Techniques d'anastomoses iléoanales avec réservoir Cours de Chirurgie
Historique
:
Ravitch, dès 1947, a décrit des anastomoses iléoanales (AIA) sans
réservoir après coloproctectomie pour des rectocolites infantiles.
Cette
technique fut abandonnée pour des raisons fonctionnelles.
Best, en
1948, tenta d’améliorer les résultats de l’intervention en associant la
conservation d’un manchon musculaire rectal pour améliorer la
continence.
Ce n’est qu’en 1978 que Parks développa l’AIA avec réservoir en S.
Actuellement, c’est un réservoir en J qui est le plus souvent utilisé.
Il a
été décrit par Utsunomiya.
Il est facile de réalisation (à la pince GIA)
et ses résultats fonctionnels sont meilleurs qu’avec les autres types de
réservoir en S et W de Nicholls.
Les réservoirs en S peuvent
entraîner des troubles de l’évacuation pouvant amener à des intubations
pluriquotidiennes, et les réservoirs enWsont plus compliqués à réaliser.
C’est donc le réservoir en J qui est utilisé par la plupart des équipes
actuellement.
Il existe trois types d’AIA après coloproctectomie.
Les deux premières techniques conservent un manchon musculaire
rectal de 2 à 3 cm:
– AIA avec anastomose manuelle après mucosectomie ;
– AIA avec anastomose mécanique.
La dernière technique, que nous utilisons préférentiellement, est une AIA avec anastomose manuelle, avec section sur la ligne pectinée après
éversion rectale, sans conservation d’un manchon rectal.
Technique
:
L’intervention débute par une coloproctectomie qui est commune aux
trois types d’anastomoses.
Dans notre expérience, les patients ont une préparation colique par XPrept
la veille de l’intervention.
Il n’est plus utilisé actuellement
d’antibiothérapie préopératoire.
Les patients reçoivent une antibioprophylaxie peropératoire de 2 g à l’induction d’Augmentint
avec une réinjection de 1 g en peropératoire toutes les 2 heures.
A - Coloproctectomie et confection du réservoir
:
1- Installation
:
Le patient est installé en position double équipe permettant une double
voie d’abord abdominale et périnéale.
L’exposition périnéale
doit être la meilleure possible en prenant soin de bien faire déborder les
fesses du patient de la table dans les meilleures conditions d’asepsie chirurgicale.
Au temps périnéal, il faut relever les jambes du patient pour
exposer au mieux l’anus.
Il est préférable de marquer l’emplacement de l’iléostomie avant la
laparotomie, au niveau de la fosse iliaque droite.
2- Voie d’abord
:
La voie d’abord est une médiane débutant à l’aplomb de la symphyse
pubienne et remontant jusqu’à la xiphoïde.
3- Colectomie totale
:
Elle débute à droite par le décollement de tout le mésocôlon droit ;
l’iléon terminal est alors sectionné au ras de la valvule de Bauhin à la
pince GIA.
Le mésentère de la dernière anse est respecté dans son ensemble.
Le
pédicule iléo-cæco-colo-appendiculaire est lié au ras du cæcum,
respectant ainsi au mieux d’éventuelles artères récurrentes iléales.
La section du mésocôlon se poursuit par la section du pédicule colique
supérieur droit qui sera lié au ras du pédicule mésentérique supérieur,
afin de libérer la plus grande longueur de l’axe mésentérique.
Les côlons transverse et gauche sont libérés et leurs mésos sont liés.
En
cas de rectocolite ulcérohémorragique, la section du méso se fait au plus
près du côlon ; lors d’une polypose adénomateuse familiale, pour
respecter les règles d’une exérèse carcinologique, en cas de polype
dégénéré, les ligatures se portent aux pédicules mésocoliques à leurs
origines.
Avant de débuter la dissection du rectum, il faut apprécier la capacité du
grêle de descendre à l’anus, avant d’entreprendre la dissection rectale :
celle-ci en effet « coupe les ponts » et interdit le recours à l’anastomose iléorectale si le grêle ne permet pas d’atteindre l’anus pour faire une
AIA.
4- Plasties mésentériques
:
Deux procédés de plastie peuvent être utilisés pour permettre une
meilleure descente du grêle à l’anus.
* Procédé de Dozois
:
Il consiste à sectionner le pédicule iléocæcal près de son origine, ce qui
permet de gagner 5 cmenviron.
Il doit être utilisé lorsque la longueur
du pédicule est importante et que la branche d’origine de la mésentérique
supérieure en est à distance permettant d’espérer un gain de longueur
appréciable.
