Allongement du temps de céphaline kaolin ou activée (TCK,TCA*), du temps de Quick, du temps de saignement Cours
d'hématologie
C’est l’association de la clinique (examen et interrogatoire)
et des examens biologiques qui permet au mieux
d’évaluer le risque ou de rechercher une étiologie.
Il faut noter que l’interrogatoire à la recherche d’une
tendance hémorragique est difficile chez le malade (dont
le jeune âge peut ne l’avoir jamais mis en véritable
situation à risque, ou dont l’ancienneté de la pathologie
peut l’avoir fait s’y habituer…) ; c’est donc souligner le
peu de fiabilité quand on l’interroge sur ses antécédents
familiaux.
Ces examens de dépistage jouent donc un
rôle soit en complément d’un interrogatoire défaillant,
soit en début de caractérisation lors d’un interrogatoire
évocateur. Ni les examens ne peuvent éviter l’interrogatoire
ni l’interrogatoire ne peut se substituer aux examens.
Ce bilan (temps de saignement, temps de Quick, temps
de céphaline + activateur) est donc réalisé dans deux
conditions différentes, soit lors d’un bilan préopératoire
systématique à la recherche d’un risque hémorragique
chez un patient sans antécédent hémorragique ni personnel,
ni familial, soit au cours de l’exploration d’un incident
hémorragique spontané ou provoqué.
Dans les
deux cas, l’interrogatoire du patient est fondamental :
rechercher toute notion d’incident hémorragique anormal,
spontané ou provoqué en particulier après une
intervention chirurgicale même bénigne de type extraction
dentaire, amygdalectomie, et préciser le type de
saignement
– anomalie de l’hémostase primaire (hémorragie
muqueuse, purpura), anomalie de la coagulation
(hématome profond, hémarthrose) –, et le délai d’apparition
(par rapport à la blessure, lésion…).
Au bilan de dépistage habituel
– temps de saignement
pour étudier l’hémostase primaire (il convient d’y associer
la numération formule sanguine qui comprend la numération
plaquettaire), temps de Quick et temps de céphaline
+ activateur pour étudier la coagulation
– il est fortement
conseillé d’associer un dosage du fibrinogène
par une technique fonctionnelle.
Certaines anomalies échappent à ce bilan de dépistage
qu’il faudra rechercher spécifiquement si la clinique est
évocatrice.
Allongement du temps
de saignement :
Les atteintes de l’hémostase primaire se caractérisent
par des hémorragies cutanéo-muqueuses dont l’interrogatoire fait préciser : le
caractère congénital ou acquis (depuis quand et dans quelles
conditions) et l’existence d’une pathologie similaire dans la
famille, les conditions déclenchantes en particulier la prise
d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (aspirine) pour préciser
si celle-ci aggrave ou révèle le syndrome hémorragique.
A - Mécanisme :
D’un point
de vue schématique, l’allongement du temps de saignement
correspond à un trouble de l’interaction des plaquettes
sanguines avec les tissus conjonctifs auxquels elles se trouvent
exposées lors d’une brèche vasculaire et qui devrait être
responsable de la réaction hémostatique.
L’anomalie
peut donc se situer à 3 niveaux :
• les plaquettes peuvent être déficientes : en nombre,
ce sont alors les thrombopénies diagnostiquées par la
numération plaquettaire ; en qualité, ce sont les thrombopathies
qui peuvent toucher toutes les fonctions d’interaction
et de réactivité des plaquettes avec le conjonctif,
entre elles et avec la coagulation.
Il est à noter que le
nombre ne remplace pas la qualité, par exemple, les thrombocytémies des syndromes myéloprolifératifs où
les plaquettes qui sont fonctionnellement déficitaires
font alterner le risque thrombotique (augmentation du
nombre et hyperactivation) et le risque hémorragique
(déficit fonctionnel consécutif) et que les plaquettes
agissent avec leur environnement dans des conditions
hémorrhéologiques optimales et que, quand elles sont
gravement perturbées (anémie intense, pic monoclonal…),
cela peut entraîner un allongement du temps
de saignement et un risque hémorragique ;
• les cofacteurs plasmatiques d’interaction des plaquettes
sont essentiellement le facteur von Willebrand et
à un degré moindre le fibrinogène dont le déficit n’entraîne
un trouble de l’hémostase primaire qu’en cas
d’hypofibrinogénémie majeure voire d’afibrinogénémie
(qui est exceptionnelle) ;
• la structure du conjonctif sur lequel interagissent
les plaquettes.
