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Hématologie
Pronostic et traitement des leucémies aiguës myéloblastiques
Cours d'hématologie
 


 

Traitement :

Les principes thérapeutiques qui gouvernent le traitement à visée curative des leucémies aiguës myéloblastiques (LAM) incluent une cure d’induction visant à l’obtention d’une rémission complète (RC) puis un traitement de consolidation dont l’objectif est l’éradication de la maladie résiduelle.

Les drogues actives sont peu nombreuses : cytarabine, inhibiteurs de topo-isomérase de type 2 (anthracyclines, intercalants, étoposide), alkylants.

Les chances d’une nouvelle rémission prolongée étant très faibles après rechute, les régimes de consolidation privilégient désormais les traitements intensifs et toxiques de 3 à 4 mois hautes doses de cytarabine, autogreffe, allogreffe par rapport à des régimes de maintenance ambulatoire de 1 à 2 ans qui sont plutôt proposés aux patients plus âgés.

En effet, il existe, in vitro, pour la plupart des agents actifs dans la LAM, une relation linéaire entre l’augmentation des drogues cytotoxiques et le nombre de cellules tuées.

Ce concept expérimental d’effet-dose a une traduction clinique puisqu’il existe une certaine corrélation entre les doses administrées, les taux de rémission et de rechute, mais aussi de décès d’origine toxique.

Les profits d’un meilleur contrôle antileucémique doivent donc être mesurés aux risques d’un excès de mortalité d’origine toxique et les travaux des dernières décennies ont visé à l’optimisation de la délivrance de la chimiothérapie dans des régimes de haute dose-intensité.

A - INDUCTION :

L’obtention de la rémission complète conditionne les chances de survie du patient et l’échec de son obtention le condamne presque toujours à court terme.

Ce point crucial explique l’importance de la recherche clinique de combinaisons de drogues cytotoxiques et de traitement de support hématologique autour du régime d’induction.

La prise en charge des LAM est une urgence médicale, la maladie étant le plus souvent révélée par des complications aiguës infectieuses ou hémorragiques.

Au diagnostic, le patient leucémique présente une insuffisance médullaire des lignées neutrophile, érythrocytaire et plaquettaire consécutive à l’envahissement tumoral.

Ces cytopénies vont durer jusqu’à l’obtention de la rémission en 4 à 8 semaines.

La sévérité de ce tableau est majorée par la fréquence des manifestations de coagulation intravasculaire disséminée (CIVD), des troubles respiratoires dans le cadre d’une leucostase pulmonaire, d’une acidose métabolique avec insuffisance rénale, hyperuricémie, hyperphosphorémie dans le cadre du syndrome de lyse cellulaire.

Aucune de ces manifestations ne doit cependant retarder la mise en route de la chimiothérapie parallèlement à l’instauration de traitements symptomatiques.

1- Traitement spécifique :

La cure d’induction utilise presque toujours l’association de cytarabine et d’anthracycline.

La cytarabine (AraC) est la plus ancienne drogue active connue.

Administrée à la dose de 20 mg/m²/j par voie sous-cutanée pendant 21 jours ou 100 mg/m²/j en perfusion continue pendant 7 jours, elle a permis d’obtenir historiquement 25 % de premières rémissions complètes.

À cette posologie, outre l’aplasie thérapeutique recherchée, on observe une toxicité extrahématologique digestive, muqueuse, assez commune aux drogues de chimiothérapie, et plus rarement cutanée.

La cytotoxicité de la cytarabine est dépendante de son incorporation intracellulaire cycle-dépendante et de sa transformation par phosphorylation en son métabolite actif, l’AraC-TP.

L’accumulation de l’AraC-TP intracellulaire est proportionnelle à la dose administrée de cytarabine.

Des posologies de 1 à 3 g/m²/j en bolus pendant 5 à 7 jours permettent également un passage de la barrière hémoméningée et donc une prophylaxie neuroméningée, mais elles sont associées à une toxicité cérébelleuse inconstamment réversible.

Parmi les inhibiteurs de topo-isomérase de type 2 (I topo 2), la daunorubicine reste l’anthracycline de référence, offrant historiquement en monothérapie 50 % de première rémission complète à la posologie de 60 mg/m²/j pendant 3 jours.

Outre leur toxicité hématologique, digestive et muqueuse et d’un effet alopéciant, les anthracyclines présentent une toxicité cardiaque rarement immédiate, mais cumulative.

L’étoposide (VP 16) ne présente en revanche pas de toxicité cardiaque et offre 20 % de seconde RC en monothérapie.

Le régime d’induction encore le plus utilisé comporte le plus souvent une seule cure d’induction par : daunorubicine (D) 45- 60 mg/m² de j1 à j3, cytarabine ou AraC (A)100-200 mg/m² en perfusion continue de j1 à j7 ou j10 (protocole AD 3 + 7 ou 3 + 10).

Ce traitement génère une aplasie de 4 à 5 semaines durant laquelle les problèmes infectieux, et plus rarement hémorragiques, dominent la mortalité.

En cas de persistance de blastes après 4 à 5 semaines, une seconde cure, dite de rattrapage, est délivrée, comportant généralement une anthracycline différente, voire une dose de cytarabine augmentée.

La rémission complète est définie par un taux de blastes médullaires inférieur à 5 % et la reconstitution de 1·109 neutrophiles/L et 100·109 plaquettes/L.

Elle est associée à l’amélioration de l’état général, la diminution du risque infectieux et la sortie du patient.

Le taux de rémissions complètes, obtenues dans la majorité des cas en 1 mois, est de 50 %, il varie cependant de 30 à 90 % selon les facteurs pronostiques.

Les échecs d’induction se repartissent en décès d’origine toxique (20 %) principalement de cause infectieuse, et résistances leucémiques (30 %).

De nombreuses variantes de chimiothérapie, dans l’objectif d’améliorer le taux de RC et de diminuer le risque de rechute ultérieure des patients, ont été testées dans le cadre d’essais randomisés, principalement chez les sujets jeunes.

Elles appellent un certain nombre de commentaires.

– De nombreux groupes coopératifs associent au régime standard une troisième drogue synergique, historiquement la 6-thioguanine (6 TG) plus récemment l’étoposide.

Son ajout en induction (A : cytarabine, D : daunorubicine et E : étoposide = ADE) a permis une amélioration de la durée de réponse et de survie dans les essais du groupe australien à l’origine de sa diffusion.

Cette association est maintenant adoptée dans de multiples essais prospectifs.

Son impact est en revanche moins net dans un régime de double induction (thioguanine, cytarabine, daunorubicine [TAD]/TAD contre ADE/ADE).

– La comparaison de la daunorubicine avec d’autres agents intercalants comme la mitoxanthrone, ou surtout une nouvelle anthracycline, l’idarubicine, dont les demi-vies prolongées peuvent être un atout pour vaincre les résistances leucémiques, a été la grande question des années 1980.

