La patiente peut ressentir une pesanteur pelvienne.
Celle-ci est permanente ou intermittente, accentuée par
la station debout ou par la fatigue de la journée.
2- Tuméfaction vulvaire :
La patiente peut percevoir une tuméfaction vulvaire,
plus ou moins accentuée, parfois à peine marquée, parfois
notable, et parfois, enfin, extériorisée.
Dans ce cas,
des saignements par ulcération du col peuvent être
observés.
3- Troubles urinaires :
Des troubles urinaires peuvent accompagner ou révéler
le prolapsus.
Il s’agit le plus souvent d’une incontinence
urinaire d’effort typique : fuites d’urine provoquées par
la toux, les éternuements, le rire ou la marche.
Parfois,
les troubles sont plus atypiques, à type de mictions
impérieuses ou de cystalgies provoquées par le cisaillement
et les mouvements d’accordéon de la vessie.
Parfois, sont observés des épisodes de rétention d’urine,
la miction ne pouvant être obtenue que par la réintégration
manuelle de la procidence.
4- Troubles sexuels :
Des troubles sexuels peuvent être retrouvés, tels qu’une
gêne lors des relations intimes, avec impression de trop
grande laxité.
La vie sexuelle peut être complètement
abolie dans certaines procidences accentuées.
Elle est
parfois absente depuis de longues années chez certaines
femmes âgées.
5- Troubles de l’exonération :
Enfin, des troubles de l’exonération anorectale sont parfois
constatés : il peut exister une incontinence des gaz
et des matières liquides.
Dans d’autres cas, à l’opposé,
l’exonération se fait mal et les selles ne sont évacuées
qu’au terme de différentes manoeuvres digitales.
Parfois, aucun trouble n’éveille l’attention de la patiente
et le diagnostic de prolapsus est le fruit du seul examen
clinique.
Diagnostic clinique :
1- Aspect de prolapsus :
Il faut, dans un premier temps, faire tousser la patiente
installée en position gynécologique.
Le praticien observe
alors la plus ou moins grande béance de l’orifice vulvaire,
barré par le col abaissé ou l’une ou l’autre des
parois vaginales effondrées.
C’est ainsi que l’observateur
peut constater :
• l’existence d’un prolapsus antérieur sous l’aspect :
– d’une urétrocèle avec bombement de la partie basse de
la paroi antérieure du vagin et abaissement à la vulve du
col vésical ; cette procidence peut s’accompagner d’une émission involontaire et patente d’urine à la toux ; une
forme plus discrète d’altération du système de continence
est réalisée par une béance du méat urinaire sans véritable
incontinence ;
– d’une cystocèle avec abaissement de la partie
de la paroi vaginale antérieure du vagin adjacente au col
utérin.
Sous l’effort de toux, cette paroi bombe vers
l’observateur ;
• l’existence d’un prolapsus moyen, c’est-à-dire d’une
procidence du col utérin ; les lèvres du col arrivent
à la vulve ou la dépassent ; le col utérin, clairement
visible, est parfois normal, il peut aussi être volumineux,
les lèvres peuvent être intactes ; elles peuvent aussi être
déchirées aux commissures latérales ou, plus rarement,
en avant ou en arrière (le col revêtant l’aspect d’un
trèfle), la déchirure se prolongeant plus ou moins haut
sur l’isthme utérin ; dans d’autres cas, le col est petit et
d’aspect tronconique.
Enfin, il arrive que le col utérin
revête un aspect spécial.
Sa lèvre antérieure est très
allongée et masque la lèvre postérieur ; cela est décrit
comme un aspect tapiroïde du col, en gueule de requin
par hypertrophie isolée de la lèvre antérieure ;
• l’existence d’un prolapsus postérieur révélé par la
voussure de la partie basse de la paroi vaginale postérieure,
adjacente au périnée postérieur.
2- Procidence des organes pelviens :
Dans certains cas extrêmes, tout le prolapsus est déjà
extériorisé, dès avant l’examen.
La procidence pend
entre les cuisses de la patiente ; le col utérin est alors
volontiers ulcéré.
Les parois vaginales atrophiques
inversées en doigt de gant sont aussi sanguinolentes.
Les
tuniques qui recouvrent le col et les parois vaginales
inversées peuvent aussi être très épaissies (pachydermisées).
Enfin, dans certains cas, le prolapsus est exclu de
la cavité pelvi-abdominale et enclavé par son volume et
son oedème à l’extérieur de l’orifice vulvaire.
L’examen de la vulve ne permet pas toujours de définir
la nature des organes prolabés.
