La ménopause se définit cliniquement comme la disparition définitive du cycle
menstruel.
On distingue les ménopauses naturelles survenant parfois précocement, les ménopauses
par castration : chimique (chimiothérapie), radique (curiethérapie, radiothérapie
externe), chirurgicale (ovariectomie bilatérale).
Son origine est ovarienne avec initialement résistance des follicules restants aux
gonadotrophines, puis disparition du capital folliculaire.
La période ménopausique se subdivise en :
– préménopause durant de 2 à 6 ans, avec des cycles anovulatoires de plus en
plus fréquents, et insuffisance lutéale.
Cette période est précédée d’une insuffisance
ovarienne « occulte » d’expression biologique pure ;
– période ménopausique ou arrêt de la fonction ovarienne avec anovulation et aménorrhée,
mais possibilité pendant 4 à 5 ans de reprises passagères de l’activité ovarienne
; c’est la période des troubles climatériques.
Elle survient en moyenne à
51 ans.
Certains facteurs influencent l’âge de sa survenue : avancée par le tabac,
retardée par la multiparité et l’alcoolisme.
Mais l’évolution naturelle vers l’atrésie
et la disparition des follicules n’est pas modifiée par les contraceptifs ;
– post-ménopause avec sécrétion ovarienne résiduelle d’androgènes et carence
oestrogénique profonde.
Diagnostic :
A - Diagnostic clinique
:
1- Aménorrhée :
Le diagnostic clinique de ménopause est donc établi rétrospectivement, sur une
aménorrhée persistante supérieure à 6 à 12 mois, éventuellement associée à un
syndrome climatérique, et survenant à un âge compatible avec le diagnostic.
2- Syndrome climatérique :
Il est inconstant, fréquemment dissocié et d’intensité variable :
– bouffées de chaleur dont la physiopathologie n’est pas élucidée : perturbation
des amines cérébrales induite par la carence oestrogénique.
Elles s’observent
chez 85 % des femmes ;
– sueurs profuses surtout nocturnes ;
– céphalées, troubles du psychisme et du sommeil avec nervosité, vertiges et tendance
dépressive, discrète altération des fonctions cognitives, atrophie vulvovaginale
avec sécheresse.
Ce tableau climatérique est surtout marqué dans la période ménopausique.
Ultérieurement,
il s’atténue et ne persiste que les manifestations des carences au
niveau des tissus-cibles.
On peut évaluer le retentissement du climatère sur la qualité de vie par différentes
échelles.
L’index de Kupperman est couramment utilisé.
B - Diagnostic biologique et histologique
:
1- Diagnostic biologique :
Le tableau biologique n’est pas spécifique ; c’est celui d’une insuffisance ovarienne
sévère : estradiol (E2) effondré o 50 pg/mL, avec gonadotrophines élevées,
FSH > 20 mUI/mL avec insuffisance lutéale, progestérone indosable et
hyperandrogénie relative par sécrétion de testostérone.
2- Diagnostic histologique :
L’ovaire ménopausique diminue de volume dans la moitié des cas.
La fonction
exocrine est caractérisée par l’absence de follicules matures et de corps jaune.
La perte du capital folliculaire est quasi complète.
Les modifications de la fonction endocrine précèdent les signes cliniques et définissent
l’insuffisance ovarienne « occulte ».
En post-ménopause, seules les cellules
du stroma sécrètent de petites doses de testostérone.
C - Ménopause précoce :
Elle survient avant 40 ans.
Il s’agit d’une défaillance ovarienne précoce définitive
d’étiologie variable : inconnue, immunologique, mais aussi iatrogénique,
infectieuse, génétique...
Sa fréquence est de 1 à 4 %.
Elle survient brutalement
ou dans un contexte d’insuffisance ovarienne chronique.
La symptomatologie
ne diffère pas des autres ménopauses.
Le tableau biologique est celui d’une insuffisance ovarienne sévère, durable.
L’aspect ovarien en échographie est variable : porteur ou non de follicules, le
caryotype peut révéler différentes formules (45 XO – 47 XXX ou mosaïques...).
La coelioscopie précise la morphologie et la taille ovarienne : hypotrophique, dysgénétique, bandelettes.
