Bookmark and Share                    Rechercher dans le site  |   Devenir membre
      Accueil       |      Forum     |    Livre D'or      |     Newsletter      |      Contactez-nous    |                                                                                                          Envoyer par mail  |   Imprimer
loading...

 
Réanimation-Urgences
OEdème aigu du poumon d’origine cardiogénique
Cours de réanimation - urgences
 

 

 

Introduction :

L’oedème aigu du poumon (OAP) cardiogénique est une situation fréquemment rencontrée en pratique de médecine d’urgence.

La prise en charge médicalisée doit être la plus précoce possible.

La population touchée est essentiellement âgée, d’autant plus dans les pays riches où l’évolution démographique est marquée par un vieillissement important.

Physiopathologie :

La physiopathologie de l’OAP cardiogénique est de mieux en mieux appréhendée.

Deux grands mécanismes sont identifiés, à savoir une altération de la fonction systolique d’une part et des troubles de la relaxation myocardique d’autre part.

Il est entendu que ces mécanismes peuvent être intriqués en pratique clinique.

La compréhension de ces aspects physiopathologiques est indispensable afin d’adapter la thérapeutique et d’améliorer la prise en charge globale à la phase aiguë.

A - POSITION DU PROBLÈME :

L’OAP cardiogénique se définit comme une augmentation de la pression hydrostatique dans la microcirculation pulmonaire résultant d’une hypertension postcapillaire.

En se rapportant à l’équation de Starling, les forces qui tendent à protéger le poumon et à le maintenir sec sont la pression oncotique plasmatique, le coefficient d’imperméabilité de la membrane alvéolocapillaire aux protéines plasmatiques, la pression hydrostatique interstitielle et le système de drainage lymphatique.

Les forces hémodynamiques opposées sont les pressions capillaire pulmonaire et oncotique.

À l’état normal, la pression capillaire pulmonaire est de l’ordre de 7 à 12 mmHg et la pression oncotique de 25 mmHg.

Dans ces conditions, le liquide est maintenu dans les capillaires pulmonaires.

La survenue d’un OAP est liée à une élévation brutale de la pression hydrostatique dans la microcirculation pulmonaire au-delà de 25 mmHg.

La conséquence directe est une extravasation de liquide dans le tissu interstitiel puis alvéolaire, conduisant à des troubles profonds de l’hématose avec hypoxémie et à une diminution de la compliance pulmonaire.

Cette augmentation de la pression hydrostatique dans la microcirculation pulmonaire résulte d’une incapacité du coeur gauche à compenser le retour veineux pulmonaire.

La dysfonction du coeur gauche peut être systolique, diastolique ou mixte.

La principale étiologie de l’OAP cardiogénique est la pathologie ischémique myocardique.

B - MISE EN JEU DES MÉCANISMES PHYSIOPATHOLOGIQUES :

Le débit cardiaque est le produit du volume d’éjection systolique (VES) par la fréquence cardiaque.

Le VES dépend de la contractilité et des conditions de charge (pré- et postcharge ventriculaires gauches).

Le VES est égal à la différence entre les volumes télédiastolique et télésystolique du ventricule gauche.

La fonction ventriculaire gauche se caractérise par sa fonction diastolique (relation pression-volume télédiastolique) et par sa fonction systolique (relation pression-volume télésystolique).

En pathologie, l’altération de la fonction systolique se définit par une diminution de la contractilité et/ou une élévation de la postcharge.

Le maintien du VES se fait au prix d’une majoration du volume télédiastolique ventriculaire gauche qui va s’accompagner d’une augmentation de la pression télédiastolique ventriculaire gauche (interdépendance de la précharge et de la contractilité, et/ou de la précharge et de la postcharge).

Ce phénomène se mesure par une élévation de la pression de l’artère pulmonaire occluse (PAPo) lors d’un monitorage invasif hémodynamique.

Ce mécanisme d’adaptation est limité par l’augmentation de la pression hydrostatique pulmonaire responsable des signes congestifs avec oedème interstitiel puis intraalvéolaire de l’OAP.

L’altération de la fonction diastolique traduit une diminution du remplissage ventriculaire gauche liée à une réduction de la distensibilité (compliance) diastolique.

Le VES est alors maintenu au prix d’une augmentation de la pression télédiastolique ventriculaire gauche.

Cette altération de la fonction diastolique entraîne une très mauvaise tolérance de ces patients aux modifications des conditions de remplissage du ventricule gauche.

Ainsi, les tachycardies ou la perte de la systole auriculaire par fibrillation auriculaire altèrent le remplissage ventriculaire gauche et conduisent à une augmentation de la pression hydrostatique pulmonaire malgré une contractilité normale, voire augmentée.

La compréhension de ces mécanismes physiopathologiques a évolué récemment.

Ceci permet de les aborder sous une vision différente ou tout au moins complémentaire.

Les données de la recherche fondamentale permettent de mieux appréhender la réponse cellulaire myocardique vis-à-vis d’anomalies de fonctionnement, de conditions de charge ou d’altérations de la fonction pompe.

Les études animales contribuent également à approfondir les connaissances, en détaillant la réponse du myocarde sur l’animal entier.

Les résultats cliniques contribuent à l’interprétation de ces mécanismes. Les nouveaux concepts intègrent des phénomènes complexes neurohormonaux et inflammatoires mis en jeu lors de la baisse de débit cardiaque.

Il s’agit en particulier du système rénineangiotensine- aldostérone, du système sympathique, des cytokines, des peptides natriurétiques, de l’arginine-vasopressine, des facteurs endothéliaux...

Ces différents facteurs sont intriqués de façon variable en fonction des conditions de charge, de la nature du facteur déclenchant et du stade évolutif de la cardiopathie.

Le système rénine-angiotensine-aldostérone est activé par une baisse du débit de perfusion rénal.

Il en découle une élévation significative des concentrations plasmatiques de rénine et d’angiotensine II, qui est un puissant vasoconstricteur et stimulateur de l’activation du système sympathique et de la sécrétion d’aldostérone.

Le résultat aboutit à une rétention hydrosodée.