Il faut alors introduire
avec douceur un spéculum fermé.
Son appui sur la face
postérieure du vagin exagère ou démasque la procidence antérieure de la cystocèle.
L’appui du spéculum fermé
vers la symphyse permet à la rectocèle de s’affirmer.
Le spéculum est alors ouvert et un pince fine de Pozzi est posée sur le col dans l’angle des valves écartées.
La traction démasque et permet d’évaluer la cervicoptose.
Il convient à ce stade de vérifier s’il existe
une vraie hystéroptose (la partie haute de l’utérus suivant
le col dans sa descente), ou si la procidence du col
est isolée, et due à l’allongement cervico-isthmique
supra-vaginal, tandis que le corps de l’utérus reste très
haut dans le petit bassin (un certain nombre de difficultés
opératoires sont alors à prévoir).
La prise par la pince
de Pozzi permet de mieux explorer le col, dont la
tunique de revêtement peut être épaissie, et de réaliser
les examens cytologiques exocervicaux, endocervicaux
et endométriaux nécessaires.
Certaines anomalies cytologiques
dues au prolapsus peuvent requérir un contrôle colposcopique du col utérin.
3- Classification
:
Sur ce seul examen clinique peut être établie une double
classification : l’une d’avant en arrière, sur la nature des
organes prolabés, l’autre de haut en bas sur le degré de
procidence des organes.
• L’urétrocèle et la cystocèle constituent les procidences
de l’étage antérieur. Elles sont tantôt simples, séparées ou associées.
Elles sont tantôt plus complexes, porteuses
de cicatrices et de replis horizontaux ou de déchirures
anciennes rétro-vésicales ou rétro-urétrales (sous la
forme de tranchées verticales).
Il est intéressant, par la
mise en place d’une fine sonde à ballonnet, de mesurer
la longueur de l’urètre qui est très souvent raccourci.
• La cervicoptose et l’hystéroptose (qui peuvent être
dissociées) constituent le prolapsus de l’étage moyen du
pelvis.
L’abaissement peut être bridé par une cicatrice
obstétricale du dôme vaginal formant corde et retenant
le prolapsus, soit bilatéralement, soit unilatéralement
(hémi-prolapsus).
• La rectocèle peut être complète, ou limitée à la procidence
de sa partie basse ou haute.
Le prolapsus postérieur
est parfois plus complexe quand il existe un prolapsus
péritonéal, soit diverticulaire, soit du fait de la
profondeur excessive du cul-de-sac de Douglas (élytrocèle).
Chacun des ces éléments peut être plus ou moins prononcé.
Lorsque la procidence demeure encore intravaginale,
elle est dite de degré 1 ; quand elle affleure l’orifice
vulvaire, elle est classée en 2, et en 3 lorsque la
procidence dépasse l’orifice vulvaire.
La même classification
est employée pour les différents éléments du prolapsus.
4- Toucher vaginal :
Le toucher vaginal procure 4 ordres de renseignements :
• sur l’aspect de l’utérus, tantôt normal (qu’il soit de
volume normal, ou atrophique chez la femme âgée) tantôt
pathologique, adénomyosique ou porteur de
fibromes utérins.
Dans ce cas, des fibromes volumineux
bloqués contre la margelle du petit bassin peuvent retenir
la procidence.
Ce sont les fibromes dits parachutes,
dont l’exérèse abdominale se complique d’un effondrement
de la statique pelvienne, quand des gestes de restauration
de l’architecture du petit bassin ne sont pas
associés à leur ablation ;
• sur la mobilité de l’utérus : celui-ci est manipulé entre
la main interne et la main abdominale ; ces gestes permettent
de distinguer 2 cas :
– tantôt la mobilité de l’utérus est extrême, en une véritable
luxation : rien ne retient les mouvements de l’utérus
; cela signifie qu’aucune structure de soutien de cet
organe n’existe plus ;
– tantôt, au contraire, l’utérus est mobile mais cette
mobilité n’est pas absolue ; quand l’organe est abaissé
par la main abdominale, des structures se tendent et
limitent sa chute ; ces structures peuvent être latérales
(ce sont les ligaments larges) ou, le plus souvent, postérieures
(ce sont les ligaments utéro-sacrés dont l’on perçoit
la corde résistante en arrière de l’isthme utérin) ; ces
constatations différentes attirent vers des techniques
opératoires différentes ;
• sur l’incontinence urinaire d’effort : l’ascension transitoire
du col vésical vers la face postérieure de la symphyse,
par la mise en place de 2 doigts, posés de chaque
côté du col, fait disparaître l’émission d’urine, observée
lors des efforts de toux.
