Gastrectomies pour lésions bénignes Cours de Chirurgie
Gastrectomies partielles typiques
:
À ce jour, la principale indication chirurgicale de réalisation d’une
gastrectomie pour lésion bénigne est le traitement radical de la
maladie ulcéreuse compliquée ou résistante au traitement médical.
Toutefois, la vulgarisation de la vagotomie dans un premier temps
, puis l’apparition des traitements médicamenteux radicaux
agissant de façon efficace sur la pathologie ulcéreuse chez la majorité
des patients ont rendu la réalisation de gastrectomies moins
courante : moins de 1 % des interventions pour ulcère bénéficient
d’une antrectomie.
L’indication chirurgicale est alors retenue chez
les patients ne répondant pas au traitement médical et ceux ayant
une mauvaise observance médicamenteuse à long terme.
La
plupart des autres indications de gastrectomie sont les pathologies
bénignes, léiomyomes, lipomes, de rares pathologies telles que la gastroparésie.
Toutefois, les tumeurs bénignes sont le plus
souvent traitées par une résection atypique et, en général
aujourd’hui, par une voie vidéoscopique (laparoscopie, coelioscopie
transgastrique ou voie combinée endoscopie-laparoscopie).
Pour les mêmes raisons, les explorations chirurgicales de l’estomac
et du duodénum sont devenues exceptionnelles en raison des possibilités et de la qualité actuelle des explorations endoscopiques
et radiologiques, et ne méritent plus de faire l’objet d’un chapitre
complet de technique chirurgicale.
Nous sommes amenés, dans ce chapitre, à décrire principalement
les techniques des gastrectomies encore régulièrement réalisées, en
ne citant pour mémoire que brièvement les autres techniques.
Le geste chirurgical le plus classique reste la gastrectomie des deux
tiers.
La réalisation d’une exérèse plus limitée de l’estomac, telle
qu’une antrectomie, permet de conserver un volume gastrique plus
important.
Ce volume facilite par ailleurs le rétablissement de la
continuité par une anastomose gastroduodénale qui conserve un
circuit digestif plus physiologique qu’une anastomose gastrojéjunale.
Elle est toujours associée à une vagotomie.
La gastrectomie polaire supérieure enlève la moitié supérieure de
l’estomac.
Décrite en 1952 par Deloyers, elle devait théoriquement
« supprimer » la sécrétion acide. Une meilleure connaissance de la
physiologie et les traitements médicaux modernes ont rendu cette
intervention caduque.
La résection du cardia et de la grosse
tubérosité peuvent aujourd’hui faire appel à une technique de type tubulisation gastrique basse avec anastomose oesophagienne
intra-abdominale.
Les gastrectomies totales pour lésion bénigne sont exceptionnelles
et entrent le plus souvent dans le cadre de la chirurgie d’urgence
(hémorragie non contrôlée, nécrose par brûlure caustique).
Elles
ne sont pas décrites dans ce chapitre. Le lecteur doit se reporter aux
techniques de gastrectomie totale pour lésions cancéreuses.
A - DÉFINITIONS
:
Les gastrectomies partielles, habituellement réservées aux lésions
bénignes, consistent en l’ablation d’un secteur gastrique déterminé.
Il s’agit rarement du secteur polaire supérieur.
Il s’agit en général
d’un secteur inférieur, l’antre ou les deux tiers de la poche gastrique.
À l’inverse, les gastrectomies atypiques réalisent l’ablation à
l’emporte-pièce d’un fragment non défini anatomiquement de la
paroi gastrique.
Lors de la réalisation d’une gastrectomie polaire inférieure, la limite
droite de l’exérèse est située en aval du pylore, à la partie initiale du
premier duodénum, 1 cm à gauche de l’artère gastroduodénale.
Cette limite marque la frontière entre le duodénum mobile et le
duodénum fixe.
1- Gastrectomie des deux tiers
:
La tranche de section gastrique de la gastrectomie des deux tiers est
limitée par une ligne oblique allant d’un point situé à deux travers
de doigt en dessous du cardia sur la petite courbure au niveau de la
partie terminale de l’artère gastrique gauche, jusqu’au niveau des
premiers vaisseaux courts sur la zone avasculaire de la grande courbure.
2- Antrectomie
:
L’antrectomie réalise une section plus économique de l’estomac.
La
ligne de section gastrique est plus horizontale.
Elle part d’un point
situé un travers de doigt au-dessus de l’angulus, jonction des parties
horizontale et verticale de la petite courbure.
