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Hématologie
Polyglobulies primitives (Suite)
Cours d'hématologie
 


 

+ Facteurs prédictifs du risque leucémique :

Caractéristiques initiales

La valeur prédictive vis-à-vis du risque de leucémie des facteurs pronostiques initiaux n’a pas été démontrée : importance de la splénomégalie ou de l’hyperleucocytose, existence d’une myélémie, taux d’hémoglobine initial particulièrement élevé.

Il en va de même des anomalies cytogénétiques (Étude cytogénétique) ou d’une myélofibrose initiale (Histologie médullaire).

Le passage par un stade de myélofibrose est considéré par certains comme une étape préalable à la transformation aiguë, comme indépendante pour d’autres.

Influence du traitement

L’un des principaux facteurs influençant la survenue d’une leucémie aiguë au cours de la polyglobulie de Vaquez demeure le traitement utilisé.

Ces conclusions ressortent clairement de l’essai prospectif du PVSG mis à jour en 1997 et sont confirmées par les études rétrospectives plus récentes de Nand en 1990 et l’enquête rétrospective italienne.

Toutes montrent que le seul facteur de risque de leucémie aiguë se dégageant clairement reste l’utilisation d’un traitement myélosuppresseur.

Après saignées seules, le taux de transformation spontanée de la polyglobulie de Vaquez est de 1,5 % (deux cas chez 134 patients pour une mise à jour qui, en 1986, correspondait à une surveillance maximale allant de 17 à 19 ans).

Bien que faible, ce taux de transformation est supérieur à celui d’une population normale de même âge.

La transformation en leucémie aiguë fait donc bien partie de l’histoire naturelle de la maladie.

Les transformations observées dans ce contexte sont précoces dans les 5 premières années.

Cette précocité indique que cette évolution spontanée n’est pas démasquée à la faveur d’une prolongation de la survie.

Toutes les autres thérapeutiques actuellement proposées (sauf l’interféron et l’anagrélide pour lesquels le recul est insuffisant) induisent un risque leucémique supérieur à cette valeur de référence.

Dans l’étude du PVSG, le 32P est responsable d’un taux de transformation en leucémie aiguë de 9,6 %, nettement plus élevé qu’après saignées, mais non différent statistiquement des taux de transformation observés après le traitement par chlorambucil qui atteignent, pour la même période, 13,5 %des cas.

Or, le chlorambucil a été éliminé en 1979 des programmes de randomisation du PVSG en raison d’un risque leucémique considéré alors comme trop élevé.

Cette apparente contradiction s’explique par le fait que le risque leucémique observé après 32P apparaît entre 6 et 10 ans, donc plus tardivement que le risque lié au chlorambucil.

Pour Najean qui a repris récemment ces données, le risque de leucémie aiguë après 32P est de 10 % à 10 ans mais atteindrait 30 % après 20 ans.

Pour la plupart des auteurs, en dehors de Modan et Lilienfeld, le risque n’est pas proportionnel à la dose totale de 32P reçue.

D’ailleurs, l’utilisation de l’hydroxyurée comme traitement d’entretien après 32P, qui diminue la dose de 32Pfinalement utilisée, ne diminue pas, bien au contraire, ce risque leucémique (19 % à 10 ans).

Les agents alkylants sont également générateurs d’un risque élevé de transformation leucémique.

Le chlorambucil, on l’a vu, comporte un risque global non différent de celui du 32P mais dont la particularité tient à sa précocité, la moitié des cas survenant dans les 5 premières années.

En outre, ce risque est durable puisque la survenue de leucémie aiguë est signalée après 13, 14 et 15 ans et subsiste même après interruption du traitement.

Là encore, aucune relation effet/dose n’a été mise en évidence.

Le busulfan n’a été utilisé que dans une seule étude, celle de l’EORTC, publiée en 1981, avec un recul faible (médiane de surveillance à 8 ans).

Ce médicament utilisé en cures courtes et discontinues n’a pas, dans cette étude, entraîné un nombre de leucémies aiguës statistiquement différent de celui qui était induit par le 32P utilisé dans l’autre bras de randomisation.

Encore faut-il noter que le taux de transformation est resté très faible dans les deux bras : inférieur à 2 %.

L’utilisation de traitements myélosuppresseurs, dépourvus d’effet mutagène, a été progressivement développée dans l’espoir de réduire le risque leucémique.

Le traitement actuellement le plus utilisé à l’échelon international est l’hydroxyurée, du fait de sa grande efficacité, de sa facilité d’utilisation et de son excellente tolérance, au moins initiale.

Les résultats du protocole du PVSG (PVSG 08) n’ont pas encore permis de mettre en évidence une différence statistiquement significative entre le taux de leucémie aiguë survenant sous hydroxyurée et le taux historique de 1,5 % observé chez les patients traités seulement par phlébotomie.

En effet, cinq cas de leucémie aiguë ont été observés chez 51 patients traités (9,8 %), après une durée médiane de traitement de 8,6 ans et une durée maximale de surveillance de 15,3 ans.

Il convient de noter toutefois que l’apparition d’un seul nouveau cas rendrait cette différence significative.

Nand, chez huit patients traités exclusivement par hydroxyurée, rapporte une fréquence de 12 %.

En revanche, l’analyse du protocole français comparant hydroxyurée et pipobroman a permis de mettre en évidence un risque de survenue de leucémie aiguë de l’ordre de 13 % à 12 ans dans les deux bras.

L’utilisation du pipobroman n’a pas permis dans les études à long terme de diminuer le risque de transformation en leucémie aiguë.

Le taux de transformation rapporté chez les patients uniquement traités par pipobroman varie entre 6,8 % (suivi médian de 5,2 ans) et 14 % de risque actuariel à 12 ans.

Finalement, le risque de leucémie aiguë ou de myélodysplasie existe quelle que soit la thérapeutique cytoréductrice utilisée.

Certains auteurs vont même jusqu’à suggérer que ce risque est similaire dans la plupart des séries publiées, de l’ordre de 10 % vers la dixième année, indépendamment du traitement utilisé : phosphore, busulfan, hydroxyurée, même si les résultats publiés ne concernent qu’un petit nombre de cas.

Ces arguments plaideraient en faveur d’une transformation liée au syndrome myéloprolifératif lui-même plutôt qu’au traitement utilisé.

Cette conclusion est cependant en contradiction formelle avec les études qui précèdent : celles du PVSG, de Nand et de l’étude italienne rétrospective.

Les associations thérapeutiques, qu’il s’agisse d’agents alkylants ou non, augmentent le risque leucémique.

Ce point est établi par plusieurs études dont celle de Nand (36 % de risque leucémique) et de Najean (32P suivi d’hydroxyurée : risque leucémique supérieur à celui du 32P seul).

Le risque de décès par maladie maligne n’augmente pas avec l’âge, à la différence de ce qui est observé en matière de complications vasculaires, et au fur et à mesure de l’évolution (l’augmentation du risque devient apparente 6 ans environ après le diagnostic).

Ce risque englobe avec une fréquence égale le risque leucémique et celui de survenue d’une affection maligne non leucémique.

* Affections malignes non leucémiques :

L’augmentation du risque d’être victime d’une maladie maligne non hématologique au cours d’une maladie de Vaquez n’est étudiée que depuis peu.

L’analyse du PVSG de janvier 1987 faisait apparaître un excès possible de cancers cutanés et gastro-intestinaux dans le groupe des patients traités par chlorambucil ou 32P, comparé au groupe saignées, sans toutefois que la différence apparaisse comme significative.

L’enquête rétrospective italienne confirme, parmi les causes de mortalité, la fréquence élevée des affections malignes (30 %), représentées à part égale par les leucémies aiguës et les cancers.

Le risque de décès par pathologie maligne, toutes formes confondues, est influencé par le traitement (6,7 % après chimiothérapie, 1,6 % après saignées).

