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Ophtalmologie
Prise en charge d’un hyphéma post-traumatique (Suite)
Cours d'Ophtalmologie
 
 
 

2- Corticostéroïdes :

Une rupture de la barrière hémato-oculaire induite par le traumatisme pourrait augmenter la diffusion de certaines protéines plasmatiques dans la chambre antérieure, telles que le plasminogène, augmentant ainsi le risque d’hémorragie secondaire.

En stabilisant la barrière hémato-oculaire et en inhibant directement la fibrinolyse, les corticostéroïdes pourraient diminuer le risque de survenue d’une hémorragie secondaire.

Yasuna a émis l’hypothèse selon laquelle les stéroïdes, en diminuant l’uvéite, pouvaient réduire la tendance au resaignement des vaisseaux congestifs de l’uvée.

Les premiers rapports qui ont démontré que les corticostéroïdes diminuaient l’incidence de l’hémorragie secondaire ont utilisé des médicaments par voie topique.

Oksala a rapporté que les collyres corticostéroïdes (Décadront [dexaméthasone sodium phosphate, Merck] trois à six fois par jour) réduisaient l’incidence de l’hémorragie secondaire.

Dans cette étude, les patients ayant un hyphéma de 4 mm de hauteur ou plus n’étaient pas traités avec des stéroïdes, et on ne sait pas quelle était l’incidence de l’hémorragie secondaire chez les patients traités avec et sans corticostéroïdes.

Dans une étude prospective, Zetterstrom a montré que des gouttes de Décadront en topique (cinq fois par jour) diminuaient l’incidence de l’hémorragie secondaire chez les patients qui pouvaient se déplacer par opposition à ceux traités par le repos strict mais sans collyre de corticoïdes.

Dans une étude rétrospective de 462 patients traités pendant une période de 10 ans, Ng et al ont trouvé une diminution significative du taux d’hémorragie secondaire chez les patients traités avec des collyres corticoïdes.

Un taux de resaignement de 5 % (11/215) a été calculé pour le groupe des patients traités par des collyres corticoïdes (avec ou sans cycloplégiques) contre un taux de 12 % (29/247) dans le groupe des patients traités sans collyres corticoïdes (avec ou sans cycloplégiques).

Ces auteurs n’ont pas rapporté la posologie des collyres corticoïdes. Dans des études rétrospectives, Fong et Gorn ont également trouvé que les collyres corticoïdes diminuaient significativement le risque d’hémorragie secondaire (Fong a conclu que la diminution observée du risque de resaignement était sujette à un biais par la sélection de patients ayant un hyphéma plus sévère pour le traitement et l’introduction des corticoïdes chez quelques patients après un resaignement).

Bien que Agapitos et al aient observé un taux de resaignement plus bas chez les patients traités par collyres corticoïdes, ils en ont conclu que l’effet n’était pas statistiquement significatif.

En effet, leur analyse statistique peut être erronée.

Une étude rétrospective et non randomisée menée par Witteman et al n’a pas retrouvé de diminution de l’incidence du resaignement associée avec l’utilisation de corticoïdes locaux.

La plupart des patients (99 %) étaient des sujets caucasiens, ce qui peut souligner le faible taux de resaignement observé à la fois dans le groupe traité et dans celui analysé.

La préparation des corticoïdes et leur posologie n’ont pas été rapportées.

La preuve démontrant l’efficacité des corticoïdes en collyre à prévenir l’hémorragie secondaire n’est pas aussi forte que celle démontrant l’efficacité de l’Amicart en usage systémique, dont l’efficacité a été démontrée dans des essais cliniques prospectifs, randomisés, contrôlés et menés dans plusieurs centres.

Néammoins, en se basant sur les raisonnements suivants, nous pensons que les collyres corticoïdes sont efficaces.

De fortes présomptions démontrent que l’utilisation de l’acide aminocaproïque par voie locale et systémique diminue l’incidence de l’hémorragie secondaire dans les hyphémas post-traumatiques.

La prednisone par voie systémique apparaît être aussi efficace que l’Amicart par voie systémique.

Il est tout à fait possible, au plan biologique, que les collyres corticoïdes puissent être capables de diminuer l’incidence du resaignement, à une dose correcte et avec une formulation adaptée.

De nombreuses études (mais pas toutes) indiquent que cette conclusion est exacte.

Des études supplémentaires sont nécessaires pour définir la dose minimale efficace et la préparation optimale adaptée aux corticoïdes.

La préparation topique des corticoïdes devrait permettre d’éliminer quelques-uns des effets systémiques des corticoïdes (par exemple, l’hyperosmolarité, le coma hyperglycémique sans corps cétoniques) et ceux de l’Amicart (par exemple, la nausée, les vomissements, l’hypotension orthostatique). Nous ne savons pas si l’application locale de corticoïdes et celle d’acide aminocaproïque sont également efficaces.

Cependant, les collyres corticoïdes sont déjà disponibles, ce qui n’est pas le cas pour l’acide aminocaproïque.

La prednisone semble diminuer l’incidence de l’hémorragie secondaire après un hyphéma post-traumatique.

Yasuna a été le premier à mettre en évidence l’efficacité de la prednisone par voie systémique (40 mg/j répartis en plusieurs prises chez l’adulte et 0,6 mg/kg/j chez l’enfant) afin de prévenir l’hémorragie secondaire.

Son protocole de traitement comprenait un repos strict allongé, des calmants, des rondelles oculaires et l’absence de traitement local (Romano a parlé de protocole « sans y toucher » en parlant de cette dernière caractéristique, bien qu’une mesure du tonus oculaire soit réalisée initialement).

Dans une étude randomisée réalisée en double aveugle, Spoor et al n’ont pas trouvé de différence significative sur l’incidence de resaignement entre le groupe traité par placebo et celui traité par la prednisone.

Bien que les doses de prednisone soient identiques à celles utilisées dans les études sans groupe contrôle qui ont démontré un effet bénéfique, la durée du traitement par corticoïdes est différente.

Spoor a traité avec de la prednisone pendant au maximum 7 jours (de façon à éviter la nécessité d’une décroissance progressive pour les corticoïdes).

Si l’hyphéma se résorbait avant le septième jour suivant sa constitution, les corticoïdes étaient alors arrêtés.

Cependant, des auteurs précédents continuaient le traitement par corticoïdes durant 5 jours continus sans surveiller si l’hyphéma se résorbait ou non.

L’absence de traitement de 5 jours entiers et le manque possible de pouvoir statistique de l’étude par Spoor et al peuvent contribuer à la discordance des résultats.

En plus de cette partie de la prise en charge, Yasuna et Rynne et Romano ont recommandé qu’aucun traitement local pouvant également jouer un rôle dans la réduction de la fréquence de l’hémorragie secondaire ne soit administré.

Dans une étude rétrospective non randomisée, Witteman et al n’ont pas retrouvé que les corticoïdes soient associés à une plus faible incidence d’hémorragie secondaire.

La dose de corticoïdes employée n’a pas été rapportée.

Les auteurs ont noté que les patients à qui étaient prescrits les corticoïdes par voie systémique avaient les hyphémas les plus sévères.

De plus, quelques patients qui ne recevaient pas de corticoïdes par voie systémique étaient traités par des collyres corticoïdes, ce qui peut avoir diminué le taux de resaignement dans le groupe témoin.

Dans un essai clinique prospectif et randomisé en double insu de l’Amicart versus la corticothérapie orale comprenant 112 patients, Farber et al ont trouvé que le taux de resaignement dans chacun des groupes était de 7 % (4/56).

Cinquante-six patients ont reçu un traitement de 5 jours de 40 mg de prednisone orale adaptés au poids et divisés en deux prises quotidiennes, pour les patients de plus de 60 kg, ou une dose de 0,6 mg/kg/j pour les patients pesant moins de 60 kg.

Cinquante-six patients ont reçu un traitement de 5 jours de 50 mg/kg d’Amicar toutes les 4 heures jusqu’à 30 g/j.

Les patients présentant une drépanocytose, une coagulopathie intravasculaire, un ulcère gastrique, un diabète, une intoxication, du sang dans les selles et les patientes enceintes ont été exclus de l’enquête.

Tous les patients étaient hospitalisés. Ni les collyres corticoïdes, ni l’aspirine n’ont été utilisés.

Il n’y avait pas de groupe contrôle non traité dans cette étude.

Il n’y avait pas de différence au sein de la population de patients, y compris la représentation des afro-américains qui constituaient 53 % (59/112) de la population étudiée.

Il n’y avait pas de différence sur l’acuité visuelle entre l’admission et la sortie.

Cette étude a confirmé les rapports antérieurs établis par Yasuna et Rynne et Romano, et a montré que la prednisone orale était aussi efficace que l’Amicart per os en diminuant l’incidence du resaignement après un hyphéma post-traumatique.

En raison de l’absence d’un groupe contrôle « sans traitement », l’étude ne prouve pas que le traitement soit plus efficace que l’absence de traitement dans cette population.

Dans cette étude, environ 42 % des patients du groupe traité par l’Amicart et 75 % des patients du groupe de la prednisone n’ont pas présenté d’hyphéma résiduel, démontrant ainsi qu’un avantage de la corticothérapie est la résorption plus rapide du caillot.

Un essai clinique randomisé avec un groupe contrôle réalisé dans une population iranienne par Rahmani et al a inclus 238 patients chez qui l’hyphéma était survenu après un traumatisme oculaire contusif.

Les patients étaient randomisés en trois groupes : placebo per os (80 patients), acide tranexamique per os à 75 mg/kg/j répartis en trois prises (80 patients) ou prednisone per os à 0,75 mg/kg/j répartis en trois prises (78 patients). Les médicaments étaient arrêtés au bout de 3 jours s’il n’y avait pas eu de resaignement.

Les patients ayant un hyphéma total, un traumatisme pénétrant, un besoin urgent de chirurgie intraoculaire, adressés après 48 heures du traumatisme initial, un trouble de l’hémostase, une prise récente d’aspirine ou d’anticoagulant, une grossesse, utilisé des collyres corticoïdes, une insuffisance rénale, une maladie ulcéreuse ou un resaignement établi avant l’admission étaient exclus de l’étude.

Aucun patient n’a présenté d’arrêt du traitement en raison des effets indésirables.

Le resaignement est survenu chez 43 patients sur 238 (18 %) : huit sur 80 (10 %) dans le groupe traité par acide tranexamique, 14 sur 78 (18 %) dans le groupe traité par prednisone et 21 sur 80 (26 %) dans le groupe traité par placebo.

Les taux de resaignement du groupe de l’acide tranexamique et du groupe placebo étaient significativement différents.

Il n’y avait pas de différence statistiquement significative sur le taux de resaignement entre les groupes prednisone et placebo, ni entre les groupes prednisone et acide tranexamique.

Il n’y avait pas de différence statistique entre l’acuité visuelle d’admission ou de sortie, l’âge, le tonus oculaire initial et de sortie, le taux de clairance de l’hyphéma, la durée d’hospitalisation ni le jour de survenue du resaignement (une acuité visuelle de 6/60 ou moins au moment de la sortie était significativement associée avec un resaignement, une acuité visuelle initiale de 6/60 ou moins, une lésion rétinienne et le genre masculin.).

L’acuité visuelle finale n’avait pas d’association statistiquement significative avec l’âge, l’utilisation de prednisone orale ou d’acide tranexamique, ou la hauteur de l’hyphéma.

Six yeux ont nécessité une intervention chirurgicale, mais la répartition entre les groupes de traitement auxquels les patients étaient assignés n’est pas claire.

