Les connaissances sur l’épidémiologie descriptive du myélome
multiple (MM) en France sont rares.
Elles donnent une incidence
annuelle entre 2 et 5 pour 100 000 habitants.
Aux États-Unis
d’Amérique, les données du programme SEER (Surveillance,
Epidemiology and End Results) pour la période 1984-1988
fournissent des incidences de 4,7/100 000 et 3,2/100 000 chez les
hommes et les femmes blancs caucasiens respectivement, et environ
du double chez les sujets noirs (10,2 chez les hommes et 6,7 chez les
femmes).
Les incidences les plus élevées sont observées chez les
Noirs américains et les sujets des îles du Pacifique.
Les Caucasiens
d’Europe et d’Amérique du Nord ont des incidences de MM
intermédiaires, et les Asiatiques (d’Asie ou d’Amérique du Nord)
des incidences faibles.
D’une façon générale, l’incidence augmente rapidement avec l’âge,
et les hommes sont plus souvent atteints que les femmes.
Le MM
représente aux États-Unis d’Amérique 1 % des cancers chez les
Blancs caucasiens et 13 % des hémopathies lymphoïdes (2 % et 31 %
chez les sujets noirs, respectivement).
Dans les pays très
médicalisés, il n’existe pas d’augmentation récente de l’incidence,
mais l’impact du MM en termes de santé publique augmentera dans
les années à venir, du fait du vieillissement de la population.
La médiane d’âge est de 72 ans, mais se réduit à 65 ans dans les
séries hospitalières.
Les patients hospitalisés appartiennent
surtout à la tranche d’âge 60-75 ans, moins de 2 % ont un âge
inférieur à 40 ans, et 3 % ont plus de 80 ans au diagnostic.
La
survenue chez des adolescents et de jeunes adultes reste
exceptionnelle, et le sex-ratio homme/femme varie entre 1,1 et 1,5
pour 1.
De multiples publications ont été consacrées aux facteurs de risque
du MM, avec des conclusions souvent incertaines et
controversées.
Le seul facteur de risque clairement identifié est
l’exposition aux radiations ionisantes.
Les professions agricoles et
les expositions correspondantes ont été incriminées, sans que l’on
puisse aboutir à des conclusions définitives, notamment sur les
produits en cause.
Les candidats les plus probables restent les
pesticides et les solvants organiques.
Il existe des cas familiaux,
faisant discuter des facteurs génétiques, et des cas chez des époux,
plaidant pour l’importance de facteurs environnementaux.
Il
existerait un risque accru de MM chez les sujets HLA (human
leucocyte antigen)-B5, HLA-CW2 et les Noirs américains HLA-CW5
et porteurs de l’allotype G3m.
De nombreuses études ont examiné les relations entre MM et
certaines pathologies, vaccinations ou traitements, le plus souvent
sans résultats convaincants.
Le rôle de stimulations antigéniques
répétées reste controversé.
On retiendra l’association avec la
maladie de Gaucher, rapportée à plusieurs reprises, et celle
probable avec la polyarthrite rhumatoïde.
Des cas ont été décrits
chez des patients infectés par le virus de l’immunodéficience
humaine (VIH).
Physiopathologie
:
Depuis une dizaine d’années, plusieurs aspects de la
physiopathologie du MM sont mieux connus, en particulier
l’oncogenèse, le rôle des cytokines et de l’environnement médullaire
dans la survie et la prolifération des cellules myélomateuses, et la
compréhension des mécanismes de l’ostéopathie.
A - ONCOGENÈSE :
L’existence d’anomalies cytogénétiques nombreuses et complexes,
numériques et structurales, est une des caractéristiques du MM, et
concourt sans doute à sa résistance au traitement.
Parmi ces
anomalies, les translocations chromosomiques impliquant le locus
des chaînes lourdes d’immunoglobulines (IgH), localisé sur le
chromosome 14 (14q32) sont fréquentes, avec pour conséquence la
dérégulation de l’expression normale de gènes situés dans la région
de cassure du chromosome partenaire.
Il existe une grande
variabilité des chromosomes partenaires, ce qui témoigne en soi de
l’hétérogénéité des tumeurs, mais deux translocations sont
majoritaires, la t(11 ; 14)(q13 ; q32) (15 % des patients, avec dysrégulation de la cycline D1) et la t(4 ; 14)(p16 ; q32) (10 % des
patients, avec surexpression du récepteur 3 pour le fibroblast growth
factor (FGFR3) et de MMSET).
Rarement, il existe aussi des
translocations t(14 ; 16)(q32 ; q23) impliquant le locus c-maf et t(6 ;
14)(p21 ; q32) avec surexpression de la cycline D3. Les anomalies de
c-myc sont fréquentes, mais rarement issues de la classique t(8 ;
14)(q24 ; q32) qui est un événement tardif dans la progression du
MM.
Des anomalies de nombre peuvent occasionner la perte de gènes
suppresseurs de tumeurs, comme c’est le cas dans une autre
aberration chromosomique essentielle, la délétion totale ou partielle
(à la bande 13q14) du chromosome 13 (-13/13q-).
Certaines
associations entre réarrangements 14q32 et anomalie -13/13q- sont
notables.
Ainsi, 85 % des patients avec une translocation t(4 ;
14)(p16 ; q32) présentent -13/13q- et ces patients sont souvent
d’isotype A, avec une b2-microglobuline (b2m) sérique élevée.
