Tératologie et utilisation des médicaments au cours de la grossesse Cours de
Gynécologie Obstétrique
Tératologie
:
On définit tératogène tout médicament, substance chimique, virus
ou polluant qui perturbe le développement normal de l’embryon et
du foetus.
La tératologie est donc l’étude des anomalies du
développement foetal, que ce soit sur le plan structurel ou
fonctionnel, avec ses manifestations typiques telles que le
développement foetal insuffisant, l’avortement ou la mort in utero,
la carcinogenèse et les malformations.
Ces dernières, que l’on peut définir comme des défauts structurels ou
fonctionnels des organes, sont classées en mineures et majeures, les
formes majeures étant celles qui nécessitent une intervention
médicale parce qu’elles présentent un risque pour la vie du sujet ou
parce qu’elles ont des retentissements organiques ou fonctionnels
graves.
Les malformations congénitales sont mises en évidence
à la naissance chez environ 3 % de la population générale et chez
environ 4,5 % à l’âge de 5 ans.
Ces pourcentages, varient peu en
fonction de la population examinée, et constituent donc une garantie
méthodologique, lors de l’évaluation des études, que la population
étudiée n’a pas été sélectionnée.
La cause précise ou le mécanisme du défaut peuvent être mis en
évidence dans moins de 50 % des cas.
Certaines substances,
certains organismes et agents physiques sont connus pour être en
mesure d’altérer le développement embryofoetal, mais le problème
tératologique le plus fréquent et important pour le gynécologue est
constitué par les médicaments.
En effet, la plupart
des médicaments sont commercialisés sans expérimentation clinique
concernant l’administration au cours de la grossesse et, dans les
instructions d’utilisation des médicaments, on lit souvent la phrase :
« bien que les études tératologiques effectuées sur les animaux
n’aient pas mis en évidence d’effet tératogène comme pour les autres
médicaments, on ne doit cependant administrer cette substance au
cours de la grossesse ou pendant l’allaitement que dans le cas de
réelle nécessité et sous contrôle direct du médecin ».
En effet, le risque tératologique n’a été correctement étudié que pour
très peu de médicaments, le médecin ne dispose donc que de peu
d’éléments pour établir si les bénéfices potentiels apportés par un
médicament à l’organisme maternel sont supérieurs aux risques
d’effets embryofoetaux néfastes.
À cette incertitude s’ajoutent
d’autres problèmes liés à la prescription des médicaments en général
comme la difficulté de prévoir une grossesse (plus de la moitié
d’entre elles ne sont pas programmées) ou de la suspecter, au cours
de la période embryonnaire, chez des femmes dont les cycles sont
irréguliers.
Selon des enquêtes internationales, la plupart des femmes sont
exposées, au cours de la grossesse, à de nombreux médicaments
comme les vitamines, les sels minéraux, les antibiotiques, les laxatifs,
les antiémétiques, les sédatifs, les antiacides, les diurétiques et les
antihistaminiques.
Certains sont pris sans avis médical, ou sans
reconnaissance de l’état gravidique par la patiente.
Dans d’autres cas, en revanche, les médicaments sont indispensables
au traitement des pathologies graves ou dangereuses survenant ou
préexistant à la grossesse.
En effet, avec l’augmentation de l’âge
maternel et l’amélioration des moyens diagnostiques, de
nombreuses maladies chroniques sont diagnostiquées avant la
grossesse.
Il s’agit parfois de maladies qui interdisaient autrefois la
grossesse (lupus, cardiopathies), mais qui ne la contre-indiquent plus
aujourd’hui de manière définitive grâce à l’amélioration des
protocoles thérapeutiques qui doivent cependant être poursuivis
pendant la grossesse afin que la maladie ne reprenne pas le dessus
au cours de celle-ci.
Dans ce chapitre sont exposés les risques liés à l’administration des
médicaments au cours de la grossesse, les méthodes utilisées pour
établir les risques embryofoetaux éventuels et les approches correctes
pour communiquer ce type de renseignement aux patientes.
Rappel historique :
La tératologie est née de l’anatomie descriptive des foetus malformés
et s’est ensuite développée pour devenir un domaine
multidisciplinaire complexe, touchant à la clinique, à
l’épidémiologie, à la pharmacologie, à l’embryologie et à la biologie
cellulaire et moléculaire.
Historiquement, le tératogène le plus connu est le thalidomide, un hypnotique-sédatif également utilisé dans le traitement de la lèpre
et de la tuberculose.
Ce désastre des années 1960 a démenti l’idée,
autrefois très répandue, selon laquelle le placenta pouvait protéger
le foetus contre les médicaments.
En effet, à la suite de son
administration, entre le 27e et le 42e jour après la conception, de
graves malformations aux membres sont apparues avec, en dehors
de cet intervalle, des anomalies cardiaques et rénales.
Bien que 20 à
30 % des foetus aient été atteints de manière caractéristique, l’effet
tératogène est resté méconnu pendant des années, engendrant par
la suite la crainte que n’importe quel médicament pris au cours de
la grossesse puisse représenter un danger.
La plupart des
tératogènes ne provoquent en effet pas de malformations d’une
incidence comparable à celle du thalidomide, et des lésions aussi
typiques, ce qui rend difficile leur identification immédiate.
Ainsi,
moins de 30 médicaments sont actuellement connus pour être
certainement tératogènes chez l’homme aux doses thérapeutiques,
et peu d’entre eux sont d’usage courant.
D’autres médicaments précédemment considérés tératogènes tels
que le diazépam, les contraceptifs oraux, les spermicides, les
salicylés et la dioxylamine associée à la pyridoxine (Bendectint) ont
par la suite été reconnus comme sûrs grâce à des études plus
approfondies et à la méta-analyse.
Dans les années 1970, un procès avait été engagé aux États-Unis
contre le laboratoire producteur du Bendectint, antiémétique connu,
parce qu’il était considéré tératogène.