La raison pour laquelle la prednisone n’a pas d’effet statistiquement significatif dans cette étude n’est pas évidente, mais cette étude présente un groupe traité par placebo qui manquait dans l’étude de Farber et al.

Cependant, comme dans l’étude de Farber et al, cette étude a montré que l’incidence du resaignement dans les groupes traités par antifibrinolytiques et ceux traités par stéroïdes n’était pas significativement différente.

Peut-être que les stéroïdes par voie orale sont moins efficaces que l’acide tranexamique dans la prévention de l’hyphéma secondaire.

Les limites du pouvoir statistique de cette étude mettent en évidence l’échec à démontrer une différence statistiquement significative concernant le pronostic entre les groupes traités par prednisone et ceux traités par placebo.

Les deux tests ont indiqué que la diminution de l’incidence du resaignement associée à l’utilisation des corticoïdes était hautement et statistiquement significative (p < 0,0001 [CF] et p < 0,0149 [CS]).

Ils ont également indiqué que la corticothérapie n’était pas associée significativement à un bénéfice sur le pronostic visuel (p < 0,584 [CF] et p < 0,519 [CS]).

3- OEstrogènes combinés :

Le Prémarint (estrogène conjugué, Wyeth-Ayerst) peut augmenter la concentration en prothrombine et diminuer l’activité antithrombine.

Deux séries non randomisées de cas consécutifs ont indiqué que le Prémarint pouvait réduire la survenue d’une hémorragie secondaire.

Une étude prospective randomisée en double insu par Spaeth et Levy n’a pas trouvé de différence entre l’incidence de resaignement chez dix des 46 patients du groupe contrôle (22 %) par rapport aux dix patients sur les 39 traités par oestrogènes.

Ces auteurs ont utilisé du Prémarint, 5 mg par voie intramusculaire chez les enfants âgés de moins de 5 ans, 10 mg par voie intramusculaire chez les enfants de moins de 10 ans et 20 mg par voie intraveineuse chez tous les autres patients, quotidiennement pendant 5 jours.

Un petit groupe de patients a subi un bilan de la coagulation, qui n’a pas retrouvé de différence entre les patients traités par Prémarint et ceux traités par le placebo.

4- Agents mydriatiques et myotiques :

Rakusin a étudié l’influence des mydriatiques, des myotiques ou des deux sur le pronostic de l’hyphéma post-traumatique.

Il n’a pas trouvé de différence significative entre l’incidence de resaignement, l’acuité visuelle finale, le taux de résorption du caillot, ou dans l’incidence des complications selon que le patient utilisait un mydriatique, un myotique, les deux ou ni l’un ni l’autre.

Dans une étude rétrospective, Gilbert et Jensen ont montré que l’utilisation de l’atropine sulfate en collyre à 3 % n’était pas associée à un plus mauvais pronostic visuel chez les yeux avec ou sans hémorragie secondaire.

D’autres études rétropectives ont indiqué que les cycloplégiques n’avaient pas d’effet positif ou néfaste sur le pronostic final.

Gorn a trouvé que les cycloplégiques pouvaient diminuer la survenue d’une hémorragie secondaire, particulièrement chez les patients utilisant l’aspirine.

Parce que les patients avec un hyphéma post-traumatique ont le plus souvent une iridocyclite associée, nous prescrivons un agent cycloplégique (atropine à 1 % une fois par jour) pour diminuer la photophobie et prévenir la formation de synéchies postérieures.

Nous préférons l’atropine parce qu’une seule application quotidienne diminue le nombre de manipulations oculaires, pouvant ainsi diminuer également le risque d’hémorragie secondaire.

5- Aspirine :

Dans une analyse rétrospective, Crawford et al ont démontré que l’incidence du resaignement est augmentée par la prise d’aspirine, quelle que soit la hauteur de l’hyphéma.

Les patients qui prennent de l’aspirine ont un taux d’hémorragie secondaire de 39 % (12/31) par rapport à 4 % (4/96) chez les patients qui n’en prennent pas.

Une étude rétrospective moins importante par Gorn a démontré que le taux de resaignement chez les patients prenant de l’aspirine était de 47 % (16/34) contre 5 % (3/59) chez les patients n’en utilisant pas.

La différence entre le groupe traité par Tylenolt (acétaminophène, McNeil) et le groupe contrôle n’était pas statistiquement significative.

Une étude prospective, randomisée et contrôlée par Marcus et al a montré que trois des 23 patients (13 %) qui prenaient de l’aspirine (500 mg per os, en une prise pendant 5 jours) et deux des 28 patients (7 %) qui n’en prenaient pas avaient resaigné.

Cependant, la différence entre les deux groupes n’était pas significative.

Il semble prudent d’éviter l’utilisation des médicaments contenant de l’aspirine ou des antiinflammatoires non stéroïdiens dans ces conditions, en dépit de l’évidence de l’effet délétère de l’aspirine sur l’incidence de l’hémorragie secondaire.

En résumé, il est évident que les médicaments systémiques mais aussi topiques comprenant les corticoïdes, l’acide aminocaproïque et l’acide tranexamique diminuent le risque de resaignement chez les patients présentant un hyphéma post-traumatique.

Dans la plupart des études publiées, l’emploi de ces médicaments n’a pas permis de bénéfice visuel défini en association avec la diminution de fréquence des hémorragies secondaires, mais des problèmes méthodologiques tel qu’un échantillon réduit peuvent expliquer cette constatation.

En fonction de l’âge du patient (âgé avec une hypotension orthostatique), des maladies associées (une hyperglycémie avec un diabète) et de la prise en charge clinique du patient (en hospitalisation ou ambulatoire), soit l’acide aminocaproïque, soit l’acide tranexamique, soit les corticoïdes peuvent être utilisés pour diminuer le risque d’hémorragie secondaire. Dans notre pratique, nous prescrivons habituellement des corticoïdes en topique (acétate de prednisolone à 1 %) pour diminuer l’inflammation intraoculaire (cependant, si un enfant n’est pas coopérant, il peut être sage d’utiliser seulement des médicaments par voie systémique.)

De plus, la prednisone par voie systémique ou l’Amicart par voie systémique sont utilisés dans la majorité des cas, en fonction des caractéristiques spécifiques du patient.

Nous pensons que l’acide tranexamique (25 mg/kg, deux fois par jour pendant 5 jours) peut être utile dans des circonstances où nous préfèrons l’acide aminocaproïque, mais nous n’avons pas l’expérience clinique de ce traitement.

Nous recommandons également l’utilisation d’un cycloplégique de longue durée d’action (atropine à 1 %) afin de prévenir la formation de synéchies et de soulager la photophobie.

Nous utilisons l’acétaminophène ou la codéine comme analgésique, et l’aspirine et les anti-inflammatoires non stéroïdiens ne sont pas employés.

Bien que nous pensions que cette approche de la prise en charge médicale soit justifiée sur la base des résultats publiés dans la littérature scientifique, nous avons noté qu’il n’a pas été encore publié d’analyse claire du rapport coût-bénéfice.

De plus, il est important de noter que les agents antifibrinolytiques et anti-inflammatoires n’ont pas prouvé de bénéfice statistique sur le pronostic visuel.

Ce fait, combiné au coût et au risque potentiel de ces médicaments, a conduit quelques experts à en éviter l’utilisation.

B - PRISE EN CHARGE AVEC REPOS STRICT AU LIT VERSUS DÉAMBULATION :

Quelques médecins mettent les patients présentant un hyphéma post-traumatique au repos strict au lit, en espérant minimiser les risques d’une hémorragie secondaire.

Cependant, deux études contrôlées ont démontré qu’il n’y avait pas d’avantage clair conféré par la prise en charge des patients avec repos strict au lit.

Rakusin a rapporté que l’incidence du resaignement chez les patients traités par repos strict au lit était de 4 % (1/26) alors qu’aucun patient pris en charge avec la déambulation prudente n’avait présenté d’hémorragie secondaire.

Read et Goldberg ont rapporté une incidence de resaignement de 18 % (12/66) chez ceux traités par repos strict au lit, pansement bilatéral, élévation du lit de 30° et sédation par opposition aux 25 % (18/71) chez ceux traités avec déambulation prudente, pansement de l’oeil traumatisé uniquement, élévation du lit de 45° et absence de sédation.

Les différences entre les deux groupes n’étaient pas statistiquement significatives.

Les pronostics de chaque cohorte en termes d’acuité visuelle étaient également similaires.

En conclusion, il n’est donc pas apparu de bénéfice résultant de la limitation des activités due au repos strict par comparaison à la prise en charge avec déambulation prudente dans un environnement hospitalier.

Vangsted et Nielsen ont rédigé une étude prospective et randomisée comparant le repos strict au lit à la déambulation.

Les critères d’exclusion étaient : présence seulement d’un hyphéma microscopique ; âge inférieur à 8 ans ; délai supérieur à 24 heures entre le traumatisme et l’examen initial ; antécédent de maladie rénale, de trouble de la crase sanguine, de maladie thromboembolique ; grossesse.

Une cohorte était confinée au repos strict au lit pendant 6 jours, et l’autre était autorisée à la déambulation dans la clinique et recevait de l’acide tranexamique (25 mg/kg per os deux fois par jour pendant 7 jours).

Les deux cohortes recevaient de l’atropine en collyre à 1 % une fois par jour et de la dexaméthasone deux fois par jour, ainsi qu’un pansement oculaire.

Les pronostics visuels étaient sensiblement plus mauvais dans le groupe confiné au repos strict au lit, mais, chez ces patients, la vision était diminuée plus par les lésions associées que par les complications de l’hyphéma en lui-même.

Wright et al ont comparé deux cohortes différentes à deux périodes différentes, repos strict au lit à l’hôpital (rétrospective et non contrôlée) versus déambulation à l’hôpital (prospective et non contrôlée), chez des patients présentant un hyphéma occupant moins d’un tiers du volume de la chambre antérieure. Les cohortes étaient bien appariées au plan démographique et en respectant la sévérité du traumatisme initial.

Les auteurs ont trouvé que quatre patients sur les 37 (11 %) du groupe du repos strict au lit et que sept patients sur les 36 (19 %) du groupe déambulation avaient présenté un resaignement.

Malgré une augmentation d’environ 50 % de la fréquence de l’hémorragie secondaire, cette différence n’était pas statistiquement significative.

L’acuité visuelle finale et la durée d’hospitalisation étaient à peu près identiques dans les deux cohortes.

Plusieurs études indiquent que le repos strict au lit n’offre pas d’avantage par rapport à la déambulation, mais dans plusieurs cas le groupe de déambulation était comme dans le cas précédent, également traité avec de l’acide tranexamique et/ou des collyres corticoïdes.

Pour la plupart des patients, il semble qu’il n’y ait pas d’avantage à prescrire le repos strict au lit par rapport à la déambulation prudente d’autant que l’environnement est fiable.

Les enfants peuvent représenter un sous-groupe de patients chez qui le repos strict au lit peut être préférable à la déambulation dans un cadre hospitalier, s’il y a un problème de surveillance.

C - EFFET DU PANSEMENT OCULAIRE :

Dans une étude prospective randomisée en double insu, Rakusin a démontré que le pansement oculaire bilatéral, unilatéral ou l’absence de pansement avaient le même pronostic visuel.

Nous recommandons que les patients avec un hyphéma portent tout le temps (y compris pendant le sommeil) une coque rigide en métal ou en plastique afin de prévenir la survenue éventuelle d’un traumatisme supplémentaire sur l’oeil blessé.

