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Ophtalmologie
Syndrome pseudoexfoliatif
Cours d'Ophtalmologie
 
 
 

Introduction :

Le syndrome pseudoexfoliatif ou pseudoexfoliation capsulaire (PEC) est connu depuis 1917.

Pourtant, son étiopathogénie exacte reste encore inconnue.

Décrit tout d’abord au niveau oculaire, il s’agit en fait d’un processus systémique dégénératif lié à l’âge, impliquant la matrice extracellulaire, mais ne faisant pas partie du processus normal de vieillissement.

Au stade évolué, il existe deux aires givrées à la face antérieure du cristallin, l’une centrale, l’autre périphérique, séparées par un intervalle clair indemne de tout matériel floconneux.

Si les complications oculaires, médicales et chirurgicales sont largement décrites, pouvant compromettre la vision du sujet âgé, seuls quelques travaux récents explorent son éventuelle expression clinique extraoculaire.

Terminologie :

Les différentes dénominations au cours du siècle passé sont l’expression des théories étiopathogéniques successives. Même à l’heure actuelle, il n’y a pas de consensus, car la pathogénie précise reste inconnue.

Le terme de « syndrome pseudoexfoliatif » semble pour l’instant le plus approprié, dans la mesure où le matériel pseudoexfoliatif est surajouté d’une part (production et accumulation de matériel aberrant) à une capsule antérieure de structure normale, et qu’il s’agit d’un processus dépassant largement le cadre oculaire d’autre part.

A - EXFOLIATION SÉNILE, THÉORIE DE L’EXFOLIATION VRAIE :

Même si la description princeps revient à Lindberg en 1917, le terme d’« exfoliation sénile » n’est proposé qu’en 1925 par Vogt.

Le matériel floconneux proviendrait d’après lui du vieillissement et de la dégénérescence progressive de la capsule cristallinienne antérieure.

Selon Gifford, il existerait en plus une exfoliation secondaire à la dégénérescence zonulaire.

Devant la forte proportion de glaucome chronique à angle ouvert chez les porteurs de PEC, Vogt associe la notion de glaucoma capsulare.

B - THÉORIE HUMORALE ET PSEUDOEXFOLIATION CAPSULAIRE :

Ce terme est proposé en 1954 par Dvorak-Theobald pour marquer la différence avec l’exfoliation capsulaire vraie, comme elle pouvait survenir chez les souffleurs de verre.

En effet, l’exposition prolongée à des températures élevées provoque une desquamation des lamelles appartenant à la capsule antérieure (rôle des infrarouges).

Il résulte de la théorie humorale de Busacca de 1928.

Le matériel floconneux pseudoexfoliatif proviendrait plutôt d’une substance inconnue en suspension dans l’humeur aqueuse, se déposant secondairement à la surface antérieure du cristallin, sans dégénérescence associée de la capsule.

C’est le terme le plus employé actuellement, d’où l’abréviation française de « PEC ».

C - AUTRES DÉNOMINATIONS :

Les termes de « fibrillopathia epitheliocapsularis », ou de basement membrane exfoliation, impliquaient des théories pathogéniques diverses, respectivement la production exclusive de matériel pseudoexfoliatif par le cristallin, ou la dégénérescence des membranes basales.

Le terme de « syndrome exfoliatif » reste toujours très employé par les Scandinaves.

Données physiopathogéniques actuelles :

L’apport de la microscopie électronique a été déterminant.

La PEC peut actuellement être considérée comme une fibrillopathie dégénérative généralisée liée à l’âge, et le matériel pseudoexfoliatif comme le produit complexe de la synthèse d’une matrice extracellulaire aberrante.

Sa production est multifocale et systémique, et son accumulation remplace et détruit progressivement la matrice extracellulaire normale.

Ceci conduit à une involution des cellules.

La théorie des microfibrilles élastiques de Streeten compare la PEC à une forme particulière d’élastose, en raison de la composition chimique et de l’association structurelle fréquente du matériel pseudoexfoliatif aux composantes élastiques dans différents tissus.

Au niveau oculaire, la production résulte non seulement de l’épithélium cristallinien, mais aussi de l’épithélium pigmentaire de l’iris et du corps ciliaire.

Ceci explique l’apparition possible de matériel pseudoexfoliatif sur l’hyaloïde antérieure chez l’aphaque, ou sur les implants intraoculaires de chambre postérieure.

De plus, une partie du matériel est en suspension dans l’humeur aqueuse et se dépose secondairement sur toutes les structures du segment antérieur.