L’étude du devenir à long terme des patients traités par 32P ou par 32P suivi d’un traitement par hydroxyurée fait apparaître dans l’étude de Najean un risque de cancer de 15 % à 10 ans après 32P seul et de 29 % à 10 ans après association hydroxyurée et 32P.

Cette tendance à l’augmentation du nombre de cancers après utilisation de traitements myélosuppresseurs réputés non mutagènes est signalée également dans une étude comparant l’hydroxyurée au pipobroman utilisé seul.

8- Traitement :

Selon l’étude de Chievtz, la médiane de survie d’un groupe de patients non traités, décédés entre 1933 et 1961, était de 18 mois.

Il est donc hautement vraisemblable que les thérapeutiques, certes plus ou moins récentes, et surtout peut-être l’inclusion dans des essais thérapeutiques obligeant à une plus grande rigueur dans les méthodes diagnostiques et de surveillance, aient amélioré l’espoir de vie des patients polyglobuliques.

* Saignées :

Elles représentent la plus ancienne méthode thérapeutique connue.

À la fois conservatrice et efficace, c’est le plus rapide moyen pour obtenir une déplétion de la masse sanguine et une diminution de l’hématocrite.

C’est, rappelons-le, l’hématocrite qui est le principal facteur influençant la viscosité sanguine.

Le flux sanguin cérébral atteignant ses valeurs optimales entre 40 et 45 % d’hématocrite, on recommande de fixer ces chiffres comme objectif du traitement par saignées.

+ En urgence :

En pratique, des saignées de 500 mL, répétées au rythme de deux ou trois par semaine, sont susceptibles de ramener le volume sanguin à la normale en 2 ou 3 semaines.

Leur première indication est donc celle de l’urgence.

Ce n’est que chez les patients très âgés, ou dont la situation vasculaire est instable, que les saignées peuvent être d’un volume plus faible, voire suivies de réinjection du plasma ou de macromolécules pour maintenir la valeur de la masse sanguine tout en réduisant la viscosité.

On manque d’études et de recul pour apprécier la place de l’érythroaphérèse dans le traitement de la polyglobulie.

+ Au long cours :

Les saignées seules ont été également préconisées comme méthode de maintien à long terme de l’hématocrite dans les limites de la normale.

Dans cette optique, on procède à une répétition de saignées de 500 mLchaque fois que l’hématocrite est supérieur à la valeur fixée (47 %).

La carence martiale qui se crée ainsi après quelques mois contribue à limiter la production érythrocytaire.

On conçoit le risque que ferait courir un traitement martial mis en oeuvre sans précaution, en restaurant brutalement la masse sanguine et en réaugmentant ainsi la viscosité.

Le maintien de l’hématocrite entre 42 et 47 % peut ainsi parfois être obtenu au prix d’un petit nombre de saignées : une ou deux tous les 3 ou 4 mois.

En revanche, la nécessité de recourir aux saignées plus fréquemment que tous les 2 mois amène à proposer le recours à d’autres modalités thérapeutiques.

Le principal avantage que l’on reconnaît aux saignées est d’être le seul traitement n’augmentant pas à long terme le risque leucémique.

Leurs inconvénients ont déjà été signalés, comme l’augmentation du risque de thrombose par comparaison aux patients chez qui la réduction de la masse sanguine est obtenue par 32P ou chimiothérapie cytoréductrice.

Ce risque apparaît plus élevé pendant les 7 premières années du traitement par saignées mais n’atteint la significativité statistique qu’au cours des 3 premières.

Il est plus élevé après 65 ans et chez les patients ayant des antécédents de thrombose.

En revanche, le chiffre de plaquettes élevé, souvent associé au traitement par saignées, ne semble pas interférer dans l’aggravation du risque thrombogène.

Les saignées, utilisées comme seul traitement, ne suppriment que l’excès de globules rouges sans modifier l’hyperproduction médullaire qui porte également sur les éléments leucocytaires et mégacaryocytaires, pouvant ainsi précipiter à terme l’évolution vers la myélofibrose et la MMPP.

Enfin, les saignées répétées sont souvent mal tolérées et ainsi très fréquemment abandonnées à plus ou moins long terme.

Ces diverses considérations font que, en dehors du traitement de l’urgence, les indications du recours exclusif aux saignées sont limitées au traitement de l’érythrocytose pure du sujet jeune.

* Traitements myélosuppresseurs :

+ Phosphore 32 :

C’est le traitement myélosuppresseur le plus anciennement proposé.

Utilisé sous forme d’un sel de sodium hydrosoluble, le produit est actif par voie buccale, mais l’imprécision de la dose réellement absorbée impose l’utilisation de la voie veineuse.

Concentré au niveau des tissus à fort contenu en phosphore et dans des cellules se divisant activement, la demi-vie de l’isotope est de 14,3 jours, ce qui assure une irradiation régulière du tissu hématopoïétique pendant plusieurs semaines.

La dose recommandée varie de 2,3 mCi/m² (3 à 5 mCi dose totale) à 0,1mCi/kg, sans dépasser 7 mCi en dose totale.

Lorsque des doses de 2,3 mCi/m² sont utilisées, on propose un jugement de l’efficacité au bout de 12 semaines et la répétition du traitement à dose plus faible si la réponse est incomplète : 1 à 4 mCi dose totale, ou plus élevée de 25 à 50 %en cas de nonréponse.

Cette méthode par tâtonnement, préconisée par le PVSG, n’est pas utilisée en France où des doses plus fortes sont en effet utilisées initialement : 0,1 mCi/kg, répétées éventuellement au bout de 3 mois en cas de non-réponse.

L’effet sur l’hématocrite ne se produisant dans ces conditions qu’au bout de 1 à 2 mois, il est recommandé pour obtenir un retour rapide de l’hématocrite à la normale de réaliser des saignées avant l’injection de 32P.

Si pour une raison quelconque ces saignées devaient être réalisées après l’injection de phosphore, il est recommandé de respecter un délai de 3 semaines après l’injection.

Une surveillance hématologique régulière est nécessaire.

Le traitement induit de façon non exceptionnelle une thrombopénie et une leucopénie plus précoces que l’effet sur l’hématocrite, mais néanmoins toujours retardées de 2 à 3 semaines.

La rémission induite par le 32P est progressive, jugée au plus tôt après 8 semaines, traduite par la diminution de l’hématocrite, le retour à la normale des chiffres leucocytaires et plaquettaires, la régression de la splénomégalie et une diminution de la richesse médullaire. Cette rémission hématologique dure de quelques mois à 3 ans, en moyenne 25 mois.

Le principal reproche fait à ce traitement, le plus souvent extrêmement bien toléré, est d’accentuer le risque leucémique à long terme.

+ Agents alkylants :

Le chlorambucil, chimiothérapie sélectionnée en 1967 pour l’étude du PVSG, a vu son utilisation interrompue prématurément en raison d’une incidence de leucémies aiguës supérieure à celle observée dans les deux autres bras de randomisation utilisant saignées ou 32P.

Cette différence entre 32P et chlorambucil n’est plus actuellement statistiquement significative.

À la suite de cette expérience, la recommandation d’éviter les médicaments potentiellement leucémogènes s’est étendue aux autres agents alkylants : cyclophosphamide, melphalan et généralement busulfan.

Cependant, le busulfan utilisé par voie orale, à la dose de 4 à 6 mg/jour, pour de courtes périodes mais à longue durée d’action, continue à être considéré par certains comme une alternative thérapeutique intéressante après 65 ans.

+ Agents non alkylants :

Les considérations précédentes concernant le risque leucémogène du 32P et des agents alkylants ont conduit à proposer l’utilisation de thérapeutiques dépourvues a priori d’effet mutagène.

L’hydroxyurée est un inhibiteur métabolique de l’ADN.

