Interruption volontaire de grossesse Cours de
Gynécologie
La mortalité et la morbidité maternelles, autrefois très
importantes au cours de l’avortement clandestin, ont été
notablement réduites depuis que les lois de 1975 et 1979
ont autorisé et médicalisé l’interruption de la grossesse en
France avant 10 semaines de grossesse.
Depuis que cette
loi a été promulguée, l’avortement a fait l’objet de progrès
médicaux réduisant les complications et substituant le
monopole du curetage utérin sous anesthésie générale à des
techniques instrumentales et médicamenteuses moins
agressives et ambulatoires.
L’interruption volontaire de
grossesse (IVG) reste cependant un geste qui n’est pas
dénué de complication et certains retentissements psychologiques
peuvent en témoigner.
Enfin, notre société se voit
désormais confrontée au problème de la prévention efficace
des grossesses non désirées, tout particulièrement chez
les jeunes.
Procédure légale :
A - Consultation initiale :
Le médecin sollicité est en droit de refuser la demande
(clause de conscience) mais il doit en informer la patiente
et la diriger vers un autre médecin, ou vers un établissement
pratiquant les IVG.
Tout médecin est habilité à faire la consultation initiale
mais il doit s’acquitter des 5 points suivants :
• Pratiquer un examen gynécologique complet pour
confirmer la grossesse et préciser l’âge gestationnel au
besoin en s’aidant d’examens complémentaires.
– Les antécédents médicaux, chirurgicaux et gynéco-obstétricaux
(IVG, fausses couches spontanées, accouchements,
infections pelviennes...) sont détaillés.
Il faut insister
sur tous les éléments permettant de définir la date de
fécondation : date des dernières règles normales et leurs
caractères, la durée du cycle menstruel spontané, la
méthode contraceptive utilisée et les motifs de son interruption
récente.
L’examen au spéculum permet de vérifier la normalité du
vagin, la position et l’aspect du col (violacé en début de
grossesse, punctiforme chez la nulligeste).
En cas de suspicion
d’infection locale, un traitement préopératoire est
prescrit.
On peut profiter de cet examen pour réalisr un frottis
cervical.
Le toucher vaginal apprécie la position et le volume utérin
en le comparant à la date d’aménorrhée et recherche une
pathologie associée (fibrome, kyste ovarien, etc.)
Si l’utérus est trops gros, on évoque une erreur de terme
(grossesse plus âgée), mais aussi une grossesse multiple,
une grossesse molaire ou un utérus fibromateux.
Si l’utérus est plus petit, il faut penser à l’absence de grossesse,
à une grossesse plus jeune ou arrêtée voire à une
grossesse extra-utérine.
– La loi n’impose aucun examen particulier. L’obligation
contractuelle liant le médecin à la patiente est une obligation
de moyens.
Il doit donc s’aider d’éventuels examens
complémentaires afin de respecter les conditions définies
par la loi. S’il y a un doute sur l’existence de la grossesse,
le dosage d’hormone chorionique gonadotrophique
humaine (hCG, human chorionic gonadotrophin) peut être
utile mais n’apporte aucun renseignement sur l’évolutivité
et la localisation de cette grossesse.
Le seul examen utile
reste l’échographie, par voie abdominale ou mieux encore par voie vaginale avant la 5e semaine.
Elle n’est formelle
qu’en présence d’un sac ovulaire intra-utérin avec un
embryon présentant une activité cardiaque.
• Informer clairement et d’une façon adaptée la patiente
sur les méthodes d’interruption de grossesse, sans occulter
les risques potentiels liés à la pratique de l’IVG.
• La renseigner sur les avantages et aides sociales auxquelles
elle a droit si elle maintient sa grossesse.
• Rédiger un certificat attestant que la patiente demande
une IVG et qu’elle se trouve dans les délais légaux.
• Remettre à la patiente le dossier guide édité par la Direction
départementale des affaires sanitaires et sociales
(DDASS) et l’adresser en consultation dans un centre
d’IVG agréé ou un centre de planification où elle pourra
avoir l’entretien prévu par la loi avec un travailleur social
formé, une psychologue, une assistante sociale ou un médecin,
dans le délai de réflexion prévu.
Au terme de cet entretien,
une attestation est remise à la patiente portant mention
de la date de cet entretien.