Pour l’instant, le matériel pseudoexfoliatif n’a pas pu être mis en évidence au niveau du segment postérieur.

Le matériel pseudoexfoliatif est également présent dans les tissus extraoculaires, ainsi que dans la plupart des organes vitaux.

Les analogies immunohistochimiques et en microscopie électronique du matériel pseudoexfoliatif en intra- et en extraoculaire plaident pour un mécanisme pathogénique commun.

A - ASPECT EN MICROSCOPIE ÉLECTRONIQUE :

Les fibrilles de la PEC sont disposées de façon anarchique.

Elles sont non ramifiées mais peuvent être droites, courbes ou angulées.

Deux types peuvent être isolés :

– les fibrilles de type A, longues et fines, ont un diamètre de 15-20 nm, une longueur de 1 μm et une périodicité de 50 nm, parfois 25 nm ;

– les fibrilles de type B sont plus courtes, 0,3-0,5 μm, plus épaisses (30-45 nm), plus denses et sans périodicité.

Ces fibrilles sont associées à des microfibrilles, soit de 8-10 nm, soit de 3-6 nm de diamètre, avec une micropériodicité de 10 à 12 nm, au sein d’une matrice extracellulaire amorphe.

B - ORIGINE DU MATÉRIEL PSEUDOEXFOLIATIF : HYPOTHÈSES

La production se fait probablement par différents types de cellules épithéliales et mésenchymateuses. Bien que les fibrilles n’aient encore jamais été mises en évidence en intracellulaire strict, elles semblent apparaître dans des vacuoles d’exocytose à la surface des cellules.

Dans un premier temps, il s’agit de microfibrilles qui s’épaississent pour former les agglomérats typiques du matériel pseudoexfoliatif, de structure pseudoarborisée et se répandent dans l’humeur aqueuse pour former des dépôts secondaires.

En intraoculaire, le matériel pseudoexfoliatif est en association étroite avec l’épithélium non pigmenté du corps ciliaire, l’épithélium pigmenté de l’iris, l’épithélium prééquatorial du cristallin, l’endothélium cornéen et trabéculaire, ainsi que presque toutes les cellules du stroma irien.

En extraoculaire, il existe une association particulière avec les cellules musculaires, les péricytes et l’endothélium vasculaires, ainsi que les cellules conjonctivales.

C - COMPOSITION CHIMIQUE :

Elle n’est pas encore totalement élucidée.

Les difficultés rencontrées sont la non-solubilité et la quantité insuffisante du matériel, ainsi que l’absence de modèle expérimental.

Les études immunohistochimiques permettent d’envisager un noyau protéique entouré de chaînes polysaccharidiques, amalgame complexe de glycoprotéines et de protéoglycanes, résistant aux enzymes, associé à de l’acide hyaluronique.

Le profil d’acides aminés est compatible avec des microfibrilles élastiques et des composantes non collagéniques de membranes basales et amyloïdes.

Le matériel pseudoexfoliatif comprend des composantes des membranes basales ainsi que des composantes élastiques.

Classification clinique :

SIGNES CLINIQUES :

L’expression oculaire est asymétrique, mais on peut considérer que les deux yeux sont impliqués à des stades différents.

La bilatéralisation intervient dans 6,8 -16,8 % à 5 ans, voire 30-43 % chez les Scandinaves.

Le diagnostic de la PEC est surtout clinique et s’effectue au biomicroscope.

Outre l’existence des flocons grisâtres dans le segment antérieur, de nombreux signes indirects, pigmentaires, sont déjà associés à la PEC dans les stades précoces.

En effet, même en l’absence de flocons visibles sur la capsule ou l’iris, les signes pigmentaires sont corrélés à la présence objective de matériel pseudoexfoliatif, par exemple dans des biopsies de conjonctive ou de paupière, ainsi qu’à la présence d’une couche microfibrillaire précapsulaire antérieure, visible en microscopie électronique.

Ces signes pigmentaires sont les suivants :

– dispersion mélanique à partir de l’épithélium irien lors des mouvements de l’iris ;

– dépôts mélaniques sur les structures du segment antérieur ;

– mydriase difficile avec tyndall pigmentaire ;

– defects focaux mélaniques du stroma irien et atrophie du rebord pupillaire ;

– pigmentation du trabéculum, prédominant dans la moitié inférieure et irrégulière ;

– présence de plusieurs lignes pigmentées au niveau de l’anneau de Schwalbe (ligne de Sampaolesi).