B - Diagnostic :
1- Thrombopénies
:
• La découverte d’un chiffre de plaquettes diminué à
la numération plaquettaire implique de vérifier qu’il
s’agit bien d’une vraie thrombopénie et non pas d’un
artefact technique dû à une agglutination des plaquettes
dans l’anticoagulant habituellement utilisé, l’EDTA
(éthylène-diamine-tétra-acétique).
Ce contrôle est réalisé
par un examen du frottis de sang et la numération
plaquettaire sur un autre anticoagulant voire en sang
capillaire prélevé sans anticoagulant.
• Le diagnostic de thrombopénie étant confirmé, il
s’agit alors de rechercher le mécanisme de la thrombopénie.
Schématiquement, il existe deux mécanismes :
soit un défaut de production des plaquettes, soit un
excès de destruction et (ou) une anomalie de distribution
des plaquettes.
Pour distinguer les anomalies
de production, c’est essentiellement l’examen médullaire
associé à la numération formule sanguine qui
permet de déterminer s’il s’agit d’une atteinte purement mégacaryocytoplaquettaire ou d’une atteinte globale
d’une ou de plusieurs lignées.
L’évolution, l’étude
familiale et les examens complémentaires permettent
de distinguer et de préciser les formes congénitales
des formes acquises.
• Les plaquettes peuvent être consommées, soit dans le
cadre d’un syndrome de coagulation ou de réaction à
des surfaces thrombogènes comme le sont les coagulations
intravasculaires disséminées (CIVD), purpura
thrombotique thrombopénique, syndrome hémolytique
et urémique, les coagulations intravasculaires localisées,
dans les angiomes (syndrome de Kassabach-Merritt),
sur des surfaces ou dans un organe artificiel (prothèse
cardiovasculaire ou surtout circulation extracorporelle),
soit dans le cadre d’une destruction immunologique,
thrombopénies auto-immunes, thrombopénies posttransfusionnelles,
thrombopénies néonatales isoimmunes,
thrombopénies immuno-allergiques médicamenteuses.
On en rapproche, soit les trappings dans les
grandes masses vasculaires type thrombopénies des
splénomégalies, soit les formes mixtes associant
consommation et hémodilution comme dans les thrombopénies
de réanimation ou de transfusion massive, ou les
thrombopénies du 3e trimestre de la grossesse.
2- Chiffre de plaquettes normal
ou moins modifié que ne le voudrait
l’allongement du temps de saignement
et le syndrome hémorragique :
L’allongement du temps de saignement peut alors
dépendre de 4 mécanismes : une anomalie intrinsèque
des plaquettes et ce sont des thrombopathies ; une anomalie
des cofacteurs plasmatiques des fonctions plaquettaires
: maladie de Willebrand, afibrinogénémie ;
une anomalie de réactivité du tissu conjonctif (en particulier
du collagène) ; une anomalie d’interaction des
plaquettes avec les éléments figurés (hémorrhéologie) ;
les anémies ou polyglobulies sévères induisent un
trouble de réactivité plaquettaire.
• Allongement du temps de saignement par thrombopathies
: toutes les étapes fonctionnelles et métaboliques des
plaquettes peuvent être atteintes.
Leur diagnostic spécifique est réalisé
en laboratoires spécialisés, voire hautement spécialisés
dans lesquels les tests de première ligne à l’heure
actuelle sont les tests d’agrégations plaquettaires à
différents inducteurs et de cytométrie de flux pour
quantifier les glycoprotéines de membrane et les contenus
granulaires.
Les thrombopathies acquises sont beaucoup plus
fréquentes que les thrombopathies constitutionnelles.
La cause la plus fréquente est médicamenteuse en
particulier par prise d’antiagrégeants plaquettaires qui
reproduisent différentes thrombopathies constitutionnelles.