B - Loi française et interruption volontaire
de grossesse
:
L’avortement a été légalisé selon certaines conditions
depuis les lois du 17 janvier 1975 (dite Veil) et du
31 décembre 1979 (dite Pelletier) suspendant ainsi les
effets de l’article 317 du code pénal français qui interdisait
cet acte.
L’IVG est autorisée lorsqu’elle est demandée par une
femme majeure s’estimant en état de détresse, avant la 10e
semaine de grossesse, soit la 12e semaine d’aménorrhée.
L’état de détresse est une notion subjective laissée à la libre interpréation de la femme.
Elle n’a pas besoin de l’avis de
son mari, si elle est mariée.
Pour les patientes mineures, la demande doit être accompagnée
du consentement d’un des parents, ou du représentant
légal (tutelle, juge pour enfants).
Pour les patientes étrangères, en dehors des réfugiées politiques,
une justification de résidence en France de plus de
3 mois est exigée.
L’IVG doit être réalisée par un médecin exerçant dans un
établissement hospitalier public ou privé agréé (article
L.178 du code de santé) et non au cabinet du médecin.
Les
établissements privés sont astreints à ne pas dépasser un
quota d’IVG égal au quart de leurs actes chirurgicaux ou
obstétricaux.
La loi du 31 décembre 1982 prévoit la prise en charge à
80 % par l’assurance-maladie des frais liés à l’IVG.
La tarification
des IVG est soumise à la réglementation, et déterminée
par arrêté ministériel.
Les forfaits dépendent de
l’anesthésie utilisée (locale ou générale) et de la durée
d’hospitalisation (moins de 12 heures ou de 24 heures).
En
cas de complications, les frais d’hospitalisation
au-delà de 48 heures sont pris en charge selon les règles
habituelles de l’assurance-maladie.
C - Seconde consultation médicale :
• L’IVG ne peut avoir lieu qu’après un délai de réflexion
de 8 jours à la suite de la première demande.
Ce délai peut
être réduit à 2 jours (procédure d’urgence) si le terme de 12 semaines risque d’être dépassé.
Si la femme persiste
dans sa demande, elle la confirme par écrit lors de la
seconde consultation.
Le médecin précise la technique et
l’anesthésie employées et leurs risques potentiels.
Par
ailleurs, il explique et prévoit la contraception ultérieure et
vérifie que la femme possède une carte de groupe.
Outre
l’aspect médical et technique, le versant psycho-affectif et
social de la patiente doit être pris en compte.
C’est même
l’élément le plus important de cette consultation où se
déroulent des événements importants dans l’histoire de la
patiente.
• Les documents doivent être conservés un an par l’établissement.
La réalisation de chaque IVG entraîne une
déclaration anonyme par le médecin qui la pratique (feuille
statistique) qui est adressée au médecin inspecteur régional
dans un délai de 1 mois.
Techniques d’interruption
de grossesse
:
La méthode la plus employée, quel que soit l’âge de la grossesse
dans les délais prévus par la loi, reste l’aspiration endo-utérine classique.
Cependant, avant 7 semaines
d’aménorrhée, 2 autres méthodes sont aussi utilisées : l’aspiration endo-utérine précoce ou régulation menstruelle et,
plus récemment l’IVG médicamenteuse.
A - Aspiration endo-utérine précoce
ou régulation menstruelle
:
Dans les 15 jours à 3 semaines qui suivent la date des règles
manquantes, une aspiration endo-utérine ambulatoire peut
être réalisée.
On utilise une canule de Karman raccordée à
une seringue de 50cm3 de préférence autobloquante.
L’intervention
peut se faire sans dilatation et sans anesthésie
avec une simple prémédication par un anxyolytique chez
une patiente à jeun.
En pratique, une dilatation cervicale
modérée peut être nécessaire pour utiliser une canule souple
de 5 à 6 mm de diamètre ainsi qu’une anesthésie locale par
bloc paracervical à la lidocaïne (Xylocaïne 1 %) sans adrénaline
(10 mL sont généralement suffisants, 5 mL de
chaque côté du col à 4 h et 8 h).
Dans la majorité des cas,
l’IVG peut être réalisée sans aucune anesthésie à condition
que l’opérateur donne des explications précises sur ses
gestes et rassure la patiente pendant l’intervention.