La PEC représentant un risque accru de complications lors de chirurgies intraoculaires et une forte proportion de glaucomes, un diagnostic le plus précoce possible est de grande valeur.

La classification proposée par GO Naumann repose sur l’aspect des altérations morphologiques présentes à la surface antérieure du cristallin et la corrélation clinicomicroscopie électronique conduit à considérer quatre stades distincts évolutifs.

1- Stade A préclinique :

Indétectable en biomicroscopie mais visible en microscopie électronique, il s’agit d’une fine couche de microfilaments en avant de la cristalloïde antérieure.

Cette couche provient probablement d’un dysfonctionnement du métabolisme de la matrice extracellulaire et le dépôt se fait à partir de l’humeur aqueuse.

La structure de l’iris est normale à ce stade.

2- Stade B ou « suspicion de PEC » :

La même couche de microfilaments est retrouvée en microscopie électronique sur toute la surface de la capsule cristallinienne, mais plus épaisse, et commence à être visible au biomicroscope (aspect dépoli et diffus du cristallin).

Les signes pigmentaires associés débutants sont présents, le plus important étant la pigmentation trabéculaire.

Il existe également quelques defects iriens et de la marge pupillaire, visibles en transillumination.

La mydriase est incomplète après instillation d’un collyre mydriatique, avec dispersion pigmentaire nette.

3- Stade C ou « mini-PEC » :

Les frottements produits par le contact entre l’épithélium pigmentaire de l’iris et de la face antérieure du cristallin conduisent à l’apparition d’un defect focal de la couche précapsulaire microfibrillaire.

Cette véritable abrasion débute classiquement dans le quadrant nasal supérieur, là où les frottements seraient les plus importants.

En périphérie, l’aspect granulaire de la couche précapsulaire se précise.

Les signes pigmentaires associés précités sont tous présents à des stades plus marqués.

4- Stade D ou « PEC classique » :

Il correspond à la description de Mailing et Vogt par agrandissement et multiplication des zones de defects dans la couche précapsulaire.

Il existe trois zones individualisées : la zone centrale où persiste du matériel pseudoexfoliatif est un disque homogène, dont le diamètre correspond au diamètre pupillaire physiologique (absence de frottements).

Elle est séparée de la zone périphérique granulaire, visible seulement en mydriase, par une zone intermédiaire indemne.

Sous l’action des mouvements pupillaires, les rebords de la zone périphérique peuvent s’enrouler de façon centrifuge, ceux de la zone centrale de façon centripète.

De plus, les flocons de matériel pseudoexfoliatif sont également présents sur l’appareil zonulaire, au niveau du trabéculum et sur l’endothélium cornéen, pouvant simuler d’autres pathologies.

Prévalence :

La PEC a été décrite en premier dans les pays scandinaves. Mais de nombreuses études ont démontré une répartition mondiale.

La prévalence générale se situe entre 3 et 8 %.

Il existe une forte variabilité en fonction des pays, des ethnies et des régions au sein d’un même pays.

De nombreux biais (méthodologie variable, sélection des patients, critères diagnostiques...) compliquent la comparabilité des résultats.

A - RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE :

La prévalence est variable, allant de 0 % (Esquimaux), 2-18 % dans l’Europe de l’Ouest, aux États-Unis ou au Japon, 16 % chez les aborigènes australiens et 38 % chez les Indiens Navajos.

En Scandinavie, la prévalence est importante, 10 à 43 % pour des patients de plus de 60 ans, ainsi que dans certaines ethnies, Bantous d’Afrique, Indiens Navajos, aborigènes australiens.

La seule étude comparative randomisée à grande échelle, sur 11 000 yeux, a montré une prévalence élevée (20 %) chez les Lapons, les Islandais, Finlandais, Russes de Novosibirsk, Tunisiens du désert, mais une prévalence faible, voire nulle chez les Péruviens (altitude supérieure à 4 000 m), les peuplades de l’Himalaya et les Esquimaux du Groenland.

Forsius avance comme hypothèse à cette variation des causes génétiques, mais aussi des causes environnementales, en particulier la radiation aux utraviolets (UV).

B - CORRÉLATION À L’ÂGE :

Dans toutes les études, on constate une nette augmentation de la prévalence avec l’âge.

D’après Forsius, l’incidence double à chaque décade après 50 ans, quelle que soit la structure démographique du pays.

