Le syndrome pyramidal associe de façon variable un
déficit moteur et des signes qui traduisent la libération
de l’activité de structures du tronc cérébral et de la
moelle : spasticité, modifications des réflexes.
A - Déficit moteur
:
D’une façon générale, il prédomine à l’extrémité distale
des membres et sur les aspects les plus élaborés de la
motilité.
Il porte sur des groupes musculaires et non sur
des muscles isolés ; même lorsqu’il est très limité, comme
dans la « pseudoparalysie radiale », il ne peut être analysé
en termes d’atteinte tronculaire ou radiculaire.
• Au membre supérieur, le déficit prédomine sur l’abduction
des doigts, l’extension des doigts et du poignet,
la supination.
Un déficit discret peut être démontré par
une tendance à la pronation lorsque l’on demande au
patient de garder les membres supérieurs étendus devant
lui, paumes tournées vers le haut.
Le signe de la main
creuse, recherché en demandant au sujet de présenter les
mains, paumes en avant, en écartant fortement les
doigts, résulte d’une tendance à l’abduction et à la
flexion du premier métacarpien.
Un trouble de la motilité
déliée des doigts, recherché par l’opposition successive
rapide de l’index sur les autres doigts, est un signe précoce
d’atteinte pyramidale.
• Au membre inférieur, le déficit prédomine sur la
flexion : dorsiflexion du pied, flexion de la jambe sur la
cuisse, de la cuisse sur le bassin.
Il peut être objectivé
par la manoeuvre de Barré : tendance à la chute de la
jambe préalablement fléchie à angle droit sur la cuisse,
le sujet étant en décubitus ventral ; par la manoeuvre de Mingazzini : tendance à la chute du membre inférieur, le
sujet étant en décubitus dorsal, jambe fléchie sur la cuisse,
cuisse fléchie sur le bassin.
• La paralysie faciale centrale résulte de l’atteinte des
fibres cortico-nucléaires destinées au noyau du facial.
Elle prédomine sur la partie inférieure de la face dont la
motilité très différenciée est sous le contrôle exclusif de
l’hémisphère controlatéral.
L’asymétrie faciale (effacement
du pli naso-génien, chute de la commissure labiale
du côté atteint) est accentuée par la mimique volontaire,
alors qu’elle est atténuée par la mimique automatique.
La
parésie du peaucier du cou est mise en évidence par l’ouverture
contrariée de la bouche.
La motilité de la partie
supérieure de la face, moins différenciée, est peu touchée
car la partie du noyau du facial qui la contrôle reçoit des
fibres cortico-nucléaires provenant des 2 hémisphères
cérébraux : l’occlusion volontaire des yeux ne fait pas
apparaître de signe de Charles Bell, tout au plus un signe
de Souques, les cils restant plus apparents du côté atteint.
• L’atteinte du contingent corticonucléaire destiné au
noyau du XII se traduit lors de la protraction de la
langue par sa déviation vers le côté opposé à la lésion.
• L’apparition de syncinésies traduit la perte de la fonction
pyramidale qui est de permettre l’exécution de
mouvements volontaires très focalisés : c’est ainsi que la dorsiflexion du pied entraîne une flexion globale du
membre inférieur, que la flexion des doigts provoque
une extension du poignet.
D’autres contractions syncinétiques
traduisent le renforcement de la spasticité.
B - Spasticité
:
La spasticité, caractéristique du syndrome pyramidal,
est liée à l’exagération du réflexe myotatique monosynaptique.
À l’examen, elle se traduit par une résistance à
l’étirement passif d’un muscle, d’autant plus marquée
que cet étirement est réalisé plus rapidement.
La résistance
au déplacement passif augmente avec l’amplitude
du mouvement, puis cède brusquement, « en lame de
canif ».
À la fin du mouvement passif, le membre
revient à sa position initiale.
Cette hypertonie « élastique
» est bien différente de la rigidité plastique, « en
tuyau de plomb », du syndrome parkinsonien.
Au membre supérieur, la spasticité prédomine sur les
fléchisseurs, les pronateurs, les rotateurs internes et les
adducteurs du bras, conférant ainsi à l’hémiplégique une
attitude caractéristique : flexion des doigts recouvrant le
pouce, flexion du poignet, flexion-pronation de l’avantbras,
bras collé au corps en rotation interne.
Au membre
inférieur, elle prédomine sur les extenseurs et les adducteurs,
avec une tendance au varus équin du pied.
