Pancréatite aiguë : diagnostic, pronostic et traitement Cours d'Hépatologie
Définition
:
La pancréatite aiguë (PA) n’est pas une entité actuellement facile à
définir.
En effet, il n’est pas clairement établi si la pathogénie
de cette affection est unique quelle que soit son étiologie ou si elle
dépend de celle-ci.
Si l’on définit la PA comme une atteinte
anatomoclinique survenant sur un pancréas sain et évoluant vers
une résolution sans séquelles, la PA alcoolique « vraie » est rare.
S’il
n’existe pas de filiation unanimement établie entre la PA et la
pancréatite chronique calcifiante (en dehors des pancréatites
d’amont sur sténose cicatricielle), d’authentiques pancréatites
chroniques alcooliques se révèlent par une ou des poussées de PA
dont la gravité peut en imposer pour d’authentiques PA « vraies ».
Néanmoins, lors de la dernière conférence de
consensus d’Atlanta, la PA a été définie cliniquement par
l’association d’une douleur compatible associée à une augmentation
de l’amylase et/ou de la lipase.
À côté de ces problèmes nosologiques, la PA pose peu de problèmes
diagnostiques, mais la recherche de son étiologie peut être délicate.
Cette enquête est importante tant pour le traitement de la poussée
actuelle que pour la prévention de sa récidive.
Physiopathologie. Pathogénie
:
Il est classique de différencier les PA d’intensité modérée et sévère,
qui correspondent globalement à la pancréatite oedémateuse et à la
forme nécroticohémorragique.
Cette dernière, qui représente 15 à
20 % des PA, se caractérise par une évolution émaillée de
complications locales et/ou systémiques.
A - ANATOMIE. PATHOLOGIE
:
Sur le plan anatomopathologique, la pancréatite se traduit
essentiellement par un oedème interstitiel.
Des zones microscopiques
de nécrose de parenchyme non viable peuvent exister, mais elles n’atteignent pas l’espace péripancréatique.
À l’opposé, la pancréatite
peut s’exprimer macroscopiquement sous la forme d’une
dévitalisation étendue avec des zones de nécrose disséminées, extrapancréatiques et confluentes.
Quelle que soit la pathogénie de la PA, l’aspect
anatomopathologique est similaire dans au moins 95 % des cas.
Trois
types de nécrose pancréatique ont été décrits :
– la nécrose de type I est caractérisée par une nécrose du tissu
graisseux et interstitiel atteignant les vaisseaux avec effusion
hémorragique ; la nécrose du tissu graisseux est consécutive à
l’action de la lipase activée ou de la phospholipase AII ;
– la nécrose de type II est plus particulièrement consécutive à
des perturbations vasculaires dans le cadre des maladies extrapancréatiques.
Elle siège au niveau des canaux ou autour de
ceux-ci, avec prédominance des lésions au niveau des acini ;
– la nécrose de type III est rarement rencontrée et serait
caractéristique des pancréatites d’origine infectieuse, avec effet
cytotoxique direct sur les cellules acineuses, sans nécrose du tissu
graisseux ou périductulaire.
Ainsi, dans la forme de type I, la nécrose intrapancréatique
prédomine au niveau de la graisse interlobulaire ; son importance
dépend directement de la quantité de tissu adipeux présent à ce
niveau.
Il existe une continuité entre la nécrose graisseuse intrapancréatique et péripancréatique. La nécrose est bordée par un
infiltrat de polynucléaires et de macrophages.
Dans la nécrose de type II, les foyers nécrotiques sont
périductulaires avec peu, voire pas de nécrose du tissu graisseux
voisin.
L’infiltrat de polynucléaires siège préférentiellement autour
de l’épithélium des canaux interlobulaires de petite ou de moyenne
taille, remplis de précipités éosinophiles.
Au contraire, la nécrose de type III prédomine au niveau des cellules
acineuses avec une distribution focale hétérogène, sans nécrose du
tissu graisseux ou ductulaire.
Cet aspect est préférentiellement
rencontré au cours de certaines affections virales (rougeole, infection
à coxsackie B ou à cytomégalovirus), voire au cours d’infections
bactériennes (leptospirose).
Sur le plan ultrastructural, les cellules acineuses adjacentes aux aires
de nécrose apparaissent petites et pauvres en granules.
Quelques
granules de zymogène persistent et sont situés le long de la
membrane cellulaire.
Certaines de ces cellules présentent de larges
vacuoles à l’intérieur desquelles des résidus membranaires ou des
granules de zymogène sont visibles.
C’est à cet endroit, au contact
des foyers de nécrose graisseuse, que des cellules acineuses non
nécrotiques forment ce que l’on appelle des complexes tubulaires,
c’est-à-dire des acini avec un rétrécissement de la lumière qui est
remplie par des sécrétions PAS positives plus ou moins fibrillaires.
B - PATHOGÉNIE
:
1- Mécanismes généraux
:
Deux hypothèses pathogéniques sont actuellement privilégiées.
La
première théorie repose sur la théorie de la destruction des cellules
acineuses par perturbation de leur fonctionnement intracellulaire
avec une libération incontrôlée d’enzymes pancréatiques ; celles-ci
sont activées par les hydrolases lysosomiales avec diffusion de cette
activation au niveau de l’espace interstitiel.
La seconde théorie est
celle de l’obstruction canalaire avec reflux de bile entraînant une
augmentation de la pression intracanalaire, quelle qu’en soit la cause
(obstacle persistant, oedème, spasme sphinctérien).
L’activation des
enzymes pancréatiques, consécutive à leur effusion à partir des
petits canaux vers l’espace interstitiel, est une hypothèse
conceptuellement intéressante mais difficile à prouver.
Les mécanismes intracellulaires de la PA comportent, quelle que soit
l’étiologie, une activation du trypsinogène à l’origine des processus
d’autodigestion.
La découverte récente de mutations du gène
du trypsinogène cationique, au cours des pancréatites héréditaires,
renforce cette hypothèse de l’activation prématurée intracellulaire du trypsinogène au cours de la PA.
L’activation du trypsinogène
peut cependant se faire par la voie du stress oxydatif et non pas par
la voie usuelle de la cathepsine B.
L’activation anormale du
trypsinogène au niveau des vacuoles de la cellule acinaire est
consécutive à un défaut d’exocytose : les phénomènes vasculaires
sont habituellement secondaires et consécutifs à une activation des
grains de zymogène par les enzymes lysosomiales.
Cette activation
du trypsinogène est classiquement attribuée aux enzymes lysosomiales comme la cathepsine B.
L’activation par la voie du
stress oxydatif est corroborée par le profil de peroxydation lipidique
et par la déplétion de mécanisme de défense contre le stress oxydatif
(glutathion).
Parmi les modèles expérimentaux de pancréatite,
la PA induite par la céruléine est un modèle basé sur la perfusion
intraveineuse de céruléine qui induit des modifications lésionnelles
dès la première heure et maximales entre 6 et 12 heures.
Ce modèle
présente l’avantage d’être non invasif mais n’induit que des lésions
modérées.
Néanmoins, dans ce modèle, les études ultrastructurales
en microscopie électronique mettent en évidence des anomalies des
mitochondries qui évoluent parallèlement à la déplétion
pancréatique en acide adénosine triphosphate (ATP).
Les
mécanismes moléculaires impliquent la voie des mitogen activated
proteins kinase (MAPK) qui sont un groupe de protéines sérinethréonine
kinase rapidement mais transitoirement activées.
Cette
phosphorylation des MAP kinase inhibe l’interaction entre des
éléments du cytosquelette, en particulier des microfilaments et
microtubules à l’origine des modifications du mécanisme
sécrétoire.
2- Mécanismes selon l’étiologie
:
Si les mécanismes ultimes des lésions pancréatiques au cours d’une
PA ont été largement décrits, les mécanismes respectifs consécutifs à
la prise d’alcool ou à la migration lithiasique demeurent encore
obscurs.
Concernant la toxicité pancréatique de l’alcool, trois
hypothèses physiopathologiques principales ont été successivement
privilégiées :
– le reflux du contenu duodénal dans les canaux pancréatiques ou
biliaires par diminution du tonus du sphincter d’Oddi induit par
l’alcool ; l’entérokinase, présente dans ce matériel de reflux,
favoriserait l’activation des enzymes pancréatiques in situ ;
– une augmentation des sécrétions pancréatiques induite par une
prise aiguë d’alcool associée à une élévation du tonus du sphincter
d’Oddi ;
– enfin, une toxicité pancréatique directe de l’alcool, ou de ses
métabolites, responsable d’une activation protéasique intra-acineuse
prématurée, est évoquée devant l’augmentation de la concentration
des enzymes pancréatiques activées au niveau du parenchyme
pancréatique dans les modèles expérimentaux.
De plus, la
prévention des PA expérimentales par les inhibiteurs des protéases,
et le déclenchement par l’alcool des poussées de PA au cours de la
pancréatite héréditaire secondaire à une autoactivation intraacineuse
du trypsinogène sont autant d’arguments en faveur de cette
dernière hypothèse.
Ainsi, l’alcool pourrait perturber l’équilibre intra-acineux entre
protéases et inhibiteurs des protéases, ou participer à la fragilisation
des granules de zymogène dont les membranes présentent une
diminution de la protéine GP2 consécutive à la production locale
d’éthylesters d’acides gras et/ou de cholestéryl esters.
Ces composés
sont issus du métabolisme hépatique ou pancréatique non oxydatif
de l’éthanol et compenseraient la faible production pancréatique des
métabolites oxydatifs de type acétaldéhyde dénués de toxicité
pancréatique.
Le mécanisme de la PA biliaire n’est également pas univoque,
mais résulte d’une obstruction plus ou moins prolongée de la
jonction biliopancréatique par un calcul biliaire.
Cette théorie repose
notamment sur la mise en évidence plus fréquente de lithiase dans
les selles de patients présentant une PA biliaire comparées aux
patients lithiasiques ne présentant pas de PA.
Ainsi, la physiopathogénie de la PA biliaire associe trois phases : une première phase de lithogenèse puis de migration, une seconde phase
de contact et d’obstruction des voies pancréatiques par la lithiase
biliaire, et une dernière phase d’hyperpression de la papille vers la
région acineuse déclenchant les lésions.
Les PA biliaires surviennent
chez des patients souffrant de maladies lithiasiques dont les facteurs
de risque sont connus (âge, sexe féminin, multiparité, obésité, hypertriglycéridémie).
Chez les patients lithiasiques, les facteurs de
risque de développer une PA en rapport avec le calcul biliaire sont
liés à l’existence de calculs inférieurs à 5 mm ou d’allure muriforme.
Il est possible également que des minicalculs, voire des cristaux
microscopiques, soient à l’origine de PA, ce qui pourrait expliquer
un à deux tiers des PA initialement inclassées et dites
idiopathiques.
Ainsi, des situations favorisant le sludge
vésiculaire, comme la grossesse ou la nutrition parentérale, peuvent
être associées à des PA biliaires.
Les seuls facteurs établis
prédisposant à la migration d’un calcul vésiculaire sont la taille du
calcul et le diamètre du canal cystique.
Ce dernier est plus large
chez les patients lithiasiques présentant une PA biliaire que chez les
patients ne présentant pas cette complication ; ce facteur pourrait
expliquer que les PA biliaires d’origine lithiasique chez l’homme
sont plus fréquentes que chez la femme (porteurs de lithiase
vésiculaire) du fait d’un canal cystique plus large chez l’homme.
Ces trois phases ne sont pas mutuellement exclusives.
En fait, la
seconde phase dite de contact entre le calcul biliaire et les voies
pancréatiques constitue une étape clé mais dont la réalité est très
débattue : il pourrait s’agir, soit d’une impaction, soit de migrations
répétées associées à une réaction oddienne spastique ou
oedémateuse.
L’existence d’un canal commun biliopancréatique qui
augmente le risque de PA biliaire est un argument en faveur de
l’importance de cette phase, même si cette anomalie n’apparaît pas
indispensable.
L’augmentation de fréquence de calcul impacté, qui
est corrélée à la précocité de sa recherche, est un argument pour la
réalité d’un tel phénomène, même si celui-ci est éphémère.
La
troisième phase dite phase pancréatique rejoint l’hypothèse d’un
reflux biliopancréatique ou duodénopancréatique.
Cependant,
l’injection rétrograde intrapancréatique de bile à pression normale
n’entraîne pas de PA, et en cas d’impaction, la pression
intrapancréatique reste supérieure à la pression intrabiliaire.