L’étude de cohorte (2 940 personnes) de la Framingham Eye Study retrouve cette augmentation de la prévalence avec l’âge, de 0,6 % entre 52 et 64 ans, de 2,6 % entre 65 et 74 ans et de 5 % de 75 à 85 ans, confirmant les résultats de Aasved dans une étude de 8 537 Norvégiens. En Europe, la PEC est rare chez le patient jeune.

Cependant elle a été décrite dès 30 ans chez les Bantous, mais aussi dans des circonstances particulières post-traumatiques : à 22 ans dans les suites d’une plaie transfixiante de cornée, ou encore à 17 ans après trabéculectomie pour glaucome congénital.

Dans les deux cas, l’apparition d’une PEC précoce est en relation probable avec des lésions traumatiques vasculaires de l’iris (iridectomie).

C - CORRÉLATION AU SEXE :

La corrélation au sexe est assez controversée.

Dans l’étude de Framingham, la prévalence est plus fréquente chez la femme après 65 ans, contrairement à l’étude d’Aasved.

En fait, la distribution du sexe dans la PEC semble dépendre de la coexistence ou non d’un glaucome : plus fréquent chez la femme dans une population non glaucomateuse.

En revanche, les PEC de sexe masculin semblent plus fréquemment développer un glaucome.

Facteurs de risques et facteurs facilitants :

Le risque de présenter une PEC, outre l’âge et les facteurs traumatiques, semble influencé par des facteurs génétiques, personnels et environnementaux.

A - FACTEURS GÉNÉTIQUES :

La mise en évidence des facteurs héréditaires est d’autant plus difficile que la PEC est fréquente dans la population générale, avec de fortes variations de prévalence.

La prévalence élevée en Scandinavie, en Bretagne et chez les Bantous suggère l’existence d’un facteur génétique, de même que l’existence de PEC familiale et de PEC chez des couples de vrais jumeaux.

Pour de nombreux auteurs, les facteurs héréditaires sont indéniables, et la PEC serait de transmission autosomique dominante, à expressivité variable.

Récemment, publiée en mai 1999, une étude multicentrique a identifié pour la première fois une localisation chromosomique précise, très probablement impliquée dans l’hérédité du syndrome pseudoexfoliatif, soit deux loci sur le chromosome 2.

Cette étude portait sur 17 familles, dont 42 membres étaient atteints de PEC.

Les régions génétiques concernées sont la région 2p14-2C et la région 2q35-q36.

Auparavant, les études HLA ont donné des résultats controversés.

Il n’y a pas non plus de différence de distribution des groupes ABO Rhésus chez les porteurs de PEC.

B - FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX :

Ils semblent également indéniables.

En effet, en 1988, Ringvold montre que l’apparition d’une PEC chez deux conjoints dépasse de 3,2 % la valeur attendue.

Exposition aux ultraviolets :

L’exposition au rayonnement UV, en particulier, semble être impliquée dans l’apparition de la PEC.

Dans des populations fortement exposées aux UV comme les aborigènes australiens, Taylor retrouve une forte prévalence (16,5 %), notamment chez les dockers.

Il a de plus établi une corrélation entre l’apparition de la PEC et un taux annuel global de radiations supérieur à 600 mW/h/cm2, pour une population de plus de 60 ans.

Par ailleurs, il existe une inversion du sex-ratio en faveur de la population masculine, dans des zones où les hommes sont plus exposés au climat par leur activité professionnelle.

C’est le cas chez des pêcheurs, des montagnards ou des nomades du désert.

C - FACTEURS PERSONNELS :

1- Couleur de l’iris :

Aucune corrélation avec une couleur particulière de l’iris n’a pu être établie avec certitude.

Par exemple, les Esquimaux ont un iris foncé mais peu de PEC, à l’inverse des Bantous. Le rôle protecteur du pigment irien contre les UV suspectés dans l’apparition de la PEC n’a donc pas été établi.

2- Dégénérescence maculaire liée à l’âge :

Récemment, une corrélation positive entre PEC et dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) dans les populations crétoise ou bretonne a été montrée pour la première fois.

En Crête, PEC et DMLA étaient directement corrélées à l’âge, mais aussi à l’altitude, ce qui renforce l’hypothèse des UV.

Il existe en effet de nombreuses similitudes épidémiologiques entre ces deux pathologies.

Modifications structurelles et conséquences :

A - CRISTALLIN :

Modifications histologiques :

Au stade A de la couche précapsulaire, il existe une fine couche de microfibrilles sur toute la surface de la cristalloïde antérieure, dont l’épaisseur est de 0,1-3,5 μm. Elle ne contient pas les fibrilles caractéristiques A et B.