Elle se termine sur la
grande courbure au niveau d’un point situé à la partie médiane de
l’arcade gastroépiploïque.
Sur le plan technique, il n’y a
pratiquement aucune modification entre les deux techniques en
dehors d’une dissection plus limitée de la grande courbure.
Le rétablissement de continuité est assuré selon deux modalités
distinctes en fonction des choix des opérateurs et des considérations
anatomiques locales constatées en peropératoire.
Le rétablissement
peut faire appel :
– à une anastomose gastroduodénale, manuelle ou mécanique, qui
rétablit le circuit digestif normal, encore appelée Billroth I ou Péan ;
– ou une anastomose gastrojéjunale qui réunit le moignon restant
de l’estomac à la première anse jéjunale, encore appelée Billroth II.
Là encore, l’anastomose est manuelle ou mécanique ;
– dans le cadre des anastomoses gastrojéjunales, il faut distinguer
les rétablissements selon Polya, historiquement anastomose à
bouche totale, des rétablissements selon Finsterer, anastomose à
bouche partielle.
Par extension, et depuis l’avènement des sutures
mécaniques réalisant des anastomoses habituellement à bouche
partielle, cette distinction n’est plus toujours respectée.
Nous décrivons ci-après la technique de la gastrectomie des deux tiers en
précisant, chaque fois que cela est nécessaire, les particularités de
l’antrectomie.
La description de la technique opératoire suit les principes généraux
de l’intervention qui sont :
– installation du patient et voie d’abord ;
– mobilisation et libération de la grande courbure ;
– mobilisation et section du duodénum ;
– mobilisation et libération de la petite courbure ;
– section de l’estomac ;
– rétablissement de la continuité.
B - INSTALLATION DU PATIENT ET VOIE D’ABORD
:
L’intervention est menée sous anesthésie générale, le patient en
décubitus dorsal.
Une antibioprophylaxie est systématiquement
utilisée. Une sonde nasogastrique permet de vider totalement
l’estomac.
Un billot, gonflable de préférence, ou une cassure de la
table au niveau de la pointe des omoplates du patient permettent
une meilleure exposition.
On n’oublie pas de supprimer cet artifice
lors de la fermeture pariétale.
Le chirurgien se place à la droite du
patient, son (ou ses) aide(s) en face de lui.
L’instrumentiste se place
en face du chirurgien, à la gauche de l’assistant.
L’incision est une médiane allant de la xiphoïde à l’ombilic.
La partie
haute de l’incision dégage largement l’appendice xiphoïde pour
donner un jour suffisant à la portion haute de l’estomac.
La partie
inférieure de l’incision déborde légèrement l’ombilic vers la gauche
si le patient est pléthorique.
L’incision préserve le ligament
rond pour faciliter l’exposition.
Certaines équipes préfèrent une voie
d’abord horizontale (bi-sous-costale), mais nous n’y voyons aucun
avantage particulier.
Une protection pariétale par une jupette en plastique est
habituellement mise en place et un écarteur pariétal de type Gosset
maintient l’exposition du champ opératoire.
Il est dans la plupart
des cas inutile de réaliser une traction supérieure sous-costale.
Une
exploration rapide de la cavité abdominale est réalisée.
C - MOBILISATION ET LIBÉRATION
DE LA GRANDE COURBURE
:
Ce temps réalise la libération de la face postérieure de l’estomac qui
représente la clef de la gastrectomie polaire inférieure.
Le premier
geste consiste en la traction vers le haut du corps de l’estomac.
Celui-ci est saisi par l’aide avec une compresse pour éviter qu’il ne
glisse ou à l’aide d’une ou deux pinces de Babcock.
Le côlon
transverse est laissé à la partie inférieure du champ opératoire et
l’épiploon est légèrement soulevé afin de tendre les vaisseaux
l’unissant à l’estomac.
Nous préférons réaliser une dissection
passant entre la paroi gastrique et les vaisseaux gastroépiploïques
afin de les préserver, même si leur utilité pour vasculariser
l’épiploon n’est pas primordiale.
À l’inverse, s’il est envisagé de
réaliser un rétablissement de la continuité avec passage d’une anse précolique, il est parfois nécessaire de procéder à une omentectomie.
Dans ce cas, l’épiploon est enlevé en monobloc avec l’estomac.
La grande courbure est dévascularisée de proche en proche, avec
ligature élective de tous les vaisseaux unissant l’épiploon à
l’estomac.
