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Réanimation-Urgences
Intoxications aiguës de l’enfant (Suite)
Cours de réanimation - urgences
 

 

 

Intoxications aiguës par les produits domestiques ménagers et industriels :

Les intoxications aiguës par les produits ménagers restent toujours aussi fréquentes avec 25 % de l’ensemble des intoxications de l’enfant.

Leur première cause réside dans le transvasement de nombre de ces produits dans des bouteilles d’eau minérale ou d’autres flacons de boisson (jus de fruit, Coca-Colat) ou des récipients à usage alimentaire (gobelet, bol, assiette, boîte de conserve).

Les produits domestiques industriels concernent 5 % des intoxications, le plus souvent des produits pétroliers ou des produits dérivés du pétrole.

L’intoxication par l’eau de Javel vient très largement en tête, suivie par les produits de lavage pour lave-vaisselle automatique, très basiques (pH entre 11 et 13), les produits à base de soude caustique et notamment les déboucheurs de canalisation, puis les produits de lavage à la main (vaisselle, linge) et les poudres pour le linge en machine, les détartrants pour les sanitaires, les antirouille, les détachants pour le linge et bien d’autres produits.

Chaque année, le service ORL d’urgence pour la région Île-de-France de l’hôpital Necker-Enfants Malades recense entre 55 et 65 produits différents sur l’ensemble des malades qui viennent en consultation, le plus souvent adressés en seconde main par des hôpitaux périphériques de Paris.

Beaucoup de produits ménagers sont simplement irritants pour le tube digestif, entraînant quelques douleurs abdominales et des selles un peu liquides, parfois graisseuses, mousseuses et nauséabondes.

Il suffit d’attendre 3 à 4 heures avant de redonner boisson et aliment à l’enfant.

En revanche, le danger vient des produits caustiques, des produits pétroliers et de l’antigel. Les produits ménagers caustiques donnent des lésions à type de brûlures des muqueuses de la bouche, du carrefour pharyngolaryngé (hypopharynx, épiglotte, margelle laryngée), de l’oesophage et même de l’estomac dans 8 % des situations.

Elles sont maximales en quelques minutes selon la concentration du produit, ce qui rend illusoire toute tentative de neutralisation.

On reconnaît les brûlures de grade I touchant la muqueuse et la sous-muqueuse, de grade II avec atteinte superficielle de la musculeuse donnant des ulcérations saignant facilement et recouvertes de fausses membranes, et de grade III où les lésions intéressent la quasi-totalité de l’épaisseur de l’oesophage donnant, en fibroscopie, un aspect ulcérobourgeonnant et nécrotique de la lumière oesophagienne.

Les lésions sont habituellement multifocales, plus ou moins étendues, parfois circonférentielles avec un risque majeur de sténose cicatricielle et de troubles de la contractilité oesophagienne.

Les bases dissolvent les matières albuminoïdes des épithéliums et saponifient les graisses, réalisant une nécrose de liquéfaction, tandis que les acides entraînent une coagulation de ces matière s albuminoïdes.

A - PRINCIPAUX PRODUITS MÉNAGERS EN CAUSE :

1- Eau de Javel :

L’eau de Javel reste le premier produit ménager absorbé accidentellement par les jeunes enfants (25 à 42 % selon les études), en raison de son fréquent transvasement dans des récipients alimentaires ou des bouteilles et de la négligence des parents.

L’enquête menée pendant 9 mois, du 15 mai 1990 au 15 février 1991, par le Centre d’information et de rencontres pour la prévention des accidents d’enfants (CIRPAE) à la requête du syndicat des fabricants d’eau de Javel et de produits connexes est toujours d’actualité.

Elle a rassemblé 158 dossiers d’accident de l’enfant avec de l’eau de Javel enregistrés aux urgences pédiatriques de cinq hôpitaux parisiens et dans les services ORL de Paris.

En voici les principales caractéristiques :

– prédominance des garçons 61 % ;

– 50 % âgés de 12 à 30 mois ; 18 % au-delà de 4 ans ;

– 30 % d’enfants migrants (population migrante à Paris 18 %) ;

– ingestion accidentelle 88 %, projection 2 %, berlingot mordillé par un nourrisson 10 % ;

– 64,5 % d’eau de Javel diluée à 12° chlorométrique ou moins ;

– 35,5 % d’eau de Javel concentrée ou de comprimés solubles ;

– adulte à proximité 90 % ;

– transvasement de l’eau de Javel et déconditionnement 60 % ;

– erreur de la part des parents, qui ont donné à boire de l’eau de Javel diluée, après transvasement méconnu ou oublié 9,5 % ;

– erreurs comportementales des adultes 95,5 %. Une vingtaine de fibroscopies ont été effectuées.

Elles n’ont montré que des brûlures de grade I, qui ont toutes guéri sans séquelles.

L’eau de Javel est une solution d’hypochlorite de sodium, qui contient du chlorure de sodium et libère de l’oxygène en milieu alcalin.

C’est la présence d’un peu de soude (1 g/L dilué à 12° chlorométrique, donc 4 g dans la forme concentrée en berlingot à 48° chlorométrique) qui assure l’alcalinité et serait responsable des lésions, leur intensité étant proportionnelle au degré chlorométrique et à la durée d’exposition.

L’adjonction de corps tensioactif dans le produit (exemple : Javel Plust) augmente le temps de contact et d’action du produit, mais il n’a pas été observé de lésions oesophagiennes autres que de grade I avec guérison complète sans séquelles.

De janvier 1988 à mai 1989, sur 100 patients ayant consulté aux urgences ophtalmologiques de l’Hôtel Dieu à Paris, 17 % concernaient des enfants âgés de 8 mois à 4 ans qui avaient mordillé dans un berlingot.

L’évolution a été favorable rapidement en 48 heures dans tous les cas, sauf un.

Intoxication par inhalation de vapeurs de chlore, provoquées par le mélange d’eau de Javel avec un détartrant acide : en dehors de l’hyperhémie conjonctivale et de céphalées, elle se caractérise par une toux spasmodique, mais elle peut déclencher une crise d’asthme ou, exceptionnellement, un OAP lésionnel.

2- Produits de nettoyage :

* Caustiques basiques :

Ils sont représentés par les décapants de fours contenant 3 % de soude caustique, les déboucheurs de canalisations (35 à 40 % de soude caustique) et l’ammoniaque (alcali du commerce).

Le Destopt est vendu à 7 000 000 d’unités chaque année, représentant 88 % du marché français de ce type de produit pour déboucher les canalisations, notamment sanitaires.

C’est un produit liquide, mais il existe aussi des déboucheurs sous forme de poudre ou de paillettes. Ces produits provoquent des brûlures oesophagiennes, parfois gastriques, étendues, multiples, selon les trois grades déjà mentionnés.

S’il existe des lésions de grade II ou de grade III, une sonde nasogastrique en silicone est mise en place pour plusieurs semaines afin de permettre l’alimentation de l’enfant tout en assurant le calibrage de l’oesophage pour éviter les sténoses cicatricielles rétractiles.

Si la sténose est unique et peu étendue, on peut la dilater avec des bougies de calibre croissant, mais ces séances de dilatation sont très gênantes pour l'enfant, car hebdomadaires, puis bimensuelles, mensuelles pendant des mois, voire 1 à 2 ans.

Il y a toujours un risque de perforation de la paroi oesophagienne, fragile au cours de ces manoeuvres, avec médiastinite et pleurésie purulente.

Lorsque l’oesophage est complètement détruit et inutilisable en raison de multiples sténoses, il faut se résoudre à effectuer une oesophagoplastie colique avec du côlon transverse en retirant la quasi-totalité de l’oesophage, qui n’est plus qu’une poche de pus et de fibrose.

Cette intervention difficile est grevée de complications postopératoires et cette réparation constitue un certain handicap pour l’enfant.

En dehors des lésions digestives, on peut observer des brûlures cutanées ou oculaires par projection, ou des atteintes pharyngolaryngées qui ne sont pas toujours de bon pronostic, passé le stade initial, car la cicatrisation peut se faire vers une sténose laryngée, un entonnoir de l’hypopharynx ou une destruction de l’épiglotte.

Quelques enfants doivent donc être trachéotomisés ou présentent des troubles de la déglutition avec fausses routes et des troubles de la parole.

En 1979-1980, une action concertée corps médical - pouvoirs publics - associations de consommateurs, a permis d’obtenir du fabricant cinq modifications du produit : couleur violet indigo au lieu de vert émeraude, introduction d’ammoniaque comme répulsif, fermeture à l’épreuve des enfants de moins de 4 ans, remplissage du flacon de 1 L à 900 mL pour éviter toute projection lors de l’ouverture, amélioration du pictogramme et du libellé des conseils d’utilisation et en cas d’accident.