Il est possible de mesurer la longueur obtenue en mesurant
les pédicules et d’extrapoler leur allongement.
* Procédé d’Utsunomiya
:
La plastie mésentérique porte sur le pédicule iléal terminant l’axe
mésentérique supérieur.
Il respecte le pédicule iléocæcal.
La section de
ce pédicule permet l’allongement de la fenêtre mésentérique en regard,
et donc de gagner environ 5 à 6 cmde longueur en moyenne.
Le choix de l’un ou l’autre procédé n’est pas simple.
Seule l’étude
attentive du mésentère des deux dernières anses et de la longueur des
vaisseaux droits afférents au grêle permet de choisir l’un des deux
procédés.
Ainsi, ce n’est qu’après mesure de la longueur estimée de l’un
ou l’autre pédicule que le chirurgien choisit le type de plastie à utiliser
(le plus souvent celle de Dozois, dans notre expérience).
L’axe mésentérique est libéré du pancréas et du troisième duodénum.
La mesure de la descente de l’iléon est ensuite effectuée.
Il faut que
celui-ci atteigne un point situé à 6 cm sous la symphyse pubienne.
En
effet, Smith a montré que, dans ce cas, l’iléon pouvait atteindre l’anus
dans 100 % des cas.
Dans notre expérience, il est rare que ce point soit
atteint ; toutefois, si le grêle dépasse de 2 à 3 cmla symphyse pubienne,
il atteint l’anus sans tension excessive.
5- Confection du réservoir en J
:
Elle peut alors être entreprise.
Elle utilise deux anses grêles de 15
à 20 cm de long, dépendant du point iléal le plus bas qui est pris comme
sommet du réservoir.
Celles-ci vont être anastomosées l’une à l’autre par
leur bord antimésentérique à la pince GIA ; pour ce faire, deux orifices
de 1 cm environ sont réalisés à 6 cm du sommet du réservoir.
La
pince GIA est introduite d’abord vers le grêle proximal ; plusieurs
chargeurs sont nécessaires pour réaliser la suture de la partie haute du
réservoir : ceci est réalisé en « fripant » la zone déjà
anastomosée pour atteindre le sommet de la poche.
Ceci effectué, quelques points séparés de Prolènet 5/0 adossent
l’extrémité supérieure des deux anses grêles afin d’éviter toute traction
sur la ligne d’agrafes.
L’agrafage du segment inférieur est alors effectué : deux chargeurs sont
utilisés.
Il persiste toujours, dans notre expérience, un pont muqueux
distal qui doit être sectionné à la pince, après évagination de celui-ci à
travers la brèche iléale.
Les lignes d’agrafes sont alors vérifiées par en dedans, à travers la
brèche ; une hémostase complémentaire est souvent effectuée à points
séparés de Prolènet 5/0.
La brèche iléale est suturée transversalement par un surjet de Prolène
5/0.
Le réservoir est prêt pour l’anastomose.
6- Dissection du rectum
:
Elle est effectuée au ras de l’organe en respectant les nerfs présacrés pour
protéger au mieux la fonction génitale.
La dissection est menée jusqu’au plancher des releveurs en assurant
soigneusement l’hémostase.
En cas de cancer du rectum ou de dysplasie rectale sur polypose
adénomateuse familiale, le mésorectum est enlevé dans sa totalité et les ailerons moyens sont liés au ras de la paroi.
La pièce est ouverte pour
s’assurer d’une marge de sécurité de 2 cm entre le pôle inférieur de la
tumeur et la ligne pectinée.
En cas de sclérolipomatose importante, une exérèse large du
mésorectum est aussi réalisée pour permettre une meilleure ampliation
du réservoir dans le pelvis.
7- Fermeture et lavage du rectum
:
Le rectum disséqué est alors fermé à la pince TA 55 au-dessus du
plancher des releveurs.
Le moignon rectal est lavé avec du sérum bétadiné à 10 %, à l’aide d’une
canule introduite par l’anus.
B - Variantes du niveau de section rectale
avec ou non mucosectomie :
L’opérateur est passé en position périnéale.
Les jambières ont été
relevées.
Le périnée a été rebadigeonné.
Suivant le niveau et le mode de la section rectale, on distingue :
– l’incision de la muqueuse rectale au niveau de la ligne pectinée avec
réalisation d’une mucosectomie ;
– l’évagination du rectum à travers l’anus, puis section en totalité
(musculeuse comprise) au niveau de la ligne pectinée sous contrôle de
la vue ;
– le rectum n’est pas resectionné et l’anastomose est effectuée à la pince
mécanique par voie transsuturaire ; la muqueuse transitionnelle du bas
rectum est alors conservée.