Elle est
majorée par la station debout et la marche, pouvant donner
lieu à un « pseudo-steppage spasmodique », ou à un
degré de plus au phénomène du fauchage.
La spasticité va de pair avec une exagération des
réflexes ostéotendineux, ainsi qu’avec des phénomènes
de clonus provoqués par l’étirement soutenu d’un
muscle : clonus du pied déclenché par la dorsiflexion du
pied (étirement du triceps sural), clonus de la rotule
déclenché par le déplacement vers le bas de celle-ci (étirement
du quadriceps).
Dans le cas d’une lésion aiguë, d’origine traumatique ou
vasculaire, le passage à la spasticité est précédé d’une
période de flaccidité pendant laquelle les réflexes ostéodentineux
sont abolis.
C - Syndrome pyramidal réflexe :
Il comporte des modifications des réflexes ostéotendineux
et des réflexes cutanés.
• L’exagération des réflexes ostéotendineux : le réflexe
ostéotendineux, monosynaptique, résulte de la contraction
phasique d’un muscle en réponse à son étirement
brusque.
Une vivacité des réflexes ostéotendineux peut être physiologique.
Certains éléments sont en faveur du caractère
pathologique de la réponse : réponse polycinétique, diffusée
(par exemple adduction de la cuisse associée à
l’extension de la jambe lors de la recherche du réflexe
rotulien), diffusion de la zone réflexogène (par exemple
réflexe rotulien déclenché par la percussion de la crête
tibiale à distance du tendon rotulien).
D’une façon générale,
il est plus facile de reconnaître le caractère pathologique
d’une vivacité des réflexes lorsque le syndrome
pyramidal est unilatéral.
L’inversion d’un réflexe ostéotendineux,
observé notamment dans les lésions de la
moelle cervicale, résulte de la conjonction d’une abolition
de la réponse directe, liée à une interruption de l’arc
réflexe, et d’une diffusion de la réponse réflexe.
De l’exagération des réflexes tendineux, il faut rapprocher
celle de certains réflexes qui mettent aussi en jeu le
réflexe myotatique monosynaptique.
Le signe
d’Hoffmann consiste en une flexion brève des doigts
lorsque l’on relâche brusquement la dernière phalange de
l’index placée préalablement en flexion forcée.
Le signe
de Rossolimo est l’exagération de la réponse en flexion
des orteils dont on a percuté la face plantaire. Le signe de Mendel-Bechterew, recherché par la percussion de la partie
externe du dos du pied, est aussi une flexion des orteils
en réponse à une mise en tension directe des fléchisseurs.
L’exagération du réflexe massétérin se recherche en percutant
le doigt de l’examinateur posé sur le menton du
sujet, la bouche étant légèrement entrouverte.
• Les modifications des réflexes cutanés : à la différence
des réflexes ostéotendineux, il s’agit de réflexes polysynaptiques,
normalement mis en jeu par des stimulations
nociceptives.
Le faisceau pyramidal exerce une influence facilitatrice
sur certains de ces réflexes qui sont diminués ou abolis
par une atteinte pyramidale : c’est le cas pour les
réflexes cutanés abdominaux et pour le réflexe crémastérien.
On peut en rapprocher le réflexe cornéen qui peut
être diminué ou aboli par une atteinte du contingent corticonucléaire,
alors même que, au niveau du tronc cérébral,
l’arc réflexe est intact.
Le faisceau pyramidal modifie la réponse du réflexe
cutané plantaire.
Chez le nourrisson, avant la maturation
du faisceau pyramidal, la réponse à une stimulation nociceptive plantaire est une extension des orteils qui
s’inscrit dans une réponse globale de retrait en triple
flexion du membre inférieur.
Le faisceau pyramidal permet
une adaptation locale de la réponse aux stimulations nociceptives plantaires, sous la forme d’une flexion
plantaire des orteils, à l’évidence plus compatible avec
la station debout et la marche.
Le signe de Babinski,
extension lente et « majestueuse » du gros orteil associée
à une abduction des autres orteils (signe de l’éventail)
en réponse au grattage d’arrière en avant du bord
externe de la plante du pied, est le retour à la réponse
primitive du fait d’une lésion du faisceau pyramidal.
Il
peut n’être qu’un élément d’une réponse de retrait plus
globale en triple flexion.
Ces réflexes de défense pathologique
diffèrent par leur lenteur du retrait brutal physiologique.