Depuis 1981, les centres antipoisons ont enregistré une baisse de 45 % des appels concernant ce produit.

Le service d’urgence ORL de la région Île-de-France, situé à l’hôpital Necker-Enfants Malades, a vu chuter de 75 % en 3 ans le nombre d’enfants hospitalisés après une absorption accidentelle de ce produit. Alors que 42 enfants subissaient en 1980 une fibroscopie pour absorption accidentelle de Destopt, depuis 1995, le chiffre annuel oscille entre trois et cinq cas.

Ces résultats confirment l’efficacité des mesures prises, qui ne peuvent supprimer cependant tous les risques : enfant jouant à proximité de conditionnement laissé ouvert, produit transvasé dans une bouteille ou un récipient à usage alimentaire, pièce non condamnée alors que le produit stagne dans le sanitaire.

Il faut aussi bien rincer l’appareil sanitaire après utilisation.

* Caustiques acides :

Ce sont des détrartrants pour WC et tous les acides utilisés à l’état pur ou dilué (acide chlorhydrique [Mirort, Argentilt] , sulfurique, nitrique, acétique).

Ils présentent les mêmes risques que les caustiques basiques, quel que soit l’organe atteint.

Ils concernent 8 % des produits.

* Poudres, gels ou tablettes de lavage pour lave-vaisselle :

Ces produits sont des caustiques basiques puissants dont le pH est compris entre 11 et 13,5.

Ces intoxications chez le jeune enfant étaient en pleine expansion jusqu’en 1989, du fait des circonstances habituelles de ces absorptions accidentelles et de l’accroissement régulier du parc des lave-vaisselle dans les foyers français (54 % actuellement), alors que les ménagères ne sont pas suffisamment conscientes que ces produits utilisés régulièrement sont dangereux.

C’est au moment de l’introduction du produit dans la machine ou à l’ouverture de la porte avant de celle-ci (réservoir ouvert), plus souvent que lors du stockage, que l’accident se produit habituellement.

Dans d’autres cas, l’enfant s’empare d’un peu de poudre et porte sa main à la bouche, alors que le conditionnement est ouvert à sa portée ou qu’on a utilisé un intermédiaire (gobelet, verre…) pour remplir le réservoir.

L’enfant, dans 30 % des cas, récupère un peu de résidu de poudre humide, qui peut rester dans le réservoir ouvert, alors que l’adulte range la vaisselle, le programme achevé.

Les produits de lavage pour machine à laver la vaisselle représentent actuellement 35 000 tonnes par an, sous forme de poudre (40 %), de gel liquide (20 %) et de tablettes (40 %), présentation qui a permis de diminuer fortement les intoxications accidentelles.

Dans les années 1986-1990, l’augmentation progressive du nombre d’enfants intoxiqués par ces produits a entraîné une nouvelle action concertée corps médical-pouvoirs publics-industriels.

Dès 1990, avant même l’arrêté du 1er juin 1991 qui transposa en droit français une directive européenne obligatoire, les industriels ont commercialisé en France, la société Sun la première, des produits munis de systèmes de fermeture à l’épreuve des enfants de moins de 4 ans.

Comme pour le Destopt, dans les 2 ans qui suivirent, le nombre d’admissions dans le service d’urgence ORL de la région Île-de- France chuta de 70 %, passant de 72 cas en 1989 à 30 en 1992, puis 23 en 1994 et ne cessant de chuter depuis lors (18 en 1995, 11 seulement en 1998).

Bien entendu, ces systèmes ne sont pas la panacée ; il faut y associer une bonne information continue des consommateurs, des notices très explicatives et des pictogrammes simples à comprendre.

* Produits antirouille pour le linge :

Ce sont des solutions aqueuses d’acide fluorhydrique comme la Rubiginet ou de l’acide oxalique, très toxiques, dont le pH est entre 1 et 2.

Les lésions caustiques digestives s’observent entre 4 et 8 heures, mais d’emblée il existe des douleurs buccales, rétrosternales, épigastriques et des vomissements, qui peuvent être sanglants.

Ils chélatent rapidement le calcium, à l’origine d’une hypocalcémie aiguë, dès la première heure, responsable de convulsions et de troubles du rythme cardiaque (à l’électrocardiogramme, allongement de l’espace QT et ondes T amples et pointues).

Pour les oxalates, le dépôt de cristaux d’oxalate dans les tubules rénaux peut conduire à l’anurie.

Si l’intoxiqué est vu rapidement, il est procédé à une évacuation gastrique prudente, bien qu’il s’agisse d’un caustique.

La recharge calcique s’adresse au gluconate de calcium à forte dose (5 g pour 250 mL de soluté glucosé à 5 % en 1 heure) sous surveillance électrocardiographique stricte, avec dosages répétés de la calcémie.

* Assouplissants textiles :

Ce sont des produits tensioactifs comprenant des alcools (isopropanol, parfois méthanol) en faible quantité.

Ils donnent quelques troubles digestifs (vomissements, douleurs abdominales, diarrhée) en cas d’absorption minime.

On prescrit l’arrêt de toute boisson ou alimentation pendant au moins 3 heures.

En cas d’absorption massive, on procède à une aspiration du contenu gastrique en milieu hospitalier, sans aucun lavage, puis à une fibroscopie pour un bilan des lésions, s’il s’agit de produits contenant des tensioactifscationiques en forte concentration, caustiques pour le tube digestif.

* Détartrants pour cafetières et fers à repasser :

Les intoxications avec ces produits qui contiennent des acides sont de plus en plus fréquentes. Absorbés, ils sont irritants, excepté pour ceux qui contiennent de l’acide phosphorique qui peut entraîner des brûlures digestives (fibroscopie nécessaire).

* Produits d’entretien des meubles, parquets et bois :

Encaustiques : leur ingestion est dangereuse par la présence de solvants, essence de térébenthine ou autres dérivés pétroliers comme le white-spirit, qui donnent une pneumopathie d’inhalation.

* Produits d’entretien des cuirs :

Les cirages ont souvent la même composition que les encaustiques et en partagent la symptomatologie et la toxicité. Ils peuvent contenir aussi du nitrobenzène et de l’aniline, deux produits méthémoglobinisants ou de l’alcool méthylique dont la toxicité oculaire est bien connue (amaurose, cécité).

Certains blancs à chaussure contiennent du trichloréthylène, dont les effets toxiques sont neurologiques (céphalées, vertiges, démarche ébrieuse, coma et convulsions) et cardiaques (troubles du rythme).

Les assouplisseurs du cuir sont à base d’éthylène glycol.

3- Autres produits :

* Colles :

La toxicité dépend de la composition de la colle.

Du fait de très faibles quantités, l’ingestion accidentelle est négligeable.

Les solvants peuvent être dangereux (hydrocarbures pétroliers, alcools, cétones...).

Les colles se polymérisent à l’application (cyanoacrylates) ; on observe alors fréquemment un collage des doigts.

Il ne faut rien tenter et attendre quelques heures que la colle se détache spontanément, quelquefois facilitée par un bain prolongé d’eau tiède savonneuse.

* Antimites et désodorisants solides :

Les antimites sont présentés en petites boules ressemblant à des friandises, qui peuvent être sucées ou croquées par de jeunes enfants, ou en blocs dont certains sont inclus dans des contenants plastiques.

À base de naphtalène ou de paradichlorobenzène, les troubles sont essentiellement neurologiques avec un état de mal convulsif et un coma.

Les blocs de désodorisants solides pour WC contiennent aussi du paradichlorobenzène.

Le naphtalène peut provoquer aussi une hémolyse aiguë chez les sujets porteurs d’un déficit en glucose-6-phosphate-déshydrogénase et le paradichlorobenzène, une hypoplasie médullaire.

B - PRODUITS INDUSTRIELSÀ USAGE DOMESTIQUE :

1- Combustibles ménagers :

Qu’il s’agisse d’essence, de mazout ou de pétrole lampant, ces produits exposent à un triple risque : des troubles digestifs par irritation immédiate, une pneumopathie d’inhalation, une atteinte neurologique depuis l’ébriété et l’obnubilation jusqu’au coma.

La pneumopathie débute par une toux avec dyspnée, qui peuvent être régressives temporairement, puis s’installe une détresse respiratoire avec signes de lutte, tandis que la radiographie pulmonaire montre des foyers dans les deux poumons, prédominant du côté droit.

Le risque réside dans la surinfection bactérienne et l’emphysème bulleux.

Dans l’immédiat, il faut déshabiller l’enfant qui en a renversé sur ses vêtements et faire couler de l’eau sur sa peau irritée.

Il ne faut pas provoquer de vomissements qui aggraveraient l’inhalation d’essences volatiles et de particules liquides.

Il ne faut rien donner à boire et surtout pas de lait, qui aggraverait l’absorption de ces produits lipophiles.