B - Méthodes médicales
:
Bien que l’aspiration soit une technique fiable et éprouvée,
elle nécessite un matériel spécifique et un personnel expérimenté.
Les méthodes médicales se proposent d’obtenir
des avortements spontanés précoces c’est-à-dire une
hémorragie avec expulsion ovulaire complète sans révision
utérine.
Ces méthodes ne sont possibles que pour des grossesses
jeunes (inférieures à 7 semaines d’aménorrhée) mais
présentent l’avantage d’être ambulatoires, sans anesthésie
et sans geste intra-utérin.
En revanche, elles nécessitent un
contrôle échographique pour s’assurer de la vacuité utérine.
Leur acceptabilité paraît satisfaisante.
Sont à considérer comme un échec, les grossesses évolutives persistantes,
les rétentions de grossesses arrêtées, et les révisions
utérines pour hémorragie importante.
1- Prostaglandines
:
Elles stimulent le myomètre et les fibres musculaires lisses
et provoquent une maturation cervicale.
Les contractions utérines peuvent être douloureuses et l’expulsion
ovulaire s’accompagne d’une hémorragie plus
abondante que les règles.
Trois analogues des prostaglandines
sont employés. L’importance des effets secondaires
est proportionnelle à la dose et à la durée du traitement :
– misoprostol (Cytotec) per os à la dose de 200 µg ;
– géméprost (Cervagème) par voie vaginale un ovule de
1 mg ;
– sulprostone (Nalador 500) par voie intramusculaire.
Les effets secondaires sont gastro-intestinaux (nausées,
vomissements, diarrhée) ou respiratoires (bronchoconstriction,
crise d’asthme).
Les contre-indications sont : une hypertension artérielle
sévère non contrôlée, des antécédents cardiovasculaires
graves et coronariens, un asthme instable, une dyslipidémie
majeure, un traitement par anti-inflammatoires non
stéroïdiens à fortes doses.
2- Antiprogestérones :
La progestérone est indispensable au développement et au
maintien initial de la grossesse.
L’ablation du corps jaune
dans les 2 premiers mois de la grossesse entraîne un avortement.
• Le RU 486 ou mifépristone (Mifégyne), progestérone de
synthèse, agit comme une anti-hormone en se fixant sur
les récepteurs de la progestérone.
On bloque ainsi les mécanismes
d’action cellulaire de cette hormone.
Pendant la phase lutéale, la mifépristone entraîne une lutéolyse
précoce avec saignements dans les 72 heures suivant
la prise médicamenteuse dans 90 % des cas.
Pendant la
grossesse, la déciduale, qui contient un nombre élevé de
récepteurs à la progestérone, est la première cible de la mifépristone.
Elle provoque une nécrose déciduale périovulaire
avec saignements (l’endothélium vasculaire est
endommagé) et une augmentation de la production de prostaglandines
par l’endomètre.
L’activité antiprogestérone
augmente la contractilité du myomètre induite par l’élévation
des prostaglandines.
Par ailleurs, les prostaglandines
ramollissent et dilatent le col et cet effet cervical favorise
l’évacuation de l’utérus.
L’HCG ne s’élève plus dès que la
mifépristone est administrée et chute rapidement quand
l’embryon est en cours d’expulsion.
La chute de l’hCG a
un effet lutéolytique secondaire et irréversible.
La mifépristone
agit directement sur l’endomètre en détachant
l’oeuf, puis secondairement sur le myomètre provoquant
son expulsion. Le mécanisme de la mifépristone est donc
double, direct par action antiprogestérone et indirect par
l’intermédiaire des prostaglandines.
• La mifépristone seule en dose unique de 600 mg, pour
des aménorrhées inférieures à 42 jours, permet d’obtenir
une efficacité de 80 à 85 %.
L’hémorragie est parfois
importante justifiant un curetage hémostatique (1,3 %).
Les
autres effets secondaires sont très discrets (asthénie, douleurs pelviennes, nausées et vomissements) sans qu’on
puisse les distinguer des douleurs survenant au cours d’un
avortement spontané.
3- IVG médicamenteuse : mifépristone associée aux prostaglandines
• L’existence d’échecs de la mifépristone seule a fait discuter
la possibilité d’une production locale insuffisante de
prostaglandines après son administration, d’où l’idée d’associer
une prostaglandine.