La sécrétion exacerbée et prolongée d’angiotensine II et d’aldostérone joue également un rôle délétère sur le cardiomyocyte par le biais d’une dysfonction endothéliale, d’une toxicité cellulaire directe et d’une activité procollagène participant au remodelage ventriculaire.

Celui-ci constitue un des mécanismes majeurs de réponse du ventricule gauche.

Le système nerveux sympathique, par l’intermédiaire de la noradrénaline, permet au début de la phase aiguë de maintenir une hémodynamique efficace par augmentation de la fréquence cardiaque et de l’inotropisme.

À terme, une stimulation excessive est associée à une apoptose des cardiomyocytes, une hypertrophie, une nécrose myocardique focale aggravant le processus de remodelage.

Les cytokines et peptides ont également un rôle à jouer.

L’atrial natriuretic peptide, sécrété par les oreillettes, et le brain natriuretic peptide, relargué par les ventricules lors d’une augmentation des conditions de charge, sont des antagonistes physiologiques de l’angiotensine II, de la sécrétion d’aldostérone et de la réabsorption sodée.

La sécrétion d’endothéline 1 par les cellules endothéliales est un puissant agent vasoconstricteur, notamment rénal.

Elle intervient dans les mécanismes de rétention hydrosodée et d'aggravation de l’insuffisance cardiaque congestive.

Enfin, le tumor necrosis factor (TNF) alpha semble également jouer un rôle néfaste sur la contraction des cardiomyocytes.

C - CONSÉQUENCES DE LA MISE EN JEU DES MÉCANISMES NEUROHORMONAUX :

Dans l’hypertension artérielle, l’augmentation de la postcharge est responsable d’une contrainte pariétale à l’origine de l’hypertrophie ventriculaire gauche concentrique.

L’hypertrophie des myocytes est secondaire à la réactivation de l’expression de gènes embryonnaires de synthèse des protéines cardiaques.

En réponse à ces contraintes hémodynamiques et biomécaniques, des facteurs de croissance myocardique liés à l’hypertension artérielle sont produits. De plus, l’activation du système rénine-angiotensine-aldostérone favorise la synthèse du collagène intramyocardique.

Ces modifications (hypertrophie des myocytes et fibrose interstitielle myocardique) sur plusieurs années vont générer le processus de remodelage qui associe une hypertrophie e t une modification géométrique du ventricule gauche.

En conséquence, une dysfonction diastolique et systolique s’instaure, aboutissant in fine à une dilatation cavitaire, une insuffisance cardiaque congestive et à l’apparition de troubles du rythme graves, facteurs fréquents de mort subite.

L’association d’une dysfonction endothéliale et d’une atteinte de la microperfusion des couches épicardiques et sous-endocardiques est probablement à l’origine de l’intrication de la pathologie hypertensive et de la pathologie ischémique.

Des travaux récents montrent que les statines, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, la spironolactone, les antioxydants, tous actifs sur la fonction endothéliale, peuvent avoir un rôle bénéfique. Une poussée hypertensive sur une cardiopathie hypertensive préexistante s’accompagne d’un trouble de la relaxation et d’une dysfonction diastolique à l’origine de l’OAP.

De même, la survenue d’une fibrillation auriculaire s’accompagne à la fois d’une aggravation de la dysfonction diastolique, mais aussi d’une dysfonction systolique avec baisse du débit cardiaque.

L’hypoperfusion rénale qui en résulte active le système rénine-angiotensine-aldostérone, aboutissant à la constitution secondaire de signes de surcharge.

Également, une hypovolémie significative induite par un traitement médicamenteux déplétif ou vasodilatateur excessif sur un myocarde compliant entraîne, par le biais de l’aldostérone et de l’angiotensine II, une activation du système rénine-angiotensinealdostérone avec la constitution secondaire d’un état congestif lié à la rétention hydrosodée.

La connaissance de ces mécanismes physiopathologiques, intriqués, variables dans le temps et d’interprétation difficile, doit être appréhendée avant d’instaurer un traitement qui peut devenir potentiellement délétère.

Prise en charge préhospitalière :

L’OAP cardiogénique est une pathologie mettant en jeu le pronostic vital immédiat.

Une prise en charge optimale fait appel à une médicalisation préhospitalière et à une orientation adaptée dans une structure de soins, sans discontinuité de thérapeutique ni de surveillance.

La coordination de cette chaîne de secours est assurée par la régulation médicale du Service d’aide médicale urgente centre 15.

L’OAP cardiogénique réalise une insuffisance respiratoire et circulatoire nécessitant une prise en charge optimisée dès la phase préhospitalière.

Il s’agit d’une éventualité fréquente pour les équipes de secours, vu l’augmentation de la prévalence de l’insuffisance cardiaque chez le sujet âgé.

A - ALERTE :

L’appel au centre 15 permet au médecin régulateur d’évoquer rapidement la situation de détresse.

L’âge, le mode de vie, les antécédents cardiovasculaires et autres sont systématiquement recherchés.

La nécessité d’une médicalisation est généralement évidente.

B - ÉLÉMENTS DU DIAGNOSTIC CLINIQUE :

Le médecin préhospitalier se trouve devant un patient demi-assis en insuffisance respiratoire aiguë avec sensation de mort imminente.

L’existence de signes de lutte respiratoire, la cyanose, les sueurs profuses liées au taux élevé de catécholamines, les marbrures signant un état de choc sont des éléments de gravité.

L’agitation et les troubles du comportement peuvent être dus à l’anxiété, à une atteinte neurologique préexistante ou à l’hypoxie.

La tension artérielle doit toujours être interprétée en fonction des valeurs habituelles.

Une pression artérielle systolique supérieure à 150 mmHg a une valeur pronostique favorable, au contraire d’une hypotension artérielle, témoignant d’un choc cardiogénique ou d’une pathologie iatrogène.

La tachycardie est due à l’hypoxie ; une bradycardie est le témoin dans la plupart des cas d’une mauvaise tolérance de l’insuffisance cardiaque.

L’auscultation pulmonaire est souvent aspécifique, avec des râles crépitants et souscrépitants, plus rarement des sibilants.