Dans tous les cas, le transport se fait en position latérale de sécurité vers les urgences hospitalières, avec surveillance de l’état respiratoire. Une oxygénothérapie par sonde nasale, lunettes ou masque peut être nécessaire selon l’oxymétrie de pouls.

L’importance de la détresse respiratoire conduit à l’intubation avec assistance respiratoire mécanique du malade et son passage en unité de réanimation.

L’alcool à brûler contient de 75 à 95 % d’alcool, du méthanol, de l’isopropanol, des glycols et des cétones.

2- Peintures :

Les peintures ont pour solvants de l’essence minérale, de l’essence de térébenthine (peintures mates), de l’huile de lin (peintures brillantes) à toxicité pulmonaire, ou tout simplement de l’eau (peintures vinyliques ou à l’eau).

Le pourcentage de plomb doit être inférieur à 1 %.

Les teintes des peintures sont dues à des pigments et à des colorants à base d’aniline, qui peuvent entraîner une méthémoglobinémie à traiter par le bleu de méthylène par voie intraveineuse.

Une intoxication aiguë par les essences volatiles dégagées par les peintures peut se produire lors de travaux dans une pièce insuffisamment aérée (céphalées, vertiges, démarche ébrieuse, somnolence).

3- « White-spirit » :

Très utilisé comme diluant de peintures ou solvant pour nettoyer pinceaux ou rouleaux, son absorption accidentelle provoque une pneumopathie d’inhalation, parfois très sévère ; 1 mL/kg pourrait entraîner la mort d’un jeune enfant de moins de 4 ans.

Le plus souvent, l’intoxication est secondaire à un phénomène de transvasement dans une bouteille d’eau minérale ou une boîte de conserve.

4- Métaldéhyde :

Ce produit sert à allumer un feu (barbecue, cheminée).

Il se présente actuellement sous la forme d’une pâte de couleur brune, qui peut faire penser à une friandise.

L’absorption accidentelle aiguë entraîne des vomissements blanchâtres, caillebotteux, des convulsions et un coma. Le traitement est symptomatique.

5- Antigels :

L’éthylène glycol en est le principal constituant et sa toxicité résulte de l’initiation de son métabolisme par l’alcool déshydrogénase hépatique.

Après une phase initiale de somnolence ou d’ébriété, avec souvent polyurie osmotique, apparaît une acidose métabolique liée à l’accumulation d’acide glycolique, métabolite de l’éthylène glycol.

L’insuffisance rénale organique, le coma convulsif et l’insuffisance circulatoire sont dus à la métabolisation de l’acide glycolique en acide oxalique.

Les sels d’oxalate précipitent sous forme de cristaux dans les reins, le cerveau et le coeur, et leur présence dans les urines authentifie l’intoxication par l’éthylène glycol.

Il peut exister une hypocalcémie sévère.

Il s’agit d’une intoxication grave dont le traitement associe en urgence une évacuation gastrique et l’administration d’antidote, l’éthanol ou le 4-méthylpyrazole.

Ces produits bloquent le métabolisme activateur de l’éthylène glycol par l’alcool déshydrogénase.

L’épuration extrarénale est utile et souvent mise en oeuvre devant l’acidose métabolique majeure, pour augmenter l’élimination de l’éthylène glycol à la phase aiguë et traiter l’anurie provoquée par les dépôts d’oxalate dans les tubules rénaux. Le reste du traitement est symptomatique : intubation et ventilation mécanique assistée, contrôle des convulsions.

Le transvasement de l’antigel dans des bouteilles ou récipients à usage alimentaire (eau minérale, Coca- Colat, jus de fruit) est responsable de nombreuses intoxications accidentelles, quel que soit l’âge de l’enfant (biberon du nourrisson ou boisson rafraîchissante au retour des activités de jeux ou sportives).

Le décret obligatoire de 1994 a imposé aux industriels la présence dans tous les antigels d’une substance très amère, le benzoate de dénatonium ou Bitrext, qui empêche l’enfant de boire le produit, car la grande amertume du Bitrext l’oblige à le recracher aussitôt après l’avoir mis en bouche.

6- Raticides :

Les raticides actuellement utilisés dans les habitations collectives ou individuelles sont à base de coumarine, présentés sous forme de poudre, de semoule ou de pâte de couleur rose ou rouge, parfois parfumée, attirant les très jeunes enfants.

Cette intoxication nécessite la surveillance du taux de prothrombine, dont la chute est retardée de 48 heures en moyenne après l’ingestion, ce qui laisse le temps à la vitamine K1 donnée per os ou par voie intraveineuse d’agir pour contrecarrer l’action du raticide sur les facteurs de la coagulation vitamine K-dépendants.

Intoxication alcoolique :

Cette intoxication est devenue assez rare. Quatre circonstances peuvent s’observer : les jeunes enfants terminent les verres à apéritif, qui ont été laissés sur une table basse, pendant que les adultes passent à table et que les enfants sont censés jouer dans une autre pièce ; absorption de vin chez des enfants qui ont l’habitude d’en boire un peu avec leurs parents, même additionné de beaucoup d’eau ; absorption de produits de toilette (eau de toilette ou parfum) qui contiennent de fortes quantités d’alcool pur ; chez l’adolescent, il s’agit le plus souvent d’une intoxication suraiguë après absorption d’une dose massive d’alcool à la suite d’un pari stupide ou d’une tentative d’autolyse polymédicamenteuse bien arrosée.

L’éthanol est absorbé en 15 minutes par le tube digestif et diffuse rapidement ; il est principalement oxydé par l’alcool déshydrogénase hépatique (95 %).

La dose létale chez l’enfant est de 3 g d’alcool absolu par kilogramme de poids (1 cL d’alcool pur correspond à 0,8 g).

Il est donc urgent de doser l’alcoolémie, maximale à la première heure, en sachant qu’elle est abaissée d’un tiers si l’estomac contient des aliments gras et sucrés.

L’intoxication aiguë alcoolique comporte trois phases :

– première phase : troubles du comportement (somnolence) et de l’humeur (logorrhée) ; troubles visuels ; syndrome cérébelleux (ataxie, tremblement des extrémités) et vestibulaire (vertiges) ;

– deuxième phase : agitation psychomotrice importante avec vomissements fréquents, sueurs profuses et parfois crises convulsives par hypoglycémie ;

– troisième phase : coma ; d’abord agité, le coma devient calme, hypotonique sans signe de localisation, pupilles dilatées et sphincters relâchés ; l’hypothermie est constante, parfois profonde.

Sur le plan biologique, en dehors de l’hypoglycémie majeure, il existe une acidose mixte à prédominance métabolique et une hyperlactacidémie.

Le traitement repose d’abord sur l’évacuation gastrique.

Le resucrage en cas d’hypoglycémie est rapide, massif et prolongé par une perfusion de glucosé hypertonique (10 à 15 %) en contrôlant le Dextrostix toutes les 2 heures et la glycémie toutes les 6 heures.

Le coma nécessite une intubation avec ventilation mécanique assistée, effectuée avant l’évacuation gastrique.

Le réchauffement est progressif par une couverture de survie aluminée ou un matelas chauffant.

L’évolution peut être fatale si la situation a été sous-estimée pour un adolescent (simple « cuite »).

Intoxication cosmétique :

La grande variabilité de composition de ces produits oblige à se renseigner rapidement auprès du centre antipoisons régional.

Ces intoxications arrivent actuellement en troisième position, car les formes des flacons, leurs packagings, leurs couleurs, leurs odeurs, sont très attirantes pour les jeunes enfants, et les parents en revanche ne soupçonnent pas habituellement le danger potentiel que certains peuvent recéler.

Il s’agit d’eaux de toilette, de parfums, de déodorants et de lotions après rasage ou capillaires, de produits moussants (savons, mousses, shampooings et sels de bains), de produits pour les ongles, de produits de maquillage et de démaquillage.

La toxicité de ces produits est liée à la présence :

– d’essences végétales, dites essentielles, fortement convulsivantes ;

– d’agents propulseurs dont l’inhalation involontaire ou volontaire (aérosols, vaporisateurs) peut entraîner des troubles de la conscience et une hyperexcitabilité cardiaque ;

– de formaldéhyde (durcisseur pour ongles) dont l’ingestion en forte quantité, ce qui ne se voit pas, entraînerait des lésions caustiques ;

– de produits moussants et irritants : il suffit de ne rien donner pendant au moins 3 à 4 heures et de reprendre boissons et alimentation passé ce délai ; ils entraînent de petits troubles digestifs, douleurs abdominales, diarrhée.

Ce ne sont pas les principes actifs qui sont habituellement dangereux pour l’enfant qui n’en prend qu’une très faible quantité.

Le risque réside dans la quantité d’alcool que contiennent les produits de parfumerie et de toilette, entre 60 et 95 % volume d’alcool pur.