Le médicament fut donc retiré
du marché en 1982, privant ainsi les femmes américaines
d’antiémétiques approuvés par la Food and Drug Administration
(FDA) pendant de nombreuses années, ce qui eut pour conséquence
l’augmentation des hospitalisations pour vomissements gravidiques.
Des médicaments similaires n’ont pas été interdits dans d’autres
pays car l’absence de danger a été démontrée.
Après ces expériences, on a estimé qu’il serait suffisant d’étiqueter
les substances comme tératogènes pour en éviter l’administration
pendant la grossesse.
Mais cette stratégie s’est révélée insuffisante
quand l’isotrétinoïne fut introduite pour le traitement de l’acné dans
les années 1980.
Cette substance, bien que clairement définie comme
étant tératogène sur la notice, a frappé de nombreuses familles, par
ignorance ou parce que la grossesse n’avait pas été prévue, ou en
raison de l’échec du moyen contraceptif utilisé.
Les anomalies
congénitales ainsi provoquées furent très graves, touchant l’oreille,
le cerveau, le coeur et le thymus.
Un véritable programme de
prévention fut donc mis en place en 1989 : le Retinoid Pregnancy
Prevention Program comprenant un processus de consensus informé
détaillé sur la nécessité d’une contraception efficace.
Cependant,
aujourd’hui encore, les dérivés de ce médicament représentent un
important risque tératogène chez les patientes fertiles.
Effet tératogène
:
Les médicaments peuvent léser le foetus par effet tératogène
lorsqu’ils sont administrés pendant l’organogenèse, la période
embryonnaire comprise entre la 2e et la 8e semaine après la
conception (4e-10e semaine d’aménorrhée), et peuvent également
altérer la structure ou la fonction des organes au cours de
l’organogenèse.
L’effet tératogène dépend donc de trois facteurs au moins : la
période de grossesse, la susceptibilité foetale et la dose du
médicament.
Expérimentations animales :
Les expérimentations animales sont utiles en tant que méthode de
dépistage pour suspecter la tératogénicité d’un médicament et pour
l’étude du mécanisme d’action tératogène, mais leurs résultats ne
permettent pas de prévoir la réponse chez l’homme, et ce pour des
raisons biologiques et expérimentales (dosages élevés souvent
employés chez l’animal).
En effet, sur environ 1 600
médicaments étudiés, presque la moitié ont provoqué des effets
tératogènes chez l’animal bien que seule une trentaine de
tératogènes aient été documentés chez l’homme.
Les exemples
en sont nombreux.
Des dosages élevés de benzodiazépines induisent
des fentes palatines et labiales chez les animaux, mais pas chez
l’homme.
Les salicylés induisent des malformations cardiaques chez
les animaux, mais pas chez l’homme.
La prudence est donc de
rigueur dans l’extrapolation des effets tératogènes de l’animal à
l’homme afin de ne pas provoquer une anxiété inutile chez les
femmes enceintes et leurs familles, qui pourrait conduire à
l’interruption d’une grossesse désirée.
Le thalidomide est au contraire tératogène chez l’homme, mais pas
chez l’animal, de même que le misoprostol qui provoque un tableau
malformatif spécifique désigné sous le nom de séquence de
Moebius.
Il s’agit cependant d’exceptions car généralement, comme
dans le cas de l’isotrétinoïne, ce sont surtout les expérimentations
animales qui, en engendrant la suspicion de tératogénicité, sont en
mesure d’éviter un désastre similaire à celui du thalidomide.
Études sur l’homme :
Les études sur l’homme, pour être valides, doivent répondre à des
critères précis.
Les études rétrospectives, les études non contrôlées,
la description de cas cliniques peuvent être source d’erreurs
d’interprétation, surtout si elles concernent des médicaments
couramment utilisés au cours de la grossesse, car il existe une
certaine prévalence naturelle des défauts congénitaux correspondant
à environ 3 % à la naissance et à environ 5 % à l’âge de 5 ans,
indépendamment de l’administration de médicaments.
C’est
le cas de l’exemple déjà rapporté du Bendectint qui a été d’abord
retiré du marché et ensuite réhabilité.
Si, au contraire, le médicament
est peu utilisé et que la malformation caractéristique est très rare,
une association peut être établie, même avec un petit nombre de
cas.
La warfarine, le diéthylstilbestrol et l’isotrétinoïne ont été
suspectés d’être tératogènes chez l’homme sur la base de rapport de
cas cliniques parce que les lésions étaient rares dans la population
générale et qu’elles étaient spécifiques de ces médicaments.
La
spécificité et la rareté du tableau malformatif ont en général aidé à
transformer des soupçons en certitude.
Ainsi, en cas de suspicion sur la tératogénicité d’un médicament,
seules de vastes études peuvent confirmer les doutes suscités par
les descriptions des cas cliniques.
Les études épidémiologiques établissent :
– si les femmes enceintes prenant un médicament ont un nombre
supérieur d’enfants malformés par rapport à celles qui n’en
prennent pas (études de cohorte) ;
– si les mères d’enfants ayant une malformation spécifique ont pris
plus fréquemment le médicament par rapport à celles dont les
enfants ne présentent pas la malformation spécifique (études cas-contrôle).
Avec la création de centres spécifiques de consultation tératologique
téléphonique, des études d’observation prospectives fiables peuvent
être organisées, notamment si ces centres collaborent entre eux pour
former des ensembles de cas ayant une valeur statistique suffisante
pour repérer les cas rares de chaque type de malformation.
Les laboratoires pharmaceutiques eux-mêmes, en réalisant des
études prospectives de cohorte sur leurs médicaments, ont été utiles
dans l’établissement de la sécurité et des risques du Bendectint, de
l’isotrétinoïne, de la fluoxétine et de l’aciclovir.