Ils peuvent parfois être déclenchés par des
stimulations ne portant pas sur la voûte plantaire : friction
de la crête tibiale (signe d’Oppenheim), pincement
du tendon d’Achille, pincement du dos du pied.
D - Valeur sémiologique du syndrome
pyramidal réflexe :
La recherche d’un syndrome pyramidal réflexe, qui peut
exister isolément en l’absence des autres éléments du
syndrome pyramidal, est un temps essentiel de l’examen
neurologique.
Sa présence permet d’affirmer l’existence
d’une atteinte du système nerveux central.
Sa valeur
sémiologique est donc considérable, comme cela peut
être illustré par quelques exemples :
• dans la sclérose en plaques, dont la première manifestation
peut être notamment une névrite optique rétrobulbaire
ou un syndrome cérébelleux, la mise en évidence
d’un syndrome pyramidal est un argument en faveur du
caractère multiloculaire des lésions ;
• dans la sclérose latérale amyotrophique (maladie de
Charcot), les manifestations initiales sont généralement
liées à l’atteinte du motoneurone périphérique se traduisant
par un déficit moteur, une amyotrophie, des fasciculations.
La vivacité pathologique des réflexes ostéotendineux
dans le territoire déficitaire indique une
atteinte associée du motoneurone central ;
• l’akinésie d’un hémi-parkinson est parfois interprétée
à tort comme étant une hémiparésie : l’absence de syndrome
pyramidal réflexe fait la différence ;
• l’existence d’un syndrome pyramidal réflexe est
incompatible avec un diagnostic de polynévrite ou de
polyradiculonévrite.
Cependant certaines affections
associent une atteinte des nerfs périphériques et du système
nerveux central.
Dans de tels cas, il existe une
« compétition » entre l’atteinte de l’arc réflexe qui tend
à abolir les réflexes ostéotendineux et l’atteinte du neurone
moteur central qui tend à les exagérer : le résultat
est habituellement une diminution, voire une abolition
des réflexes ostéotendineux, le syndrome pyramidal
réflexe se résumant alors au signe de Babinski.
E - Syndrome pseudobulbaire
:
Il résulte d’une atteinte bilatérale des voies corticonucléaires.
Les lésions responsables peuvent siéger dans
les hémisphères cérébraux ou le tronc cérébral, pas
nécessairement au même niveau des deux côtés.
Le déficit
pseudobulbaire se traduit par un aspect atone du visage,
et l’atteinte labio-glosso-pharyngée donne lieu à des
troubles de l’élocution et de la déglutition.
Le réflexe du
voile est aboli.
Aux signes déficitaires sont associés des
signes traduisant la libération d’activités intégrées à un
niveau sous-cortical : rires et pleurs spasmodiques.
Le
réflexe massétérin est exagéré.
Le syndrome pseudobulbaire
est un syndrome moteur : une détérioration intellectuelle,
lorsqu’elle existe, est due à des lésions associées.
Des lésions de nature diverse peuvent en être
responsables : vasculaires le plus souvent, notamment
de type lacunaire, mais aussi inflammatoires (sclérose
en plaques), ou dégénératives.
Parmi ces dernières, il
faut isoler la maladie de Charcot dont les formes à début
bulbaire associent souvent un syndrome pseudobulbaire
aux signes traduisant l’atteinte des motoneurones des
noyaux moteurs du bulbe, notamment du XII, donnant
lieu à une amyotrophie et à des fasciculations de la
langue.
F - Potentiels évoqués moteurs
:
À la limite du syndrome pyramidal, il faut mentionner la
possibilité de déceler une atteinte infraclinique de la
voie corticospinale par l’étude des potentiels évoqués
moteurs.
Orientation diagnostique
:
Un très grand nombre d’affections du système nerveux
central, qu’elles soient de nature lésionnelle, métabolique
ou toxique, peuvent comporter des signes pyramidaux
dans leur sémiologie.
Il ne saurait donc être question
d’être exhaustif, mais seulement de dégager
quelques grandes orientations diagnostiques.
A - Syndrome pyramidal unilatéral :
1- Mode d’installation
:
D’une façon générale, une installation aiguë est en
faveur d’un accident vasculaire, une installation subaiguë
en faveur d’une cause inflammatoire (sclérose en
plaques), infectieuse (abcès, encéphalite) ou parasitaire
(toxoplasmose), une installation progressive est en
faveur d’une cause tumorale.