On peut donc observer, à la suite d’absorption massive de ces liquides, une intoxication alcoolique sévère avec coma éthylique d'installation rapide, hypoglycémie et hypothermie profondes, état de mal convulsif.

Intoxication par le monoxyde de carbone :

Elle ne représente plus que 0,5 % des intoxications de l’enfant, mais sa fréquence varie selon les régions, la rigueur des intempéries et certaines variations climatiques brutales.

C’est une intoxication familiale ou collective ; les enfants de moins de 15 ans représentent 26,2 % des personnes hospitalisées (âge < 2 ans : 3,3 % ; 2-4 ans : 5,4 % ; 5-14 ans : 17,5 %) selon un rapport établi en 1999 par le Service général informatique et réseaux de la direction régionale de la santé concernant 526 affaires d’intoxication par le CO survenues en France en 1998 dans 67 départements impliquant 2 275 personnes, dont 1 317 ont été hospitalisées (58 %) et 40 décès rapportés ; 65 % des affaires sont survenues en période froide : janvier, février, novembre et décembre.

Vingt pour cent des affaires traitées dans ce rapport concernent des appareils à gaz raccordés à un conduit d’évacuation des produits de combustion, 22 % des chauffeeau.

Dans la moitié des affaires, il n’y a pas d’aération ou bien celle-ci est obturée, ce qui entraîne une mauvaise combustion du gaz, du fait d’une arrivée d’oxygène insuffisante, même si le chauffe-eau est raccordé à un conduit d’évacuation.

Certains conduits sont également fissurés et non étanches, ou non réglementaires dans plus de la moitié des cas.

Les chauffe-bain sont responsables dans 7,4 % des cas, les appareils de chauffage fonctionnant au fuel ou au charbon dans 5,7 %, un poêle dans 5,1 %, une cuisinière dans 3,4 %.

Certaines causes classiques sont devenues rares : brasero dans un local fermé (2,3 %), ventilation mécanique contrôlée-gaz (1,9 %), panneau radiant (1,3 %), gaz d’échappement d’automobile (1,3 %).

Enfin, les incendies d’habitation fournissent un lot important d’intoxiqués par le CO (10,4 %).

Dans cette enquête nationale de 1998, 21,4 % des personnes impliquées ont été traitées en caisson hyperbare, 4 % admises en réanimation et 1,7 % décédées (40 décès).

En raison d’une certaine stabilité dans les départements qui signalent des affaires à la Direction générale de la santé (DGS) depuis 1996, les données recueillies en 1998 permettent d’autres constatations, qui ont une certaine valeur :

– le nombre d’affaires signalées est en diminution constante (815 en 1996, 526 en 1998) ;

– le pourcentage des hospitalisations est en diminution également (79 % en 1997 et 58 % en 1998) ;

– le pourcentage de décès, qui était élevé en 1992 et 1994 (3,9 et 3,5 % des personnes impliquées respectivement) a chuté de moitié ces 3 dernières années (1,8 % en 1996 ; 1,6 % en 1997 ; 1,7 % en 1998).

A - RAPPEL PHYSIOPATHOLOGIQUE :

Le CO est produit lors de la combustion incomplète de toute substance carbonée, donc de tout combustible. C’est un gaz inodore, incolore, très diffusible du fait de sa densité proche de l’air (0,97), pénétrant dans l’organisme par voie respiratoire.

La quantité de CO retenue dans l’organisme dépend principalement de la concentration de CO dans l’air inhalé, de la durée d’exposition, du débit ventilatoire, qui est élevé chez l’enfant, ce qui accélère les échanges gazeux. Dans le sang, le CO se fixe à 85 % sur l’hémoglobine pour laquelle il a une affinité 230 fois supérieure à celle de l’oxygène.

On peut déterminer la présence de CO dans l’atmosphère du local incriminé.

Les médecins d’urgence, les équipes de Smur et les sapeurs-pompiers sont désormais équipés de ces détecteurs au cours de leurs missions.

On peut déterminer le taux de CO dans le sang en mL/100 mL de sang ou en mmol/L de sang et le taux de carboxyhémoglobine (HbCO) exprimé en pour-cent de l’hémoglobine totale. Dans les conditions habituelles, pour 14 à 15 g/dL d’hémoglobine, une conversion entre les deux dosages peut être fondée sur la relation suivante :

– 1 mL CO/100 mL de sang = 5 % HbCO.

Le CO traverse la barrière placentaire ; il peut entraîner une mort foetale précoce, une embryopathie ou des séquelles neurologiques si l’intoxication survient après le quatrième mois de grossesse.

B - CLINIQUE :

La susceptibilité individuelle au CO étant extrêmement variable, il n’y a pas de parallélisme entre le taux sanguin de CO et les signes cliniques.

Chez le nourrisson, les anomalies de la conscience sont difficiles à apprécier et l’intoxication doit être suspectée devant des pleurs inexpliqués associés à une pâleur et à des vomissements.

Il peut s’agir aussi de troubles du comportement inexpliqués avec agitation et incohérence.

Chez l’enfant plus grand, les premiers signes sont des céphalées, des nausées et des vomissements, des vertiges avec un grand état de fatigue.

Puis surviennent des troubles de la conscience, de l’humeur et du jugement qui précèdent la syncope et le coma.

Il s’agit d’un coma anoxique, hypertonique aux quatre membres en règle avec trismus, compliqué de crises convulsives (5 à 10 % des cas) spécifiques de l’intoxication chez l’enfant.

Des signes cardiovasculaires existent très fréquemment : troubles de la repolarisation à type d’ischémie sous-épicardique ou sus-endocardique intéressant surtout les parois antérieure et latérales du myocarde et parfois le septum : les troubles du rythme sont beaucoup plus rares ; un collapsus cardiovasculaire est fréquent dans les intoxications graves et parfois rapidement réversible sous oxygénothérapie.

Sa correction par un remplissage macromoléculaire trop rapide expose au risque d’OAP, plus fréquent chez l’enfant que chez l’adulte.

Les phlyctènes cutanées et les troubles musculaires par compression prolongée avec rhabdomyolyse sont rares.

L’évolution est habituellement favorable, mais les décès (sept à dix par an) sont plus nombreux que ceux observés dans toutes les autres intoxications réunies.

Cependant, la survenue d’un syndrome secondaire n’est pas exceptionnelle chez l’enfant, même après une intoxication qui paraissait bénigne (crise convulsive, cécité transitoire, ataxie) ; il a une évolution favorable en 15 à 45 jours.

La recherche d’une intoxication par CO doit être entreprise lors d’une mort subite du nourrisson pendant la période automnohivernale, surtout si les parents présentent des céphalées, des nausées ou vomissements, ou si l’accident est survenu dans un véhicule (gaz d’échappement).

Des séquelles peuvent survenir même après une intoxication réputée peu grave : troubles de la mémoire, troubles du comportement, céphalées, hypoacousie et comitialité.

La tomodensitométrie cérébrale a également montré des séquelles cérébrales de leucomalacie périventriculaire bilatérale avec atrophie corticale et dilatation ventriculaire.

C - TRAITEMENT :

Le traitement de l’intoxication oxycarbonée est double : étiologique par l’oxygène et symptomatique.

1- Traitement étiologique :

Le retrait de l’intoxiqué de l’atmosphère viciée par des sauveteurs protégés du risque est du ressort des sapeurs-pompiers.

On recherche la source de CO qui est neutralisée.

Dans l’attente des secours, l’entourage peut parfois entreprendre les premiers gestes de sauvetage, comme le déplacement de la victime de la pièce où elle se trouve, la désobstruction oropharyngée au doigt, la mise en décubitus latéral de sécurité, plus rarement le bouche-à-bouche et le massage cardiaque externe.

Qu’il s’agisse d’une équipe du Smur ou des sapeurs-pompiers, l’oxygénothérapie isobare est appliquée chez tous les enfants au masque ou grâce à un Hood (les lunettes ou la sonde nasale sont insuffisants) ; il faut que l’enfant respire de l’oxygène pur pendant au moins 3 heures.

L’oxygénothérapie hyperbare est indiquée chez les enfants qui ont perdu connaissance, et ce sans attendre les résultats des prélèvements qui ont pu être effectués (dosage de HbCO et de CO dans le sang).

Les enfants sont rapidement dirigés vers un caisson hyperbare.

Une séance de 1 heure à 2 atmosphères absolues est habituellement suffisante.

Pour éviter les risques de convulsions, il faut administrer du Valiumt intrarectal à l’enfant sur la base de 0,5 mg/kg jusqu’à 20 kg de poids et 10 mg pour les enfants de plus de 20 kg.

Chez la femme enceinte, le traitement par oxygène hyperbare, le plus rapidement possible, permet de corriger chez le foetus l’anoxie et accélère la dissociation de l’oxyde de carbone dans le sang foetal par l’intermédiaire du placenta.