Les méta-analyses ont pour but de rassembler les études ayant une
structure comparable, mais rassemblant chacune un nombre de cas
insuffisant pour tirer des conclusions valables.
Si la méthodologie
de récolte des données est correcte, les résultats peuvent être
fiables.
En ce qui concerne les substances qui agissent sur le développement
du système nerveux central (SNC), des études à long terme sont
particulièrement importantes pour évaluer les effets sur les fonctions
cognitives.
Certaines substances comme la carbamazépine et l’acide
valproïque peuvent provoquer des troubles cognitifs au-delà de
défauts du tube neural ; l’isotrétinoïne peut provoquer une altération
du développement neuropsychique, même chez des sujets ayant un
phénotype normal ; la warfarine peut provoquer la
chondrodysplasie ponctuée avec retard mental et, chez 1-2 % des
foetus, la malformation de la fosse crânienne postérieure connue
sous le nom de syndrome de Dandy-Walker.
D’autres difficultés d’interprétation des données sont liées à la rareté
des malformations, même chez des sujets exposés aux tératogènes.
Les tératogènes sont considérés comme tels parce qu’ils augmentent
le risque de défauts jusqu’à deux fois, mais rarement plus, à
l’exception du thalidomide et de l’isotrétinoïne.
Un pouvoir
statistique suffisant nécessite une étude incluant généralement des
centaines de sujets exposés au risque tératogène.
D’autres difficultés proviennent de la maladie traitée par le
médicament qui peut comporter des risques pour le foetus,
indépendamment du traitement choisi.
Par exemple, l’hypertension
et le cancer entraînent un risque augmenté de développement foetal
insuffisant ; l’épilepsie et le diabète sont liés à un risque de
malformation congénitale du foetus.
D’autres difficultés dans les études rétrospectives sont liées à ce que
la patiente a donné comme renseignements en raison de facteurs
émotionnels, ou aux modalités de récolte des informations.
Les
premières études ayant entraîné des conclusions erronées sur l’effet
tératogène des benzodiazépines, des spermicides et du Bendectint
étaient de type rétrospectif cas-contrôle.
Même les études prospectives non randomisées, fondées sur
l’observation, ne sont pas exemptes de critiques, surtout lorsqu’il
s’agit d’études neurocomportementales à long terme, comportant
des facteurs de confusion tels que le quotient intellectuel et le niveau
socio-économique et culturel des parents, données qui sont connues
pour influencer la fonction cognitive des enfants.
Les données obtenues auprès des laboratoires pharmaceutiques sont
en général mixtes, rétrospectives et prospectives, avec une forte
probabilité que la patiente qui a contacté le laboratoire l’ait fait à la
suite de problèmes et non pas de bénéfices provenant de la prise
des médicaments.
Il n’est donc pas étonnant que l’incidence des
malformations soit généralement plus de deux fois plus importante
dans les études rétrospectives que dans les études prospectives.
En revanche, en ce qui concerne les méta-analyses, la combinaison
d’études de qualité et de méthodologie non homogène, ainsi que le
fait que les études tératologiques montrant un lien cause-effet soient
publiées plus facilement que celles qui n’en relèvent aucun, laissent
perplexe.
Prévention tératologique
:
Si l’administration de médicaments notoirement tératogènes à une
patiente fertile est nécessaire, il est indispensable de réaliser au
préalable un test de grossesse et de mettre en place, pendant le
traitement, une contraception efficace.
La disponibilité de
contraceptifs efficaces, à longue durée d’action, a minimisé le risque
de grossesses imprévues pendant un traitement par des agents
tératogènes.
De nouveaux dispositifs intra-utérins et des implants
hormonaux (Levonorgestrelt), dont la durée d’action va jusqu’à 5
ans, sont disponibles, et sont donc théoriquement préférables à
l’acétate de médroxyprogestérone dont l’efficacité contraceptive dure
seulement 3 mois.
Si des mesures adaptées n’ont pas été prises avant
le rapport sexuel, une contraception postcoïtale peut également être
envisagée.
Il est inutile de souligner l’importance, surtout chez les femmes en
âge fertile, du célèbre aphorisme, que tout médicament ne doit être
utilisé qu’en cas de nécessité et si son efficacité est prouvée, car
seules 40 % des grossesses sont programmées.
Chez les quelques patientes ayant programmé une grossesse, il faut
agir comme si elles étaient déjà enceintes, et les médicaments les
moins dangereux pour le foetus doivent être choisis.
Dans le cas de médicaments qui font l’objet d’une accumulation
dans l’organisme maternel, une période d’attente plus ou moins
longue est observée après la fin du traitement selon le médicament
(isotrétinoïne : 1 mois ; étrétinate : 1 an).
Pour les vaccins, même ceux obtenus par technique recombinante et
non par virus atténué, il est d’usage d’attendre 3 mois, même en
l’absence de risque réel.
La contraception orale n’a pas d’effet tératogène et il n’est donc pas
nécessaire d’interposer une certaine période entre son arrêt et la
conception.
En conclusion, les principes généraux de prévention tératologique
suivants peuvent être considérés importants :
– en cours de grossesse n’utiliser de médicaments qu’en cas de
réelle nécessité, lorsque l’indication est certaine, en contrôlant les
effets bénéfiques et les effets secondaires et en informant la patiente
de la raison du traitement ;
– les patientes en traitement chronique doivent être informées de
manière détaillée et la datation échographique de la grossesse est
particulièrement importante en cas de prise accidentelle, car une
attention particulière est de rigueur au cours de la période
embryonnaire et de la période proche de l’accouchement ;
– si un traitement est indispensable, il faut choisir des médicaments
largement expérimentés, à la dose minimale efficace et ne jamais
utiliser de médicaments récemment introduits sur le marché, car cela
reviendrait à faire de la tératologie expérimentale.
