Physiopathologie des infections bactériennes Cours de Bactériologie
Les bactéries pathogènes sont transmises à
l'hôte de diverses façons :
1) ingestion
d’eau ou d’aliments contaminés (voie
digestive);
2) inhalation d’aérosols ou de
particules associés à des bactéries (voie
respiratoire);
3) inoculation cutanée par
contact direct ou indirect (voie cutanée);
4)
inoculation muqueuse directe par la salive ou
les sécrétions sexuelles;
5) inoculation
transcutanée par les insectes (Yersinia
pestis, Rickettsia, Borrelia...), par
traumatismes ou manipulations iatrogènes.
La 1ère phase du processus infectieux est
l'implantation (ou colonisation) par les
bactéries du revêtement cutanéo-muqueux.
Suit éventuellement d’une dissémination des
bactéries par la circulation sanguine et de
métastases infectieuses à de nombreux
organes.
Ces grandes étapes sont
retrouvées pour tous les micro-organismes
(virus bactéries, parasites) et comportent
donc une porte d’entrée, une dissémination
sanguine éventuelle, des métastases
infectieuses.
Le diagnostic bactériologique
s’attachera donc à rechercher les microorganismes
à partir de ces trois phases du
processus infectieux.
L’implantation des bactéries
:
Les bactéries virulentes s’implantent sur la
peau et les muqueuses en franchissant les
diverses barrières. Les mécanismes qui
permettent de franchir ces barrières, sont
peu connus : la mobilité des bactéries, la
sécrétion de certaines enzymes (mucinases),
vitesse de croissance, compétitivité pour la
quête de nutriments ou des ions ferriques
(sidérophores), production de bactériocines
...
Au contact des cellules épithéliales de
la peau ou des muqueuses, les bactéries
adhérent et se multiplient au contact des
cellules, formant des microcolonies.
Des
ligands bactériens ou adhésines
reconnaissent spécifiquement des
récepteurs cellulaires et sont des structures
de nature variée :
1) des pili (fimbriae), spicules protéiques ou
glycoprotéines associés à la membrane
externe des bactéries à Gram négatif (pili
CFA, K88, K99 de E. coli entéropathogènes,
hémagglutinines de V cholerae ou de
Bordetella pertussis).
2) des protéines ancrées dans la membrane
externe (protéine II du gonocoque)
3) des acides lipotéchoïques (Streptococcus
pyogenes, Streptococcus mutans)
4) des polyosides capsulaires (antigènes K
de E. coli, capsule de Streptococcus
mutans).
Les récepteurs cellulaires des adhésines
sont des glycoprotéines ou glycolipides
exposés à la surface de la membrane
cytoplasmique, dont la fonction normale est
dévoyée par les adhésines.
Ces récepteurs
sont parfois des molécules libres
(fibronectine, albumine...), qui se fixent
ensuite sur un support solide (dents) ou sur
les cellules épithéliales.
Par exemple, la fibronectine, une glycoprotéine du sérum, de
la salive et du tissu conjonctif est le
récepteur de l’attachement de Streptococcus
pyogenes et S mutans et s’adsorbe à la
surface des cellules de l’oropharynx et des
dents.
Ces interactions bactéries-cellules
expliquent :
1) la spécificité d’espèce du pouvoir
pathogène de certaines bactéries : par
exemple, le gonocoque, le méningocoque,
Salmonella typhi, Haemophilus influenzae,
certaines E. coli de diarrhée sont des
bactéries strictement humaines, et d’autres
bactéries ne sont pathogènes que pour
certaines espèces animales (E. coli K88 pour
le porc...) et pas pour l'homme.
2) la sensibilité individuelle des individus :
la
densité des récepteurs de certaines adhésines varie selon l’âge (nouveau-né) et
selon les individus.
Ainsi, certaines
personnes présentant des infections
récidivantes pourraient exprimer une forte
densité de certains récepteurs à la surface
de certaines cellules épithéliales (infections
urinaires récidivantes à E. coli, portage
chronique de S. aureus, streptocoque B, N.
gonorrhoeae...).
Chez l’animal, la sensibilité
par exemple des porcs à l’infection par E. coli K88 (diarrhées mortelles des veaux
nouveau-nés) est liée à l’expression d'un
récepteur codé par un gène autosomique
dominant.
Ce type d’observation permet de
comprendre un des mécanismes expliquant
la grande variabilité individuelle de la
sensibilité aux infections.
La croissance in vivo des bactéries
:
Après l’implantation des bactéries sur le
revêtement cutanéo-muqueux, la suite du
processus infectieux est très variable suivant
les facteurs de virulence des espèces
pathogènes.
Il existe des bactéries à
multiplication extracellulaires et des bactéries
intracellulaires.
Ces bactéries peuvent rester
à la porte d'entrée ou envahir les tissus.
Bactéries toxinogènes
:
Parmi les bactéries productrices de toxines
(toxinogènes), certaines n'envahissent pas
les tissus et restent confinées au revêtement cutanéo-muqueux.
Les signes cliniques de la
maladie sont alors liés à la production de
toxines qui agissent localement sur
l’épithélium (V cholerae, E. coli
entéropathogènes...) ou à distance par
diffusion sanguine et fixation sur des tissus
ou organes cibles (Corynebacterium
diphtheriae, Clostridium tetani, exfoliatine de
Staphylo-coccus aureus...).
D’autres
bactéries toxinogènes envahissent les tissus
à la porte d’entrée, en traversant les cellules
épithéliales, puis atteignent la sousmuqueuse
et peuvent éventuellement donner
des septicémies (S. aureus, Streptococcus
sp...).
Cette dissémination est favorisée par la
production d'enzymes, d'exotoxines
cytolytiques et de LPS agissant dans le
micro-environnement tissulaire des
bactéries.
Ces substances concourent aux
destructions tissulaires et à la lyse cellulaire
(macrophages...) et à la protéolyse des
protéines inflammatoires (complément...).
Les bactéries extra-cellulaires peuvent aussi
être protégées de la phagocytose par une
capsule. protégeant les bactéries.
Bactéries à croissance intracellulaire
:
Certaines bactéries se multiplient dans les
cellules épithéliales (parfois dans des
cellules endothéliales ou
parenchymateuses...), trouvant ainsi un gîte
à l’abri des défenses immunitaires
(Salmonella typhimurium, Yersinia
pseudotubercu-losis, Y enterocolitica,
Shigella sp , E coli entéro-invasives).
Ces
bactéries peuvent même parfois croître dans
les macrophages et les cellules dendritiques
et être véhiculées à distance par voie
lymphatique et sanguine.