La perception de râles sibilants seuls ne doit pas égarer le diagnostic vers une crise d’asthme chez le sujet de 60 ans et plus sans antécédent asthmatique.

Il s’agit d’un authentique OAP, souvent dénommé pseudo-asthme cardiaque.

C - MONITORAGE PRÉHOSPITALIER :

Il est standardisé et doit permettre une surveillance effective.

Il comprend un monitorage de la fréquence cardiaque, de la tension artérielle, de la saturométrie de pouls. Dans le cas où une ventilation mécanique est nécessaire, la mesure de la pression téléexpiratoire de gaz carbonique (CO2) doit être installée.

Les palettes du défibrillateur sont prêtes à l’emploi.

De mise en oeuvre rapide, le monitorage permet de signaler en temps réel des complications pouvant survenir durant le transport.

D - ÉLÉMENTS DU DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE PRÉHOSPITALIER :

De conception récente, les équipes préhospitalières peuvent pratiquer certains dosages biologiques en temps réel.

Le dosage de la troponine est fiable et facile de réalisation.

Il a un intérêt direct sur l’orientation du patient présentant un syndrome coronarien aigu.

Toutefois, ces mesures n’ont de valeur que pour des patients examinés au-delà de la troisième heure, délai nécessaire à l’élévation significative du marqueur.

Depuis 1 an, plusieurs études tendent à démontrer l’intérêt du dosage précoce du brain natriuretic peptide. Hormone spécifique des myocytes du ventricule gauche, son intérêt réside dans son aide au diagnostic, mais aussi à l’évaluation du pronostic.

Les sensibilité et spécificité sont proches de 95 % dans le diagnostic d’insuffisance cardiaque congestive, avec une valeur prédictive positive de 95 % et une valeur prédictive négative de 98 %.

Le dosage plasmatique du brain natriuretic peptide en pratique préhospitalière semble constituer un argument de poids dans l’affirmation de l’origine cardiogénique d’un OAP ou d’une dyspnée brutale, tout particulièrement chez le sujet âgé.

La restriction à la pratique de ces dosages est qu’ils ne doivent en aucun cas retarder la mise en oeuvre d’un traitement par définition urgent, et ce d’autant que le tableau clinique est évident dans une très grande majorité des cas.

La gazométrie artérielle peut également être pratiquée en préhospitalier. Son intérêt reste toutefois limité, dans la mesure où elle n’a que peu d’incidence sur la stratégie thérapeutique ou l’évaluation de la gravité.

L’examen clinique reste la clé de voûte du diagnostic positif, appuyé par l’électrocardiogramme et éventuellement par des dosages biologiques précoces.

L’ensemble permet d’envisager avec confiance l’origine cardiogénique d’un OAP.

E - ESTIMATION PRÉHOSPITALIÈRE DE LA GRAVITÉ :

La gravité est appréciée sur l’existence de troubles de la conscience, d’une saturation artérielle en oxygène effondrée, des signes de lutte respiratoire, un collapsus cardiovasculaire, la constatation d’un infarctus à la phase aiguë.

En présence d’un ou plusieurs de ces éléments et en l’absence d’une réponse thérapeutique rapide, une ventilation assistée doit être envisagée.

La classification de Killip peut présenter un intérêt pour les équipes de réanimation préhospitalières dans leur stratégie d’orientation.

Les OAP classe I ou II de Killip relèvent d’un service d’urgence, puis d’un service de cardiologie conventionnelle.

Les classes III ou IV de Killip nécessitent une orientation en service de réanimation au mieux cardiologique et pouvant offrir dans des délais brefs des possibilités de reperfusion instrumentale.

F - ORIENTATION ÉTIOLOGIQUE PRÉHOSPITALIÈRE :

L’orientation étiologique s’attache à rechercher les causes susceptibles d’être immédiatement accessibles en préhospitalier.

Les trois étiologies le plus fréquemment rencontrées sont les cardiopathies ischémiques, les cardiopathies hypertensives et les tachyarythmies.

Pour les pathologies ischémiques, l’OAP survient souvent sur une cardiopathie connue.

En effet, un grand nombre de patients porteurs d’une insuffisance cardiaque ont une maladie coronarienne.

Les cardiopathies hypertensives, fréquentes chez le sujet âgé, évoluent vers un OAP essentiellement par le biais d’une dysfonction diastolique ventriculaire gauche.

Enfin, les troubles du rythme peuvent être à l’origine d’un OAP.

La fibrillation auriculaire, paroxystique ou chronique, est le mode de survenue le plus fréquent, la pathogénie étant un trouble de la relaxation.

Les autres étiologies des OAP cardiogéniques sont difficilement accessibles au diagnostic préhospitalier.

L’existence d’une valvulopathie connue ou d’un souffle non connu peut orienter vers une valvulopathie aortique ou mitrale aiguë.

Les facteurs favorisants doivent être recherchés, notamment médicamenteux (anti-inflammatoires non stéroïdiens et anti-cyclooxygénase 2, corticoïdes, antiarythmiques de classe 1, inhibiteurs calciques bradycardisants, anthracyclines, zidovudine...).

G - STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE PRÉHOSPITALIÈRE :

La thérapeutique a un double objectif, à savoir prévenir l’arrêt cardiorespiratoire et améliorer la fonction cardiaque gauche systolique et diastolique, en termes d’inotropisme et de conditions de charge.

La mise en oeuvre du traitement intègre la bonne compréhension des mécanismes physiopathologiques, des éventuels facteurs déclenchants et des traitements en cours.

Toutefois, l’intrication éventuelle de ces divers éléments rend difficile l’approche physiopathologique de la thérapeutique de l’OAP cardiogénique en pratique préhospitalière.

1- Correction de l’hypoxémie :

* Masque facial :

La correction de l’hypoxémie se fait par administration d’oxygène (O2) au masque à haut débit (de 10 à 12 L/min) et à fraction inspiratoire d’oxygène (FiO2) élevée.

Elle doit être la première mesure à prendre.

Toutefois, son efficacité reste aléatoire en fonction de l’hémodynamique du patient et de l’inondation alvéolaire.