Néanmoins, dans les modèles animaux, la ligature isolée du canal
pancréatique suffit à déclencher une PA par hyperpression dans les
canaux pancréatiques, ce qui apparaît comme un élément primordial
du déclenchement de la PA en dehors d’un reflux biliopancréatique
ou duodénopancréatique.
Épidémiologie. Étiologie
:
L’alcool et la lithiase biliaire sont responsables de 60 à 95 %
des PA.
L’importance de l’alcoolisme varie en fonction des régions
mais peut prendre en compte jusqu’à 90 % des PA, notamment en
Afrique du Sud.
En France, des études ont montré que ces deux
étiologies représentaient 75 % des PA. Ainsi, l’incidence de la PA
dans la population générale varie entre 0,1 et 0,2 ‰ habitants/an.
Dans la population de sujets lithiasiques, cette incidence passe à 15
(24 chez l’homme et 11 chez la femme), la cholécystectomie ne
permettant pas d’atteindre un taux d’incidence comparable à celui
de la population générale (2 ‰ habitants/an chez les sujets cholécystectomisés).
A - ALCOOL
:
Il existe une controverse actuelle, quant à l’existence d’une PA
d’origine alcoolique en dehors de la pancréatite chronique. Depuis
l’hypothèse de la séquence « nécrose-fibrose » à l’origine de la
question concernant la relation entre PA et pancréatite chronique
alcoolique, il était classique de considérer les PA et les pancréatites
chroniques comme deux entités distinctes.
Cette classification
reposait notamment sur des constatations autopsiques qui
ont mis en évidence, parmi 4 000 autopsies non sélectionnées, des
lésions de PA chez 25 sujets, et des lésions de PA chez seulement deux des 51 patients décédés par ivresse aiguë et massive.
Une
autre série autopsique de 405 patients décédés de pancréatite avait
mis en évidence, chez 131 d’entre eux, des lésions relevant
uniquement d’un processus lésionnel aigu.
Dans les séries
cliniques, les résultats, source de confusion, présentent des
arguments pour et contre une filiation.
Dans une première série de
144 patients ayant présenté une PA rattachée à la prise d’alcool, 95
ont présenté des signes compatibles avec le diagnostic de pancréatite
chronique (calcifications, données biopsiques ou nécropsiques,
déficit sécrétoire exocrine) ; 39 patients ne présentaient aucun de ces
signes au cours d’un suivi identique.
Dans la seconde étude
incluant 122 patients hospitalisés pour PA alcoolique inaugurale, 61
ont présenté des signes de pancréatite chronique d’emblée ou au
cours de la première année de suivi et 40 ultérieurement ; parmi
les 114 patients ayant un suivi suffisant, le diagnostic de pancréatite
chronique était porté chez 92 % d’entre eux.
Le diagnostic de
pancréatite chronique reposait soit sur la mise en évidence de
calcifications, soit sur la survenue d’une insuffisance pancréatique
endocrine.
Ainsi, dans ces deux études, le diagnostic de PA sans
pancréatite chronique sous-jacente était retenu chez respectivement
34 et 8 % des patients initialement inclus et suivis pour une PA
rattachée à la prise d’alcool.
Le diagnostic de pancréatite chronique
chez un sujet alcoolique était notamment basé sur la mise en
évidence d’anomalies du canal de Wirsung objectivées par la pancréatographie qui n’apparaissent cependant que pour
une pancréatite chronique évoluée.
Il existe par ailleurs des
anomalies du canal du Wirsung suffisamment importantes pour
évoquer une pancréatite chronique chez 16 % des patients (n = 50)
ayant présenté une PA biliaire.
Cependant, d’autres études ont
montré que la pancréatographie se normalise après une PA
nécrotique grave, en 2 à 23 mois chez les patients non alcooliques.
Il est donc difficile de savoir si les lésions canalaires observées au
décours d’une PA sont des signes faussement positifs de pancréatite
chronique, ce que seule l’histologie permettrait d’affirmer.
B - CRISTAUX DE BILE
:
D’autres causes plus rares de PA doivent être recherchées.
Parmi les
10 à 20 % de PA idiopathiques diagnostiquées par une exploration
standard, il existe dans 50 % des cas des cristaux dans la bile dont la
responsabilité dans la PA peut être incriminée.
Il a été ainsi
démontré que la fréquence des PA dites idiopathiques chutait de
30 à 10 % après de telles explorations.
Les PA consécutives à la
migration de calculs clairs, plus rares, représentent jusqu’à 5 % des PA.
Classiquement observée chez le sujet jeune ou d’âge moyen, elle
survient aussi fréquemment chez l’homme que chez la femme en
l’absence d’alcoolisme ou de calcifications dans l’aire pancréatique.
C - CAUSES MÉTABOLIQUES ET MÉDICAMENTEUSES
:
Des PA peuvent être consécutives ou compliquer une connectivite
ou une vascularite qui doit être recherchée dans le bilan des PA idiopathiques.
Les PA associées
aux médicaments sont souvent bénignes et récurrentes en cas de
réintroduction du principe actif.
Les causes métaboliques classiquement rencontrées sont
l’hypercalcémie secondaire à l’hyperparathyroïdie, la nutrition parentérale et l’hyperlipémie quel qu’en soit le type.
Ainsi, 1 %
des patients atteints d’hyperparathyroïdie font des PA par activation
intracellulaire du trypsinogène.
Les PA au cours des hyperlipidémies
sont souvent récidivantes et surviennent pour une lipémie
supérieure à 10 g/L, voire 20 g/L de triglycérides, alors que les hypertriglycéridémies « secondaires » ou associées à l’alcoolisme
s’élèvent rarement au-delà de 10 g/L.
Elles représentent 1 à 4% des
PA et sont associées à une augmentation des chylomicrons (type I),
des pré-bêta-lipoprotéines (very low density lipiproteins [VLDL] type
IV) ou des deux (type V).
Alors que 50 % des enfants atteints de
mucoviscidose ont une insuffisance pancréatique dès la naissance,
des PA peuvent en émailler le cours évolutif (jusque dans 83 % des
cas).
Ainsi, devant un tableau de pancréatite, la suspicion
clinique de PA par mutation du gène cystic fibrosis transmembrane
conductance regulator (CFTR) doit être forte si d’autres manifestations
évocatrices sont présentes (bronchites à répétition, sinusite
chronique, polypose nasale, azoospermie).
On peut disposer
d’examens complémentaires comme la mesure de la différence de
potentiel (DDP) nasale, qui relève cependant de techniques
sophistiquées réservées à de rares laboratoires, ou encore le test à la
sueur qui est cependant peu sensible dans certains sous-groupes de
mutations du gène CFTR.
Ces groupes semblent précisément plus
susceptibles d’être responsables de formes frustes de mucoviscidose
révélée par des PA lors de l’adolescence.
Cependant, la question
de la susceptibilité particulière des sujets porteurs d’une mutation à
l’état hétérozygote à des facteurs exogènes classiques reste posée.
Ainsi, trois études explorant des patients atteints de PA idiopathique ou de pancréatite chronique, révélées par des poussées
aiguës pour un certain nombre, présentaient au moins une mutation
du gène CFTR avec une fréquence quatre à 11 fois supérieure à la
fréquence attendue dans la population générale.
Cette fréquence
n’était cependant pas augmentée chez les patients présentant une
pancréatite alcoolique classique.
D - ANOMALIES DES CANAUX PANCRÉATIQUES
:
D’autres causes canalaires peuvent être à l’origine de PA.
Il s’agit
soit d’anomalies de la disposition des canaux pancréatiques, soit
d’anomalies de leur contenu.
Les premières regroupent le pancreas divisum qui est l’anomalie canalaire la plus fréquemment
observée et qui concerne 5 % des patients examinés par
pancréatographie rétrograde endoscopique et 10 % des patients
examinés par résonance magnétique.
La responsabilité du pancreas
divisum dans la pathogénie de PA récidivantes, bien que débattue,
repose sur des arguments morphologiques (aspect de pancréatite
obstructive sur le canal dorsal en pancréatographie, fibrose de la
papille accessoire) et évolutifs (amélioration ou guérison après
sphinctérotomie chirurgicale ou endoscopique de la papille
accessoire ou dilatation de son orifice).
Le pancréas annulaire peut
également être responsable de PA, le diagnostic reposant sur la pancréatographie rétrograde ou sur la résonance magnétique.
Les altérations du contenu des canaux pancréatiques peuvent
également entraîner des PA.
Classiquement, il s’agit de tumeurs intracanalaires papillaires-mucineuses (TIPM), de type tumeur villeuse du canal de Wirsung ou ectasie canalaire mucineuse.
Elles
sont généralement associées à des dilatations modérées du canal
pancréatique principal et à la production de mucus sortant au
niveau de la papille principale qui est béante.
Un carcinome
pancréatique canalaire, ou plus rarement développé au niveau de
l’ampoule de Vater, peut être révélé par une PA.
Le diagnostic est
relativement difficile et nécessite une exploration endoscopique par cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique (CPRE) et/ou
échoendoscopie.
Ces explorations sont souvent couplées à distance
de l’épisode aigu devant une PA d’apparence idiopathique. Une PA
a été décrite dans 1 à 40% (1 à 2 % des PA et 15 % des PA
idiopathiques) après CPRE.
Lorsqu’une telle complication est décrite
par une élévation des enzymes pancréatiques supérieure à trois fois
la norme, associée à des douleurs abdominales compatibles, cette
complication survient après 5 à 8% des CPRE.
La fréquence pourrait
être diminuée par la perfusion d’analogue de la somatostatine.
Diagnostic
:
A - DIAGNOSTIC CLINIQUE
:
La majeure partie des patients atteints de PA présentent une forme
modérée avec des douleurs abdominales jugulées par les
antalgiques.
Le drame pancréatique de Dieulafoy, qui correspond à
une forme sévère et fulminante de PA, est rare et ne représente que
10 à 15 % des PA.
Entre ces deux présentations cliniques, il existe
un tableau clinique intermédiaire qui représente environ 20 % des
cas et dont les manifestations témoignent d’une complication
évolutive.
Les signes cliniques associant douleurs épigastriques
en barre, vomissements, choc et iléus, se combinent avec plus ou
moins d’intensité avec ceux témoignant d’une complication
systémique (hypovolémie, insuffisance rénale, détresse respiratoire,
hypocalcémie, coagulopathie, nécrose graisseuse cutanée
métastatique) ou d’une complication locale (collection liquidienne
aiguë, nécrose pancréatique, abcès, hémorragie abdominale,
perforation, occlusion intestinale).
Ces signes, absents dans un
tableau de PA bénignes (qui représentent 80 % des PA), se
rencontrent au cours de PA graves pour lesquelles une complication
parfois létale survient dans 40 % des cas.
Ainsi, l’examen clinique initial est peu contributif, hormis la
surcharge pondérale qui, en cas de PA alcoolique, indique d’emblée
une forte probabilité de forme grave (63 % des cas).
Les autres signes
de gravité, observés au bout de quelques heures, associent une
infiltration hématique des flancs à partir de l’espace rétropéritonéal
(signe de Grey Turner) ou des ecchymoses périombilicales (signe de
Cullen) au cours de formes graves associées à une mortalité de
l’ordre de 40 %.
B - DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE
:
L’augmentation des enzymes pancréatiques fait partie de la
définition de la PA.
Devant une douleur abdominale aiguë, il est
établi que les données anamnestiques et cliniques d’urgence
permettent d’établir un diagnostic correct de PA dans 50 % des cas.
Une augmentation de l’amylase à deux fois le taux normal permet
le diagnostic de PA avec une sensibilité et une spécificité de 91 et
96 %, ces valeurs étant respectivement de 96 et 60 % pour un dosage
dépassant la limite supérieure de la normale.
Le dosage de la lipase
ou des isoamylases d’origine pancréatique permet de porter le
diagnostic de PA avec une sensibilité respectivement de 92 et 98 %
et une spécificité de 95 et 88 %.
Ces légères différences ne sont pas
significatives et le choix doit dépendre des possibilités locales ou du
délai écoulé depuis le début de la PA, tout en sachant que le dosage
des isoamylases d’origine pancréatique peut être réalisé rapidement,
y compris en urgence, à partir d’un test reposant sur l’inhibition
sélective des isoamylases d’origine salivaire.