2- Traitement symptomatique :

Il comporte une intubation nasotrachéale et une assistance mécanique respiratoire pour assurer une ventilation suffisante chaque fois qu’il existe un trouble de la commande respiratoire et/ou un encombrement des voies respiratoires.

La correction d’une déshydratation est prudente en raison du risque d’oedème pulmonaire. Quand le collapsus cardiovasculaire résiste au remplissage macromoléculaire , la dobutamine est l’inotrope de choix. Un traitement barbiturique est prescrit systématiquement chaque fois qu’il y a des anomalies électroencéphalographiques en raison du risque convulsif.

Pour tous les intoxiqués peu graves, le repos strict en milieu hospitalier s’impose avec surveillance électrocardiographique.

3- Signalement aux services compétents :

Devant toute intoxication oxycarbonée domestique en dehors des incendies, il faut alerter le bureau municipal d’hygiène ou le service d’hygiène de la Direction des affaires sanitaires du département. Pour Paris et les départements 92, 93, 94, c’est le laboratoire central de la Préfecture de police, 39 bis, rue de Dantzig, 75015, qu’il faut joindre.

Ces services ont un but commun, mener une enquête technique au domicile ou dans les locaux suspects pour identifier l’installation responsable de la production de CO et imposer les modifications indispensables à une mise en conformité des appareils et des installations avec la réglementation existante.

D - PRÉVENTION DE L’INTOXICATION AU MONOXYDE DE CARBONE :

Comme en témoignent les données des enquêtes menées dans différentes régions en France (Nord-Pas-de-Calais, Picardie, région Centre, Île-de-France), la plupart des affaires d’intoxications par le CO concerne actuellement les appareils de production d’eau chaude et de chauffage à gaz raccordés à un conduit de cheminée.

Cela revient à dire que le problème majeur réside dans des erreurs de comportement des consommateurs ou une insuffisance de l’information envers certaines catégories de population défavorisées.

Les appareils de production d’eau chaude doivent être installés par des professionnels qualifiés, agréés, et utilisés conformément aux instructions données par les notices, qui doivent être rappelées, voire expliquées aux consommateurs.

Les arrivées d’air frais du local où se trouve l’appareil et la grille d’évacuation du gaz de combustion ne doivent jamais être obturées ou condamnées, ce qui est malheureusement observé dans de nombreuses affaires enregistrées par l’enquête de 1998.

Tous les appareils de production d’eau chaude, quel que soit le combustible qu’ils utilisent, doivent répondre aux normes françaises (NF) et porter l’estampille NF.

Pour les chauffe-eau de cuisine, non raccordés, appareils de faible puissance à usage intermittent mais qui doit être inférieur à 7 min/h, l’arrêté du 3 mai 1978 impose deux dispositifs de sécurité, une sécurité d’encrassement du corps de chauffe (bloc à lamelles situé à la partie supérieure de l’appareil) et une sécurité d’atmosphère, qui arrête la distribution du gaz si la teneur du local en CO dépasse 50 ppm.

On estime qu’il existe encore en France 300 000 chauffe-eau qui ont été fabriqués avant la réglementation obligatoire de 1978 et qui sont toujours en service.

Ce sont surtout les familles de bas niveau socioéconomique et vivant dans des habitats précaires qui les possèdent.

Cependant, en 10 ans, le parc d’appareils non conformes a régressé de 70 % grâce à des actions menées en multipartenariat pour le résorber.

Les chaudières et les chauffe-eau doivent être vérifiés une fois par an au minimum grâce à un contrat d’entretien.

Il faut faire ramoner, au moins une fois par an, les conduits de cheminée pour s’assurer qu’ils ne sont pas fissurés, obstrués par des débris de tuiles, d’ardoises, des végétaux ou des nids d’oiseaux... et vérifier que le tirage des tuyaux de poêle est correct.

L’information sur les intoxications au CO concerne aussi bien les professionnels (chauffagistes) que les consommateurs.

Un groupe de travail a été constitué à la DGS pour analyser les statistiques, les circonstances de ces intoxications, donner des orientations aux campagnes d’information et de sensibilisation que mènent les pouvoirs publics et les organismes de tutelle et faire progresser la réglementation.

C’est ainsi qu’ont été identifiées deux nouvelles causes d’intoxication par le CO : l’utilisation d’un groupe électrogène dans un local fermé et sans évacuation des gaz brûlés d’une part, l’utilisation de machines destinées à lisser la glace dans les patinoires d’autre part.

Depuis 1996, des campagnes nationales d’information et de prévention contre les risques d’intoxication dus au CO ont été lancées chaque année au début de l’automne, intitulées « Pour vivre en sécurité, mon habitation doit respirer ».

Menées par les directions départementales de la sécurité civile, le ministère de la Santé (DGS), Gaz de France et Charbonnages de France, ces campagnes se sont appuyées sur de nombreux supports : affiches, dépliants, dossiers de presse repris par les médias (télévision, radios, presse nationale et régionale, courriers locaux), journées d’information des professionnels de santé, réunions d'information avec les consommateurs et les professionnels, opérations de sécurisation des installations de gaz dans le parc habitations à loyer modéré, opérations d’élimination des appareils non conformes (50 000 en 1999).

D’autres organismes ont créé leurs propres supports comme les assureurs (association assureurs-prévention-santé), les services de secours (sapeurs-pompiers) ou des associations de consommateurs.

C’est bien entendu la répétition des messages d’alerte et de mise en garde à chaque saison et tout au long de la période automnohivernale qui est fondamentale.

Intoxication à l’acide cyanhydrique :

Au cours des incendies d’habitation, la combustion lente de produits textiles naturels (laine, soie) et l’inflammation rapide de certains produits plastiques et synthétiques contenant de l’azote (polyuréthanes, polyamides, polyacrylonitriles) génère de l’acide cyanhydrique contenu dans les fumées épaisses noirâtres inhalées par les victimes.

L’ion cyanure est un poison cellulaire ; en se liant au fer ferrique de la cytochrome oxydase, il bloque la chaîne respiratoire mitochondriale, d’où une anoxie.

L’inhalation d’acide cyanhydrique est immédiatement suivie de céphalées, vertiges, agitation et confusion.

Très souvent en cas d’incendie, les victimes sont découvertes en coma profond, d’installation rapide, avec des convulsions et un collapsus cardiovasculaire.

L’intoxiqué peut mourir en quelques minutes d’un arrêt respiratoire, puis cardiaque.

Une réanimation immédiate peut permettre une guérison complète, sur les lieux du sinistre par l’injection lente intraveineuse de 80 mg/kg de poids de l’enfant d’hydroxocobalamine (vitamine B12), en utilisant le Cyanokitt, utilisable aussi chez les adultes.

Sur le plan biochimique en milieu hospitalier, il existe une corrélation significative entre la lactacidémie et la concentration sanguine en cyanure, dont le dosage sanguin n’est pas de pratique courante.

Intoxication par les métaux lourds :

A - SATURNISME :

L’intoxication chronique par le plomb chez l’enfant, ou saturnisme, est un problème de santé publique, notamment dans les grandes agglomérations et les villes ouvrières depuis 1985.

L’origine des intoxications est triple :

– absorption digestive d’écailles d’anciennes peintures au plomb (céruse) interdites en 1948, mais existant encore sur certains murs, huisseries et ferronneries d’habitats vétustes, humides, délabrés ou insalubres ; cette absorption est favorisée par une conduite alimentaire culturelle, dénommée pica, dans les populations africaines ;

– eau des canalisations municipales au plomb datant souvent de plus d’un siècle, dont la minéralisation est faible et le pH acide ;

– pollution industrielle et atmosphérique en milieu urbain près des grands axes de circulation. Le pourcentage de plomb résorbé par voie digestive est de 50 %.

Après son absorption, le plomb se fixe électivement sur les hématies et le squelette, où il s’accumule, et le rein.

Au début, les signes cliniques sont non spécifiques et, en l’absence de notion d’exposition au risque, le diagnostic peut être méconnu.

Il peut s’agir de troubles :

– digestifs : vagues douleurs abdominales, anorexie, constipation ;

– neuropsychiques : instabilité, agressivité, troubles de l’humeur et du comportement, troubles du sommeil, retard psychomoteur ;

– pâleur, asthénie.

Les formes évoluées associent une hypertension artérielle, une encéphalopathie aiguë avec hypertension intracrânienne (convulsions, voire état de mal convulsif, ataxie, apathie, vomissements) pouvant conduire au coma et au décès, une tubulopathie aiguë.

Dans la série de 3 000 cas diagnostiqués à Paris depuis 1985, presque exclusivement des Africains noirs âgés de 1 à 7 ans, on relève quatre décès et une trentaine d’enfants porteurs d’encéphalopathie, présentant une épilepsie ou une insuffisance rénale.