En début de grossesse, la prise de mifépristone accroît la contractilité utérine, des contractions
utérines régulières apparaissent 36 à 48 heures après le début
du traitement.
La sensibilité du myomètre aux analogues des
prostaglandines est accrue après traitement par mifépristone
et de faibles doses ont alors un effet manifeste.
À l’opposé,
les prostaglandines naturelles et l’ocytocyne sont sans effet
dans les mêmes conditions.
En l’absence de prostaglandines,
le risque d’échec de la méthode atteint 20%.
• En France, plusieurs études ont associé la dose unique
de 600 mg de mifépristone à des analogues des prostaglandines.
Les taux de succès obtenus sont supérieurs à
96 % pour des grossesses de 49 jours d’aménorrhée au
maximum.
La durée moyenne du saignement est de 8 à
10 jours.
Dans 80 % des cas, l’expulsion ovulaire a lieu le
jour de l’administration des prostaglandines.
C - Déroulement de l’IVG médicamenteuse :
• La première consultation doit avoir lieu avant le 42e jour
d’aménorrhée compte tenu des délais légaux de réflexion.
Lors de la deuxième consultation, au plus tard au 49e jour
d’aménorrhée, 600 mg de mifépristone (soit 3 comprimés
à 200 mg) sont ingérés en une seule prise par voie orale en
présence du médecin.
La signature d’une lettre de consentement
par la patiente atteste de ce qu’elle a été totalement
informée de la méthode (procédure identique à l’aspiration-
curetage) et de ses risques (notamment l’échec conduisant
à l’aspiration-curetage).
Ce médicament est inscrit sur
la liste I et sa délivrance est réservée aux établissements
d’hospitalisation publics ou privés satisfaisant aux dispositions
de l’article L.176 du Code de la santé publique, propriétaires
d’une pharmacie en application de l’article L.577
du même code.
Sa délivrance est en outre soumise à des
dispositions particulières précisées par arrêté.
• La prescription de mifépristone doit impérativement être
suivie, 36 à 48 heures plus tard, de celle d’un analogue
des prostaglandines par voie vaginale ou orale.
Deux analogues
des prostaglandines sont actuellement recommandés
en association avec la mifépristone :
– le misoprostol (Cytotec) s’utilisant per os à la dose de
200 µg en une prise unique 36 à 48 heures après la mifégyne
– le géméprost (Cervagème) s’utilisant per os à la dose d’un
ovule de 1 mg 36 à 48 heures après la mifégyne.
Ces 2 prostaglandines associées à la mifépristone permettent
d’obtenir un taux de succès de l’ordre de 96 %.
La sulprostone (Nalador 500) s’utilisait par voie intramusculaire
36 à 48 heures après la mifégyne.
Il est recommandé
de ne plus recourir actuellement à cet analogue des
prostaglandines dans cette indication car, associée à la mifégyne, de rares accidents cardiovasculaires graves (infarctus
du myocarde, fibrillation ventriculaire) sont survenus
chez des femmes de plus de 30 ans fumant plus de 10 cigarettes
par jour.
• Pendant l’administration et pendant les heures qui suivent
l’administration de l’analogue de la prostaglandine,
les patientes doivent rester sous surveillance médicale.
Par ailleurs, la patiente doit contacter le centre prescripteur
où s’y rendre en cas de phénomène anormal notamment en
cas de métrorragies très abondantes.
Dans 80 % des cas,
l’expulsion ovulaire a lieu le jour de l’utilisation de la prostaglandine.
• Une consultation de contrôle doit avoir lieu impérativement
dans un délai de 8 à 12 jours après la prise de mifépristone
pour vérifier (examen clinique, examen échographique,
voire taux d’hCG) que l’expulsion a été complète.
En cas d’échec de la méthode, une aspiration-curetage est
réalisée.
• Le recours à l’IVG médicamenteux est évité, par mesure
de précaution et dans l’attente d’une expérience plus large,
chez les fumeuses de plus de 35 ans, chez les femmes ayant
des affections et des antécédents cardiovasculaires (angine
de poitrine, syndrome ou maladie de Raynaud, troubles du
rythme, insuffisance cardiaque, hypertension artérielle
sévère), dans le diabète insulinodépendant, l’insuffisance
rénale, l’insuffisance hépatique.