À
l’inverse, les patients sans réarrangement 14q32 sont majoritairement
sans -13/13q-, d’isotype G avec une b2m sérique basse.
La
répartition des principaux réarrangements 14q32 et des anomalies
-13/13q- a été étudiée dans une série de 901 patients présentant une dysglobulinémie monoclonale de signification indéterminée
(d’apparence bénigne, MGUS ou MGUS pour le sigle anglo-saxon),
un MM indolent, un MM symptomatique ou une leucémie à
plasmocytes primitive.
Les réarrangements 14q32
peuvent être observés dès le stade de MGUS [monoclonal
gammopathy of undetermined significance] avec, en particulier une
incidence de translocation t(11 ; 14)(q13 ; q32) identique dans les
deux groupes.
D’autres altérations moléculaires ont été rapportées, telles des
mutations (ras, p53), des méthylations de promoteur de gènes
suppresseurs de tumeur (p15, p16) ou la phosphorylation d’un
oncogène (STAT3).
Des mutations activatrices dans les codons 12, 13
ou 61 des gènes K-ras et N-ras sont présentes chez 10 à 40 % des
patients au diagnostic et 70 % des patients en rechute.
Elles sont
associées à une forte masse tumorale, et constituent un facteur
pronostique péjoratif de survie.
Elles ont longtemps été
considérées comme un événement moléculaire tardif, mais une
étude récente a retrouvé la mutation du codon 61 de N-ras dans une
sous-population de cellules (12 à 100 %) chez tous les patients testés
avec une technique sensible.
Les gènes p16 et p15 sont
fréquemment inactivés par hyperméthylation de leur promoteur, et
il s’agirait d’un événement précoce.
Les mutations sur le gène de
la p53 sont retrouvées chez 2 à 20% des patients, et sont associées à
la phase terminale de la maladie.
De telles études concourent à la compréhension des bases
moléculaires de la transformation maligne, et permettent d’élaborer
des modèles de progression des différentes hémopathies
plasmocytaires.
Récemment ont été rapportés les premiers
résultats d’études des profils d’expression génique, qui préfigurent
sans doute de nouvelles classifications génétiques et pronostiques
du MM.
B - RÔLE DES CYTOKINES ET DE L’ENVIRONNEMENT
MÉDULLAIRE
:
L’interleukine 6 (IL 6) tient un rôle essentiel dans la
physiopathologie du MM.
L’IL 6 est un facteur de croissance et de
survie des plasmocytes malins, et sa production est augmentée chez
les patients atteints de MM.
L’IL 6, issue de l’environnement
médullaire, agit par l’intermédiaire d’un récepteur constitué de deux sous-unités : une chaîne a ou gp80, et une chaîne b ou gp130,
responsable de la transduction du signal.
Le clivage de la chaîne a
par épissage alternatif ou par l’action de métalloprotéinases génère
une forme soluble agoniste du récepteur de l’IL 6.
Lors de la
liaison de l’IL 6 à la gp80, la gp130 est recentrée et l’agrégation du
récepteur conduit à l’activation de plusieurs voies de transduction,
notamment JAK/STAT et Ras/MAPK.
L’insulin growth factor 1
(IGF-1) constitue un autre facteur majeur de prolifération des
cellules myélomateuses et les protège de l’apoptose induite par la
dexaméthasome (1).
Les cellules myélomateuses ont un tropisme
important pour le compartiment médullaire, environnement
indispensable au développement de la tumeur.
Les cellules stromales médullaires sont capables d’induire in vitro la maturation
des précurseurs tumoraux, et les cellules malignes peuvent stimuler
la production d’IL 6 par les cellules stromales.
Les interactions
entre les cellules myélomateuses et l’environnement médullaire font
intervenir le contact cellulaire, en particulier la fibronectine des
cellules stromales et l’intégrine VLA-4 des cellules myélomateuses,
et des cytokines.
L’accumulation dans la moelle osseuse des cellules
plasmocytaires est plus liée à un défaut d’apoptose qu’à une
prolifération élevée, et implique l’expression des protéines
antiapoptotiques de la famille Bcl-2, en particulier Mcl-1, facteur de
survie essentiel des cellules myélomateuses.
Le vascular
endothelial growth factor (VEGF) est aussi sécrété par les cellules
tumorales et stromales.
Il participe à l’accroissement de
l’angiogenèse au sein de la moelle osseuse, et est un facteur de
croissance et de migration des cellules myélomateuses.
C - REMODELAGE OSSEUX AU COURS DU MYÉLOME
MULTIPLE :
L’envahissement et la destruction de l’os sont des événements
caractéristiques du MM.
L’ostéolyse est la conséquence d’une
augmentation de l’activité de résorption ostéoclastique, dans la
proximité des plasmocytes tumoraux, associée à une inhibition de la
formation osseuse.
Le phénomène est précoce, absent dans les MGUS et présent dans les MM débutants, parfois plusieurs années
avant les premiers symptômes.
La résorption osseuse excessive
recouvre en fait l’augmentation du recrutement des ostéoclastes, leur
différenciation, et une augmentation de leur activité résorptive.
La
découverte du système ostéoprotégérine (OPG)/RANK/RANKL
(cette dernière molécule aussi appelée TRANCE ou OPGL) est un
progrès majeur dans la compréhension de l’ostéopathie du MM.
Au laboratoire, l’implication du système OPG/RANKL dans
l’ostéolyse a été démontrée.
