Les grands principes de l’organisation qui gouvernent la structure
et les fonctions du foie peuvent être schématisés ainsi :
– la double vascularisation veineuse et artérielle (apports nutritifs,
hormones, oxygénation etc) ;
– la disposition en travées unicellulaires des hépatocytes le long des
sinusoïdes : capillaires particuliers fenestrés, dépourvus de
membrane basale (richesse et facilitation des échanges, hétérogénéité
cellulaire) ;
– la séparation du compartiment biliaire hépatocytaire de la
circulation sanguine (cycle entérohépatique) ;
– l’organisation hépatocytaire intracellulaire spécifique (expression
exocrine et métabolique) ;
– l’exposition des cellules de Kupffer et des cellules endothéliales
sinusoïdales aux différentes particules étrangères et substances
immunogènes (fonctions immunologiques) ;
– la présence de matrice extracellulaire dans l’espace de Disse, entre
les cellules sinusoïdales et les hépatocytes (régulation de
l’homéostasie cellulaire, communications intercellulaires et cellules-matrice).
Après la mise en place de la vascularisation et de l’innervation
hépatique, nous envisagerons l’organisation histologique générale
du foie, puis nous décrirons les différents éléments structuraux du
lobule hépatique : les hépatocytes, les sinusoïdes et les cellules
sinusoïdales, le système biliaire, la matrice extracellulaire, en
insistant, pour chaque élément, sur les relations structure/fonction.
Vascularisation. Innervation
:
A - VASCULARISATION SANGUINE
:
1- Disposition générale
:
Le foie peut être considéré comme un carrefour vasculaire, formé
par la confluence des courants porte (75 %) et artériel (25 %).
Rappelons brièvement que l’artère hépatique est une branche du
tronc coeliaque (sa disposition est susceptible de variations) et que
la veine porte, formée par la réunion des veines splénique,
mésentériques inférieure et supérieure, apporte au foie les produits
de l’absorption intestinale.
Ces deux vaisseaux (artère hépatique et veine porte) abordent le foie
au sein du pédicule hépatique et forment, au niveau du hile, deux
branches, droite et gauche, divisant le foie en deux lobes, puis en
segments.
Parallèles l’une à l’autre sur tout leur trajet, elles sont associées d’une
part aux canaux biliaires, d’autre part à des structures lymphatiques
et nerveuses.
Elles cheminent dans des espaces portes, au sein d’un
tissu conjonctif, émanation de la capsule de Glisson, contenant
également des cellules mésenchymateuses (fibroblastes et myofibroblastes).
La
vascularisation veineuse porte peut être divisée, en fonction de son
mode de distribution, en portion conductrice et portion
parenchymateuse.
La portion
conductrice est très variable dans sa longueur, son diamètre et le
nombre de ses branches.
La portion
parenchymateuse se ramifie en branches de premier, deuxième et
troisième ordre (les branches de deuxième ordre correspondent aux
veines vues dans les espaces portes du lobule en microscopie optique
; les branches de troisième ordre correspondent aux branches
septales).
À cette arborisation terminale par divisions successives s’ajoute une
autre arborisation terminale qui naît directement des troncs
vasculaires.
Les veines septales donnent naissance aux sinusoïdes, via une
veinule d’apport.
Le sang sinusoïdal se draine dans les veines sushépatiques
terminales (veine centrolobulaire), puis les veines sublobulaires et enfin les veines sus-hépatiques (au nombre de trois :
droite, gauche et médiane) qui sont des affluents de la veine cave
inférieure.
2- Régulation de la microcirculation
:
L’écoulement du sang veineux dans le système porte est à basse
pression (2 à 4 mmHg).
Le flux artériel et le flux sanguin porte
varient en sens inverse.
La perfusion du foie par la veine porte est
probablement aidée par les pressions pariétales ambiantes (pression
négative de la cavité pleurale, mouvements respiratoires, motilité
gastro-intestinale, pression intra-abdominale).
De plus, la paroi des
veines portes, aussi bien dans le foie que dans la portion extrahépatique, présente dans la média des cellules musculaires
lisses ayant vraisemblablement des propriétés de dépolarisation et
de contraction spontanées (péristaltisme spontané) assurant un
tonus actif.
Celles-ci sont soumises à une innervation adrénergique
dense et présentent une sensibilité à certains agents vasoactifs
(endothéline-1…).
Ceci est plus marqué encore pour le réseau
veineux sus-hépatique.
Dans le foie, des veines centrolobulaires aux
veines sus-hépatiques, les parois vasculaires sont comparativement
plus épaisses que dans le réseau veineux porte.
Ces parois sont
formées d’une trame conjonctive organisée, mêlée à de nombreuses
cellules musculaires lisses, assurant un tonus et une résistance
pariétale.
B - CIRCULATION LYMPHATIQUE
:
Il existe trois secteurs anatomiques lymphatiques dans le foie :
– le réseau lymphatique portal, représentant 80 % du transit
lymphatique hépatique ; la lymphe naît à partir de l’espace de Disse
entre les cellules endothéliales sinusoïdales et les hépatocytes, puis
atteint l’espace de Mall au niveau des branches terminales de la
veine porte et enfin gagne l’espace porte pour former les vaisseaux
lymphatiques initiaux ; les lymphatiques descendent le long du
système veineux porte via le hile hépatique ;
– le réseau lymphatique pariétal, drainant la capsule et les ligaments
accessoires vers le diaphragme et la paroi abdominale ;
– le réseau lymphatique central, suivant le système veineux
sus-hépatique.
C - INNERVATION
:
Le foie reçoit une innervation à la fois ortho- et parasympathique.
Cette innervation est constituée :
– de fibres efférentes sympathiques (fibres préganglionnaires
splanchniques et postganglionnaires, après synapse dans le ganglion
coeliaque) et parasympathiques (fibres préganglionnaires du vague)
jouant un rôle dans le métabolisme de la cellule hépatique
(glucidique surtout, peut-être lipidique), dans la régulation
hémodynamique et la motricité biliaire ;
– de fibres afférentes végétatives qui interviendraient dans les
phénomènes d’osmo- et chémoréception.
Au niveau du hile, les fibres nerveuses amyéliniques sont réparties
en deux plexus, antérieur et postérieur, communiquant largement
entre eux ; elles pénètrent dans le foie essentiellement autour de
l’artère hépatique.
