (chutes), la nécessité d’examens invasifs (ponction artérielle ou biopsies notamment digestives), et l’adhésion prévisible du patient, ou au moins de son entourage, au traitement anticoagulant oral.

1- Choix du type d’AVK :

Il faut distinguer les AVK à demi-vie courte (inférieure à 12 heures) telles que Sintromt (acénocoumarol) et ceux à demi-vie longue comme la Coumadinet (warfarine) et le Préviscant (fluindione).

La Coumadinet (warfarine), du fait de sa demi-vie plus longue, constitue le médicament de choix pour les traitements au long cours (fibrillation auriculaire, prothèse valvulaire, traitement au long cours d’une maladie veineuse thromboembolique).

Le Sintromt (acénocoumarol) a l’avantage d’exercer un effet anticoagulant plus rapide et peut être utilisé en cas de TVP ne justifiant pas d’un traitement au long cours.

En raison de sa demi-vie plus courte, l’administration du Sintrom se faisait avec deux prises par jour ; une étude récente montre qu’il n’y a pas d’argument pour ce mode d’administration et que la prise unique par jour est possible.

2- Surveillance du traitement AVK :

La surveillance du traitement AVK se fait par l’INR qui doit se situer dans une zone thérapeutique comprise entre 2 et 3.

L’obtention de cet objectif est absolument fondamental car elle permet de limiter considérablement les risques hémorragiques du traitement sans diminuer son efficacité.

Pendant la période de relais, le traitement par héparine (HNF ou HBPM) doit être poursuivi pendant une durée de 5 à 7 jours et ne peut être interrompu qu’après obtention d’un INR supérieur à 2 sur deux contrôles successifs.

Au-delà de 70 ans, on propose de diminuer la dose initiale d’un quart.

De nombreux médicaments ont une activité inhibitrice ou potentialisatrice sur les AVK.

L’attitude la plus sage est donc de renforcer la surveillance de l’INR chaque fois que l’on est amené à modifier les thérapeutiques associées.

3- Éducation du patient :

Afin de prévenir les complications du traitement anticoagulant oral, il est nécessaire d’expliquer clairement au patient l’objectif ainsi que le mécanisme d’action du traitement anticoagulant, les risques encourus en distinguant les accidents mineurs et majeurs nécessitant une prise en charge médicale urgente.

Le patient doit être averti qu’il ne doit pas prendre de nouveau médicament sans en parler au préalable à son médecin traitant, et qu’en ce qui concerne l’alimentation, il est important qu’elle soit équilibrée.

Ces explications sont notées sur une fiche AVK que le patient peut conserver.

Un carnet de surveillance permettant de noter les résultats des INR et les doses prises à domicile doit également être remis au patient.

Enfin, le patient doit garder sur lui une carte signalant qu’il est sous traitement anticoagulant oral.

La prise en charge du suivi et de l’adaptation posologique par des unités spécialisées permet d’améliorer le rapport bénéfice/risque du traitement anticoagulant oral.

4- Durée du traitement anticoagulant oral :

La durée du traitement AVK reste encore très controversée, mais des recommandations sont malgré tout proposées.

Pour un premier épisode de TVP, elle pourrait être de 3 mois s’il y a un facteur déclenchant réversible (chirurgie , traumatisme, voyage...), et de 6 mois en l’absence de facteur déclenchant évident.

Une durée d’au moins 1 an, voire au long cours, est généralement préconisée en cas de récidive et lorsqu’il existe un facteur de risque persistant (cancer, thrombophilie, immobilisation prolongée...).

Les modalités d’arrêt du traitement, là encore, sont controversées.

Il semble bien cependant qu’un arrêt brutal n’entraîne pas d’effet rebond et puisse être réalisé sans risque.

On peut cependant proposer une diminution progressive sur une quinzaine de jours lorsque le traitement préalable a été prescrit au long cours et lorsque les patients sont anxieux à l’idée de l’arrêt de ce traitement.

C - THROMBOLYSE :

Il existe de nombreuses controverses dans la littérature concernant le traitement thrombolytique dans la thrombose veineuse.