* Ventilation spontanée en pression de fin d’expiration positive (VS-PEP) :

La VS-PEP est une technique accessible depuis quelques années en préhospitalier, où son efficacité a largement été démontrée.

Elle réduit le travail respiratoire en améliorant à la fois la compliance pulmonaire et la postcharge.

L’efficacité de la VS-PEP est donc double, avec un effet bénéfique à la fois ventilatoire et circulatoire.

Elle permet de réduire le recours à une ventilation mécanique.

Ce mode ventilatoire, bien que non systématique encore à ce jour en pratique préhospitalière, devrait s’inscrire dès la première intention dans le traitement de l’OAP cardiogénique.

La valve de Boussignac permet aisément de mettre en route une VS-PEP par simple branchement sur une bouteille d’oxygène.

Elle génère une pression positive grâce à une valve virtuelle créant un régime d’air turbulent à l’extrémité du masque qui reste ouvert.

L’utilisation de la VS-PEP peut s’avérer être un échec par épuisement respiratoire.

L’ajout d’une aide inspiratoire permet, en réduisant le travail ventilatoire, d’aider le patient. Cependant, aucune étude n’a montré la supériorité de la ventilation non invasive (VNI) avec aide inspiratoire par rapport à la VS-PEP.

De surcroît, il apparaît que l’incidence de l’infarctus du myocarde est plus élevée chez les patients en OAP cardiogénique ventilés sous VNI avec aide inspiratoire.

La ventilation en pression positive à deux niveaux de pression ou bilevel positive airway pressure (BIPAP) permet d’atteindre cet objectif en améliorant plus rapidement les paramètres ventilatoires.

Cependant, cette technique est très peu diffusée dans le cadre de l’urgence préhospitalière.

La VNI se heurte également à de nombreuses contreindications, qui sont les troubles de conscience, les états de choc, les vomissements, la non-acceptation du patient.

L’absence d’amélioration, voire l’aggravation sous VNI, imposent l’arrêt de cette technique.

* Ventilation contrôlée :

L’indication d’une ventilation contrôlée est un critère de gravité indiscutable, avec une mortalité de 84 % pour les patients en OAP sur infarctus du myocarde.

L’intubation est pratiquée chez les sujets en état de choc, en épuisement respiratoire ou présentant des troubles de la conscience.

Elle améliore les paramètres respiratoires et hémodynamiques en augmentant le recrutement alvéolaire et le rapport ventilation-perfusion, et en mettant les muscles respiratoires au repos.

La majoration de la pression intrathoracique exerce des effets bénéfiques sur les pressions de remplissage et sur la fonction ventriculaire gauche.

L’intubation endotrachéale peut se faire soit après une induction en séquence rapide, soit après une anesthésie locale de la glotte qui permet de respecter la position demi-assise.

2- Traitements hémodynamiques :

* Diurétiques :

La correction des désordres hémodynamiques est l’autre objectif thérapeutique à atteindre.

Les diurétiques de l’anse sont administrés par voie intraveineuse et à des doses suffisantes, de l’ordre de 60 à 80 mg de furosémide ou de 2 à 4 mg de bumétanide.

Ces doses peuvent être répétées en l’absence d’effet escompté au bout de 15 minutes.

Toutefois, l’administration en perfusion à débit continu semble plus efficace et moins délétère que les bolus répétés. De même, l’efficacité de fortes doses de diurétiques reste discutée par rapport aux dérivés nitrés.

L’effet natriurétique est souvent retardé par rapport à l’amélioration clinique, du fait d’une action veinodilatatrice.

Le furosémide augmente les résistances périphériques, avec augmentation de la postcharge altérant le débit cardiaque et le VES.

Ceci s’explique par une activation du système rénine-angiotensine et du système sympathique.

* Dérivés nitrés :

Les dérivés nitrés présentent un double avantage par veinodilatation et effet vasodilatateur sélectif du réseau coronarien.

Ils améliorent la consommation d’oxygène par réduction de la pression télédiastolique, de la tension pariétale du ventricule gauche et amélioration de la perfusion coronaire.

La résultante aboutit à une amélioration de la fonction systolique et diastolique du ventricule gauche.

L’administration répétée de fortes doses de dérivés nitrés en bolus associés à des doses moindres de diurétiques (40 mg de furosémide) semble plus appropriée dans les formes sévères que de fortes doses de diurétiques avec une perfusion continue de dérivés nitrés.

L’attitude actuelle dans la prise en charge de l’OAP cardiogénique sévère à la phase initiale consiste en l’utilisation de bolus répétés de 3 mg toutes les 5 minutes de dinitrate d’isosorbide associés à des doses limitées de furosémide ou de bumétanide.

Cette stratégie agressive permet, grâce à l’effet supplémentaire de vasodilatation artérielle, de limiter le recours à la ventilation contrôlée ainsi que l’incidence de l’infarctus du myocarde.

La pression artérielle étant monitorée, l’objectif thérapeutique espéré est une diminution de 30 % de la pression artérielle moyenne.

Ce schéma ne peut être proposé pour des valeurs de pression artérielle moyenne inférieures à 100 mmHg.

* Amines vasoactives :

L’existence de signes de bas débit cardiaque ou d’hypotension artérielle indique l’administration d’amines vasoactives.

La dobutamine est proposée en première intention.

Les posologies en débit continu vont progressivement de 5 à 20 μg/kg/min, en surveillant l’éventuelle survenue de troubles du rythme.

Devant un collapsus rebelle ou un état de choc installé, la dopamine ou la noradrénaline, voire l’adrénaline, sont indiquées.

Pour une pression artérielle systolique inférieure à 70 mmHg, la noradrénaline peut être utilisée à des doses de 0,1 à 0,3 μg/kg/min.

La dopamine est introduite à des posologies de 5 à 20 μg/kg/min à partir de valeurs de la pression artérielle systolique supérieures à 80 mmHg, tout en diminuant la noradrénaline.

Dès que la pression artérielle systolique atteint 90 mmHg, la dobutamine est progressivement introduite, tout en pouvant espérer diminuer la dopamine.

Le maniement des amines vasoactives reste délicat en médecine préhospitalière, sur des terrains d’une extrême précarité.