Leur distribution intrahépatique est variable.
Chez l’homme, les deux types de fibres nerveuses (ortho- et parasympathique)
sont retrouvés dans le tissu conjonctif des espaces
portes, en contact étroit avec l’artère hépatique, la veine porte et les
canaux biliaires.
Quelques fibres, uniquement orthosympathiques,
pénètrent dans le lobule, formant un réseau autour des hépatocytes
et dans la paroi sinusoïdale, s’étendant parfois jusqu’à la veine centrolobulaire.
L’histochimie de fluorescence et l’immunohistochimie ont permis
d’identifier, dans les fibres nerveuses intrahépatiques, différents
types de substances aminergiques, cholinergiques et peptidergiques
(neuropeptide Y, substance P, vasoactive intestinal polypeptide,
calcitonine gene-related peptide, galanine…).
Des terminaisons
nerveuses contenant différents neuropeptides sont situées près des
fibroblastes, des myofibroblastes, des cellules étoilées du foie et des
cellules endothéliales vasculaires et sinusoïdales, suggérant la
participation de ces neurotransmetteurs dans la régulation
hémodynamique du flux sanguin, notamment sinusoïdal.
Organisation histologique :
lobule hépatique
De façon schématique, le lobule hépatique est un polyèdre
(pentagonal ou hexagonal).
Sur les arêtes du lobule, courent les
vaisseaux, artère hépatique et veine porte (deuxième ordre), et le
canal biliaire (interlobulaire).
L’ensemble
constitue, avec le tissu conjonctif environnant, l’espace porte
(terminal) avec sa triade.
Chaque veine
porte terminale donne à intervalles réguliers, de part et d’autre
des faces latérales du polyèdre, les veines septales.
Des veines
septales et des branches de la veine porte partent, en direction du
parenchyme, les veinules d’apport qui donnent naissance au réseau
sinusoïdal.
Les veines
septales, dépourvues d’enveloppe conjonctive, ne sont pas visibles
en microscopie optique.
La biopsie
hépatique doit être interprétée en fonction de cette organisation
spatiale.
Il faut imaginer
le réseau sinusoïdal dans les trois dimensions de l’espace.
À la zone
portale et septale, en forme de faucille, dans laquelle les
sinusoïdes sont interconnectés, fait suite une zone radiaire vers le
centre du lobule. Les représentations du lobule, en deux ou trois
dimensions, diffèrent selon qu’il s’agit d’une représentation
simplifiée de la réalité ou d’un schéma illustrant une idée.
Ces
représentations sont parfois, au moins en partie, erronées.
Ainsi,
l’artère hépatique ne vascularise pas directement les sinusoïdes ; il n’y a pas
à proprement parler d’équivalent artériel à la veinule d’apport.
Aujourd’hui, on
individualise au sein du lobule classique (dit lobule secondaire) le
lobule primaire (zone
triangulaire de parenchyme comprise entre la base de la veine porte et ses deux branches septales, et au sommet la veine sus-hépatique
[centrolobulaire ou terminale]) et la sous-unité microcirculatoire.
Cette sous-unité représenterait la plus petite unité
fonctionnelle de parenchyme hépatique avec d’une part l’élément endocrine (veine d’apport, sinusoïdes, hépatocytes) et d’autre part
l’élément exocrine (drainage biliaire via les canalicules, le canal de
Hering et les ductules).
Éléments structuraux du lobule
hépatique :
A - HÉPATOCYTES
:
Ce sont des cellules polyédriques de 20 μm de long sur 30 μm de
large environ, représentant 80 % de la population cellulaire du foie
humain.
Elles comportent un noyau rond ou ovalaire central, parfois
deux (environ 25 % des hépatocytes sont binucléés).
Les mitoses sont
rares dans le foie adulte normal (une pour 10 000 à 20 000 hépatocytes)
et la durée de vie moyenne minimale d’un hépatocyte est
de l’ordre de 150 jours.
Les hépatocytes sont agencés en travées
unicellulaires.
Ils sont en contact avec les hépatocytes adjacents de
la même travée par leurs membranes latérales, avec le canalicule
biliaire par leur membrane canaliculaire, et avec l’espace de Disse
par leur membrane sinusoïdale.
L’intégrité des trois domaines très
spécialisés de la membrane hépatocytaire nécessite la présence de la
matrice extracellulaire et de l’environnement microcirculatoire.
1- Les trois domaines de la membrane hépatocytaire
:
L’aspect ultrastructural de la membrane est identique à celui de
toutes les membranes plasmiques.
Cependant, l’équipement
enzymatique, la nature biochimique et la réactivité immunologique
de la membrane diffèrent d’un domaine à l’autre.
La membrane sinusoïdale est très riche en microvillosités, ce qui
augmente considérablement la surface d’échange avec le plasma
(entrées et sorties) ; de plus, de très nombreuses vésicules de
pinocytose sont la preuve d’une intense activité fonctionnelle.
La membrane latérale est parallèle à celle de l’hépatocyte adjacent ; à
son niveau, on note quatre types de jonctions intercellulaires :
– le desmosome (ou macula adherens), qui est une zone arrondie,
servant d’ancrage aux filaments intermédiaires du cytosquelette de
l’hépatocyte, renforçant l’adhésion entre les cellules ;
– le nexus (ou gap junction, ou macula communicans), qui autorise
une communication étroite entre les cellules et notamment des
échanges électriques, électrolytiques et de protéines de bas poids
moléculaire, par l’intermédiaire d’une structure protéique appelée
« connexon » ;
– la tight junction (ou zonula occludens), péribilaire ;
– les interdigitations, au niveau desquelles l’espace intercellulaire
contient la liver cellular adhesion molecule qui renforce l’adhésion
entre les cellules tout en permettant le passage d’eau et
d’électrolytes.
La membrane canaliculaire
est également très riche en microvillosités.
2-
Cytosquelette :
Il est constitué
de trois types de structure : les microfilaments
(actine), les microtubules (tubuline polymérisée) et les filaments
intermédiaires (cytokératines).
Les filaments intermédiaires et les microtubules sont répartis dans
tout le cytoplasme, en périphérie de la cellule et autour du noyau,
alors que les microfilaments sont situés surtout à la périphérie, où
ils sont reliés aux structures membranaires.
Les filaments
intermédiaires sont connectés entre eux, avec les microtubules, les microfilaments, et ont aussi des liens étroits avec le noyau et les
ribosomes.