2- Diagnostic topographique :
Un syndrome pyramidal unilatéral est le plus souvent
causé par une lésion supramédullaire, localisée dans
l’hémisphère ou le tronc cérébral.
Le déficit moteur,
controlatéral à la lésion, a habituellement une distribution
hémiplégique ; cependant la somatotopie présente
sur le cortex moteur est conservée dans le faisceau pyramidal,
de telle sorte qu’une lésion limitée peut donner
lieu de façon préférentielle à une paralysie faciale centrale,
à une monoplégie brachiale ou crurale.
3- Lésion hémisphérique :
Une lésion de la capsule interne, où le faisceau pyramidal
est très ramassé, tend à donner une atteinte globale,
proportionnelle, de l’hémicorps controlatéral, intéressant
également la face, le membre supérieur et le
membre inférieur : cette formule est observée dans les
infarctus du territoire profond de l’artère sylvienne, de
l’artère choroïdienne antérieure, dans les hémorragies
capsulo-lenticulaires ou capsulo-thalamiques.
Une lésion limitée (infarctus de type lacunaire) du
centre ovale, où les fibres pyramidales qui convergent
depuis le cortex moteur vers la capsule interne sont
proches des fibres cortico-ponto-cérébelleuses, peut être
responsable du syndrome de l’hémiparésie ataxique.
Ce
syndrome peut être réalisé aussi par une lésion du pied
de la protubérance.
L’origine des fibres pyramidales dans le cortex moteur
est étalée, s’étendant de la partie basse de la frontale
ascendante (opercule rolandique) pour la représentation
céphalique, à la région interhémisphérique (lobule paracentral)
pour la représentation du membre inférieur.
De
ce fait, une lésion corticale peut donner une atteinte plus
limitée ou non proportionnelle, à prédominance brachio-
faciale dans le cas d’une lésion de la convexité
(infarctus du territoire superficiel de l’artère cérébrale
moyenne, méningiome de la convexité), à prédominance
crurale dans le cas d’une lésion parasagittale (infarctus
du territoire de l’artère cérébrale antérieure, méningiome
parasagittal).
L’origine hémisphérique d’une hémiplégie peut souvent
être affirmée sur l’association d’éléments tels qu’une
hémianopsie latérale homonyme, une aphasie, un syndrome
de négligence, une anosognosie, une hémiasomatognosie,
un syndrome frontal.
Certaines lésions hémisphériques sévères, compressives
(hémorragie cérébrale, infarctus sylvien étendu oedémateux)
provoquent un coma.
Il n’est pas possible d’explorer
la motilité volontaire.
En outre, à ce stade l’hémiplégie
est flasque et le syndrome pyramidal réflexe se
résume au signe de Babinski.
Les éléments permettant
de reconnaître une atteinte unilatérale des voies corticospinales
et corticonucléaires sont les suivants : déviation
conjuguée de la tête et des yeux (en règle vers le
côté de la lésion), soulèvement de la joue du côté paralysé
lors de l’expiration (le malade « fume la pipe »), grimace
asymétrique lors de la manoeuvre de Pierre Marie
et Foix (compression derrière les branches montantes
des maxillaires), réponses aux stimulations douloureuses
absentes ou anormales (réponses stéréotypées en
flexion ou en extension) du côté paralysé, chute plus
lourde des membres préalablement soulevés, notamment
de la main après qu’elle a été placée en position
verticale (signe de Raïmiste).
4- Lésion du tronc cérébral
:
Dans le tronc cérébral, le faisceau pyramidal peut être
lésé dans la partie ventrale du mésencéphale (pédoncule
cérébral), du pont (protubérance), ou dans la pyramide
bulbaire.
L’existence d’une paralysie faciale centrale du
côté de l’hémiplégie indique que la lésion siège au-dessus
du départ des fibres corticonucléaires destinées au
noyau du nerf facial situé à la partie inférieure de la protubérance
; une atteinte de l’hémilangue du côté de l’hémiplégie
localise la lésion au-dessus du départ des fibres
destinée au noyau du XII situé dans le bulbe.
Le syndrome pyramidal peut être isolé ou associé à
d’autres signes du tronc cérébral, réalisant des syndromes
alternes ayant une grande valeur localisatrice.
Ces syndromes alternes sont le plus souvent d’origine
vasculaire, mais ils peuvent aussi avoir une cause tumorale
ou inflammatoire.