Consultation tératologique
:
La patiente qui demande un avis sur l’exposition à des facteurs
potentiellement tératogènes doit être amenée à participer, elle doit
être prudemment informée, sans être alarmée inutilement pour ne
pas aggraver ses sentiments de culpabilité car, dans la plupart des
cas, le risque tératogène est faible.
Il suffit de penser que le risque
du thalidomide, qui est un tératogène puissant, n’est que de 25 %
environ.
Beaucoup de patientes, au contraire, tout comme leurs
médecins, sont très loin de la réalité, ce qui conduit de façon
inévitable à la panique et au risque d’interrompre des grossesses
normales.
Cependant, la conduite clinique par rapport à la prise de
médicaments pendant la grossesse, surtout en période
d’organogenèse, est particulièrement complexe, car nombreuses sont
les questions auxquelles il faut répondre.
– S’agit-il d’un médicament notoirement tératogène ?
– Y a-t-il des effets nuisibles sur le foetus ou sur le nouveau-né ?
– Quel est le risque maternel si le médicament est pris ou arrêté ?
– Y a-t-il des facteurs plus importants que le problème
pharmacologique, tels que la maladie à soigner ?
– Quelles sont les sources d’information auxquelles se référer ?
– Comment conseiller la patiente ?
La cause de la plupart des malformations congénitales est inconnue,
mais l’on sait que 20 à 25 % sont secondaires à des anomalies
génétiques, 3 à 5 % à des infections intra-utérines, 4 % sont associées
à des maladies comme le diabète, la phénylcétonurie, l’épilepsie.
Bien que moins de 1 % des malformations soient dues aux
médicaments prescrits, nombre de patientes, leurs médecins et leurs
avocats soupçonnent qu’à l’origine d’une malformation foetale, il y
a de toute façon un traitement médical particulier.
Peu de médicaments sont notoirement tératogènes, mais il est très
probable que la liste s’allonge avec le temps.
En effet, les
informations sur la plupart des médicaments sont insuffisantes à
exprimer un jugement fondé sur l’évidence scientifique.
Pour obtenir des informations, différents textes internationaux
existent, périodiquement mis à jour, ainsi que des
banques de données informatisées.
Enfin, la consultation de centres spécialisés locaux est généralement
la solution optimale, en évitant d’anticiper des avis infondés, tandis
que le soutien psychologique est toujours très important.
Afin d’aider les médecins dans l’interprétation du risque tératogène
associé à la prise de médicaments, en 1979, la FDA, sur la base
des données recueillies chez l’homme et chez les animaux, a classé
les médicaments en différentes catégories allant de la classe A pour
les médicaments sans risque, à la classe X pour les médicaments
tératogènes :
– catégorie A : médicaments considérés relativement sûrs, dans des
études bien contrôlées (par exemple : les vitamines) ;
– catégorie B : médicaments dépourvus de risques connus pour
l’homme, mais en l’absence d’expérimentation clinique sur l’homme
(par exemple : ampicilline) ;
– catégorie C : médicaments avec peu ou pas d’informations
disponibles comme ceux de récente introduction (par exemple :
zidovudine) ;
– catégorie D : médicaments dont les risques sont connus, mais qui
sont souvent indispensables (par exemple : antiépileptiques) ;
– catégorie X : médicaments dont les risques sont connus, et qui sont
de toute façon contre-indiqués car non indispensables (par exemple : isotrétinoïne).
Ces catégories, malheureusement peu à jour, parfois ambiguës, ne
sont donc pas d’une grande utilité. Par exemple, les contraceptifs oestroprogestatifs sont classés dans la catégorie X, bien que des métaanalyses
aient révélé qu’ils ne sont pas associés à une augmentation
des malformations.
Chaque année, des milliers de femmes
conçoivent pendant une contraception inadaptée et, en consultant la
classification de la FDA, elles pourraient être prises d’anxiété
infondée.
Les tricycliques sont classés dans la classe D
(évidence de risque) bien qu’il n’y ait pas de données prouvant ce
risque et que les données disponibles montrent, au contraire, leur
sécurité.
La Société de tératologie a conseillé d’abandonner cette
classification et la FDA semble avoir pris en considération cette
suggestion dans une réunion du 15 septembre 1997.
D’autres pays
comme la Suède, la Hollande, le Danemark et la Suisse utilisent
d’autres classifications fondées néanmoins sur des hiérarchies de
risque.
Enfin, les indications de certains médicaments prescrits en cours de
grossesse ne sont pas prévues dans la notice, comme la prévention
des avortements à répétition, de l’accouchement prématuré, des
infections néonatales, de la prééclampsie et de ses complications, la
maturation du col de l’utérus, ou l’induction de l’accouchement et
de la maturité pulmonaire foetale.
Cette prescription est proposée
plus couramment qu’on ne le pense et elle est validée par l’évidence
scientifique ou, à défaut, par l’habitude ou par le consensus qualifié.
Dans ces cas, il est particulièrement utile de se servir du consensus
informé de sorte que la patiente soit au courant du sens du
traitement prescrit.
Au début de toute consultation tératologique, il faut rassembler des
renseignements anamnestiques et pratiquer un examen clinique.
Il
faut dater la grossesse en se fondant sur les dernières règles et
l’échographie précoce et demander des renseignements sur le
médicament et sur sa prise (classe, dose, voie d’administration,
époque et maladie), sur la prise éventuelle d’autres médicaments et
sur l’utilisation des rayons X.
Il faut recueillir l’histoire familiale en
approfondissant l’aspect génétique et évaluer le risque malformatif.
Il est utile de subdiviser la grossesse en trois périodes :
– période préembryonnaire (14e-32e jour de l’âge gestationnel) ;
– période embryonnaire (33e-70e jour) ;
– période foetale (71e jour ou 10e semaine jusqu’au terme).