Cette manoeuvre, décrite par Bonney, démontre, lorsqu’elle est efficace, l’intérêt des
gestes urinaires qui devront être associés à la cure du
prolapsus ;
• sur l’étiologie du prolapsus : en particulier les brides
et cicatrices vaginales observées, les déchirures du col
sont en faveur du traumatisme obstétrical ; l’atrophie
des tissus et des organes plaide pour une défaillance hormonale
; enfin, l’association d’une paroi vaginale antérieure
trop brève, d’un allongement antérieur ou plus
global du col, et une rétroversion de l’utérus évoquent
une cause congénitale.
5- Toucher anorectal :
Le toucher anorectal permet d’une part, d’exposer le
périnée postérieur, qui est rarement intact (tantôt élimé,
tantôt cicatriciel, sectionné, déchiré ou éclaté, et tantôt
réduit à rien).
Il faut explorer le quadrant antérieur du
sphincter anal, qui peut être normal, aminci ou faire
complètement défaut.
Il est alors possible de retrouver
latéralement les cornes sphinctériennes rompues à l’endroit
de deux petites fossettes ombiliquées.
Dans certains
cas, le périnée postérieur a été entièrement détruit
et est réduit à un accolement muqueux anovaginal à
angle aigu sans aucune structure interne restante.
Le toucher plus profond permet de distinguer les rectocèles
basses des rectocèles hautes.
Il permet chez certaines femmes (le plus souvent déjà
opérées) de reconnaître un sillon horizontal séparant en
bas une poche de rectocèle, du bombement supérieur et
atteignant le col utérin d’une élytrocèle.
La toux de la
patiente exagère cette séparation qui est mieux évaluée
par un toucher combiné.
L’examen doit être encore plus minutieux quand la
patiente a été opérée (hystérectomie ou première cure de
prolapsus).
Il faut alors rechercher sur le dôme ou les
parois vaginales les cicatrices des colpotomies antécédentes.
Il faut aussi savoir reconnaître la persistance de
la procidence, en amont d’un périnée postérieur reconstitué
sur une trop grande longueur.
Il faut encore dépister la sclérose développée autour du col vésical et de l’urètre par les interventions urologiques
préalables.
Cet examen clinique, long et minutieux, présente l’avantage
de pouvoir totalement se passer de l’exploration
radiologique de la statique pelvienne par le colpocystogramme.
Diagnostic radiologiques :
le colpocystogramme
Le colpocystogramme comprend habituellement 2 clichés
de profil du bassin et un diagramme.
Les différents organes sont opacifiés par des produits ou
des instruments : l’urètre par une chaînette ou une crème
; la vessie par un liquide iodé qui dessine sa moitié inférieure
; l’utérus par une sonde intracavitaire ; le vagin
par une pâte étendue sur ses parois ; le rectum et le canal
anal par une crème ou un liquide opaque.
Un index métallique sert de repère au méat urétral.
Le
premier cliché du colpocystogramme est effectué sur la
patiente en position debout.
Il montre la place des
organes en l’absence d’un effort de poussée.
Le second
cliché est réalisé lorsque la patiente, toujours debout,
effectue une forte poussée sur son abdomen et le diaphragme
pelvien.
Un abaissement des organes est alors
constaté.
Le décalque des contours radiologiques fait
apparaître clairement la modification plus ou moins
accentuée de la hauteur des différents organes, au repos
ou sous la poussée de haut en bas.
Toutefois, le colpocystogramme ne mérite actuellement
pas un emploi courant dans l’étude des prolapsus génitaux.
Diagnostic différentiel
:
Trois diagnostic principaux doivent être éliminés.
1- Kystes vaginaux :
Les kystes vaginaux font saillie dans la cavité vaginale
ou à la vulve sous la forme d’une tuméfaction liquidienne.
Tantôt tendues et irréductibles, gênant l’examen
gynécologique, tantôt rénittentes et impulsives à la toux,
ces formations anormales peuvent être confondues avec
une cystocèle, une rectocèle ou une élytrocèle.
Leur diagnostic
passe par l’injection de bleu dans la vessie et par
le toucher anal, qui démontrent l’absence de dépendance entre le kyste et les organes pelviens.
Une échographie
pelvienne révèle habituellement la nature réelle de la
tuméfaction dans les cas difficiles.
2- Tumeurs bénignes :
Les tumeurs bénignes du col utérin prolabées dans la
cavité vaginale peuvent être prises pour une procidence.