• Le syndrome de Weber (lésion pédonculaire) associe
une hémiplégie controlatérale et une paralysie du III
homolatérale.
• Le syndrome de Foville pédonculaire donne une
hémiplégie controlatérale associée à une paralysie de la
latéralité vers le côté opposé à la lésion (les voies commandant
les mouvements de latéralité des yeux n’ont
pas encore croisé : le patient « se détourne de son hémiplégie
et regarde sa lésion »).
Cette formule est aussi
observée dans certaines lésions hémisphériques sévères,
notamment chez des malades comateux).
• Le syndrome de Foville protubérantiel associe une
hémiplégie controlatérale à une paralysie de la latéralité
vers le côté de la lésion (le patient « se détourne de sa
lésion et regarde son hémiplégie »).
On distingue un syndrome de Foville protubérantiel supérieur dans
lequel la paralysie de la latéralité est due à la lésion des
voies supranucléaires après leur décussation, et un syndrome
de Foville protubérantiel inférieur dans lequel la
paralysie de la latéralité est associée à une paralysie
faciale périphérique du côté de la lésion.
Dans cette dernière
variété, due à une atteinte du noyau du VI, la paralysie
n’intéresse pas seulement les mouvements de latéralité
volontaires, mais aussi les mouvements réflexes
oculo-céphaliques ou oculo-vestibulaires.
• Le syndrome de Millard-Gubler (lésion protubérantielle
basse) comporte une paralysie faciale périphérique
du côté de la lésion, associée à une hémiplégie controlatérale
respectant la face.
Une atteinte bilatérale des voies corticospinales et corticonucléaires
au niveau de la partie ventrale de la protubérance
abolit totalement la mobilité volontaire des
membres, de la face, des muscles d’innervation bulbaire,
ainsi que les mouvements de latéralité des yeux. Le
malade qui est conscient ne peut s’exprimer que par des
mouvements de verticalité des yeux dont la commande
se fait au niveau mésencéphalique.
Ce syndrome (lockedin-
syndrome) est dû le plus souvent à une thrombose du
tronc basilaire.
Une lésion paramédiane du bulbe, au-dessus de la
décussation donne une hémiplégie controlatérale respectant
la face, associée à une paralysie homolatérale du
XII.
Une lésion bulbaire siégeant au niveau de la décussation
donne un syndrome pyramidal bilatéral : quadriplégie
dans le cas d’une lésion bilatérale, ou « hemiplagia
cruciata » dans le cas d’une lésion paramédiane
touchant les fibres destinées au membre inférieur qui ont
déjà croisé et celle destinées au membre supérieur qui
n’ont pas encore croisé.
À noter que le syndrome de
Wallenberg, lié à une lésion postéro-latérale du bulbe,
ne touche pas le faisceau pyramidal et ne donne pas
d’hémiplégie.
5- Lésion médullaire
:
Un syndrome pyramidal unilatéral est plus rarement la
conséquence d’une lésion médullaire.
Il est alors homolatéral
à la lésion, intéressant selon son niveau le
membre supérieur et le membre inférieur (lésion cervicale)
ou seulement le membre inférieur (lésion dorsale).
Le syndrome pyramidal peut être isolé ou associé à des
signes traduisant l’atteinte d’autres structures d’une hémi-moelle pour réaliser un syndrome de Brown-Séquard plus ou moins complet avec, du côté de la
lésion, outre le syndrome pyramidal, un syndrome cordonal
postérieur (tact fin, sens de position, sensibilité
vibratoire) et du côté opposé des troubles de la sensibilité
thermique et douloureuse (syndrome spinothalamique).
Un syndrome pyramidal unilatéral d’origine médullaire
est exceptionnellement d’origine vasculaire (infarctus
limité au territoire d’une artère sulco-comissurale) ; la
cause en est généralement une compression ou un processus
inflammatoire (sclérose en plaques).
B - Syndrome pyramidal bilatéral
:
Il peut être dû à des lésions multiples, bilatérales (accidents
vasculaires, plaques de démyélinisation, lésions
inflammatoires, infectieuses ou tumorales) siégeant
dans les hémisphères ou dans le tronc cérébral.
L’existence d’une paralysie faciale centrale et les signes
neurologiques associés permettent habituellement de
reconnaître cette éventualité.
Dans les autres cas, la
cause d’un syndrome pyramidal bilatéral doit être
recherchée au niveau de la moelle.