Pendant la période préembryonnaire, les effets sont presque nuls
car soit les concentrations du médicament auquel le zygote est
exposé sont minimes, soit un avortement infraclinique se produit
selon la « règle du tout ou rien ».
Pendant la période embryonnaire, l’effet est limité à la période de
développement de l’organe cible.
Pendant la période foetale, des altérations fonctionnelles
permanentes ou un hypodéveloppement foetal peuvent se produire.
De ce qui précède apparaît clairement l’importance fondamentale
d’établir l’époque réelle de la grossesse avec une échographie
précoce car, parfois, il est possible de déduire qu’à l’époque de la
prise du médicament la conception n’avait pas encore eu lieu, ou
que l’on ne se trouvait pas dans la période de l’organogenèse, ce qui
exclut donc toute possibilité de lésion.
Il faut aussi évaluer la
possibilité que le médicament puisse avoir été absorbé ou, comme il
arrive souvent, qu’il ait franchi le filtre placentaire.
Dans certains
cas, comme avec la trétinoïne, le risque est bien défini.
Il faut
toujours insister sur le fait qu’il existe un risque malformatif au
départ de 3 à 5 % et que pour plus de 50 % des médicaments, il n’y
a pas d’études contrôlées, tandis que certaines maladies comme le
diabète et l’épilepsie sont associées, si elles ne sont pas soignées, à
un risque indépendant supérieur au risque pharmacologique.
Pour ces cas, une consultation préconceptionnelle serait préférable,
même si cela est rarement réalisable.
Il faut souvent évaluer la
possibilité de retarder le traitement au-delà de la période de
l’organogenèse, mais si la maladie est grave, comme par exemple
dans le cas d’une leucémie, cela n’est pas possible, en dépit de la
toxicité des médicaments.
Le risque doit toujours être inférieur au
bénéfice, en utilisant la dose minimale efficace.
L’absence de données
sur les effets néfastes ne signifie pas sûreté et il est donc souvent
préférable d’utiliser de vieux médicaments plutôt que des nouveaux
sur lesquels on manque de renseignements.
Diagnostic prénatal
:
L’amniocentèse pour caryotype foetal n’a pas d’intérêt dans le
diagnostic des malformations foetales dues à des médicaments, alors
que l’échographie ciblée peut être très utile.
Cependant, il convient
de souligner, dans le consensus informé, que l’échographie, ainsi
que tout autre moyen diagnostique prénatal, ne peut jamais exclure
un effet tératogène.
Agents tératogènes
:
Certains médicaments, produits toxiques ou virus sont cause de
malformations et doivent donc être connus du médecin qui suit une
grossesse.
On trouvera plus loin dans l’appendice les principaux
tératogènes désignés dans le bulletin de l’American College of
Obstetrics and Gynecology (ACOG), qui sont étonnamment peu
nombreux, ainsi que les principales banques de données.
En ce qui
concerne tous les autres médicaments, il faut se référer aux textes de
la bibliographie, à Internet, à la consultation, même téléphonique,
d’experts des différents instituts compétents.
Aux États-Unis et en
Europe sont apparus les Teratology Information Services ou TIS,
sources complètes et multidisciplinaires de consultation médicale en
cas d’exposition prénatale.
Les TIS interprètent les renseignements
concernant un risque tératogène connu et potentiel en donnant des
évaluations du risque réel pouvant être communiquées aux
individus en âge reproductif ou aux médecins.
Les TIS sont
subdivisés en différentes sections recouvrant le territoire des États-Unis et du Canada (OTIS), et des pays d’Europe (ENTIS).
Pharmacocinétique et métabolisme
des médicaments au cours
de la grossesse :
Au cours de la grossesse, l’absorption, la distribution, le
métabolisme et l’excrétion des médicaments sont modifiés.
A - ABSORPTION
:
L’absorption intestinale est augmentée au cours de la grossesse par
diminution de la motilité gastrique et intestinale, particulièrement
marquée pendant le travail, avec augmentation de 30 à 50 % des
temps de transit.
L’augmentation du temps de transit gastrique a un
effet sur la dégradation des médicaments à pH acide ou augmente
la solubilité d’autres médicaments.
La sécrétion d’acide gastrique diminue de 40 % pendant la grossesse.
Le flux sanguin intestinal s’accroît par augmentation du débit
cardiaque.
La prise concurrente de plusieurs médicaments rend
encore plus complexe l’absorption en la renforçant ou en l’inhibant.
L’absorption pulmonaire des gaz, des solutions aqueuses et des
aérosols dépend de la ventilation alvéolaire et de la perfusion
pulmonaire qui augmentent dès les premières phases de grossesse,
induisant des concentrations plus élevées dans l’utérus et dans le
placenta.
L’absorption intramusculaire dépend du district intéressé, elle est
irrégulière dans les membres inférieurs en raison de la stase
veineuse et plus efficace au niveau des membres supérieurs.
L’absorption cutanée et muqueuse est très augmentée en raison de
la vasodilatation de la peau et de toutes les muqueuses, notamment
vaginale.
L’absorption épidurale de certains médicaments, comme la péthidine, peut être comparable à une administration intraveineuse.
B - DISTRIBUTION :
Les médicaments administrés à la mère se distribuent dans son
organisme, dans le placenta, dans le foetus et dans le liquide
amniotique.
Du côté maternel, il faut considérer :
– l’augmentation du volume plasmatique présente à partir de la 12e
semaine, atteignant son maximum (jusqu’à 50 %) à la 28-30e semaine
et la diminution relative de la concentration des globules rouges et
de l’hémoglobine ;
– l’augmentation des liquides intra- et extracellulaires, qui entraîne
une dilution des médicaments hydrosolubles ;
– l’augmentation de la masse du tissu adipeux, qui entraîne la
persistance de l’effet des médicaments liposolubles tels que le
diazépam ou les anesthésiques généraux ;
– la diminution de l’albuminémie avec augmentation de la fraction
libre du médicament et donc de l’efficacité thérapeutique et de la
toxicité (diazépam, phénytoïne, acide valproïque).