La molécule RANKL, exprimée par les
cellules préostéoblastiques, se lie à son récepteur RANK présent sur
les ostéoclastes, et cette liaison augmente fortement l’activité
ostéoclastique.
Dans des systèmes de coculture, les plasmocytes
tumoraux induisent une augmentation de RANKL et une
diminution de la production d’OPG par les préostéoblastes et les
cellules stromales. Des contacts intercellulaires sont mis en jeu dans
ces phénomènes, impliquant notamment l’intégrine VLA-4.
Ce
même déséquilibre du système OPG/RANKL est observé dans les
cellules de l’environnement osseux, sur des biopsies
ostéomédullaires de patients atteints de MM.
Chez la souris
recevant par injection les cellules myélomateuses 5T2MM, le
traitement par l’OPG recombinante prévient le développement des
lésions lytiques.
D’autres cytokines et protéases participent au phénomène de
résorption osseuse, en particulier MIP-1a (macrophage inhibitory
protein-1 alpha) et les matrixines (ou matrix métalloprotéinases,
MMP).
L’utilisation d’antisens MIP-1a dans un modèle de cellules
ARH-77 injectées à des souris immunodéficientes (SCID) confirme
l’implication de cette molécule dans la survenue des lésions
ostéolytiques.
Les MMP peuvent intervenir dans l’initiation de la
résorption osseuse et la dissémination extramédullaire.
Les cellules myélomateuses induisent la production de MMP-1 par les cellules
stromales, activent la MMP-2 et sécrètent de façon constitutive la
MMP-9.
L’IL 6 ou les complexes IL 6 /récepteur soluble IL 6,
l’interleukine 11, l’hepatocyte growth factor (HGF), le M-CSF
(macrophage colony stimulating factor) et le VEGF sont également
impliqués dans la perte osseuse du MM.
Signes cliniques et complications :
A - DONNÉES GÉNÉRALES :
La présentation clinique se modifie avec le temps.
Le
diagnostic est maintenant évoqué dans près d’un tiers des cas chez
un patient asymptomatique, et les complications inaugurales
tendent à être moins fréquentes dans les pays très médicalisés.
Dans une étude américaine, la majorité des patients (58 %) avec un
MM symptomatique avait des antécédents de MGUS, MM indolent
ou plasmocytome.
La présentation clinique au diagnostic est
comparable chez les sujets âgés ou très âgés (âge supérieur à 70 ou
75 ans), avec cependant un taux plus important d’infection (20 %).
Le MM est la plus fréquente des dysglobulinémies monoclonales
malignes.
Son diagnostic est habituellement facile sur des signes
cliniques évocateurs, la présence d’une plasmocytose médullaire
supérieure à 10 % et l’existence d’une immunoglobuline
monoclonale sérique et/ou urinaire.
Des critères diagnostiques ont
été publiés, mais ils sont sans réelle utilité dans les cas habituels et
ne résolvent pas toujours les cas difficiles.
Lorsque le MM est symptomatique, c’est le plus souvent l’altération
de l’état général et les douleurs osseuses qui dominent le tableau
clinique.
Les douleurs osseuses sont présentes au diagnostic chez
70 % des patients, et intéressent surtout le squelette axial (rachis,
côtes, bassin).
Elles nécessitent volontiers le recours aux antalgiques majeurs, et retentissent sur les capacités fonctionnelles des patients.
Les fractures pathologiques (dites aussi spontanées) sont notées chez
un tiers des patients, et les tumeurs osseuses (plasmocytomes) sont
possibles.
Elles peuvent être révélatrices : notamment l’anémie,
l’insuffisance rénale, l’hypercalcémie, les complications osseuses et
infectieuses.
B - INSUFFISANCE RÉNALE :
La fréquence de l’insuffisance rénale est variable selon les critères
utilisés pour la définir, le mode de recrutement des patients et
l’ancienneté des études considérées.
Dans deux importantes séries
publiées depuis 1994, 22 % et 31 % des patients avaient une créatininémie supérieure ou égale à 20 mg/L et 130 mmol/L
respectivement.
Dans une cohorte de patients diagnostiqués
entre 1987 et 1990, 33 % des patients avaient une créatininémie
supérieure à 12 mg/L, 10 % supérieure à 20 mg/L et 3 % supérieure
à 50 mg/L, chiffres significativement inférieurs à ceux retrouvés
dans des séries plus anciennes.
Si l’on considère la
clairance de la créatinine, c’est environ 50 % des patients qui ont au
diagnostic une clairance anormale.
À l’inverse, 5 à 10%des patients
doivent recourir à l’hémodialyse au diagnostic.
L’insuffisance
rénale est multifactorielle, l’excrétion de la protéine de Bence Jones
et l’hypercalcémie étant les facteurs les plus importants, retrouvés
dans plus de 90 % des cas.
Les autres causes incluent l’amylose,
l’infiltration rénale maligne, l’hyperuricémie, les épisodes infectieux
et de déshydratation, et l’utilisation de médicaments
néphrotoxiques.
Le type de l’immunoglobuline monoclonale
intervient également puisque, dans une série récente, 24 % des
patients avec un MM IgG avaient une insuffisance rénale alors qu’ils
étaient 31 % des MM IgA, 52 % des MM à chaîne légère isolée et
100 % des MM IgD.
Les patients avec insuffisance rénale ont plus
fréquemment une masse tumorale importante.
C - INFECTIONS :
Les tuméfactions des organes hématopoïétiques sont rares.