Le mode d’installation
oriente la discussion diagnostique.
1- Installation aiguë :
Il s’agit d’une paraplégie ou d’une quadriplégie constituée
brutalement ou rapidement, en quelques heures ou
quelques jours.
La présentation est celle d’une paraplégie
(lésion dorsale) ou d’une quadriplégie (lésion cervicale)
qui à la phase initiale est généralement flasque.
Les réflexes ostéotendineux peuvent être abolis.
Les
réflexes cutanés plantaires sont indifférents ou en extension.
Il existe en règle une rétention d’urine.
Il existe des
troubles sensitifs dans le territoire sous-lésionnel avec
un niveau supérieur indiquant le niveau de la lésion
médullaire.
Trois diagnostics doivent être évoqués :
• une compression aiguë de la moelle, dont l’origine est
habituellement traumatique ;
• un infarctus médullaire dont le siège habituel est dans
le territoire artériel spinal antérieur.
Le syndrome neurologique,
très particulier, associe à la paraplégie ou à la
quadriplégie une anesthésie thermique et douloureuse
dans le territoire sous-lésionnel (atteinte des faisceaux
spinothalamiques) contrastant avec la conservation de la
sensibilité tactile et du sens de position (intégrité des
cordons postérieurs qui dépendent du territoire artériel
spinal postérieur) ;
• une myélite aiguë dont les causes sont diverses. Une
myélite aiguë peut être la manifestation initiale d’une
sclérose en plaques : son association à une névrite
optique rétrobulbaire réalise la neuromyélite optique
aiguë de Devic (un neuro-lupus est une autre cause de ce
syndrome).
Une myélite aiguë peut aussi être la conséquence
de la localisation médullaire de l’encéphalomyélite
aiguë disséminée, affection à médiation immunologique
qui peut survenir de façon apparemment primitive
ou au décours d’une agression virale plus ou moins bien
identifiée.
À la différence de la sclérose en plaques,
l’encéphalomyélite aiguë disséminée a une évolution
habituellement monophasique.
Dans la mesure où ces
deux affections peuvent se révéler par une lésion unique
ou par des lésions multiples, la distinction à la phase
aiguë, en l’absence du critère évolutif, est difficile.
Une
agression virale directe peut aussi être en cause comme
dans la myélite zostérienne.
Parmi les autres causes
infectieuses, il faut mentionner la myélite syphilitique
aiguë (syphilis méningo-vasculaire).
L’imagerie par
résonance magnétique médullaire est un examen important dans le diagnostic de ces myélites : elle confirme
l’absence de compression médullaire et montre souvent
la lésion intramédullaire sous la forme d’un hypersignal
en T2 ou d’une prise de contraste (gadolinium).
Le
liquide céphalo-rachidien est inflammatoire.
2- Installation progressive :
Il s’agit d’une paraparésie ou d’une quadriparésie spasmodique.
• Devant un syndrome pyramidal bilatéral progressif,
de distribution paraparétique ou quadriparétique, la
première hypothèse à envisager est celle d’une compression
médullaire.
La manifestation initiale est habituellement
un trouble de la marche revêtant typiquement
l’aspect de la claudication intermittente non douloureuse.
Une impériosité mictionnelle doit être recherchée par
l’interrogatoire.
La mise en évidence du syndrome pyramidal
réflexe est essentielle, permettant d’affirmer l’origine
centrale du trouble. Il existe habituellement un
déficit sensitif dans le territoire sous-lésionnel et la mise
en évidence d’un niveau sensitif est un argument important
en faveur d’une atteinte médullaire.
Au syndrome sous-lésionnel moteur, sensitif et réflexe, peut être associé
un syndrome lésionnel, suspendu, correspondant au
niveau de la compression : douleurs radiculaires, déficit
moteur de type périphérique, abolition des réflexes intégrés
au niveau du segment médullaire lésé.
Ce syndrome
lésionnel est surtout net aux membres supérieurs, dans
les compressions de la moelle cervicale basse.
Lorsque l’on évoque une compression médullaire, l’examen
de première intention est l’imagerie par résonance
magnétique médullaire, avec injection de gadolinium,
en se souvenant que la moelle ne dépasse pas L1 et
qu’une imagerie par résonance magnétique lombaire est
sans intérêt (elle prend tout son intérêt lorsque l’on
évoque une compression du cône terminal ou de la
queue de cheval).