Cet effet rend
souvent nécessaire une modification des protocoles thérapeutiques
au cours de la grossesse ;
– l’augmentation des a-1 et des a-2 b-lipoprotéines et la diminution
des a-1 glycoprotéines auxquelles se lient certains médicaments ;
– l’augmentation précoce et stable du débit cardiaque de 1,5 L/min
avec augmentation de la fréquence cardiaque de 15 battements/min
et de la fraction d’éjection systolique.
Tous ces phénomènes modifient la pharmacocinétique au cours de
la grossesse, généralement en augmentant le volume de distribution
des médicaments et en diminuant les concentrations maximales.
C - MÉTABOLISME :
Le métabolisme des médicaments est peu modifié au cours de la
grossesse, que ce soit qualitativement ou quantitativement, et ces
modifications sont mal connues.
Dans les rares études
comparatives, comme par exemple sur le phénobarbital et sur la péthidine, il n’y a pas de différence importante.
Le métabolisme
hépatique est d’importance fondamentale et dépend du lien du
médicament avec les protéines plasmatiques, de la clairance et de la
perfusion hépatique.
La diminution du lien avec les protéines
plasmatiques entraîne une augmentation de la fraction métabolisable
du médicament.
Les dimensions et la perfusion hépatiques ne
semblent pas modifiées au cours de la grossesse, alors que la
clairance est augmentée par l’action du système réticuloendothélial
et de l’activité microsomiale.
L’effet cholestatique des oestrogènes
diminue l’élimination biliaire des médicaments.
D - EXCRÉTION
:
Les médicaments sont excrétés par voie rénale, biliaire et
pulmonaire.
L’excrétion rénale est la plus importante car elle s’accroît dès la 10e
semaine par augmentation du flux plasmatique et de la filtration
glomérulaire.
Le lien avec les protéines plasmatiques peut avoir des
conséquences sur la clairance rénale et entraîner des fuites
importantes de médicaments dans les urines.
De ce fait, les doses isolées ou répétées induisent des concentrations
sanguines inférieures à celles qui seraient produites en dehors de la
grossesse, alors que l’injection continue induit un état stationnaire
plus précoce qui comporte toujours des niveaux inférieurs à celui
généré à l’état prégravidique.
E - PASSAGE TRANSPLACENTAIRE :
L’étude du passage transplacentaire est difficile en raison des
différences anatomiques physiologiques et métaboliques entre les
différentes espèces animales, bien que des méthodes de perfusion
placentaire in vitro existent.
D’autres méthodes comprennent l’étude
des avortements thérapeutiques ou la détermination des
concentrations cordonales à la naissance.
La plupart des
médicaments (99 %) traversent le placenta par simple diffusion par
effet du gradient de concentration (loi de Fick), et donc la notion de
barrière placentaire doit être abandonnée car elle est trompeuse.
Le
passage placentaire par diffusion dépend du lien avec les protéines
plasmatiques, du poids moléculaire, du gradient de concentration, de la surface d’échange et de l’épaisseur de la membrane basale (âge
gestationnel), des caractéristiques de liposolubilité ou
d’hydrosolubilité et du pH sanguin.
Les substances de poids
moléculaire inférieur à 600 daltons traversent le placenta plus
rapidement, tandis qu’au-dessus de cette valeur la liposolubilité de
la molécule devient le paramètre principal.
Le passage des vitamines se fait en général par transport actif.
Le lithium diffuse passivement, mais le calcium, le zinc et l’iode, qui
sont très importants sur le plan nutritionnel pour le foetus, sont
transportés activement.
Le passage du mercure est entravé ainsi que, du moins en partie,
celui du plomb, alors que le cadmium ne passe pas et que le fluor
diffuse librement.
Le processus de pinocytose explique le passage des grosses
molécules telles que les anticorps.
Les concentrations atteintes dans le sang foetal, pour la plupart des
médicaments, ne dépassent généralement pas 50 à 80 % de la
concentration maternelle.
Les principaux facteurs qui influent sur le passage placentaire sont :
– l’âge gestationnel, important parce qu’il influe sur l’épaisseur de
la membrane basale et sur la surface des villosités ;
– le lien avec les protéines plasmatiques, qui empêche le passage
placentaire alors que cet effet est moins prononcé dans les molécules
liposolubles en raison de leur rapide dissociation ;
– le flux placentaire, qui influe sur le transfert des médicaments,
surtout des médicaments liposolubles à transfert rapide ;
– l’activité contractile intense, qui peut limiter la diffusion des
médicaments en influant sur le flux utérin ;
– les pathologies maternelles et foetales telles que la prééclampsie et
l’hydrops foetal.
F - MÉTABOLISME PLACENTAIRE ET FOETAL :
Les molécules peuvent être transformées par le placenta et par le
foetus en mutagènes, carcinogènes, tératogènes ou inactivées.
Les
enzymes hépatiques hydroxylantes foetales sont présentes dès le 1er
trimestre.
Les médicaments parviennent au foetus par la veine
ombilicale et peuvent shunter le foie par le canal veineux ; jusqu’à
60 % de la dose ayant traversé le placenta peut arriver directement à
la veine cave inférieure.
Pour cette raison, et du fait de l’immaturité
de la barrière hématoencéphalique, une quantité plus importante
que chez l’adulte parvient généralement au cerveau foetal.
Il est donc évident que si le métabolisme placentaire des
médicaments s’installe précocement, le métabolisme foetal
commence surtout au cours de la dernière phase de la grossesse.