Elles sont cependant le dernier rempart thérapeutique dans les formes gravissimes.

* Autres traitements :

Les autres traitements n’ont pas leur place en dehors de l’amiodarone, qui peut être proposée en l’absence de contre-indications dans le traitement des troubles du rythme supraventriculaires à la posologie de 5 mg/kg/20 min.

Les digitaliques ne sont pas indiqués dans cette pathologie.

Il en va de même pour les effets vasodilatateurs artériolaire et veineux des morphiniques, jusqu’à preuve du contraire.

L’accès hypertensif est dans la majorité des cas contrôlé par les diurétiques et les dérivés nitrés.

La persistance d’une hypertension artérielle sévère peut faire envisager l’adjonction d’un traitement antihypertenseur.

Celui-ci doit être prudent.

La nicardipine à débit continu (de 1 à 2 mg/h) peut être proposée au cours d’une cardiopathie hypertensive isolée et décompensée.

Son emploi est donc très limité et formellement contre-indiqué lors d’une cardiopathie ischémique associée.

L’urapidil, par ses effets vasodilatateurs périphériques artériels et veineux en plus d’une action hypotensive centrale, peut représenter une alternative.

Un bolus de 25 mg est administré avant un relais en perfusion continue (de 9 à 30mg/h).

Son utilisation n’a toutefois jamais été validée dans le cadre de l’OAP cardiogénique.

Un syndrome coronarien aigu avec OAP fait appel aux techniques de revascularisation coronaire, soit par thrombolyse, soit par cardiologie interventionnelle.

L’orientation du patient prend ici une importance primordiale.

H - ORIENTATION DU PATIENT :

L’orientation du patient est un élément de la prise en charge tout aussi important que la mise en route d’une stratégie thérapeutique adéquate.

La décision doit être prise de manière collégiale entre le médecin préhospitalier, le médecin régulateur du centre 15 et le cardiologue.

Dans le meilleur des cas, le patient est orienté directement vers un service de cardiologie disposant d’une unité de soins intensifs et d’une table d’angiographie.

Toutefois, un grand nombre d’OAP sont orientés sur les services d’accueil des urgences.

Ceci peut se concevoir pour des patients dont l’évolution est favorable sans nécessité de thérapeutiques spécifiques.

À l’inverse, les patients Killip III et IV doivent être orientés d’emblée vers un service de réanimation.

Prise en charge au service d’accueil des urgences :

L’admission du patient doit être anticipée de sorte qu’une salle de déchocage soit réservée. Le service est prévenu par l’intermédiaire de la régulation du centre 15.

Lors de l’admission d’un OAP, comme pour toute autre pathologie mettant en jeu le pronostic vital, il est impératif d’assurer une transmission orale et écrite entre le médecin transporteur et le médecin des urgences, et de veiller à ce qu’il n’y ait pas de rupture de thérapeutique lors des manipulations liées au brancardage et à l’installation du patient.

L’objectif à atteindre est de confirmer le diagnostic, d’adapter le traitement en fonction de l’évolution clinique et d’orienter le malade vers la structure de soins compatible avec son état.

A - CONFIRMATION DIAGNOSTIQUE :

La confirmation du diagnostic débute par l’interrogatoire qui est repris et approfondi auprès du patient et de son entourage, afin de cerner au mieux un ou plusieurs éléments étiologiques.

Parmi les facteurs de décompensation de la fonction systolique ventriculaire gauche, il faut rechercher les écarts de régime sans sel, le contexte infectieux notamment bronchopulmonaire, les endocardites, la notion ou l’existence d’un trouble du rythme, fibrillation auriculaire le plus souvent.

Toutefois, les circonstances favorisantes intéressantes sont souvent liées à l’environnement thérapeutique.

Leur identification est fondamentale, nombre d’entre elles sont potentiellement réversibles sous l’effet d’un traitement spécifique approprié.

Le caractère délétère de l’arrêt brutal des bêtabloquants, avec diminution significative de la fraction d’éjection et effet rebond, est à l’origine d’une dégradation de la fonction ventriculaire gauche, et ce d’autant que le patient est coronarien.

Également, l’interruption des digitaliques favorise les poussées d’insuffisance cardiaque gauche.

La prise régulière d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion, d’antagonistes de l’angiotensine II, de digoxine, de bêtabloquants doit être connue.

L’administration concomitante de diurétiques à fortes doses au cours de l’épisode aigu risque d’entraîner une mauvaise tolérance hémodynamique.

Le reste de l’interrogatoire est axé sur l’apparition ou l’aggravation d’une dyspnée d'effortet/ou d'une orthopnée, préférentiellement nocturne, l’existence de syncopes à l’effort, la notion d’une douleur thoracique comme facteur déclenchant.

Un électrocardiogramme 18 dérivations doit être réalisé.

Il va permettre de déceler les troubles du rythme supraventriculaires ou ventriculaires, les anomalies de la conduction auriculoventriculaire.

Les signes électriques faisant évoquer une pathologie coronarienne aiguë sont mis en évidence, sauf en cas de bloc de branche gauche complet.

Les signes d’hypertrophie ventriculaire gauche sont identifiés, ainsi que les anomalies de l’onde P.

L’examen clinique recherche à l’inspection les signes d’épuisement respiratoire associés à des troubles du comportement dans le cas d’une hypoxémie sévère mal tolérée ou plus fréquemment d’une carbonarcose.

Les marbrures, signe de la vasoconstriction périphérique, sont notées.

La pâleur, les sueurs profuses, l’angoisse, sont fréquentes. En dehors de ces signes évidents de gravité dont vont découler des mesures urgentes, la position assise ou demi-assise traduit l’orthopnée, le grésillement laryngé et l’émission d’expectorations mousseuses saumonées témoignant de l’aspect massif de l’OAP.

L’état d’hydratation est estimé avec la recherche d’oedèmes déclives.

L’auscultation pulmonaire confirme le diagnostic par l’existence de râles crépitants et sous-crépitants des deux champs pulmonaires.

Parfois, le diagnostic est plus difficile, voire trompeur, si la dyspnée est asthmatiforme avec bradypnée expiratoire et râles sibilants ou bronchiques.