En effet, ce traitement coûteux présente un risque hémorragique trois fois supérieur par rapport au traitement par héparine pour un bénéfice qui n’est pas évident.

Mais la plupart des auteurs s’accordent pour ne l’utiliser que dans des cas très particuliers représentés par des thromboses proximales sévères, non occlusives, et datant de moins de 8 jours.

Ce bénéfice consisterait en une diminution du syndrome post-thrombotique, diminution qui n’est pas retrouvée par tous les auteurs.

La possibilité d’un risque embolique induit par le traitement thrombolytique n’est pas clairement établie.

Quoi qu’il en soit, les quelques indications pouvant être envisagées concernent des patients jeunes, sans aucun facteur de risque hémorragique et présentant une TVP proximale sévère et récente.

Le traitement habituellement utilisé est, soit la streptokinase administrée à la dose de 100 000 U/h après une dose de charge de 250 000 U sur 30 minutes, soit l’urokinase administrée à la dose de 2 200 à 4 400 U/kg/h.

La durée du traitement est habituellement de 48 à 72 heures, l’héparine n’étant reprise qu’après la fibrinolyse.

D - INTERRUPTION CAVE :

Les barrages caves définitifs (clips ou filtres caves) s’avèrent utiles dans certaines situations bien précises et relativement rares.

Les clips caves, qui nécessitent une anesthésie générale, tendent à être abandonnés. Les indications généralement admises concernent :

– une contre-indication absolue au traitement anticoagulant au cours d’une thrombose veineuse proximale.

Le problème est souvent de définir ce qui représente réellement une contre-indication absolue au traitement anticoagulant.

Il peut s’agir d’une contre-indication d’emblée ou d’un accident hémorragique survenant au cours du traitement imposant l’arrêt de celui-ci.

L’arrêt des anticoagulants induit un risque important de thrombose du filtre, ce qui nécessite la reprise du traitement anticoagulant dès que la situation du malade le permet.

En cas de thrombose surale, une simple surveillance par échodoppler répétée paraît suffisante, et on n’envisage la pose d’un filtre qu’en cas d’extension proximale ;

– une inefficacité du traitement anticoagulant ;

– la survenue d’une EP sous traitement anticoagulant est une indication licite, bien que très rare. Encore faut-il que cette récidive soit parfaitement documentée et que le traitement anticoagulant ait été adapté et suivi de façon correcte.

La réalisation systématique d’une scintigraphie pulmonaire en cas de thrombose veineuse proximale permet de servir d’examen de référence.

Si une EP sous traitement est suspectée, cet examen est répété et comparé à l’examen initial.

Cette procédure permet d’éliminer un grand nombre de fausses récidives mais pose bien sûr un problème de coût.

En cas de doute, le recours à l'angiographie pulmonaire est indispensable ;

– en cas d’extension de la TVP initiale malgré le traitement anticoagulant, le risque embolique étant mal connu, l’indication du filtre cave est plus discutable ;

– les suites d’embolectomies, situation dans laquelle la mise en oeuvre d’un traitement anticoagulant à doses efficaces est difficilement réalisable et le risque de récidive embolique menaçant ;

– le coeur pulmonaire chronique postembolique non opérable, car la moindre récidive peut être fatale.

Compte tenu de l’étude PREPIC, les autres indications sont très discutables et ne doivent être envisagées que de façon exceptionnelle au cas par cas :

– le caractère flottant du thrombus proximal a souvent été pris en compte, mais le caractère emboligène de ces caillots flottants (dont la définition elle-même est sujette à caution) vient d’être remis en question par une étude récente ;

– en fonction du terrain sur lequel survient la maladie veineuse thromboembolique.

En cas d’état cardiorespiratoire déficient (du fait d’une insuffisance cardiorespiratoire préalable ou d’une EP sévère associée), la pose de filtre cave pourrait alors à la rigueur se justifier, une nouvelle EP risquant d’être fatale, mais ceci nécessite des études complémentaires.