Ce cytosquelette a un rôle de charpente, certainement un rôle
fonctionnel dans le transport des substances et un rôle dynamique
au niveau des canalicules biliaires.
3- Organelles
:
De nombreuses organelles témoignent des multiples fonctions des
hépatocytes.
– Les mitochondries, très nombreuses (environ 800 par hépatocyte),
sont réparties dans tout le cytoplasme ; leurs nombre, taille, forme
et propriétés enzymatiques varient selon la zone du lobule.
Elles
présentent des granules contenant du calcium et du magnésium,
dont le nombre et la densité aux électrons varient en fonction de
l’activité cellulaire.
Elles participent à la phosphorylation oxydative
et à l’oxydation des acides gras.
– Le réticulum endoplasmique comporte deux types de structures : le
réticulum endoplasmique granuleux (REG) et le réticulum
endoplasmique lisse (REL), dont l’agencement varie d’une cellule à
l’autre et en fonction des conditions physiologiques ou
pathologiques.
– L’ergatoplasme ou REG est formé de sacs aplatis ou citernes,
disposés par groupes de trois à dix, distribués dans tout
l’hépatocyte.
Les citernes communiquent avec l’enveloppe
nucléaire et avec les tubules du REL.
Les profils de REG entourent fréquemment les mitochondries.
Les ribosomes peuvent
également être libres ou en amas de trois à dix, formant les
polyribosomes.
Le REG a des fonctions importantes dans la
synthèse de l’albumine, du fibrinogène et des autres protéines de
l’inflammation, de la coagulation etc.
– Le REL est constitué de citernes sans ribosomes et de vésicules.
Ce système communique fréquemment avec le REG et l’appareil
de Golgi, mais jamais avec la membrane nucléaire. Il est associé à
des dépôts de glycogène.
Il intervient dans la conjugaison de la
bilirubine, l’estérification des acides gras, la glycogénolyse, la désiodation de la thyroxine, la synthèse du cholestérol et des
acides biliaires.
Il est le siège principal du système microsomal
oxydatif qui intervient dans le métabolisme des lipides, des
substances liposolubles (médicaments et xénobiotiques) et des
stéroïdes.
L’induction de ce système par certains médicaments
(par exemple le phénobarbital), l’alcool, le tabac, etc, entraîne une
hypertrophie considérable du REL, et par là un métabolisme plus
rapide de la substance intéressée, mais aussi de toutes les autres
(induction enzymatique par stimulation des cytochromes P450).
– L’appareil de Golgi est composé de trois à cinq citernes parallèles
de REL associées à des vésicules plus ou moins larges et parfois à des éléments lysosomiaux.
Les extrémités renflées des citernes et des
vésicules contiennent souvent des particules denses correspondant
à des very low density lipoproteins (VLDL), riches en triglycérides et
jouant un rôle important dans le transport des lipides vers le plasma.
Certaines de ces vésicules ont une activité phosphatasique acide
positive, suggérant un rôle catabolique.
L’appareil de Golgi est
impliqué dans la production des glycoprotéines et l’adjonction du
composant carbohydrate aux lipoprotéines.
– Les lysosomes sont nombreux, essentiellement situés près des
canalicules biliaires et de l’appareil de Golgi.
Leur nombre et leur
aspect sont très variables : entouré d’une membrane simple, leur
contenu peut être dense, hétérogène ou granuleux ; on peut y voir
des pigments, des débris d’organelles ou des inclusions.
Ils ont une
activité phosphatasique acide et au moins 30 enzymes hydrolytiques
y ont été identifiées. Ils catabolisent les corps étrangers, les
organelles vieillies et participent au stockage du fer.
– Les peroxysomes sont des particules de taille variable, limitées par
une membrane simple entourant une matrice granuleuse (où l’on
trouve les catalases) et parfois un centre plus dense, de structure
souvent cristalline (qui contiendrait l’uricase).
Chaque hépatocyte
en contient environ 200 (un pour quatre mitochondries).
Les peroxysomes interviennent vraisemblablement dans le devenir du
peroxyde d’hydrogène, le métabolisme des purines, des lipides, des
alcools et la gluconéogenèse.
Ils sont spécialisés dans la bêtaoxydation
des acides gras à longue chaîne.
B - SINUSOÏDES ET CELLULES SINUSOÏDALES
:
Les sinusoïdes diffèrent des capillaires habituels : ils sont fenestrés
et ne sont pas entourés de membrane basale ; ils sont aussi plus
larges et de calibre irrégulier.
Tortueux en zone périportale, ils sont
plus rectilignes avec un diamètre plus large (de 30 à 40 %) en zone
centrolobulaire.
Leur paroi est constituée de quatre types de cellules : cellules
endothéliales sinusoïdales (CES), cellules de Kupffer, cellules étoilées du foie
(CEF) et lymphocytes associés du foie.
Ces
cellules sinusoïdales occupent seulement 6 % du tissu hépatique,
mais elles représentent plus du quart des membranes plasmiques
totales.
Ceci est essentiellement en rapport avec les longs
prolongements des CES et des CEF et, à moindre degré, avec les
microvillosités des cellules de Kupffer.
Cette
particularité morphologique est corrélée à un rôle fonctionnel
majeur de ces cellules.
Les sinusoïdes sont séparés des hépatocytes et plus particulièrement
de leur membrane sinusoïdale par l’espace de Disse, contenant
quelques fibres et faisceaux de collagène et autres composants
matriciels.
La microscopie électronique (transmission, balayage), les
techniques de fixation-perfusion, d’immunohistochimie ont permis
de préciser les caractéristiques structurales de ces cellules ; les
techniques d’isolement, de culture et de biologie cellulaire et
moléculaire ont fait avancer les connaissances sur leur rôle
fonctionnel, permettant de mieux appréhender la physiologie du
sinusoïde.
1- Cellules sinusoïdales
:
* Cellules endothéliales sinusoïdales
:
Les CES forment la bordure continue mais fenestrée des sinusoïdes
hépatiques. Les fenestrations regroupées en tamis (sieve plates) ont
un diamètre de 105 à 110 nm et occupent 6 à 8% de la surface
endothéliale, favorisant ainsi les échanges entre la lumière
sinusoïdale et les hépatocytes.