Chaque paquet artérioveineux doit être lié de manière
sélective.
La ligature peut être réalisée indifféremment à l’aide
de points résorbables, notre préférence, mais également non
résorbables, de clips, ou à l’aide d’une pince automatique appliquant
deux agrafes et sectionnant au centre (pince LDS, Autosuture-Tyco).
Cette dissection est menée de la partie moyenne de
l’estomac vers la gauche, jusqu’à la fin de l’arcade gastroépiploïque,
avec ligature de l’artère gastroépiploïque gauche au contact de
l’estomac.
Pour la réalisation d’une antrectomie simple, cette
dissection est plus limitée, s’arrêtant à la partie moyenne de l’arcade
gastroépiploïque.
Il est ici impératif de conserver l’arcade vasculaire,
alimentée par l’artère gastroépiploïque gauche, qui participe à la
vascularisation du corps de l’estomac.
Ce temps permet d’aborder l’arrière-cavité des épiploons qui est
libérée en effondrant les quelques adhérences postérieures unissant
l’estomac au pancréas.
Ces adhérences prédominent à droite.
Elles
sont idéalement disséquées au bistouri électrique, ce qui permet de
coaguler les quelques rameaux vasculaires qui y cheminent.
La
dissection est alors poursuivie vers la droite jusqu’au niveau du
pylore.
D - MOBILISATION ET SECTION DU DUODÉNUM
:
Les adhérences postérieures du pylore, constantes, sont dégagées de
proche en proche avec hémostase par coagulation ou ligatures des
petits pédicules vasculaires.
Cette dissection bénéficie de l’usage d’un bistouri à argon qui assure l’hémostase sans multiplier les
petites ligatures d’un fin lacis veineux.
La veine gastroépiploïque
droite, rejoignant le tronc gastrocolique (tronc de Henle) doit
souvent être liée à ce moment, mais la dissection se poursuit à ras
du pylore afin de pouvoir préserver l’artère gastroépiploïque droite.
L’estomac doit alors être basculé vers le bas pour exposer le
petit épiploon.
La pars flaccida, élément avasculaire du petit
épiploon, est alors ouverte de haut en bas jusqu’au pylore.
Il est
alors possible de passer la main gauche en arrière du pylore pour
l’exposer.
Cette préhension assure à la fois la présentation du pylore
qui permet de disséquer et de lier l’artère gastrique droite (artère
pylorique) au contact du pylore et la protection, en arrière, de
l’artère hépatique.
Il est à ce moment possible de terminer la dissection du duodénum
mobile en liant ou coagulant un ou deux petits vaisseaux supraduodénaux.
L’artère gastroduodénale marque la limite droite
de la dissection de la première portion du duodénum.
Ceci réalise
une mobilisation duodénale complète qui doit être
systématiquement réalisée quel que soit le mode de rétablissement
de la continuité choisi.
La section duodénale est réalisée à ce moment, ce qui permet de
relever l’estomac pour le basculer vers le haut afin d’exposer sa face
postérieure pour les temps suivants.
La section doit emporter 2 à
4 cm de duodénum et rester à gauche de l’artère gastroduodénale.
Il
faut conserver environ 1 cm de duodénum mobile afin de pouvoir
traiter correctement la tranche duodénale.
Quelle que soit l’option
choisie pour le rétablissement de la continuité, il est possible de
réaliser cette section à l’aide d’un bistouri, la tranche pouvant être
suturée, ou à l’aide de pinces automatiques réalisant l’agrafage du
moignon.
L’opérateur place au préalable une compresse abdominale
en arrière du duodénum afin de protéger le champ opératoire.
La
sonde gastrique doit être retirée afin de ne pas se retrouver prise
dans la tranche de section.
Selon la modalité de rétablissement
choisie, le traitement de la tranche diffère. Nous envisageons
successivement deux cas de figure.
1- Anastomose gastrojéjunale :
fermeture immédiate du moignon duodénal
L’utilisation des pinces automatiques a considérablement simplifié
et amélioré le contrôle du moignon duodénal.
En effet, la multiplicité
des techniques décrites dans la littérature pour cette fermeture rend
compte du risque élevé de fistule postopératoire de cette suture.