La majorité des études réalisées réunies dans une méta-analyse sont en faveur de l’idarubicine pour l’obtention du taux de RC, voire de survies sans rechute.

Cependant, il existe une grande hétérogénéité des doses d’anthracyclines utilisées avec un fréquent sous-dosage de daunorubicine.

L’essai AML10 de l’Organisation européenne de recherche sur le traitement du cancer (OERTC) le plus récent a en revanche randomisé des doses équivalentes de daunorubicine, idarubicine et mitoxanthrone chez plus de 2 000 patients, sans observer de différence selon l’agent intercalant utilisé, en termes de taux de rémission ou de devenir.

On peut penser que les études historiques ont rapporté une efficacité meilleure de l’idarubicine parce que cette drogue était donnée à une dose supérieure au bras contrôle.

Cela rappelle l’importance de l’effet-dose de la chimiothérapie dans le traitement des LAM pour les anthracyclines mais surtout pour la cytarabine.

– L’augmentation de la dose-intensité délivrée à l’induction peut être réalisée par l’augmentation des doses de cytarabine pour une dose totale de 6 à 24 g par cure contre 1 à 2 g conventionnellement, mais aussi par la répétition systématique d’une seconde cure d’induction précoce (j15-j21) soit identique, soit avec de hautes doses de cytarabine (double induction).

Les études testant l’apport des hautes doses de cytarabine (HDAC) à l’induction ont montré une faible influence sur le taux de RC en partie en raison d’une augmentation du taux de décès d’origine toxique mais une amélioration de la survie sans rechute.

Ces données sont confortées par les bénéfices d’une double induction affichant à la fois les scores les plus élevés de RC (80 %) et semblant permettre de gommer les facteurs pronostiques défavorables chez les patients de moins de 60 ans.

Il est probable que l’indication et les modalités (dose de cytarabine, date de seconde cure) de la double induction, systématique ou mesurée selon les facteurs pronostiques, sera l’une des questions majeures de la décennie à venir.

2- Traitement symptomatique :

Le risque élevé de décès durant l’induction justifie un traitement de support symptomatique rigoureux des manifestation d’urgence du diagnostic (CIVD, insuffisance rénale, détresse respiratoire) et de l’aplasie prolongée.

La mortalité en aplasie a significativement diminuée depuis les 20 dernières années en raison d’une meilleure prise en charge du risque hémorragique et surtout des infections bactériennes.

La prévention des infections chez le patient leucémique reste décevante.

Si l’isolement en flux laminaire paraît le meilleur moyen de prévention du risque d’aspergillose disséminée, il n’existe pas de recommandations formelles pour les autres mesures de prophylaxie (cotrimoxazole, quinolones, fluconazole).

La prise en charge de la fièvre repose alors sur la prescription empirique rapide d’une antibiothérapie bactéricide couvrant le spectre des bactéries à Gram négatif et du streptocoque, adaptée, le cas échéant, à un portage déjà identifié chez le patient.

La persistance de la fièvre ou sa récidive fait élargir également de manière empirique le spectre thérapeutique contre les infections fungiques et le staphylocoque.

Les facteurs de croissance granulocytaires (G et granulocyte macrophage-colony stimulating factor [GM-CSF]) sont des glycoprotéines qui stimulent la prolifération et la différenciation des progéniteurs hématopoïétiques neutrophiles.

Leur administration après chimiothérapie, dans le cadre des lymphomes et des tumeurs solides, permet une diminution du risque de neutropénie fébrile, ce qui a conduit à leur utilisation massive.

Malgré la présence de récepteurs fonctionnels pour ces facteurs sur les blastes myéloïdes, leur utilisation chez les patients atteints de LAM n’a pas été associée à une croissance leucémique ou à une augmentation du risque de rechute.

Le bénéfice de leur administration, testé massivement chez les sujets âgés après la cure d’induction, s’est révélé essentiellement économique, en permettant la diminution de la durée de neutropénie rarement d’hospitalisation de 2 à 5 jours, sans affecter ni le taux de décès d’origine toxique, ni le taux de RC.

Les facteurs de croissance plaquettaire ne modifient ni la durée de la thrombopénie ni la consommation de concentrés plaquettaires et n’ont pas trouvé leur place en support d’induction.

B - TRAITEMENTS DE POSTRÉMISSION :

La rechute est quasi inéluctable en l’absence de traitements de postrémission, ce qui traduit la persistance d’une maladie résiduelle à l’issue de l’induction.

Après une première consolidation utilisant les drogues de la cure d’induction à dose identique ou réduite, ces traitements de postrémission comprennent soit une greffe de cellules souches allogéniques précoce, classiquement pour les patients les plus jeunes (moins de 50 ans) qui possèdent un donneur familial human leucocyte antigen (HLA) identique, soit plusieurs cures de chimiothérapie incluant au moins une cure de haute dose de cytarabine, soit une greffe de cellules souches autologues, soit encore la combinaison de ces dernières jusqu’à 60-65 ans, la thérapeutique idéale des patients les plus âgés restant à optimiser.

1- Chimiothérapie : place des hautes doses de cytarabine

La chimiothérapie classique de consolidation comportait historiquement des réinductions mensuelles ou bimensuelles à doses réduites d’anthracycline et de cytarabine pendant 1 à 2 ans, associées à un traitement d’entretien oral par mercaptopurine et méthotrexate.

Compte tenu des propriétés pharmacologiques de la cytarabine, il était logique de tester l’impact de hautes doses de cytarabine sur le taux de récidive leucémique.

Les essais randomisés de phase III des années 1990-1995 ont établi la supériorité de une à trois cures de cytarabine à hautes doses (12- 36 g/m²/cure) seule ou en association avec un agent intercalant comparée à des doses faibles (0,2 g/m²), conventionnelles (0,5 g/m²) ou intermédiaires (2 g/m²).

Avec des doses élevées, il est possible d’obtenir régulièrement un taux de survies sans rechute de 30-40 % à 5 ans contre 20 % pour les bras témoins.

La réduction des doses de cytarabine de 36 à 12-18 g permet de diminuer la mortalité d’origine toxique (de 20 à 5 %) et la toxicité neurologique cérébelleuse (de 30 à 5 %).

Le bénéfice de l’administration de G-CSF après la cure de consolidation est plus net qu’en induction, avec une réduction non seulement de la durée de neutropénie de 5 jours, mais aussi de l’incidence des infections documentées, des durées d’hospitalisation et de la consommation de thérapeutiques antimicrobiennes.

Ce bénéfice s’observe aussi bien lors de cures successives d’intensité standard que dans des régimes intensifs.

Si la répétition des cures de consolidation intensives semble effectivement particulièrement bénéfique, elle n’est pas toujours applicable, seulement la moitié des patients ayant reçu au moins trois cures dans l’étude de doses croissantes de cytarabine.