De nombreux autres médicaments agissent
plus ou moins spécifiquement sur les plaquettes (antiinflammatoires
non stéroïdiens, pénicillines et céphalosporines…),
de nombreuses pathologies induisent des
thrombopathies et plus ou moins de thrombopénies
(voire hyperplaquettose) avec des mécanismes souvent
intégrés : les pathologies hématologiques – syndromes
myéloprolifératifs (associant risque hémorragique et thrombose), leucémies aiguës et états préleucémiques – ;
l’insuffisance rénale chronique ; l’alcoolisme qui associe
souvent thrombopénie et thrombopathie avec des mécanismes
complexes au stade de la cirrhose.
• Allongement du temps de saignement par atteinte de
cofacteurs plasmatiques : un arrêt efficace du saignement
(mesuré par le temps de saignement) nécessite une
interaction des plaquettes avec les tissus conjonctifs
exposés et une interaction des plaquettes entre elles.
Ces deux mécanismes impliquent des cofacteurs
plasmatiques, en particulier le fibrinogène et le facteur von Willebrand.
Afibrinogénémie congénitale : de faibles quantités de
fibrinogène (0,10 g/L) sont suffisantes pour permettre
une réactivité plaquettaire.
Dans les déficits en fibrinogène,
seule l’afibrinogénémie induit un allongement du
temps de saignement.
Maladies de Willebrand : on doit dire les maladies
de Willebrand car il en existe plusieurs sous-types.
La
maladie de Willebrand de type 1 est la maladie hémorragique
constitutionnelle avec la prévalence la plus forte
car les anomalies biologiques de type I sont retrouvées
dans 1 à 2 % de la population générale.
Le dosage précis du facteur von Willebrand est difficile
car le taux plasmatique est variable dans le nycthémère,
modifié par les stimulations extérieures (stimulations
adrénergiques, syndromes inflammatoires, stimulation
hormonale (intrinsèque : cycle chez la femme ; extrinsèque
: contraception), influencé par le groupe sanguin :
les sujets de groupe O ont un taux de facteur von
Willebrand en moyenne inférieur de 20 % aux sujets de
groupe non O.
La détermination du facteur von
Willebrand demande de mesurer les différents composants
du complexe : le facteur VIIIc (de la coagulation)
qui, dans la circulation, est lié au facteur von Willebrand
qui le stabilise, le dosage quantitatif de ce dernier qui se
fait par une technique immunologique (facteur von
Willebrand antigène), le dosage qualitatif du facteur von
Willebrand qui se fait en induisant l’interaction du
Willebrand avec les plaquettes (d’où une agglutination
des plaquettes) par un réactif, la ristocétine (facteur von
Willebrand cofacteur de la ristocétine).
Ces trois examens de routine sont complétés le cas
échéant si le diagnostic de maladie de Willebrand
variant est soupçonné par : la recherche d’une sensibilité
des plaquettes à s’agglutiner aux très faibles doses de
ristocétine ; l’étude de la répartition multimérique du
facteur von Willebrand par électrophorèse sur gel d’agarose
; le dosage du facteur von Willebrand intraplaquettaire
; l’étude de la liaison du facteur von Willebrand au
collagène, la liaison du facteur VIII au Willebrand voire
la recherche des mutations sur le gène car celles responsables
des principales formes de maladie de Willebrand
de type 2 sont assez localisées.
Il existe schématiquement 3 types de maladies de Willebrand : la forme la plus fréquente
(type 1) est une forme avec un déficit quantitatif
modéré.
Les 3 activités du complexe FVIII-facteur von
Willebrand sont parallèlement diminuées aux alentours de 30 %, ce qui est dû à une anomalie hétérozygote ;
les types 2 sont les formes d’anomalies qualitatives ;
les types 3, les plus rares, sont des déficits sévères
homozygotes.
À part la forme plaquettaire due à une anomalie dérivée
des glycoprotéines de liaison du facteur von Willebrand
à la plaquette (GPIb), il existe des formes acquises de
maladie de Willebrand dues à une consommation du facteur
von Willebrand (le plus souvent dans un processus
immunologique).
• Allongement du temps de saignement par défaut de
réactivité du conjonctif et en particulier du collagène :
c’est un diagnostic qui est évoqué devant les allongements
« idiopathiques » du temps de saignement, c’està-
dire non inexpliqué par toutes les causes passées en
revue précédemment.
Il n’existe pas de preuve convaincante
de leur existence.