La
solution qui nous semble aujourd’hui la plus simple, la plus rapide
et la plus sûre, est d’utiliser une pince à agrafage et section linéaire
(type GIA, Autosuture-Tyco ; ou TLC, Ethicon, 55 mm, chargeur
bleu), qui est à même d’assurer l’hémostase, l’étanchéité et la section
du duodénum sans ouverture de l’organe et donc sans
contamination du champ opératoire, tant pour ce temps que pour la
durée du reste de la libération de l’estomac.
La pince à
agrafage et suture linéaire ne présentant que deux rangées d’agrafes,
un surjet complémentaire doit être effectué afin d’enfouir les rangées
d’agrafes du moignon.
La section peut également être réalisée à l’aide d’une agrafeuse
linéaire sans section (type TA, Autosuture-Tyco ; ou TX, Ethicon,
55 mm, chargeur bleu) qui assure la fermeture du moignon
duodénal en un temps.
Appliquant trois rangées d’agrafes, elle ne
nécessite pas de surjet complémentaire du côté duodénal.
Elle
n’assure pas la section des tissus et l’occlusion gastrique.
Un clamp
est alors placé au niveau de l’estomac avant section pour éviter une
contamination du champ opératoire.
Toutefois, ce clamp peut gêner
les manoeuvres d’exposition et nous ne privilégions pas cette
technique.
Enfin, une section duodénale avec suture entièrement manuelle est
réalisable en l’absence de disponibilité de matériel de suture
mécanique.
Deux clamps droits rigides sont placés de part et d’autre
de la zone de section.
La section duodénale est effectuée aux ciseaux
droits ou à l’aide d’un bistouri, manuel ou électrique (position
coupe).
Une fermeture par points séparés ou par surjet extramuqueux est réalisée.
La plupart des auteurs effectuent alors
un second plan d’enfouissement par une seconde rangée de points
ou par la réalisation d’une bourse d’enfouissement.
Ce plan d’enfouissement nécessite une longueur de 2,5 cm de paroi
duodénale, longueur supérieure à celle requise pour appliquer une
agrafeuse.
Certains auteurs ont prôné l’adjonction de colle
biologique au contact de la suture du moignon, mais les résultats
n’objectivent pas de réduction significative du taux de fistule
postopératoire.
Ce taux, bien que faible, de l’ordre de 4,5 %,
reste une complication grave de cette chirurgie.
* Prise en charge des duodénums difficiles
:
La disponibilité des systèmes d’agrafage mécanique et la relative
rareté des indications tendent à faire oublier les difficultés pouvant
être liées à la dissection du duodénum.
Une maladie ulcéreuse
chronique ou aiguë peut avoir totalement remanié la région
pylorique et rendre la dissection et le contrôle du duodénum
difficiles.
En effet, l’évolution du processus ulcéreux en arrière du
duodénum intéresse le bloc duodénopancréatique, c’est-à-dire le
pancréas, le cholédoque et le canal de Santorini.
Le processus de
sclérose périulcéreux fait disparaître le plan de clivage entre le
duodénum et le cholédoque et explique la possibilité de lésion de la
voie biliaire pendant la dissection.
L’opacification de la papille et du
cholédoque par la vésicule, la canulation du cholédoque sont des
artifices théoriquement efficaces mais en réalité de réalisation
difficile en raison de l’état inflammatoire local.
La dissection
progressive du duodénum, dont le but est de réséquer en totalité
l’ulcère, peut en outre léser le pancréas, le canal de Santorini et être
responsable d’une fistule pancréatique.
Pour cette raison, il nous
semble aujourd’hui préférable de laisser l’ulcère en place et de
réaliser une fermeture duodénale protégée.
Plusieurs cas de figure peuvent se présenter.
Si l’état du duodénum
ou la longueur de duodénum sain disponible ne permet pas
d’appliquer une pince à agrafage linéaire, le duodénum doit être
suturé sans dissection, car celle-ci peut se révéler très laborieuse et
entraîner une déchirure de la paroi sans possibilité de résection de
l’ulcère.
Il est alors préférable de laisser l’ulcère en place et de
suturer le duodénum par des points séparés.
Le duodénum est
suturé transversalement si une longueur suffisante est disponible
pour réaliser deux plans.
Si le bord postérieur n’est pas dissécable
en raison de l’ulcère et de sa réaction inflammatoire au contact du
pancréas et si ses bords supérieurs et inférieurs sont de qualité
satisfaisante, la suture est faite par des points séparés dans le sens
longitudinal, ce qui prévient le risque de passage d’un point dans le
pancréas, dans le canal de Santorini ou dans le cholédoque.