Considéré comme non mutagène dans les études préliminaires, ce médicament a été introduit dans l’étude du PVSG dans les années 1980 et son efficacité comparée à celle du pipobroman dans une étude randomisée initiée par Najean.

Utilisée par voie orale, la dose initiale recommandée est de 25 mg/kg/jour ou de 1 500 mg en dose totale journalière pendant 1 semaine.

Il est très important de moduler ensuite la dose quotidienne à l’aide d’une numération hebdomadaire en se basant exclusivement sur la tolérance de la lignée granuleuse.

On détermine ainsi une dose d’entretien efficace qui permet d’obtenir, mais de façon décalée dans le temps, la réduction de l’hyperplaquettose, de l’hématocrite et de la splénomégalie sans entraîner de neutropénie excessive.

Cette dose maximale tolérée est très variable d’un individu à l’autre : de 0,5 à 1,50 g/jour.

En raison de l’effet différé sur l’hématocrite, il est habituel au début d’associer des saignées, qu’il est souvent nécessaire de répéter les premiers mois mais dont la nécessité s’estompe par la suite.

Une partie des inconvénients de ce traitement est connue de longue date :

– nécessité absolue d’un traitement continu d’entretien ;

– nécessité d’une surveillance hématologique régulière (mensuelle) en raison de la survenue, en cas de surdosage, d’épisodes de pancytopénie très rapidement réversibles à l’arrêt du traitement ;

– macrocytose constante, parfois impressionnante et sans inconvénient connu ;

– manifestations d’intolérance initiale : fièvre, rash cutané, intolérance digestive avec diarrhée, obligeant rarement à interrompre prématurément le traitement.

Ces inconvénients sont en général mineurs au début de l’utilisation de l’hydroxyurée et ce médicament est habituellement considéré comme très efficace et bien toléré.

En fait, actuellement, trois questions restent à l’ordre du jour et concernent les effets à long terme de ce traitement.

Il s’agit :

– de la réalité de l’absence d’effet leucémogène ou plus généralement mutagène de ce produit à long terme ;

– de la qualité du contrôle de la myélosuppression et de l’effet à long terme sur la myélofibrose, déjà évoqué ;

– enfin, de la tolérance extrahématologique à long terme, notamment cutanéomuqueuse ; des manifestations d’intolérance, aphtes buccaux, phénomènes de photosensibilisation, sécheresse de la peau, modification des ongles et surtout ulcères de jambes, conduisent parfois à l’interruption du traitement après plusieurs années.

Le pipobroman est un dérivé de la pipérazine, considéré, apparemment à tort, comme un agent alkylant ; son mode d’action serait en réalité celui d’un antimétabolite.

Introduit dans le traitement de la polyglobulie avant l’hydroxyurée, ce produit bénéficie d’un renouveau d’intérêt récent.

Utilisé à la dose de 1,25 mg/kg/jour, ses modalités d’emploi sont très similaires à celles de l’hydroxyurée, avec des délais d’action et un effet résiduel plus prolongés.

Comme pour l’hydroxyurée, certaines réserves sont à formuler concernant l’utilisation de ce produit :

– nécessité quasi absolue d’un traitement d’entretien ;

– nécessité d’une surveillance hématologique régulière ;

– manifestations d’intolérance digestive initiale possibles.

De même, restent à l’ordre du jour les questions concernant : – l’effet mutagène à long terme, qui paraît du même ordre que celui observé avec l’hydroxyurée ;

– la qualité et l’ampleur de la myélosuppression, qui plaideraient en faveur du pipobroman comparé à l’hydroxyurée en raison d’un risque diminué à long terme d’évolution fibrosante, mais ce point ne peut être considéré actuellement comme démontré ;

– les effets extrahématologiques observés à long terme, qui sont mal connus mais paraissent relativement mineurs.

Les incertitudes concernant les effets à long terme de ces deux drogues et notamment l’augmentation d’incidence du risque leucémique ou de cancer justifient donc la poursuite d’essais comparatifs randomisés.

+ Traitement des polyglobulies primitives par interféron :

L’intérêt de l’interféron alpha comme agent myélosuppresseur dans la leucémie myéloïde chronique (LMC), son efficacité pour réduire l’hyperplaquettose des syndromes myéloprolifératifs, ont conduit de nombreux groupes à évaluer l’efficacité de ce produit dans la maladie de Vaquez.

Ce traitement est susceptible de contrôler la masse sanguine en 6 à 12 mois, supprimant ainsi chez 70 % des patients la nécessité de recourir à des saignées.

Chez les patients où ce traitement fait preuve d’efficacité sur la lignée érythrocytaire, on constate également un effet sur l’hyperplaquettose, l’hyperleucocytose, la splénomégalie.

Cependant, chez 20 % des patients, le résultat obtenu reste partiel et 10 % sont apparemment résistants à l’interféron.

Les doses utilisées au début varient de 9 à 25 MU/semaine, en général administrées en trois injections sous-cutanées de 3 à 9 MU chacune.

Après qu’un contrôle de l’excès de production médullaire a été obtenu, les doses nécessaires au maintien de la réduction peuvent être réduites.

Il est possible d’observer au cours du traitement une perte d’efficacité liée au développement d’anticorps anti-interféron.

L’utilisation d’interféron « lymphoblastoïde » alpha N1 permet alors de restaurer l’effet du produit.

La tolérance du produit reste extrêmement médiocre chez un tiers des patients, conduisant à l’interruption prématurée du traitement.

En raison du coût de l’interféron, de ses effets secondaires, en dehors des indications spécifiques que représentent prurit et grossesse, l’avantage réel de ce type de traitement reste à déterminer.

L’absence d’effet leucémogène est sûrement à l’heure actuelle l’argument le plus important pour préférer l’interféron aux traitements cytoréducteurs couramment employés actuellement comme l’hydroxyurée et le pipobroman.

Cet argument est cependant d’autant plus important qu’on s’adresse à des individus jeunes.

Reste également à démontrer qu’à l’instar de ce que l’on observe au cours de la LMC, le traitement par l’interféron est susceptible d’obtenir un contrôle efficace et prolongé de la prolifération clonale à l’origine de la maladie.

Faute de marqueurs cytogénétiques, on ne peut que se baser sur quelques exemples publiés de rémission cytogénétique.

Il faut encore déterminer la valeur à accorder à la diminution progressive des progéniteurs granulomonocytaires et érythrocytaires du sang observée chez la plupart des patients traités au cours des 2 premiers mois, et surtout peut-être l’effet à long terme de l’interféron sur le développement de la myélofibrose.

* Traitements antiagrégants :

L’utilité d’un traitement antiagrégant au cours de la maladie de Vaquez fait partie des questions qui ont été posées par le PVSG.

L’étude menée de 1977 à 1981 chez 178 patients traités par saignées associées à l’aspirine, 900 mg/jour, et au dipyridamol, ou par le 32P, a comparé l’incidence des complications notamment thrombotiques et hémorragiques.

Cette étude a montré que le groupe des patients traités par saignées et antiagrégant comportait un risque plus élevé de thrombose et en outre un risque hémorragique accru, ce dernier étant le seul à être statistiquement lié à la présence d’une hyperplaquettose.

Depuis cette étude, il est donc recommandé d’éviter l’utilisation d’un traitement antiagrégant chez les patients polyglobuliques.

Plusieurs faits de connaissance récente amènent à remettre en question ces premières conclusions et à reposer le problème du traitement antiagrégant en termes différents.

Tout d’abord, on a démontré l’efficacité de faibles doses d’aspirine (30 à 75 mg) à la fois clinique, dans la prévention secondaire des thromboses chez les patients atteints d’affections ischémiques, cardiaques ou cérébrales, et biologique, comme inhibiteur de l’activité cyclo-oxygénase des plaquettes démontré par la mesure de la production du thromboxane A2 au cours de la coagulation du sang total.

Ces découvertes amènent à reposer la question des doses d’antiagrégant à utiliser.