Ses conséquences sont la stérilité nécessitant de faire appel aux techniques de
la procréation médicalement assistée, et l’insuffisance oestrogénique précoce,
profonde et durable, pathologie imposant le THS.
Traitement :
A - Méthodes :
Le traitement de la ménopause repose sur le THS : traitement hormonal substitutif.
1- OEstrogènes :
Il est fait appel aux oestrogènes disponibles (à l’exception de l’éthinyl-oestradiol
dont les effets métaboliques justifient son abandon au-delà de 40 ans à titre
contraceptif).
Ceux-ci vont se fixer sur les récepteurs.
• Différentes voies d’administration sont possibles : orale, percutanée, dispositifs
transdermiques 25 à 100 µg/j, parentérale (Benzo-gynoestryl), vulvovaginale.
Le rôle des progestatifs au cours du traitement substitutif est d’éviter l’hyperplasie
et le cancer de l’endomètre.
• Différentes voies d’administration sont possibles : orale, vaginale, cutanée
(qui ne permet un passage systémique que pour un petit nombre de progestatifs).
Elle n’est pas utilisée actuellement en France.
• Les molécules disponibles sont :
– progestérone micronisée ;
– progestatifs de synthèse : rétroprogestérone, dérivés de la 17-hydroxyprogestérone,
la 19-norprogestérone, la 17-méthyl progestérone, les norstéroïdes.
Le choix des molécules est basé sur leur puissance progestomimétique et antioestrogénique.
Les progestatifs non androgéniques ne diminuent pas l’effet protecteur obtenu
par les oestrogènes.
3- Schémas thérapeutiques :
• OEstrogènes : leur mode d’administration est cyclique, 21 à 25 jours par mois,
ou continu, sans interruption.
• Progestatifs : administration séquentielle, 10 à 14 jours consécutifs par mois
entraînant une hémorragie de privation, ou continue (traitement sans règles).
4- Traitements non hormonaux :
Ils sont destinés au traitement symptomatique des bouffées de chaleur et des
manifestations psychofonctionnelles : Proxibarbal (sédatif), Véralipride (benzodiazépine),
b-alanine (acide aminé), clonidine (a-sympathico-mimétique).
B - Modalités de prescription et de surveillance :
1- Indications :
Le THS est indiqué pour la correction de la carence oestrogénique ménopausique
et les troubles qui en résultent, la prévention des maladies cardiovasculaires et
de l’ostéoporose.
Les progestatifs ne sont pas nécessaires en cas d’hystérectomie.
2- Contre-indications aux traitements systémiques :
Elles ne sont pas superposables à celles des oestroprogestatifs contraceptifs et
évoluent vers une plus grande acceptation, en particulier cardiovasculaire.
Cependant,
chez les patientes porteuses d’affections cardiovasculaires, les bénéfices
et les risques ne sont pas suffisamment évalués pour ne pas respecter les contreindications
:
• Relatives : antécédents familiaux de cancer du sein, antécédents thrombo-emboliques
(par analogie avec les oestroprogestatifs contraceptifs), cardiopathies
emboligènes, coronaropathies, maladies métaboliques sévères, diabète, obésité.
Les traitements hormonaux à visée locale pendant une période relativement courte
(quelques années) ne sont pas contre-indiqués.
3- Surveillance :
• Les dosages hormonaux pour affirmer la ménopause ne sont habituellement
pas indiqués.
Ils peuvent orienter en cas d’hystérectomie et en l’absence de syndrome
climatérique.
Par ailleurs, ils n’ont aucun caractère prédictif.
La mise en route du traitement est justifiée en cas de ménopause confirmée :
aménorrhée de plus de 6 mois et 3 tests mensuels aux progestatifs négatifs.
Dans les premières années d’installation de la ménopause, une reprise passagère
de l’activité ovarienne est possible et impose l’arrêt du traitement.
• En cours de THS, l’adaptation du traitement se fait essentiellement sur la clinique
: bouffées de chaleur et carences persistent en cas de sous-dosage, mastodynies
en cas de surdosage.
Pour certains auteurs, la protection osseuse nécessite des taux circulants de E2
supérieurs à 60 pg/mL mais il ne s’agit que d’une donnée statistique, sans valeur
individuelle.
• L’examen sénologique et une mammographie normale sont nécessaires avant
la mise en route du traitement.