1- Section au niveau de la ligne pectinée et mucosectomie
:
Deux écarteurs de Gelpi sont placés perpendiculairement l’un à l’autre
dans l’anus et exposent le canal anal.
La mucosectomie débute par l’infiltration de la sous-muqueuse au sérum
adrénaliné à 1‰, ce qui facilite la dissection et la rend moins
hémorragique.
Une incision muqueuse est effectuée au niveau de la ligne pectinée et la
dissection est menée dans le plan de la sous-muqueuse.
La muqueuse
est disséquée sur 2 à 5 cmselon les auteurs.
La paroi rectale est incisée à la partie supérieure de la mucosectomie et
le moignon rectal sus-jacent au manchon musculaire est alors retiré.
L’hémostase du manchon rectal est complétée.
2- Évagination du rectum et section au niveau de la ligne pectinée
:
Le rectum fermé et lavé est évaginé à travers l’anus à l’aide d’un tampon
monté, après une dilatation au doigt de l’anus, douce et progressive.
Aucun écarteur n’est placé dans le canal anal.
Le rectum est sectionné à sa jonction avec le canal anal au niveau de la
ligne pectinée : la section débute au bistouri électrique sur la face
antérieure.
Des points séparés, prenant toute l’épaisseur du canal
anal ainsi sectionné, sont fixés au pourtour et exposent progressivement
la circonférence du canal anal qui est alors prête à accueillir
l’anastomose avec le réservoir iléal.
3- Respect de la zone transitionnelle
:
Dans cette technique, les 2 ou 3 cm de muqueuse transitionnelle
recouvrant le manchon musculaire rectal sont volontairement laissés en
place au-dessus de la ligne pectinée.
La section du rectum est faite à la
pince TA 55 par voie abdominale le plus bas possible, car il n’est pas
recoupé.
Parfois, en cas d’impossibilité de sectionner le rectum très bas
par voie abdominale, celui-ci est éversé au tampon monté à travers l’anus et le rectum est resectionné à la pince TA55 au-dessus de la ligne
pectinée.
Il reste donc, avec cette technique, en moyenne 1 à 3 cm de
muqueuse transitionnelle au-dessus de la ligne pectinée.
C - Anastomose iléoanale
:
Le réservoir est abaissé à l’anus à l’aide d’une pince en coeur ; dans notre
expérience, malgré les mesures effectuées auparavant, il persiste
toujours une tension sur la corde mésentérique, mais celle-ci n’interdit
l’anastomose que dans 1 % des cas.
1- Anastomose manuelle après mucosectomie
:
Le réservoir est fixé au manchon musculaire par quatre points de fil
résorbable, fixant ainsi le grêle prêt pour l’anastomose.
Le
grêle est alors ouvert.
L’anastomose, effectuée à points séparés de Vicryl 4/0, charge la
totalité des parois du grêle et du canal anal.
Elle débute par le quadrant antérieur et se termine par le quadrant
postérieur.
L’anastomose terminée, un drain souple est glissé dans le réservoir qu’il
draine donc à travers l’anus.
2- Anastomose manuelle après éversion rectale
et section complète au niveau de la ligne pectinée :
Le réservoir est ouvert et anastomosé pas à pas : l’anastomose débute
sur la face antérieure, l’hémicirconférence antérieure est suturée
progressivement, puis l’hémicirconférence postérieure.
Une attention particulière doit être portée à la traction sur le réservoir
qui ne doit pas être excessive.
Il est possible de s’aider, en début,
d’anastomose de fils qui fixent quatre coins du réservoir au canal anal.
L’anastomose terminée, un drain souple est glissé dans le réservoir qu’il
draine donc à travers l’anus.
3- Anastomose mécanique
:
Une fois le rectum fermé à la pince TA55, l’anastomose est réalisée en transsuturaire à la pince circulaire automatique.
Pour cela, la confection
du réservoir diffère.
L’agrafage du réservoir se fait par le sommet de
celui-ci.
Puis, au niveau de l’entérotomie qui a servi à
introduire la pince à agrafe, une bourse circulaire est réalisée à l’aide de
la pince purse-string (Ethicont).
La tête de la pince circulaire est délicatement introduite dans le réservoir,
puis la bourse est nouée autour de la tige de la tête circulaire et le fil est
coupé.
La pince est ensuite introduite par l’anus avec le trocart escamotable en
position enfouie.
Le trocart escamotable est sorti à travers le moignon
rectal sous contrôle de l’aide-opératoire qui est placé en position
abdominale.