Les bruits du coeur sont d’analyse délicate avec le bruit pulmonaire surajouté.

Il faut rechercher un bruit de galop, un souffle d’insuffisance mitrale ou de rétrécissement aortique.

L’examen des mollets et la recherche de signes de thrombophlébites profondes des membres inférieurs ne doit pas être omis.

Le reste de l’examen somatique est bien entendu réalisé.

B - MONITORAGE AUX URGENCES :

Le monitorage aux urgences comprend au minimum et sans exception un électrocardioscope, une saturométrie de pouls, une prise tensionnelle non invasive automatisée (mesures toutes les 10 minutes), une mesure continue de la pression téléexpiratoire de CO2 si une ventilation mécanique est nécessaire.

La température centrale est prise en début d’examen.

C - EXAMENS COMPLÉMENTAIRES AUX URGENCES :

Les examens complémentaires accessibles aux urgences sont de deux ordres : les examens de laboratoire d’une part, les examens d’imagerie médicale d’autre part.

Ces derniers doivent être pratiqués au lit du malade et en aucun cas entraver la prise en charge thérapeutique du patient.

1- Radiographie pulmonaire :

La radiographie pulmonaire, de réalisation facile et rapide, est un examen essentiel.

Un seul cliché basse tension est réalisé de face en position assise ou demi-assise, avec une incidence antéropostérieure.

Il permet d’apprécier les modifications de la trame pulmonaire, et par là l’importance de l’oedème interstitiel et périvasculaire par l’existence des lignes de Kerley, l’oedème péribronchoartériel avec flou des contours et redistribution du flux vasculaire vers les apex, la présence d’épanchements pleuraux.

Une cardiomégalie souvent préexistante ne peut pas être interprétée fiablement sur des clichés effectués en décubitus dorsal ou demi-assis.

La radiographie pulmonaire standard permet également d’éliminer une autre cause de détresse respiratoire, comme par exemple une pneumopathie ou un pneumothorax.

2- Échocardiographie :

L’échocardiographie doppler transthoracique présente les avantages d’être un moyen non invasif permettant d’évaluer rapidement la fonction cardiaque et de fournir des arguments déterminants en faveur de l'origine cardiaque de l’insuffisance respiratoire aiguë.

En pratique courante, elle met en évidence une dilatation ou une hypertrophie cavitaire associée à une altération de la fonction ventriculaire gauche systolique globale ou segmentaire, ou une anomalie de la fonction diastolique.

L’analyse des valves mitrales et aortiques à la recherche d’un rétrécissement aortique serré ou d’une insuffisance mitrale massive sur rupture de cordage est essentielle pour l’orientation ultérieure du patient vers une structure de chirurgie cardiothoracique.

La visualisation du péricarde permet d’éliminer une tamponnade ou une constriction.

L’échocardiographie transoesophagienne est plus performante, mais reste à ce jour difficilement réalisable chez des patients précaires sur le plan respiratoire.

En cas de ventilation mécanique, elle présente l’avantage d’une excellente visualisation des valves mitrales, contrairement à la technique transthoracique.

La réalisation de l’échocardiographie à la phase aiguë de l’OAP doit être développée en médecine d’urgence.

3- Examens biologiques :

* Examens biologiques de base :

L’ionogramme sanguin apporte des éléments importants.

Il apprécie d’abord la fonction rénale ; ceci amène en cas d’insuffisance rénale avancée à augmenter les doses de diurétiques.

La natrémie oriente sur l’état d’hydratation cellulaire du patient.

Les dyskaliémies sont corrigées sous peine de voir apparaître des troubles conductifs ou rythmiques précédant l’altération de la fonction systolique.

Une hypomagnésémie profonde peut être à l’origine d’une insuffisance cardiaque gauche aiguë et une diminution de la concentration extracellulaire en calcium ionisé peut s’accompagner d’une altération significative de la fonction systolique ventriculaire gauche, tout comme une lactatémie excessive.

La numérationformule sanguine renseigne sur le degré d’anémie éventuel et oriente vers une pathologie infectieuse intriquée devant une hyperleucocytose.

Cette situation est fréquente chez le sujet âgé en OAP.

Les marqueurs de l’inflammation, comme la protéine C réactive, peuvent aider dans l’orientation diagnostique et la stratégie thérapeutique.

* Marqueurs cardiovasculaires :

Le dosage de la troponine Ic est très sensible et spécifique de la nécrose myocardique.

Les créatine-phospho-kinases (CPK), enzymes d’origine musculaire, ont également une élévation dans les mêmes délais.

Il faut coupler leur dosage avec leur fraction MB, plus spécifique du muscle myocardique.

Un rapport MB sur CPK totales supérieur à 10 % oriente vers une souffrance myocardique ischémique.

Le dosage de la myoglobine plasmatique ne possède pas de spécificité cardiaque, mais présente comme seul avantage une élévation très précoce (de 1 à 3 heures) et sensible, ce qui doit être là aussi un élément d’orientation.

En cas de doute, le dosage des D-dimères par méthode enzyme-linked immunosorbent assay, indiqué en fonction des données de l’examen clinique, permet d’effectuer un premier triage en éliminant le diagnostic de maladie thromboembolique.

Un résultat de D-dimères inférieur à 500 ng/mL possède une valeur prédictive négative très forte (supérieure à 99 %).

* « Brain natriuretic peptid » :

Le dosage du brain natriuretic peptide réalisé au lit du malade présentant une dyspnée aiguë a une valeur prédictive négative proche de 98 % dans l’insuffisance cardiaque congestive et permet d’identifier un sousgroupe de patients à risque.

Tout récemment, une étude multicentrique vient de confirmer ces premiers résultats.

Ce nouveau marqueur présente déjà pour certains un intérêt certain en urgence dans le dépistage des poussées d’insuffisance cardiaque.

Il ne doit pas remplacer l’échocardiographie, mais peut être un élément diagnostique très utile en cas d’indisponibilité de cette dernière.

Le brain natriuretic peptide éclaire également sur l’efficacité thérapeutique et doit pouvoir guider une éventuelle modification ou adaptation posologique.