Gottsch et al ont suggéré que les patients présentant un hyphéma évoluant depuis longtemps et qui peuvent avoir une exposition prolongée à la lumière présentent un risque élevé de développer une dysfonction endothéliale et donc une hématocornée.

Il peut s’avérer prudent de mettre un pansement sur l’oeil blessé de ces patients.

D - PRISE EN CHARGE AMBULATOIRE DES PATIENTS :

La plupart des études publiées sur l’efficacité de la prise en charge ambulatoire des patients présentant un hyphéma sont des études rétrospectives et non contrôlées.

Dans une analyse rétrospective sans randomisation, Clever a rapporté son expérience de 20 patients.

Tous présentaient moins d’un tiers du volume de la chambre antérieure rempli de sang.

Six des huit patients pris en charge de manière traditionnelle (75 %) avaient une acuité visuelle finale supérieure ou égale à 20/40, et dix des dix patients pris en charge de manière ambulatoire avaient des résultats similaires. Dans chaque groupe, un patient a développé une hémorragie secondaire.

De plus, deux des patients admis à l’hôpital ont été par la suite perdus de vue alors qu’aucun des cas traités de façon ambulatoire n’a été perdu de vue.

Mortensen et Sjolie ont rapporté une étude non randomisée dans laquelle 56 patients consécutifs ont été traités avec repos strict au lit pendant 5 jours d’hospitalisation et 64 patients consécutifs ont été traités avec de l’acide tranexamique (25 mg/kg, per os deux fois par jour pendant 6 jours), sans repos au lit et de manière ambulatoire.

Les critères d’exclusion pour cette prise en charge ambulatoire comprenaient un âge inférieur à 12 ans, une élévation de la pression intraoculaire ou une hémorragie empêchant l’examen de la rétine.

Bien que ces critères aient pu faire des patients hospitalisés un groupe plus sévèrement touché, les deux cohortes étaient bien appariées au regard des lésions associées.

Cinquante deux des 56 patients hospitalisés (93 %) et 56 des 64 patients ambulatoires (88 %) ont atteint une acuité visuelle supérieure ou égale à 20/30.

Alors qu’aucun des patients ambulatoires n’a présenté d’hyphéma secondaire, trois de ceux hospitalisés (5 %) en ont présenté un.

Dans une autre étude, Sjolie et Mortensen ont traité 44 patients consécutifs sans traitement antifibrinolytique et de manière ambulatoire.

Les enfants âgés de moins de 12 ans étaient inclus, mais ils étaient hospitalisés et autorisés à se promener.

Il était expliqué aux patients qu’ils ne devaient pas lire, ne pas se tester eux-mêmes, et revenir pour un contrôle aux cinquième et douzième jours après l’examen initial, et n’importe quand si une baisse de la vision ou une douleur survenaient.

Onze patients ont été admis pour une élévation du tonus oculaire, pour des « lésions graves de l’iris », pour une hémorragie du vitré ou des « lésions de la rétine ».

Les patients hospitalisés étaient autorisés à avoir une activité ambulatoire.

Quatre des 44 patients (9 %) ont présenté un hyphéma secondaire.

Apparemment, aucun des patients n’a été perdu de vue.

Bramsen a rapporté les résultats d’une étude rétrospective sans groupe contrôle de patients ayant un hyphéma post-traumatique et pris en charge de manière ambulatoire.

Seuls les patients présentant un hyphéma macroscopique ont été étudiés.

Tous les patients ont été traités par de l’acide tranexamique (25 mg/kg per os, deux fois par jour pendant 6 jours).

Du 1er janvier 1977 au 13 décembre 1977, 78 patients ont été admis à l’hôpital durant 5 jours ; ils pouvaient se déplacer et ne portaient pas de bandage oculaire.

Du 1er janvier 1978 au 1er octobre 1978, 85 patients ont été admis le jour même de leur consultation, informés du traitement à administrer eux-mêmes, et autorisés à sortir le jour suivant et à reprendre leurs activités normales.

Finalement, huit des 78 des patients hospitalisés (10 %) et quatre des 85 patients traités en ambulatoire (5 %) ne sont pas revenus aux visites de contrôle.

Aucune hémorragie secondaire n’est survenue chez la cohorte des patients hospitalisés ou chez les 81 patients ambulatoires qui sont revenus pour le suivi.

Les deux groupes traités avaient les mêmes résultats en terme d’acuité visuelle.

Une étude rétrospective sans groupe contrôle menée par Wilson et al a analysé la prise en charge ambulatoire des hyphémas microscopiques sans autre lésion sévère de l’oeil dans un environnement urbain.

Sur les 80 patients initiaux, seulement 62 sont revenus pendant un suivi minimal de 5 jours (taux de perdus de vue de 23 %).

Les patients recevaient un traitement par atropine trois fois par jour ainsi qu’une coque protectrice.

Le timolol était prescrit pour une élévation de la pression intraoculaire (> 24 mm Hg).

Parmi les 62 patients revenus pour leurs visites de contrôle, quatre (6 %) ont développé une hémorragie secondaire.

Cependant, le véritable taux de resaignement chez les patients n’est pas connu, en raison du manque de suivi complet des patients.

En général, les patients qui ont présenté une hémorragie secondaire avaient un tonus oculaire plus élevé que ceux qui n’en n’avaient pas présenté.

Les auteurs ont conclu que la plupart des hyphémas microscopiques pouvaient être pris en charge de manière ambulatoire.

Ils ont suggéré que les patients présentant une hypertonie oculaire ou ceux supposés avoir un risque plus élevé d’hémorragie secondaire pouvaient profiter d’une prise en charge à l’hôpital.

Parmi les limites de cette étude, on peut trouver l’échec à caractériser la composition raciale de la population des patients, l’échec à noter l’acuité visuelle initiale par rapport à celle finale et le taux élevé de perdus de vue.

Williams et al ont présenté une étude prospective sans groupe contrôle, menée chez 43 patients présentant un petit hyphéma (occupant moins d’un tiers du volume de la chambre antérieure) et pris en charge de manière ambulatoire.

Les patients revenaient tous les jours (moyenne de 4,3 fois) pour un contrôle clinique, mais neuf (21 %) n’ont pas eu de suivi.

Il n’y avait pas de traitement topique ou par voie systémique.

Trois patients ont présenté une hémorragie secondaire.

Les limites de cette étude comprennent l’absence d’enregistrement de l’acuité visuelle finale, l’absence de groupe contrôle et le nombre important de perdus de vue.

Cependant, le taux de resaignement (9 % chez les 34 patients suivis) était tout à fait comparable à celui observé dans les autres études.

Shiuey et al ont mené une analyse rétrospective sur la prise en charge ambulatoire des hyphémas dans une population majoritairement blanche.

Le groupe des 154 patients ambulatoires a été comparé à un groupe contrôle de 119 patients hospitalisés précédemment pour un hyphéma au sein de la même institution (dans la cohorte des patients hospitalisés, 63, soit 53 %, ont reçu de l’acide aminocaproïque.)

Sept patients (5 %) ont été admis dès leur premier examen pour une baisse de l’acuité visuelle (deux patients), pour une hypertonie oculaire (un patient) et pour un manque prévisible de compliance associé à un hyphéma non compliqué (deux patients).

Sur les 147 patients restants qui ont été pris en charge en ambulatoire, six (4 %) ont été hospitalisés par la suite.

Un patient (0,6 %) a été admis pour une hypertonie oculaire sévère et cinq patients supplémentaires (3 %) ont été admis après un resaignement.

Tous les patients chez qui on a porté le diagnostic de resaignement à l’examen initial ou au cours du suivi ont été hospitalisés et on a débuté un traitement par Amicart (50 mg/kg per os toutes les 4 heures).

Les patients ont tous été traités pharmacologiquement de la même manière (comprenant de l’acétate de prednisolone à 1 %, une fois par jour) et chirurgicalement dès que nécessaire.

Il a été expliqué à tous les patients de garder le repos strict au lit, d’élever la tête du lit, de porter une coque oculaire de protection et d’éviter l’utilisation de l’aspirine et de tout antiinflammatoire non stéroïdien.

Il n’y avait pas de différence entre le groupe de l’étude et celui historique dans le taux global de resaignement ou dans le taux de resaignement entre les patients qui recevaient ou ceux qui ne recevaient pas d’acide aminocaproïque.

Les taux de resaignement pour le groupe de l’étude et pour le groupe historique étaient respectivement de 4,5 % et de 5,0 % (p > 0,05).

Les taux de resaignement des patients de l’étude traités initialement en ambulatoire et ceux du groupe historique étaient respectivement de 3,3 % et de 4,8 % (p > 0,05).

Un total de 96 % des patients de l’étude ont atteint une meilleure acuité visuelle finale, supérieure ou égale à 20/30.

Les causes d’une acuité visuelle finale inférieure ou égale à 20/30 comprenaient les patients perdus de vue avant la résolution de l’hyphéma (chez trois des 147 patients, soit 2 %), une cataracte traumatique (deux patients, soit 1 %), un trou maculaire (un patient) et une dégénérescence maculaire (un patient).

Les auteurs ont conclu que dans leur population à prédominance caucasienne, un suivi ambulatoire rapproché des hyphémas posttraumatiques était sûr et efficace.

L’hospitalisation des hyphémas n’a pas semblé diminuer le taux de resaignement et la baisse d’acuité visuelle dans les suites d’un hyphéma post-traumatique, qui résultait le plus souvent des comorbidités non affectées par l’hospitalisation des patients.

Les auteurs ont estimé à 80 % la diminution du coût associée à la prise en charge ambulatoire des patients par rapport à leur hospitalisation (la prise en charge ambulatoire des patients était relativement rapprochée, avec une moyenne de 4,6 visites dans les 2 premières semaines suivant l’examen initial pour les patients qui n’étaient pas hospitalisés).

Clarke et Noel ont rapporté les résultats d’une prise en charge ambulatoire comprenant 21 patients, âgés de 4 à 15 ans, avec des hyphémas microscopiques (19 cas) ou en anneau (deux cas).

Le protocole comprenait le repos à domicile pendant 7 jours, l’utilisation d’une coque, un traitement par collyres associant un antibiotique et un corticoïde (deux fois par jour pendant 7 jours) et de l’acide tranexamique (25 mg/kg per os deux fois par jour, jusqu’à une dose maximale de 1500 mg per os trois fois par jour).

Dix-huit patients étaient caucasiens, deux étaient métisses et un était noir.

Les limites de l’étude comprenaient l’absence d’un groupe contrôle prospectif, le manque d’information concernant le pronostic visuel du groupe de l’étude et l’absence d’information sur les perdus de vue en dépit de « quelques difficultés » assurant un suivi adapté.

Coats et al ont réalisé une étude rétrospective sur 25 enfants âgés de moins de 16 ans et présentant un hyphéma occupant moins d’un tiers de la chambre antérieure.

Le traitement comprenait une coque de protection (25 patients, soit 100 %), un repos allongé/inactivité (21 patients, soit 84 %), un collyre cycloplégique (20 patients, soit 80 %), des collyres corticoïdes (24 patients, soit 96 %), des traitements antiglaucomateux (sept patients, soit 28 %) et de l’Amicart (cinq patients, soit 20 %).

Seize patients (64 %) étaient caucasiens, six (24 %) étaient afro-américains et trois (12 %) étaient d’autres races.

Une hémorragie secondaire est survenue chez trois patients (12 %). Un des six patients afro-américains (17 %) a présenté un resaignement et deux sur les 16 patients caucasiens (13 %) ont présenté un resaignement.