Les données paracliniques reposent sur la radiologie et la biochimie.

En radiographie, les particules de plomb ingérées, radio-opaques, sont nettement visibles dans l’intestin sur un abdomen sans préparation ; on note des bandes denses métaphysaires sur les os longs, les crêtes iliaques, les omoplates, témoignant du stockage du métal.

La demi-vie du plomb accumulé dans les tissus, notamment dans l’os, est de 20 ans.

Il existe un relargage à partir de l’os dans certaines situations (immobilisations, grossesse) comportant des risques spécifiques : signes d’intoxication aiguë, passage transplacentaire et toxicité foetale.

Les signes biologiques affirment le diagnostic.

La plombémie donne une évaluation du plomb soluble circulant et non pas de la quantité de plomb stockée par l’organisme.

En dessous de 250 μg/L, l’intoxication est minime. De 250 à 500 μg/L, elle est modérée, au-dessus de 500 μg/L elle est sévère et au-dessus de 700 μg/L, on peut aboutir à l’encéphalopathie saturnine.

L’élévation des protoporphyrines érythrocytaires témoigne du blocage enzymatique de la synthèse de l’héme par le plomb ; un seuil de 350 μg/L est pathologique.

La plomburie provoquée est un bon reflet du stock de métal contenu dans l’organisme.

Elle impose une diurèse suffisante et un recueil d’urines sur 8 heures dans un pot décalcifié suivant une injection de 500 mg/m2 de surface corporelle de calcitétracémate disodique (EDTA) calcique.

Les troubles hématologiques associent une anémie microcytaire hypochrome avec carence martiale associée et la présence de granulations spécifiques dans les hématies (hématies ponctuées).

La prise en charge d’un enfant intoxiqué par le plomb est déterminée par la valeur de la plombémie.

Il faut le soustraire de la source d’intoxication, qui doit être déterminée par une enquête des services d’hygiène municipaux.

Le cas de saturnisme doit être déclaré au médecin inspecteur de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales ou au médecin responsable de PMI, ainsi qu’à l’Institut national de veille sanitaire pour toute plombémie supérieure à 100 μg/L.

Des mesures doivent être prises au niveau du logement (réhabilitation du logement, relogement de la famille pendant la durée des travaux de réfection ou relogement définitif dans un autre habitat) pour éviter la réexposition.

Traitement :

Le traitement médical est basé sur l’utilisation de chélateurs dont l’objectif est de mobiliser le plomb des tissus et d’augmenter son excrétion urinaire.

Il s’adresse à trois chélateurs : le British Anti Lewisite (BAL), l’EDTA calcique, d’utilisation parentérale exclusive, et l'acide dimercaptosuccinique (DMSA), commercialisé sous le nom de Succimert utilisable par voie orale :

– pour une plombémie comprise entre 400 et 700 μg/L, on peut proposer une chélation orale par le DMSA ;

– au-dessus de 700 μg/L, on effectue habituellement une chélation double DMSA et EDTA ;

– au-dessus de 1 000 μg/L et/ou en présence de signes d’encéphalopathie, on associe l’EDTA et le BAL.

L’EDTA est utilisé à la dose de 1 000 mg/m2 de surface corporelle en quatre perfusions de 10 minutes pendant 5 jours.

Ce traitement est poursuivi sous forme de cinq cures de 5 jours, séparées par des intervalles de 1 semaine imposés par le risque de toxicité rénale.

Le BAL s’utilise par voie intramusculaire à la dose de 300 mg/m2 de surface corporelle en quatre injections par 24 heures.

Par ailleurs, l’hypertension artérielle et l’encéphalopathie aiguë convulsivante nécessitent un traitement symptomatique.

Devant la résurgence du saturnisme à Paris, favorisée par les mauvaises conditions d’habitat dans certains milieux africains migrants, un dépistage systématique a été mis en place dans les centres de PMI des arrondissements les plus touchés (nord-est de Paris), ainsi qu’une information ciblée de la part de la Caisse primaire d’assurance maladie et des services médicosociaux de la capitale pour les populations à risque (affiches, dépliants, cassette vidéo mettant en scène des familles africaines).

Le dépistage systématique du saturnisme a été étendu à d’autres villes (Lille, Lyon, Marseille) ou d’autres départements (Seine-Saint-Denis).

B - MERCURE :

C’est une intoxication désormais exceptionnelle.

Le mercure est toxique sous forme de sels, oxycyanure de mercure, chlorure mercurique.

L’absorption intestinale est très rapide en moins de 1 heure.

Ces sels de mercure entrent dans la composition de produits caustiques industriels et d’antiseptiques à usage externe.

En revanche, le mercure métal des anciens thermomètres à mercure, interdits désormais à la vente depuis le 1er avril 2000 pour des problèmes de pollution de l’environnement, n’est pas absorbable ; il est donc non toxique.

Intoxications en milieu rural et par les végétaux :

Les intoxications par les produits phytosanitaires en milieu agricole sont peu fréquentes, mais graves en raison de la forte toxicité des produits utilisés.

En revanche, trop de citadins, notamment lors des weekends ou des vacances, n’entreposent pas correctement leurs produits usuels de jardinage dans des placards adaptés hors de portée des jeunes enfants.

Les absorptions de produits sont donc relativement fréquentes mais peu graves en règle.

A - INSECTICIDES ORGANIQUES DE SYNTHÈSE :

1- Organochlorés :

Insecticides d’ingestion ou de contact très utilisés, le dichloro-diphényl-trichloréthane (DDT), le paradichlorobenzène ou le lindane sont très liposolubles, ce qui leur confère une grande toxicité neurologique, en s’accumulant dans les graisses du système nerveux central.

La symptomatologie clinique comprend agitation, hyperexcitabilité, désorientation, ataxie, crises convulsives et coma.

En cas d’absorption digestive, on note en plus des troubles digestifs avec diarrhée et vomissements.

En cas d’accident de pulvérisation, il faut décontaminer l’enfant au plus vite en le déshabillant et en le douchant avec savonnage abondant.

L'ingestion accidentelle réclame une évacuation gastrique indispensable : les lipides sont proscrits de l’alimentation pendant 48 heures.

Le traitement symptomatique s’adresse au coma et aux convulsions.

2- Organophosphorés :

Ceux-ci sont des substances anticholinestérasiques, très toxiques et très liposolubles, comme le parathion.

Les premiers signes cliniques sont digestifs : nausées, vomissements, douleurs abdominales et diarrhée.

Puis apparaissent des signes muscariniques (myosis, hypersialorrhée, bradycardie, hypotension) et des signes nicotiniques se traduisant par des fasciculations, des crampes musculaires, des mouvements involontaires et une paralysie qui atteint rapidement les muscles respiratoires.

L’accumulation d’acétylcholine dans le système nerveux central entraîne un état confusionnel, une ataxie, un coma convulsif et la paralysie des centres respiratoires.

La mort peut survenir par insuffisance respiratoire avec défaillance cardiaque.

Le parathion est mis en évidence par son produit de dégradation, le paranitrophénol, dans les urines.

Le diagnostic biologique des autres o rganophosphorés se fait par la détermination du taux d'activité cholinestérasique.

Les cholinestérases, en effet, dégradent l’acétylcholine en choline et en acide acétique, dont la libération en un temps donné est directement proportionnelle à l’activité cholinestérasique.

Le traitement de l’intoxication par le parathion fait appel à un antidote spécifique, le Contrathiont, qui régénère les cholinestérases en déplaçant les organophosphorés de leur site.

Le Contrathiont (pralidoxime) est administré en perfusion lente de 200 mg dilués dans du sérum salé isotonique à 0,9 % toutes les 6 heures les premiers jours.

B - HERBICIDES ORGANIQUES DE SYNTHÈSE :

Il s’agit essentiellement du paraquat, ammonium quaternaire, herbicide puissant, très utilisé en Europe et en France. Il est commercialisé sous le nom de Gramoxonet liquide à 20 %.

Produit très toxique et caustique, son absorption accidentelle est rarissime, car les agriculteurs en connaissent le danger et l’entreposent habituellement en sécurité.

L’intoxication peut se produire par voie cutanée, muqueuse, respiratoire et digestive.

Si l’intoxication est exceptionnelle chez le jeune enfant, en revanche, ce produit est utilisé dans un but d’autolyse par les adolescents et les adultes. Une dose de 15 mL peut être fatale (trois cas mortels ont été répertoriés en 10 ans en Îlede- France chez les adolescents de 14-15 ans).