* Gaz du sang :

La gazométrie artérielle a un intérêt tout particulier : elle renseigne fiablement sur les altérations de l’hématose et guide l’oxygénothérapie.

L’hypoxémie à la phase aiguë de l’OAP est une constante.

L’apparition ou l’aggravation rapide d’une hypercapnie est un signe de gravité.

La valeur du pH reflète l’impact systémique de la pathologie.

L’acidose est dans ce cadre préférentiellement mixte (respiratoire et métabolique).

Un dosage de la lactatémie doit être réalisé en cas d’acidose sévère.

D - TECHNIQUES VENTILATOIRES AUX URGENCES :

Deux modes ventilatoires sont accessibles aux urgences, la VNI et la ventilation conventionnelle.

La VNI est une technique qui permet dans certains cas d'éviter l'intubation endotrachéale et la ventilation artificielle standard.

Les OAP cardiogéniques asphyxiques chez des sujets conscients sont une bonne indication de VNI en VS-PEP ou en mode BIPAP.

La ventilation au masque permet d’attendre que le traitement fasse son effet et d’éviter l’épuisement initial.

Les modalités optimales d’assistance ventilatoire dans cette pathologie sont encore discutées et guidées par la clinique.

Cependant, la VSPEP ne modifie pas la mortalité hospitalière.

Le recours à la ventilation mécanique est réservé pour les formes réfractaires aux traitements conventionnels, les formes asphyxiques d’emblée, les épuisements respiratoires et les troubles de la conscience.

À l’issue de cette prise en charge aux urgences, le patient doit être orienté selon le niveau de conditionnement instauré et la gravité de l’OAP vers un service de réanimation, de soins intensifs de cardiologie, de médecine.

L’admission dans la structure de soins doit permettre de poursuivre les investigations et d’adapter ou d’instaurer d’autres thérapeutiques plus spécifiques.

Prise en charge lors des premières heures d’hospitalisation :

Le principe de cette prise en charge va consister à mettre en oeuvre les investigations nécessaires au diagnostic d’une étiologie accessible à une thérapeutique urgente supplémentaire à celles déjà instaurées.

A - CHOC CARDIOGÉNIQUE SUR INFARCTUS MYOCARDIQUE :

Lors d’un état de choc cardiogénique sur infarctus du myocarde, l’objectif est de réduire les délais de mise en route des traitements de reperfusion à la phase aiguë que sont la cardiologie interventionnelle et la thrombolyse.

La cardiologie interventionnelle, à condition de disposer d’une table d’angiographie, doit être privilégiée.

Dans ce contexte, il s’agit le plus souvent d’angioplastie primaire, sans thrombolyse préalable.

Le taux de reperméabilisation coronaire lors de choc cardiogénique est de 75 % environ, avec un taux de mortalité globale proche des 50 %.

Les meilleurs candidats à la revascularisation sont les patients âgés de moins de 70 ans présentant un infarctus inaugural sans comorbidité associée.

La thrombolyse dans le cadre de l’OAP cardiogénique avec choc sur nécrose myocardique doit être administrée en l'absence de contre-indication si l’angioplastie n’est pas disponible ou si l’éloignement de celle-ci ne permet pas des possibilités de revascularisation dans des délais acceptables.

Cette technique est accessible dès la prise en charge préhospitalière.

Quel que soit le thrombolytique administré (recombinenttissue- type plasminogen activator [rt-PA] ou tenecteplase-t-PA), le bas débit cardiaque limite la possibilité de reperméabilisation et l’extension de la fibrinolyse.

La correction préalable du bas débit par agents vasopresseurs ou contre-pulsion aortique devient un impératif.

La contre-pulsion aortique par ballon intra-aortique fait partie intégrante de l’arsenal thérapeutique du choc cardiogénique.

La mise en place précoce de cette technique dans les chocs cardiogéniques améliore le pronostic des patients sans modifier le taux de mortalité.

La contre-pulsion aortique permet de pouvoir espérer passer le cap de l’instant critique et doit être couplée aux stratégies de revascularisation coronaire.

Les techniques d’assistance extra- ou intracorporelles du choc cardiogénique existent.

Leurs indications dépendent de la sévérité de l’état de choc, du contexte étiologique, des possibilités de récupération de la fonction myocardique après revascularisation.

B - LÉSIONS VALVULAIRES AIGUËS ET CARDIOMYOPATHIES HYPERTROPHIQUES :

1- Insuffisance aortique aiguë :

Elle associe une hypoperfusion systémique et un OAP.

Les deux principales étiologies sont représentées par l’endocardite bactérienne et la dissection aortique.

Le diagnostic repose en urgence sur l’échocardiographie doppler.

Le traitement repose sur la reconnaissance du degré de défaillance circulatoire, la diminution des pressions veineuses pulmonaires et l’optimisation du débit cardiaque.

L’association de diurétiques et de vasodilatateurs est recommandée.

Les inotropes positifs type dobutamine sont souvent utilisés pour accélérer la fréquence cardiaque.

En effet, une tachycardie entre 100 et 120 battements par minute diminue la fuite aortique, élève la pression artérielle diastolique, et donc la perfusion coronaire et le débit cardiaque effectif.

Si l’instabilité hémodynamique persiste malgré un traitement médical bien conduit, la mutation vers un centre de chirurgie cardiothoracique en urgence est la seule solution.

2- Insuffisance mitrale aiguë :

L’insuffisance mitrale aiguë par rupture de cordage sur processus ischémique, endocardite, dégénérescence myxoedémateuse, est de diagnostic échographique.

La voie transthoracique ne visualise pas toujours la fuite mitrale et l’échographie transoesophagienne doit alors être pratiquée.

La conduite thérapeutique tend vers une diminution des pressions veineuses pulmonaires, de la postcharge ventriculaire gauche, de manière à privilégier le flux sanguin vers la circulation systémique.

Les vasodilatateurs sont d’indication large.

La mise en place dans ce contexte d’une contrepulsion aortique diastolique peut avoir des effets favorables de réduction de la postcharge et d’augmentation de la perfusion coronaire.