Les trois yeux présentant une hémorragie secondaire avaient une acuité visuelle finale supérieure ou égale à 20/30.

Apparemment, aucun patient n’a été perdu de vue.

Les auteurs ont suggéré que l’on puisse recourir à une prise en charge ambulatoire seulement si les parents et les enfants semblent être compliants avec les recommandations médicales et ponctuels aux rendez-vous de contrôle.

Des considérations semblables doivent être données aux patients qui sont pris en charge tardivement, qui présentent des lésions oculaires perforantes, une hypertonie oculaire ou qui sont monophtalmes.

Witteman et al ont rapporté les résultats d’une grande étude multicentrique et rétrospective sur la prise en charge ambulatoire des hyphémas.

Les patients ambulatoires avaient des examens quotidiens à la lampe à fente et les patients hospitalisés étaient généralement examinés au lit.

Ces auteurs n’ont pas trouvé de différence sur l’incidence de resaignement entre les patients ambulatoires et ceux hospitalisés dans le cas des hyphémas non totaux.

De plus, l’incidence du resaignement était plus basse pour les patients ambulatoires que pour ceux hospitalisés.

Sans tenir compte de la hauteur initiale de l’hyphéma, la prise en charge ambulatoire n’a pas augmenté le risque d’hémorragie secondaire.

Un taux très bas de resaignement, 13/371 (4 %), a été observé.

Les limites de cette étude comprennent : l’absence de prise en charge uniforme entre le groupe ambulatoire et le groupe hospitalisé ; l’absence de randomisation entre les deux groupes ; le petit nombre de patients hospitalisés dans le groupe des hyphémas sévères (huit cas d’hyphémas occupant de 50 à 100 % de la chambre antérieure chez les patients hospitalisés contre 22 cas similaires chez les patients ambulatoires) ; l’absence de données sur l’acuité visuelle ; l’applicabilité de ces données aux centres urbains, seulement 0,8 % de la population de l’étude était afro-américain et le suivi du patient était excellent.

Le suivi dans une population urbaine peut ne pas être aussi bon que celui obtenu par Shiuey et al et par Witteman et al.

Le faible taux de resaignement qu’ils ont observé est important.

L’incidence de resaignement après un hyphéma post-traumatique peut être différente entre les sujets caucasiens et afro-américains.

Si cette hypothèse s’avère exacte, il peut être difficile de généraliser les résultats de Shiuey et al et de Witteman et al, particulièrement dans les centres urbains des États-Unis.

En résumé, bien que les études de Shiuey et al et de Witteman et al aient prouvé que l’on puisse traiter certains patients présentant des hyphémas en ambulatoire de manière aussi rassurante que les patients hospitalisés, ceci ne doit pas être mis directement en oeuvre pour toutes les populations urbaines des États-Unis, ni pour tous les enfants.

Romano a mis en évidence que la compliance des patients pouvait être un facteur prépondérant limitant l’efficacité de la prise en charge ambulatoire des patients.

Il a suggéré les stratégies suivantes pour améliorer la compliance des patients pour l’administration des médicaments, la diminution des activités et les rendez-vous de contrôle.

Premièrement, revoir plusieurs fois l’emploi du temps du traitement avec le soignant/patient, et mettre cet emploi du temps sous forme de tableau avec un emplacement pour le soignant/patient pour entrer la date et l’heure de la prise du médicament.

Deuxièmement, avoir les prescriptions remplies pour le patient, si possible, et avoir une réunion pour expliquer au soignant/patient la prise des médicaments.

La réunion doit observer et critiquer la technique.

Troisièmement, il faut insister pour que le soignant/patient amène les médicaments avec lui à chaque visite de contrôle.

À cette étape, l’équipe peut évaluer si les médicaments ont bien été correctement pris (c’est-à-dire compter les pilules et déterminer le volume de liquide dans les flacons).

Quatrièmement, pour s’assurer d’un suivi adapté, il faut avoir une équipe au secrétariat qui appelle le patient chez lui la veille de chaque visite de contrôle programmée.

Si le patient ne se présente pas à ses visites de contrôle, le médecin traitant doit réussir à contacter le patient (par téléphone, par mail confidentiel ou bien directement par la police au domicile du patient).

Cas particuliers : drépanocytose et troubles de la coagulation

A - DRÉPANOCYTOSE :

La prise en charge médicale et chirurgicale de l’hypertonie oculaire chez les patients présentant une drépanocytose est différente par certains aspects de la prise en charge des patients sans hémoglobinopathie.

Les patients avec une drépanocytose homozygote ou hétérozygote ont une incidence plus élevée d’hypertonie oculaire, d’atrophie de la tête du nerf optique et d’hémorragie secondaire dans les suites d’un hyphéma posttraumatique par comparaison à des patients indemnes de la maladie.

Par exemple, la drépanocytose hétérozygote a été décrite chez les enfants comme un facteur de risque de resaignement, d’hypertonie oculaire et de baisse d’acuité visuelle permanente. Une analyse rétrospective portant sur 99 yeux d’enfants présentant un hyphéma post-traumatique avait trouvé un taux de resaignement de 9 % (9/99).

Ces neuf cas sont survenus chez des patients hétérozygotes pour la drépanocytose, ce qui signifie que 64 % (9/14) des enfants hétérozygotes pour la drépanocytose ont présenté un resaignement.

Ces patients étaient plus prédisposés à développer une hypertonie oculaire.

Ils avaient également un plus mauvais pronostic visuel, même en excluant les lésions oculaires sans lien avec l’hyphéma.

La fibrinolyse peut être majorée chez les patients présentant une drépanocytose hétérozygote, pouvant ainsi favoriser la survenue d’une hémorragie secondaire.

Dans le cadre d’une drépanocytose homozygote ou hétérozygote, la taille de l’hyphéma peut ne pas être un indicateur fiable de l’évolution clinique ultérieure.

Par exemple, il y a une faible corrélation entre la hauteur de l’hyphéma et la facilité avec laquelle le tonus oculaire est contrôlé.

Goldberg a montré que les patients souffrant de drépanocytose hétérozygote possédaient plus d’érythrocytes falciformes dans l’humeur aqueuse que dans le sang veineux.

Des yeux de lapin dans lesquels on injecte des globules rouges humains capables de falciformation présentent des hyphémas d’évolution plus prolongée et des hypertonies plus élevées par rapport aux yeux de lapin auxquels on injecte des globules rouges normaux.

Il est probable que les drépanocytes (globules rouges falciformes) soient moins capables de passer à travers les mailles du trabéculum que les globules rouges normaux, ce qui est semblable à l’incapacité des « érythrocytes fantômes » à passer à travers ces mêmes mailles.

Une hypertonie oculaire élevée est moins bien tolérée chez les patients souffrant de drépanocytose homozygote, comme cela a été mis en évidence par le fait qu’il ait été décrit des cas d’occlusion de l’artère centrale de la rétine associés à des hyphémas minimes chez de jeunes individus souffrant d’hémoglobinose S.

Le flux dans l’artère centrale de la rétine des patients souffrant de drépanocytose homozygote peut être significativement diminué pour des pressions intraoculaires supérieures à 40 mmHg.

Dans l’étude de Crouch et Frenkel, les deux patients qui ont présenté une atrophie optique dans les suites d’un hyphéma post-traumatique souffraient tous les deux de drépanocytose hétérozygote et avaient des pressions oculaires variant entre 35 et 39 mmHg (pendant 2 et 4 jours respectivement).

Donc, même des patients souffrant de drépanocytose hétérozygote sont susceptibles de présenter des occlusions vasculaires pour des hypertonies oculaires relativement basses et pour des pressions oculaires plus élevées durant un intervalle très bref.

Ces observations ont conduit Goldberg à suggérer d’éviter d’utiliser tout traitement médical favorisant la falciformation dans la prise en charge des patients avec une drépanocytose homozygote ou hétérozygote présentant un hyphéma.

Il faut proscrire les doses répétées ou excessives d’agents hyperosmotiques/diurétiques (glycérine, isosorbide, mannitol), car ils peuvent causer une hémoconcentration et une augmentation de la viscosité sanguine dans la microcirculation oculaire.

Les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique par voie systémique n’induisent pas seulement une hémoconcentration, mais également une acidose métabolique, qui est connue pour exacerber la falciformation des globules rouges.

En plus de diminuer le pH de l’humeur aqueuse, l’acétazolamide augmente la concentration d’acide ascorbique dans l’humeur aqueuse et l’ascorbate peut exagérer le processus de falciformation lui-même en agissant peut-être comme un agent réducteur.

La méthazolamide (Neptazanet, retiré du marché français) cause moins d’acidose métabolique que l’acétazolamide et peut augmenter sensiblement le pH de l’humeur aqueuse.

S’il est nécessaire d’utiliser un inhibiteur de l’anhydrase carbonique par voie systémique, on recommande d’utiliser la méthazolamide à la place de l’acétazolamide dans la prise en charge des patients présentant un hyphéma post-traumatique et une drépanocytose.

Le dorzolamide appliqué localement diminue le débit de l’humeur aqueuse mais ne produit pas d’acidose métabolique systémique.

Dans les essais cliniques, il n’a pas été rapporté de troubles de l’équilibre acidobasique ou de troubles électrolytiques avec l’utilisation du dorzolamide.

Bien qu’on ne dispose pas de données relatives aux études humaines, une overdose peut potentiellemnt produire un déséquilibre électrolytique, un état acidosique et d’autres effets secondaires.

Il y a un risque théorique d’acidose dans la chambre antérieure, bien qu’il n’y ait pas d’étude rapportant d’acidose de la chambre antérieure avec l’utilisation de dorzolamide.

L’absence d’acidose métabolique peut être séduisante, particulièrement chez les patients présentant une drépanocytose, mais il n’y a pas d’étude prouvant l’innocuité du dorzolamide en collyre chez les patients présentant une drépanocytose avec un hyphéma.

Vernot et al ont suggéré que l’épinéphrine pouvait promouvoir la désoxygénation de la chambre antérieure chez les patients atteints de drépanocytose et ont recommandé de ne pas l’utiliser dans la prise en charge d’une hypertonie oculaire dans de telles circonstances.

Cependant, ces auteurs n’ont pas pu mettre en évidence une différence dans l’hypertonie intraoculaire ou le pourcentage de globules rouges falciformes entre les yeux de lapin traités par épinéphrine et le groupe traité par placebo.

Protocole :

Nous suggérons le protocole suivant pour les patients atteints de drépanocytose homozygote/hétérozygote qui présentent un hyphéma post-traumatique et une hypertonie oculaire.

On utilise le timolol collyre en première intention (le timolol ne semble pas avoir d’effet significatif sur l’oxygénation de la chambre antérieure, qui peut être importante dans ces conditions).

S’il est nécessaire d’ajouter un autre traitement, on peut ajouter la brimonidine ou l’apraclonidine en collyre.

Si un autre agent est nécessaire, on utilise le dorzolamide en collyre avant d’utiliser la méthazolamide.

Un agent hyperosmotique doit être rarement utilisé, par exemple, seulement une fois par 24 heures et en dernier recours, afin d’éviter la chirurgie (l’utilisation répétée d’agents hyperosmotiques demande une évaluation rapprochée des électrolytes sanguins, afin de détecter une hyponatrémie, et un monitorage tensionnel pour l’hypotension orthostatique).

L’évacuation chirurgicale de l’hyphéma doit être considérée pour des hypertonies oculaires plus basses que celles proposées dans la prise en charge des hyphémas chez des patients ne souffrant pas de drépanocytose.