Leur diamètre et leur nombre sont
variables et peuvent être modulés par divers agents chimiques
(nicotine, cytochalasine B…), par la composition de la matrice
extracellulaire sous-jacente ou par la pression de perfusion.
Ces variations modulent le passage de molécules volumineuses telles
que les lipoprotéines.
La porosité de la barrière endothéliale diffère
entre la région périportale et la région centrolobulaire (fenêtres plus
petites mais plus nombreuses en zone périportale).
La défenestration
des cellules endothéliales, accompagnée du dépôt d’une membrane
basale continue (capillarisation du sinusoïde), se voit lors du
développement de la fibrose hépatique, quelle qu’en soit la cause
(agents toxiques comme l’éthanol notamment).
Identification
La distinction des cellules endothéliales des autres cellules
sinusoïdales repose essentiellement sur des données
d’ultrastructure et d’immunohistochimie.
Les
cellules endothéliales sont des cellules aplaties dont seul le noyau
bombe dans la lumière sinusoïdale. Leur cytoplasme est divisé en
deux parties :
– le corps cellulaire, épais et non fenestré, contenant le noyau, les
mitochondries, des vésicules de pinocytose et un REG en faible
quantité ;
– de fins et longs prolongements fenestrés.
Les marqueurs immunohistochimiques habituels des cellules
endothéliales vasculaires (facteur von Willebrand, CD 31, CD 34,
Ulex, BNH9…) sont négatifs au niveau des CES dans le foie humain
normal, mais ils peuvent être détectés en situation pathologique lors
du processus de capillarisation.
Par ailleurs, les CES expriment les
récepteurs CD 4, CD 13, CD 14, CD 16, le récepteur pour la liposaccharide-binding-protein, les récepteurs II et III du fragment Fc
des immunoglobulines G ; elles expriment également un répertoire
limité d’intégrines et de molécules intervenant dans l’adhésion des
leucocytes à l’endothélium (P-sélectine, E-sélectine, VCAM-1
[vascular cell adhesion molecule]) ; elles n’expriment pas les molécules
d’adhésion intercellulaire PECAM-1 [platelet endothelial cell adhesion
molecule] et CD 34.
De plus, il existe une hétérogénéité zonale d’expression de ces
marqueurs dans le lobule hépatique, en faveur de l’existence de sous-populations de CES.
Propriétés physiologiques
Les propriétés d’endocytose sont reflétées par la présence de
nombreuses vésicules d’endocytose dans le cytoplasme des CES.
Ces
cellules jouent un rôle important de scavenger pour différentes
macromolécules, souvent par le biais d’une endocytose médiée par
récepteur.
Les CES interviennent dans la synthèse de matrice extracellulaire
(production de collagène IV, fibronectine et collagène III), dans la
production de médiateurs de l’inflammation (interleukines 1 et 6,
eicosanoïdes dont les prostacyclines et la prostaglandine E2) et de
vasorégulateurs tels que le monoxyde d’azote (NO), grâce à la
présence d’une NO-synthase dont la fonction est altérée dans le foie
fibreux, ce qui pourrait contribuer à l’hypertension portale.
Interactions cellulaires
Interaction avec les cellules sanguines lors de l’inflammation : le
recrutement de leucocytes lors de phénomènes inflammatoires
comporte une phase d’adhésion aux cellules endothéliales, puis une
phase d’extravasation.
Les CES participent à ce phénomène en sécrétant des cytokines activant les leucocytes, et en exprimant des
protéines membranaires favorisant l’adhésion des cellules
circulantes, parmi lesquelles CD 2, neural cell adhesion molecule,
VCAM-1, ICAM-1, ICAM-2 et ICAM-3 (intercellular adhesion
molecule).
Interaction avec les cellules tumorales : la fréquence des métastases
tumorales dans le foie pourrait être favorisée par l’expression, par
les CES, de molécules d’adhésion reconnues par les cellules
tumorales telles que VCAM-1 ou la E-sélectine.
* Cellules de Kupffer
:
Ce sont des cellules macrophagiques mobiles, attachées à la cellule
endothéliale ou participant parfois, en partie, à la formation de la
barrière sinusoïdale.
Elles représentent de 80 à 90 % de la population macrophagique fixe de l’organisme.
En microscopie électronique,
leur surface est irrégulière, avec de nombreux prolongements
cytoplasmiques recouverts d’une couche feutrée (fuzzy coat), que l’on peut
retrouver invaginés dans le cytoplasme. Leur
cytoplasme contient de nombreux lysosomes et phagosomes, un
réticulum endoplasmique développé, un appareil de Golgi complexe
et des vésicules de sécrétion.
Les cellules de Kupffer ont une demivie
longue et leur nombre augmente au cours des phénomènes
inflammatoires.
Il semble qu’elles soient capables de se multiplier
sur place dans le foie. Cependant, dans certaines conditions, elles
pourraient être recrutées à partir de progéniteurs médullaires.
+ Marqueurs immunohistochimiques
:
Les cellules de Kupffer chez le rat sont identifiées à l’aide des
anticorps monoclonaux ED1 et ED2 ; des études in vivo et in vitro
ont permis de caractériser deux sous-populations : une population
ED1+ et ED2+, de grande taille, et une population ED1+ et ED2-, de
petite taille.
Dans le foie humain, elles sont facilement mises en
évidence, comme tous les macrophages, sur coupe tissulaire, par
l’anticorps anti-CD 68 (KP1).
+ Principales fonctions
:
Les cellules de Kupffer interviennent dans les fonctions
immunitaires par leur propriété de phagocytose d’agents infectieux et de cellules tumorales.
Elles participent aussi à la réponse
inflammatoire par la synthèse de cytokines, d’eicosanoïdes et de
dérivés réactifs de l’oxygène.
Il existe vraisemblablement différentes populations de cellules de Kupffer : celles de la région périportale, plus grosses, sont plus
actives dans les processus de la phagocytose et celles de la région
centrolobulaire, plus petites, interviendraient plus dans la
production de cytokines et les processus de cytotoxicité.
– Endocytose : les cellules de Kupffer sont les premiers macrophages
entrant en contact avec les substances étrangères potentiellement
nocives provenant du tube digestif. Leur fonction de phagocytose
s’exerce sur les virus, les bactéries, les protozoaires et leurs
constituants.
Ces cellules jouent un rôle primordial dans l’immunité,
en présentant les antigènes aux lymphocytes.