De
façon exceptionnelle, d’autres sites ou organes, très variés, peuvent
être le siège de lésions ou tumeurs plasmocytaires (localisations neuroméningées, pleurales, cutanéomuqueuses, oculaires,
thyroïdiennes, oto-rhino-laryngologiques…).
Le MM n’est pas,
en dehors de sa phase terminale, une maladie fébrile.
Toute fièvre
témoigne a priori d’un état infectieux, dont le traitement est urgent.
L’infection est présente au diagnostic chez environ 10 % des patients,
les infections récidivantes à pneumoccoques, notamment les
pneumonies, restant une circonstance de découverte classique.
Elle demeure la première cause de décès, en cause dans 20 à 50 %
des cas, et est favorisée par le déficit des immunoglobulines polyclonales qui obéit à différents mécanismes : blocage de
maturation des lymphocytes B, présence de lymphocytes B
suppresseurs, coopération anormale entre lymphocytes T et B, rôle
inhibiteur des macrophages et de cytokines.
Le risque
infectieux est majoré par la chimiothérapie quand elle induit des
phases neutropéniques, et il varie dans le temps, étant
particulièrement élevé à la période initiale du traitement et lors des
rechutes.
Durant les deux premiers mois du traitement, on estime
que presque la moitié des patients présentera une infection, et ces
infections précoces sont souvent sévères puisque des taux de décès
jusqu’à 30 % ont été rapportés.
Les localisations les plus
fréquentes sont pulmonaires (également favorisées par les fractures
costales et les tassements vertébraux, responsables d’une insuffisance
respiratoire restrictive) et urinaires, ces infections pouvant être
septicémiques.
Les infections sont surtout bactériennes, beaucoup
moins souvent à levures, virus Herpès, mycobactéries, et à Pneumocystis carinii.
Tous les germes peuvent être en cause, Streptococcus pneumoniae et Haemophilus influenzae étant fréquents
dans les infections initiales, Staphylococcus aureus et les bacilles Gram
négatifs (notamment Escherichia coli) dans les épisodes plus tardifs.
Globalement, jusqu’à 50 % des infections sont acquises à
l’hôpital.
Streptococcus pneumoniae est le germe le plus
fréquemment retrouvé chez les patients au diagnostic qui n’ont pas
été hospitalisés et n’ont pas reçu de chimiothérapie.
D - AUTRES SYNDROMES :
Le syndrome d’hyperviscosité est rare dans le MM. Il s’observe
lorsque le taux du composant monoclonal sérique (IgA ou IgG3) est
trés élevé.
Ses signes cliniques sont neurosensoriels (troubles visuels
ou auditifs), neuropsychiques (céphalées, vertiges, convulsions,
coma) et hémorragiques (hémorragies au fond d’oeil, épistaxis).
L’amylose s’observe dans 5 à 15% des cas avec des manifestations
neurologiques (neuropathie périphérique sensitivomotrice
progressive, distale et symétrique), rénales (syndrome néphrotique),
cardiaques et synoviales (syndrome du canal carpien).
Les
syndromes myélodysplasiques secondaires au MM sont rares (2 à
3 % des cas) et favorisés par l’usage prolongé des alkylants.
Signes biologiques :
La vitesse de sédimentation globulaire (VS) est souvent élevée
(> 50 mm à la première heure) ou très élevée (> 100 mm), ce
phénomène étant directement lié à la présence de la protéine
monoclonale sérique.
Parfois la VS est peu augmentée, voire
normale, dans les cas de MM à chaînes légères, non excrétants, ou
lorsque la protéine monoclonale précipite à basse température
(cryoglobuline).
L’anomalie la plus fréquente de l’hémogramme est
l’anémie normochrome, normocytaire ou macrocytaire,
arégénérative.
Dans la série historique de la clinique Mayo, 62 %
des patients avaient un taux d’hémoglobine inférieur à 12 g/dL (et
8 % inférieur à 8 g/dL) mais dans une série plus récente, seuls 39 %
des patients étaient dans cette situation du fait d’un diagnostic plus
précoce.
Des rouleaux érythrocytaires sont observés
sur le frottis.
De multiples mécanismes expliquent l’anémie, parmi
lesquels la prolifération plasmocytaire médullaire, un déficit relatif
en érythropoïétine, une suppression de l’érythropoïèse induite par
les cytokines, un phénomène d’hémodilution, l’effet de l’insuffisance
rénale et des traitements administrés.
L’expression à la surface
des cellules myélomateuses des récepteurs Fas-ligand et TRAIL
(tumor necrosis factor-related apoptosis-inducing ligand) intervient dans
l’apoptose des progéniteurs érythroïdes.
La leucopénie et la
thrombopénie sont rares et de mauvais pronostic, reflétant une
importante masse tumorale.
Au cours de l’évolution,
l’insuffisance médullaire peut s’installer jusqu’à une pancytopénie
franche, résultat de l’augmentation de la masse tumorale et aggravée
par les chimiothérapies reçues.
Il est très rare de constater, au
diagnostic et avec les techniques de routine, une plasmocytose
sanguine, mais un faible contingent de plasmocytes circulants peut
souvent être mis en évidence par des techniques plus sensibles.
En
phase terminale du MM, une plasmocytose sanguine entre 1 et 20 %
est parfois présente.
Le myélogramme est nécessaire pour établir le diagnostic.