Cela invite à combiner l’administration de hautes doses de cytarabine à d’autres modes de consolidation.

L’attitude classique est de proposer des réinductions pendant 1 à 2 ans, mais la tendance actuelle est plutôt d’essayer de proposer une nouvelle consolidation intensive suivie d’autogreffe.

2- Autogreffe de cellules souches hématopoïétiques :

* Autogreffe de moelle osseuse :

La réinjection de cellules souches hématopoïétiques autologues dite autogreffe issues d’un prélèvement de moelle osseuse sous anesthésie générale, après un traitement appelé aussi conditionnement myéloablatif, permet une reconstitution hématologique complète en 4 à 5 semaines.

La réversion de la toxicité hématologique permet une augmentation d’un facteur de 3 à 10 des doses de chimiothérapie tolérables, les toxicités limitantes étant donc essentiellement extrahématologiques.

Les alkylants n’ont pas d’indication en traitement d’induction, en revanche, ils sont retenus dans le traitement de consolidation.

Leur activité antileucémique dans la LAM est établie essentiellement dans des régimes de hautes doses, responsables d’aplasies très prolongées, voire définitives et nécessitant donc idéalement un support de cellules souches hématopoïétiques (CSH). Pour exemple, le melphalan à 140 mg/m², associé à la réinjection de CSH autologues prélevées en première rémission, offre 30 % de seconde rémission.

Les alkylants (busulfan [Bu], cyclophosphamide [Cy], melphalan [Me]), et l’irradiation corporelle totale (ICT) de 12 Gy sont les agents de choix du conditionnement de greffe en raison de leur index thérapeutique étendu.

Des conditionnements myéloablatifs similaires (cyclophosphamide ou melphalan associé au busulfan ou à l’ICT (Bu-Mel, Bu-Cy, Mel-ICT, Cy-ICT) sont utilisés avant autogreffe ou greffe allogénique, ce qui a permis, dans une certaine mesure, de comparer l’impact de l’origine des greffons sur la survie.

Les essais pilotes des années 1980 ont montré la faisabilité d’une autogreffe de moelle osseuse chez 50 % des patients de moins de 60 ans atteints de LAM en première RC, avec une mortalité d’origine toxique de 10 %, un risque de rechute de 40 à 60 % conduisant à une survie sans rechute de 30 à 50 % dans des essais non contrôlés.

Malgré la documentation, par des études de marquage, de la contamination des greffons par des progéniteurs leucémiques pouvant être à l’origine de la rechute, la purge chimique in vitro du greffon (par le 4-hydroxycyclophosphamide notamment) reste peu appliquée du fait de la lenteur de reconstitution hématologique, d’un taux de décès de 15 % et de l’absence d’essais contrôlés.

Selon l’analyse du registre européen, son utilisation semble cependant associée à une diminution du risque de rechute.

Cinq essais randomisés initiés dans les années 1985-1995 ont comparé une autogreffe de moelle osseuse prélevée après 1 à 2 mois de rémission à des chimiothérapies d’intensité variable.

Ces études sont à la base de l’établissement des facteurs pronostiques et de la réflexion stratégique des années 2000.

Ces différents programmes ont une faisabilité très variable, avec 35 à 70 % de patients en rémission effectivement randomisés et 55 à 90 % des patients recevant l’autogreffe allouée.

Les raisons majeures de non-randomisation ou de non-réalisation de l’autogreffe de moelle sont représentées de manière égale par :

– les toxicités hématologiques et extrahématologiques après consolidation, faisant refuser la poursuite de régime intensif ;

– les rechutes précoces ;

– la qualité médiocre des greffons médullaires.

L’analyse en intention de traitement rapporte régulièrement une diminution du taux de rechutes dans le groupe autogreffe, cet avantage étant partiellement atténué par un excès de mortalité ; cela conduit aux conclusions suivantes :

– une autogreffe de moelle précoce, purgée par le 4-hydroxycyclophosphamide, donne sensiblement les mêmes chances de survie sans rechute (35 % à 4 ans) qu’une seule intensification par de hautes doses de cytarabine ;

– une autogreffe de moelle tardive après plusieurs consolidations améliore la survie sans rechute quels que soient les facteurs pronostiques des patients (50 % avec autogreffe, 40 % sans autogreffe) ;

– la comparaison autogreffe de moelle versus chimiothérapie reste imparfaite, compte tenu de l’hétérogénéité des régimes.

Cependant, la plus vaste étude testant l’autogreffe contre un entretien à doses intermédiaires de cytarabine montre un avantage pour l’autogreffe en termes de survie sans rechute (48 % avec autogreffe, 30 % avec chimiothérapie).

On peut donc globalement supposer que ces deux techniques de consolidation ne doivent pas être opposées et que l’impact marginal de l’autogreffe puisse encore bénéficier des progrès récents de thérapie cellulaire.

* Autogreffe de cellules souches périphériques :

Effectivement, la faisabilité médiocre de l’autogreffe de moelle, ainsi que la morbidité et la mortalité associées à l’aplasie de longue durée ont conduit à la recherche de l’amélioration de la qualité des greffons autologues.

Les facteurs de croissance granulocytaire (GM, G-CSF) disponibles depuis 1990, maintenant recommandés après les cures de consolidation, permettent par ailleurs une démargination des progéniteurs ou cellules souches hématopoïétiques de la moelle vers le sang périphérique.

Ils autorisent, 3 à 4 semaines après de hautes doses de cytarabine, la collecte de cellules souches hématopoïétiques dites périphériques (CSP) par cytaphérèses répétées 2 à 4 jours consécutifs.

Cette technique conduit à une augmentation de la quantité de cellules souches injectées et permet une reconstitution neutrophile et surtout plaquettaire plus rapide (j15-j20 après CSP contre j30-j40 postgreffe de moelle).

Cela se traduit par une hospitalisation de durée réduite, à moindre coût, et surtout par une diminution de la mortalité de l’autogreffe à moins de 5 % en première ligne.

Ces avantages ont induit le remplacement complet, depuis 1995, des greffons autologues médullaires par des CSP. Malgré l’absence d’essais contrôlés.

Il ne semble pas que le risque de récidive soit influencé par l’origine médullaire ou périphérique des greffons.

En revanche, il semble que l’on assiste à l’amélioration de l’accès à l’autogreffe : 70 à 80 % des patients atteints de LAM en première RC possédant un greffon de CSP satisfaisant.

3- Greffe allogénique (allogreffe) de cellules souches hématopoïétiques :

* Greffe allogénique géno-identique :

La greffe de moelle osseuse allogénique développée à la fin des années 1970, avant l’ère des hautes doses de cytarabine, s’adresse classiquement aux patients de moins de 50 ans possédant un donneur de la fratrie de groupe HLA (complexe majeur d’histocompatibilité [MHC]) identique (géno-identique), c’est-à-dire 10 % seulement de l’ensemble des patients.