– Sécrétion de cytokines : le tumor necrosis factor (TNF) a, les
interleukines 1 et 6, l’interféron a et d sont produits par les cellules
de Kupffer, qui interviennent ainsi dans les processus
inflammatoires.
Par la production de transforming growth factor
(TGF) b, elles participent au développement de la fibrose hépatique.
– Sécrétion d’eicosanoïdes et de dérivés réactifs de l’oxygène : après
stimulation par un corps étranger, les cellules de Kupffer produisent
des dérivés réactifs de l’oxygène (ion superoxyde), diverses
prostaglandines et du thromboxane.
– Interaction des cellules de Kupffer avec les cellules tumorales : les
cellules de Kupffer auraient une action tumoricide in vitro sur des
cellules d’adénocarcinome colique.
In vivo, chez le rat, le traitement
par des inhibiteurs des fonctions des cellules de Kupffer
(gadolinium) favorise la croissance tumorale de métastases, alors
que les stimulateurs de leur activité réduisent la croissance des
tumeurs.
Ces cellules renforcent donc l’activité antitumorale.
* Cellules étoilées du foie
:
Initialement découvertes par von Kupffer en 1876, ces cellules ont
été définitivement décrites par Ito en 1968 (cellules de Ito).
Situées
dans l’espace de Disse (cellules périsinusoïdales), elles ont un rôle
dans le stockage des graisses et de la vitamine A (lipocytes, fatstoring
cell), dans la synthèse de la matrice extracellulaire et dans la
régulation du flux sanguin sinusoïdal (péricytes).
Ces variations
dans la nomenclature prêtent à confusion et actuellement
l’unanimité se fait autour de la dénomination « cellule étoilée du
foie » (hepatic stellate cell), terme descriptif ne préjugeant pas des
propriétés de ces cellules.
+ Morphologie et identification des cellules étoilées du foie
:
Les CEF (cinq CEF pour 100 hépatocytes) sont situées sous la
barrière endothéliale.
Elles sont caractérisées par l’existence de longs
et fins prolongements cytoplasmiques assurant une fonction de
soutien et de communication entre cellules épithéliales (hépatocytes)
et mésenchymateuses (cellules sinusoïdales).
Si la technique d’identification de référence reste la microscopie
électronique, il est également possible de mettre les CEF en évidence
sur des coupes semi-fines par leur situation sous-endothéliale et leur
contenu en lipides.
Leur identification en microscopie optique dans
le foie humain normal est difficile : mise en évidence de la vitamine
A (coloration à l’or, autofluorescence).
Les CEF se modifient après activation : elles perdent leur contenu
lipidique et prennent un phénotype myofibroblastique, caractérisé
notamment par la néoexpression de l’isoforme de type musculaire
lisse de l’a-actine.
D’autres marqueurs ont été proposés, mais sont
encore controversés, comme la glial fibrillary acidic protein et la
NCAM exprimées par les CEF activées, ou l’épimorphine, qui
pourrait intervenir dans le processus de régénération hépatique.
+ Principales fonctions
:
– Rôle dans le métabolisme de la vitamine A : les CEF sont le site
majeur de stockage de la vitamine A dans l’organisme.
Elles sont
capables d’internaliser le complexe retinol-retinol binding protein par un mécanisme d’endocytose médiée par un récepteur.
Le rétinol
peut être libéré par les CEF et capté par les hépatocytes avant d’être
remis en circulation.
Au cours de leur activation, les CEF sont
déplétées en vitamine A par un mécanisme encore inconnu.
– Rôle dans la vasomotricité : les CEF contribuent au contrôle du
tonus vasomoteur, par leur localisation et leur capacité contractile
en réponse à divers agents (thromboxane A2, prostaglandine F2,
substance P, endothéline-1).
L’endothéline-1 est surexprimée dans
les foies fibreux où elle est produite essentiellement par les CEF, qui
augmentent ainsi de façon autocrine leur contraction et pourraient
participer à la constitution de l’hypertension portale.
Les CEF
synthétisent cependant aussi du NO, vasodilatateur, à demi-vie
courte (de 5 à 30 secondes).
La synthèse de vasodilatateurs et de
vasoconstricteurs laisse supposer que les CEF sont capables de
réguler précisément la vasomotricité sinusoïdale.
– Rôle dans le dépôt de matrice extracellulaire : les CEF jouent un
rôle central dans le dépôt matriciel, en sécrétant les composants
et en modulant la dégradation de la matrice.
À l’état quiescent,
ces cellules sont impliquées dans la synthèse de la matrice
normale ; sous leur forme activée, elles modifient leur synthèse
de protéines et participent activement à la constitution de la
fibrose.
– Synthèse des composants matriciels.
Les CEF quiescentes
synthétisent les constituants normaux de la matrice extracellulaire
périsinusoïdale.
Après activation, elles modifient
leur répertoire de synthèse et expriment en grande quantité les
collagènes fibrillaires de type I et III, ainsi que le collagène de
type VI, la production de collagène de type IV et de laminine restant stable, voire diminuée.
Outre les collagènes fibrillaires, les CEF activées augmentent leur synthèse de la plupart des autres
composants matriciels.
– Intervention dans la dégradation matricielle.
La dégradation
matricielle est la résultante d’un équilibre complexe entre
l’expression des enzymes dégradant la matrice (matrix
metalloproteinases [MMP]) et de leurs inhibiteurs (tissue inhibitors
of metalloproteinases [TIMP]).
À la phase initiale d’une lésion
hépatique, la surexpression de métalloprotéases (MMP-1, MMP-2)
par les CEF permet la dégradation de la matrice sinusoïdale
normale, avec pour conséquence une rupture des interactions
cellule-matrice normales, préalable nécessaire à la constitution
d’une fibrose hépatique.
À un stade plus avancé de fibrose, la
dégradation de la matrice est inhibée par la production de TIMP-1
et TIMP-2, alors que la production de MMP par les CEF diminue.
– Recrutement, prolifération et activation des cellules étoilées du foie au
cours des processus de fibrose.
Ces phénomènes ont été
particulièrement bien étudiés dans les modèles expérimentaux tels
que l’administration de tétrachlorure de carbone chez le rat. Les
foyers d’inflammation sont infiltrés par les cellules de Kupffer, les
macrophages et les plaquettes.