Parce que la drépanocytose hétérozygote survient chez 8 à 9 % de la population afro-américaine, nous recommandons qu’un test de falciformation (Sickledext) ou une électrophorèse de l’hémoglobine soient réalisés pour tous les patients afro-américains qui présentent un hyphéma.

Deutsch et al ont suggéré de songer à l’intervention chirurgicale si la pression intraoculaire dépassait les 24 mmHg sur une période de plus de 24 heures consécutives malgré un traitement local maximal.

De plus, si le tonus oculaire augmente de manière progressive aux environs des 30 mmHg, il faut envisager la chirurgie.

Dans leur étude portant sur 22 patients souffrant de drépanocytose hétérozygote et d’hyphéma, 14 patients (64 %) ont maintenu un tonus oculaire suffisament bas pour qu’un traitement médical seul soit nécessaire (tonus intraoculaire moyen inférieur à 25 mmHg sans aucune pression supérieure à 30 mmHg après les 24 premières heures).

Excepté pour un patient (5 %), le temps moyen nécessaire pour abaisser le tonus avec un traitement médical a été de moins de 24 heures.

Dans un seul des huit yeux traités chirurgicalement (13 %), le tonus oculaire a été équilibré dans les 24 heures suivantes.

Ces auteurs ont donc conclu que si un patient répond bien à un traitement médical seul, une diminution significative du tonus oculaire en dessous des 30 mmHg sera probablement atteinte dans les 24 premières heures.

Si à des mesures répétées effectuées durant les 24 premières heures le tonus oculaire dépasse régulièrement les 30 mmHg, il est peu probable que le tonus oculaire soit contrôlé plus tard.

Nous partageons les recommandations de Deutsch et al, mais nous reconnaissons que les médecins doivent utiliser leur jugement clinique afin d’appliquer les résultats de cette étude rétrospective surtout pour la prise en charge de chaque cas particulier.

B - TROUBLES DE LA COAGULATION :

Un hyphéma post-traumatique peut être le mode de révélation d’une hémophilie.

Le temps de céphaline activée (TCA) est parfois utilisé pour dépister l’hémophilie A.

Dans des conditions de stress, le TCA peut être normal, malgré des niveaux bas de facteurs VIIIc, pouvant faire méconnaître le diagnostic.

Comme un déficit en facteur VIII modifie l’évolution de la prise en charge, il est plus prudent de mesurer directement le taux en facteur VIII chez un patient présentant un hyphéma devant des antécédents familiaux d’hémophilie.

Morsman et Holmes ont rapporté le cas d’un enfant hémophilique âgé de 9 ans qui avait présenté un hyphéma posttraumatique avec une hémorragie secondaire.

Les auteurs ont noté que, quand on prend en charge de tels patients, il faut corriger les troubles de la coagulation et surveiller le patient de manière rapprochée, afin de détecter et de traiter les complications comme l’hémorragie secondaire et l’hypertonie oculaire.

Si un traumatisme oculaire est survenu, un ophtalmologiste doit examiner le patient à la lampe à fente pour rechercher un hyphéma microscopique.

Le facteur de coagulation déficitaire doit être administré dès que possible après la blessure.

Les auteurs recommmandent que, en présence de signes même minimes d’une hémorragie intraoculaire, le patient puisse être admis à l’hôpital et que le facteur de coagulation déficient (ou cryoprécipité) puisse être administré régulièrement durant la période à risque élevé pour la survenue d’une hémorragie secondaire (c’est-à-dire les 5 à 7 premiers jours suivant le traumatisme initial).

Si le patient doit subir une intervention chirurgicale afin d’évacuer l’hyphéma, il peut être plus intéressant de réaliser une thérapie de substitution suffisante pour restaurer les niveaux du facteur de coagulation à 100 % de la norme durant cette procédure.

Les patients présentant des cas même modérés d’hémophilie peuvent avoir un risque élevé d’insuffisance rénale aiguë s’ils sont traités par l’acide aminocaproïque.

Pitts et al ont suggéré que des calculs urinaires asymptomatiques peuvent être fréquents chez les hémophiles et ce phénomène peut être exacerbé avec l’administration d’acide aminocaproïque.

Hallet et al ont rapporté le traitement d’un hyphéma post-traumatique chez un garçon âgé de 12 ans présentant un déficit en facteur VIIIc traité par de l’acétate de desmopressine (DDAVP, Aventis ou Minirint en France).

La DDAVP, qui augmente les taux plasmatiques de l’activité du facteur VIII chez les patients souffrant d’hémophilie et de maladie de Willebrand de type I, semble accélérer le saignement supplémentaire malgré la normalisation du facteur VIIIc par le biais de la vasodilatation induite par le traitement.

Le saignement a été traité efficacement par des concentrés de facteur VIII recombinant.

Les auteurs ont suggéré que la DDAVP puisse être contre-indiquée chez les patients présentant une hémophilie moyenne ou une maladie de Willebrand dans le traitement d’un hyphéma posttraumatique.

Bien que l’on puisse prendre en toute sécurité une prophylaxie contre l’hémorragie secondaire chez de tels patients avec des corticoïdes locaux ou systémiques, il n’est pas évident que ces médicaments puissent être efficaces dans les conditions de l’hémophilie.

Chez des patients présentant une hémorragie intraoculaire avec une thrombopénie sévère, il faut évaluer les risques d’une transfusion de culots plaquettaires (comme l’hépatite) par rapport à ceux d’une hémorragie intraoculaire récurrente.

En général, il est prudent de prendre en charge de tels patients présentant un trouble de la crase sanguine en faisant équipe avec un hématologue.

Prise en charge d’un hyphéma chez l’enfant :

Derespinis et al ont trouvé que le diagnostic le plus fréquent chez les enfants subissant un traumatisme oculaire était celui d’hyphéma (81/258, soit 31 %).

Les hyphémas post-traumatiques de l’enfant sont le plus souvent associés aux mêmes types de lésions oculaires que celles rencontrées chez l’adulte, mais les agressions constituent une proportion beaucoup plus faible de cas par rapport aux lésions balistiques (par balles, cailloux, jouets…). Les enfants ne semblent pas avoir une incidence plus faible d’hémorragie secondaire que les adultes.

Agapitos et al ont trouvé, par exemple, un taux de resaignement de 24 sur 316 enfants d’une communauté urbaine caucasienne (8 %).

La plupart des hyphémas (294/316, soit 93 %) étaient de grade I ou moins.

Parmi les patients qui ont resaigné, 17 sur 22 (77 %) avaient une acuité visuelle supérieure ou égale à 20/30 et parmi ceux qui n’ont pas resaigné, 160 sur 176 (91 %) avaient une acuité visuelle supérieure ou égale à 20/30.

Il n’a pas été observé chez les patients plus jeunes de taux d’hémorragie secondaire plus élevé.

Dans cette étude, les collyres corticoïdes ont été utilisés de façon non contrôlée et les traitements systémiques n’ont pas été employés. Une étude a montré que les enfants, et spécialement ceux âgés de moins de 6 ans, avaient un taux plus élevé de resaignement après un hyphéma post-traumatique.

Les enfants afro-américains ont une incidence plus élevée de resaignement que les enfants caucasiens.

Pour identifier les facteurs de risque associés avec des taux plus élevés de complications oculaires chez les enfants présentant un hyphéma post-traumatique, Lai et al ont analysé les résultats chez 40 enfants.

Les critères d’inclusion de cette étude rétrospective comprenaient des enfants (âgés de moins de 18 ans) qui étaient admis à l’hôpital dans les 48 heures suivant un traumatisme oculaire à globe fermé conduisant à un hyphéma.

Parmi les 40 enfants, 20 étaient afro-américains, un était sino-américain et 19 étaient caucasiens.

Cinq parmi les 20 enfants afro-américains (25 %) présentaient une drépanocytose hétérozygote et un seul (5 %) avait une anémie falciforme.

Le taux d’hémorragie secondaire était statistiquement plus élevé dans la population afro-américaine (p = 0,05), mais il n’existait pas de différence statistiquement significative entre les taux d’hémorragie secondaire chez les patients avec ou sans drépanocytose.

La drépanocytose était associée avec un taux plus élevé d’hypertonie oculaire à l’examen initial (p = 0,03) et durant le suivi du patient (p = 0,02).

Les auteurs ont donc conclu que, dans la survenue d’un hyphéma post-traumatique, les enfants afroaméricains semblaient avoir un risque plus élevé pour développer une hémorragie secondaire et que la drépanocytose augmentait le risque d’hypertonie oculaire mais pas celui de resaignement.

Ils ont avancé le fait qu’il était nécessaire de réaliser des études plus larges afin de valider ces observations.

Le traitement des enfants présentant un hyphéma post-traumatique a été controversé.

Certaines études ont mis en évidence l’intérêt des traitements antifibrinolytiques et de la corticothérapie par voie systémique chez des enfants présentant un hyphéma.

L’acide tranexamique par voie systémique semble diminuer l’incidence d’hémorragie secondaire chez l’enfant.

Deans et al, par exemple, ont observé un taux de 24 patients sur 316 (8 %) dans une cohorte non traitée et analysée rétrospectivement, et un taux de cinq patients sur 163 (3 %) dans une cohorte traitée par l’acide tranexamique et éudiée de manière prospective.

Des collyres corticoïdes et cycloplégiques ont été utilisés de manière indifférenciée et il n’a pas été noté d’effet indésirable dans le groupe traité.

La différence entre les taux d’hémorragie secondaire n’était pas statistiquement significative.

Dans une analyse à la fois prospective et rétrospective de 340 cas, Uusitalo et al ont observé un resaignement chez 21 des 214 patients traités avec repos strict uniquement (10 %) et chez un des 121 patients traités par acide tranexamique par voie systémique (0,8 %).

La cohorte traitée par l’acide tranexamique était divisée en deux groupes, celui du repos au lit et celui de la déambulation modérée. Les corticoïdes n’ont pas été utilisés.

Il n’a pas été observé d’effet indésirable avec le traitement et les acuités visuelles finales étaient semblables dans les différents groupes.

Les résultats publiés indiquent généralement que la prednisone et l’Amicart sont tous les deux efficaces chez l’enfant, bien que les données ne soient pas entièrement concordantes. Kraft et al et Teboul et al n’ont pas trouvé par exemple que l’Amicart soit efficace chez l’enfant. Kraft et al ont traité 49 enfants (quatre afro-américains et 45 caucasiens) avec 100 mg/kg d’Amicar toutes les 4 heures pendant 5 jours (dose maximale de 30 g/j).

Les collyres corticoïdes n’ont pas été utilisés.

Un resaignement est survenu chez deux des 24 patients traités par Amicar (8 %) et chez un des 25 patients traités par placebo (4%).

La nausée est survenue chez huit des 24 patients traités par Amicart (33%).

Les auteurs ont donc conclu que l’Amicar n’apporte aucun effet utile.

Dans une étude prospective et randomisée en double insu dans une population à prédominance blanche menée par Teboul et al, 94 enfants ont reçu de manière aléatoire de l’Amicart à la dose de 100 mg/kg per os toutes les 4 heures (n = 48) ou un placebo (n = 46) pendant 5 jours.

Les patients avec des antécédents d’anémie falciforme, de maladie hépatique, rénale ou cardiaque, de coagulopathie, de prise récente d’aspirine, les patients à risque de chirurgie imminente ou les patientes enceintes ont été exclus.