En revanche, la fraction
P3 de l’amylase qui physiologiquement n’est pas présente au niveau
sanguin est un marqueur sensible et très spécifique de la PA ; sa
détermination repose néanmoins sur une électrophorèse en gel d’agarose difficile à réaliser en urgence.
À côté du diagnostic positif,
les dosages biologiques peuvent aider au diagnostic étiologique de
PA.
D’emblée, il faut préciser que le choix
des marqueurs biochimiques pour déterminer l’origine biliaire ou
alcoolique d’une PA doit prendre en compte le délai par rapport au
début de la maladie.
Ainsi, le dosage des enzymes hépatiques, et en
particulier de l’alanine aminotransférase (ALAT), est le meilleur
marqueur individuel d’une PA d’origine biliaire, avec une valeur
prédictive positive de 95 % lorsque son élévation est supérieure à
trois fois la limite supérieure de la normale.
Parmi les autres
enzymes d’origine hépatobiliaire, la détermination de l’aspartate
aminotransférase (ASAT) a une valeur presque équivalente à
l’ALAT, alors que les autres enzymes sont de peu d’intérêt.
Plus récemment, le ratio lipase/amylase a été également proposé
pour attribuer à une origine biliaire ou alcoolique une poussée de
PA ; un ratio inférieur à 2 indique que l’origine alcoolique d’une
PA est peu probable, alors qu’un ratio supérieur à 3 est fortement
évocateur d’une PA d’origine alcoolique.
L’identification de
l’alcoolisme au cours d’une PA repose traditionnellement sur la
mesure du volume globulaire moyen, de la gamma GT ou du ratio ASAT/ALAT ; celui-ci a une sensibilité extrêmement variable, de
20 à 80 %, alors que sa spécificité est aux alentours de 85-95 % pour
ce diagnostic.
Les différents paramètres biologiques qui permettent d’évaluer le
pronostic de la PA, quelle que soit son origine, sont abordés au
paragraphe consacré à l’évaluation du pronostic.
C - DIAGNOSTIC RADIOLOGIQUE
:
En pratique quotidienne, l’échographie ou la tomodensitométrie
abdominale constituent l’exploration morphologique de base devant
une suspicion de PA.
Nous verrons successivement leur intérêt et
leur limite dans le diagnostic positif et le diagnostic des
complications au cours de la PA.
Leur rôle dans l’appréciation du
pronostic est traité au chapitre suivant.
1- Échographie abdominale
:
Plusieurs études ont démontré que l’examen de la glande
pancréatique est impossible dans 30 à 50 % des cas au cours d’une
PA ; l’absence de visualisation n’est pas formellement corrélée à la
gravité et à l’intensité de la nécrose parenchymateuse.
Au cours
des PA bénignes ou interstitielles, le parenchyme pancréatique peut
paraître normal dans 40 % des cas et les limites de l’organe sont
habituellement clairement reconnues, à la différence des PA sévères.
Au cours des formes bénignes, l’échogénécité est habituellement
diminuée, alors qu’au cours des formes sévères il existe une
alternance de plages fortement et faiblement échogènes avec aspect
hétérogène.
Un épanchement abdominal ou pleural peut être
visualisé lors d’un examen échographique ; si la visualisation de
la voie biliaire principale pour le diagnostic étiologique est difficile,
l’examen de la vésicule biliaire permet de mettre en évidence une
lithiase vésiculaire avec une sensibilité supérieure à la
tomodensitométrie abdominale.
En revanche, l’échographie est de
peu d’utilité pour définir la sévérité de la PA.
Quelques études ont
comparé le rendement de l’échographie à celui de la
tomodensitométrie, avec une concordance diagnostique dans un
quart des cas, alors que dans 50 % des cas l’examen échographique
sous-estime la sévérité de la PA.
La place de
l’échoendoscopie biliopancréatique au cours de la PA n’est pas
formellement établie.
Elle permet avec une plus grande sensibilité la
visualisation de la glande pancréatique et surtout de la voie biliaire
principale par rapport à l’examen échographique ou
tomodensitométrique (respectivement 100, 43 et 57 % des
examens).
2- Tomodensitométrie
:
* Intérêt pronostique
:
La tomodensitométrie constitue un examen primordial, plus pour
apprécier la gravité de la PA et définir le pronostic ou détecter la
présence de complications locales, que pour établir le diagnostic positif de PA.
La fréquence d’une nécrose
parenchymateuse est diversement appréciée dans la littérature mais
concerne 20 à 30 % des PA selon le recrutement, alors qu’une
complication locale à type de pseudokystes ou d’abcès survient dans
5 à 15 % des cas.
L’examen tomodensitométrique, en l’absence de contre-indication,
doit être réalisé avec injection intraveineuse de produit de contraste.
Cette injection, selon un protocole classique, doit permettre
d’évaluer la densité du parenchyme pancréatique lors de la phase
parenchymateuse.
La tomodensitométrie a ainsi transformé la démarche diagnostique
et l’évaluation pronostique au cours des PA.
Initialement,
elles étaient classées en cinq grades de gravité tomodensitométrique.
Ces grades évaluaient essentiellement la présence et
l’extension des collections liquidiennes péripancréatiques.
L’absence
de collection liquidienne (stades A, B et C) était associée à une
mortalité nulle et une morbidité faible (4 %), alors que la présence
d’une ou plusieurs collections liquidiennes (stades D et E) était
associée à une mortalité importante (14 %) et à une forte morbidité
(54 %).
Cette première classification ne prenait pas en compte une
éventuelle nécrose parenchymateuse pancréatique.
Celle-ci,
objectivée lors de l’injection d’un bolus de contraste, est cotée
en fonction de son importance.
Un score lui est attribué (nécrose
absente = 0, nécrose inférieure à 30 % du parenchyme = 2, nécrose
comprise entre 30 et 50 % du parenchyme = 4, nécrose supérieure à
50 % du parenchyme = 6), et associé au stade (de A à E), témoignant
de la présence et de l’extension des collections liquidiennes péripancréatiques.
La somme de ces
deux scores permet de classer les patients sur une échelle de 0 à 10
points.
Ce score
définit un index scanographique de sévérité qui, lorsqu’il est
inférieur à 3, est associé à une mortalité et une morbidité
respectivement de 3 et 8 %, alors que lorsque ce score est compris
entre 7 et 10, ces taux sont respectivement égaux à 17 et 92 %.
Cependant, le diagnostic tomodensitométrique de la nécrose
pancréatique, bien que sensible, n’est pas toujours spécifique de la
gravité, car d’une part cet examen pourrait être peu sensible quand
la nécrose atteint moins de 30 % de la glande pancréatique, et
d’autre part, il a été montré que la survenue d’une défaillance
viscérale n’était pas corrélée au pourcentage de nécrose
parenchymateuse.
Il faut souligner que cette corrélation entre l’index
de sévérité scanographique et le pronostic est d’autant meilleure
qu’il s’agit de la première poussée de PA et qu’il n’existe pas de
modification morphologique résiduelle préalable, ce qui pourrait
être source de surestimation de cet index.
Le délai de survenue de la
nécrose est évalué entre 24 et 72 heures après le début des
symptômes.
L’examen tomodensitométrique peut être
équivoque lorsqu’il est réalisé dans les 24 à 48 heures suivant le
début de la PA.
Une meilleure évaluation du pronostic est ainsi
possible lorsque cet examen est réalisé 72 heures après le début des
symptômes.
Enfin, les éléments de certitude dont nous disposons
quant à la toxicité de l’injection d’un produit de contraste sur
l’évolution de la PA sont plutôt rassurants car, dans une seule étude
chez l’animal, l’injection intraveineuse de produit de contraste iodé
a accentué la sévérité de la PA nécrosante par un mécanisme
d’ischémie au niveau de la microcirculation pancréatique.
Ces
résultats n’ont pas été reproduits dans d’autres modèles animaux, et
aucune étude chez l’homme n’a clairement établi les effets délétères
d’une telle injection au stade initial de la PA.
* Intérêt
diagnostique :
À côté de son intérêt pronostique, la tomodensitométrie présente un
intérêt diagnostique.
Elle est effectivement irremplaçable dans le
diagnostic des complications locales.
Le problème de la surinfection
de la nécrose pancréatique est abordé au chapitre des complications.
Les autres anomalies repérées au cours de l’examen
tomodensitométrique sont l’existence de collections liquidiennes
aiguës, la présence d’un abcès pancréatique, l’atteinte du
système vasculaire et en particulier l’existence de thromboses
mésentériques ou portales, la présence d’anomalies biliaires ou
des parenchymes adjacents hépatiques et spléniques.
Les collections liquidiennes se développent autour du pancréas et leur
fréquence peut atteindre 50 % des cas.
Le plus souvent, elles
régressent spontanément en quelques jours, mais elles peuvent
persister, voire se surinfecter.
Elles peuvent coexister avec une
nécrose graisseuse péripancréatique dont la distinction
morphologique peut être difficile.
Une densité inférieure à 15 UH
est généralement le témoin d’une collection liquidienne, alors qu’une
densité supérieure à 25 UH est fortement évocatrice d’une nécrose
associée.
L’atteinte des artères ou des veines péripancréatiques au
cours de la nécrose ou du processus inflammatoire est classique.
Au
niveau veineux, il peut s’agir d’une thrombose qui peut être associée
à des stigmates d’hypertension portale segmentaire, alors que
l’atteinte artérielle peut se traduire par une hémorragie aiguë intrapéritonéale digestive par la formation d’un pseudoanévrisme
ou par un infarctus mésentérique.
Ces pseudoanévrismes peuvent
être responsables d’un tableau hémorragique aigu avec choc
hypovolémique, ou au contraire se traduire par une hémorragie
intrapseudokystique.
Des retentissements sur la voie biliaire sont
également détectables par un examen tomodensitométrique.
Il peut
s’agir d’une obstruction de la voie biliaire principale consécutive à
une compression par un pseudokyste ou une collection liquidienne.
Dans ce cas, la compression peut siéger tout au long de l’arbre
biliaire, y compris au niveau intrahépatique ou au niveau de la
convergence des canaux hépatiques droits et gauches. Enfin, des
compressions de différents segments digestifs et en particulier
gastriques duodénaux ou coliques ont été mis en évidence à
l’examen tomodensitométrique.
La place de la résonance
magnétique dans l’exploration morphologique des PA est en cours
d’évaluation.
Elle apparaît intéressante dans le diagnostic de nécrose péripancréatique, notamment pour différencier les collections
liquidiennes des nécroses diffusant dans les espaces
péripancréatiques.
Elle présente en outre un intérêt pour le
diagnostic étiologique de la PA, à la recherche d’une maladie
lithiasique ou d’une lithiase enclavée dans la voie biliaire
principale.
Pronostic
:
A - ÉVALUATION CLINIQUE OU BIOCLINIQUE
:
L’évaluation du pronostic par des variables cliniques est peu
sensible.
Seuls l’âge, l’existence d’une fièvre et une augmentation de
l’index de masse corporelle sont des variables quantifiables qui ont
été corrélées au pronostic, avec cependant un pourcentage de
patients présentant une PA sévère et correctement classés, faible et
respectivement égal à 39, 34 et 64 % pour ces trois variables.
Au
contraire, leur intégration avec d’autres valeurs permet d’établir des
scores multifactoriels.
Il existe des scores
spécifiques établis pour évaluer le pronostic de la PA et d’autres qui
sont des scores non spécifiques de réanimation.
Parmi les scores spécifiques, le score de Ranson comporte 11 variables
pronostiques dont les cinq premières sont évaluées à l’admission.
Les six autres sont déterminées pendant les
48 premières heures d’hospitalisation.
La PA est considérée comme
sévère lorsque ce score est supérieur à 3.
Un score modifié, évaluant
le pronostic des patients présentant une PA d’origine lithiasique, a
été ultérieurement proposé.
Un score entre 3 et 5 est associé à
une mortalité de 10 à 20 %, et celle-ci passe à 50 % lorsque ce score
est supérieur à 6.
Cependant, le pouvoir discriminant du score de
Ranson se renforce dans les valeurs extrêmes, puisque lorsque ce
score est inférieur à 2, les risques de complications générales ou
locales sont quasiment nuls, alors que lorsqu’il est supérieur à 6, la
mortalité est augmentée, même en cas de nécrose stérile.
Le score d’Imrie ou score de Glasgow modifié (suppression des ALAT) par Blamey comprend huit variables à
déterminer dans les 48 premières heures et cotées 0 ou 1.