Ces cellules synthétisent des facteurs
solubles conduisant au recrutement des CEF, à leur prolifération
(platelet derived growth factor [PDGF], endothéline-1) et à leur
transformation en myofibroblastes synthétisant par le biais de
cytokines (TGFb, TNFa) des protéines matricielles en excès. Le stress
oxydatif dans les foyers inflammatoires stimule aussi la prolifération
et l’activation des CEF par le biais de radicaux libres.
Les CEF activées expriment le système apoptotique majeur Fas/Fas-ligand.
Les CEF activées qui interviennent dans la réparation des lésions
hépatiques pourraient ainsi entrer en apoptose dès la fin du
processus de cicatrisation. Un déséquilibre entre recrutement des
CEF et apoptose pourrait intervenir dans la fibrogenèse hépatique.
* Lymphocytes associés du foie (LAF)
:
Ce sont des cellules d’origine circulante, en contact dans la lumière
du sinusoïde, via des molécules d’adhésion, avec les CES et/ou avec
les cellules de Kupffer.
Par rapport aux lymphocytes du sang
périphérique, les LAF présentent un rapport CD 4/CD 8 plus bas et
un pourcentage très élevé de cellules natural killers (CD 56+) (30 %).
En microscopie électronique, parmi les LAF on distingue les grands
lymphocytes granulaires et d’autres cellules contenant des granules
qui pourraient être des cellules CD 8+ cytotoxiques.
La
reconnaissance des granules a entraîné la dénomination, encore
utilisée, de cellules à granules (pit cells).
Les LAF ont une très forte activité cytotoxique et jouent
probablement un rôle important dans la défense antitumorale et
antivirale.
2- Physiologie du sinusoïde
:
Le sinusoïde (dont le diamètre moyen est de 4 μm dans la zone
portale, de 5 à 6 μm dans la zone centrolobulaire) est le lieu
d’échange entre le sang circulant et les hépatocytes.
Ces échanges
dépendent en grande partie de la taille et du nombre des
fenestrations endothéliales, dont la surface représente de 6 à 8% de
la surface endothéliale.
Les microvillosités de la membrane
sinusoïdale des hépatocytes augmentent considérablement les
échanges (par un facteur de 100).
Le transport à travers les fenêtres
serait un transport actif.
En effet, les éléments circulants du sang, en
fonction de leur taille et de leur possibilité à se déformer dans les
sinusoïdes, vont être responsables :
– d’une filtration forcée (c’est le fait des globules rouges,
déformables qui, en déprimant la paroi sinusoïdale, facilitent le
passage des molécules vers l’espace de Disse) ;
– d’un « massage endothélial » (c’est le fait des globules blancs, peu
déformables : reflux de l’espace de Disse vers la lumière sinusoïdale
en aval et aspiration, en sens inverse, en amont).
Les éléments figurés du sang sont plus gros que les sinusoïdes de la
zone périportale.
Par ailleurs, dans cette zone, les sinusoïdes sont
tortueux et la circulation y est irrégulière ; cette anatomie particulière
faciliterait les échanges.
Dans la zone centrolobulaire,
les sinusoïdes sont plus larges et plus rectilignes, mais les
échanges seraient favorisés par la plus grande taille des fenêtres.
Système biliaire :
A - CANALICULES BILIAIRES
:
Ils constituent la plus petite unité de l’arbre biliaire, le premier
segment excréteur de la bile sécrétée par les hépatocytes.
Leur
diamètre, de 0,5 à 1,5 μm, augmente de la zone centrolobulaire à la
zone périportale du lobule.
Ils sont situés entre les parois latérales
de deux ou plus rarement plusieurs hépatocytes et présentent des
microvillosités membranaires faisant saillie dans leur lumière ; ils
n’ont pas de paroi propre.
Cette zone, appelée membrane canaliculaire ou pôle biliaire de l’hépatocyte, délimite l’espace
canaliculaire.
Les tight junctions (ou zonula occludens) limitent les
canalicules ; les techniques de cryofracture ont montré qu’elles sont
constituées de plusieurs rangées de membranes adjacentes
fusionnées.
Cette jonction est perméable à l’eau et aux petites
molécules.
Le cytoplasme hépatocytaire péricanaliculaire est densifié par des
microfilaments qui pénètrent dans les microvillosités et s’insèrent
sur les desmosomes des membranes latérales, près du canalicule.
Ces microfilaments sont constitués d’actine, identique à celle des
cellules musculaires, expliquant les propriétés contractiles des
canalicules, et jouant certainement un rôle dans la sécrétion biliaire.
Plusieurs activités enzymatiques peuvent être mises en évidence
(adénosine triphosphatase [ATPase], phosphatase alcaline),
dessinant sur des préparations histochimiques le réseau
canaliculaire.
L’activité ATPasique suggère que la sécrétion biliaire
requiert un processus énergétique.
La bile s’écoule dans les canalicules vers les espaces portes
terminaux, à la périphérie desquels elle traverse une structure
intermédiaire : le canal de Hering (canalicular-ductular junction).
B - CANAL DE HERING
:
Sa paroi est
constituée, d’une part par des hépatocytes, et d’autre part par des
cellules biliaires fusiformes, entourées d’une membrane basale.
Ces cellules biliaires du canal de Hering sont des
cellules particulières, ayant des caractéristiques de cellules
progénitrices ou cellules souches pluripotentes du foie, capables de
se différencier et de proliférer soit en hépatocytes, soit en cellules
biliaires.
Le canal de Hering pourrait être le premier site lésionnel
dans divers processus pathologiques.
Les canaux de Hering sont
colocalisés avec les veinules d’apport ; ils s’ouvrent dans les ductules
ou cholangioles.
C - DUCTULES
:
Ils ont un diamètre inférieur à 15 μm et sont bordés d’une couche
de deux à quatre cellules biliaires, cuboïdes, reposant sur une
membrane basale et présentant des microvillosités et parfois des cils
à leur pôle luminal.
Les ductules sont entourés de fibres de
collagène.
D - CANAUX BILIAIRES INTERLOBULAIRES
:
Les ductules se drainent dans les canaux biliaires interlobulaires des
espaces portes.
Leur diamètre, inférieur à 100 μm, augmente avec la
taille de l’espace porte (de 15 à 20 μm pour les plus petits) ; ce
diamètre est voisin de celui de l’artériole qui l’accompagne.
Leur
paroi est constituée d’une couche de cellules épithéliales étroitement
accolées les unes aux autres par des desmosomes.