Il met en
évidence une infiltration plasmocytaire qui représente plus de 10 %
des éléments nucléés.
Des anomalies morphologiques des
plasmocytes peuvent être observées (cytoplasme flammé, inclusions
cristallines, modification de l’archoplasme, anomalies nucléaires)
mais elles ne sont pas indispensables au diagnostic.
Le prélèvement
de moelle osseuse permet l’analyse cytogénétique de la moelle
osseuse, par cytogénétique conventionnelle ou surtout hybridation
in situ fluorescente (FISH), qui fournit d’importantes informations
pronostiques.
Il permet aussi, dans des laboratoires spécialisés, la
détermination de l’index cinétique de phase S.
Parfois, un premier
myélogramme peut s’avérer normal témoignant d’une infiltration
tumorale focale, et il est alors nécessaire de le renouveler dans un
autre territoire.
Plus rarement, la biopsie ostéomédullaire est
nécessaire, pour mettre en évidence l’infiltration tumorale.
L’existence d’une myélofibrose est possible mais rare.
La réalisation d’une électrophorèse et d’une immunofixation (ou
d’une immunoélectrophorèse) des protéines sériques (EPS) et
urinaires est indispensable.
Dans 80 % des cas, l’EPS met en
évidence un pic étroit correspondant à une protéine monoclonale de
type IgG ou IgA migrant dans la zone des c-globulines, des
b-globulines, plus rarement des a2-globulines.
La présence d’une
protéine monoclonale sérique est responsable d’une hyperprotidémie.
Parfois, il n’existe pas d’aspect de pic étroit à
l’EPS.
Cette situation correspond surtout au MM à chaînes légères
où l’anomalie sérique usuelle est une hypogammaglobulinémie,
souvent sévère.
Rarement, l’absence de pic étroit sur l’EPS est en
rapport avec un MM non excrétant ou non sécrétant.
L’EPS doit être
complétée par le dosage pondéral des immunoglobulines, qui
retrouve l’augmentation de l’immunoglobuline monoclonale et
surtout l’effondrement des autres classes d’immunoglobulines.
L’immunofixation ou l’immunoélectrophorèse des protéines sériques
permet de typer la protéine monoclonale, pour sa chaîne lourde et
sa chaîne légère.
Environ 55 % des myélomes sont de type IgG, 25 %
de type IgA, 15 % sont de type urinaire pur (à chaînes légères) et les
5 % restants sont constitués de variants rares (non excrétants ou non
secrétants, biclonaux, IgD, IgM, IgE).
Concernant les chaînes légères,
le type j est deux fois plus fréquent que le type k.
De la même
façon seront réalisées une électrophorèse et une immunofixation (ou
une immunoélectrophorèse) des protéines urinaires.
Dans 90 % des
cas, elle met en évidence une protéinurie à chaînes légères
dénommée protéinurie de Bence Jones et l’immunofixation en
précise le type, j ou k.
Les EP sériques et urinaires sont des éléments
très importants du suivi thérapeutique.
Les patients répondeurs à la
chimiothérapie voient se réduire leur protéine monoclonale sérique
et/ou urinaire.
Le dosage des chaînes légères libres dans le sérum et
les urines pouvait avoir un intérêt, en particulier pour les MM à
chaînes légères, et non sécrétantes2.
Le bilan biologique initial précise l’état de la fonction rénale par
dosage de la créatinine sérique et comprend un dosage de la
calcémie, ces paramètres étant très régulièrement réévalués dans le
suivi des patients.
Il permet d’apprécier le pronostic, en pratique
courante par les dosages sériques de la b2m, de l’albumine, de la
protéine C-réactive (CRP) et de la lactico-déshydrogénase (LDH).
De
façon rare sont observés des troubles d’hémostase avec
manifestations hémorragiques, en rapport avec un syndrome
d’hyperviscosité générant une thrombopathie fonctionnelle
(inhibition de l’agrégation et des fonctions plaquettaires par
l’immunoglobuline monoclonale).
Exceptionnellement, des
hémorragies sont liées à l’interaction de l’immunoglobuline
monoclonale avec des facteurs de coagulation.
Signes radiologiques :
A - TECHNIQUES RADIOLOGIQUES :
La radiologie conventionnelle reste la référence.
Le bilan comprend
des clichés du crâne, rachis complet, bassin, thorax et grils costaux,
humérus et fémurs.
Ce bilan sera répété lors du suivi, généralement
à un rythme annuel.
Une douleur osseuse brutale justifie à tout
moment la réalisation d’une nouvelle radiographie sur le site
douloureux.
Il n’est pas indiqué d’effectuer de scintigraphie osseuse.
En revanche, l’imagerie en résonance magnétique nucléaire (IRM)
peut être utile.
La plupart des équipes la réservent à deux situations :
l’expertise des MM à faible masse tumorale où il n’existe pas de
lésions osseuses en radiologie conventionnelle, et le diagnostic des
complications ostéoneurologiques, compressions médullaires ou
radiculaires.
L’IRM précise au mieux l’état du mur postérieur de la
vertèbre, l’existence d’une épidurite, l’état du cordon médullaire…
En général, l’IRM est réalisée au niveau du rachis dorsolombaire et
du bassin.
Moins fréquemment, il peut exister une indication
d’examen tomodensitométrique osseux.
B - ASPECT DES LÉSIONS :
Les signes radiologiques essentiels sont l’ostéoporose (ostéopénie),
les lésions ostéolytiques (géodes ou lacunes) et les fractures.