L’allogreffe réalisée rapidement après l’obtention de la première rémission confère à cette population ultrasélectionnée 50 à 60 % de chances de guérison appréciées par la survie sans rechute à 10-15 ans.

Ce puissant effet antileucémique est associé, en partie, au conditionnement myéloablatif, mais surtout à l’effet graft versus leukemia (GVL) responsable du plus faible taux de rechutes (20 à 30 %) de toutes les stratégies thérapeutiques.

Cet effet GVL a pour agent les lymphocytes T allogéniques du greffon, activés par les différences entre donneur et receveur des antigènes mineurs d’histocompatibilité (mhc).

Il est de fait associé à une réaction indésirable appelée maladie du greffon contre l’hôte (graft versus host disease [GVHD]).

Une GVHD aiguë puis chronique est observée chez 40 % des patients, et elle est responsable de 20 à 30 % de mortalité jusqu’à 2 ans après la greffe.

Toutes les techniques diminuant efficacement l’incidence de la GVH par déplétion du greffon en lymphocytes T (T déplétion) sont restées associées à une augmentation du taux de rechutes sauf au prix d’un alourdissement du conditionnement.

À l’inverse, une nouvelle injection de lymphocytes du donneur permet, en cas de rechute, d’obtenir une nouvelle rémission dans 30 % des cas.

Quatre études clôturées en 1995, ont rapporté le devenir de patients adultes en première rémission possédant un donneur familial, comparé au devenir des patients de même âge sans donneur recevant chimiothérapie ou autogreffe de consolidation.

Sachant que la plupart des patients possédant un donneur reçoivent effectivement une greffe allogénique précoce (HLA identique, moelle osseuse non T déplétée) alors que seulement 50 % des patients reçoivent un traitement de consolidation de type chimiothérapie ou autogreffe, les conclusions sont les suivantes :

– la mortalité d’origine toxique de la greffe allogénique classique intrafamiliale conditionnement myéloablatif, moelle osseuse non T déplétée est au moins deux fois plus élevée que celle des autres traitements de consolidation ;

– le taux de rechute est significativement plus faible après des greffes allogéniques sauf dans une seule étude ;

– cela peut conduire à un avantage de survie sans rechute, mais rarement à un avantage de survie.

Après l’enthousiasme des années 1980, on doit donc maintenant discuter les indications de consolidation à la lumière de la connaissance des facteurs pronostiques et de tolérance.

De manière consensuelle, on retient l’indication de greffe allogénique en première ligne pour les patients dont le risque de rechute attendue sous chimiothérapie est supérieur à 40-50 % et chez les enfants qui présentent une mortalité consécutive à la greffe inférieure à celle des adultes.

Par ailleurs, les acquisitions technologiques des dernières années ont permis comme pour l’autogreffe de montrer l’avantage du greffon de CSP prélevé par cytaphérèse après stimulation du donneur par G-CSF, comparé à un greffon de moelle osseuse (MO), en termes de cinétique de reconstitution hématologique.

Il semble exister en revanche un risque plus élevé de développer une GVH chronique, probablement en raison d’un nombre de lymphocytes cent fois plus important dans un greffon de cellules souches périphériques que dans un greffon médullaire.

* Greffe allogénique phéno-identique :

Les chances de trouver un donneur HLA identique dans la fratrie n’étant que de 25 %, il a été constitué ces dix dernières années un fichier mondial de donneurs volontaires, auquel s’est joint récemment une banque de cellules souches de sang de cordon ombilical.

La qualité du typage HLA moléculaire a permis ces dernières années une meilleure sélection des donneurs et identifie un donneur potentiel dans 50 % des cas.

Ces greffes phénoidentiques gardent une excellente activité antileucémique avec un taux de rechutes comparable aux greffes géno-identiques, mais sont associées à une mortalité d’origine toxique de 30-50 % principalement en raison d’une incidence de GVH de l’ordre de 80 %.

Leur indication en première ligne est donc pour l’instant rare (cf Facteurs pronostiques).

C - DEVENIR :

Deux tiers des patients ayant obtenu une première rémission présentent une rechute dans un délai de 12 mois, moins de 20 % de rechutes survenant plus de 2 ans après auto- ou allogreffe.

Pour la plupart d’entre eux, la prise en charge de la rechute rarement offerte après 60 ans n’offre aucune chance de guérison ; la survie médiane est de 6 mois, ce qui justifie la place de protocoles expérimentaux.

Classiquement, le nouveau traitement d’induction consiste en l’administration de combinaisons discrètement différentes du traitement de première ligne par exemple mitoxantrone associée à l’étoposide et à de hautes doses de cytarabine (EMA), ou l’association à la fludarabine (FLAG).

Les chances de nouvelle rémission après ce type de combinaison reposent sur la durée de première rémission, ainsi que sur la difficulté à l’obtenir.

Elles varient même de moins de 20 % pour les patients en échec après l’induction ou dont la première RC était de moins de 1 an de 40 à 70 % selon que les durées de première RC sont supérieures à 1 ou 2 ans.

Parmi les nouveaux agents cytotoxiques, le topotécan, inhibiteur de topo-isomérase de type 1 offrant 30 à 50 % de nouvelle réponse, seul ou en combinaison, est actuellement testé ; en association à la cytarabine, il est actuellement comparé à une induction standard pour le traitement de première ligne des leucémies secondaires.

Certains auteurs ont tenté de sensibiliser les cellules leucémiques aux agents cytologiques cycle-dépendants, tels que la cytarabine, en utilisant des facteurs de croissance comme le GM-CSF pour faire entrer ces cellules dans le cycle cellulaire de réplication.

Ces tentatives n’ont pas permis de modifier les scores de rémission ou de survie.

L’expression de la résistance aux anthracyclines et à l’étoposide, dépendant du gène multidrug resistance (MDR1), est présente chez 50 % des patients en rechute.

Le produit du gène est une P-glycoprotéine (PGP) assurant l’efflux actif des drogues.

Des modulateurs, comme la ciclosporine A (CSA) et son dérivé le PSC 833, sont capables d’empêcher l’efflux de ces drogues hors de la cellule leucémique.

Cependant, ces deux modulateurs diminuent également la clairance de l’étoposide et des anthracyclines et nécessitent la réduction des posologie de 30 %, sous peine de toxicité extrahématologique (hépatique, muqueuse) excessive.

Des essais de phase III ont établi le bénéfice de l’administration de la CSA sur le taux de réponses et de survies des patients à expression élevée de PGP.

Néanmoins, ces scores restent très médiocres, suggérant l’existence d’autres mécanismes de résistance non contrôlés par les modulateurs disponibles, et justifient la recherche d’autres stratégies.

Le traitement de consolidation en seconde RC reste difficile, car actuellement les patients qui rechutent ont en principe été traités de manière optimale en première ligne.