Ils sont entourés
d’une membrane basale et leur paroi est renforcée par un tissu
fibreux contenant des fibres élastiques.
Les canaux biliaires septaux sont formés par la confluence des canaux
biliaires interlobulaires ; leur diamètre est supérieur à 100 μm et leur
revêtement devient cylindrique.
Les canaux segmentaires ont un diamètre compris entre 400 et
800 μm ; ils sont entourés d’un tissu fibreux élastique et leur
confluence donne les canaux hépatiques droit et gauche.
Les ductules et les canaux biliaires représentent un réseau de plus
de 2 km de long dans le foie adulte.
En dehors de son rôle de voie
excrétrice, l’arbre biliaire a d’importantes fonctions de sécrétion et
d’absorption.
Les cellules biliaires jouent un rôle dans la composition de la bile en
modifiant le contenu en eau et en bicarbonates.
Elles sont perméables à certains solutés hydrophiles, et il a été récemment
proposé l’existence d’un shunt biliohépatique pour des sels biliaires
mono- et déhydroxylés.
Par ailleurs, des protéines passent de la
circulation sanguine ou lymphatique dans la bile à travers
l’épithélium biliaire.
Cette circulation de la bile vers le sang ou du
sang vers la bile est facilitée par des dispositions anatomiques
particulières :
– un plexus de capillaires sanguins et lymphatiques entoure une
grande partie de la surface basale des ductules ;
– ces capillaires ont souvent un endothélium fenestré (avec un
diaphragme) ;
– de nombreuses vésicules sont observées le long de la membrane
plasmique au pôle basal des cellules endothéliales vasculaires.
L’arbre biliaire intrahépatique est très richement vascularisé par un
plexus uniquement artériel issu de l’artère hépatique ; ceci explique
les conséquences graves pour l’arbre biliaire d’une lésion de l’artère
hépatique.
Les glandes péribiliaires, localisées autour des grosses voies biliaires
intrahépatiques, sont des structures intra- et extramurales, sécrétant
des mucines neutres et acides déversées dans la lumière de la voie
biliaire ; ces glandes pourraient intervenir dans la fonction biliaire
normale et être impliquées dans divers processus pathologiques.
E - CANAUX BILIAIRES EXTRAHÉPATIQUES
:
Les canaux hépatiques droit et gauche, situés dans la plaque hilaire,
leur convergence, le canal hépatique commun, et le cholédoque
forment la voie biliaire principale sur laquelle est branchée en
dérivation la voie biliaire accessoire (vésicule biliaire et canal
cystique).
Les canaux ont un calibre inférieur à 15 mm ; leur paroi est mince
(de 0,5 à 1 mm), constituée d’une muqueuse faite de cellules
cylindriques, reposant sur un tissu conjonctif lâche riche en fibres
élastiques et contenant quelques petites glandes séromuqueuses,
d’une musculeuse et d’une adventice.
Quel que soit le niveau de l’arbre biliaire, les cellules biliaires ont un
cytosquelette abondant, différent de celui des hépatocytes ; elles
expriment notamment les cytokératines 7 et 19.
Matrice extracellulaire
:
Elle est située dans les espaces portes, en continuité avec le tissu
conjonctif de la capsule de Glisson, dans l’espace de Disse périsinusoïdal et, en faible quantité, autour des veines
centrolobulaires.
L’espace de Disse, qui représente de 2 à 4% du parenchyme
hépatique, est compris entre la membrane sinusoïdale de
l’hépatocyte et la barrière CES/CEF.
Les différents constituants de la matrice extracellulaire forment un
réseau complexe, qui joue non seulement un rôle structural, mais
surtout un rôle physiologique majeur dans le maintien de
l’homéostasie des cellules hépatiques.
A - COMPOSANTS DE LA MATRICE EXTRACELLULAIRE
:
Collagènes, protéoglycanes
et glycoprotéines sont les grandes familles de constituants de la
matrice extracellulaire, dont la
répartition varie selon le site (espace porte, veine centrolobulaire,
espace de Disse).
1- Collagènes
:
Ils sont constitués par trois chaînes a reliées en triple hélice (il est
décrit plus de 16 types en fonction de la structure primaire des
chaînes a et de leur association en homo- ou hétérotrimère).
Les
chaînes sont formées par la répétition Gly-x-y (x et y étant des acides
aminés variables, souvent proline et lysine).
Collagènes interstitiels : les collagènes de types I et III sont abondants
et de structure fibrillaire ; ils représentent 80 % du collagène
hépatique. Ils sont situés essentiellement dans la capsule de Glisson
et dans les espaces portes, et présents en faible quantité dans
l’espace de Disse.
Le collagène de type V est également un collagène
fibrillaire situé près des membranes basales, dans l’intima artérielle,
mais est absent le long des sinusoïdes.
En faible quantité dans le
foie normal, il pourrait former la partie centrale des fibres de
collagène interstitiel de types I et III.
Le collagène de type VI est un
composant non fibrillaire, ubiquitaire, servant d’ancrage aux
différents éléments de la matrice.
Il forme un réseau avec les
collagènes de type I et de type III.
Le collagène de
type IV, non fibrillaire, forme de fins dépôts discontinus dans
l’espace de Disse.
Il est un des
composants de la membrane basale des vaisseaux, des capillaires et
des canaux biliaires.
2- Protéoglycanes
:
Ils sont formés par un squelette protéique et des chaînes de
glycosaminoglycanes.
Ils sont organisés en agrégats
macromoléculaires reliés par des molécules d’acide hyaluronique.
Présents dans la matrice interstitielle, ils jouent un rôle dans
l’adhésion, la migration, la prolifération et la différenciation
cellulaire.
Ils peuvent en effet interagir avec les cellules, facteurs de
croissance, collagènes et glycoprotéines, par l’intermédiaire de leur
squelette axial.
Les protéoglycanes de la matrice extracellulaire
hépatique sont en majorité le biglycan, la décorine et le perlecan ;
on trouve d’autres glycoaminoglycanes (héparan, dermatan et
chondroïtine sulfates).
3- Glycoprotéines
:
Elles jouent un rôle à la fois structural et fonctionnel.
Elles sont
essentiellement réprésentées par deux molécules : la laminine
(capable de se lier avec le collagène de type IV, les héparan sulfates,
l’entactine et des récepteurs des cellules endothéliales et épithéliales)
et la fibronectine qui intervient dans l’adhésion cellulaire aux
collagènes, à la fibrine et à l’héparine.