Ces
anomalies sont souvent associées, mais il est des cas où l’ostéoporose
seule existe, difficile à différencier d’une ostéoporose commune (6 à
9 % des patients).
L’ostéolyse peut toucher tout le squelette mais
prédomine là où l’hématopoïèse est plus active : rachis, côtes,
sternum, crâne et extrémités proximales des fémurs et humérus. Sur
le rachis, l’aspect est volontiers celui d’un tassement en galette.
Sur
les os longs, courts et plats, on retrouve, avec ou sans fracture, les
géodes dites « à l’emporte-pièce » (c’est-à-dire sans liseré de
condensation périphérique).
Certains patients (10 à 20 %) n’ont pas
de lésions osseuses en radiologie standard.
Dans ces cas, l’IRM met
en évidence des lésions myélomateuses dans 50 % des cas,
définissant un groupe de patients dont la progression se fera plus
rapidement vers un stade plus avancé.
L’étendue des lésions
osseuses est un facteur pronostique, pris en compte dans la classique
classification en trois stades de Durie et Salmon.
La reminéralisation sous traitement des lésions osseuses spécifiques est
très rare, y compris chez les patients répondeurs au traitement.
Formes cliniques :
A - PLASMOCYTOMES SOLITAIRES :
Ils constituent des tumeurs rares, représentant moins de 10 % des
hémopathies plasmocytaires.
On distingue classiquement les plasmocytomes solitaires osseux et extraosseux.
Les plasmocytomes
osseux sont observés dans deux tiers des cas chez des hommes, à un
âge médian d’environ 55 ans, soit de 10 ans inférieur à la médiane
d’âge de survenue du MM.
Leurs critères diagnostiques ont évolué
au fil du temps et sont maintenant plus stricts.
Il est recommandé
de ne retenir dans ce cadre que les patients présentant une lésion
ostéolytique unique, avec absence de prolifération plasmocytaire
clonale en dehors de ce site, des radiographies osseuses et une IRM
normales (en dehors de l’unique lésion lytique) et l’absence ou un
taux faible de protéine monoclonale sérique et/ou urinaire, sans
effondrement des autres classes d’immunoglobulines.
Les patients
n’ont pas d’anémie, d’hypercalcémie ou d’insuffisance rénale
attribuables à l’affection hématologique.
Une protéine monoclonale
est présente dans le sérum ou les urines chez 24 à 72 % des patients,
à un taux habituellement plus faible que dans le MM.
Avec ces
critères, cette forme clinique tend aujourd’hui à devenir de plus en
plus rare.
Pour la majorité des patients, le traitement ne consiste
qu’en une radiothérapie localisée à la dose d’environ 45 Gy (40 Gy
pour les lésions vertébrales).
Parfois la radiothérapie complète une
intervention de chirurgie orthopédique rachidienne (de stabilisation ou du fait d’une compression neurologique) ou sur un os long
(traitement d’une fracture ou enclouage préventif).
L’évolution se
fait souvent vers un authentique MM avec un temps médian jusqu’à
progression de 2 à 3 ans, mais aussi des MM très tardifs, jusqu’à 15
ans après la radiothérapie.
Certains patients présentent des plasmocytomes osseux successifs, en différents sites, sans
dissémination médullaire.
Les plasmocytoses solitaires osseux sont
souvent considérés comme une forme précoce de MM, mais la
stabilisation de l’immunoglobuline monoclonale à un taux faible
après radiothérapie évoque le retour à un état de MGUS.
La
médiane de survie est d’environ 10 ans, et 10 à 20 % des patients
décèdent d’une cause sans rapport avec l’hémopathie.
Les plasmocytomes solitaires extraosseux sont des tumeurs souvent
développées au niveau des voies respiratoires supérieures (fosses
nasales, amygdales, nasopharynx, sinus) ou du tractus digestif.
Leur
traitement repose également sur la radiothérapie localisée, souvent
curative.
Leur pronostic est meilleur que celui des plasmocytomes
osseux solitaires, avec une moindre tendance à la dissémination.
B - LEUCÉMIE À PLASMOCYTES :
La leucémie à plasmocytes réalise un tableau clinique et
hématologique gravissime, pouvant être la forme d’évolution
terminale d’un MM (leucémie à plasmocytes secondaire) ou survenir
de novo (leucémie à plasmocytes primitive).
Cette dernière entité
représente environ 4 % des MM, et sa présentation clinique est
proche de celle d’une leucémie aiguë avec anémie et thrombopénie
sévères, localisations extraosseuses et fièvre.
La plasmocytose
sanguine est par définition supérieure à 2 X 109/L (ou 20 % des
cellules du sang périphérique) et les cellules malignes ont des
caractéristiques phénotypiques et cytogénétiques les distinguant de
la forme habituelle du MM.
La chimiothérapie melphalanprednisone
est inefficace, et les médianes de survie restent courtes
avec les polychimiothérapies, à 18 et 20 mois dans deux séries
récentes.
C - FORMES SELON L’IMMUNOGLOBULINE
MONOCLONALE :
Le MM à chaînes légères se complique volontiers d’insuffisance
rénale, surtout si la protéinurie de Bence Jones est importante.
Les
MM IgD (2 % des cas) sont presque toujours de type k avec
insuffisance rénale, hypercalcémie, amylose et localisations
extramédullaires.
Il existe aussi des MM non excrétants (2 % des
cas), biclonaux, d’exceptionnels MM IgM ou IgE.