La sortie du trocart escamotable doit être complète
jusqu’au témoin situé à la base de celui-ci. Les deux éléments sont
solidarisés, permettant d’entendre un cliquetis caractéristique.
L’opérateur périnéal peut ensuite viser la pince de façon à rapprocher la
tête de l’enclume jusqu’au témoin.
Pendant ce temps, l’aide-opératoire
prend garde d’éviter l’interposition de graisse ou de structures
avoisinantes.
L’opérateur en position périnéale peut alors
effectuer l’agrafage qui va assurer l’anastomose.
La pince est ensuite
desserrée et extériorisée par de légers mouvements de rotation.
Cette
extraction est facilitée actuellement par la tête basculante de la pince
Premium Plus CEEA(Autosuturet).
Les collerettes iléale et rectale sont
vérifiées : elles doivent être circulaires et complètes.
D - Iléostomie de protection
:
1- Technique
:
Une iléostomie latérale de protection est la plupart du temps effectuée,
réalisée suivant la technique de Turnbull.
Elle est située à 30
ou 40 cm du réservoir, en prenant garde à ne pas endommager l’arcade
bordante.
Elle est extériorisée en fosse iliaque droite.
Deux drains aspiratifs sont placés dans le pelvis.
Le bord libre de la racine du mésentère est péritonisé à la goutière
pariétocolique droite.
La fermeture de l’iléostomie est effectuée par voie élective 2 mois plus
tard, après une opacification aux hydrosolubles préopératoire (réalisée
par l’iléostomie) qui vérifie l’absence de fuite et de sténose.
2- Controverse
:
Certains proposent de ne plus réaliser, chez des patients sélectionnés,
d’iléostomie de protection systématique.
En effet, dans l’étude multivariée réalisée en 1989 par Keighley, la confection d’une
iléostomie de protection ne semblait pas influencer le résultat
fonctionnel.
Plus récemment, dans une étude comparant deux groupes de 50 patients
ayant eu une AIA pour rectocolite ulcérohémorragique, associée ou non
à une iléostomie de protection, le taux de sepsis pelvien était
significativement plus élevé dans le groupe de patients qui n’avaient pas
eu d’iléostomie de protection, entraînant un nombre significativement
plus élevé de reprise chirurgicale.
Ces résultats rejoignent ceux de Keighley qui avait montré, dans la même analyse multivariée,
l’influence néfaste du sepsis pelvien sur le résultat fonctionnel.
Ces
résultats permettent de continuer de proposer, après proctectomie totale
et AIA, une iléostomie de protection quasi systématique.
Indications
:
La coloproctectomie totale avec AIA est le traitement de référence
de la polypose adénomateuse familiale et de la rectocolite
hémorragique.
En cas de maladie de Crohn colique, bien que contreindiquée
pour la plupart, elle pourrait être proposée dans certains cas très
sélectionnés.
A - Polypose adénomateuse familiale
:
Elle représente l’indication « idéale » de cette intervention.
En effet, la
possibilité de supprimer toute la muqueuse colorectale élimine le risque
de dégénérescence à ce niveau.
En cas de cancer du rectum, sur polypose
adénomateuse familiale, l’AIA avec exérèse totale du mésorectum
n’altère pas le résultat fonctionnel.
En effet, réaliser une anastomose iléorectale chez ce type de malade impose de surveiller à vie le rectum
restant, en raison du risque de dégénérescence.
L’anastomose iléorectale
semble donc aujourd’hui devoir être réservée à des cas très particuliers
(sujets âgés à mauvaise fonction sphinctérienne avec rectum peu
atteint).
B - Rectocolite hémorragique
:
La coloproctectomie totale, en supprimant en totalité la muqueuse
colique et rectale, guérit le patient.
Lorsque l’état du rectum impose la proctectomie, l’indication de rétablissement de la continuité par AIA
s’impose.
En cas de rectum conservable, le patient, pour un résultat
fonctionnel assez peu différent entre colectomie, puis anastomose iléorectale et coloproctectomie totale et AIA, est exposé à une récidive
et une dégénerescence du rectum restant.
Ceci plaide donc pour la
réalisation quasi systématique de l’AIA dans la rectocolite
hémorragique.
En cas de colite aiguë grave, il est préférable de réaliser une colectomie
subtotale avec iléostomie et sigmoïdostomie avant l’anastomose
iléoanale.
Ce choix thérapeutique permet de ne faire l’anastomose que
chez un patient renutri, ne prenant plus de corticoïde, et donne un résultat
fonctionnel équivalant à la chirurgie en un seul temps.