Des
performances égales ou supérieures sont obtenues avec cet indice,
sa supériorité étant reconnue dans les séries de PA où prédomine
une cause lithiasique. Pour un score supérieur à 3, la valeur
prédictive positive et négative est respectivement égale à 50 et 95 %.
Le pourcentage de patients bien classés pour un score supérieur à 3
est de 80 % avec le score d’Imrie et 71 % avec le score de Ranson.
Cependant, si
ces scores sont utiles, ils présentent plusieurs inconvénients :
nombre élevé de variables à enregistrer, évaluation de la sévérité
réalisée seulement au bout de 48 heures, influence du traitement sur
les variables durant les 48 premières heures, évaluation quotidienne
répétée impossible, nécessité d’évaluer les patients dont
l’évolution date de moins de 48 heures et absence de validation de
ces scores pour les PA non biliaires et non alcooliques.
Pour pallier à
ces inconvénients, des scores de gravité non spécifique ont été
proposés.
Il s’agit du score APACHE II (Acute
Physiology and Chronic Health Evaluation), du score OSF (Organ
System Failure) ou du score SAPS (Simplified Acute Physiologic
Score).
Le score APACHE II collige 12 variables physiologiques
évaluant l’atteinte de sept systèmes physiologiques majeurs, l’âge,
l’indice de coma de Glasgow, et prend en compte également des
défaillances organiques antérieures et chroniques.
Pour un score
supérieur à 8, le diagnostic de PA sévère se fait avec une sensibilité de 82 % et une spécificité de 96 %, et de 72 et 92 % pour un score
supérieur à 10.
Ce score apparaît utile au début de la PA, notamment
dans les 48 premières heures, car après ses valeurs prédictives
positives et négatives sont voisines de celles du score de Ranson ou
d’Imrie.
Ce score est discriminant pour prédire la mortalité ou la
survie des patients présentant une nécrose pancréatique stérile.
Cependant, il présente l’inconvénient de sa complexité et de son
calcul fastidieux, donne une importance lourde à l’âge des patients
dont la valeur pronostique est controversée au cours de la PA.
Néanmoins, une progression de trois points de ce score dans les
48 premières heures d’évolution permet de repérer les formes les
plus sévères.
Eu égard à la complexité du score APACHE II, le score
SAPS, comportant 14 variables mesurées et obligatoirement cotées
de 0 à 4 a été proposé.
Sa valeur prédictive pour la mortalité est
comparable à celle du score de Ranson et d’APACHE II dans la PA.
Le score OSF permet d’évaluer de façon spécifique la
défaillance des grands systèmes (vasculaire, pulmonaire, rénal,
neurologique, hématologique, hépatologique et gastro-intestinal).
La
somme des défaillances viscérales au cours du même jour permet
d’établir un score variant de 0 à 7.
Les patients qui présentent une
PA sévère, compliquée ou non de décès, ont un score OSF supérieur à 4.
La précision
diagnostique pour la sévérité de la PA, avec un score supérieur à 1
à l’entrée est de 88 % et de 90 % après 48 heures d’évolution.
Ces différents
scores ont été incomplètement comparés ou le plus souvent deux à
deux.
Ils présentent
tous une précision diagnostique équivalente, mais d’autant plus
marquée qu’il s’agit de prédire la survenue d’une complication
systémique ou générale et que l’on se situe proche des valeurs
extrêmes de ces scores.
B - ÉVALUATION BIOLOGIQUE
:
Elle permet actuellement un diagnostic fiable et très précoce de la
sévérité de la PA.
De nombreux marqueurs sont proposés et il est
important de connaître leur limite et, surtout, ce qu’ils sont amenés
à prédire : sévérité de la PA, décès dû à la PA, survenue d’une
nécrose pancréatique ou survenue d’un sepsis sur nécrose
pancréatique.
Quant à la sévérité, il faut toujours connaître si celle-ci
englobe des complications générales et/ou locales ou s’il s’agit
uniquement de défaillance viscérale.
De nombreux marqueurs
biologiques ont été proposés pour évaluer le pronostic des PA.
Il existe des marqueurs de la nécrose pancréatique comme le dosage de
la méthalbumine qui est un complexe résultant de la chélation
de l’albumine circulante par hématine issue de l’hydrolyse protéasique de l’hémoglobine.
La sensibilité de ces marqueurs est
cependant limitée et leur valeur pronostique est équivalente au score bioclinique.
Le dosage de l’activité ribonucléasique sérique a été
également proposé, car elle est libérée au niveau sanguin au cours des nécroses cellulaires massives.
Sa sensibilité est également faible
et ces deux marqueurs ne sont pas d’utilisation clinique courante.
D’autres marqueurs témoins de l’activation protéasique ont été
proposés.
Il s’agit en particulier du peptide libéré lors de l’activation intrapancréatique du trypsinogène (trypsinogen activation peptide
[TAP]).
Sa libération s’effectue au niveau de la cavité
péritonéale et au niveau sanguin avec une élimination urinaire. Une
concentration supérieure à 2 nmol/L, voire 10 nmol/L dans les
urines est un marqueur sensible (85 à 100 %) et spécifique (85 à 90 %)
de la PA sévère.
Cependant, ces résultats sont d’autant plus sensibles
et spécifiques que l’on est proche du début de la PA.
Des marqueurs de la réponse inflammatoire ont été également évalués.
Il s’agit du dosage circulant de l’élastase des polynucléaires et de la protéine C réactive.
Ces deux marqueurs ont
respectivement une sensibilité et une spécificité de 90 et 85 % pour
le diagnostic de PA sévère.
L’avantage de la protéine C réactive
réside dans son dosage largement répandu et dans la parfaite
connaissance de sa cinétique au cours des premiers jours d’évolution
de la PA.
Un taux supérieur à 210 mg/L entre le premier et le
quatrième jour ou supérieur à 120 mg/L au septième jour
d’évolution de la PA est corrélé à la survenue d’une PA sévère dans
respectivement 85 et 87 % des cas. L’élévation de cette protéine
supérieure à 300 mg/L ne se voit que dans les pancréatites qui
auront une évolution sévère.
Enfin, la protéine C réactive est un
bon marqueur qui est corrélé exclusivement à la présence d’une
nécrose parenchymateuse pancréatique indépendamment d’autres
critères de sévérité (survenue d’une complication générale ou d’une
surinfection).
Néanmoins, la production hépatique de cette
protéine, induite notamment par l’interleukine 6, n’augmente au
niveau sanguin que 48 heures après le début de cette induction.
D’autres médiateurs de l’inflammation ont été proposés pour
évaluer le pronostic d’une PA.
Il s’agit en particulier d’un certain
nombre de cytokines comme la phospholipase A2,
l’interleukine 1, l’interleukine 6 et l’interleukine 8.
L’interleukine 6, en particulier, a été extensivement étudiée : il s’agit
d’un promoteur de la production de protéine C réactive au niveau
hépatique. La cinétique de son augmentation au niveau circulant est
parallèle à celle de la protéine C réactive, mais la précède de
48 heures ; ainsi, elle pourrait être un marqueur plus précoce de la
sévérité ou de la nécrose au cours des PA dans les 48 premières
heures d’évolution.
Le dosage de la protéine associée à la
pancréatite (PAP) a été également proposé : il s’agit d’une
protéine dont certaines isoformes sont spécifiques du pancréas et
dont la production pourrait constituer un mécanisme de défense visà-
vis de l’agression.
Sa valeur prédictive et sa cinétique au cours de
l’évolution des PA modérées permet une évaluation comparable du
pronostic à celle de la protéine C réactive.
Enfin, une augmentation
de l’activité catalytique de la phospholipase A2 est observée dans le
sérum de patients atteints de PA.
Cette enzyme est impliquée dans
une étape essentielle et limitante de la production des eicosanoïdes.
Récemment, l’intérêt du dosage de l’activité de la phospholipase A2
de type II a été souligné pour prédire la survenue d’une nécrose
pancréatique.
Il existe donc de nombreux marqueurs biologiques qui possèdent
une sensibilité et une spécificité équivalentes oscillant
respectivement entre 85-95 % et 80-90 %.
Le choix du marqueur idéal
dépend de l’instant dans l’histoire naturelle de la PA auquel le
dosage est effectué et des possibilités locales.
Ainsi, c’est le dosage
de l’élastase des polynucléaires et de la protéine C réactive qui est le
plus communément admis comme marqueur biologique standard :
un taux supérieur à 300 μg/L et 60 mg/L dès la 24e heure ou
supérieure à 120 mg/L pour la protéine C réactive à la 72e heure
permet de prédire la survenue d’une forme sévère.
L’interleukine 6,
dont le dosage de routine est actuellement possible, pourrait
remplacer ces marqueurs pour les patients vus dans les 48 premières
heures d’évolution afin de prédire la survenue d’une PA sévère.
Il
est encore trop tôt actuellement pour déterminer quel marqueur
permettra de prédire la survenue d’une complication infectieuse de
la nécrose pancréatique.
Cette dernière est actuellement au mieux
prédite à la 72e heure par le dosage de la protéine C réactive ou de
la PAP.
Ces marqueurs
biologiques ont rarement été évalués simultanément afin de prédire la sévérité ou la
survenue de complications locales.
C - ÉVALUATION TOMODENSITOMÉTRIQUE
:
Cette question a déjà été abordée précédemment.
Il convient ici de
rappeler l’intérêt de déterminer, au cours d’une tomodensitométrie
abdominale avec injection de produit de contraste, non seulement la
présence de collections liquidiennes extrapancréatiques, mais
également l’importance de la nécrose parenchymateuse
pancréatique.
En effet, avant la prise en considération de la nécrose
pancréatique et lorsque la tomodensitométrie permettait de classer
les PA en fonction du nombre de collections extrapancréatiques (grades A à E), les patients classés dans les grades D ou E
présentaient un risque élevé de morbidité (infection de la nécrose)
et de mortalité seulement s’ils avaient par ailleurs un score
bioclinique de Ranson supérieur à 3 (45 % de décès).
Ceux
appartenant aux mêmes grades mais présentant un score de Ranson
inférieur à 3 avaient un taux de morbidité faible (20 %) et une
mortalité quasi nulle.
Ceci souligne l’importance de la nécrose
parenchymateuse pancréatique pour établir le pronostic de la PA,
sans pour autant que cette influence soit corrélée à la survenue
d’une défaillance viscérale.
Ainsi, le nombre de collections
liquidiennes extrapancréatiques et l’intensité de la nécrose
parenchymateuse permettent d’établir un index tomodensitométrique
de sévérité qui définit trois classes : score de 0 à 3, score
de 4 à 6 et score de 7 à 10.
Ces trois classes sont respectivement
associées à une mortalité de 3, 6 et 17 %, alors que le pourcentage de
PA sévère dans ces trois classes est respectivement de 8, 35 et 92 %.
Cependant, la présence d’une nécrose parenchymateuse
pancréatique isolée est également corrélée à la morbidité et à la
mortalité des patients atteints de PA.
Les patients sans nécrose
parenchymateuse ont une mortalité de 0 % et une morbidité de 6 %,
alors que ces taux sont respectivement de 25 et 75 % chez ceux qui
présentent une nécrose de 50 % de la glande pancréatique et de
11 et 100 % pour ceux dont la nécrose atteint plus de 50 % du
parenchyme pancréatique.
La mise en évidence de complications locales, et en particulier d’une
surinfection de la nécrose pancréatique, est envisagée au chapitre
« complications ».
Complications
:
A - COMPLICATIONS INFECTIEUSES
:
L’infection de la nécrose pancréatique survient chez 30 à 50 % des
patients présentant une nécrose parenchymateuse et sa fréquence
est corrélée à l’extension de cette nécrose ; celle-ci retentit sur le
pronostic.
Ainsi, la mortalité passe de 12 à 39 % chez les patients
dont la nécrose parenchymateuse atteint moins de 50 % du
parenchyme et pour lesquels une surinfection est notée, alors que
lorsque la nécrose concerne plus de 50 % du parenchyme, la
mortalité passe de 15 à 67 % dans ces deux situations.
Cette
complication survient principalement entre la première et la
troisième semaine d’évolution, 50 % des surinfections se faisant dans
les 15 premiers jours d’évolution de la PA.
L’évolution peut se faire
de façon mono- ou biphasique, mais dans ce dernier cas la
surinfection, qui est plus tardive, se manifeste 1 à 2 mois après le
début de la PA.