Dans certains cas,
l’immunoglobuline monoclonale précipite ou forme un gel au froid,
correspondant à une cryoglobuline de type I (immunoglobuline
monoclonale isolée) ou de type II (immunoglobuline monoclonale
et IgG polyclonales).
D - MYÉLOMES OSTÉOCONDENSANTS :
Ces rares MM s’associent à une polyneuropathie dans 30 à 50 % des
cas, alors que celle-ci est rare (3 %) dans la forme habituelle de
l’hémopathie.
Cette polyneuropathie, sensitivomotrice, diffuse et
progressive, s’intègre parfois dans le cadre plus général d’un
syndrome POEMS (P : polyneuropathie, O : organomégalie, E :
endocrinopathie, M : protéine monoclonale, S : lésions cutanées
[skin]).
Le syndrome POEMS prédomine chez les sujets de sexe
masculin, parfois jeunes, et a une physiopathologie mal connue.
Il
pourrait être lié à la production par le clone plasmocytaire de
diverses cytokines augmentant la perméabilité vasculaire et proangiogéniques, notamment le VEGF.
Le traitement est non
codifié, mais une évolution favorable après traitement intensif et
autogreffe de cellules souches périphériques a été récemment
rapportée.
Il existe aussi des plasmocytomes solitaires
condensants avec neuropathie, pour lesquels une irradiation
localisée peut permettre la disparition de la neuropathie.
E - MYÉLOMES ASYMPTOMATIQUES :
Ils sont diagnostiqués de façon fortuite, le plus souvent par le biais
d’une électrophorèse des protéines sériques pratiquée de façon
systématique ou lors du bilan d’une autre pathologie.
Ces patients,
désignés aussi comme des MM indolents (smoldering pour les
auteurs anglo-saxons) auront une période de stabilité clinique avant
la nécessité de débuter la chimiothérapie.
Ils sont en majorité au
stade I de la classification pronostique de Durie et Salmon, et il peut
être difficile voire impossible de les différencier de patients atteints
de MGUS.
L’incidence des MM asymptomatiques varie avec le
temps et en fonction du mode de recrutement.
Dans une série de
638 patients consécutifs diagnostiqués au MD Anderson Cancer
Center entre 1974 et 1991, 15 % des patients entraient dans ce
cadre.
Ils étaient 34 % dans une série italienne de patients
diagnostiqués entre 1987 et 1990 et 44 % dans une série
nordique.
Ces MM évoluent vers des formes symptomatiques et
lytiques mais avec des temps jusqu’à progression variables, parfois
de plusieurs années.
Une plasmocytose médullaire et un composant
monoclonal plutôt élevés, une anémie, l’existence d’une ou plusieurs
lésions osseuses et des anomalies osseuses en IRM (alors que les
radiographies standards sont normales) sont, en routine, les
éléments associés à un temps jusqu’à progression court.
Diagnostic différentiel
:
Le diagnostic de MM est en règle facile à établir.
Parfois, les lésions
osseuses font discuter une ostéoporose commune sévère ou un
cancer secondaire des os, mais le myélogramme et l’étude du sérum
et des urines établissent le diagnostic.
La maladie de Waldenström,
les exceptionnelles maladies des chaînes lourdes, l’amylose primitive
et la maladie des dépôts de chaînes légères ne posent pas de
problème diagnostique.
Il en est de même des immunoglobulines
monoclonales associées aux lymphomes malins non hodgkiniens, à
la leucémie lymphoïde chronique, aux déficits immunitaires, ou
rencontrées de façon transitoire au décours d’épisodes infectieux ou
de vaccinations.
Le problème de diagnostic différentiel réel se situe entre les MGUS
et les MM asymptomatiques à faible masse tumorale.
Souvent
l’évolution seule permet de trancher, l’expansion plasmocytaire
médullaire et l’élévation de la protéine monoclonale, a fortiori
l’apparition de lésions ostéolytiques et de signes cliniques, signant
le diagnostic de MM.
En l’état actuel des connaissances, la confusion
de ces deux états n’a du reste pas de conséquence clinique, car tous
ces patients ne relèvent que d’une surveillance attentive, sans
recours à un traitement.
Des expertises biologiques sophistiquées ont
été menées durant ces dernières années pour comprendre la
transition entre l’état prémalin, représenté par la MGUS et le MM.
Pour importantes qu’elles soient sur le plan physiopathologique, ces
investigations, réservées à des laboratoires très spécialisés, n’ont le
plus souvent pas été capables de qualifier de façon fiable la situation
d’un patient particulier.
Ainsi, dans le domaine de la cytogénétique,
l’anomalie -13/13q- et les réarrangements affectant la région 14q32
peuvent être observés dans les deux états, y compris les
translocations t(11 ; 14)(q13 ; q32) et t(4 ; 14)(p16 ; q32).
Si l’on
s’adresse aux cytokines et molécules de surface, la détection de
l’acide ribonucléique messager (ARNm) de l’IL 1b et l’expression
de la molécule CD56 ont été utilisées.
Comme la cytogénétique,
l’étude extensive du phénotype des cellules plasmocytaires constate
qu’il existe dans les MGUS, des cellules plasmocytaires polyclonales
résiduelles.
Une résorption osseuse excessive est retrouvée
beaucoup plus fréquemment dans le MM, y compris à faible masse
tumorale, que dans les MGUS.