En outre, il est recommandé aux patientes de s’abstenir de
fumer dans les jours qui précèdent l’utilisation de prostaglandines,
ainsi que le jour même.
D - Aspiration endo-utérine classique
:
Entre 7 et 12 semaines, soit au-delà du 50e jour de gestation,
on a recours à des techniques plus classiques.
À cette
période, le diagnostic clinique est évident.
En échographie,
le sac ovulaire mesure 20 mm à 7 semaines d’aménorrhée
et contient un embryon de 10 mm.
À 12 semaines d’aménorrhée,
il atteint 60 à 70 mm de diamètre et contient un
embryon de 10 mm.
À 12 semaines d’aménorrhée, il atteint
60 à 70 mm de diamètre et contient un embryon de 50 à
55 mm dont le pôle céphalique mesure 20 mm de diamètre.
L’évacuation chirurgicale de l’utérus est alors préférable.
L’aspiration requiert presque toujours une dilatation cervicale
et une anesthésie locale est nécessaire.
Malgré cela, l’aspiration du premier trimestre est une intervention
sûre et la fréquence des incidents diminue avec
l’expérience des opérateurs.
Pour éviter les complications,
il faut un matériel adéquat utilisé correctement pour les différents
temps de l’IVG: l’anesthésie, la dilatation et l’aspiration.
Dans ces conditions, la pratique actuelle des IVG
est sans conséquence sur l’avenir obstétrical des patientes.
Mesures complémentaires
et contraception :
A - Traitements complémentaires
:
Quel que soit le type d’IVG, dans les suites immédiates, le Métherginen en intramusculaire facilite la rétraction utérine
et peut être poursuivi per os dans les jours suivants.
L’antibiothérapie prophylactique n’est aucunement justifiée dans les suites d’une IVG, sauf indications particulières.
La prévention de l’immunisation Rhésus doit être systématique
chez toutes les femmes Rhésus négatif dans les
heures qui suivent l’expulsion.
La dose standard de 85 µg
de gammaglobulines est suffisante pour les IVG et peut être
suivie par un contrôle (recherche d’anticorps résiduels)
effectué 48 heures après l’injection.
B - Contraception
:
L’IVG constitue un échec de la contraception et reste un
moment privilégié pour entreprendre une prescription efficace.
Quelle que soit la technique utilisée, l’ovulation peut
survenir 15 à 20 jours après l’expulsion ovulaire.
Il est donc
nécessaire d’envisager la contraception dès l’IVG et non
pas après le retour des règles.
Comme pour toute contraception,
le choix de la méthode doit tenir compte des
contre-indications mais la préférence se fera d’abord vers
une contraception orale.
Ce choix a longtemps été guidé
par le désir d’aboutir à une régénération optimale de l’endomètre.
Pour ce faire, beaucoup d’auteurs prescrivent de
préférence un contraceptif oestroprogestatif de type séquentiel.
En fait, cette prescription juste après l’aspiration n’accélère
pas ou peu la régénération et la prolifération de l’endomètre,
ne modifie pas les réactions inflammatoires
locales et semble même retarder l’élimination des résidus
trophoblastiques.
Il semble donc plus simple de prescrire
immédiatement la préparation oestroprogestative que l’on
envisage de choisir pour la patiente.
Le début de la prise
du contraceptif se fera le jour ou le lendemain de l’expulsion
ovulaire.
La pose d’un dispositif utérin peut être envisagée à la suite
d’une IVG mais doit rester l’exception.
Il n’existe aucun
surcroît de complication ou d’expulsion du stérilet.
C - Consultation de contrôle :
Toute IVG doit être contrôlée par une consultation à distance
de celle-ci (15 à 20 jours).
C’est le seul moyen de
s’assurer que la procédure n’a pas été suivie de complication,
et que la grossesse est bien interrompue.
Cette consultation
permet aussi de s’assurer que la contraception a non
seulement été prescrite, mais utilisée et d’évaluer le retentissement
psychologique de l’IVG sur la patiente.
1- Anesthésie :
• L’anesthésie locale est préférée à l’anesthésie générale
car elle présente plusieurs avantages : simplicité car elle
est réalisée par l’opérateur lui-même, commodité et économie
car elle permet une intervention ambulatoire, innocuité
car sa morbidité est plus faible.