G - LIQUIDE AMNIOTIQUE :
La présence du liquide amniotique complique la pharmacocinétique
de la grossesse parce que sa quantité est variable et peut constituer
une réserve où les médicaments et leurs métabolites peuvent
s’accumuler comme c’est le cas pour la péthidine, prolongeant
l’effet foetal après l’arrêt du traitement.
Dans le cas des
molécules hydrosolubles, un passage amniochorial ou
paraplacentaire existe aussi, mais il est généralement négligeable par
rapport au passage placentaire.
H - DISTRIBUTION FOETOPLACENTAIRE :
De nombreux facteurs influencent l’équilibre des concentrations
foetomaternelles.
En effet, le lien avec les protéines plasmatiques est
moins important chez le foetus que chez l’adulte, du fait de leur
concentration moindre, des différences qualitatives et d’affinité, et
des différences quantitatives d’autres substances telles que la
bilirubine non conjuguée, les acides gras libres, les hormones, etc.
La différence de pH entre la mère et le foetus peut modifier
sensiblement le transfert de substances faiblement basiques comme
les anesthésiques locaux qui, en cas d’alcalose maternelle, peuvent
passer plus facilement dans le foetus.
Certains médicaments se concentrent sélectivement dans certains
tissus, c’est le cas des tétracyclines (os et dents), de la chloroquine et
de la phénothiazine (rétine), des antithyroïdiens, de la phénytoïne et
de la progestérone (glandes surrénales).
Médicaments de premier choix
au cours de la grossesse
:
Au cours de la grossesse, en cas de nécessité réelle, il convient
d’utiliser les médicaments selon des critères généraux qui fassent
l’objet d’un consensus.
Les médicaments traditionnels
sont préférables aux nouveaux, c’est-à-dire les médicaments donc la
sécurité pour le foetus a été démontrée par de vastes études de
cohortes ou des méta-analyses.
Il faut les utiliser aux dosages
minimaux efficaces bien que l’hémodilution et l’augmentation de la
clairance rénale entraînent souvent l’utilisation de doses supérieures
aux doses prégravidiques.
Toute initiative personnelle des patientes
dans la prise de médicaments doit être vivement déconseillée au
début de la grossesse.
Appendice
:
PRINCIPAUX TÉRATOGÈNES :
*
Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine
(par exemple : énalapril, captopril)
:
Le risque augmente
au cours des 2e et 3e trimestres par hypotension foetale, ischémie
rénale, insuffisance rénale.
* Acide valproïque :
Effets : anomalies du tube neural (spina bifida), anomalies faciales
mineures, 1 % de défauts ouverts quand l’exposition est précoce,
avant la fermeture du tube neural.
* Alcool
:
Effets : hypodéveloppement intra- et extra-utérin, retard mental,
microcéphalie, hypoplasie faciale avec faciès caractéristique, défauts
cardiaques et rénaux et autres malformations majeures et mineures.
La coexistence éventuelle de déficits nutritionnels, de tabagisme, de
consommation de drogues et de médicaments peut brouiller le
tableau clinique.
Les foetus de femmes qui boivent deux verres de boissons alcoolisées
par jour peuvent présenter une réduction du poids foetal tandis que
celles qui boivent six verres par jour ont 40 % de risques de
présenter certains facteurs du syndrome.
* Androgènes et dérivés de la testostérone (par exemple : danazol)
:
Effets : virilisation des foetus féminins et augmentation du
développement génital des foetus masculins, dose-dépendant et lié
au stade de développement embryonnaire au moment de
l’exposition.
L’administration avant la 9e semaine peut produire une fusion labioscrotale tandis que la clitoromégalie peut être observée à
n’importe quelle époque.
Le risque lié à une exposition occasionnelle
est moindre.
* Antifoliques (méthotrexate et aminoptérine)
:
Effets : risque augmenté d’avortements et de différentes anomalies.
Ils ne doivent pas être utilisés dans le psoriasis et avec beaucoup de
précautions dans les tumeurs malignes car il s’agit de tératogènes
bien documentés.
Au cours du 1er trimestre, ils provoquent une
incidence de malformations de 30 % dans les foetus qui ont survécu.
Le
risque de défaut du tube neural, à prévalence lombosacrée est de
1 à 2 % au cours du 1er trimestre et augmente avec la prise d’autres
antiépileptiques.
* Cocaïne
:
Effets : atrésie intestinale, malformations congénitales du coeur, des
membres, du visage, du tractus urogénital, microcéphalie, hypodéveloppement foetal, infarctus cérébral.
Le risque peut être modifié par l’utilisation d’autres substances.
Le
risque de mort soudaine et de décollement placentaire existe.
* Coumariniques (warfarine)
:
Effets : hypoplasie nasale et anomalies des extrémités épiphysaires,
mains grandes et courtes avec phalanges raccourcies, anomalies
oculaires, hypodéveloppement foetal, retard de développement,
anomalies du cou et du SNC.
Le risque de défauts importants est de 15 à 25 % au cours du 1er
trimestre (6-9 semaines) tandis que l’exposition tardive peut
provoquer des avortements, des morts intra-utérines, des anomalies
du SNC, un décollement intempestif du placenta, des hémorragies
foetonéonatales.
* Diéthylstilbestrol :
Effets : adénocarcinome à cellules claires du vagin et du col de
l’utérus, adénose vaginale, anomalies utérines et du col, anomalies
testiculaires, infertilité.
Adénose vaginale dans plus de 50 % des cas
avant la 9e semaine et faible risque d’adénocarcinome.
Anomalies
testiculaires chez 25 % des foetus de sexe masculin.
* Phénytoïne :
Effets de l’hypodéveloppement foetal, microcéphalie, retard mental,
anomalies craniofaciales, défauts cardiaques, hypoplasie des ongles
et des phalanges distales.
Le syndrome complet est observé dans
moins de 10 % des cas, mais environ 30 % peuvent présenter
certaines de ces manifestations.