De plus, il est
parfois difficile, après colite grave, de classer correctement les patients
entre rectocolite hémorragique et maladie de Crohn.
La persistance du
rectum, après colectomie subtotale initiale, permet de faire des biopsies
après guérison.
C - Crohn colique
:
Il paraît possible de proposer cette intervention à des patients très
sélectionnés, sans atteinte périnéale ni atteinte du grêle, comme
alternative à l’iléostomie définitive chez des patients avec rectum non
conservable, tout en sachant qu’il existe un risque d’ablation
secondaire du réservoir.
En cas de colite indéterminée, il semble aussi qu’une AIA puisse être
envisagée avec près de 80 % des patients qui gardent un réservoir en
fonction à long terme, avec des résultats fonctionnels comparables à
celui de la rectocolite hémorragique.
Résultats
:
A - Mortalité
:
La mortalité est de 1 %, avec 0,4 % de mortalité postopératoire
immédiate et 0,6 % de mortalité tardive (pour un suivi moyen de
35 mois, avec des extrêmes de 1 à 125 mois).
B - Morbidité
:
La morbidité globale est de 62,7 %.
Les complications les plus
fréquentes sont l’occlusion du grêle (25,3 %), la « pouchite » (23,5 %),
la sténose anastomotique (14 %) et l’abcès pelvien (8,2 %). Les autres
complications sont plus rares : il s’agit de fistules anastomotiques,
d’hémorragies sur le réservoir, d’exceptionnelles nécroses du réservoir,
de fistules vaginales à partir du réservoir, de complications stomiales,
d’infections pariétales et d’éventrations.
C - Résultats fonctionnels
:
La fréquence des selles est en moyenne de cinq par 24 heures et de
six selles par 24 heures pour les patients opérés d’une maladie de Crohn.
Moins de la moitié des patients peuvent avoir une selle
nocturne.
La continence est totale pour les gaz et les selles chez 82 % des patients
le jour et chez environ 71 % des patients la nuit.
L’activité sexuelle est inchangée chez 90 % des patients sans
impuissance, avec quelques cas d’éjaculation rétrograde.
Variantes chirurgicales
:
Dans la technique princeps de coloproctectomie suivie d’AIA, il était
décrit une conservation d’un manchon musculaire rectal avec
mucosectomie.
Ces derniers centimètres de la paroi musculaire rectale
sont responsables d’une meilleure pression anale de repos, d’une
meilleure continence nocturne et de la conservation du réflexe anal
inhibiteur.
La mucosectomie correspond à l’exérèse de la zone
transitionnelle qui est une bande de muqueuse rectale de 1,3 ± 0,6 cm,
présente dans 91 % des cas, située entre la ligne pectinée et la
muqueuse rectale en haut.
Elle est pauvre en récepteurs sensoriels mais
est reconnue dans l’initiation du réflexe anal inhibiteur et dans
l’obtention d’une meilleure pression anale de repos.
Une mucosectomie a été proposée, car la muqueuse de la zone transitionnelle
présente des signes d’inflammation chez 50 % des patients ayant une
rectocolite hémorragique et des signes de dysplasie dans 2,5 % des
cas.
L’analyse de la même zone, chez des patients atteints de polyadénomatose familiale, retrouve 100 % de micropolypes.
En
fait, le risque d’enlever la muqueuse transitionnelle n’est que théorique
sur la continence. Le problème de la mucosectomie est qu’elle est
parfois difficile à réaliser en cas de microrectum ou de rectite sévère.
Il
peut être alors laissé des îlots de muqueuse rectale qui ne sont pas
surveillés par endoscopie car cette mucosectomie a été théoriquement
complète.
Les partisans de l’AIA à la pince laissent au contraire délibérément de la
muqueuse pathologique, et l’impossibilité de prévoir le devenir de ce
court moignon rectal oblige à une surveillance endoscopique à vie.
C’est la raison pour laquelle notre équipe réalise des AIA avec section
du rectum au niveau de la ligne pectinée après éversion rectale.
Les
résultats fonctionnels sont comparables à ceux rapportés par les autres
équipes adeptes de l’AIA avec mucosectomie ou d’anastomoses à la
pince avec préservation de la muqueuse transitionnelle.
Ces résultats
fonctionnels identiques montrent que la conservation d’un manchon
musculaire rectal n’est pas nécessaire à la préservation d’une continence
normale et que l’éversion n’altère pas la fonction sphinctérienne.
Cette technique, en supprimant toute muqueuse rectale, permet d’éviter
les récidives sous formes de dysplasie sévère, de cancer et de
poussées inflamatoires sur la zone de mucosectomie.