Une diminution de l’index
d’apoptose des plasmocytes a été démontrée durant la transition
MGUS - MM asymptomatique - MM évolutif.
En pratique, ce sont finalement des éléments simples qui gardent
valeur d’orientation.
Les MGUS ont un taux d’immunoglobuline
monoclonale plutôt faible (inférieur à 20 g/L pour l’IgG, à 10 g/L
pour l’IgA), une protéinurie de Bence Jones nulle ou faible
(inférieure à 300 mg/24 heures), une plasmocytose médullaire faible
(inférieure à 10 %) faite de plasmocytes non dystrophiques.
Bien
entendu, il n’existe, ni lésions ostéolytiques, ni anémie, ni
insuffisance rénale, ni hypercalcémie (sauf à considérer que ces
anomalies aient une autre étiologie).
L’hypogammaglobulinémie polyclonale, c’est-à-dire la diminution des autres classes
d’immunoglobulines, n’est pas un bon élément de diagnostic
différentiel puisqu’elle est présente dans 20 à 30 % des MGUS.
Facteurs pronostiques
:
Le pronostic du MM est globalement péjoratif mais cependant
variable, avec 10 % des patients qui décèdent précocement et
d’autres qui survivent plus de 10 ans.
Peu de paramètres permettent,
au diagnostic, de prédire le devenir des patients.
Le facteur le plus
important semble en fait être la chimiosensibilité de la tumeur, par
définition non connue au diagnostic.
Si les patients chimiorésistants
décèdent rapidement, ceux qui obtiennent après traitement un état
de rémission complète semblent présenter les survies sans
progression et survies les plus longues.
Ce point mérite
cependant d’être précisé, car la définition de la rémission complète
a varié dans le temps et selon les équipes.
Dans une étude récente,
la rémission complète, définie par l’immunofixation, conférait, par
rapport à la réponse partielle, un avantage statistiquement non
significatif sur la survie sans progression, sans bénéfice sur la
survie.
L’appréciation initiale du pronostic est indispensable, et
tend aujourd’hui à orienter les choix thérapeutiques.
La b2m est un
facteur pronostique essentiel, quel que soit le traitement mis en
place.
Une b2m sérique élevée est associée à une masse tumorale
importante et à une survie plus courte, qu’elle soit considérée
comme une variable linéaire ou à différents seuils (les données
publiées font état de seuils variables, entre 2,5 et 7 mg/L).
La valeur
pronostique de la b2m reste discriminante dans les deux années
suivant le diagnostic.
La b2m est normale chez environ 10 % des
patients, dépourvue de signification pronostique chez ces « nonproducteurs
».
Des modèles pronostiques performants sont obtenus
en associant à la b2m d’autres paramètres de routine tels l’albumine
sérique ou la CRP (tous deux reflets de l’IL 6 endogène), identifiant
les patients à b2m élevée et albumine basse ou CRP élevée comme
de très mauvais pronostic.
Les anomalies cytogénétiques prennent une importance pronostique
croissante.
L’anomalie -13/13q- est un puissant facteur de mauvais
pronostic, que les patients reçoivent un traitement conventionnel ou
intensif.
Là encore, la prise en compte conjointe de la
b2m et de l’anomalie -13/13q- établit un modèle pertinent, dans
lequel les patients à b2m élevée et avec -13/13q- ont un pronostic
très péjoratif.
Chez les patients recevant un traitement intensif,
la translocation t(4 ; 14)(p16 ; q32), souvent associée à -13/13q-, est
de très mauvais pronostic, à l’inverse de la translocation t(11 ;
14)(q13 ; q32) qui est de bon pronostic.
L’hypodiploïdie est
également un facteur de mauvais pronostic.
Il en est de même
des taux sériques élevés d’IL 6 et du récepteur soluble de l’IL 6 et d’un index de prolifération élevé du clone malin (index de
phase S ou labeling index des auteurs anglo-saxons) aussi bien au
diagnostic qu’en phase de plateau.
Le degré d’angiogenèse
médullaire est corrélé à l’index de prolifération, et les patients à haut
niveau d’angiogenèse médullaire ont une survie plus courte.
D’autres facteurs ont fait l’objet d’expertises moins complètes ou
préliminaires.
Des comptes élevés de cellules immunes circulantes,
en particulier CD19+, sont associés à une survie plus prolongée.
La forme soluble de la molécule Syndecan-1 est souvent retrouvée à
des taux plus élevés ches les patients atteints de MM par rapport
aux sujets sains, et les taux sériques les plus élevés sont associés à
une survie courte.
Il existe des données préliminaires sur la
valeur pronostique de marqueurs de remodelage osseux, par
exemple l’ICTP sérique (C-terminal cross-linked telopeptide of collagen
I), produit de dégradation du collagène de type I.
La
morphologie plasmoblastique des cellules myélomateuses est de
mauvais pronostic, mais le MM plasmoblastique est une entité de
définition délicate et ne concerne en outre qu’environ 10 % des
patients.
Une autre classification cytologique dont la
méthodologie repose sur la reconnaissance, plus facile, des cellules
plasmocytaires matures, établit l’importance de cette dernière
population comme de bon pronostic.
La classification de Durie et
Salmon considère des paramètres usuels liés à la masse tumorale.
Elle reste à ce jour utilisée, même si sa valeur pronostique est
inférieure à celle de la b2m et des anomalies cytogénétiques, et si
elle pêche par une détermination souvent imprécise des lésions
osseuses.