Au stade D, la zone centrale ressemble à la couche microfibrillaire, d’une épaisseur de 1,5 à 3,5 μm, mais avec quelques fibres A et B.

La zone intermédiaire présente quelques mottes isolées à la surface lisse de la capsule.

La zone périphérique granulaire consiste en de nombreuses mottes de matériel PE typique, produites par l’épithélium pigmentaire irien, pouvant se détacher lors des mouvements iriens.

La zone capsulaire prééquatoriale est la seule partie de la capsule à être modifiée en profondeur et produisant activement du matériel PE : il existe des fibrilles dans les deux tiers antérieurs de la capsule, produites par l’épithélium cristallinien et s’agrégeant en fibrilles pseudoarborisées à la surface des cellules pour ensuite infiltrer la capsule secondairement.

B - ZONULE ET CORPS CILIAIRE :

1- Modifications histologiques :

Les flocons de matériel pseudoexfoliatif sont visibles en gonioscopie dans la plupart des yeux, même lorsque la PEC n’est pas encore visible sur le cristallin.

Les fibrilles recouvrent et s’incrustent dans les fibres zonulaires et leur accumulation les dilacère.

La production se fait à partir des cellules de l’épithélium non pigmenté du corps ciliaire.

L’ancrage des fibres zonulaires est ainsi fragilisé par destruction progressive des membranes basales, au niveau du corps ciliaire et au niveau du cristallin, et la dilacération des fibres les rend friables.

Conjointement aux modifications de la capsule dans la zone prééquatoriale, ceci est à l’origine de ruptures de certaines de ces fibres.

2- Conséquences cliniques :

La fragilité de la zonule peut se traduire par un phacodonésis, voire même une luxation du cristallin, spontanée ou après traumatisme léger.

Vers l’avant, cette luxation entraîne un glaucome aigu par fermeture de l’angle ou par bloc pupillaire, vers le vitré une cataracte hypermûre avec risque de glaucome phacolytique.

Les risques pendant la chirurgie de la cataracte sont plus élevés, comme la dialyse zonulaire ou la perte de vitré.

C - TRABÉCULUM :

1- Modifications histologiques :

Il existe de façon précoce une pigmentation du trabéculum, importante, irrégulière, prédominant dans la partie inférieure, à partir de la mélanine en provenance de l’iris en suspension dans l’humeur aqueuse.

L’importance de la pigmentation est indépendante du stade de la PEC.

Le matériel pseudoexfoliatif est présent d’une part dans le tissu jouxtant le canal de Schlemm, d’autre part dans la partie uvéale du trabéculum.

Les fibrilles sont produites puis s’accumulent passivement dans les cellules endothéliales du canal de Schlemm.

Ne pouvant pas être phagocytées comme la mélanine, les cellules se « ballonnisent » progressivement, avec protrusion dans la lumière du canal.

De plus, leur dégénérescence entraîne des oblitérations partielles endocanaliculaires par accolement des cellules entre elles.

2- Conséquences cliniques :

L’augmentation de résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse, associée à l’augmentation de sa viscosité est à l’origine d’une prédisposition au développement de glaucomes chez les patients porteurs d’un syndrome pseudoexfoliatif.

D - IRIS :

1- Modifications histologiques :

Le matériel pseudoexfoliatif se trouve dans toutes les structures de l’iris : épithélium pigmenté, stroma, vaisseaux, sphincter et muscle dilatateur de l’iris.

Tous les types cellulaires participent : fibrocytes, mélanocytes, cellules endothéliales vasculaires, péricytes, cellules musculaires.

La dégénérescence de l’épithélium pigmentaire conduit à la libération de mélanine, et celle des cellules musculaires à la pauvreté de la mydriase.

Celle des vaisseaux conduit à des microthromboses capillaires avec hypoperfusion et réduction de la pression partielle d’oxygène dans la chambre antérieure et rupture de la barrière hématoaqueuse.

2- Modifications en angiographie à la fluorescéine :

Il existe une raréfaction des vaisseaux iriens radiaires, avec hypoperfusion, micronéovascularisation et extravasation de fluorescéine surtout au niveau de la marge pupillaire.

3- Conséquences cliniques :

Les mouvements iriens, en particulier la mydriase diagnostique, conduisent à une dispersion mélanique en chambre antérieure.

Il existe des dépôts secondaires de grains de mélanine sur l’iris.