Quatre-vingt-huit sur 94 patients (94 %) présentaient un hyphéma occupant moins d’un tiers de la chambre antérieure et aucun patient n’avait un hyphéma occupant plus de la moitié de la chambre antérieure.

Un des 48 patients traités par Amicart (2 %) et deux des 46 patients ayant reçu le placebo (4 %) ont présenté une hémorragie secondaire.

Ces auteurs ont conclu que l’utilisation de l’acide aminocaproïque ne pouvait pas être justifiée.

Néanmoins, plusieurs études prospectives contrôlées et randomisées comprenant des enfants ont démontré l’efficacité de l’Amicar à réduire l’incidence d’hémorragie secondaire.

Nous conseillons d’utiliser l’Amicart ou la prednisone de façon systématique chez les enfants présentant un hyphéma.

L’efficacité apparente des corticoïdes à réduire l’incidence de l’hémorragie secondaire à la fois en systémique et en topique mais aussi leur capacité couramment reconnue à diminuer les séquelles d’inflammation intraoculaire (qui accompagne souvent un traumatisme oculaire) nous amènent à préférer l’emploi des corticoïdes par voie systémique avec ou sans corticoïdes en collyres, plutôt que l’Amicart, dans la prise en charge des enfants avec un hyphéma post-traumatique, indépendamment du fait qu’ils soient pris en charge en hospitalisation traditionnelle ou en ambulatoire.

Bien que l’acide tranexamique diminue probablement l’incidence d’hémorragie secondaire chez l’enfant, il n’est actuellement pas disponible aux États-Unis.

Quelques preuves indiquent qu’il n’y a pas de différence sur le pronostic visuel ou sur le taux de resaignement parmi les enfants assignés au repos strict et ceux autorisés à la déambulation calme.

Habituellement, on recommande l’hospitalisation durant les 5 à 7 jours suivant le traumatisme.

Chez des patients soigneusement sélectionnés, la prise en charge ambulatoire peut être sûre, mais les données sont limitées.

Clarke et Noel ont traité 21 enfants présentant un hyphéma microscopique ou en anneau de manière ambulatoire, avec de l’acide tranexamique par voie systémique.

Aucun patient n’a présenté d’hémorragie secondaire.

Dans une étude rétrospective, Coats et al ont rapporté les résultats de la prise en charge en ambulatoire de 25 enfants âgés de moins de 16 ans et présentant des hyphémas qui occupaient moins d’un tiers de la chambre antérieure.

Trois des 25 patients (12 %) ont présenté une hémorragie secondaire (dont un de ceux utilisant l’Amicart) et un a nécessité l’évacuation chirurgicale de son caillot de chambre antérieure.

Deux de ces patients étaient caucasiens et l’autre était afro-américain.

Un des patients avec une hémorragie secondaire ne prenait pas de collyre corticoïde.

Tous les patients avaient une acuité visuelle finale supérieure ou égale à 20/40 excepté trois patients (12 %) qui avaient des lésions oculaires limitant par ailleurs la vision.

L’acuité visuelle finale était supérieure ou égale à 20/30 chez tous les patients présentant une hémorragie secondaire.

Ainsi, plusieurs études publiées indiquent que la prise en charge ambulatoire des patients avec un hyphéma peut s’avérer sûre.

Actuellement, il n’y a pas d’essais cliniques prospectifs et randomisés qui soient publiés et qui fournissent des critères bien établis qui recommandent l’admission plutôt que la prise en charge ambulatoire dans le traitement des hyphémas post-traumatiques chez l’enfant.

Le médecin traitant doit utiliser son jugement clinique en se basant sur les caractéristiques propres de chaque cas.

Nous recommandons l’admission à l’hôpital pour les enfants qui présentent des lésions concomitantes nécessitant une hospitalisation, si l’hyphéma est important (c’est-à-dire plus de 50 % du volume de la chambre antérieure), si le tonus oculaire est élevé, si le patient présente une drépanocytose ou un trouble de la coagulation, s’il y a un retard à la présentation initiale ou s’il y a un problème par rapport à la distribution des médicaments, à la compliance vis-à-vis de la limitation des activités, par rapport à la capacité à effectuer le suivi, ou encore par rapport à la sûreté de l’environnement familial.

Si le traitement de l’enfant qui présente un hyphéma diffère de celui de l’adulte, c’est qu’il faut prêter une considération tout à fait particulière à la sûreté de l’environnement familial par rapport à la restriction des activités, l’administration des médicaments et la compliance aux examens de contrôle si la prise en charge ambulatoire est envisagée. Ainsi, le médecin traitant doit à la fois évaluer les parents et l’enfant.

Une complication de l’hyphéma qui est propre à la population des enfants est le développement d’une amblyopie, qui peut survenir comme résultant d’une hématocornée.

Prise en charge chirurgicale :

Rakusin a comparé le traitement médical avec le traitement chirurgical des hyphémas.

Il a trouvé que la cohorte ayant subi un traitement chirurgical avait une proportion plus élevée de résorption en 1 semaine.

La cohorte traitée médicalement avait une meilleure acuité visuelle finale et une plus faible incidence de complications.

Dans une étude, 20 patients (11 avec un hyphéma total initial et neuf avec une hémorragie secondaire qui a réalisé un hyphéma total) ont été répartis de manière aléatoire selon une prise en charge médicale ou chirurgicale.

Si possible, le médecin traitant attendait 4 jours avant d’attribuer les patients à la cohorte médicale ou chirurgicale.

Cette répartition était basée sur une étude de la lyse du caillot, qui avait montré que, à 4 jours, le caillot était suffisamment organisé pour être extrait en une masse unique et en même temps, mais pas suffisamment organisé pour que la périphérie du caillot puisse adhérer à l’angle iridocornéen.

La technique chirurgicale utilisée consistait en une incision de la base de la cornée sur 90° sous la base du limbe et avec des sutures préplacées.

Le caillot était retiré par la combinaison d’une extraction spontanée et d’une expression douce et manuelle grâce à un crochet à muscle.

Le caillot résiduel était retiré grâce à des éponges de Weck et la section cornéosclérale était irriguée par une solution saline adaptée.

Durant cette phase, aucun instrument n’était introduit en chambre antérieure.

Les indications pour passer d’une prise en charge médicale à une prise en charge chirurgicale étaient les suivantes : tonus oculaire supérieur à 60 mmHg pendant 48 heures malgré un traitement local maximal (un cas) ; imprégnation microscopique par le sang de la cornée (trois cas) ; 8 jours d’hyphéma supérieur à 75 % (quatre cas).

Au total, huit patients ont été traités médicalement et douze de manière chirurgicale.

Quatre de ces 12 patients (33 %) ont subi une intervention chirurgicale dans les 4 jours suivant l’installation de l’hyphéma (un pour hypertonie oculaire et trois pour hématocornée).

Quatre autres parmi les 12 (33 %) ont subi une intervention à 8 jours pour une mauvaise résorption de l’hyphéma.

Quatre patients (33 %) ont subi une intervention à 4 jours comme prévu dans le protocole.

Parmi ceux qui ont été traités médicalement, cinq des huit patients (63 %) ont obtenu une vision supérieure ou égale à 20/200, alors que seulement quatre des 12 patients opérés (33 %) ont obtenu une acuité visuelle supérieure ou égale à 20/200.

Dans la dernière cohorte, un seul des quatre patients qui ont subi un traitement chirugical à 8 jours de l’étude (25 %) a obtenu une acuité visuelle supérieure ou égale à 20/200.

Le pronostic visuel final de ceux qui ont subi une intervention chirurgicale dans les 4 jours suivant l’installation de l’hyphéma était globalement mauvais avec un seul patient sur les quatre (25 %) présentant une acuité visuelle supérieure ou égale à 20/200.

Deux des quatre patients assignés au traitement médical qui se sont suffisamment éclaircis au quatrième jour (50 %) ont finalement obtenu une acuité visuelle finale supérieure ou égale à 20/40 par comparaison à un seul patient (25 %) sur les quatre équivalents dans le groupe traité chirurgicalement.

Ces résultats indiquent qu’il est préférable de traiter médicalement un hyphéma total de chambre antérieure pendant les 4 premiers jours si l’on peut contrôler le tonus oculaire de manière satisfaisante par des médicaments et s’il n’y a pas d’hématocornée.

Il faut interpréter ces résultats soigneusement.

Dans la plupart des cas, les instruments de microchirurgie actuellement disponibles offrent une approche supérieure à celle de l’expression manuelle du caillot et aux autres techniques utilisant les enzymes qui ont été proposées.

A - INDICATIONS :

Read et Goldberg et Deutsch et al ont développé les critères empiriques suivants pour proposer l’intervention chirurgicale.

L’évacuation de l’hyphéma est recommandée dans les situations suivantes :

– chez un patient souffrant de drépanocytose homozygote ou hétérozygote et si le tonus oculaire moyen est supérieur à 24 mmHg sur les 24 premières heures ou si le tonus oculaire dépasse de manière répétée 30 mmHg ;

– chez les patients indemnes de drépanocytose, si le tonus oculaire est supérieur à 60 mmHg pendant 2 jours (afin de prévenir l’atrophie optique) ;

– lorsque le tonus oculaire est supérieur à 25 mmHg avec un hyphéma total de chambre antérieure pendant 5 jours (afin de prévenir l’hématocornée) ;

– lorsqu’il y a une hématocornée microscopique débutante ;

– lorsque l’hyphéma ne se résorbe pas en deçà de 50 % du volume de la chambre antérieure au bout de 8 jours (afin de prévenir la formation de synéchies périphériques antérieures).

En général, nous suivons des critères empiriques similaires pour décider d’une intervention chirurgicale.

Nous essayons de recourir plus tôt à la chirurgie dans les cas avec un tonus oculaire élevé malgré un traitement médical maximal et dans les cas de nonrésorption d’un hyphéma total de chambre antérieure.

B - TECHNIQUE :

La technique chirurgicale employée dépend des caractéristiques cliniques et dans un moindre degré de l’entraînement du chirurgien.

Afin de diminuer de manière intense la pression intraoculaire, on peut réaliser une ponction de chambre antérieure à la lampe à fente sous anesthésie topique si le patient est suffisamment coopérant.

Avec un blépharostat stérile en place et après avoir désinfecté la surface oculaire avec une solution oculaire de polyvidone iodée (Bétadinet oculaire), on introduit au limbe une aiguille de 0,5 pouce et de 30 G montée sur une seringue à insuline.

Tandis que le chirurgien tient la seringue en place, l’assistant aspire doucement l’humeur aqueuse teintée de sang.

Cette technique n’est pas efficace si un caillot occupe la majeure partie de la chambre antérieure.

L’évacuation définitive du caillot est réalisée en salle d’opération.

Nous préferons la technique suivante.

On crée une incision en cornée claire près du limbe juste au-dessus du méridien horizontal et du côté de la main non dominante du chirurgien.

Une aiguille recourbée de 23 G est introduite à travers l’incision pour infuser une solution saline.

La pression d’infusion est ajustée à 30-40 mmHg (cependant, il faut éviter les périodes prolongées d’hypertonie oculaire, surtout si le patient présente une drépanocytose).

Le vitréotome est introduit dans la chambre antérieure à travers une deuxième incision en cornée claire, proche du limbe et juste audessus du méridien horizontal, mais du côté opposé.

L’orifice de coupe du vitréotome est occlus par le caillot de sang.

Il faut travailler avec une faible aspiration (environ 50 mmHg) afin d’éviter un collapsus de la chambre antérieure.

Le chirurgien essaie dans un premier temps d’aspirer le sang liquéfié.