L’analyse des études non contrôlées des années 1990 permet de retenir que :

– la survie sans rechute de patients ne recevant ni autogreffe ni allogreffe est inférieure à 10 % ;

– la mortalité d’origine toxique après autogreffe (20 %) est inférieure à la mortalité observée après greffe allogénique standard

– HLA identique intrafamiliale (40 %) et après greffe utilisant des donneurs alternatifs (50 %) ;

– le taux de rechutes après greffe allogénique (40 %) est inférieur à celui observé après autogreffe (60 %) ;

– le taux de survie sans rechute est pour l’instant plus élevé après greffe allogénique standard (30 à 40 %) qu’après autogreffe ou greffe allogénique à partir de donneurs alternatifs (20 %).

Facteurs pronostiques :

Les facteurs pronostiques de survie regroupent les facteurs de décès précoces (inférieurs à 4-6 semaines) et les facteurs de résistance leucémique (non-rémission, rechute) qui, en dehors de l’âge, diffèrent les uns des autres.

A - FACTEURS DE RISQUE DE DÉCÈS PRÉCOCE :

Le principal risque de mortalité durant le premier mois est lié à la toxicité du traitement par infection et plus rarement par hémorragie.

Les facteurs de risque de décès au décours de la cure d’induction sont l’âge, le statut de performance, le taux de neutrophiles, de fibrine, d’albumine, de bilirubine et les hyperleucocytoses majeures.

Ils reflètent à la fois le retentissement des complications associées à la leucémie sur les fonctions vitales de l’hôte et une mauvaise tolérance à l’induction aplasiante.

Ils peuvent, d’une part, faire décider d’une prise en charge spécifique des patients, par exemple en soins intensifs et, d’autre part, faire exclure des inductions classiques les patients cumulant les facteurs les plus défavorables, patients pour lesquels la mortalité précoce prévisible est supérieure à 30 % (par exemple âge de plus de 75 ans, altération importante de l’indice de performance, comorbidité cardiorespiratoire).

B - FACTEURS DE RISQUE DE RÉSISTANCE :

1- Nature des facteurs de risque :

L’absence de rémissions (patient réfractaire) et la rechute représentent les causes majeures de décès des patients leucémiques.

Ces facteurs de risque incluent classiquement l’âge, les antécédents d’anomalies hématologiques ou de radiochimiothérapie et, à un moindre degré, le phénotype MDR, l’hyperleucocytose, la classification FAB (French American British).

L’impact de ces différents facteurs est désormais dominé par celui des anomalies cytogénétiques et moléculaires.

– L’âge est le facteur pronostique le plus important pour le résultat du traitement d’induction.

Les taux de RC observés après des chimiothérapies comparables dans de grandes séries, chez les enfants, les adultes jeunes (30-50 ans) et les sujets âgés (plus de 60 ans) sont respectivement de 80 %, 60-70 % et moins de 50 %.

L’impact sur la survie à long terme est plus délicat à analyser compte tenu de programmes de consolidation souvent différents, mais, là encore, la survie sans rechute à 5 ans chez les enfants, les adultes jeunes et les patients âgés est de 50 %, 30-40 % et moins de 20 %.

Cet impact négatif de l’âge avancé est en majeure partie expliqué par l’augmentation des autres facteurs péjoratifs comme les leucémies secondaires et les caryotypes de pronostics défavorables.

– Les antécédents d’anomalies hématologiques ou de traitement de radiochimiothérapie pour cancer sont régulièrement si défavorables avec un taux de rémissions inférieur à 50 % et une survie à 5 ans historiquement inférieure à 20 %, que ces patients sont le plus souvent exclus de l’analyse de résultats des protocoles thérapeutiques leucémiques (cf Leucémies secondaires).

Ce pronostic est en majeure partie lié au caryotype et au phénotype MDR.

– Le phénotype MDR (résistance multiple aux drogues décrit la capacité des cellules leucémiques à refouler les drogues cytotoxiques.

Cet efflux est associé à l’expression de différentes protéines membranaires dont la P glycoprotéine codée par le gène MDR1 et participe directement et indépendamment à la résistance leucémique.

– L’hyperleucocytose supérieure à 30-50·109/L reste un facteur d’échec thérapeutique influant sur le taux de rémissions, mais aussi sur le taux de rechutes. Cette hyperleucocytose est plutôt associée aux leucémies à contingent monocytaire (LAM 4, 5).

– La classification FAB identifie effectivement, dès le diagnostic, des formes à pronostic favorable comme les LAM 3 ou leucémies promyélocytaires (LAP), les LAM 4 à différenciation éosinophile (M4 eo) dont 90 % sont associées à un caryotype favorable, les LAM 1 et les LAM 2 dont 30 % sont associées à un caryotype favorable à l’opposé des LAM 0, 4, 5, 6 ou 7 plus fréquemment associées à des caryotypes défavorables.

– Données génétiques et moléculaires.

Depuis les années 1990, la généralisation de l’analyse cytogénétique et maintenant moléculaire des blastes leucémiques a pu établir le caryotype comme facteur pronostique prépondérant pour la résistance leucémique et la survie.

Les anomalies récurrentes se repartissent globalement en deux groupes principaux : translocations (t) équilibrées affectant des facteurs de transcription majeurs pour l’hématopoïèse normale, plutôt observés chez les patients les plus jeunes, au devenir favorable, et perte de matériel chromosomique, dont la pathogénie reste non élucidée, plutôt chez les patients âgés au devenir défavorable.

Plusieurs des études thérapeutiques déjà citées ont analysé l’impact du caryotype sur des groupes de patients recevant des traitement similaires et validé régulièrement la classification en groupes pronostiques favorable, intermédiaire et défavorable décrite.

– Enfin, à ces facteurs initiaux intrinsèques vient s’ajouter le facteur de réponse précoce au traitement d’induction.

Dans les régimes n’utilisant pas de double induction précoce systématique, un chiffre de blastes supérieur à 5 % après la cure d’induction pénalise le devenir des patients : lorsque la rémission n’est obtenue qu’après une cure de rattrapage, la survie ne dépasse pas 20 %.

De la même manière, la lenteur de reconstitution hématologique après la cure d’induction traduit, elle aussi, une résistance leucémique et est associée à un taux de récidives plus élevé.

2- Implications thérapeutiques :

Toute la réflexion thérapeutique actuelle vise à essayer de gommer par les différentes stratégies disponibles ces facteurs pronostiques et de proposer des stratégies adaptées « à la carte » minimisant la toxicité chez les patients à moindre risque et considérant au contraire toutes les thérapeutiques innovantes pour les patients à haut risque.

* Patients au caryotype favorable :

Chez ces patients rapidement mis en rémission, l’allogreffe en première rémission a été abandonnée car elle était trop toxique.

Quel que soit l’âge et les antécédents, une guérison peut être obtenue dans 50 à 80 % des cas : par des régimes contenant de la cytarabine à hautes doses pour les « core binding factor leukemia » avec t (8, 21), inv 16 et surtout par de l’acide tout transrétinoïque dans les LAM 3.