L’absence d’augmentation du risque hémorragique et la preuve de l’inhibition complète de la production du thromboxane A2, au cours d’un essai randomisé comparant chez 112 polyglobuliques l’effet de l’aspirine à la dose de 40 mg à celui d’un placebo, renforcent l’argumentation en faveur de l’utilisation de faibles doses d’aspirine.

Enfin, l’étude de la thrombocytémie essentielle, au cours de laquelle l’ampleur du risque hémorragique est corrélée aux fortes augmentations du nombre des plaquettes, est en faveur de la mise en oeuvre d’un essai comparant l’abstention d’antiagrégants à l’aspirine utilisée à faible dose, chez les patients dont la polyglobulie est par ailleurs contrôlée efficacement par des saignées et par un traitement cytoréducteur visant à maintenir le chiffre des plaquettes dans des limites normales.

* Traitements adjuvants et associés :

L’hyperuricémie justifie la prescription systématique d’allopurinol au début du traitement myélosuppresseur.

Le prurit, spontané ou plus souvent déclenché par le contact avec l’eau, est un symptome extrêmement fréquent (50 %).

Son mécanisme est mal élucidé.

Il n’existe en particulier pas de relation claire entre la sévérité de la polyglobulie et l’importance du prurit.

Chez 20 %des patients, le prurit persiste malgré un contrôle efficace de la masse sanguine.

Gilbert a suggéré l’existence d’une relation entre prurit, taux d’histaminémie sanguine et urinaire et nombre de basophiles circulants.

Cependant, aucune corrélation évidente n’a été retrouvée entre le taux d’histamine et le prurit, et les antihistaminiques ainsi que les antagonistes des récepteurs de l’histamine restent d’efficacité limitée.

Une relation entre prurit et infiltration tissulaire par les mastocytes, proposée par Jackson, expliquerait l’efficacité chez certains patients de la photothérapie.

En revanche, des publications itératives démontrent l’efficacité de l’interféron alpha dans le traitement du prurit des polyglobulies.

Une amélioration appréciable est observée dans 80 % des cas. Cet effet est dose-dépendant et atteint son maximum d’efficacité au bout de 3 à 6 mois de traitement.

Le mécanisme de cet effet reste cependant non démontré.

9- Évolution de la maladie de Vaquez et propositions thérapeutiques :

La description de l’évolution de la maladie de Vaquez ne se conçoit que chez un patient faisant l’objet d’un traitement.

Les essais menés de 1967 à 1974 par le PVSG, incluant 431 patients et comparant en termes d’efficacité, de survie et de survenue de complications, les trois traitements les plus utilisés alors (saignées, 32P, chlorambucil) ont eu comme avantage essentiel de démontrer que l’évolution de la maladie dépendait dans une large mesure du choix thérapeutique.

Tout récemment, le dépouillement des études françaises de traitement des polyglobulies est venu apporter des précisions sur les résultats à moyen et long terme du 32P et des chimiothérapies non mutagènes.

* Études du PVSG :

L’analyse des résultats de la première série d’études, celle du PVSG, réalisée en 1987 et actualisée en 1997, montre une médiane de survie de 9,1 ans dans le groupe « chlorambucil », de 10,9 ans dans le groupe « P32 » et de 12,6 ans dans le groupe « saignées ».

La survie est donc moins bonne pour les patients traités par chlorambucil et comparable dans les deux autres groupes. L’essai montre que la différence de survie entre les trois groupes est liée aux décès tardifs, alors que pendant les 7 premières années de l’étude, la survie globale est équivalente.

Les causes de décès varient en fonction du traitement.

La première cause de mortalité est représentée par les thromboses (29,2 %), puis par les hémopathies : leucémies, lymphomes (23,3 %), et les tumeurs solides (16 %), les hémorragies représentent 6,8 %des issues fatales, enfin le développement d’une myélofibrose avec métaplasie myéloïde n’est évaluée dans cette étude qu’à 3,2 % des causes de décès.

L’influence des traitements évalués sur les complications non fatales a déjà été en partie évoquée.

Ainsi, les thromboses sont plus fréquentes, pendant les 3 premières années du traitement, chez les patients uniquement saignés.

Après cette période, les courbes de survie sans thrombose sont pratiquement parallèles dans les trois groupes.

Les leucémies aiguës et les cancers apparaissent de façon prédominante dans les groupes de patients traités par myélosuppression, surtout après la cinquième année.

Passé la septième année, le traitement myélosuppresseur, quel qu’il soit, comporte un désavantage en matière de survie dû à l’augmentation des hémopathies et des tumeurs malignes.

Le risque de myélofibrose est apparu dans cette étude analogue dans les trois bras.

Cependant, le pourcentage de patients ayant développé une myélofibrose et victimes secondairement d’une transformation en leucémie aiguë est plus élevé après traitement myélosuppresseur (32Pou chlorambucil).

Une seconde étude du PVSG, l’essai 08, a permis d’évaluer l’efficacité d’un agent myélosuppresseur non alkylant et considéré comme non mutagène, l’hydroxyurée.

Le contrôle de l’hématocrite est obtenu chez 80 %des patients après 3 mois et persiste chez 73 %d’entre eux après 1 an.

La toxicité précoce de ce traitement est une cytopénie dose-dépendante.

La combinaison de ces deux études a permis de conclure que pendant les 7 premières années, les événements thromboemboliques apparaissaient significativement moins fréquents chez les patients traités par hydroxyurée que chez ceux traités par saignées seules, la thrombose étant la première manifestation de l’échec du traitement chez 32,8 % des patients traités par saignées contre 9,8 %des patients traités par hydroxyurée.

En ce qui concerne l’effet leucémogène, les conclusions sont plus incertaines compte tenu du petit nombre d’événements observés.

Les pourcentages de leucémies aiguës sont de 9,8 % après hydroxyurée et de 3,7 % après saignées, après une durée médiane de 8,6 ans et un délai maximal de surveillance de 15,3 ans, pour l’ensemble des patients traités, et respectivement de 5,9 % et 1,5 % pour le groupe plus restreint des patients toujours inclus dans l’étude.

La différence n’est pas significative. Des études que nous venons de résumer découlent les propositions thérapeutiques préconisées par le PVSG.

Tout patient considéré comme exposé à un risque important de thrombose en raison de son âge, de ses antécédents thrombotiques ou du nombre important de saignées nécessaires pour contrôler son hématocrite doit se voir proposer un traitement myélosuppresseur. Les saignées seules sont à réserver aux autres patients.

Les traitements myélosuppresseurs sont ensuite choisis en fonction de l’âge des patients et de leur risque mutagène propre.

Le 32P, éventuellement associé aux saignées, est préconisé après 70 ans, l’hydroxyurée au-dessous de cet âge.

* Critique des conclusions du PVSG :

La première critique concerne les critères diagnostiques choisis par le PVSG, excluant probablement de l’étude un nombre important de polyglobulies primitives en raison de l’absence de splénomégalie ou d’une expansion évidente du reste du clone myéloïde.

L’inclusion de ces patients dans les études futures (Critères du diagnostic) est susceptible de modifier les conclusions concernant la survie globale et la fréquence des complications à court et à long terme.

Les critiques les plus importantes concernent les recommandations qui découlaient des études précédentes en faveur du traitement par saignées seules.

Tout d’abord, la tolérance de cette option thérapeutique pose problème.

Sur une cohorte de 55 patients suivis dans le contexte de l’étude du PVSG et traités par saignées seules, la médiane d’observation du traitement n’est que de 3,3 ±3,5 ans, ce qui amène à redouter que seul un tout petit nombre de patients ait bénéficié de cette unique théapeutique durant la période correspondant à la médiane de survie observée dans ce bras de randomisation (12,6 ans).