Allongement des temps de Quick
et de céphaline + activateur
:
A - Physiopathologie :
Alors que le temps de saignement explore globalement
l’hémostase primaire, les anomalies de la coagulation
sont dépistées par un allongement du temps de Quick et du temps de céphaline + activateur, tests qui explorent
l’ensemble des facteurs plasmatiques de la coagulation
(en dehors du facteur XIII).
1- Temps de Quick
:
Le temps de Quick consiste à ajouter de la thromboplastine
et du calcium à du plasma anticoagulé par du citrate
(chélateur du calcium).
La thromboplastine est un extrait
tissulaire (et maintenant un produit de biotechnologie)
qui associe le facteur initiateur de la coagulation : le
facteur tissulaire, et les phospholipides qui forment les
surfaces moléculaires nécessaires pour que s’assemblent
efficacement les complexes des facteurs de coagulation.
Cette voie que l’on appelle maintenant voie du facteur
tissulaire (anciennement voie extrinsèque ou exogène)
est la seule efficace.
On peut avoir du mal à comprendre
que ce test ne soit pas sensible aux déficits en facteurs VIII et IX qui sont des facteurs indispensables et dont
les déficits (hémophilie A et B) entraînent les syndromes
hémorragiques que l’on connaît.
Cela est dû au
fait
que la forte quantité de thromboplastine, réactif ajouté
au plasma à tester, entraîne une formation brutale
des complexes (le temps de Quick normal est de 11 à
13 secondes selon les réactifs) qui court-circuite le complexe
de la prothrombinase (c’est directement le facteur VIIa qui active le facteur X en Xa). Alors qu’in vivo, du
fait des concentrations relatives et des conditions de
flux, ce complexe de la prothrombinase joue une place
prépondérante.
Le taux de prothrombine (TP) est une manière d’exprimer
le temps de Quick non plus en temps absolu mais en
pourcentage de la normale.
Les valeurs normales du
taux de prothrombine sont de 70 à 120 %.
Son expression
en pourcentage est très facile à comprendre pour
suivre les traitements anticoagulants aux antivitamines K.
On a bien compris combien le réactif thromboplastine
influe sur le taux de prothrombine, et c’est pour éviter
cette variabilité technique que le test a été normalisé
sous la forme de l’INR (international normalized ratio)
pour suivre maintenant les traitements par antivitamines K
(AVK).
L’INR est ce rapport du temps de Quick du
malade au temps de Quick du témoin corrigé par un
facteur dépendant de la sensibilité du réactif à la
diminution des facteurs dépendants de la vitamine K
(l’INR n’a donc de sens que chez les malades anticoagulés
aux antivitamines K).
D’une manière générale, la diminution d’un facteur de
coagulation ne porte un risque hémorragique élevé que
lorsque le facteur est inférieur à 30 % et alors plus
le facteur est diminué, plus le risque hémorragique est
élevé.
C’est pour cela qu’un taux de prothrombine entre
50 et 60 % ne reflète qu’une anomalie modérée alors
qu’un taux de prothrombine inférieur à 30 % signifie un
temps de Quick très allongé et un risque hémorragique
majeur.
La seule exception à cette règle est le déficit dû à un
inhibiteur, acquis contre un facteur spécifique du temps
de Quick.
L’exemple le plus fréquent (même s’il est globalement
rare et s’il affecte le temps de céphaline +
activateur et pas le taux de prothrombine) est l’antifacteur
VIII ; en effet, le complexe facteur + inhibiteur
conserve une activité dans les tests de coagulation mais
a perdu de son efficacité in vivo.
Une diminution
relativement modérée (environ 30 %) par un inhibiteur
comporte un risque hémorragique majeur.
À noter que d’un point de vue technique, le réactif du
temps de Quick contient en outre un inactivateur de
l’héparine qui rend ce test insensible aux concentrations
thérapeutiques d’héparine.
2- Temps de céphaline + activateur
:
Autrefois appelé temps de céphaline kaolin, le temps de
céphaline + activateur consiste à ajouter une surface
d’activation de la phase contact de la coagulation (qui
n’était autrefois que le kaolin et qui maintenant peut être
la silice, l’acide élagique…).
La céphaline est un phospholipide
qui forme la surface moléculaire nécessaire
pour que s’assemblent les complexes des facteurs de
coagulation ainsi que du calcium à du plasma anticoagulé
par du citrate.