Si
aucune suture de qualité n’est réalisable, le geste le plus simple est
de réaliser une duodénostomie, ou fistule dirigée sur sonde.
Après
libération et section du duodénum, une sonde en caoutchouc, sonde multiperforée ou sonde de Pezzer, est introduite dans la lumière du
moignon duodénal sur 3 à 4 cm.
Une bourse ou des points ferment
le moignon autour de la sonde.
La sonde est extériorisée
dans le flanc droit par un trajet aussi direct que possible, et est
doublée par une lame de drainage.
Cette duodénostomie ramène
300 à 600 mL de liquide par jour.
Elle est maintenue pendant 8 à 15
jours, puis est progressivement retirée.
Le trajet se ferme
spontanément dans la majorité des cas.
2- Anastomose gastroduodénale
:
La réalisation d’une anastomose gastroduodénale impose la
conservation d’un moignon duodénal de bonne qualité et la
possibilité d’affronter les deux segments digestifs, estomac et
duodénum sans tension.
Afin de gagner un peu de longueur et
avant de réaliser l’anastomose, il convient de décoller le bloc duodénopancréatique de ses attaches postérieures.
La dissection
débute par une incision du péritoine en regard du deuxième
duodénum.
Le décollement en arrière du duodénum et du pancréas
et en avant de la veine cave est réalisé sous contrôle direct de la vue
avec coagulation progressive de tous les petits vaisseaux rencontrés.
Cette dissection est préférable au décollement manuel réalisé à
l’aveugle et risquant d’entraîner un hématome de la loge rétropancréatique (manoeuvre de Kocher).
Il permet de « remonter »
le bloc duodénopancréatique de plusieurs centimètres et d’affronter
le duodénum et l’estomac.
Deux clamps droits rigides sont placés
de part et d’autre de la zone de section duodénale.
La section est
effectuée aux ciseaux droits ou à l’aide d’un bistouri, manuel ou
électrique (position coupe).
La tranche duodénale est laissée en
attente jusqu’à la réalisation de la suture.
On peut également
s’abstenir de la mise en place du clamp duodénal.
Le duodénum est
exposé et sectionné à l’aide d’un bistouri froid ou aux ciseaux.
Ceci
laisse plus d’étoffe sur le moignon et est moins traumatisant pour la
tranche duodénale.
La lumière duodénale est obturée à l’aide d’une compresse bétadinée pendant la dissection finale de l’estomac.
Il est
encore possible d’utiliser une pince automatique d’agrafage linéaire
(type GIA, ou TLC).
Celle-ci est placée 1 cm en amont de la zone
retenue pour l’anastomose.
Le fragment comportant les agrafes est
recoupé au dernier moment pour la réalisation de l’anastomose.
Cette méthode présente l’avantage de réaliser toute la dissection de
l’estomac à pièce « fermée », mais fait perdre environ 1 cm de paroi
duodénale pour l’anastomose.
Enfin, certains auteurs proposent la
réalisation de l’anastomose gastroduodénale à l’aide d’une pince à
agrafage circulaire (de type PCEEA, Autosuture-Tyco ou CDH,
Ethicon).
Le moignon duodénal est alors coupé après mise en place
d’une pince à bourse.
Celle-ci permet le positionnement de
l’enclume de pince à anastomose circulaire.
Certains auteurs proposent de réaliser une anastomose préservant
le pylore et l’innervation vague.
Cette technique diminuerait les
séquelles fonctionnelles de la gastrectomie.
Elle n’est toutefois pas
de pratique courante.
E - MOBILISATION ET LIBÉRATION
DE LA PETITE COURBURE :
Cette dernière étape de la mobilisation gastrique impose d’écarter le
lobe gauche du foie.
Une valve récline le lobe hépatique gauche vers
le haut et la droite.
L’assistant peut alors relever la partie distale de
l’estomac vers le haut et la gauche de façon à exposer l’origine de
l’artère gastrique gauche.
Celle-ci est liée peu après son arrivée sur
la petite courbure, avec ligature successive de ses branches
antérieures et postérieures.
Cette ligature effectuée à
proximité de l’estomac préserve une branche collatérale du tronc
coeliaque à destinée du foie : l’artère hépatique gauche accessoire
qui peut être dominante ainsi que l’artère cardiotubérositaire qui
vascularise le cardia.
Après section des branches de l’artère gastrique gauche, un fil repère
est placé sur la paroi de l’estomac : il représente le point de départ
de la ligne de section d’une gastrectomie des deux tiers.