L’anesthésique utilisé est la lidocaïne (Xylocaïne 1 %) sans
adrénaline, chez une patiente à jeun et éventuellement prémédiquée
par un anxyolytique.
Bien que moins confortable pour l’opérateur, cette technique
est très bien tolérée par les patientes mais nécessite
une approche différente de dialogue et des explications rassurantes
en cours d’intervention.
Deux techniques d’anesthésie locale sont possibles après
désinfection du col et du vagin :
– le bloc paracervical, où l’on injecte 5 mL de Xylocaïne
1% de chaque côté, au ras du col dans le cul-de-sac vaginal
(à 4 heures et 8 heures) après s’être assuré en aspirant
de ne pas faire une injection intravasculaire ;
– l’injection intracervicale est moins utilisée. On injecte la
Xylocaïne 1% sur 4 à 5 cm de profondeur de part et d’autre
du canal cervical et parallèlement à celui-ci.
• L’anesthésie générale nécessite une consultation préopératoire
par l’anesthésiste et impose une hospitalisation
plus longue (6 à 12 heures de surveillance).
Elle n’est
pas dénuée de risques.
Elle peut être discutée devant des
impératifs techniques particuliers (dilatation présumée difficile,
âge gestationnel avancé, nulliparité et combinaison
de ces différents facteurs) et de la personnalité de la patiente
(pusillanimité, vaginisme).
L’une des fonctions des consultations
préopératoires est alors de prévoir ces obstacles et
de faire en sorte qu’une anesthésie générale soit réalisable
le cas échéant.
2- Dilatation :
La vessie doit être vide.
Après mise en place d’une pince
de Pozzi sur la lèvre antérieure du col, une traction douce
redresse l’angle cervico-isthmique.
Deux types de dilatateurs
peuvent être utilisés : les bougies en gomme souple
de Dalsace et les dilatateurs métalliques à bout conique.
Les dilatateurs sont introduits par ordre croissant jusqu’à
8 à 9 mm de dilatation.
Afin de faciliter cette dilatation,
certains utilisent des prostaglandines naturelles ou des analogues
des prostaglandines quelques heures avant l’IVG.
3- Aspiration :
• Elle est réalisée avec des canules d’aspiration (canules
de Karman) en plastique transparentes à usage unique dont
l’extrémité est biseautée.
Ces canules sont reliées à une
seringue à butée, ou à un aspirateur électrique par un tuyau
souple et transparent branché sur un manchon métallique
qui sert de raccord entre le tuyau et la canule.
Ce manchon
métallique est équipé d’une bague coulissante permettant
d’ouvrir ou de fermer le système d’aspiration.
Lors de la dépression, on associe des mouvements de vaet-vient dans la cavité utérine sans franchir le col et des
mouvements de rotation axiale qui détachent lentement le
trophoblaste.
En fin d’aspiration, on ne ramène plus rien
et le contrôle de la vacuité utérine est assuré par une sensation
rugueuse au contact des parois de l’endomètre ainsi
que par la rétraction utérine sur la canule d’aspiration ou
sur une curette-mousse introduite à cet effet.
• On examine les débris ovulaires en vérifiant la présence
de fragments embryonnaires et de villosités choriales qui
prennent un aspect arborescent en suspension dans le
liquide.
Le volume du produit d’aspiration doit correspondre
à la date d’aménorrhée.
En cas de doute, on associe
un contrôle par une échographie voire un examen anatomopathologique
en cas de suspicion de môle ou de
grossesse extra-utérine (ces 2 diagnostics auraient dû être
évoqués à la consultation initiale).
• La durée de la surveillance post-opératoire dépend du
type d’anesthésie et de l’importance des saignements.
En
cas d’anesthésie locale, après quelques heures de surveillance, la sortie est autorisée en précisant à la patiente
les suites normales auxquelles elle doit s’attendre.
Au 3e ou 4e jour, il existe souvent une reprise des saignements,
avec contractions utérines qui correspond à une hématométrie secondaire, rapidement résolutive sous utérotoniques
et antibiotiques mais quelquefois difficile à différencier
d’une endométrite ou d’une rétention ovulaire.