Ce test explore ce que l’on appelait la
voie intrinsèque ou endogène de la coagulation.
L’activation de la phase contact va activer la cascade de
la coagulation.
Il est donc particulièrement sensible à la phase contact alors que cette phase ne joue pas de rôle
physiologique significatif dans la coagulation (et dont
les déficits ne portent pas de risque hémorragique).
En revanche, activant lentement la coagulation (les
temps sont 3 fois plus longs que le temps de Quick),
il est sensible aux anomalies sur le complexe de la prothrombinase et en particulier aux déficits en facteur
VIII et IX dont il assure efficacement le dépistage.
À la pratique de ces deux tests (temps de Quick et temps
de céphaline + activateur), 4 possibilités peuvent
schématiquement se présenter : les résultats sont normaux,
on peut alors raisonnablement éliminer une anomalie
hémorragipare de la coagulation (en dehors des cas
particuliers de déficits totaux en facteur XIII déjà
évoqués) ; soit seul le temps de Quick est allongé ;
soit seul le temps de céphaline + activateur est allongé ;
soit le temps de céphaline + activateur et le temps de
Quick sont allongés.
B - Allongement isolé du temps de Quick
:
En théorie, seuls les déficits en facteur VII allongent le
temps de Quick et pas le temps de céphaline + activateur.
Les déficits constitutionnels hétérozygotes (50 %) sont
rares et homozygotes exceptionnels.
On a récemment
décrit des polymorphismes qui influent sur le taux de
facteur VII et l’association de plusieurs polymorphismes
génétiques peut aboutir à de véritables déficits (jusqu’à
30 %).
Le facteur VII étant le facteur dépendant de la
vitamine K à la durée de vie la plus courte à
l’induction d’un traitement par antivitamine K (ou en
cas de carence en vitamine K), c’est le facteur VII qui
chute le premier.
En pratique, le temps de céphaline + activateur est beaucoup
moins sensible aux facteurs dépendants de la vitamine
K que le temps de Quick (un taux de prothrombine
à 50 % peut être associé à un temps de céphaline + activateur
encore dans les limites de la normale).
Donc un
allongement apparemment isolé du temps de Quick doit
faire doser l’ensemble des facteurs du complexe prothrombinique
(V, complexe VII + X, II), sauf cas particulier,
le dosage du VII et du X n’est fait qu’après une
épreuve de recharge en vitamine K.
C - Allongement du temps de céphaline
+ activateur, sans allongement significatif
du temps de Quick
:
Il faut alors compléter les examens par le dosage du
fibrinogène et un temps de thrombine (TT).
1- Temps de thrombine allongé
:
Un temps de thrombine allongé avec un fibrinogène normal
évoque en premier lieu l’action d’une antithrombine,
classiquement l’héparine non fractionnée et, depuis
quelques temps, les antithrombines directes, en particulier
l’hirudine.
Si le malade n’en reçoit pas et si le prélèvement
n’a pas pu être souillé (tube de coagulation prélevé
après un tube de prélèvement sur héparine), il peut
s’agir d’un trouble de la fibrinogénoformation (dysfibrinogénémie),
soit constitutionnel, soit acquis soit par
anomalie de synthèse (cirrhose) ou par interférence
extérieure (très forte augmentation des produits de
dégradation de la fibrine, paraprotéine, exceptionnel
auto-anticorps antithrombine).
2- Temps de thrombine normal
:
Si le temps de thrombine et le temps de Quick sont
normaux, c’est alors le cas d’un allongement isolé du
temps de céphaline + activateur qui peut correspondre
soit à un inhibiteur de la coagulation, soit à un déficit en
un facteur non exploré par le temps de Quick.
La distinction entre les deux repose sur l’épreuve de correction
de l’allongement du temps de céphaline + activateur
du malade par du plasma témoin normal.
Mais il
faut savoir que pour les allongements modérés (10 à 15 s)
qui peuvent correspondre à un inhibiteur peu puissant,
l’épreuve peut être non conclusive obligeant, si le contexte
le nécessite, à doser individuellement tous les facteurs et
s’ils sont normaux à rechercher des arguments pour un
inhibiteur par d’autres techniques spécialisées.
• Si l’allongement est significatif en l’absence de correction,
le diagnostic d’inhibiteur est supposé et est
confirmé par des tests spécifiques démontrant la spécificité antiphospholipidique de l’inhibiteur.