Les conséquences hématologiques du traitement par saignées ont d’autre part été dénoncées par les études françaises qui incriminent, outre l’augmentation du risque de thrombose mise en évidence par l’étude originale, leur rôle dans la transition vers un tableau de splénomégalie myéloïde, par le biais d’une augmentation de la production de plaquettes, justifiant souvent le recours secondaire à un traitement myélosuppresseur, et d’une augmentation du volume splénique.

* Études récentes, prospectives et rétrospectives :

Tout récemment, le dépouillement des études françaises de traitement des polyglobulies est venu apporter des précisions sur les résultats à moyen et à long terme du 32P et des chimiothérapies non mutagènes.

Chez les individus de plus de 65 ans, tenant compte des propositions thérapeutiques du PVSG préconisant le 32P, la question posée dans une étude débutée en 1979 et incluant 461 patients fut celle de l’intérêt d’un traitement d’entretien complémentaire par l’hydroxyurée pour diminuer le risque d’accidents vasculaires et le risque leucémogène à long terme.

Les conclusions apportées par cette étude confirment que le 32P utilisé à dose suffisante (0,1 mCi/kg) est dans l’ensemble parfaitement toléré, sous réserve d’une réduction de dose de 25 % après 80 ans.

Il entraîne une rémission de très longue durée (médiane 3 ans) et une survie médiane très proche de la survie des individus non polyglobuliques d’âge identique.

La médiane de survie est de 10,9 ans en tenant compte de l’intention de traitement, et de 11,2 ans en tenant compte du traitement principal reçu, comparée à 11,4 ans de médiane de survie pour des individus non polyglobuliques d’âge identique.

En revanche, l’introduction d’un traitement d’entretien par l’hydroxyurée, après utilisation du 32P, réduit de façon significative les doses de 32P totales nécessaires, mais n’allonge pas la survie (médiane respectivement de 9,1 ans en « intention de traitement » et de 9,3 ans en « traitement principal »), ne réduit pas le risque vasculaire ni la fréquence d’une hyperplaquettose résiduelle, constatée chez un quart des patients, et ne réduit pas la probabilité ultérieure de développement d’une myélofibrose (30 %des cas à 15 ans).

Bien plus, selon cette étude, l’introduction de l’hydroxyurée, à la suite d’un traitement par 32P, augmente après 8 ans le risque de transformation en leucémie aiguë et s’accompagne d’un risque aggravé de développement d’un cancer.

Un petit contingent de patients chez qui deux injections de 32P en 2 ans ou trois injections en 4 ans sont nécessaires pour contrôler la polyglobulie est ainsi identifié.

La survie de ce groupe, à fort potentiel évolutif, est abrégée par l’apparition de complications vasculaires ou d’affections malignes secondaires (survie médiane de 8,2 ans comparée à 11,8 ans pour le reste du groupe).

Cette forme de polyglobulie tirerait bénéfice, après injection de 32P, d’un traitement d’entretien par l’hydroxyurée capable de limiter le risque d’accident vasculaire.

Chez les individus plus jeunes, le résultat de l’étude randomisée comparant l’hydroxyurée au pipobroman indique une efficacité analogue de ces deux médicaments en termes d’induction de la rémission hématologique initiale, une tolérance médiocre obligeant dans 10 % des cas à une interruption du traitement et une fréquence d’accident vasculaire analogue dans les deux bras.

En revanche, l’hydroxyurée semble inférieure au pipobroman en ce qui concerne l’obtention d’une myélosuppression adéquate.

L’utilisation de l’hydroxyurée laisse souvent persister une hyperplaquettose et conduit souvent à une augmentation des doses.

Ces deux médicaments, malgré leur réputation de produits non mutagènes, comporteraient un risque leucémogène identique.

Quatorze leucémies aiguës ont été recensées chez 260 patients évaluables dont les premiers cas sont apparus dès la quatrième année.

Le risque de myélofibrose reste important chez les patients traités par hydroxyurée (22 cas de myélofibrose sur 48 cas suivis depuis plus de 10 ans).

Ce risque semble corrélé à la persistance d’une hyperplaquettose en dépit du traitement.

Le pipobroman, après un délai de surveillance beaucoup plus court (22 cas suivis depuis plus de 10 ans), comporte un risque de myélofibrose beaucoup plus faible (trois cas).

Cette différence atteint la significativité statistique.

Comme on le voit, les indications thérapeutiques de la maladie de Vaquez ne peuvent être considérées comme définitivement établies.

À défaut de la perspective réellement satisfaisante que serait l’espoir d’une éradication précoce et définitive de la maladie, trois problèmes restent à l’ordre du jour : celui de la place des antiagrégants, destinés à diminuer le risque persistant de thrombose en dépit du traitement cytoréducteur ; celui du produit au plus faible essai mutagène ; enfin, celui de la meilleure thérapeutique pour prévenir à terme la myélofibrose.

B - Polyglobulies familiales et congénitales :

Le chapitre des polyglobulies familiales comporte plusieurs aspects :

– celui des formes familiales de la maladie de Vaquez (Épidémiologie) ;

– celui des polyglobulies familiales secondaires (polyglobulie par anomalie de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène et polyglobulie des Chuvash), que nous ne ferons que citer puisque leur place est en réalité au chapitre des polyglobulies secondaires ;

– celui des polyglobulies familiales primitives, qui va être principalement développé ici.

1- Polyglobulie familiale primitive :

Aucun des patients jusqu’à présent décrits dans ce cadre ne remplit les critères diagnostiques de maladie deVaquez retenus par le PVSG.

La transmission de l’anomalie est autosomale dominante.

Le terme d’érythrocytose familiale dominante est donc celui qui définit le mieux la maladie.

Les individus qui expriment l’anomalie dans les familles décrites sont asymptomatiques, ne nécessitent aucun traitement, voire sont susceptibles de performances physiques les situant à un niveau olympique.

Toutefois, au fur et à mesure des publications, on devine une présentation clinique plus polymorphe, avec notamment présence parfois d’une splénomégalie, voire survenue d’accidents hémorragiques ou thrombotiques majeurs.

L’identification de cette entité nosologique a suivi les progrès de nos connaissances de la physiologie de l’érythropoïèse dans la polyglobulie.

Dès 1975, Adamson les distingue des formes récessives en raison, d’une part bien sûr de la transmission héréditaire, mais également de leur expression clinique beaucoup plus indolente.

Plus tard, en apportant la preuve de l’absence de sécrétion anormale d’Epo confirmée par le dosage de l’Epo sérique et de l’activité érythropoïétique urinaire, on montre également que la sécrétion d’Epo n’est pas autonome et qu’elle s’élève dans le sérum et dans l’urine après réduction de l’ordre de 20 % de la masse sanguine grâce à des saignées.

C’est l’étude de la pousse de progéniteurs érythrocytaires en culture qui a finalement constitué le moyen d’identification de cette entité.

Chez aucun des patients atteints, on ne met en évidence de pousse des progéniteurs érythrocytaires indépendante de la présence d’Epo ; pour affirmer ce fait, il est parfois nécessaire d’avoir recours à des techniques de culture utilisant des anticorps anti-Epo, des anticorps antirécepteurs de l’Epo ou même l’adjonction au milieu de la forme soluble du récepteur de l’Epo.

Dans la maladie de Vaquez, les BFU-E endogènes (comptées au douzième jour) persistent dans ces conditions de culture.

Dans les polyglobulies familiales en revanche, comme chez les individus normaux, la formation de colonies est abolie ou très largement supprimée après adjonction au milieu de culture des inhibiteurs précédents.

En revanche, les courbes dose/réponse de pousse de progéniteurs érythrocytaires en présence d’Epo montrent un déplacement vers la gauche indiquant la plus grande sensibilité des progéniteurs en présence de faibles doses d’Epo, si bien qu’un petit nombre de colonies hémoglobinisées (CFU-E J7) est encore visible quand plus aucune dose d’Epo n’est ajoutée au milieu de culture en dehors des facteurs stimulants contenus dans le sérum de veau foetal.