L’hypoxie conduit probablement à l’atrophie péripupillaire et stromale et la vasculopathie irienne à des hémorragies spontanées ou lors de la mydriase, pouvant conduire à un hyphéma total.

Le matériel pseudoexfoliatif ayant des propriétés adhésives, la survenue de synéchies postérieures spontanées est possible, aggravée par l’instillation de traitements hypotonisants miotiques.

E - CORNÉE :

1- Modifications histologiques :

Il existe parfois quelques flocons de matériel pseudoexfoliatif accolés à l’endothélium de façon isolée, voire intégrés dans la membrane de Descemet.

Il existe une raréfaction des cellules endothéliales avec polymorphisme et polymégatisme, une dégénérescence cellulaire avec proliférations cellulaires focales (rôle de l’hypoxie du segment antérieur ?) et production active de microfibrilles in situ, ainsi qu’une production anormale de matrice extracellulaire amorphe.

La densité cellulaire chute significativement chez un patient porteur de PEC, d’autant plus qu’il présente un glaucome associé.

Dans les stades tardifs, l’endothélium peut même devenir une source de production des fibrilles.

2- Conséquences cliniques :

La kératopathie est présente précocement dans la PEC.

L’altération de l’endothélium peut conduire à une décompensation oedémateuse, en particulier lors de pics pressionnels minimes ou lors de chirurgie intraoculaire.

Cette décompensation est diffuse, contrairement à celle de la cornea guttata ou de la dystrophie de Fuchs, qui commence au centre pour s’étendre vers la périphérie.

F - HUMEUR AQUEUSE :

Il existe une rupture de la barrière hématoaqueuse, avec discret tyndall (tyndallométrie), pouvant simuler une pseudo-uvéite.

La concentration en protéines est multipliée par trois, augmentant encore lors de chirurgies intraoculaires (filtrante ou cataracte).

G - FILM LACRYMAL :

L’involution des cellules conjonctivales augmente le risque de xérophtalmie, surtout s’il existe un traitement bêtabloquant local associé.

En effet, le test de Schirmer et le temps de rupture du film lacrymal sont significativement altérés dans la PEC.

Syndrome pseudoexfoliatif et glaucome :

Environ 40 à 60 % des patients PEC présentent un glaucome chronique à angle ouvert (GCAO) secondaire. S’il survient un glaucome dans un cas de PEC unilatérale, alors celui-ci survient du côté où la PEC est manifeste. Inversement, parmi les glaucomateux, 10-85 % présentent une PEC.

Il existe de nombreuses différences avec le glaucome pigmentaire et avec le GCAO primitif : le glaucome pseudoexfoliatif est souvent asymétrique, avec un fond hypertonique plus marqué, des pics pressionnels, une altération précoce de la papille et du champ visuel, une résistance rapide au traitement médical, une trabéculorétraction initiale très efficace mais transitoire, un pronostic plus péjoratif avec conséquence chirurgicale (trabéculectomie) plus fréquente, et enfin des différences HLA, ABO Rhésus, ainsi que des différences histologiques.

Outre le GCAO secondaire, la PEC peut se compliquer de glaucome aigu à angle ouvert chez 25 % des sujets glaucomateux chroniques.

L’augmentation aiguë du tonus oculaire (souvent supérieur à 50 mmHg sans mydriase) provient de l’oblitération aiguë du trabéculum par dispersion de mélanine et de flocons de PEC, d’autant plus s’il existe déjà une subluxation du cristallin vers le vitré.

Par ailleurs, peut également survenir, dans une proportion plus faible, un glaucome à angle fermé sur blocage pupillaire (10 %), ou sur blocage ciliaire par instabilité zonulaire.

Il semblerait que les yeux porteurs d’un syndrome pseudoexfoliatif présentent une proportion plus importante d’angle étroit, ainsi qu’un volume plus petit de la chambre antérieure : microphtalmie antérieure relative, cristallin plus gros, longueur axile plus petite ?

Une subluxation minime du cristallin vers l’avant peut entraîner un blocage pupillaire, et ce d’autant plus que la mydriase est déjà médiocre et qu’il existe des synéchies postérieures.

Si la subluxation du cristallin vers l’avant est plus importante, la contraction du muscle ciliaire la majore et engendre un blocage pupillaire aigu.

Une extraction du cristallin en urgence est indispensable si le bloc ciliaire n’est pas rapidement levé par une cycloplégie médicamenteuse énergique.