Cette situation est rare et correspond à ce que l’on
appelle un abcès pancréatique qui, comparé à l’infection de la
nécrose pancréatique, entraîne une mortalité plus faible.
La
symptomatologie au cours d’une surinfection de la nécrose est non
spécifique, la fièvre ou l’hyperleucocytose pouvant notamment être
consécutives au syndrome de réponse inflammatoire systémique.
Ainsi, plusieurs marqueurs, comme une fièvre supérieure à 38 °C,
une hématocrite inférieure à 35 %, un excès de base inférieur à
4 mmol/L, une pression artérielle en oxygène (PaO2) inférieure à
60 mmHg, une pression artérielle en dioxyde de carbone (PaCO2) inférieure à 30 mmHg, une albumine inférieure à 30 g/L ou des
plaquettes supérieures à 450 000/mm3 ont été proposés comme
pouvant identifier des patients présentant une surinfection
pancréatique. Seulement 25 % des patients présentant une telle
complication ont trois de ces critères présents.
En analyse univariée,
une augmentation du score de Ranson (supérieur à 6) ou de la
protéine C réactive au début des symptômes (80 versus 130 mg/L)
est associé à la survenue d’une surinfection de la nécrose
pancréatique, mais l’analyse multivariée montre que seule
l’importance de la nécrose parenchymateuse authentifiée en
tomodensitométrie est prédictive de la survenue d’une surinfection.
Sur le plan morphologique, le diagnostic est rarement fait sur
l’aspect tomodensitométrique.
La présence de bulles de gaz
témoignant de la présence de germes anaérobies est rare (15 à 20 %
des nécroses surinfectées) : c’est un marqueur tardif de la
surinfection, plus fréquemment mis en évidence au sein des abcès
pancréatiques.
Par ailleurs, la spécificité de ce signe n’est pas
totale, puisqu’il peut s’agir d’un aspect consécutif à une fistule
spontanée entre le tube digestif et la nécrose pancréatique.
Le
diagnostic de la surinfection repose actuellement sur la ponction à
l’aiguille fine de la nécrose pancréatique et/ou des collections
liquidiennes, guidée par échographie ou mieux par
tomodensitométrie.
Le diagnostic repose sur l’examen direct et sur
la culture qui permet l’identification d’un germe.
Le risque de
faux positif par une contamination cutanée doit être évoqué devant
l’isolement d’un Staphylococcus epidermidis, de même qu’une
ponction digestive ou une fistule avec le tube digestif en cas de flore
plurimicrobienne.
Enfin, notamment en cas d’antibiothérapie
préalable, la recherche de surinfections mycotiques doit être
systématique.
Il n’est pas clairement établi actuellement si la
recherche d’une surinfection de la nécrose doit être systématique ou
ne s’adresser qu’à un sous-groupe de patients.
Il est aujourd’hui
classique d’envisager cette recherche diagnostique devant tout signe
manifeste de sepsis, mais aussi toute complication générale ou
défaillance viscérale.
Cette recherche doit être d’autant plus
fréquemment réalisée que ces symptômes surviennent dans les deux
premières semaines d’évolution.
Un résultat négatif ne vaut que
pour l’instant où la ponction-aspiration a été réalisée, car il a été
rapporté qu’une seconde ponction pouvait être positive chez 50 %
des patients préalablement négatifs alors que la situation clinique se
modifiait.
Les germes en cause sont essentiellement d’origine
digestive, avec prédominance des bacilles à Gram négatif, mais la
fréquence d’une infection à germes à Gram positif peut atteindre
25 % des cas.
Ce spectre bactérien semble se modifier avec une
utilisation croissante des antibiotiques à la phase précoce, favorisant
une émergence des germes de type Staphylococcus aureus et des
infections à Candida.
B - AUTRES COMPLICATIONS LOCALES
:
La nécrose parenchymateuse pancréatique ne constitue pas réellement
une complication locale car elle fait partie de la définition de la PA.
Soulignons cependant qu’elle se développe précocement : 46 % des
cas dans les 24 premières heures d’évolution, et dans 97 % des cas
dans les 72 premières heures d’évolution de la PA.
Sa présence
influence fortement la morbidité (36 % versus 80 % des PA classées
grade D ou E), mais a peu d’influence sur la mortalité (14 % versus
13 % des patients classés grade D ou E).
Ainsi, si la mortalité est
globalement augmentée lorsqu’il existe une nécrose
parenchymateuse pancréatique (23 % versus 0 %), le taux de
mortalité n’est pas corrélé à l’étendue de la nécrose.
Le diagnostic
de nécrose repose sur la tomodensitométrie avec injection de produit
de contraste, et parmi les marqueurs biologiques, un taux de
protéine C réactive supérieur à 120 mg/L dans les 48 premières
heures est un marqueur sensible et spécifique de sa présence.
Des
formes particulières de nécrose pancréatique ont été décrites de type
cavitaire central, dont le pronostic est meilleur que celui de la
nécrose classique.
Des complications locales digestives à type d’infarctus mésentérique
ou d’infarctus colique ont été décrites.
Leur pronostic est effroyable, car ils se compliquent dans 20 % des cas de gangrène et
de perforation digestive.
Leur diagnostic est difficile au cours de la
PA et leur physiopathologie mal définie, des troubles circulatoires à
type d’hypovolémie ou d’hypotension n’étant probablement pas au
premier plan.
D’autres complications vasculaires ont été décrites, à
type de fistule pancréatique ou portale qui est une complication
exceptionnelle de la PA, survenant le plus souvent sur un terrain de
pancréatite chronique calcifiante.
Cette complication peut être associée à une panniculite fébrile
nodulaire non suppurative plus connue sous le terme de syndrome
de Weber-Christian.
Il s’agit de nodules dermohypodermiques
asymétriques pouvant siéger sur l’abdomen, d’évolution isolée ou
confluente et pouvant fistuliser à la peau.
Leur intérêt est qu’ils
peuvent constituer le signe inaugural au cours d’une PA sans en
être spécifique. Ils sont en effet également décrits au cours d’autres
maladies systémiques, mais également lors de fistules pancréaticoportales au cours de la pancréatite chronique calcifiante.
Enfin, des complications vasculaires, en particulier artérielles, peuvent
compliquer la PA.
Il s’agit d’hémorragies par pseudoanévrisme
ou de complications hémorragiques d’un pseudokyste qui souvent
se présentent sous la forme d’une hémorragie digestive importante,
voire cataclysmique.
Ces complications hémorragiques ne sont pas
rares au cours de la PA, mais émaillent de préférence l’évolution
d’une pancréatite chronique calcifiante.
Ce type de complication
hémorragique est associée dans trois quarts des cas à un pseudokyste au cours de la PA.
Les fistules pancréatiques internes peuvent compliquer également une PA.
Il s’agit d’ascite pancréatique, d’épanchement pleural
pancréatique ou d’une association des deux.
Ces
complications surviennent après rupture d’un canal pancréatique
principal ou secondaire et formation d’une fistule avec la cavité
péritonéale ou pleurale. Néanmoins, ces complications ne
concernent que 10 % des PA.
Le diagnostic repose sur l’analyse du
produit de ponction, ramenant un liquide riche en albumine
(> 30 g/L) associé dans 90 % des cas à une augmentation de
l’amylase dans le liquide de ponction.
L’amylase sanguine peut être
augmentée de façon contemporaine en dehors de tout processus
évolutif par résorption de l’amylase présente dans les épanchements.
Enfin, une des complications locales qu’il faut rechercher à distance
de la PA est la survenue d’un pseudokyste nécrotique qui survient au
décours d’une PA, que celle-ci évolue pour elle-même ou qu’elle soit
le témoin évolutif d’une pancréatite chronique sous-jacente.
Il est
difficile de décrire cette complication et son évolution au décours
d’une PA, car les séries de la littérature décrivent le plus souvent le
diagnostic et le pronostic de pseudokystes survenant au décours
d’une PA et/ou d’une pancréatite chronique. Ils sont révélés
généralement par l’association d’une douleur abdominale, d’un
amaigrissement et d’une masse palpable.
Classiquement, 20 à 50 %
d’entre eux disparaissent spontanément, mais cette probabilité est
d’autant plus faible que ces pseudokystes sont volumineux et
intraparenchymateux.
À l’inverse, ils peuvent se compliquer de
surinfection, réalisant alors un abcès pancréatique, se rompre au
niveau du tube digestif ou comprimer une structure voisine biliaire,
vasculaire ou digestive.
La fréquence de ces complications est
d’autant plus grande que ces pseudokystes évoluent depuis
longtemps : 20 % des cas dans les six premières semaines
d’évolution et 60 % après 12 semaines d’évolution.
On estime par
ailleurs que la maturation de la paroi d’un pseudokyste nécessaire
pour un drainage chirurgical ou endoscopique de bonne qualité
nécessite 6 à 8 semaines pendant lesquelles on préfère s’abstenir de
toute intervention chirurgicale ou endoscopique.
Le drainage
par voie endoscopique et transpapillaire donne des résultats
intéressants mais n’a été validé que pour les pseudokystes survenant
sur une pancréatite chronique.
Enfin, un aspect particulier de la
nécrose parenchymateuse pancréatique a été décrit sous la forme
d’une nécrose cavitaire centrale et totale.
Cette particularité ne
constitue pas une complication à proprement parler, mais doit être
soulignée car elle est associée à un faible taux de surinfection et de
décès.
C - COMPLICATIONS GÉNÉRALES ET SYSTÉMIQUES
:
Elles sont l’expression d’une intense réaction inflammatoire
systémique.
Ces phénomènes inflammatoires graves génèrent une
réaction généralisée de l’organisme dont la sévérité est caractérisée
par des dysfonctionnements d’organe.
Le syndrome de réponse
inflammatoire systémique (SRIS) est défini comme la réponse de
l’organisme à une agression inflammatoire grave et généralisée, alors
que le sepsis est un syndrome de réponse inflammatoire systémique
lié à une infection.
Le stade plus évolué définit le syndrome de
dysfonctionnement multiviscéral (SDMV).
Enfin, le choc septique
est une infection systémique avec une modification tensionnelle
durable nécessitant un traitement par amine vasopressive.
Ainsi,
depuis 1991, on dispose de définitions précises de la bactériémie, du SRIS, du sepsis ou infection systémique et du choc septique. La présence d’au moins deux critères définissant le SRIS
ne doit être retenue que s’ils ne sont pas en rapport avec une cause
connue et d’apparition récente ou d’évolution aiguë.
Il faut souligner
qu’une bactériémie n’est présente que dans 30 à 60 % des sepsis, et
que donc un sepsis sévère peut exister sans la présence d’une
bactériémie.
Le sepsis sévère est défini par des signes de
dysfonctionnement d’organe témoignant essentiellement d’une
hypoperfusion d’organe.
Le syndrome de dysfonctionnement multiviscéral traduit l’absence de contrôle de l’homéostasie par
l’organe en cause.
Sa fréquence augmente du fait des progrès de la
réanimation, mais il persiste un lien direct entre la mortalité et le
nombre de défaillances viscérales.
Plusieurs scores ou systèmes
d’évaluation des défaillances d’organe ont été proposés, le plus
classique étant le score OSF qui évalue les défaillances
cardiovasculaires, respiratoires, rénales, hématologiques ou
neurologiques.
Le SDMV n’est pas l’apanage des formes nécrosantes
et infectées des PA, car il peut survenir au cours de nécroses
massives stériles.
Néanmoins, la mortalité est nulle en l’absence de
manifestations systémiques au cours des pancréatites nécrotiques
non infectées, alors que la mortalité globale atteint 40 % en cas de
nécroses stériles associées à des complications générales et/ou
systémiques.
Le choc apparaît l’élément le plus discriminatif, une
mortalité de 82 % étant observée chez les patients présentant cette
complication, comparée à 7 % chez ceux qui n’en étaient pas atteints.
Les conséquences pulmonaires au cours de la PA sont
variables, allant de l’hypoxémie modérée asymptomatique au
syndrome de détresse respiratoire aiguë ; la première est
fréquemment rencontrée (50 à 66 % des patients) durant les 48
premières heures d’évolution.
L’amélioration est la règle et cette
hypoxémie bénigne ne peut être assimilée à une complication
respiratoire de la PA.
Le pronostic est davantage engagé lorsqu’apparaissent des atélectasies ou/et des épanchements
pleuraux.
La survenue d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë
au cours de la PA est comparable à celui d’autre origine et invite à
une démarche diagnostique bien codifiée qui, dans le contexte, est
orientée vers la recherche d’une infection abdominale sous-jacente.