* Patients au caryotype défavorable :

Chez ces patients tout comme chez ceux qui ne sont pas mis en rémission en une cure, il est nécessaire d’envisager, pour les plus jeunes, une induction renforcée, la tentative de modulation des résistances, un traitement de consolidation avec greffe allogénique nécessitant éventuellement la recherche de donneurs alternatifs.

En effet, dans les situations les plus péjoratives, la greffe allogénique offre deux fois plus de chances de survie qu’un programme de chimiothérapie ou d’autogreffe.

* Patients au caryotype intermédiaire :

Pour ces situations, le consensus est moins clair, la diminution du risque de rechute étant à balancer avec l’excès de décès toxique.

Cependant, la greffe allogénique n’étant jamais associée à une perte de chance, de nombreux groupes coopératifs recommandent l’allogreffe en première rémission.

Formes cliniques :

A - LEUCÉMIE AIGUË PROMYÉLOCYTAIRE :

La leucémie aiguë promyélocytaire représente seulement 5 % des LAM, mais elle est tout à fait singulière par ses mécanismes d’oncogenèse parfaitement identifiés et par son pronostic très favorable.

Elle est caractérisée au diagnostic par l’existence d’un syndrome de CIVD sévère représentant la principale cause de mortalité précoce.

La LAP est définie désormais par la translocation avec fusion d’une partie du récepteur alpha de l’acide rétinoïque (RAR) et d’une partie du gène PML, responsable de la leucémogenèse.

L’acide tout-transrétinoïque (ATRA), disponible depuis 1990, permet de surmonter le blocage des échanges entre corépresseurs et coactivateurs de RAR causé par la fusion avec le gène PML, corrige l’arrêt de différenciation et d’apoptose et permet d’obtenir, à lui seul sans chimiothérapie, 80 % de RC et une rapide correction de la CIVD.

Cependant, tous les patients rechutent rapidement du fait de l’acquisition de résistances.

Par ailleurs, son administration est liée dans 25 % des cas à un « syndrome ATRA » évoquant un syndrome de fuite capillaire survenant en médiane après 10 jours et associant dyspnée, fièvre, prise de poids, épanchements, insuffisance rénale.

Fatal chez 25 % des patients, il répond cependant favorablement aux stéroïdes et à la chimiothérapie.

Ces données résistance rapide à l’ATRA, réponse de « syndrome ATRA » à la chimiothérapie ont conduit à l’association classique actuelle ATRA/anthracyline plus ou moins cytarabine, qui a bouleversé le pronostic de cette leucémie.

Tous les essais rapportent avec une grande homogénéité l’absence de résistance primaire, un taux de rémissions de 90 %, y compris en supprimant la cytarabine de l’association classique.

La meilleure combinaison de postrémission reste l’objet de débats.

Selon les études disposant du plus long suivi, elle semble reposer, après une consolidation standard, sur un traitement d’entretien de 1 à 2 ans, de faible toxicité, associant de façon séquentielle ATRA et polychimiothérapie.

Ce régime peu toxique est associé à moins de 10 % de rechutes et à 75 % de survie à 4 ans.

La place de la cytarabine à hautes doses semble ici peu claire.

Cependant, son administration dans le cadre d’une double induction offre le plus haut score de rémission moléculaire.

Parmi les facteurs pronostiques initiaux pour la survie, on retrouve l’hyperleucocytose supérieure à 5·109/L et la thrombopénie inférieure à 40-50·109/L.

Par ailleurs, l’absence de rémission moléculaire médullaire, 3 mois après le diagnostic, ou surtout une nouvelle positivité en polymerase chain reaction (PCR) vérifiée à 1 mois d’intervalle, sont annonciatrices de rechute.

En situation de rechute, la LAP reste une exception car à l’opposé des autres LAM, on peut attendre 90 % de nouvelle rémission et une survie de 70 % à 3 ans y compris sans greffe allogénique.

B - ENFANTS :

Les enfants (moins de 15, 20 ans) présentent quatre fois moins de LAM que de LA lymphoblastiques (LAL).

Leur devenir est meilleur que celui des adultes du fait à la fois de facteurs pronostiques intrinsèques plus favorables (quasi-absence de leucémies secondaires, expression faible de MDR1) et d’une meilleure tolérance aux régimes les plus intensifs.

Toutefois, le taux de guérison n’est que de 50 %, contre 70 % pour les LAL.

Les facteurs pronostiques sont superposables à ceux de l’adulte.

Les différentes acquisitions thérapeutiques de la dernière décennie ont imposé plusieurs standards concernant :

– une induction renforcée par l’étoposide et/ou une seconde induction précoce conduisant à des taux de RC homogène de 70-80 %, avec une augmentation des chances de survie sans rechute à long terme de 50 % pour les patients recevant une double induction contre 40 % pour le bras contrôle ;

– en termes de consolidation, l’administration d’au moins deux cures de hautes doses de cytarabine offre probablement les mêmes chances de survie qu’une autogreffe.

Bien que le taux de récidives semble régulièrement plus faible chez les patients recevant une autogreffe et que la mortalité soit maintenant inférieure à 5 %, la morbidité des régimes myéloablatifs chez l’enfant stérilité, retard de puberté, troubles de la croissance, troubles endocriniens, difficultés cognitives, second cancer les font réserver aux indications de greffe allogénique ;

– en effet, la greffe allogénique reste le traitement de référence offrant 60 à 70 % de chances de guérison.

Les risques de cataracte, de troubles de la croissance et d’hypothyroïdie ont été réduits depuis que l’irradiation corporelle totale a été remplacée par le busulfan.

Comme chez l’adulte cependant, on exclut généralement de cette stratégie les enfants en première RC avec caryotype favorable et les enfants atteints de trisomie 21 constitutionnelle, dont la survie actuelle sans greffe est de 70-90 %.

À l’inverse, la meilleure faisabilité chez l’enfant de greffes allogéniques, à partir de greffons alternatifs issus de fichier-donneur volontaire ou de sang de cordon ombilical congelé, doit faire réaliser, pour les patients au pronostic le plus défavorable, une recherche active de greffon dans les fichiers internationaux.

C - PATIENTS ÂGÉS :

La moitié des patients atteints de LAM ont plus de 60 ans et cette fréquence ne va cesser d’augmenter avec le vieillissement de la population.

Cependant, les progrès thérapeutiques réalisés n’ont pour l’instant bénéficié qu’aux patients les plus jeunes.

Les données les plus récentes montrent un taux de RC de 40-50 %, une survie médiane inférieure à 1 an et 10-15 % de patients vivants à 5 ans. La réalité est peut-être encore plus négative.