En cas d’hypotension sévère, les vasoconstricteurs peuvent être manipulés avec une grande prudence devant le risque d’augmentation préjudiciable de la postcharge.

Parallèlement à la mise en route du traitement médical, l’identification de la cause, notamment ischémique, doit être rapide.

L’association d’une chirurgie de revascularisation coronaire au remplacement valvulaire mitral semble améliorer la survie à long terme.

De même, lors d’une dysfonction de pilier sans rupture, une angioplastie précoce peut diminuer la fuite mitrale et différer ou annuler le recours à la chirurgie.

La thrombolyse semble diminuer l’incidence des insuffisances mitrales au cours des nécroses inférieures.

Toutefois, il paraît raisonnable d’envisager une angioplastie primaire si les conditions locales le permettent.

Dans le cas où une instabilité hémodynamique persiste malgré un traitement bien conduit, la chirurgie doit être réalisée le plus vite possible.

3- Rétrécissement mitral :

Il peut être dû à une anomalie congénitale, à un rhumatisme articulaire aigu ou à une dégénérescence avec calcifications chez le sujet âgé. Il peut rester longtemps asymptomatique.

Chez le sujet en OAP, il traduit dans la très grande majorité des cas plusieurs années d’évolution.

Il faut rechercher à l’interrogatoire des symptômes caractéristiques comme la syncope et la douleur thoracique d’effort, des signes d’insuffisance cardiaque prenant toute leur valeur en cas de souffle méconnu.

Cliniquement, un souffle systolique crescendo-decrescendo maximal en mésotélésystolique est retrouvé dans la région aortique et le long du bord gauche du sternum.

L’irradiation se fait classiquement vers les carotides, où il est possible de palper un thrill lorsqu’il existe un gradient de pression significatif au travers de l’orifice aortique.

L’abolition du deuxième bruit traduit classiquement le caractère serré de la sténose.

L’électrocardiogramme montre des signes d’hypertrophie ventriculaire gauche, la radiographie thoracique au stade tardif de la congestion pulmonaire un élargissement du ventricule gauche et un aspect saillant de l’aorte ascendante.

L’échocardiographie couplée au doppler réalisée après l’admission du patient confirme le diagnostic.

Elle précise l’épaississement des valvules aortiques, détecte les calcifications, apprécie l’épaisseur pariétale et la fonction ventriculaire gauche.

La surface de l’orifice aortique peut être déterminée et le mode doppler évalue le gradient de pression systolique au travers de l’orifice.

L’approche thérapeutique de ces patients porteurs d’un rétrécissement aortique en OAP est très délicate.

Il faut retenir que les dérivés nitrés ne doivent pas être utilisés, ou alors avec une extrême prudence, en raison du risque de baisse de la pression artérielle et de la réduction secondaire du débit coronaire.

Ces patients sont orientés en réanimation ou en soins intensifs, où une prise en charge chirurgicale ou de cardiologie interventionnelle est discutée.

Le rhumatisme articulaire aigu est la cause la plus fréquente de rétrécissement mitral.

La période asymptomatique peut durer vingt années et se terminer par l’apparition brutale d’une insuffisance cardiaque gauche, souvent contemporaine d’un épisode de fibrillation auriculaire.

Un traitement associant digitaliques et amiodarone va viser à ramener la fréquence cardiaque à des valeurs proches de la normale.

Les troubles du rythme paroxystique avec tachycardie mal tolérés sur le plan hémodynamique sont à traiter éventuellement par choc électrique.

En cas d’hypotension artérielle non liée à une hypovolémie ou à une tachycardie, les agents vasoconstricteurs sont contreindiqués et les agents bêta-adrénergiques (dopamine, dobutamine) à des doses non tachycardisantes sont préférables.

L’hypoxie, l’hypercapnie et l’acidose sont prévenues afin d’éviter une poussée d’hypertension artérielle pulmonaire avec le risque d’une insuffisance ventriculaire droite aiguë.

4- Cardiomyopathies hypertrophiques :

Elles se caractérisent par une hypertrophie ventriculaire gauche et septale avec anomalie mitrale associée.

La résultante est un rétrécissement de la chambre de chasse, variable selon les conditions de charge et la systole, et que contribue à aggraver un mouvement anormal d’un feuillet mitral qui se plaque contre le septum.

Le trouble hémodynamique fondamental est la diminution de la compliance et la lenteur de la relaxation.

L’évolution se fait vers l’insuffisance cardiaque congestive, les troubles du rythme et la mort subite.

Le traitement classique associe bêtabloquants et/ou inhibiteurs calciques.

En urgence, il faut éviter chez ces patients précaires toutes les situations favorisant les arythmies auriculaires, les poussées hypertensives, l’augmentation de contractilité, ainsi que les diminutions brutales de précharge et de postcharge qui aggravent l’obstruction dynamique.

5- Autres étiologies :

Les autres étiologies d’OAP cardiogéniques sont explorées dans l’unité d’hospitalisation.

Les méthodes d’étude du ventricule gauche parviennent à détecter les anomalies des fonctions diastolique et systolique. L’échocardiographie est indispensable.

Elle permet à elle seule d’évaluer la fonction contractile et les dimensions des deux ventricules, d’apprécier les déterminants de la pompe cardiaque (valves, péricarde, cinétique segmentaire) par une étude anatomique et fonctionnelle, d’étudier sélectivement les fonctions ventriculaires systolique et diastolique.

Le cathétérisme artériel pulmonaire est une autre méthode, invasive, probablement complémentaire de l’échographie, réalisable uniquement en unité de réanimation ou de soins intensifs.

Par la mesure du débit cardiaque couplée à celle de la saturation veineuse en O2, il analyse la distribution d’O2 au niveau périphérique et permet de juger de l’adéquation métabolique du débit.

La mesure de la PAPo reste le meilleur indice prédictif de survenue de l’OAP.

En schématisant, l’échocardiographie précise le mécanisme physiopathologique en cause, tandis que le cathétérisme artériel pulmonaire quantifie la dysfonction ventriculaire gauche et guide son suivi thérapeutique.

Il convient néanmoins de rappeler que le cathétérisme artériel