L’insuffisance rénale oligurique est multifactorielle, mais son
pronostic est sombre, associé à une mortalité de 80 %.
D’autres
manifestations systémiques sont exceptionnelles, comme
l’encéphalopathie pancréatique ou la rétinopathie de Purtscher.
L’encéphalopathie est rare et, dans sa description initiale, associe une
confusion, des hallucinations, une dysarthrie et une anxiété. Elle
évolue par phases cycliques avec des rémissions.
Elle est de
survenue précoce, entre le premier et le cinquième jour d’évolution
de la PA.
L’électroencéphalogramme montre des signes peu
spécifiques (ondes thêta ou delta).
Des lésions de la substance
blanche en résonance magnétique ont été décrites avec un hypersignal en T2, de même que des anomalies de l’aminogramme
du liquide céphalorachidien.
Leur survenue n’a pas un impact
important sur le pronostic et sa réversibilité est d’autant plus
fréquente que le SDMV est monoviscéral et/ou associé à une nécrose
pancréatique non infectée.
D - COMPLICATIONS FONCTIONNELLES
:
La réponse métabolique au cours de la PA dépend d’une part, de la
réponse au syndrome inflammatoire systémique et d’autre part, des
lésions des îlots de Langerhans par inflammation et des destructions
pancréatiques.
L’hyperglycémie est une complication précoce,
consécutive à une hyperglucagonémie secondaire au stress et à un
défaut de synthèse et de libération d’insuline.
À la différence
des autres agressions, le taux d’insuline est bas en réponse à
l’hyperglycémie au cours de la PA.
Cependant, la libération d’insuline après perfusion intraveineuse d’alanine persiste au cours
de la PA, suggérant qu’il s’agit plus d’un défaut de libération que
de production de l’insuline en réponse à l’hyperglycémie.
Parallèlement, les taux sériques de glucagon sont augmentés à la
phase précoce de la PA, malgré l’hyperglycémie, en partie du fait
d’une augmentation du taux circulant de catécholamines.
Le
degré de perturbation de la fonction endocrine est globalement
corrélé à l’importance de la nécrose pancréatique.
Il n’est pas
clairement établi si ce déficit de la fonction endocrine persiste à
distance de la PA : sa persistance est plus fréquemment décrite en
cas de PA d’origine alcoolique que d’origine biliaire.
Une
anomalie de la fonction endocrine pancréatique a été décrite dans
30 à 60 % des cas 6 mois après la PA.
Cette fréquence demeure
identique 2 à 3 ans après la PA considérée.
Cependant, l’étude de la
libération d’insuline et de peptide C après un test de tolérance oral
au glucose montre que leur libération est supérieure chez les patients
par rapport aux sujets sains, alors qu’il n’existe pas de différence
dans la libération de glucagon.
Par conséquent, une réponse normale
à la charge glucosée et une glycémie normale pourraient être
maintenues au décours d’une PA au prix d’une sécrétion augmentée
d’insuline.
Les conséquences de la PA sur la fonction exocrine du pancréas ont
été également étudiées, mais peu d’études ont évalué la fonction
exocrine du pancréas chez l’homme durant la phase aiguë et
précoce.
Étudié au cours de cette phase par tubage duodénal, il
serait rare ou associé seulement à une nécrose extensive de la
glande.
Le caractère cyclique de la sécrétion pancréatique
exocrine est conservé au décours de la PA, suggérant que sa
régulation est peu perturbée.
Un déficit de la fonction exocrine
pancréatique a été décrit 1 mois après une PA dans 10 à 75 % des
cas.
Ce déficit persiste à long terme chez 20 à 50 % des patients.
Il serait d’autant plus fréquent que la PA est d’origine alcoolique et
associée à une nécrose parenchymateuse.
Un déficit de la fonction
pancréatique exocrine est noté 1 an après la PA chez respectivement
68 et 50 % des patients présentant une PA alcoolique nécrosante et
oedémateuse, alors que ces pourcentages sont respectivement de 33
et 0 % chez les patients présentant de telles pancréatites d’origine
biliaire.
Ainsi, la plupart des patients ont un déficit exocrine
modéré, alors qu’une insuffisance pancréatique exocrine sévère ne
concerne que 5 à 10% des patients et que 15 % des patients ont une
fonction exocrine pancréatique normale.
Traitement
:
A - TRAITEMENT MÉDICAL
:
1- Non spécifique
:
L’hypovolémie est consécutive à une séquestration liquidienne
initiale, notamment par séquestration splanchomésentérique.
Le
maintien d’une volémie satisfaisante en termes de pression veineuse
centrale et de débit urinaire impose un remplissage vasculaire dès
l’installation des premiers signes de PA.
C’est en partie grâce à ce
remplissage que la mortalité observée à la phase précoce a
partiellement diminué, puisque 70 % des décès survenaient au cours
de la première semaine avant 1985 et qu’actuellement plus de 80 %
des décès sont observés au-delà de 21 jours d’évolution.
L’attention
actuelle se focalise sur la sauvegarde de la microcirculation,
notamment pancréatique, des travaux expérimentaux ayant montré
les effets délétères de la vasoconstriction de la microcirculation et
l’intérêt de l’hémodilution normovolémique avec réduction de
l’hématocrite d’un quart de sa valeur.
En pratique, la qualité du
remplissage doit tenir compte de l’abaissement de la pression
inhérente aux pertes plasmatiques et d’une hématocrite souhaitée
de 30 %.
La persistance d’un collapsus en dépit d’un remplissage
optimisé requiert une stratégie proche de celle du choc septique.
Le
maintien de l’hématose repose sur l’oxygénothérapie nasale qui au
début est systématique.
Elle peut être insuffisante eu égard à la gêne
mécanique consécutive à l’oedème pulmonaire non hémodynamique ou aux contraintes mécaniques engendrées par la distension
abdominale et les épanchements pleuraux et ascitiques.
La
ventilation mécanique avec intubation trachéale répond aux critères
habituels, avec une ventilation en pression positive, l’azote (NO)
inhalé pouvant trouver son indication.
Une attention toute
particulière doit être accordée aux maintiens des équilibres
métaboliques et rénaux, alors qu’une attention spécifique doit être
accordée à l’hypomagnésémie consécutive à l’hypocalcémie.
Les supplémentations doivent être cependant prudentes et reposer sur
la valeur du calcium ionisé.
Lorsque celui-ci chute et qu’il existe des
signes neuromusculaires, un apport de gluconate de calcium de base
doit être exceptionnellement majoré, une supplémentation en
magnésium étant cependant préconisée.
L’hyperglycémie est
fréquente et ne préjuge en rien du statut glycémique ultérieur.
L’apport d’insuline par voie intraveineuse continue est indiquée.
2- Traitement de la douleur
:
La recommandation d’éviter les opiacés en raison des effets
potentiels sur le sphincter d’Oddi n’est en pratique pas suivie.
De
fait, aucune étude n’a prouvé ses effets délétères sur le cours de la PA.
Par ailleurs, il n’existe pas d’essai contrôlé randomisé ayant
comparé l’infusion de procaïne à l’utilisation des opiacés.
La
potentialisation de l’effet antalgique par les opiacés agonistes purs
ou agonistes-antagonistes grâce à une sédation et/ou une anxiolyse
est préconisée.
Un bloc analgésique coeliaque a été évalué dans
une étude ouverte mais n’est pas d’utilisation répandue.
La voie
péridurale est préconisée par certains, mais doit obéir aux règles
habituelles et être proscrite dans un contexte de coagulopathie.
Une
association à la morphine jusqu’à 4 mg/24 heures a été proposée,
mais ne s’adresse qu’à 20 % des patients.
Dans un quart des cas, un
traitement antalgique adjuvant par voie générale est nécessaire et
dans 30 % des cas une diminution de la pression artérielle était
notée.
Ces études ouvertes ne permettent pas de préconiser un
recours généralisé à cette technique en l’état actuel des résultats. Par
ailleurs, cette méthode peut majorer l’hypovolémie relative lors de
la PA.
3- Traitement nutritionnel
:
Les besoins énergétiques sont d’autant plus élevés que la PA est
grave et qu’il existe une complication septique.
Ce besoin oscille
entre 1,4 et 1,6 fois la dépense énergétique prédite selon la formule
de Harris et Benedict. L’apport énergétique doit être couvert pour
60 à 70 % par un apport glucosé.
Les conséquences de
l’administration parentérale de lipides sur l’évolution de la PA nécrosante (en dehors du sepsis) ont été étudiées de façon
prospective dans un seul essai.
Il n’existe pas de différence
d’évolution des signes cliniques ou biologiques chez des patients
recevant 2 g/kg/j de glucides, par rapport à ceux recevant la même
charge glucidique complétée par une émulsion lipidique à la dose
de 1,5 g/kg/j.
Un apport de 2 à 3 g/kg/j de protides est
recommandé.
L’apport d’acides aminés branchés, destiné à réduire
le catabolisme azoté et à pourvoir un substrat nécessaire à la
synthèse hépatique des protéines, a été évalué de façon randomisée
sans avoir d’effet sur les paramètres mesurant le catabolisme, le taux
sérique d’albumine ou de préalbumine ou de rétinol binding
protein.
Compte tenu du fait d’une déplétion des facteurs
antioxydants physiologiques (vitamines A, C, E, bêtacarotène et
sélénium), l’intérêt d’un apport de N-acétylcystéine a été évalué de
façon randomisée au cours de la PA ; il existe, au troisième jour
d’évolution, une diminution du score APACHE II dans le groupe
traité.
Une supplémentation parentérale de nutriments
antioxydants a été également évaluée de façon randomisée chez les
patients présentant une PA récidivante ; il existe une normalisation
des concentrations sériques d’antioxydants naturels chez les patients
supplémentés, associée à une diminution de la rechute
symptomatique chez les patients supplémentés comparés à ceux
recevant le placebo.
La seule étude prospective randomisée ayant tenté de préciser
l’influence de la nutrition parentérale sur le pronostic s’est adressée à des patients présentant une PA bénigne, d’origine alcoolique huit
fois sur dix.
Aucune diminution de morbidité ou de mortalité n’a
été constatée chez les patients ayant bénéficié d’une nutrition
parentérale totale dès les 24 premières heures d’évolution.
Depuis, plusieurs études ouvertes ou comparaisons historiques ont
montré que la mortalité était corrélée à l’absence de positivité du
bilan azoté par la nutrition parentérale.
Cependant, dans les
comparaisons historiques, il est noté dans plusieurs études que les
malades ayant une nutrition parentérale pour PA ont une incidence
des complications septiques au niveau de la voie veineuse centrale
plus élevée que celle de patients recevant une même nutrition pour
d’autres indications.
Quant à la voie préférée pour réaliser
l’apport nutritionnel, elle est éminemment dépendante de la
persistance ou de la régression de l’iléus intestinal.
La nutrition entérale en site jéjunal est théoriquement possible, sans
modifications de la composition ou de l’importance des sécrétions
pancréatiques.
Une étude comparant la nutrition nasojéjunale à
la nutrition parentérale chez des patients présentant une PA
d’intensité modérée n’a trouvé aucune différence en termes de
morbidité ou de mortalité.
Un travail plus récent a comparé
de façon randomisée, chez des patients présentant une PA sévère, la
nutrition par sonde nasojéjunale semi-élémentaire et une nutrition
parentérale à l’aide d’un cathéter veineux central.
Le taux de
complications, notamment septiques, était significativement diminué
dans le groupe traité par nutrition entérale, associé à un coût moins
élevé.
Ainsi, les recommandations proposées pour la nutrition artificielle
au cours de la PA reposent sur les résultats enregistrés suivants :
– ni la nutrition entérale, ni la nutrition parentérale n’ont d’effets
bénéfiques sur l’évolution clinique des patients atteints de PA
bénigne ou modérée ;
– la nutrition entérale est privilégiée chez les patients atteints de
pancréatite, notamment par voie jéjunale où elle est souvent bien
tolérée sans exacerbation des symptômes chez les patients atteints
d’une PA bénigne ou modérée, ainsi que chez les patients qui ont
une intervention chirurgicale pour complications de la pancréatite ;
– ni le site de nutrition (gastrique, duodénal ou jéjunal), ni le type
d’apport entéral (semi-élémentaire ou polymérique) ne peuvent être
recommandés actuellement afin de diminuer le risque
d’exacerbation des symptômes de la maladie ;
– les émulsions lipidiques intraveineuses peuvent être utilisées chez
les patients atteints de PA à condition d’éviter une hypertriglycéridémie supérieure à 4 g/L.