Dans tous les cas de douleurs, de fièvre supérieure à 38 °C
ou de saignement important, il est conseillé à la patiente
de consulter au centre d’IVG.
Épidémiologie :
A - Complications immédiates :
1- Accidents anesthésiques :
• Au cours des anesthésies générales, il existe 1 accident
sur 2 000 et 1 décès sur 8 000.
Les causes de la mort peuvent
être un non-respect des contre-indications anesthésiques,
un arrêt cardiaque réflexe ou un choc allergique.
• Au cours de l’anesthésie locale à la Xylocaïne, un passage
vasculaire peut provoquer des convulsions suivies
d’asphyxie, un choc anaphylactique ou un simple collapsus
avec bradycardie.
Leur prévention nécessite d’aspirer
toujours avant d’injecter et de ne jamais administrer des
doses trop élevées.
Ils sont rares depuis que la dose de
10 cm3 de Xylocaïne à 1 % n’est plus dépassée et se traduisent
plus volontiers par de légers incidents : vertiges,
bourdonnements d’oreille, somnolence.
2- Hémorragies :
Elles surviennent essentiellement pendant l’intervention et
dans l’heure qui suit et restent exceptionnelles avant
8 semaines d’aménorrhée. Environ 0,05 % des hémorragies
dépassent 500 cm3.
Elles peuvent être la conséquence
d’utérus fibromateux, de troubles de l’hémostase et d’aspiration
incomplète. Leur fréquence augmente avec l’âge
gestationnel.
L’anesthésie locale en diminue le risque.
Les
statistiques américaines donnent 0,32 % d’hémorragies
sous anesthésie locale contre 0,54 % sous anesthésie générale.
Le Méthergin injecté de façon systématique ne semble
pas diminuer les pertes sanguines mais s’accompagne souvent
de nausées et de vomissements.
3- Perforations :
• Le diagnostic de perforation n’est pas toujours facile,
mais on peut le suspecter lorsque la bougie, lors de la dilatation,
ou la sonde, lors de l’aspiration, pénètrent trop loin
et trop facilement sans rencontrer d’obstacle.
L’échographie
peut aider au diagnostic dans ce contexte.
Dans tous les cas de perforation, il est indispensable de
vider l’utérus afin de permettre son hémostase et de prévenir
une surinfection possible.
Il faut distinguer :
– la perforation faite au cours de la dilatation : la réalisation
de l’IVG doit se poursuivre sous contrôle échographique.
La glace sur le ventre et des antibiotiques associés à une surveillance de la température à la recherche d’une
infection pelvienne, éventuellement un contrôle échographique
pour éliminer un hémopéritoine, constituent la
marche à suivre dans cette situation ;
– la perforation faite au cours de l’aspiration : le risque
de perforation intestinale est non négligeable.
Ce type de
perforation impose une coelioscopie pour vérifier correctement
le tube digestif et voir une plaie digestive ou l’incarcération
d’une anse dans le muscle utérin.
Les perforations
méconnues ou les interventions les jours suivants
pour péritonite ont un pronostic beaucoup plus sombre.
• Les perforations doivent être distinguées de la fausse
route, complication le plus souvent mineure et qui correspond
à l’effraction de la paroi du col et de l’isthme lors de
la dilatation par la bougie.
Celle-ci nécessite le plus souvent
la réalisation de l’IVG sous contrôle échographique
afin de retrouver le trajet cervical normal.
4- Hématométrie :
Elle peut survenir dans l’heure qui suit l’IVG et peut être
facilement traitée par une nouvelle dilatation et aspiration.
5- Déchirures du col :
Elles sont rares et sont habituellement bénignes, correspondant
à des déchirures partielles, saignant peu et laissant
une cicatrice sans importance pour l’avenir gynéco-obstétrical.
Un très petit nombre nécessite une suture hémostatique.
Elles sont plus fréquentes sous anesthésie générale.
Les statistiques de l’OMS donnent 0,10 à 1,18 %.
6- Malaise vagal :
Il apparaît le plus souvent au cours de la dilatation.
Il est
facilement prévenu par une prémédication, une anesthésie
locale ou plus simplement par une information précise et
une attention soutenue aux interrogations de la patiente.
B - Complications secondaires :
1- Échec de l’IVG :
Les échecs sont rares : moins de 0,5 % par aspiration et 4 %
par IVG médicamenteuse.