En effet, si la proportion de traitements uniquement palliatifs est de plus en plus réduite, les caractéristiques des patients analysés dans ces essais thérapeutiques à visée curative révèlent le plus souvent une sélection des patients sans comorbidité sévère, sans antécédent d’anomalie hématologique ou de cancer et donc finalement parmi les moins âgés (médiane : 65 ans).

Les essais les moins restrictifs en termes d’inclusion révèlent une incidence de 25 % de leucémies secondaires, 33 % d’anomalies cytogénétiques défavorables et 70 % d’expression de MDR1.

L’induction standard (3 + 7) s’est imposée depuis 1990 contre la cytarabine sous-cutanée durant 21 jours qui permet toutefois d’obtenir 25 % de RC avec une toxicité plus faible.

Cependant, les taux de rémissions après anthracycline/cytarabine passent de 80 à 10 % selon qu’il existe de zéro à trois facteurs péjoratifs (leucémie secondaire, cytogénétique défavorable, expression de MDR1).

Ni l’administration des CSF, ni l’augmentation des doses d’anthracyclines, ni l’ajout de nouvelles drogues comme la fludarabine n’ont modifié pour l’instant ce taux de RC.

En ce qui concerne le traitement de postrémission, la nécessité d’une « certaine » dose de traitement d’entretien pendant un « certain » temps est retenue, bien que les bénéfices restent marginaux.

Pour exemple, la réalisation des réinductions avec anthracyclines est supérieure en termes de survie sans rechute à un régime sans anthracyclines ; un traitement d’entretien par cytarabine à faible dose pendant 1 à 2 ans est supérieur à l’absence de traitement d’entretien.

La place de doses élevées de cytarabine chez les patients âgés n’est en revanche pas encore réglée.

En effet, dans l’étude initiale de Mayers testant l’impact de hautes doses de cytarabine (12 g/m²) les patients âgés ne tiraient pas de bénéfice avec 15 % de survie sans rechute, en partie en raison d’une mauvaise compliance (30 % seulement des patients randomisés recevant les hautes doses).

Une étude récente a rapporté l’absence de bénéfice de consolidations à doses intermédiaires de cytarabine (3 g/m²) en comparaison à des doses standards de cytarabine malgré une délivrance satisfaisante des cures.

L’impression générale est donc que les leucémies des sujets âgés sont différentes de celles des patients plus jeunes.

Le traitement de ces patients reste un véritable défi pour les années à venir, mais doit toujours retenir, comme pour les plus jeunes, les facteurs pronostiques pour la décision thérapeutique.

L’identification de facteurs de mortalité précoce comme l’âge supérieur à 75-80 ans ou le mauvais statut de performance, souvent lié à l’existence de comorbidités sévères, exclut légitimement les patients d’une induction classique.

Le traitement purement palliatif procure une survie médiane de 2 à 3 mois et associe des transfusions essentiellement érythrocytaires, la gestion des infections, et éventuellement une chimiothérapie à faible dose non alopéciante, sans toxicité digestive ou muqueuse (cytarabine à faible dose, 6 mercaptopurine, 6 TG, méthotrexate).

Cette prise en charge privilégie le confort du patient et nécessite, malgré son caractère non spécifique, un certain savoir-faire pour limiter les hospitalisations.

Par ailleurs, dans les années à venir, on devrait pouvoir mieux cerner la place en induction de nouvelles drogues moins toxiques comme l’idarubicine orale, qui offre 25 % de premières RC avec une durée réduite d’hospitalisation dans une population à mauvais statut de performance, et surtout les anticorps monoclonaux.

En revanche, la connaissance des facteurs prédictifs d’une résistance élevée (LAM secondaires, cytogénétique péjorative, MDR+) doit orienter les patients en bon état général vers des combinaisons investigationnelles d’induction et faire réfléchir à la faisabilité d’intensification avec greffe (cf Perspectives).

D - LEUCÉMIES SECONDAIRES :

Les leucémies secondaires (LA2) représentent 20 à 30 % des LAM.

On inclut sous ce terme les LAM succédant à une anomalie hématologique, généralement une ou plusieurs cytopénies présentes depuis plusieurs mois, traduisant une myélodysplasie ou succédant à un traitement de radiochimiothérapie pour cancer.

Ce dernier type de LA2 est associé à l’exposition à des alkylants, à des anthracyclines ou à de l’étoposide, combinaisons régulièrement utilisées à hautes doses dans le traitement des pathologies lymphoïdes, des tumeurs germinales et du cancer du sein.

Les LA secondaires aux alkylants sont fréquemment associées à une phase myélodysplasique, aux anomalies chromosomiques du 5 et du 7.

Elles surviennent plus tardivement que les LAM secondaires aux anthracyclines et à l’étoposide, celles-ci étant plutôt associées aux anomalies du chromosome 11.

Le risque cumulatif après autogreffe pour lymphome varie de 8 à 20 % à 10 ans contre 2 % après chimiothérapie pour cancer du sein, 3 à 10% après chimiothérapie des LAL de l’enfant et des maladies de Hodgkin, avec une médiane de survenue de 3 ans après traitement.

L’inclusion des LA2 dans un programme thérapeutique a longtemps été débattue, du fait d’un taux élevé de résistances, et la plupart des essais majeurs déjà discutés ici n’acceptent pas ces patients sauf l’essai anglais AML10.

L’analyse de protocoles dédiés à cette population incluant généralement à la fois des LA2 et des myélodysplasies à haut risque de transformation leucémique rapporte 40-50 % de taux de premières RC, une survie de 15 % à 4 ans avec des programmes de chimiothérapie à dose conventionnelle.

Une amélioration des taux de RC et plus modérément de la durée de rémissions a été démontrée avec l’association d’agents capables comme la quinine d’abolir les effets de la résistance aux anthracyclines médiée par le phénotype mdr.

Chez les patients atteints de myélodysplasie avec expression élevée de la PGP, le taux de résistance primaire attendu est de 50 %.

Les autres modulateurs de MDR disponibles n’ont en revanche pas fait la preuve de leur activité dans cette population de patients.

Par ailleurs, la faisabilité de l’autogreffe et de la greffe allogénique dans cette population, plutôt plus fragile et plus âgée que la population de LAM de novo, est démontrée.

La mortalité d’origine toxique est respectivement de 10 et 40 % et la survie sans rechute à 4 ans est de 30 %, ce qui est encourageant.

Enfin, après ajustement des facteurs pronostiques cytogénétiques, le devenir de ces patients est superposable à celui des LAM de novo et justifie donc leur prise en charge systématique de manière adaptée au risque.

Pour exemple, les rares patients atteints de LAM secondaires avec anomalies cytogénétiques favorables [(t(15, 17), t(8, 21), inv 16)] bénéficient de la même manière que les LAM de novo de protocoles sans greffe allogénique en première ligne.