4- Traitement des complications infectieuses
:
Il faut dissocier traitement préventif et traitement curatif d’une
infection prouvée de la nécrose pancréatique.
* Antibioprophylaxie systémique
:
Pour tenter de prévenir les complications septiques au niveau de la
nécrose pancréatique, certains auteurs ont préconisé l’utilisation
d’antibiotiques à titre prophylactique.
Quatre études ont évalué
l’ampicilline ou la céphalotine, incluant des patients
présentant presque exclusivement des pancréatites éthyliques
bénignes.
Les résultats de ces quatre essais sont négatifs, tant sur
l’incidence des complications septiques abdominales ou extraabdominales
que sur la survie.
L’ampicilline est cependant sécrétée
faiblement dans le tissu et les sécrétions pancréatiques
pathologiques.
Depuis, quatre études randomisées ont évalué
l’intérêt d’une antibiothérapie précoce au cours de la PA.
La
première concernait des patients atteints de PA nécrosante
biliaire ou alcoolique et l’antibiothérapie évaluée était l’imipénème
à la dose de 0,5 g intraveineux toutes les 8 heures pendant 14 jours,
débutée sitôt la confirmation tomodensitométrique de la nécrose
pancréatique.
Il existait une diminution de l’incidence des infections
pancréatiques (12 % versus 30 %) et extrapancréatiques (15 % versus
48 %) sans modification significative de la fréquence de défaillances
viscérales (9 % versus 39 %), ni de la mortalité (7 % versus 12 %).
La seconde étude a inclus des patients présentant une première PA
alcoolique nécrosante sévère et l’antibiotique testé était le céfuroxime
à la dose de 1,5 g intraveineux toutes les 8 heures, poursuivi jusqu’à
la normalisation clinique et du taux de protéine C réactive.
Cependant, dans le groupe traité par céfuroxime, 20 des 30 patients
ont eu un changement d’antibiotique en moyenne 9 jours après le
début de l’antibioprophylaxie.
En outre, dans le groupe contrôle, un
traitement antibiotique a été débuté chez 23 des 30 patients 6 jours
après la randomisation.
Il existait une diminution significative du
nombre moyen d’infections par malade, mais non significative du
nombre de malades ayant eu une complication infectieuse (67 %
versus 83 %).
Il existait également une diminution significative de la
mortalité (3,3 % versus 22 %).
La troisième étude a évalué
23 patients présentant une pancréatite alcoolique grave et traités par
une association d’antibiotiques : ceftazidime (2 g toutes les 8 heures),
amikacine (7,5 mg/kg toutes les 12 heures) et métronidazole (500 mg
toutes les 8 heures) pendant 10 jours.
Il existait une diminution
significative du taux d’infections dans le groupe traité (0 % versus
58 %), alors que la mortalité n’était pas diminuée (un décès sur
12 versus trois décès sur 11).
Plus récemment, une quatrième
étude a randomisé 60 patients présentant une PA sévère avec
nécrose atteignant au moins 50 % du parenchyme : la péfloxacine
(400 mg deux fois par jour) a été comparée à l’imipénème (500 mg
trois fois par jour) débuté dans les 5 jours après le début des
symptômes et poursuivi durant 15 jours.
Il existait une diminution
significative de l’incidence de l’infection de la nécrose pancréatique
dans le groupe traité par imipénème (10 % versus 34 %), de même
que de l’incidence des infections extrapancréatiques (20 % versus
44 %).
La mortalité n’était pas différente dans les deux groupes (10 %
versus 24 %).
Ces quatre études ne justifient donc pas l’antibioprophylaxie
systémique et systématique dans les PA nécrosantes non graves.
Dans les pancréatites nécrosantes et sévères, l’antibioprophylaxie
permet de diminuer l’incidence des infections de la nécrose
pancréatique et des infections extrapancréatiques.
Cette antibioprophylaxie ne se justifie qu’en utilisant des antibiotiques à
bonne diffusion au niveau du pancréas inflammatoire et/ou
nécrotique.
Cette antibioprophylaxie ne permettant pas de diminuer
la mortalité nécessite donc une évaluation plus précise de son
retentissement sur l’écosystème et la sélection des germes dans les
unités de soins intensifs ou de réanimation.
* Décontamination digestive sélective
:
Avant l’avènement des essais contrôlés randomisés évaluant l’intérêt
d’une antibioprophylaxie systémique, le spectre des bactéries
trouvées dans la nécrose pancréatique infectée était compatible avec
une origine intestinale.
La surinfection de la nécrose pancréatique
pourrait être secondaire à des translocations d’origine intestinale,
favorisées par les lésions ischémiques de la muqueuse intestinale.
Expérimentalement, la décontamination digestive permet de réduire
la fréquence de l’infection de la nécrose pancréatique.
Son utilité
chez l’homme a été évaluée dans une étude contrôlée randomisée
incluant des patients atteints de PA nécrosante et grave d’origine
alcoolique ou biliaire.
La décontamination associait colistine, amphotéricine et norfloxacine per os à des applications locales au
niveau des portes d’entrée respiratoires et digestives, jusqu’à ce que
les patients soient sortis de réanimation, extubés et déperfusés.
En
outre, une prophylaxie par céfotaxime systémique était mise en
place jusqu’à la preuve bactériologique de l’absence de germes à
Gram négatif au niveau de la bouche et du rectum.
Il existait une
diminution significative du nombre de laparotomies et surtout du
taux d’infection de la nécrose pancréatique (18 % versus 38 %) dans
le groupe traité.
Les taux d’infection de la nécrose pancréatique à
germes à Gram négatif étaient également significativement diminués
(8 % versus 33 %).
Il existait une diminution significative de la
mortalité dans le groupe traité (22 % versus 35 %) par réduction de
la mortalité tardive (2 semaines après le début de la PA).
Ces
résultats sont encourageants, mais l’association d’une
antibiothérapie systémique ne permet pas de juger de l’effet de la décontamination digestive seule et par ailleurs, le délai entre le
début des symptômes et l’institution d’une telle prophylaxie n’était
pas précisé.
* Traitement de la nécrose pancréatique infectée
:
Celui-ci peut faire appel au drainage percutané sous contrôle
radiologique et en particulier tomodensitométrique, ou au drainage
chirurgical.
+ Drainage percutané des collections liquidiennes infectées
:
La classification issue du consensus d’Atlanta reconnaît deux types
de complications infectieuses intra-abdominales au cours de la PA.
Il s’agit des nécroses infectées et des abcès. Dans les deux cas, il
est nécessaire de mettre en place un drainage efficace.
En effet, à ce
stade, le traitement médical exclusif conduit inéluctablement à
l’échec. Ce drainage est classiquement chirurgical par voie transpéritonéale ou par un abord électif rétropéritonéal.
Le
développement du drainage percutané des collections ou des abcès intra-abdominaux postopératoires a contribué à l’extension de cette
technique au traitement des complications de la PA.
Cette méthode
a montré son efficacité et sa moindre morbidité, notamment
pariétale, comparées au drainage chirurgical. L’évaluation de ces
résultats pour les complications infectieuses accompagnant la PA est
difficile car si ce type de drainage est réservé aux complications
infectieuses, il s’agit de collections liquidiennes aiguës infectées, ou
de nécroses surinfectées non encore liquéfiées, ce qui peut peut-être
rendre compte d’une certaine hétérogénéité des résultats.
Ainsi, les
séries évaluant le drainage percutané des complications infectieuses intra-abdominales des PA avec nécrose parenchymateuse ont traité
six à 30 patients avec des drains dont le diamètre était entre 8 et
24 frenchs.
Le taux de conversion pour un traitement chirurgical
après échec variait de 33 à 85 %.
Le taux de complication
difficilement évaluable s’élève autour de 20 % pour la persistance
de collections liquidiennes et de 10 % pour les complications
majeures à type de fistules digestives. La durée du drainage,
variable selon les études, s’élève en moyenne à 20 jours.
Le drainage transpariétal transgastrique ne modifie pas ces résultats.
Plus
récemment, cette technique de drainage transpariétal a été améliorée
en utilisant des drains de fort diamètre (28 frenchs) ou par
débridement transpariétal complémentaire.
Ces adaptations
permettaient d’éviter définitivement un traitement chirurgical dans
50 % des cas.
+ Drainage chirurgical de la nécrose infectée
:
L’alternative au drainage percutané par voie radiologique est le
recours au drainage chirurgical. Ce drainage, associé à une nécrosectomie, est actuellement préféré aux résections qui ont
démontré leurs fortes morbidité et mortalité.
La voie d’abord
reste discutée : la voie classique transpéritonéale permet une
nécrosectomie initiale ou complète sous contrôle visuel avec mise
en place d’une jéjunostomie d’alimentation, alors que la voie
rétropéritonéale, moins répandue, n’autorise qu’une nécrosectomie
aveugle, parfois incomplète.
Le choix dépend essentiellement du
site de la nécrose.
Une seule étude prospective randomisée a évalué
l’impact du drainage chirurgical par rapport au début des
symptômes, en comparant la nécrosectomie précoce (48 à 72 heures
après le début de la maladie) à la nécrosectomie tardive (au moins
12 jours après le début des symptômes).
Cependant, l’ensemble des nécrosectomies n’était pas réalisé pour une surinfection de la
nécrose, bien que le pourcentage de nécroses infectées soit identique
dans les deux groupes.
L’étude a été interrompue avant son terme
en raison de la forte morbidité associée à la nécrosectomie
précoce.
5- Traitements spécifiques
:
Ceux-ci visent à mettre au repos le pancréas ou à lutter contre
l’activation enzymatique ou contre la cascade des médiateurs pro-inflammatoires.
– Parmi les moyens pharmacologiques visant à réduire les
sécrétions pancréatiques, le glucagon et la calcitonine se sont avérés inefficaces.
Les antisécrétoires acides n’ont pas fait la preuve de
leur intérêt au cours de la PA.
L’utilisation d’inhibiteurs
plasmatiques naturels des protéases comme l’alpha-2
macroglobuline, qui peut être apportée par plasma frais congelé, a
été évaluée chez des patients présentant une PA biliaire ou
alcoolique dont un tiers était grave.
Les patients étaient
randomisés, un groupe recevant deux unités de plasma frais congelé
par jour pendant 3 jours et l’autre un volume équivalent d’albumine
humaine comme solution colloïde témoin.
Il n’existait pas de
différence entre les deux groupes en termes de morbidité (14 %
versus 20 %) et de mortalité (8 % versus 9 %).
– Le gabexate mesilate est également un antagoniste des protéases de
faible poids moléculaire permettant un passage intracellulaire au
niveau de la cellule acineuse qui a été évalué dans cinq essais
randomisés.
Dans ces essais randomisés, la pancréatite était
d’origine alcoolique dans 18 à 48 % des cas. Le gabexate mesilate
était utilisé à des doses variant de 600 mg à 4 g/j pendant 7 à
14 jours.
Dans aucune de ces études il n’existait une différence
significative en termes de morbidité ou de mortalité.
Ainsi, en
cumulant ces études, le taux de mortalité chez les patients traités et
chez les témoins était respectivement égal à 10,7 et 12,8 %.
On peut
donc conclure qu’à faibles ou fortes doses, le gabexate mesilate
n’influence pas l’évolution des pancréatites, quelle qu’en soit
l’étiologie ou la sévérité.
– Un traitement visant à s’opposer aux facteurs d’activation
plaquettaires (platelet activiting factor [PAF]) a été proposé afin de
s’opposer à ce médiateur pro-inflammatoire synthétisé par les
cellules endothéliales, les polynucléaires, les macrophages et les
plaquettes après activation par la phospholipase A2.
Le Lexipafantt
est un antagoniste puissant du PAF qui se lie à son récepteur
membranaire.
Ce traitement a été évalué dans deux études
prospectives randomisées et administré dans le groupe traité à
doses de 60 ou 100 mg/j.
Ce traitement était institué 48 ou 72 heures
après le début de la PA. Après 7 jours de traitement, seule la
première étude mettait en évidence une diminution non significative
de la morbidité dans le groupe traité par rapport au groupe placebo
(4/42 versus 11/41), avec une différence significative en termes de
complications et de défaillance rénale.
Dans ces études, la mortalité
était comparable dans les groupes traités et sous placebo ; elle était
respectivement, dans ces séries cumulées, égale à 8 et 12%.