Ils peuvent être le fait d’une interruption très précoce (régulation
menstruelle ou IVG médicamenteuse sans contrôle
ultérieur), d’une insuffisance technique ou d’une malformation
utérine.
Une aspiration secondaire sous échographie
est alors proposée.
2- Rétention placentaire :
Elle se traduit par des métrorragies abondantes, un utérus
cliniquement non involué et par des images hyperéchogènes
à l’échographie.
Les études américaines rapportent
un taux de rétentions de 0,75 %. Une aspiration-curetage
secondaire se fait sous échographie.
3- Complications infectieuses :
La fréquence des complications infectieuses varie de 0,5 à
12 % selon les critères retenus.
Ces complications septiques
peuvent se résumer à une simple réaction fébrile, mais il
peut s’agir également d’une endométrite (pertes nauséabondes, utérus sensible, hyperthermie) qui peut diffuser
aux structures de voisinage (phlegmon du ligament large,
salpingite, pelvi-péritonite) ou par voie sanguine (septicémie).
L’utilité de la prévention antibiotique systématique n’a
jamais été formellement démontrée et aurait l’inconvénient
de sélectionner des germes et de masquer des états septiques
à leur début.
Cette antibioprophylaxie est à réserver
à des groupes à risques (antécédents d’infections pelviennes,
cardiopathies orificielles).
4- Retentissement sur la fertilité ultérieure :
La fréquence de la stérilité secondaire à une IVG est difficile
à apprécier et semble peut-être supérieure pour les nullipares.
Cependant, de nombreux auteurs, comparant la fertilité
des femmes ayant avorté à celle des femmes ayant
accouché, ne trouvent pas de différence dans les 2 groupes.
Ces stérilités sont en général liées à une infection postabortum
susceptibles d’entraîner une obturation tubaire
bilatérale ou la survenue d’une grossesse extra-utérine.
La fréquence des synéchies est sûrement sous-estimée.
Ces
synéchies sont plus fréquemment observées après curetage
qu’après aspiration et surtout lors des curetages secondaires
dans un contexte fébrile.
Le diagnostic est hystérographique
ou hystéroscopique.
L’incidence de la béance cervico-isthmique responsable
d’avortements tardifs ultérieurs ou d’accouchements prématurés
est encore mal précisée.
Le risque d’avortement
spontané tardif ou celui d’accouchement prématuré augmente
dans la population avec le nombre d’IVG, surtout
chez la nullipare et si la dilatation a dépassé 12 mm.
5- Iso-immunisation :
L’iso-immunisation Rhésus secondaire à une IVG ne
devrait plus s’observer depuis que l’on prescrit systématiquement
une injection de gammaglobulines chez les
femmes Rhésus négatif.
Le taux d’iso-immunisation Rhésus secondaire à une IVG
serait d’environ 7 % en l’absence de séroprévention.
6- Complications psychiatriques et
psychologiques :
Elles ont une gravité et une symptomatologie très variées.
C’est en général un sentiment de culpabilité que l’on
observe après IVG.
Le taux de regrets serait de l’ordre de
5 % dans les statistiques américaines.
Parallèlement, une
grossesse non désirée est source d’agression pour la mère
et peut interférer sur la qualité du développement foetal avec
corrélation entre l’attitude négative de la mère par rapport
à sa grossesse et la mortalité périnatale.
De nombreuses
études ont signalé l’évolution des grossesses dont la
demande d’avortement avait été rejetée : 12 à 17 % de ces
enfants doivent faire l’objet d’un placement ou d’une adoption,
avec une fréquence plus importante de maladies mentales
et de comportements délinquants.
La fédération internationale pour la planification familiale,
reprenant la plupart des études menées dans de nombreux
pays, estime que les femmes en parfait état physique et mental, ont peu de conséquences psycho-affectives.
Des manifestations psychiatriques majeures peuvent s’observer,
en particulier chez les patients psychotiques et
nécessitent donc une prise en charge psychiatrique préventive.
Ces complications sont moindres lors de l’IVG médicale
où la patiente partage avec le corps médical les gestes qui
déclencheront l’avortement.
Le seul véritable problème est
lié à l’intensité de la douleur parfois mal acceptée.