Le caillot solide est engagé dans la bouche du vitréotome et aspiré au centre (si l’hyphéma occupe moins de 50 % du volume de la chambre antérieure), et fragmenté en mettant en marche la coupe du vitréotome (de 200 à 1200 cycles/s en fonction de l’appareil à vitrectomie utilisé).

La bouche du vitréotome ne doit pas être dirigée vers le cristallin, surtout lorsque le mode de section-aspiration est enclenché.

Il faut suffisamment augmenter l’aspiration de la vitrectomie pour engager le caillot dans la bouche du vitréotome et ainsi le mettre en occlusion, en évitant dans le même temps un collapsus brutal de la chambre antérieure.

La disponibilité des instruments de vitrectomie moderne qui permettent la « fragmentation » du caillot en assurant une grande stabilité du volume de la chambre antérieure (par exemple, la machine Accurus de Alcon) diminue probablement le risque lié à cette technique.

Nous laissons en place dans l’oeil la partie du caillot qui adhère étroitement à l’iris.

On préfère une incision en cornée claire réalisée parallèlement à l’iris afin d’éviter tout contact entre les instruments intraoculaires et l’iris et le cristallin.

On préfère des instruments séparés parce qu’ils offrent au chirurgien un meilleur contrôle du volume de la chambre antérieure et qu’ils permettent de retirer les instruments sans baisse brutale du tonus oculaire, ce qui pourrait aggraver l’hémorragie intraoculaire.

Si un saignement intraoculaire survient au cours de l’intervention, on peut le contrôler de différentes manières.

Premièrement, on augmente la pression d’infusion à 60-70 mmHg pendant 3 à 5 minutes.

Deuxièmement, on peut injecter du produit viscoélastique (par exemple, Healont) dans la chambre antérieure afin d’éclaircir la vision.

Si le saignement persiste et que l’on réussit à localiser son origine, on peut cautériser le site du saignement grâce à une sonde d’endodiathermie unipolaire de 23 G ou grâce à une diathermie bipolaire bimanuelle.

À la fin de l’intervention, on ferme les incisions grâce à un fil de Nylont 10/0.

Il faut réaliser une iridectomie périphérique s’il se développe un blocage pupillaire en postopératoire ou si l’iris hernié ne peut être repositionné.

Nous reconnaissons que l’entraînement du chirurgien va influencer le choix de la technique utilisée et que d’autres techniques sont également efficaces.

Par exemple, on peut réaliser l’irrigation et si nécessaire l’aspiration du sang en chambre antérieure avec une sonde d’irrigation-aspiration Simcoet ne laissant aucun caillot adhérent à l’intérieur de l’oeil.

L’incision dépend de la préférence du chirurgien. Les incisions peuvent être réalisées au limbe ou peuvent être sclérales tunnellisées (3 mm de large et à 1-2 mm en arrière du limbe) avec un site limbique de ponction de chambre antérieure qui reste accessible en postopératoire.

D’une autre manière, on peut réaliser deux incisions en cornée claire et utiliser une technique bimanuelle avec la sonde Simcoet en employant une ligne d’infusion séparée.

Nous pensons que la coupe « bouchée par bouchée » du vitréotome représente un moyen supérieur d’exérèse du caillot selon une technique bien contrôlée.

Nous pensons qu’une instrumentation séparée offre un meilleur contrôle du volume de la chambre antérieure.

Par rapport aux incisions sclérales tunnellisées, les incisions réalisées en cornée claire semblent présenter moins de risque de contact avec le cristallin, surtout si un caillot en bouton de col avec un blocage pupillaire est présent et si le plan iridocristallinien est déplacé en avant.

C - TRAITEMENT DE L’HYPERTONIE :

Si le tonus intraoculaire est élevé de façon primaire en raison de la dispersion des globules rouges, on peut irriguer la chambre antérieure de la manière suivante.

Une aiguille de 0,5 pouce et de 27 à 30 G montée sur une ligne d’infusion est introduite à travers la cornée claire, au-dessus du méridien horizontal et du côté de la main dominante du chirurgien.

Une aiguille de 0,5 pouce et de 27 à 30 G montée sur une seringue à insuline sans le piston est introduite du côté opposé à travers la cornée claire.

Cette technique permet un contrôle prudent de l’irrigation de la chambre antérieure et utilise des incisions autoétanches.

Dans notre expérience, une trabéculectomie est réalisée de manière exceptionnelle parce que l’enlèvement des globules rouges en chambre antérieure diminue habituellement suffisament le tonus oculaire pour qu’il puisse être traité médicalement.

S’il est nécessaire, on peut réaliser une trabéculectomie dans de meilleures conditions et plus tard.

De plus, une trabéculectomie peut abaisser excessivement le tonus oculaire et ainsi créer des complications telles qu’un syndrome d’effusion uvéale ou un tarissement des corps ciliaires, qui peuvent induire une hémorragie secondaire par l’hypotonie engendrée.

Néanmoins, la trabéculectomie peut être une intervention efficace, surtout chez les patients présentant un hyphéma total de chambre antérieure, une pression intraoculaire très élevée et une susceptibilité particulière aux lésions induites par l’hypertonie intraoculaire (par exemple, une atrophie optique glaucomateuse préexistante, une drépanocytose homozygote/ hétérozygote).

De plus, si une hématocornée diminue sévèrement la visibilité en chambre antérieure, la trabéculectomie peut offrir l’approche la plus sûre pour la prise en charge.

On utilise une technique standard.

On réalise un volet scléral attaché au limbe d’une superficie de 4 ´ 4 mm2 et d’une épaisseur de 0,33 à 0,5 mm s’étendant d’environ 1 mm dans la cornée claire et lui-même réalisé sous un volet conjonctival rattaché au limbe.

On réalise une incision de pleine épaisseur de 3 à 4mm au limbe, à la partie antérieure de l’attache du volet scléral.

Le tissu comprenant la berge postérieure de cette incision de pleine épaisseur est réséqué en utilisant une dissection à main libre (avec les ciseaux de Vannas à coude droit) ou une pince à descemet de Kelly.

Le sang liquéfié est irrigué depuis la chambre antérieure (en infusant une solution saline dans la chambre antérieure par un site d’infusion situé à distance du limbe) et une iridectomie périphérique est réalisée.

Il est parfois utile de réaliser un orifice légèrement plus large que la normale si la taille du caillot restant est importante.

Le volet scléral est suturé avec un fil de Nylont 10/0.

La conjonctive est suturée avec un surjet de Vicrylt 9/0 monté sur une aiguille vasculaire (BV 100-3).

Les sutures sclérales sont enlevées à distance de la chirurgie si nécessaire.

Verma a trouvé que la trabéculectomie seule n’abaissait pas le tonus oculaire de manière satisfaisante et a rapporté que la trabéculectomie combinée avec une extraction manuelle du caillot à travers une large incision était sûre et efficace.

Les forceps angulés de McPherson ont été utilisés pour l’extraction du caillot à travers une incision limbique sur 120°.

Les interventions dans la salle d’opération sont réalisées sous anesthésie générale chez les enfants et sous anesthésie locale ou générale chez les adultes.

Conclusions et recommandations :

En résumé, nous pensons que les observations précédemment rapportées justifient l’approche suivante dans la prise en charge des hyphémas post-traumatiques.

A - EXAMEN CLINIQUE ET PARACLINIQUE :

Tout d’abord, il faut recueillir les antécédents complets du patient.

Il faut surtout rechercher les antécédents personnels ou familiaux de glaucome, de pathologie de l’endothélium cornéen (par exemple, la dystrophie de Fuchs), de traitement par anticoagulant, de trouble de la crase sanguine (comme une drépanocytose, une leucémie ou une maladie de Willebrand), de maladie de l’hémostase (comme l’hémophilie), de traitement par aspirine ou anti-inflammatoires non stéroïdiens, de pathologie thromboembolique, ou de quelconque pathologie tumorale.

Si le patient prend un traitement comme de l’aspirine ou des anti-vitamines K (comme la coumadine), il faut discuter de la possibilité d’interrompre le traitement avec un interniste ou un pédiatre.

Si le patient est afro-américain ou s’il est susceptible de présenter une drépanocytose homozygote ou hétérozygote, il faut obtenir un test de falciformation suivi d’une électrophorèse de l’hémoglobine.

Si la clinique est évocatrice (un hyphéma apparemment spontané), les patients présentant un hyphéma doivent avoir une numération formule sanguine, une numération plaquettaire, un taux de prothrombine, un TCA et une mesure du temps de saignement.

Il faut également obtenir un dosage des enzymes hépatiques et des électrolytes, comprenant l’urée et la créatinine, avant un traitement systémique tel que l’Amicart.

Si une hémophilie est diagnostiquée, l’Amicart ne doit pas être utilisé.

Les femmes en âge de procréer doivent subir un test de grossesse avant de débuter un traitement par l’Amicart ou le Cyclokapront, car la grossesse est une contre-indication relative à l’utilisation de ces médicaments.

De manière habituelle, il faut noter les caractéristiques de la blessure (par exemple, la localisation et la date de survenue, l’utilisation de lunettes de protection, des antécédents de mauvaise vision dans l’oeil impliqué, des antécédents de vision fluctuante dans les suites de la blessure).

Si l’on suspecte des sévices à enfants ou des sévices conjuguaux, il faut contacter les services sociaux concernés.

B - LÉSIONS ASSOCIÉES :

Il faut ensuite rechercher et traiter toutes les lésions associées, à la fois oculaires et corporelles.

La mise en évidence des lésions oculaires associées réclame un examen ophtalmologique complet comprenant une mesure de l’acuité visuelle, un examen de la motilité oculaire, une recherche de la consensualité du réflexe photomoteur, et, si l’examen du fond d’oeil est possible, il faut dilater pour réaliser un examen ophtalmoscopique indirect (sans indentation sclérale).

L’appréciation de la sensibilité épicritique dans la zone innervée par la branche maxillaire du nerf trijumeau peut révéler une hypoesthésie révélant une fracture orbitaire de type blow-out qui accompagne souvent les hyphémas.

Nous ne recommandons pas la réalisation d’une gonioscopie durant environ les 2 semaines suivant le traumatisme afin d’éviter la survenue d’une hémorragie secondaire.

Dans certains cas précis, cette évaluation doit également comprendre un examen par ultrasons soigneux de l’oeil afin de rechercher précocement un décollement de la rétine, un corps étranger intraoculaire ou une rupture du globe oculaire, mais aussi un examen tomodensitométrique (TDM) si des lésions orbitaires sont suspectées et une imagerie par résonance magnétique (IRM) si l’on suspecte une lésion du nerf optique.

Bien que le mécanisme ne soit pas connu, les patients présentant un hyphéma peuvent être somnolents.

Dans les conditions d’un traumatisme crânien associé à un hyphéma, il peut être nécessaire d’obtenir une imagerie TDM ou IRM (ainsi qu’une consultation neurochirurgicale) afin d’écarter des lésions intracrâniennes pouvant être la cause d’altération des fonctions intellectuelles.

C - TRAITEMENT MÉDICAL :

Une prise en charge médicale est alors débutée.

Un collyre mydriatique est administré afin de supprimer la photophobie et d’empêcher la formation d’une sécclusion pupillaire.

Nous préférons l’atropine à 1 % car elle est efficace à la posologie d’une goutte par jour.

Un collyre corticoïde (acétate de prednisolone à 1 %, quatre fois par jour) est appliqué afin de diminuer l’inflammation intraoculaire, le risque de synéchie périphérique antérieure et postérieure, et le risque d’hémorragie secondaire (si on utilise des corticoïdes par voie systémique, il n’est probablement pas nécessaire d’utiliser des collyres corticoïdes).