La
différence de résultats pourrait s’expliquer par la différence de
sévérité des PA incluses dans ces deux essais.
En effet, dans l’étude
où une diminution de la prévalence des défaillances viscérales était
constatée au terme du traitement, les patients présentaient des
pancréatites de gravité modérée ou sévère, alors qu’à l’inverse, dans
la seconde étude, toutes les PA étaient sévères.
Cette différence,
associée à un délai entre l’initiation du traitement et le début de la
PA plus court dans l’essai positif (48 heures versus 72 heures),
suggère que ce traitement aurait plus un effet préventif que curatif
des conséquences viscérales du syndrome de réponse inflammatoire
systémique.
– La somatostatine et son analogue synthétique, l’octréotide, sont des
inhibiteurs de la sécrétion pancréatique exocrine.
L’intérêt de la
somatostatine (250 μg/h durant 3 à 7 jours), ainsi que celui de
l’octréotide (200 à 600 μg/j durant 5 à 21 jours) ont été évalués dans
respectivement 13 et neuf essais dont six étaient randomisés, les
autres n’étant que contrôlés.
La méta-analyse de ces essais a
montré qu’il existait une réduction significative de la mortalité chez
les patients traités par somatostatine, que l’ensemble des essais ou
uniquement ceux randomisés soient pris en compte (risque relatif
[RR] à 0,36 et 0,39 respectivement).
Concernant l’octréotide, la
diminution de la mortalité était significative uniquement lorsque
l’ensemble des essais était pris en compte, alors que lorsque les deux
essais contrôlés non randomisés étaient retirés, cette réduction de la
mortalité ne faisait qu’approcher la significativité (RR respectifs à
0,57 et 0,64).
Aucun de ces traitements ne réduisait de façon
significative le RR de complications, et donc le taux de morbidité.
Ces résultats ne concernent que les patients présentant une PA
sévère.
La méta-analyse pour les patients présentant une PA modérée ne mettait pas en évidence d’intérêt en termes de mortalité
ou de morbidité pour l’utilisation d’un de ces deux inhibiteurs des
sécrétions pancréatiques.
– Les antisécrétoires gastriques (antihistaminiques ou inhibiteurs de
la pompe à protons) n’ont pas fait la preuve de leur utilité au cours
de la PA.
B - TRAITEMENT ENDOSCOPIQUE
:
Il s’agit essentiellement de préciser la place de la cholangiographie
rétrograde associée à la sphinctérotomie endoscopique au cours de
la PA biliaire.
Il s’agit ici d’analyser les résultats de ce traitement
pour modifier le pronostic de la PA en dehors des complications
biliaires spécifiques.
Quatre études ont tenté de répondre à cette
question sous la forme d’essais randomisés.
Il existe une
certaine hétérogénéité des résultats en termes de différence de
morbidité et de mortalité attribuable à des stratégies différentes dans
ces études.
Deux études montrent qu’il n’existe pas de
diminution de la morbidité ou de la mortalité lorsqu’une sphinctérotomie endoscopique est réalisée chez les patients
présentant une PA bénigne.
Deux études montrent que la
réalisation d’une CPRE, associée à une sphinctérotomie
endoscopique, permet de diminuer les complications biliaires en
diminuant le RR d’ictère et d’angiocholite.
Dans ce dernier cas,
cet objectif n’est atteint que si la sphinctérotomie endoscopique est
réalisée précocement, dans les premières 24 heures d’évolution, et si
la PA est sévère.
Le délai entre le début des symptômes et la
réalisation de la CPRE, avec éventuelle sphinctérotomie
endoscopique, est un élément important à prendre en compte,
comme l’a montré l’étude dans laquelle il n’existait pas de
diminution de la morbidité ou mortalité chez les patients traités par sphinctérotomie.
Effectivement, les patients avaient une PA qui
évoluait depuis plus de 72 heures, même si le geste endoscopique
était réalisé dans les 72 heures suivant l’admission.
L’importance de
ce délai est soulignée dans la quatrième étude qui a montré qu’il
existait une diminution de la morbidité et de la mortalité chez les
patients traités par sphinctérotomie endoscopique, qu’il y ait ou non
un calcul enclavé dans la voie biliaire principale au cours d’une PA
biliaire (critère non précisé), à condition que ce geste soit réalisé dans
les 24 premières heures d’évolution.
Ainsi, la méta-analyse de
ces quatre essais conclut à une réduction de la morbidité et de la
mortalité chez les patients bénéficiant d’un cathétérisme rétrograde
associé à une sphinctérotomie endoscopique au cours de la PA
biliaire.
Cette conclusion doit être modulée car la méthodologie
de cette méta-analyse n’est pas publiée : elle ne concerne que les PA
graves pour lesquelles le geste est réalisé précocement, dans les
24 heures suivant le début des symptômes.
Dans les autres cas, il
n’y a pas d’indication à réaliser une opacification rétrograde avec sphinctérotomie endoscopique, sauf en cas de complication biliaire
à type d’angiocholite prédominant cliniquement.
C - TRAITEMENT CHIRURGICAL
:
1- Méthodes chirurgicales
:
* Résection pancréatique réglée
:
Les pancréatectomies précoces subtotales ont été abandonnées.
Elles étaient responsables d’une mortalité importante s’élevant
jusqu’à 50 %, ne prévenaient pas la survenue d’une infection locale
et souvent aboutissaient à l’exérèse de parenchyme sain du fait
d’une nécrose le plus souvent péripancréatique.
En effet, les études
qui ont comparé les résections pancréatiques au lavage péritonéal
par voie percutanée, mis en place chirurgicalement, ont montré des
résultats en faveur du traitement non chirurgical.
Au vu de ces
résultats, l’exérèse précoce du pancréas a été abandonnée par la
majorité des chirurgiens.
* Nécrosectomie associée au drainage
:
Il s’agit de réaliser l’exérèse uniquement des tissus dévitalisés en
respectant le parenchyme sain.
Ce drainage peut se faire par
différentes voies de type fermé ou de type ouvert.
Dans le drainage fermé, la voie d’abord est médiane sus-ombilicale ;
le débridement et la nécrosectomie sont effectués à la demande et
prudemment, avec un lavage, par mise en place de drains en
Silastict à double lumière.
La mortalité hospitalière est de 12,5 %,
avec un taux de reprise chirurgicale de 30 %.
Ce drainage peut être ouvert avec une voie d’abord sous-costale
gauche, éventuellement élargie à droite, associant un débridement
et une nécrosectomie, la paroi étant lâchement refermée sur un
« packing ».
Une reprise pour nouveau débridement tous les 2 à 3
jours est réalisée avec une mortalité hospitalière de l’ordre de 17 %,
un taux de fistule de 4 %, mais avec des déhiscences de paroi
fréquentes, atteignant 34 %.
Une solution intermédiaire, notamment adoptée en France, à partir
d’une incision plutôt médiane ou bi-sous-costale, associe une
nécrosectomie à un drainage actif prolongé à l’aide de sacs de
Mikulicz.
Cette méthode de drainage est associée à une mortalité de
16 %, un taux de reprise chirurgicale de l’ordre de 30 % et un taux
non négligeable de fistules digestives ou pancréatiques de 10 à
20 %.
* Autres gestes
:
D’autres gestes chirurgicaux peuvent être réalisés en fonction des
complications à type de perforation d’organe creux, d’hémorragie
digestive ou de sténose digestive qui intéressent surtout le côlon
gauche ou l’angle gauche colique, avec une indication opératoire
d’autant plus formelle que cette complication survient précocement
dans l’histoire naturelle de la PA.
Les perforations du grêle font le
plus souvent l’objet d’un drainage percutané dirigé.
2- Indications
:
Les complications de type perforations, fistules pancréatiques
internes ou sténoses coliques sont à discuter au cas par cas, mais relèvent le plus souvent du traitement chirurgical.
L’indication
chirurgicale est plus discutée devant une nécrose pancréatique
stérile ou infectée. Pour la majorité des équipes, les interventions
chirurgicales doivent être différées le plus possible.
Il ne s’agit alors
de traiter que les lésions auxquelles on attribue l’échec du traitement
médical, au premier rang desquelles l’infection de la nécrose
pancréatique ou l’abcès.
Concernant les modalités de drainage de la nécrose pancréatique
infectée, le choix entre un drainage percutané transpariétal mis en
place sous tomodensitométrie et un drainage chirurgical associé à
une nécrosectomie doit être guidé par le caractère liquidien ou non
de la nécrose et par l’existence d’une défaillance viscérale associée.
L’indication d’un drainage chirurgical d’une nécrose pancréatique
stérile est moins consensuel.
En effet, la mortalité postopératoire en
cas de nécrose stérile est comprise entre 11 et 27 %, alors
que la mortalité spontanée de cette complication est inférieure à
15 %.
Il existe par ailleurs un risque de surinfection
secondaire du foyer opératoire de la nécrose stérile compris entre
25 et 50 % qui, dans ce cas, est associé à une mortalité de 20 à 35 %.
En outre, une intervention systématique dans cette indication
induit une morbidité spécifique dans environ 30 % des cas,
essentiellement constituée de fistules pancréatiques ou digestives.
Ces arguments, qui plaident contre la chirurgie au cours de la
nécrose stérile, doivent être opposés au risque de méconnaître une
surinfection d’une nécrose pancréatique qui correspond au taux de
faux négatifs de la ponction percutanée pour ce diagnostic et qui
s’élève aux alentours de 10 %.
Même si ce taux de faux négatifs peut
être plus élevé à la période initiale de la PA associée à une nécrose
parenchymateuse et qu’un taux de surinfection de la nécrose prouvé
chirurgicalement peut atteindre 60 % dans les 72 premières heures
d’évolution, la morbidité et la mortalité constatées chez les
patients opérés précocement pour nécrosectomie n’invitent pas à
retenir une telle indication.
En effet, cette étude qui avait pour
but de comparer de façon prospective randomisée la nécrosectomie
précoce (avant 72 heures) à la nécrosectomie tardive (après le
12e jour) a été interrompue précocement avant inclusion du nombre
de malades prévus en raison d’un taux trop élevé de morbidité et
de mortalité dans le groupe opéré précocement.
Quel que soit le type de drainage (ouvert ou fermé), une fistule
gastro-intestinale ou pancréatique survient chez 40 % des patients.
Elle nécessite souvent un traitement chirurgical spécifique et
différé.
3- Traitement chirurgical de la lithiase biliaire au cours
d’une PA
:
Il s’agit de préciser le moment optimal pour pratiquer le traitement
de la lithiase biliaire lorsqu’elle est reconnue ou présumée
responsable de la PA.
Une étude prospective a comparé les
résultats de la chirurgie biliaire pratiquée dans les 48 heures suivant
l’admission à celle réalisée à distance.
Cette étude a montré que
dans les PA bénignes, la morbidité et la mortalité n’étaient pas
significativement différentes et respectivement égales à 7 et 3% chez
les patients opérés précocement et à 3 et 0%chez les patients opérés
tardivement.
Au contraire, chez les patients présentant une PA
grave, la différence de morbidité et de mortalité était
significativement en défaveur de la chirurgie précoce
(respectivement 83 et 48 %) comparée à la chirurgie retardée
(respectivement 18 et 12 %).
Signalons que dans cette étude, un
calcul impacté était mis en évidence chez 26 % des patients opérés
dans les 48 premières heures et chez seulement 5 % des patients
opérés au-delà de 48 heures.
Il est donc clair que le délai de
48 heures peut même sembler insuffisant et que dans les PA
bénignes, il est inutile de différer la chirurgie, alors que dans les
formes graves, la priorité doit être donnée au traitement de la PA et
de ses complications.
Dans tous les cas, il doit y avoir une
exploration de la voie biliaire principale pré- ou peropératoire en
fonction du type de chirurgie réalisée et des habitudes des
collaborations médicochirurgicales.
Conclusion
:
Le pronostic de la PA dépend de sa sévérité.
Le symposium d’Atlanta de
1992 a proposé de classer les PA comme sévères devant la présence de
critères cliniques ou de nécrose pancréatique parenchymateuse : celle-ci
est présente dans 20 à 30 % des 185 000 cas incidents de PA aux États-Unis.
La mortalité globale est de 30 % mais 80 % des décès
surviennent actuellement au cours des PA présentant une nécrose
surinfectée.
Le traitement fait appel à une stratégie
médicochirurgicale hiérarchisée.