Syndrome pseudoexfoliatif et cataracte :

La PEC semble favoriser la survenue d’une cataracte nucléaire, mais les deux pathologies apparaissent chez le sujet âgé.

A - COMPLICATIONS CHIRURGICALES :

1- Risques peropératoires :

La PEC est un facteur de risque de complications peropératoires.

Elles sont liées à la mydriase médiocre, aux synéchies postérieures, à la structure plus rigide de l’iris et surtout à la fragilité zonulaire.

* Risque de rupture zonulaire peropératoire :

Il est surtout important dans les PEC évoluées.

Le chirurgien s’attachera à rechercher en préopératoire un phacodonésis.

Le risque de survenue de rupture zonulocapsulaire est multiplié par quatre si le diamètre pupillaire maximal est inférieur à 6 mm.

* Risque de perte de vitré :

Il est également augmenté. Une dilatation pupillaire maximale inférieure à 6,5 mm multiplie par deux le risque d’issue de vitré.

Si elle est inférieure à 4,5 mm, le risque est multiplié par cinq.

Ceci pourrait augmenter les risques de décollement de rétine du pseudophaque (hypothèse non encore vérifiée).

2- Risques postopératoires :

* Hypertonie oculaire transitoire.

– Inflammation postopératoire :

Réaction inflammatoire de la chambre antérieure plus importante et plus longue (rupture de la barrière hématoaqueuse), après chirurgie de la cataracte ou chirurgie filtrante, avec formation fréquente de fibrine, pouvant simuler une pseudo-uvéite.

– Cataracte secondaire :

Elle est d’environ 46,5 % à 1 an chez les patients porteurs d’une PEC, contre 29,6 % sans PEC, et est probablement également liée à la rupture de la barrière hématoaqueuse.

L’une des hypothèses pour la stimulation de la prolifération des cellules épithéliales du cristallin serait, outre les phénomènes d’hypoxie, l’augmentation importante de la concentration en protéines sériques et en facteurs de croissance dans l’humeur aqueuse.

* Autres complications :

– Décentrement tardif de l’implant de chambre postérieure par décentrement fibrotique de tout le sac capsulaire en raison de l’insuffisance de l’appareil zonulaire.

– Décompensation endothéliale cornéenne diffuse, mais perte cellulaire comparable lors de la chirurgie.

– Résultats visuels postopératoires inférieurs chez les patients porteurs de PEC en comparaison de ceux qui sont indemnes.

B - CHOIX DE LA TECHNIQUE CHIRURGICALE :

1- Type d’extraction :

Il est primordial de savoir s’il existe un phacodonésis franc préopératoire.

En cas d’absence ou en cas de phacodonésis léger, l’extraction extracapsulaire est la règle.

Si la dilatation pupillaire est insuffisante (inférieure à 6 mm), des sphinctérotomies ou des écarteurs à iris sont nécessaires.

La phacoémulsification peut être utilisée en routine car elle présente peu de risques de complications chez des chirurgiens expérimentés.

J Colin applique le protocole opératoire suivant : dilatation pupillaire, capsulorhexis large, hydrodissection complète du noyau, anneau en polymétacrylate de méthyl (PMMA) pour tendre le sac et diminuer éventuellement la rétraction du capsulorhexis.

Pour l’instant, l’implantation d’implants de chambre postérieure avec des haptiques en PMMA, n’a pas permis de réduire significativement le « capsulophimosis ».

S’il existe un phacodonésis majeur avec subluxation du cristallin, une extraction intracapsulaire est de mise, avec implant suturé à la sclère.

De même, si la dilatation pupillaire est nulle avec synéchies circulaires, une iridectomie sectorielle est en plus nécessaire, avec suture en fin d’intervention.

2- Implantation :

Le cristallin artificiel est implanté en chambre postérieure chaque fois que cela est possible, c’est-à-dire en cas d’intégrité de la zonule et de la capsule postérieure.

Sinon, il faut préférer une implantation dans le sulcus à une implantation en chambre antérieure, en raison de la diminution du comptage endothélial et du risque important de GCAO secondaire.

L’inconvénient de l’implantation dans le sulcus est l’augmentation de la dispersion mélanique par frottement de l’implant contre l’iris, avec contact direct avec le corps ciliaire pouvant entraîner des hypertonies.

Syndrome pseudoexfoliatif systémique :

A - LOCALISATIONS :

Elles sont démontrées depuis le début des années 1990.