Les antiphospholipides
ne font pas saigner mais s’il ne s’agit pas
d’un antiphospholipide et a fortiori s’il existe un déficit
isolé sur un des facteurs de la coagulation exploré par le
temps de céphaline + activateur, un inhibiteur neutralisant
doit être évoqué.
Cela permet de comprendre pourquoi
l’exploration ne peut pas s’arrêter à la recherche
d’un anticoagulant circulant type lupus mais doit comporter
un dosage individuel de tous les facteurs portant
un risque potentiel hémorragipare en particulier les facteurs
VIII et IX.
• En cas de correction du temps de céphaline +
activateur du malade par le plasma du témoin : un
déficit en facteur de coagulation est alors probable.
Le
temps de Quick étant normal, ce déficit porte donc sur
un ou plusieurs des facteurs suivants: VIII, IX, XI, XII
ou un autre facteur de la phase contact (prékallikréine,
kininogène de haut poids moléculaire).
C’est le dosage
individuel de ces facteurs qui permet de faire le diagnostic
exact.
Il faut savoir que certains anticorps de faible
affinité dirigés contre l’un ou l’autre des facteurs de la
coagulation peuvent apparaître comme corrigés après
une incubation courte.
L’incubation doit être prolongée
(au moins jusqu’à 2 h) et quand il y a doute, des techniques
spéciales doivent être mises en oeuvre.
Le déficit en facteur XII est le plus souvent congénital
(quelquefois acquis comme au cours des fuites protéiques
massives du syndrome néphrotique).
Ce déficit
n’entraîne aucune tendance hémorragique (bien qu’il
allonge de manière importante le temps de céphaline + activateur).
On a même évoqué l’hypothèse selon
laquelle ce facteur, qui joue un rôle dans une des voies
d’activation de la fibrinolyse, peut entraîner un risque
thrombotique (cette notion est très discutée aujourd’hui).
Quand l’allongement n’est expliqué pour aucun des
déficits classiques en VIII, IX, XI, XII, on évoque un
déficit en prékallikréine ou en kininogène de haut poids
moléculaire dont la confirmation doit être apportée par
un laboratoire hautement spécialisé.
Les déficits comme
le déficit en facteur XII ne s’accompagnent d’aucune
tendance hémorragique, ce qui confirme le rôle accessoire
des facteurs contact dans l’hémostase physiologique.
L’hémophilie est la conséquence d’un déficit en facteur VIII pour l’hémophilie A et un facteur IX pour l’hémophilie
B.
Sur le plan clinique, en pratique rien ne distingue
ces deux déficits.
L’hémophilie A (5 fois plus fréquente
que la B) a une fréquence estimée de 1 sur 5 000.
L’hémophilie est une maladie récessive liée au sexe. Les
garçons sont atteints et les filles sont généralement
indemnes de troubles cliniques. Un hémophile donne
naissance à des garçons indemnes et à des filles conductrices.
Le diagnostic biologique est simple, c’est un
allongement du temps de céphaline + activateur à temps
de Quick normal : le dosage spécifique des facteurs précise
le type de l’hémophilie et sa gravité.
Un taux de facteur VIII ou IX indétectable ou inférieur à 2 % définit
une hémophilie sévère caractérisée par des accidents
hémorragiques nombreux et spontanés.
Un taux de facteur VIII ou IX entre 2 et 5 % définit une hémophilie
modérée où les accidents hémorragiques sont moins fréquents
mais tout aussi préoccupants.
L’hémophilie
modérée ne l’est que dans l’effondrement du taux de
facteur, non dans la gravité des accidents.
Au-dessus de 5 %, c’est l’hémophilie mineure où les
accidents hémorragiques sont le plus souvent provoqués.
Lorsque le taux est compris entre 15 et 30 %, l’hémophilie
peut être méconnue et ne se manifester que
très tard dans la vie par exemple par une hémorragie
postopératoire.
Il faut bien savoir le risque de ces formes
appelées mineures mais se révélant plus ou moins tardivement
par un accident hémorragique gravissime.
Cinq à dix pour cent des hémophiles sévères (donc substitués
à de nombreuses occasions) peuvent s’immuniser
contre le facteur dont ils sont dépourvus.