Cette situation diffère de ce qu’on sait actuellement être celle de la maladie de Vaquez, où la pousse endogène n’est pas contrôlée par un mécanisme mettant en jeu le couple Epo/récepteur de l’Epo.

La pousse des progéniteurs granulomonocytaires et mégacaryocytaires est normale dans l’érythrocytose familiale dominante.

Ce qui précède, joint à la preuve de l’absence d’effet stimulant du plasma, a conduit à rechercher l’existence d’altérations du récepteur de l’Epo.

Ce récepteur fait partie d’une famille dont les membres ont en commun la présence de quatre résidus cystéine dans le domaine cytoplasmique et d’un domaine tryptophane-sérine-X-tryptophane-sérine (WSXWS) où X représente un acide aminé quelconque.

Les membres de cette famille comportent de nombreux récepteurs pour les facteurs de croissance (interleukines 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, GM-CSF, G-CSF [granulocyte colony stimulating factor], C-mpl).

La présence de récepteurs de l’Epo dans la voie de différenciation érythroïde n’est constatée qu’à partir des BFU-E mûres.

Elle manque au stade préalable des BFU-E à prolifération lente.

Elle coïncide avec l’apparition d’une faible sensibilité à l’Epo des BFU-E précoces.

Les CFU-E sont très sensibles, elles, à l’Epo.

La sensibilité à l’Epo décline progressivement avec la maturation. Au-delà du stade érythroblaste acidophile, la sensibilité à l’Epo disparaît et les cellules comportent un nombre de récepteurs à l’Epo plus faible par cellule.

L’activation du récepteur à l’Epo induit un signal de prolifération cellulaire.

Cette activation se traduit par une phosphorylation du récepteur qui induit à son tour la phosphorylation d’autres protéines cytoplasmiques ou membranaires.

On connaît actuellement plusieurs modalités d’activation du récepteur à l’Epo.

L’activation physiologique corrrespond à la fixation de son ligand naturel, l’Epo.

Dans le domaine expérimental, l’activation peut résulter de la fixation du produit du gène env d’un virus d’érythroleucémie murine, la protéine transmembranaire appelée gp55 ou de la survenue de mutations dans certains domaines du gène récepteur.

Ces mutations augmentent son activité (délétion de la partie carboxyterminale intracytoplasmique siège d’une région régulatrice négative du récepteur), ou même confèrent à la cellule la capacité de proliférer en l’absence d’Epo (substitution d’une cystéine par une arginine au codon 129 du domaine extracytoplasmique).

Dans le domaine clinique, l’étude du nombre et de l’affinité des récepteurs, chez les individus atteints d’érythrocytose familiale dominante et chez les membres de leur famille, n’a pas montré d’anomalie.

L’analyse en southern blot de l’ADN génomique a démontré l’absence d’amplification génique, de réarrangement chromosomique et d’insertion de séquences homologues à la gp55 du gène env de la variante SFFV (spleen focus forming virus) du virus de Friend.

En revanche, dans une famille comportant 20 individus affectés par l’érythrocytose familiale dominante, le domaine intracellulaire C-terminal était le siège d’une mutation du nucléotide 6 002 (guanine remplacée par adénine), permettant de prédire la perte des 70 acides aminés terminaux de la molécule de récepteur à l’Epo.

L’étude de cette famille et de cinq autres correspondant à la même entité clinique confirme que dans la majorité des familles de polyglobulie primaire, familiale et congénitale, chez lesquelles une mutation du récepteur de l’Epo a été démontrée, cette mutation conduisait à la perte de la partie terminale du récepteur comportant un domaine régulateur négatif (six fois sur huit patients étudiés).

Il est clair cependant que ceci ne représente qu’une faible part des patients actuellement explorés.

D’autres mutations du récepteur de l’Epo peuvent être présentes dans d’autres domaines, notamment extracytoplasmiques, comme le suggèrent les études du récepteur murin, voire dans d’autres gènes.

2- Polyglobulies familiales congénitales secondaires :

Elles ont en commun une stimulation d’un système hématopoïétique normal par des quantités excessives d’Epo.

La plupart, on le sait, sont causées par une augmentation de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène, induisant une hypoxie tissulaire, par mutation de l’hémoglobine ou production diminuée de 2-3 DPG, et sont aisées à détecter cliniquement par la mesure de la P50.

D’autres moins bien connues, dont le caractère familial est plus difficile à mettre en évidence du fait de leur transmission souvent récessive, constituent, malgré leur rareté, un diagnostic différentiel de polyglobulie à connaître.

On suggère à leur origine l’existence d’une anomalie du mécanisme de régulation de l’Epo.

Sur la base d’une mesure des variations de l’activité érythropoïétique du sérum ou de l’urine après saignées réduisant la masse sanguine, plusieurs situations ont été observées.

L’étude la plus ancienne est en faveur, dans certaines de ces érythroses familiales secondaires, d’une sécrétion autonome d’Epo.

Plus récemment, la même équipe montre l’existence de polyglobulies congénitales secondaires à une production excessive d’Epo où cette production reste sensible à l’effet de phlébotomie, même en présence d’un hématocrite élevé.

Cette situation suggère l’existence d’une anomalie de fonction des récepteurs rénaux jouant un rôle régulateur de la sécrétion d’Epo.

Ce qui précède plaide en faveur d’une hétérogénéité de présentation clinique de ces patients.

Pourtant certains points communs ont été dégagés : la transmission presque toujours récessive, avec un certain nombre de cas sporadiques et une famille à transmission dominante ; le début très précoce, dès l’enfance, et l’élévation souvent considérable du taux d’hémoglobine et de l’hématocrite.

Il s’agit presque toujours de petites séries de patients n’affectant aucun groupe ethnique particulier.

La polyglobulie congénitale de Chuvashie est au contraire très particulière par sa fréquence (81 familles décrites en 1977 et plusieurs centaines d’enfants porteurs de l’affection).

Apparemment cantonnée à un groupe ethnique particulier, vivant dans une république autonome de la rive ouest de laVolga, sa transmission est autosomique récessive.

Il s’agit d’une érythrocytose isolée, considérable (valeur moyenne d’hémoglobine : 21,8 g/dL et hématocrite moyen : 76 %), symptomatique : céphalées, fatigue, gêne à l’exercice physique.

C’est une forme clinique grave, comportant un contingent important de mortalité précoce, le plus souvent par thrombose cérébrale.

Elle est secondaire à une hypersécrétion d’Epo mais les premières études ne sont pour l’instant pas en faveur d’une mutation du gène de l’Epo ni de son récepteur.

Critères du diagnostic de maladie de Vaquez :

Dans le courant des années 1960, sur la base d’un « consensus » entre hématologistes nord-américains, européens et israéliens rassemblés au sein du PVSG ont été jetées les bases de la classification des syndromes myéloprolifératifs sans chromosome Philadelphie.

Les critères, choisis en fonction des connaissances de l’époque, se fixaient pour but de n’inclure que des syndromes myéloprolifératifs indiscutables dans les protocoles prospectifs comparant l’efficacité des drogues alors disponibles.

Cette démarche rigoureuse, parfaitement codifiée, dont l’utilité n’est plus à démontrer, définit la polyglobulie vraie, polyglobulie primitive acquise ou maladie deVaquez, et élimine très efficacement les polyglobulies secondaires, en particulier les tumeurs rénales et les polyglobulies dont le mécanisme est relié à l’anoxie.

Malheureusement, cette démarche, écartant également les érythroses pures, a pour inconvénient principal de laisser hors du cadre des polyglobulies primitives celles qui sont en réalité les premières manifestations d’un syndrome myéloprolifératif.

L’heure est donc à la réévaluation de chacun des moyens diagnostiques utilisés depuis plus de 20 ans pour faire le diagnostic de maladie de Vaquez.