Le matériel pseudoexfoliatif est en particulier présent dans des biopsies de conjonctive et de peau des paupières.

Les fibrilles pseudoexfoliatives sont en rapport structurel étroit avec les fibres élastiques, les fibroblastes et le collagène des viscères.

1- Répercussions cliniques ?

L’implication de la PEC dans des manifestations pathologiques extraoculaires reste floue.

Celles-ci font l’objet de nombreuses études actuelles, mais peu de résultats sont connus.

La PEC peut pourtant être considérée comme indicateur d’un terrain à risque cardiovasculaire.

* Thrombose veineuse rétinienne ?

Une seule étude récente a étudié rétrospectivement l’existence ou non d’une PEC lors de la survenue de thrombose veineuse rétinienne.

Environ 6 % des patients présentaient une PEC.

L’auteur met en cause la PEC comme véritable facteur de risque de survenue d’une thrombose rétinienne de branche à proximité de la papille, et ce d’autant plus qu’il existe un glaucome associé (rôle de l’hypertonie et de l’angle plus aigu des vaisseaux au niveau de l’excavation d’une papille glaucomateuse).

Une autre hypothèse est la possible vasculopathie des vaisseaux rétiniens, dans la mesure où du matériel pseudoexfoliatif a été mis en évidence en extrabulbaire, à proximité des vaisseaux nourriciers du nerf optique.

* Pathologies carotidiennes et vasculaires cérébrales ?

+ Accident ischémique transitoire cérébral (AIT) :

Pour certains auteurs, la transillumination irienne anormale serait associée aux maladies cérébrovasculaires extracrâniennes.

La PEC étant plus fréquente chez les patients présentant un AIT, l’hypoperfusion oculaire pourrait être incriminée comme facteur de développement de PEC.

En effet, les patients ayant présenté un AIT indiquent une augmentation de l’indice de résistivité dans l’artère ophtalmique, suggérant des modifications au niveau de la circulation ciliaire.

+ Pathologie carotidienne :

D’autres auteurs n’ont pas retrouvé de différence entre les index de résistance au niveau des carotides interne et externe et des artères ophtalmiques, mais une augmentation significative de l’épaisseur de l’intima-média (versus GCAO primitifs) au niveau de la carotide primitive dans le groupe PEC, suggérant un épaississement de la paroi par du matériel pseudoexfoliatif dans des vaisseaux à destinée céphalique.

+ Accidents vasculaires cérébraux constitués (AVC) :

Dans une récente étude cas-témoins, 14 % des patients PEC ont présenté un AVC avec séquelles hémiplégiques, contre 1,5 % dans le groupe témoin.

* Terrain cardiovasculaire :

En Australie, 4 433 individus de plus de 49 ans ont été examinés dans une étude de cohorte. Une PEC a été retrouvée dans 2,3 % des cas, avec une prévalence augmentant avec l’âge, le sexe féminin et le glaucome.

Une association statistiquement significative était montrée pour la première fois, après appariement au sexe, à l’âge, à la tension artérielle systolique, au diabète, à la cholestérolémie, au tabagisme et à la masse corporelle, entre la PEC et des anamnèses positives d’hypertension artérielle, d’angine de poitrine d’une part, ou la combinaison angine de poitrine-infarctus ou angine de poitrine-syndrome de menace d’autre part.

Une deuxième étude mettait en évidence l’existence d’antécédents personnels de pathologies cardiovasculaires graves dans le groupe PEC, incluant en particulier des troubles du rythme cardiaque, infarctus, angine de poitrine, ainsi que des antécédents de chirurgie cardiaque.

Conclusion :

La PEC présente un tableau clinique ophtalmologique décrit et connu depuis de nombreuses années, du fait de sa fréquence et de sa répartition mondiale.

L’identification de certains de ses facteurs de risques, comme l’hypoperfusion oculaire ou les facteurs génétiques et environnementaux a été possible, mais ne permet pas d’élucider précisément son étiopathogénie.

Les complications oculaires peuvent compromettre la vision du sujet âgé.

En effet, la PEC est à considérer comme un facteur de risque de glaucome, ainsi que de complications diverses de la chirurgie intraoculaire.

Ceci impose sa recherche systématique en préopératoire. Si la PEC se confirme à l’avenir comme indicateur de terrains à risque particuliers, notamment cardiovasculaire, qui mettent en jeu des pathologies graves, sa détection précoce oculaire deviendra primordiale pour une meilleure prise en charge multidisciplinaire des facteurs véritables de risques respectifs.

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