Malgré une efficacité indiscutable sur le risque embolique à court terme, les filtres caves définitifs majorent le risque de récidive de thrombose veineuse à long terme, et ceci sans effet sur la mortalité.

Si l’on rajoute à cela l’existence de complications mécaniques parfois très graves (migration du filtre, déchirure de la veine cave...) et le surcoût induit par ces matériels, on conçoit que leurs indications doivent être posées avec soin.

Si une indication de filtre cave est posée, le choix de l’opérateur est fondamental pour minimiser la survenue de complications mécaniques et compte tenu du risque de récidive de TVP, la nécessité d’un traitement AVK au long cours une fois le filtre en place mérite d’être posée ;

– les filtres temporaires pourraient constituer une alternative intéressante en évitant notamment les récidives de TVP à long terme, mais leur évaluation reste trop insuffisante pour pouvoir les préconiser actuellement.

Leurs indications en association avec un traitement thrombolytique pour éviter un hypothétique migration embolique induite par ce traitement semblent déraisonnables.

E - TRAITEMENT NON MÉDICAMENTEUX :

Le traitement médicamenteux doit obligatoirement s’accompagner d’autres procédures thérapeutiques.

1- Contention :

La contention élastique doit être réalisée par bandes de contention pendant la phase d’oedème avec un relais par collant ou bas jarrets de contention en fonction du niveau de la thrombose, sauf s’il existe une contreindication liée à une artériopathie des membres inférieurs.

Cette contention doit être parfaitement adaptée à la morphologie du patient afin d’éviter les phénomènes de garrot, source de récidive.

Elle doit être de classe II ou III. Sa prescription est fondamentale car elle réduit de moitié le risque de syndrome post-thrombotique.

La durée de prescription devrait être au minimum de 1 an en cas de TVP proximale.

Celle-ci sera plus ou moins prolongée ultérieurement en fonction de l’évolution clinique et échographique.

2- Drainages lymphatiques :

Les drainages lymphatiques selon la méthode de Leduc sont nécessaires en cas d’oedème et de douleurs importantes.

Ils présentent un effet très spectaculaire sur ces symptômes.

3- Surélévation des pieds du lit :

Elle doit être systématique en l’absence d’artériopathie associée.

4- Lever précoce :

Il est actuellement préconisé.

Ce lever peut être réalisé d’emblée en cas de TVP surale et au bout de 24 à 48 heures de traitement héparinique en cas de TVP proximale.

En cas d’EP associée ou d’oedème très important du membre inférieur, ce délai peut être rallongé.

Perspectives thérapeutiques d’avenir :

A - PERSPECTIVES À COURT TERME :

Compte tenu des études précitées, les HBPM permettent d’ores et déjà de réaliser un traitement à domicile même pour les TVP proximales.

Il faut cependant insister sur le fait que cette attitude ne concerne actuellement que des malades présélectionnés (les critères de sélection restent d’ailleurs à mieux définir) et qu’il s’agit plus, du moins au début, d’une courte hospitalisation que d’un véritable traitement à domicile.

Le passage initial du malade, dans les 24 à 48 premières heures, dans un centre spécialisé paraît en effet indispensable pour débuter le traitement anticoagulant, le relais héparine-AVK, envisager la contention élastique, l’éducation du malade et surtout organiser le bilan étiologique.

Cette attitude, porteuse d’une économie de santé considérable, pourrait permettre de concilier le confort et la sécurité du malade tout en impliquant étroitement le médecin traitant et le médecin spécialisé pour le retour au domicile.

B - PERSPECTIVES À MOYEN TERME :

Il est probable que les HBPM seront remplacées par le pentasaccharide qui correspond à la molécule active de l’héparine (celle qui se fixe sur l’AT III) et qui est fabriquée par synthèse chimique.

Ce médicament, prescrit en une injection souscutanée par jour, aurait notamment l’avantage d’être exempt du risque de TIH.

Il est également possible que les AVK soient également remplacées par des antithrombines directes (actives sans nécessité de l’AT III) utilisables par voie orale et qui, par rapport aux AVK, pourraient peut-être être prescrites sans nécessité d’un test de surveillance.

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