Le diagnostic de polyglobulie comporte plusieurs étapes :

– confirmer la réalité de l’élévation de la masse sanguine ;

– éliminer les causes les plus communes de polyglobulie secondaire ;

– rechercher des arguments en faveur du diagnostic de syndrome myéloprolifératif.

Comme les critères précédents du PVSG, ils comportent des critères majeurs ou des critères mineurs.

L’application de ces critères au diagnostic actuel de maladie de Vaquez est discutée ci-après.

A - Mesure de la masse sanguine :

En France, on réserve le terme de polyglobulie absolue ou volumétrique aux situations où existe une augmentation du volume globulaire total au-dessus des valeurs normales.

C’est dire l’importance que revêt la détermination du volume globulaire et du volume plasmatique.

Elles sont réalisées en utilisant la méthode de dilution.

L’indicateur diffuse dans le volume sanguin de manière homogène et reste dans ce volume.

Une mesure de la concentration de la substance indicatrice permet donc de mesurer le volume de dilution.

Les traceurs isotopiques utilisés sont les hématies marquées au chrome 51 ou au technétium 99 pour mesurer le volume globulaire et l’iode 125 ou 131 pour le volume plasmatique selon les recommandations du Comité international de standardisation en hématologie (1980).

Bien que l’examen soit techniquement facile à réaliser et de précision excellente, l’interprétation des résultats soulève quelques difficultés qui tiennent à la détermination des valeurs normales, qui doivent être comparées nécessairement aux résultats observés.

L’expression des résultats en mL par kg, traditionnelle depuis que le PVSG a défini la polyglobulie volumétrique par des valeurs de volume globulaire supérieures à 36 mL/kg de poids chez l’homme et de 32 mL/kg de poids chez la femme, peut conduire à des conclusions inexactes chez les sujets obèses dans la mesure où le tissu adipeux est avasculaire et sous-estime le volume globulaire.

Pour répondre à cette objection, on a recommandé de rapporter les valeurs normales à la masse de tissu maigre (lean body mass).

Cependant, les valeurs normales sur lesquelles sont fondées les équations qui permettent de calculer, chez un individu de poids et de taille connus, la valeur idéale du volume globulaire et du volume plasmatique ont été obtenues par des méthodes critiquables, ce qui a récemment conduit à une réévaluation de ces valeurs.

Les valeurs obtenues ont été rapportées à la surface corporelle calculée par la méthode traditionnelle de Du Bois et Dubois.

De 98 à 99 % des individus normaux ont des volumes qui s’écartent au maximum de ± 25 % par rapport aux valeurs théoriques calculées par la formule précédente.

Il est donc recommandé de considérer comme pathologiques les valeurs mesurées qui s’écartent de plus de 25 % des valeurs calculées à partir du poids, de la taille, du sexe et de l’âge des patients étudiés.

Au terme de ces explorations, on peut définir la polyglobulie ou polyglobulie absolue ou volumétrique comme une augmentation du volume globulaire supérieure à 125 % des valeurs théoriques.

La polyglobulie relative correspond aux situations où l’hématocrite est élevé au-dessus des valeurs considérées comme à la limite supérieure de la normale (supérieur à 0,51 chez l’homme et à 0,47 chez la femme) tandis que le volume globulaire est compris dans les limites de valeur normale avec un volume plasmatique diminué de plus de 25 %.

B - Arguments destinés à éliminer le diagnostic de polyglobulie secondaire :

1- Étude de la saturation en oxygène du sang artériel :

La saturation en oxygène du sang artériel (SaO2) supérieure à 92 % est le critère unique proposé par le PVSG pour éliminer les polyglobulies (ou érythrocytoses secondaires) dues à une désaturation du sang artériel en oxygène. Pearson a récemment insisté pour qu’une stratégie plus élaborée soit appliquée chez les patients dont l’histoire clinique suggère des épisodes intermittents, notamment nocturnes, de désaturation.

En outre, la mesure de la SaO2 ne suffit pas à éliminer les polyglobulies liées au tabac, qui conjuguent une élévation de l’oxycarbonémie, dont l’effet essentiel est un déplacement de la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine, une réduction du volume plasmatique élevant l’hématocrite de un à deux points par rapport à une population de non-fumeurs et les conséquences diverses du tabagisme sur la fonction respiratoire.

2- Recherche des causes tumorales :

La recherche d’une cause rénale constitue la plus importante des étapes conduisant à l’élimination d’une sécrétion inappropriée d’Epo d’origine tumorale.

L’intérêt de l’échographie rénale est dans ce contexte de permettre l’étude des reins, l’examen du foie et des vaisseaux sus-hépatiques ou spléniques et la mesure de la taille de la rate.

C - Arguments en faveur du diagnostic de polyglobulie primitive :

1- Splénomégalie :

La présence d’une splénomégalie palpable, tout au moins lorsqu’il n’existe pas de pathologie associée pour l’expliquer, est une constatation d’une importance considérable en faveur du diagnostic de polyglobulie de Vaquez.

Cet argument a été inclus au rang des critères majeurs du PVSG.

L’échographie abdominale faisant partie de l’examen systématique de tout polyglobulique, la tendance est de substituer le critère échographique au critère clinique, voire de préconiser une étude scintigraphique.

Cette assimilation soulève en réalité de très sérieux problèmes.

Si l’on admet que pour devenir aisément palpable, la rate doit tripler de taille, il est indispensable, pour interpréter sans risque d’erreur les données échographiques, de déterminer les limites de variations physiologiques de la rate chez les individus normaux et surtout dans les polyglobulies secondaires.

Reste encore à déterminer quels sont les paramètres spléniques à prendre en considération, longueur totale ou plus large surface, pour assurer la comparaison.

Pour cette raison, si on conserve à la splénomégalie cliniquement palpable la valeur de critère majeur de polyglobulie de Vaquez, il paraît raisonnable de ne considérer que comme critère mineur les splénomégalies observées d’une autre manière que par la palpation clinique.

2- Hyperplaquettose :

L’hyperplaquettose, supérieure à 400x109/L en dehors des causes inflammatoires ou néoplasiques ou d’une carence martiale, qui doit être systématiquement éliminée avant l’étude du volume globulaire, garde ses prérogatives de critère mineur ; en revanche les anomalies qualitatives plaquettaires qu’ont tenté d’introduire les auteurs anglais : élévation du rapport ATP/ADP, élévation du diamètre moyen des plaquettes (PDW), n’ont guère eu de succès en raison de leur caractère inconstant et des difficultés de standardisation qu’ont soulevées ces examens.

3- Hyperleucocytose :

L’hyperleucocytose supérieure à 12x109/L ou mieux la polynucléose supérieure à 10x109/L gardent leur valeur de critère mineur, à condition de tenir compte du fait qu’il s’agit ou non d’un individu fumeur.

Lorsqu’il existe une suspicion de polyglobulie du fumeur, en présence d’un tabagisme extrême, ce critère perd toute signification et Pearson propose que, chez les fumeurs en général, la limite de la polynucléose significative soit portée à 12x109/L.

4- Éléments sans valeur :

En revanche, comme cela est entré dans la pratique en France depuis plusieurs années, le score des phosphatases alcalines leucocytaires, le dosage de la vitamine B12 sérique et la mesure de la capacité de saturation de la transcobalamine sont abandonnés, en raison de la non-spécificité de leurs résultats et des causes d’erreurs.

5- Critères positifs nouveaux de syndrome myéloprolifératif :

* Intérêt de la culture des progéniteurs érythroïdes dans le diagnostic de la maladie de Vaquez :

Vu sous l’angle de l’aide au diagnostic, le phénomène de pousse spontanée ou endogène des colonies érythrocytaires décrit en 1974 par Prchal et Axelrad est maintenant proposé comme critère de PV.