Il s’agit alors très rarement d’un volumineux oeuf de Naboth du col, plus souvent d’un fibromyome pédiculé.
Celui-ci peut être d’origine endocavitaire et faire saillie
à travers l’orifice cervical externe. Le myome peut aussi
être développé à partir d’une des lèvres du col, qu’il
déforme et allonge.
Le simple examen au spéculum permet
de redresser le diagnostic.
Une échographie endovaginale
peut être nécessaire et révéler la nature solide de
la lésion.
3- Inversion utérine chronique :
Dans le cas de celle-ci, la face endométriale du fond utérin
fait saillie à travers le col et est prolabée dans la cavité
vaginale.
L’aspect est variable selon l’étiologie ; tantôt
elle est cryptogénétique, et une tuméfaction ferme,
rouge et saignante se présente à l’orifice vulvaire, tantôt
l’inversion a pour origine une tumeur endocavitaire
éversée qui attire l’attention.
Diagnostic étiologique
:
Dans le cas des prolapsus génitaux, les antécédents de
naissance par les voies naturelles manquent rarement.
Ils sont toutefois variés.
Tantôt les accouchements ont
été longs et difficiles, avec manoeuvres instrumentales,
application de forceps et déchirures du périnée.
Tantôt,
au contraire, la parturition a été en apparence aisée et
rapide, en quelques heures ou fractions d’heure, sans la
moindre lésion périnéale apparente.
Tantôt l’enfant était
de poids élevé, tantôt, au contraire, peu volumineux.
Parfois, les naissances se sont déroulées par alternance
d’accouchements par les voies naturelles et de césariennes
(et, dans ce cas, une hystérographie doit être
ajoutée aux examens complémentaires pour évaluer
l’importance de la cicatrice utérine et ses rapports avec
la vessie).
Parfois encore, le prolapsus est observé après
de seules césariennes, dans ce cas, il est essentiellement
postérieur sous forme d’une élytrocèle par évasement du
cul-de-sac de Douglas, consécutive à la pexie antérieure
de l’utérus.
Plus rares sont les procidences observées chez les nullipares
ou les femmes vierges ; elles se manifestent alors
par un prolapsus restreint au corps et au col de l’utérus
glissés en coin entre une paroi antérieure du vagin et une
paroi postérieure exemptes de toute procidence.
L’examen plus général peut démontrer l’existence
d'autres anomalies extragynécologiques.
Il n’est pas rare
que coexistent des hernies, ou des éventrations de cicatrice.
Procidence et défauts pariétaux apparaissent alors
comme une défaillance globale des tissus de soutien.
Il
est assez fréquent aussi que la procidence et les troubles urinaires associés soient observés chez des patientes de
poids élevé, ou parfois paradoxalement à l’occasion
d’une cure d’amaigrissement.
Diagnostic
des troubles urinaires associés :
L’examen clinique n’est toutefois pas suffisant pour évaluer
la fonction urinaire d’une patiente atteinte de prolapsus.
Une étude urodynamique complète est toujours
nécessaire.
Celle-ci a pour principal intérêt de pressentir
un éventuel échec thérapeutique sur le plan urinaire,
malgré le fait qu’un temps opératoire vésico-urétral spécifique
soit toujours associé à la cure chirurgicale d’un
prolapsus génital.
Ce qui est recherché est donc non pas
tant un défaut de transmission, qu’un défaut neurologique
ou du tonus sphinctérien.
Une telle constatation
doit faire informer la patiente du risque d’échec postopératoire
et de la nécessité d’une rééducation périnéale
associée à l’intervention.
Deux notions doivent être ajoutées : celle que quels que
soient les résultats urodynamiques, le traitement de la défaillance anatomique prime, en particulier quand le
prolapsus est extériorisé ; celle de l’interprétation difficile
de l’examen urodynamique en cas d’instabilité
extrême de la vessie et de l’utérus, dont la mobilité
modifie à tout instant les enregistrements.
Il peut exister, dans certains cas de prolapsus extériorisé,
une altération du haut appareil urinaire par compression
ou étirement des uretères.
Des examens urinaires,
bactériologiques et radiologiques sont alors indispensables,
les clichés pris très bas, montrant en totalité la
vessie pré- et post-mictionnelle.
L’urographie
intraveineuse est aussi obligatoire pour vérifier le
nombre et la situation des uretères lorsqu’une intervention
par voie abdominale est prévue.
Dans ce cas, il est
judicieux de faire un cliché de profil du promontoire,
siège de l’arrimage du prolapsus.