Cette immunisation
qui pose de gros problèmes thérapeutiques doit
être systématiquement recherchée par une surveillance
rigoureuse.
Ces anticorps surviennent le plus souvent en
cas de facteur VIIIc indosable mais pas exclusivement.
Il peut s’agir de variants moléculaires justifiant le
recours à la biologie moléculaire.
Il faut rapprocher la maladie de Willebrand 2N (taux
de facteur VIIIc par défaut de liaison à sa molécule
stabilisatrice le facteur von Willebrand anormal dans cette
forme de Willebrand) des hémophilies A ; en effet, si on y
pense plus facilement chez la femme, les formes de
l’homme ont, pour certaines, été initialement diagnostiquées
comme des hémophilies mineures ou modérées.
Les hémophiles doivent être pris en charge dans une
structure spécialisée (Centre de traitement des hémolphiles) qui seul peut fournir l’approche multidisciplinaire
adaptée tant sur la prise en charge de l’hémophile, que
de sa famille pour l’ensemble des problèmes spécifiques
liés au suivi biologique, transfusionnel, orthopédique,
social et de conseil génétique.
Le déficit en facteur XI porte un risque hémorragique
pour les taux inférieurs à 30 %.
Ce risque hémorragique
existe constamment pour les déficits sévères (homozygotes
déficits inférieurs à 1 %), mais est variable pour
les taux entre quelques percentiles et 30 % d’un sujet à
l’autre sans qu’il soit clairement établi si cette variabilité
dépend du type d’anomalie moléculaire et (ou) du type
de déficit en facteur XI du contenu des granules a
plaquettaires.
D - Allongements combinés du temps de
Quick et du temps de céphaline + activateur
:
Pour les diminutions du fibrinogène, il faut savoir que
des taux aussi bas que 0,5 g/L de fibrinogène ne modifient
ni le temps de Quick ni le temps de céphaline + activateur.
À l’opposé, des augmentations très fortes (> 10 g/L)
allongent ces tests.
Les diminutions peuvent correspondre
à des hypo- ou des dysfibrinogénémies et peuvent
être constitutionnelles ou acquises.
Si plusieurs résultats de ces deux tests de première intention,
temps de Quick et temps de céphaline + activateur,
sont anormaux, il peut s’agir de plusieurs pathologies
différentes dont les examens de coagulation associés au
contexte clinique et aux autres examens biologiques permettront
le diagnostic spécifique : pathologie hépatique,
coagulopathie de consommation, hypovitaminose K,
déficit isolé constitutionnel ou acquis en facteur intervenant
à la fois dans le temps de Quick et le temps de
céphaline + activateur, auxquels il faut rajouter certaines
formes d’antiphospholipides puissants qui peuvent aussi
agir sur le temps de Quick.
Quand le temps de Quick est allongé, l’analyse individuelle
des facteurs du complexe prothrombinique oriente
parmi les diagnostics proposés suivant qu’il s’agit de la
combinaison de déficits de facteurs de synthèse hépatique
(II,V, VII, X), consommés au cours de la coagulation
(V, II), dépendants de la vitamine K (VII, X, II).
Une hypofibrinogénémie complète souvent les deux
premiers tableaux.
Une thrombopénie et une augmentation significative des
complexes solubles de fibrine et des produits de dégradation
de la fibrine font partie du tableau complet de coagulopathie de consommation.
En fait, les tableaux biologiques sont souvent dissociés
car les mécanismes physiopathogéniques sont fréquemment
intriqués ou parce qu’il faut avoir des connaissances
techniques : les réactifs commerciaux de temps de Quick
possèdent un inhibiteur qui antagonise l’héparine jusqu’à
2 U/mL, donc le temps de Quick n’est qu’apparemment
insensible aux doses thérapeutiques d’héparine.
Les déficits congénitaux induisant un allongement du
temps de céphaline + activateur et du temps de Quick sont les déficits en fibrinogène, II, V, et X.
Les déficits en facteur V les plus graves s’accompagnent
aussi d’un allongement du temps de saignement que
l’on explique par un défaut de l’activité procoagulante
des plaquettes.
Pour les déficits partiels en facteur V,
l’intensité du syndrome hémorragique est également
reliée au contenu des plaquettes en facteur V qui est
stocké dans les granules alpha.