Cet examen a remplacé la myélographie
avec contraste dans le diagnostic des tumeurs intraou
extramédullaires, des épidurites inflammatoires ou
néoplasiques, de la myélopathie cervicarthrosique.
Il
peut aussi montrer des images évocatrices d’une malformation
vasculaire de la moelle (angiome artério-veineux)
conduisant à poser l’indication d’une artériographie
médullaire.
Toutefois certaines fistules artério-veineuses durales peuvent échapper à l’imagerie
par résonance magnétique.
• La forme progressive d’emblée de la sclérose en
plaques revêt volontiers l’aspect d’une paraplégie spasmodique
s’aggravant de façon insidieuse.
Les potentiels
évoqués multimodaux, l’imagerie par résonance magnétique
cérébrale peuvent apporter des arguments au diagnostic
en objectivant une atteinte multiloculaire infraclinique.
Dans le liquide céphalo-rachidien, une
sécrétion intrathécale et un profil oligoclonal des immunoglobulines
sont évocateurs.
Mais, en l’absence d’un
test diagnostique spécifique, il s’agit dans une large
mesure d’un diagnostic d’élimination, car un tableau
voisin peut être réalisé par d’autres affections : inflammatoires (sarcoïdose médullaire, maladie de Behçet,
syndrome de Gougerot-Sjögren), infectieuses (myélopathie
liée au virus HTL-V1, maladie de Lyme, brucellose),
parasitaires (schistosomiase médullaire).
• La sclérose combinée de la moelle (dégénérescence
combinée des cordons postérieurs et des faisceaux pyramidaux)
se présente comme une myéloneuropathie
paresthésique et ataxiante dans laquelle le syndrome
pyramidal est initialement au second plan.
Le syndrome
neurologique peut précéder les manifestations hématologiques
de la carence en vitamine B12.
Il faut y penser
avant l’évolution vers une paraplégie spasmodique avérée.
On peut en rapprocher la myélopathie vacuolaire du
syndrome d’immunodéficience acquise (sida) dont les
lésions assez voisines ont fait discuter le rôle d’un
trouble du métabolisme de la vitamine B12.
• L’adrénomyéloneuropathie est la forme médullaire de
l’adrénoleucodystrophie, affection de transmission
récessive liée à l’X.
Elle débute chez l’adulte jeune de
sexe masculin, donnant lieu à une paraplégie spasmodique
progressive associée à une neuropathie périphérique,
au moins infraclinique, et à une insuffisance surrénale.
Des formes d’apparition plus tardive peuvent
être observées chez les femmes hétérozygotes, se résumant
habituellement à la myélopathie, en l’absence
d’insuffisance surrénale.
Un liquide céphalo-rachidien
inflammatoire n’élimine pas le diagnostic qui repose sur
l’élévation du taux des acides gras à très longue chaîne.
• D’autres erreurs héréditaires du métabolisme des
lipides peuvent comporter, dans leurs formes d’apparition
tardive, une symptomatologie pyramidale prédominante,
souvent associée à une neuropathie périphérique.
Parmi ces affections, dont la transmission est autosomale
récessive, il faut mentionner : la maladie de Krabbe
(déficit en galactocéramidase) ; la leucodystrophie
métachromatique (déficit en arylsulfatase A) ; certaines
gangliosidoses résultant d’un déficit en hexosaminidase ;
la xanthromatose cérébrotendineuse résultant d’un
trouble de la dégradation du cholestérol avec accumulation
de choléstanol.
• Les paraplégies spastiques héréditaires sont des
affections hérédo-dégénératives dont les lésions portent
exclusivement, ou de façon largement prédominante, sur
les voies corticospinales.
La sémiologie reste dominée
tout au long de l’évolution par un syndrome pyramidal
très spastique des membres inférieurs d’évolution lentement
progressive.
La transmission peut être autosomale
récessive ou dominante.
Les formes dominantes peuvent
avoir un début tardif.
Ces paralysies spastiques progressives
peuvent être tout à fait pures ou être associées à
d’autres manifestations neurologiques ou somatiques
(paraplégies spastiques héréditaires « plus »).
Une « note pyramidale » est fréquente, mais au second
plan, dans de nombreuses autres affections dégénératives,
telles que les hérédo-ataxies spinocérébelleuses
dont il existe des formes récessives (maladie de
Friedreich) et dominantes, les atrophies multisystématisées,
la paralysie supranucléaire progressive (maladie de
Steele-Richardson).