Perspectives :

A - PERSPECTIVES DIAGNOSTIQUES :

Tout récemment, l’analyse par PCR a pu établir les duplications internes en tandem du ligand de Flt3 (à récepteur tyrosine kinase) Flt3/ITDs comme l’anomalie somatique la plus fréquente des LAM (20 à 25 %) indépendante de l’âge, de la catégorie de FAB, et du caryotype.

Dans la série de 800 patients de moins de 60 ans analysée par le groupe anglais Medial Research Council (MRC), sa présence affecte défavorablement le taux de rechutes et la survie.

Ce facteur devrait permettre de choisir plus efficacement les stratégies thérapeutiques des patients à caryotype dit de « risque standard » puisque le taux de récidives à 5 ans double en cas de présence de l’anomalie.

Par ailleurs, l’analyse de la qualité de la rémission a bénéficié de l’identification d’antigènes membranaires aberrants des cellules leucémiques.

Classiquement, les critères cytologiques de rémission étaient purement morphologiques.

La persistance de cellules exprimant un phénotype aberrant 2 à 4 semaines après l’induction, malgré l’absence de blastes morphologiquement identifiables, est associée à un risque élevé de récidive rapide et devrait aider au choix d’inductions et de consolidations renforcées.

B - NOUVEAUX AGENTS THÉRAPEUTIQUES NON CYTOTOXIQUES :

L’identification de processus biologiques impliqués dans la transformation maligne cellulaire ont permis la génération d’une nouvelle vague d’agents anticancéreux ciblés sur ces mécanismes.

Les agents d’hypométhylation, les inhibiteurs des histones désacétylases, sont capables de lutter contre l’hyperméthylation utilisée par les cellules leucémiques pour inactiver les gènes suppresseurs de tumeur, mais gardent une toxicité hématologique.

L’acide tout-transrétinoïque dans la LAP, l’imatimib (Glivect) inhibiteur de la transduction du signal actif au bcr-abl dans la leucémie myéloïde chronique sont les premiers exemples convaincants d’une puissante activité antileucémique sans aplasie secondaire.

Le trioxyde d’arsenic possède une action différenciante établie pour la LAP, donnant lieu à 90 % de RC en première et seconde ligne et va être testé également dans les autres LAM et dans les myélodysplasies parmi d’autres agents capables de remodeler la chromatine.

Les inhibiteurs de farnésyl transférase (FTI) permettent d’inhiber l’activation de l’oncoprotéine ras.

Les inhibiteurs de flt3 permettent l’inhibition de la phosphorylation du récepteur dont la mutation génère l’activation pathogène.

Enfin, l’identification comme facteur péjoratif du taux sérique élevé de vascular endothelial growth factor (VEGF) fait proposer de tester des inhibiteurs de l’angiogenèse dont le chef de file est le thalidomide.

C - IMMUNOTHÉRAPIE :

1- Anticorps monoclonaux :

L’immunothérapie passive par les anticorps monoclonaux dirigés contre les antigènes de surface des cellules tumorales est une des voies les plus efficacement développées récemment dans les hémopathies lymphoïdes et le cancer du sein.

Près de 80 % des LAM expriment l’antigène CD33, absent des cellules souches hématopoïétiques normales les plus immatures et des tissus non hématopoïétiques.

L’administration, à 15 jours d’intervalle, de deux doses de gemtuzumab, un anticorps anti-CD33 humanisé couplé à la calichéamycine (agent intercalant), a permis d’obtenir, en monothérapie, 30 % de secondes rémissions (dont la moitié cependant avec une reconstitution plaquettaire incomplète) chez des patients atteints de LAM de novo, sans influence de l’âge ni de la durée de première rémission.

Les effets secondaires immédiats classiques du conflit antigène-anticorps après perfusion de gemtuzumab associent frissons et fièvre, rarement sévères, chez 60 % des patients et, dans moins de 10 %, des cas d’hypotension ou de dyspnée.

Une aplasie profonde de 4 à 6 semaines, attendue du fait de l’expression de CD33 sur les progéniteurs hématopoïétiques engagés, est également observée, conduisant à une durée moyenne d’hospitalisation de 3 à 4 semaines.

La seule toxicité notable est hépatique, se manifestant par une cytolyse transitoire, mais aussi 5 à 10 % de maladies veino-occlusives.

En revanche, la toxicité extrahématologique muqueuse est très limitée, la toxicité cardiaque, rénale, cérébrale complètement absente, et le taux de décès d’origine toxique est de 8 %.

Cet excellent profil de tolérance a déjà conduit à l’intégration du gemtuzumab en phase I, en association à des régimes d’induction classique.

2- Conditionnements atténués de greffe allogénique :

Il a pu être démontré qu’un conditionnement de chimiothérapie atténué (association de fludarabine et de doses réduites d’alkylants) ou purement immunosuppresseur de l’hôte (fludarabine et irradiation corporelle totale à 2 Gy) était suffisant pour établir une hématopoïèse issue du donneur.

Cette observation a été révolutionnaire après 20 ans de recherche d’intensification des conditionnements myéloablatifs et a établi le lymphocyte T allogénique alloréactif comme le plus puissant des agents antileucémiques.

La bonne tolérance relative de ces régimes, associés à des cytopénies, des hospitalisations brèves et à une mortalité à 3 mois de 10 %, permet de proposer cette stratégie jusqu’à 65-70 ans.

Toutefois, le taux de maladies du greffon contre l’hôte reste élevé et un plus ample recul est nécessaire pour apprécier le taux de rechutes.

3- Immunothérapie cellulaire :

La greffe allogénique est le seul exemple d’immunothérapie cellulaire efficace, mais peu contrôlée, et a généré la recherche d’autres voies d’immunothérapie cellulaire active.

L’administration d’interleukine 2 est suivie de l’amplification des populations lymphocytaire natural killer (NK) et lymphocyte activating killer (LAK) et permet d’obtenir de 15 à 30 % de nouvelles réponses complètes.

Néanmoins, son administration, dans le cadre de maladie résiduelle après autogreffe, n’a pas permis de modifier le taux de rechutes ; elle est actuellement à l’étude en phase III, après chimiothérapie.

Enfin, des modèles précliniques de vaccination antitumorale sont fondés sur l’utilisation de cellules tumorales irradiées, associées à une source de production cellulaire de GM-CSF, ou de cellules dendritiques dérivées des cellules leucémiques, excellentes présentatrices d’antigènes.

Leur injection permet d’amplifier la population lymphocytaire spécifique à la reconnaissance et à la lyse des cellules tumorales. Des essais cliniques sont envisagés.

Conclusion :

Les progrès thérapeutiques des 20 dernières années ont essentiellement conduit à l’optimisation de la délivrance des régimes intensifs et à l’adaptation des stratégies aux facteurs pronostiques cytogénétiques.

On attend dans un avenir proche la mise au point de nouveaux agents thérapeutiques ciblés sur des mécanismes aberrants pathogènes, et une meilleure maîtrise des thérapies cellulaires.

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