Un retard mental léger ou modéré
est retrouvé chez les enfants ayant les signes caractéristiques.
L’effet provient d’un gène mutant qui diminue la production
d’époxydrolase, une enzyme nécessaire au blocage de l’effet
tératogène de l’époxyphénytoïne.
Le risque au
cours du 1er trimestre est faible, contrairement à ce que l’on estimait
par le passé, tandis que l’exposition au cours du dernier mois de
grossesse peut produire des effets toxiques sur la thyroïde, le reins
et le système neuromusculaire.
La paralysie cérébrale peut survenir même en
cas d’exposition au cours du 3e trimestre (poisson et blé contaminés).
* Plomb :
Effets : risque d’avortement, mort in utero.
Le développement du SNC peut être compromis.
La mesure des niveaux sanguins préconceptionnels peut être utile dans les cas à risque.
* Streptomycine et kanamycine :
Effets : surdité et atteinte du VIIIe nerf.
Aucune atteinte foetale par la
gentamicine ou la vancomycine n’a été rapportée.
* Thalidomide
:
Effets : défauts bilatéraux des membres, anotie et microtie, anomalies
cardiaques et gastro-intestinales.
En cas d’exposition entre le 35e et
le 50e jour de gestation, 20 % des foetus sont atteints.
* Tétracyclines
:
Effets : hypoplasie de l’émail avec inclusion du médicament dans
les dents et les os avec dyschromie des dents de lait.
On ne connaît
pas d’effets au cours du 1er trimestre.
* Trimétadione et paramétadione :
Effets : fente labiopalatine, anomalies cardiaques, hypodéveloppement,
microcéphalie, retard mental, faciès caractéristique,
anomalies oculaires, des membres et génito-urinaires.
Le risque
d’avortement est de 60 à 80 % au cours du 1er trimestre.
Un
syndrome caractéristique avec anomalies oculaires, de l’implantation
des oreilles, du palais et de la dentition a été identifié. Ces
médicaments ne sont plus utilisés, car il en existe de plus efficaces
moins toxiques.
* Vitamine A et dérivés (isotrétinoïne et rétinoïdes)
:
Effets : avortement, microtie, anomalies du SNC, agénésie du
thymus, anomalies cardiovasculaires, dysmorphies craniofaciales,
microphtalmie, fente labiopalatine, retard mental.
L’exposition prégravidique à l’isotrétinoïne ne comporte pas de
risque car il n’y a pas d’accumulation dans les tissus.
Bien que
l’étrétinate ait des effets qui se prolongent dans le temps, des
applications locales ne comportent pas de risque.
Il s’agit de la plus fréquente des infections congénitales.
Son
incidence est de 40 % après l’infection primaire, et de 14 % après
infection récurrente, tandis que les effets foetaux sont observés dans
20 % des cas d’infection primaire et dans 8 % des cas d’infection
secondaire.
Il n’y a pas de traitement efficace.
* Rubéole :
Effets : microcéphalie, retard mental, cataracte, surdité, malformations
cardiaques, altérations de tous les organes.
L’incidence
est de 50 % au cours du 1er trimestre et de 6 % au cours du
2e trimestre.
La vaccination est recommandée, sauf au cours de la grossesse, bien
que la possibilité de malformations liées au virus atténué n’ait pas
été démontrée.
* Syphilis
:
Effets : les infections graves induisent la mort et l’hydrops foetal
tandis que des infections légères provoquent des anomalies de la
peau, des dents et des os.
La pénicilline est efficace pour limiter les dégâts.
La gravité de
l’atteinte dépend de la durée de l’infection.
L’atteinte est plus grave
si l’infection est supérieure à 20 semaines.
La prévalence de la
syphilis est en augmentation continuelle et, chez les femmes
enceintes atteintes, il faut toujours exclure la coexistence d’autres
maladies à transmission sexuelle.
* Toxoplasmose :
Effets : possibles sur tous les organes mais particulièrement sur le SNC : microcéphalie, hydrocéphalie, calcifications cérébrales.
La choriorétinite est l’effet le plus fréquent.
La gravité des
manifestations dépend de la durée de la maladie qui a une
prévalence faible au cours de la grossesse (0,1 à 0,5 %).
Pour que le
foetus soit exposé à un risque, l’infection initiale doit avoir été
contractée au cours de la grossesse.
La transmission a lieu par la
viande crue ou par contact avec des déjections de chat.
Au cours du
1er trimestre, l’incidence de l’infection foetale est de 9 %, augmentant
jusqu’à 59 % au cours du 2e trimestre.
La gravité de l’infection
congénitale est supérieure au cours du 1er trimestre par rapport à la
fin de la grossesse.
Le traitement par la pyriméthamine, la
sulfadiazine ou la spiramycine est efficace.
* Varicelle :
Effets : possibles sur tous les organes, y compris la peau, choriorétinite, cataracte, microcéphalie, hypoplasie des mains et des
pieds et atrophie des muscles.
Le risque de varicelle est faible, de 2
à 3 %, et s’exprime entre la 7e et la 21e semaine.
L’immunoglobuline
est disponible pour les nouveau-nés exposés au cours des 4-7
derniers jours de grossesse.
L’herpes zoster n’a pas d’effet.
* Radiations :
Effets : microcéphalie, retard mental.
Les examens diagnostiques
(< 0,05 Gy) ne comportent pas de risque. Ils induisent une
exposition inférieure à 0,01 Gy (pyélographie < 0,0041 Gy) (1
gray = 100 rad).
Conclusion
:
Pour conclure, le domaine de la consultation de tératogénétique est
complexe et plein de risques car, outre la tératogénicité réelle, la
désinformation peut provoquer des interruptions de grossesse de foetus
sains ou l’arrêt de traitements utiles et sans risque pour le foetus.
Seule
une consultation bien informée et sereine peut limiter ces risques.