L’intoxication aiguë se déroule en trois phases :

– initialement, des lésions caustiques digestives, oesophagogastriques, très douloureuses ;

– puis, une insuffisance rénale par tubulopathie aiguë oligoanurique après 24 heures d’évolution ;

– enfin, une fibrose pulmonaire progressive s’installe en 4 à 10 jours, aggravée par l’oxygénothérapie, aboutissant à une hypoxémie réfractaire irréversible et au décès en quelques jours.

D’autres atteintes sont notées, hépatique et myocardique. Le dosage du paraquat s’adresse à la méthode radio-immunologique, sensible et rapide d’interprétation, appréciant la gravité de l’intoxication et permettant de suivre l’élimination du toxique. Proudfoot, Steward et al ont établi, en 1979, une courbe pronostique en fonction de la concentration plasmatique du paraquat à l’admission à l’hôpital et du temps écoulé depuis l’ingestion, permettant d’identifier les probables survivants des cas mortels.

L’efficacité du traitement dépend en partie de la rapidité de sa mise en route.

Bien qu’il s’agisse d’un caustique, le pronostic mortel de cette intoxication autorise son élimination digestive par tous les moyens, car il est peu absorbé et surtout éliminé par les fèces : aspiration du contenu gastrique sans lavage, administration par la sonde gastrique d’un adsorbant, soit 500 mL de terre de Fowler à 30 %, disponible dans les centres antipoisons, à répéter toutes les 4 heures (le paraquat est inactivé dans la terre), purgation saline répétée toutes les 6 heures.

Certaines équipes ont tenté de traiter la fibrose pulmonaire par un mélange oxygènehélium avec des survies, mais aussi des séquelles d’insuffisance respiratoire de type restrictif.

Les lésions digestives caustiques nécessitent la mise en place d’une grosse sonde nasogastrique en silicone pour calibrage de l’oesophage et alimentation entérale pendant plusieurs semaines.

Par l’arrêté du 25 août 1987, les pouvoirs publics ont obligé les fabricants à introduire une substance répulsive odorante et une substance émétisante dans le paraquat pour provoquer des vomissements précoces et spontanés en cas d’ingestion massive.

Le produit est aussi sévèrement réglementé à la vente et des instructions très draconiennes sont formulées aux utilisateurs pour le stockage et l’utilisation.

C - HERBICIDES MINÉRAUX :

Après ingestion accidentelle, les chlorates de sodium et de potassium, qui sont de puissants oxydants, entraînent des nausées, vomissements et douleurs épigastriques en raison de leur causticité digestive.

Ils donnent aussi une méthémoglobinémie intense avec hémolyse et tubulopathie aiguë anurique.

Le traitement comprend l’injection intraveineuse lente de bleu de méthylène (1 à 2 mg/kg) en cas de méthémoglobinémie (sang prélevé de couleur marron ne se modifiant pas après oxygénation).

Si l’hémolyse est menaçante, on procède à une exsanguinostransfusion ; la tubulonéphrite anurique nécessite une dialyse péritonéale.

D - INTOXICATIONS PAR LES VÉGÉTAUX (FEUILLES, TIGES, BAIES) :

Beaucoup de plantes, d’arbustes, leurs feuilles, leurs tiges ou leurs baies, quels que soient leur couleur et leur agencement, sont dangereuses pour les jeunes enfants, qui explorent leur environnement avec leurs mains pour ensuite tout porter à la bouche, lécher, sucer ou croquer.

À l’extérieur de la maison, certaines plantes sont bien connues pour leur toxicité, comme le marron, le laurier rose, la digitale pourpre, les graines des pois de senteur, l’arum, l’if et le chèvrefeuille (ces trois dernières ont des baies rouges), la belladone (baies noires), le gui (baies blanches).

Mais bien des jardins présentent un danger : muguet, houx, fusain, vigne vierge, lierre, troène, cytise avec ses grappes de fleurs jaunes et ses gousses contenant des graines toxiques.

Les premiers troubles sont presque toujours digestifs : nausées, vomissements, coliques, diarrhée.

Ils s’accompagnent de signes variables selon la baie ingérée :

– troubles neurologiques, tremblements, convulsions, délire, perte de connaissance, coma ;

– troubles musculaires, crampes ou fasciculations ; – troubles du rythme cardiaque à type d’hyperexcitabilité ;

– troubles respiratoires ;

– mydriase ou myosis ;

– sécheresse de la bouche et des muqueuses.

La gravité dépend de la nature, de l’état de maturité et de la quantité de baies ingérées.

En raison de la diversité des plantes et des baies absorbées et de la variété des signes observés, en cas d’absorption accidentelle :

– appeler le centre antipoison régional ;

– tenter de décrire très exactement la plante en cause, sa forme, la couleur, l’architecture et la disposition de ses feuilles sur les tiges, le groupement, la grosseur et la couleur des baies ;

– décrire les troubles déjà présentés par l’enfant intoxiqué ;

– se conformer aux décisions du médecin du centre antipoison ;

– conduire l’enfant aux urgences hospitalières, si possible avec un gros fragment de la plante incriminée.

E - PLANTES D’APPARTEMENT :

Nombre de plantes et de fleurs dans nos maisons renferment des produits toxiques, dont le simple contact ou l’absorption accidentelle peuvent provoquer de sérieux troubles chez les jeunes enfants.

Les plantes allergiques sont nombreuses : la sève du dieffenbachia, plante au feuillage vert plus ou moins tacheté de jaune au centre des nervures, est toxique, sous la forme de gouttelettes de suc, qu’il ne faut en aucun cas toucher.

Porter ensuite ses doigts à la bouche et c’est un risque d’asphyxie d’installation très rapide, par le gonflement brutal et majeur de la langue.

Frotter son oeil et c’est la conjonctivite avec oedème monstrueux des paupières.

L’appel au 15 ne se discute pas pour procéder à une injection de corticoïdes et d’antihistaminique par voie intraveineuse.

Le latex blanc de la poinsetta, plante reconnaissable par ses feuilles inférieures vert sombre contrastant avec des feuilles supérieures d’un rouge vif, donne des irritations oculaires et des muqueuses.

La sève du croton est également toxique. Plante commune d’appartement, ses feuilles découpées combinent le vert avec le jaune, l’orange, le rouge et le violet, les nervures étant bien dessinées.

D’autres plantes sont dangereuses : l’ingestion de pétales de tulipe ou de feuilles d’azalée provoque des troubles digestifs (douleurs abdominales, vomissements) ; les bouquets de fleurs et de plantes séchées très décoratives peuvent aussi renfermer des dangers, comme les capsules de datura contenant de nombreuses petites graines noires, qui peuvent tomber au moindre choc, ou les baies du fusain d’Europe, dites « bonnet de cardinal » en raison de leur forme, constituées de trois à cinq graines, dont l’absorption provoque des troubles digestifs et des convulsions.

F - INTOXICATION AIGUË PAR LES CHAMPIGNONS :

Cinq espèces de champignon sont mortelles et une vingtaine d’autres sont dangereuses et non comestibles.

Les espèces mortelles sont :

– les amanites (vireuse, phalloïde, printanière) comportant des signes de reconnaissance communs : anneau floconneux ou membraneux blanc sous le chapeau, volve membraneuse persistante, épaisse et blanchâtre, au pied ;

– le cortinaire des montagnes avec son chapeau roux ;

– la lépiote brune confondue aisément avec la coulemelle.

Dans une intoxication aiguë par les champignons, les premiers signes cliniques sont presque toujours des troubles digestifs.

Le délai d’apparition des symptômes fait distinguer des intoxications plutôt bénignes à courte période d’incubation, moins de 6 heures, des intoxications graves à période d’incubation longue de 6 à 48 heures, ce qui nécessite une hospitalisation d’au moins 48 heures.

Les signes d’apparition précoce sont une gastroentérite intense avec vomissements incoercibles, diarrhée profuse et vives douleurs abdominales, entraînant des perturbations hydroélectrolytiques, un syndrome atropinique ou un syndrome muscarinique.

L’intoxication par les champignons hallucinogènes peut être responsable d’hyperthermie et de convulsions chez le jeune enfant.

Le syndrome d’apparition tardive concerne surtout l’hépatite toxique due à l’amanite phalloïde.

Elle comporte un risque de mortalité de 10 à 25 %.

La toxine, essentiellement l’alpha-amanitine, inhibe l’acide ribonucléique polymérase ; sa fixation est très rapide, surtout au niveau du foie.

Après un temps de latence de 6 à 48 heures apparaît une diarrhée cholériforme ; les signes d’atteinte hépatique apparaissent en 36 heures et l’insuffisance hépatocellulaire est maximale au troisième jour.

Le traitement est symptomatique (correction de la déshydratation et des troubles hydroélectrolytiques).

Dans les formes extrêmes, une transplantation hépatique peut être tentée.

Intoxications par les animaux et les insectes :

Elles concernent :

– les morsures de vipères ;

– les piqûres d’arachnides et d’insectes ;

– les piqûres ou les contacts avec les animaux aquatiques.