La surveillance sénologique ultérieure (mammographie
tous les 2 ans) n’a pas de particularité. Biopsie d’endomètre, échographie
pelvienne et doppler utérin n’ont aucune indication chez les patientes
asymptomatiques.
• En cas de métrorragies (à distinguer des hémorragies de privation), une consultation
est indiquée.
L’enquête étiologique peut comporter une biopsie endométriale,
éventuellement sous contrôle hystéroscopique ou une échotomographie
vaginale.
Si celle-ci montre une épaisseur endométriale inférieure à 8 mm et une
cavité vide, le risque de cancer endométrial est alors quasi inexistant.
• La surveillance du bilan lipidique n’est pas indiquée, à la différence des références
médicales opposables.
• La masse osseuse peut être appréciée indirectement par la densité osseuse.
Sa
mesure est un bon critère d’évaluation du risque fracturaire (bonne spécificité
–
sensibilité modeste) et se mesure au col fémoral par l’absorptiométrie biphotonique
à rayons X.
Les valeurs sont exprimées en variations du T score (valeur moyenne maximale
chez l’adulte jeune), ou du Z score, moyenne théorique pour l’âge.
Il existe un
risque fracturaire au-delà de 2 déviations standard.
On peut ainsi connaître à un
moment donné le niveau d’ostéoporose.
La répétition de la mesure dans un délai
de 3 à 5 ans détermine la vitesse de perte, et le risque d’atteindre le « seuil fracturaire
».
Le seuil fracturaire est une notion théorique qui correspond à la densité audessous
de laquelle 90 % des patientes présentent des fractures.
La densitométrie
osseuse peut être indiquée chez les sujets à haut risque d’ostéoporose : antécédent
d’insuffisance oestrogénique prolongée, hypercorticisme, ménopause précoce.
4- Complications liées au THS :
• La prise de poids est une conséquence de la ménopause et du vieillissement et
non du traitement hormonal qui améliore le syndrome métabolique ménopausique.
• Les métrorragies sont de causes variables : hyperplasie ou cancer de l’endomètre
en cas de déséquilibre oestroprogestatif prolongé, atrophie muqueuse.
C - Risques liés aux traitements :
1- Cancer du sein
:
Le risque d’augmentation, du fait d’une oestrogénothérapie de durée supérieure
à 10 ans, est évalué dans différentes études épidémiologiques et de méta-analyses,
et controversé.
Il est suggéré un risque relatif compris entre 1,06 et 1,3.
Ce discret surcroît disparaîtrait 2 ans après l’arrêt ; un meilleur dépistage chez
les femmes traitées et (ou) une stimulation par le THS de la croissance de cancers
préexistants, a été suggéré.
Cependant, les données sont insuffisantes aujourd’hui
pour conclure définitivement, ce qui démontre l’absence de liaison forte
entre cancer du sein et THS.
Les progestatifs n’ont pas de rôle « protecteur ».
Du fait de la grande fréquence
de ce cancer, une surveillance radioclinique régulière est préconisée, surtout en
cas de mastodynies.
2- Cancer de l’endomètre :
Ce risque est fortement corrélé (dose-durée) à l’utilisation des THS non compensés
par un progestatif.
Le risque relatif est évalué à 2,3 ; il diminue en cas de
traitement équilibré (risque relatif à 0,8).
L’oestrogénothérapie isolée prolongée entraîne une hyperplasie endométriale susceptible
de se transformer en cancer et l’imprégnation progestative nécessite une
dose et une durée suffisantes.
3- Cancer de l’ovaire :
Le risque ne semble pas modifié par le THS, mais les études actuelles sont insuffisantes
pour conclure définitivement.
4- Risques autres
:
Aux doses physiologiques, il n’y a pas d’augmentation de la fréquence ni de la
sévérité des accidents thrombo-emboliques.
Il existe chez les femmes traitées un discret surcroît de pathologies vésiculaires.
D - Bénéfices thérapeutiques :
• A court terme, ils apparaissent clairement sur le syndrome climatérique et plus
globalement sur les scores de qualité de vie liée à la santé.
• À long terme, c’est-à-dire au-delà de 7 à 10 ans, la diminution du risque fracturaire
et de la pathologie cardiovasculaire est également reconnue par des
méthodes indirectes et par les chiffres de morbidité-mortalité.