À quelques exceptions près, il s’observe chez tous les patients atteints de polyglobulie primitive, aussi bien dans les formes classiques de la maladie qu’au cours des formes latentes (Thromboses splanchniques) qu’il permet de définir.

La présence d’une pousse spontanée peut être mise en évidence après traitement lorsque les résultats hématologiques se sont normalisés, mais une diminution ou même la disparition du phénomène a été signalée après chimiothérapie ou interféron.

Il disparaît également à la phase de transformation aiguë.

Ce phénomène n’est pas limité à la maladie de Vaquez mais s’observe au cours d’autres syndromes myéloprolifératifs primitifs, notamment les thrombocythémies essentielles.

Ce phénomène de pousse spontanée n’a jamais été mis en évidence dans plus de 100 exemples de polyglobulies ou d’érythrocytoses secondaires.

Quelques exemples de résultats discordants, où le phénomène a été observé chez les témoins ou dans un petit nombre de polyglobulies secondaires, s’expliquent a priori par des différences concernant le milieu (sérum de veau foetal) ou les techniques de culture, voire les modalités de lecture des résultats.

Dans les cas, pour l’instant exceptionnels, d’érythrocytoses familiales autosomiques dominantes par mutation du récepteur de l’Epo, le phénomène observé est en réalité une hypersensibilité des progéniteurs et non une réelle indépendance vis-à-vis de l’Epo.

Ce phénomène de pousse endogène s’observe aussi souvent dans les cultures de sang que de moelle provenant de polyglobulie (mais peut-être avec une spécificité plus grande dans la moelle).

La population de progéniteurs érythrocytaires capable de cette pousse « spontanée » est habituellement inférieure à 60 %.

Elle est souvent en réalité très faible : 2 à 3 %.

Ces considérations et les réserves signalées plus haut, notamment celles concernant les limites de reproductibilité du test (petit nombre et faible intensité de l’hémoglobinisation des BFU-E endogènes) et les difficultés de standardisation des milieux de culture utilisant le serum de veau foetal, ont amené à proposer d’autres modalités de culture.

Il s’agit de la mise en évidence de l’hypersensibilité des BFU-E de PV, qui en présence de concentrations croissantes d’Epo donnent un nombre de colonies plus élevé à concentration identique que des cellules de témoins normaux.

Un autre test proposé repose sur la mise en évidence, en milieu sans sérum, d’un excès de sensibilité des BFU-E précoces de PV, cultivées en présence d’Epo et l’IL 3, ce qui permet de les différencier des progéniteurs normaux ou de polyglobulies secondaires.

L’intérêt de ces tests résiderait en la présence d’une quantité notable d’Epo dans le milieu rendant la lecture plus aisée.

Pour l’instant, l’absence de validation définitive de ces techniques, ou leur complexité relative, invite à s’en tenir à la culture des cellules mononucléées non adhérentes du sang périphérique sur milieu dépourvu d’Epo avec une lecture des colonies endogènes à J 14 ou des progéniteurs de la moelle dans les mêmes conditions à J 8, en utilisant toujours comme témoin des cellules de même origine cultivées en présence d’Epo.

Ainsi définie, cette « pousse spontanée » est considérée comme un test positif objectif et relativement spécifique de maladie de Vaquez.

* Dosage de l’Epo sérique :

L’introduction d’un dosage radio-immunologique de l’Epo et plus récemment d’une méthode fiable de dosage par kit Elisa (enzyme-linked immunosorbent assay) a permis de démontrer que dans la PV les taux d’Epo sériques sont diminués ou situés aux limites inférieures de la normale.

En revanche, dans les polyglobulies secondaires les valeurs sont soit augmentées, soit normales.

Après traitement destiné à ramener les valeurs de l’hématocrite dans les limites de la normale, les taux sériques d’Epo restent au-dessous des limites inférieures de la normale dans les deux tiers des cas de PV.

Il est habituel maintenant d’effectuer un dosage d’Epo lors du diagnostic de polyglobulie.

En raison des variations du taux d’Epo en fonction du taux d’hémoglobine, l’interprétation correcte des valeurs observées nécessite une correction en fonction de l’hématocrite.

Une certaine variabilité des résultats obtenus avec les kits de dosage actuellement disponibles oblige chaque laboratoire à déterminer ses propres valeurs de référence.

S’il est vrai qu’un taux élevé d’Epo pourrait inciter à faire porter le diagnostic de polyglobulie secondaire et un taux bas celui de polyglobulie primitive, cette opposition n’est pas absolue puisqu’il existe de façon presque constante une zone d’incertitude dans les valeurs normales et que les études comparant maladie de Vaquez et polyglobulies secondaires ont montré quelques résultats aberrants dans les deux éventualités.

On conçoit que tout ceci conduit à ne reconnaître à ce dosage que la valeur d’un critère mineur.

* Données histomorphologiques :

La réalisation d’une biopsie médullaire est préconisée de très longue date lors de l’exploration d’un syndrome myéloprolifératif.

Malgré des travaux importants faits à propos de l’histologie médullaire dans la polyglobulie de Vaquez, ce n’est que relativement récemment, et surtout sous l’impulsion des auteurs allemands que l’inclusion des résultats de cet examen dans les critères diagnostiques positifs de maladie de Vaquez a été proposée.

Beaucoup de classifications élèvent maintenant les données de la biopsie médullaire au rang de critère diagnostique majeur. Les arguments plaidant en faveur du diagnostic de syndrome myéloprolifératif ont déjà été envisagés.

Rappelons seulement ici l’existence d’une augmentation modérée à forte de la richesse médullaire, la mise en évidence de mégacaryocytes de grande taille, regroupés en amas ayant un cytoplasme mature et des noyaux multilobés, comparables dans une certaine mesure à ceux que l’on observe dans la thrombocytémie essentielle.

La myélofibrose ne fait pas partie du tableau histologique caractéristique au moment du diagnostic de PV.

En fait, sa présence sur des prélèvements médullaires même précoces est un fait connu.

Ainsi la constatation d’une densification de la réticuline, surtout si elle s’exprime avec cette netteté, voire l’existence d’une fibrose collagène peuvent être considérées comme des arguments forts en faveur du diagnostic de syndrome myéloprolifératif.

* Nature clonale de la maladie de Vaquez :

La nature clonale de la maladie de Vaquez étant très solidement établie, la mise en évidence d’une hématopoïèse clonale devrait pouvoir constituer un bon argument en faveur du diagnostic de syndrome myéloprolifératif.

Des anomalies du caryotype, pouvant être observées selon certaines études au maximum chez 20 %des patients, sont sans doute actuellement la façon la plus banale de faire la preuve d’une hématopoïèse clonale.

Cependant, l’absence d’anomalie cytogénétique spécifique fait que l’analyse du caryotype n’est pas préconisée lors du diagnostic de polyglobulie.

Les techniques de mise en évidence d’une hématopoïèse monoclonale s’appuyant sur le principe de l’inactivation au hasard d’un des deux chromosomes X chez la femme normale ont été décrites plus haut (Anomalies cellulaires).

Techniquement, cette démarche suppose une étude de l’inactivation d’un des gènes liés à l’X et comporte deux étapes.

L’une consiste à s’assurer que la patiente est bien « hétérozygote », donc « informative » pour le gène en question, l’autre à rechercher si l’inactivation s’est faite ou non au hasard.

Ce problème est compliqué par l’existence chez 23 % des femmmes normales d’une inactivation biaisée sans signification pathologique et cette éventualité ne peut être éliminée que par l’étude d’un tissu témoin.

Les lymphocytes T sont généralement choisis, ce qui implique la nécessité d’étudier les diverses fractions cellulaires séparées avec un degré de pureté suffisant.

La validation des techniques proposées est moins avancée que dans la thrombocytopénie essentielle.

Les érythrocytoses pures, où leur intérêt serait le plus net, sont objectivement rarement observées dans la population féminine.

Seul l’avenir indiquera la place qui pourra leur être réservée.

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