A -  MORSURES DE VIPÈRES :

En France, le seul serpent venimeux est la vipère et ses quatre espèces autochtones, qui appartiennent toutes au genre Vipera, rattaché à la famille des Vipéridés (aspis, berus, ursinii et latastei).

Les principales actions du venin sont fibrinolytique et anticoagulante, hémolytique et nécrosante, neurotrope et contracturante sur les muscles lisses.

Le diagnostic de morsure est en règle facile devant les signes locaux, la main, les doigts et la cheville étant des localisations préférentielles :

– douleur minime initiale, mais augmentant d’intensité après 5 à 15 minutes ;

– traces de la morsure visibles sous la forme de deux points noirs entourés d’une aréole ecchymotique violacée de 1 à 2mm de diamètre, les points étant distants de 4 à 6 mm ;

– réaction oedémateuse ecchymotique avec phlyctènes notées de 15 minutes à 2 heures après la morsure ; celle-ci va s’étendre progressivement en remontant vers la racine du membre en prenant un aspect nécrotique superficiel souvent très impressionnant.

Quant au syndrome général d’envenimation, il associe des troubles digestifs (vomissements), une hypo- ou une hyperthermie, un collapsus, une oligoanurie, des signes neurologiques (agitation, prostration, tremblements, diplopie, dysesthésies) et un OAP lésionnel particulièrement grave.

Le danger d’une morsure de vipère chez le jeune enfant dépend de la quantité de venin injectée par l’animal en fonction du poids de l’enfant, de l’effraction vasculaire directe par un crochet venimeux, du délai écoulé entre la morsure et la reconnaissance de celle-ci, de la rapidité des signes d’envenimation.

S’il n’y a pas de signes d’envenimation, il n’est pas nécessaire de faire autre chose que l’évacuation rapide vers un centre hospitalier en utilisant le moyen le plus approprié, voiture personnelle, ambulance, véhicule de secours sapeurs-pompiers.

En effet, il existe un délai de plusieurs heures avant que n’apparaissent des complications graves.

En cas d’envenimation, commencer la sérothérapie avec le sérum antivenimeux en utilisant obligatoirement la méthode de Besredka, car il s’agit d’un produit animal (cheval).

On injecte en intramusculaire 0,1 mL, puis 0,2 mL, enfin 0,5 mL en espaçant les injections de 5 minutes pour dépister les réactions allergiques avant d’injecter le reste de l’ampoule moitié dose près de la morsure et moitié dose dans la cuisse ou la fesse.

Pour le transport en milieu hospitalier de ces cas avec envenimation, dans certains lieux géographiques d’accès particulièrement difficiles, la Gendarmerie ou la Protection civile interviennent au moyen de matériels autotractés ou héliportés avec l’équipe médicale du Samu.

À l’hôpital, l’héparinothérapie, à la dose de 2 à 4 mg/kg/j en intraveineuse, est mise en oeuvre en cas d’envenimation et de coagulation intravasculaire disséminée biologiquement prouvée.

Devant un collapsus, on débute un remplissage prudent avec des substances macromoléculaires (Plasmiont) ou de l’albumine diluée de moitié (1 g/kg) associées à des inotropes positifs en cas de choc cardiogénique associé : dobutamine (10 μg/kg/min) ou dopamine (5 à 10 μg/kg/min).

S’il existe un OAP lésionnel, l’intubation avec ventilation mécanique contrôlée et PEP est nécessaire.

Si l’hypoxie réfractaire est incontrôlable par la ventilation classique, on peut proposer l’assistance respiratoire extracorporelle, méthode d’exception.

On vérifie la validité de la vaccination antitétanique et une antibiothérapie par la pénicilline G prévient le risque de gangrène gazeuse aux autres anaérobies.

B - PIQÛRES D’ARACHNIDÉS ET D’INSECTES :

1- Scorpions :

En France, seul le scorpion jaune, Buthud occitanus, est dangereux pour le jeune enfant.

La piqûre est suivie d’une vive douleur au point d’inoculation sans signes locaux inflammatoires importants.

Après 2 heures, on note des sueurs, une agitation avec angoisse, des signes digestifs (vomissements, diarrhée) et une chute tensionnelle.

Le traitement comporte une désinfection locale au Dakint, une immobilisation du membre avec pose d’une large bande Velpeau, bien serrée, au-dessus de la piqûre et remontant vers la racine du membre.

Les autres espèces de scorpions en France donnent des signes locaux inflammatoires, qui réclament des topiques locaux comportant des anti-inflammatoires et parfois des antiprurigineux.

S’il existe des signes généraux, le traitement est symptomatique.

2- Araignées :

Leurs piqûres peuvent entraîner une douleur notable et une tuméfaction inflammatoire importante avec des microvésicules, dont le grattage peut conduire à la sur infection et à l’impétiginisation.

3- Hyménoptères :

Les piqûres d’hyménoptère sont très fréquentes, habituellement peu graves (abeille, guêpe, frelon).

Ils injectent leur venin au moyen d’un dard, mais seule l’abeille l’abandonne dans la peau.

Il faut le retirer sans appuyer sur le sac à venin, avant de désinfecter la piqûre et d’administrer un anti-inflammatoire et un sédatif (paracétamol).

Les piqûres de guêpe sont fréquentes, car ces insectes se trouvent dans les fruits et sont attirés par toutes les substances sucrées.

La piqûre est désinfectée, la douleur et l’inflammation atténuées par un antiinflammatoire local.

En fait, les accidents graves sont liés aux piqûres multiples par un essaim d’abeilles, au lieu d’inoculation exceptionnel endobuccal ou pharyngolaryngé, mais surtout au risque de choc anaphylactique, plutôt chez l’enfant de plus de 6-8 ans, allergique.

Le choc anaphylactique est caractérisé par un collapsus du fait d’une vasoplégie brutale due à la libération massive d’histamine et une perte de connaissance.

On s’adresse à l’adrénaline par voie intramusculaire ou intraveineuse lente en injectant une ampoule de 1 mg diluée dans 9 mL de sérum physiologique, millilitre par millilitre, jusqu’à récupération d’une hémodynamique satisfaisante, de pouls bien frappés et de la reprise de la conscience.

On peut être amené à injecter plus de 1 mg d’adrénaline en cas d’inefficacité et à effectuer un remplissage vasculaire secondaire avec de l’Elohest à 6 % (15 mL/kg).

C - INTOXICATION PAR LES ANIMAUX MARINS :

– Parmi toutes les espèces de vives, l’espèce Trachinus draco est la plus dangereuse ; c’est un poisson très courant d’environ 10 à 15 cm de long qui vit dans les baies sableuses, s’enfouit dans le sol pour ne laisser dépasser qu’une partie de la tête et ses épines dorsales et operculaires possédant des glandes à venin.

Le venin de la vive déclenche aussitôt une douleur très violente qui diffuse à la racine du membre, voire syncopale, et s’accompagne de signes généraux (lipothymie, vertige, nausées ou vomissements, agitation).

La zone de piqûre est plus pâle, devient oedémateuse, puis inflammatoire et peut évoluer vers l’ischémie et la formation d’une plaque de nécrose circonscrite de près de 1 cm.

Le venin étant thermolabile à 50 °C, on recommande un bain prolongé en eau chaude ou l’approche immédiate près du site de piqûre du bout incandescent d’une cigarette allumée.

La zone de piqûre doit être désinfectée et la douleur calmée par un antalgique par voie générale.

En cas de malaise général ou de syncope, coucher l’enfant en position latérale de sécurité, tête légèrement plus basse que le reste du corps en attendant les services de secours.

– La rascasse est hérissée de piquants très résistants et possède un appareil venimeux formé de 12 épines dorsales et de trois épines anales.

Le venin est thermolabile et les envenimations prennent un caractère clinique très semblable à celui de la vive.

– Le contact avec les méduses déclenche une sensation immédiate de cuisson ou de douleur, suivie de l’apparition de lésions urticariennes souvent linéaires, d’évolution vésiculobulleuse ou parfois purpurique.

Les tentacules sont tapissées de cellules venimeuses équipées d’une sorte de filaments urticants invaginés qui se déroulent lors du contact.

Il est recommandé de rincer la peau à l’eau de mer ou avec une solution formolée sans frotter car la friction risque de faire éclater les cellules urticantes résiduelles collées à la peau. Ensuite, on peut utiliser un antiseptique, une pommade anti-inflammatoire et un antihistaminique.

– Les piquants d’oursins noirs ont tendance à se fractionner à l’intérieur du derme et peuvent être emprisonnés par les muscles avec grande difficulté d’extraction immédiate.

Il faut savoir attendre quelques jours avant de tenter d’enlever certains d’entre eux.

La désinfection des zones d’implantation doit être rapide pour éviter une surinfection.

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