Localisées dans l’espace de
Disse, elles jouent un rôle essentiel dans l’organisation de la matrice
extracellulaire et dans l’adhésion des cellules à la matrice.
Les autres glycoprotéines matricielles sont :
– l’entactine (nidogène), polypeptide formant un complexe avec la
laminine, qui module la liaison cellulaire à la laminine ;
– la vitronectine, molécule d’adhésion codistribuée avec la
fibronectine ;
– l’élastine, située dans la paroi des vaisseaux portes et centrolobulaires, qui est formée de molécules superenroulées
permettant la constitution d’un réseau tridimensionnel ;
– la ténascine qui, détectée dans les tissus jeunes ou en cicatrisation,
intervient dans la migration des cellules et dans l’organisation de la
matrice ; elle possède des propriétés antiadhésives ;
– la thrombospondine, qui facilite prolifération, migration et adhésion
cellulaire ; elle interagit avec les collagènes, la fibronectine, la
laminine, le plasminogène et des cytokines telles que le TGFb1.
– l’ostéonectine, qui est une glycoprotéine essentiellement retrouvée
dans les tissus en remodelage ; elle est capable de bloquer le cycle
cellulaire des cellules endothéliales et d’interagir avec diverses
cytokines dont le PDGF, bFGF (Fibroblast Growth Factor) et le TGFb1.
B - ORIGINE CELLULAIRE DES COMPOSANTS
DE LA MATRICE EXTRACELLULAIRE :
Toutes les cellules du foie interviennent à différents degrés dans la
synthèse de la matrice.
Néanmoins, les CEF sont les principales
cellules impliquées, capables de produire l’ensemble des composants
matriciels ainsi que les enzymes modulant leur turnover : MPP et
TIMPS.
C - INTERACTIONS CELLULES-MATRICE EXTRACELLULAIRE
:
Les interactions entre cellules et matrice sont essentielles au maintien
de l’homéostasie cellulaire.
En effet, chaque composant matriciel
possède la capacité de moduler la croissance cellulaire, la migration
cellulaire et l’expression de gènes directement (par le biais de
plaques d’adhésion focale et des intégrines) ou indirectement, en
liant des facteurs de croissance et des cytokines sous forme active
ou inactive.
– Il est actuellement bien établi que toute modification de la
composition de la matrice intervient dans l’activation des CEF.
– Les composants matriciels peuvent agir en modulant l’activité de
facteurs de croissance : en les stockant, en les protégeant ou en
modulant leur accès aux récepteurs cellulaires.
L’interaction du TGF
b1 avec la décorine, protéoglycane synthétisé par les CEF, est un
bon exemple d’interaction.
La fixation du TGF b1 sur son récepteur
cellulaire est favorisée par sa liaison préalable au bétaglycan, un
protéoglycane transmembranaire. La décorine, par inhibition
compétitive de la liaison bétaglycan-TGF b1, limite l’activité du
peptide.
Le TGF b1 stimule la production de décorine par les
myofibroblastes, rétrocontrôlant ainsi négativement son activité.
– Les cellules entrent en contact avec les composants matriciels par
des récepteurs de la famille des intégrines, molécules dimériques
formées de deux chaînes a et b.
L’interaction entre le ligand et
l’intégrine module l’organisation du cytosquelette, et génère la
production de signaux vers le milieu intracellulaire.
Les interactions
entre composants matriciels et intégrines sont modifiées au cours de
la fibrose, ainsi que le répertoire des intégrines exprimées par les
différentes cellules hépatiques.
L’expression des intégrines a été
étudiée sur des CEF humaines en culture.
Les chaînes a1, b1 et a5
sont exprimées dans les cellules quiescentes et activées.
L’association
a1b1 est un récepteur pour le collagène et la laminine, et le complexe
a5b1 est le récepteur classique de la fibronectine.
Les CEF expriment
aussi a6b4, un hétérodimère médiant l’adhésion des cellules
épithéliales à la laminine.
Les chaînes a2 (liaison avec collagène et laminine) n’apparaissent qu’après activation des CEF, tandis que
l’expression des chaînes a4 (fibronectine et VCAM-1) et av
(vitronectine) est majorée.
Ces modifications de l’expression des intégrines pourraient jouer un rôle crucial dans l’activation des CEF,
en modulant les interactions entre la matrice et les cellules.
Il apparaît donc que les interactions entre cellules et matrice
constituent un édifice extrêmement complexe et fragile, où chaque
constituant joue un rôle capital.
La bonne connaissance de ces
interactions devrait ouvrir des perspectives thérapeutiques dans des
pathologies telles que la fibrose hépatique ou l’oncogenèse.
Cellules souches. Renouvellement
cellulaire :
Le renouvellement cellulaire hépatocytaire et biliaire dans le foie
normal ou dans des conditions pathologiques est réalisé à partir de
trois compartiments :
– les hépatocytes et les cellules biliaires peuvent se diviser et donner
respectivement des cellules filles de même différenciation ;
– les cellules bordant les canaux de Hering ou cellules souches
peuvent entrer en division asymétrique et donner, outre une cellule
fille souche identique à la cellule mère, une cellule fille qui entrera
en processus de différenciation hépatocytaire ou biliaire ;
– des cellules souches d’origine médullaire peuvent coloniser le foie
par voie sanguine ; dans le foie, ces cellules peuvent se différencier
en hépatocytes ou en cellules biliaires.
Conclusion
:
Le foie est un organe volumineux qui assure de nombreuses fonctions
essentielles pour l’organisme : sécrétion biliaire, synthèse et
métabolismes de très nombreuses substances, fonctions
immunologiques etc.
Macroscopiquement homogène, il présente à
l’échelon microscopique une organisation cellulaire et matricielle
complexe.
Son architecture vasculaire et biliaire rend compte de son
hétérogénéité fonctionnelle.
À ces caractéristiques histophysiologiques, il faut ajouter des
caractéristiques physiopathologiques liées aux premières : le foie
maintient une masse fonctionnelle constante par des mécanismes
d’adaptation fonctionnelle et de régénération ; toutes les lésions
chroniques du foie aboutissent à une cirrhose, caractérisée par une
distorsion de l’architecture vasculaire qui se moule dans un tissu
fibrotique épais, entourant des nodules parenchymateux.