Le patient est examiné à la lampe à fente au moins une fois par jour si possible (parfois l’agitation du patient induite par l’examen peut être évaluée comme un risque plus grand que celui causé par l’hyphéma, en fonction du degré de coopération du patient, de la hauteur de l’hyphéma et d’autres caractéristiques cliniques).

La cornée est examinée soigneusement afin de rechercher le développement d’une hématocornée. Des collyres bétabloquants, des collyres alpha-adrénergiques et des collyres d’inhibiteurs de l’anhydrase carbonique sont utilisés si nécessaire pour contrôler le tonus oculaire.

On peut également utiliser la méthazolamide (10 mg/kg/j en trois prises jusqu’à une dose maximale de 50 mg per os trois fois par jour) ou l’acétazolamide (chez l’adulte, 20 mg/kg/j en quatre prises jusqu’à une dose maximale de 250 mg per os quatre fois par jour ; chez l’enfant, de 5 à 10 mg/kg/j en quatre prises).

Chez les patients présentant une drépanocytose, nous préférons la méthazolamide.

Nous avons trouvé que les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique par voie systémique sont parfois plus efficaces pour abaisser le tonus intraoculaire que les préparations topiques.

S’il est nécessaire, on peut également utiliser la glycérine (de 1 à 1,5 g/kg per os) ou l’isosorbide (1,5 g/kg per os) ou encore le mannitol par voie veineuse (1,5 g/kg administré sur environ 45 minutes) toutes les 6 heures (pendant 24 heures), mais ces agents ne sont utilisés qu’une fois seulement par 24 heures chez les patients présentant une drépanocytose homozygote/hétérozygote.

Les agents hyperosmotiques systémiques sont habituellement utilisés afin d’équilibrer le patient avant la chirurgie et ne sont généralement pas employés durant plus de 24 heures.

Les agents hyperosmotiques peuvent être contre-indiqués chez les patients ayant une insuffisance cardiaque congestive.

Leur utilisation chez les patients présentant un obstacle sur les voies urinaires doit être considérée avec attention. Une utilisation excessive d’agents hyperosmotiques peut induire une hyponatrémie et/ou une hyperglycémie (surtout avec la glycérine).

Quand on utilise ces agents, il faut surveiller la diurèse, l’azotémie, la créatininémie, le ionogramme sanguin et la glycémie (dans le cas de la glycérine).

Nous évitons l’utilisation de pilocarpine ou de latanoprost.

Il faut probablement éviter d’utiliser l’épinéphrine en collyre dans le cas de patients présentant une drépanocytose.

Les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique en collyre peuvent potentiellement induire une acidose de la chambre antérieure, ce qui peut influer sur le traitement des patients drépanocytaires.

Cette éventualité n’a pas été confirmée ou infirmée par la littérature.

La décision d’utiliser des inhibiteurs de l’anhydrase carbonique en collyre repose avant tout sur l’appréciation clinique du médecin traitant.

Une coque oculaire protectrice est portée tout le temps sur l’oeil blessé.

S’il y a un risque de développer une hématocornée, on utilise plutôt un pansement ou une rondelle oculaire sous la coque transparente, ou bien on préfère une coque non transparente.

Cependant, chez l’enfant, une installation occlusive peut augmenter le risque d’amblyopie et de strabisme acquis. L’activité est limitée aux déplacements calmes.

La tête du lit est surélevée d’environ 30° par rapport au plan du sol afin de faciliter la sédimentation de l’hyphéma.

L’acétaminophène (de 10 à 20 mg/kg toutes les 4 heures jusqu’à une dose maximale de 650 mg par dose) est utilisé comme antalgique, à moins qu’il n’y ait une contre-indication (par exemple, une affection hépatique).

La codéine ou l’oxycodone peuvent être employées s’il est nécessaire d’obtenir une analgésie supplémentaire, en l’absence de contre-indications.

Les narcotiques sont employés avec modération en raison du risque de nausée et d’altération des fonctions mentales.

D - UTILISATION DE L’AMICAR :

En fonction des caractéristiques cliniques, le patient est traité avec l’Amicart en systémique (50 mg/kg per os toutes les 4 heures avec une dose totale inférieure à 30 g/j) ou par la prednisone (de 0,6 à 0,75 mg/kg/j en plusieurs prises jusqu’à un total de 40 mg/j) pendant 5 jours (si le Cyclokapront est disponible, il peut être utilisé à la dose de 25 mg/kg per os trois fois par jour, jusqu’à une dose quotidienne maximale de 1 500 mg per os trois fois par jour pendant 5 jours.)

La Compazinet (prochlorpérazine) peut être ajoutée au traitement de la nausée, à condition qu’elle soit commercialisée.

Habituellement, les adultes sont traités avec 5 à 10 mg per os trois ou quatre fois par jour, ou de 5 à 10mg par voie intramusculaire toutes les 4 heures, ou 25 mg par voie rectale deux fois par jour ; les enfants sont traités avec 2,5 mg par voie orale ou rectale une ou deux fois par jour (pour un poids de 20 à 29 livres, n’excédant pas 7,5 mg/j) ou 2,5 mg per os ou par voie rectale (PR) deux ou trois fois par jour (pour un poids de 30 à 39 livres, n’excédant pas 10 mg/j), ou 2,5 mg par voie orale ou rectale trois fois par pour ou 5 mg par voie orale ou rectale deux fois par jour (pour un poids de 40 à 85 livres, n’excédant pas 15 mg/j).

Bien que nous n’ayons aucune raison de croire que la prednisone soit moins efficace que l’Amicart chez les patients présentant une drépanocytose homozygote/hétérozygote, des données démontrant l’efficacité dans cette population de patients ont été rapportées dans des études prospectives et randomisées utilisant l’Amicart.

Farber et al ont exclu de tels patients de leur essai clinique prospectif et randomisé comparant le traitement par prednisone et celui par Amicart.

Après l’arrêt des agents antifibrinolytiques, le patient doit être surveillé étroitement pour rechercher une éventuelle hypertonie oculaire, qui peut être causée par la lyse du caillot.

Certains cliniciens pensent que la diminution progressive de ces médicaments peut réduire la survenue de cette complication.

Les patients hémophiles doivent recevoir un traitement substitutif du facteur de la coagulation.

La transfusion de plaquettes doit être évoquée chez les patients présentant une thrombocytopénie sévère.

E - SURVEILLANCE :

Chaque jour, le patient est examiné soigneusement avec une attention spéciale concernant l’acuité visuelle, la présence d’une hématocornée, la taille de l’hyphéma et le tonus oculaire (les cliniciens doivent évaluer le rapport entre les risques associés aux examens soigneux et répétés par rapport aux bénéfices potentiels, surtout quand on traite des patients peu coopérants).

La hauteur de l’hyphéma est notée en millimètres.

Le tonus oculaire est mesuré quotidiennement grâce au tonomètre à aplanation.

Le tonus oculaire doit être mesuré plus souvent (toutes les 6 à 12 heures) à une fréquence choisie par l’appréciation clinique du médecin traitant s’il y a une susceptibilité à développer un glaucome (par exemple, patients drépanocytaires ou hyphéma occupant plus des trois quarts du volume de la chambre antérieure), si la capacité à tolérer l’hypertonie oculaire est compromise (patients drépanocytaires ou atrophie optique glaucomateuse connue), ou encore si le tonus oculaire est élevé.

L’examen par ophtalmoscopie indirecte doit être réalisé dès que la clarté des milieux le permet afin de rechercher des déchirures rétiniennes, des hémorragies intravitréennes ou une pathologie maculaire.

Dans la plupart des cas, l’indentation sclérale doit être repoussée durant plusieurs semaines après la blessure afin d’éviter d’induire une hémorragie secondaire.

Une gonioscopie est réalisée environ 2 à 6 semaines après la blessure.

Une gonioscopie plus précoce peut être nécessaire si le patient présente une hypotonie et qu’il faut différencier une cyclodialyse d’une rupture du globe oculaire.

Si une récession post-traumatique de l’angle est détectée ou s’il existe des antécédents familiaux de glaucome, mais que le tonus oculaire est normal, le patient est examiné une ou deux fois par an pour un contrôle pressionnel.

Sinon, le contrôle du tonus oculaire est effectué tous les ans ou tous les 2 ans.

F - TRAITEMENT AMBULATOIRE :

Nous proposons aux adultes une prise en charge ambulatoire de l’hyphéma dans les conditions suivantes :

– absence de lésion oculaire associée nécessitant l’admission à l’hôpital ;

– hyphéma occupant moins de la moitié du volume de la chambre antérieure ;

– tonus oculaire satisfaisant (< 35 mm Hg sans antécédent d’excavation papillaire glaucomateuse ou de drépanocytose) ;

– absence d’antécédent de trouble de la crase sanguine ou de trouble de l’hémostase ;

– absence d’inquiétude :

– quant à la sûreté de l’environnement familial ;

– quant à la capacité du patient à restreindre ses activités ;

– quant à l’administration prudente du traitement ;

– quant à la fiabilité du suivi.

Autrement, le patient est admis pour une hospitalisation. L’activité est limitée à une simple déambulation.

La tête du lit est surélevée (d’environ 30°) afin de faciliter la résolution de l’hyphéma, et l’oeil atteint est protégé par une coque rigide et perforée pour permettre une vision binoculaire à moins qu’il n’y ait un risque de développer une hématocornée.

En général, les enfants sont hospitalisés, mais des exceptions sont faites sur des cas particuliers.

Les patients souffrant de drépanocytose sont généralement hospitalisés de façon à surveiller leur tonus oculaire plus d’une fois par jour.

G - CLINIQUE :

S’il est nécéssaire de réaliser une intervention chirurgicale, cette approche est adaptée aux besoins du patient et à l’entraînement du chirurgien.

Il reste des questions sans réponses dans la prise en charge d’un hyphéma post-traumatique, parmi lesquelles on peut noter :

– Est-ce que l’emploi d’agents antifibrinolytiques ou de prednisone par voie systémique, ou d’un autre agent diminuant le taux d’hémorragie secondaire apporte un bénéfice visuel significatif aux patients souffrant d’hyphéma post-traumatique ?

– Quelle est la dose minimale efficace d’acétate de prednisolone qui diminue la fréquence de survenue d’un hyphéma secondaire ?

– Existe-t-il un agent particulier diminuant le resaignement qui soit plus efficae dans certaines circonstances cliniques particulières (est-ce que la prednisone et l’Amicart par voie systémique sont d’efficacité égale chez les patients présentant une drépanocytose) ?

– Est-ce que la combinaison de l’Amicart ou de l’acide tranexamique avec la prednisone (en systémique ou en topique) est plus efficace qu’un autre agent utilisé en monothérapie ? (une analyse rétrospective des données publiées indique que la combinaison des corticoïdes par voie topique et systémique n’a pas de bénéfice supplémentaire).

– Quels sont les patients les plus appropriés pour une prise en charge ambulatoire ?

Nous supposons que les réponses à ces questions ne seront obtenues que par le biais d’importants essais cliniques, multicentriques, randomisés et prospectifs dont le schéma prendra en compte les différentes tendances aux complications en fonction des différents groupes ethniques.

Une analyse du rapport coût-bénéfice de telles données pourra alors permettre d’établir une politique de santé publique basée sur des données régionales quant à la prise en charge d’un hyphéma post-traumatique.

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