Pour une antrectomie, l’artère gastrique gauche est préservée au contact de
l’estomac.
La dissection de la petite courbure est effectuée à
l’angulus, zone quasi avasculaire.
F - SECTION DE L’ESTOMAC
:
Les modalités de section de l’estomac ne dépendent pas de la
procédure choisie pour effectuer le rétablissement de la continuité.
En effet, l’usage des systèmes d’agrafage automatique est
aujourd’hui la solution qui doit être considérée comme la plus
simple, rapide et efficace.
La section utilisant l’agrafage linéaire est
employée aussi bien dans l’optique d’une anastomose selon Péan
que pour une anastomose selon Polya.
Un second fil repère est placé
à la partie gauche de la ligne de section.
Pour une gastrectomie des
deux tiers, la partie gauche de la ligne de section se situe sur la
grande courbure, au niveau des premiers vaisseaux courts.
Pour la réalisation d’une antrectomie, la ligne de section gastrique
se termine sur la grande courbure à la partie terminale de l’artère gastroépiploïque droite.
La sonde gastrique est retirée au
ras de l’oesophage.
Au niveau de la petite courbure, l’artère
gastrique gauche est liée 2 cm plus haut sur la petite courbure pour
la réalisation d’une gastrectomie des deux tiers que pour la
réalisation d’une antrectomie.
Après mise en place d’une compresse
abdominale protectrice sur le pancréas, sous la zone de section, une
agrafeuse de type linéaire de 90 mm, agrafes vertes, est appliquée et
fermée.
Elle réalise un agrafage à trois rangées d’agrafes.
En
cas de longueur insuffisante de l’agrafeuse, il est possible d’utiliser
des chargeurs supplémentaires pour terminer l’agrafage.
Un clamp
droit est placé sous la ligne d’agrafes et l’estomac est sectionné au
ras de l’agrafeuse.
La pince est retirée et un surjet d’hémostase
complémentaire, sans enfouissement, est réalisé.
Cette technique
réalise ainsi une résection gastrique sans ouverture de pièce
opératoire dans le champ opératoire, limitant au maximum le risque
de contamination septique.
Certains auteurs proposent de laisser la
pince d’agrafage en place et de s’en servir pour présenter l’estomac
lors de la réalisation d’une anastomose gastrojéjunale.
Ce geste est
efficace mais risque de provoquer l’arrachement de quelques
vaisseaux et nous n’y avons habituellement pas recours.
En l’absence d’utilisation de pince à agrafage, une section manuelle
est réalisée.
Deux clamps digestifs sont placés de part et d’autre de
la ligne théorique de section.
Celle-ci est alors réalisée au bistouri
froid ou au bistouri électrique.
L’incision est menée dans les plans
séreux et musculaires, de façon à découvrir le plan sous-muqueux
richement vascularisé. Pas à pas, les vaisseaux sous-muqueux sont
liés par une suture résorbable fine, 3/0 ou 4/0.
Dans tous les cas,
l’hémostase de la tranche gastrique est vérifiée après la section.
La
tranche est refermée en deux plans au fil résorbable, par points
séparés ou par surjets.
Le premier plan est un plan extramuqueux,
invaginant, qui rapproche les berges et assure l’hémostase.
Le
second est un plan de solidité, séroséreux.
Cette fermeture est
partielle dans l’optique d’une anastomose selon Finsterer, ou totale
dans l’optique d’une anastomose postérieure selon Billroth.
G - RÉTABLISSEMENT DE LA CONTINUITÉ
:
Il existe deux grandes modalités de rétablissement de la continuité
digestive après gastrectomie partielle : les anastomoses gastroduodénales et les anastomoses gastrojéjunales.
Les deux
procédures, dont le principe est décrit depuis 1881, permettent
de rétablir la continuité digestive après résection gastrique.
Elles ont
leurs partisans et adversaires, chacune ayant ses contraintes et
particularités. Les durées opératoires des deux techniques sont
comparables.
Aucun avantage déterminant en faveur de l’une ou
de l’autre technique ne ressort de la littérature en termes de
survenue tardive de cancer sur le moignon gastrique, sur les
métabolismes calcique et hormonal, sur les hémorragies, le reflux
ou la sécrétion de cholécystokinine, toutes complications
secondaires aux gastrectomies.
Pour notre part, nous réalisons de
façon préférentielle une anastomose selon Polya.
Les deux
techniques sont présentées successivement.
1- Rétablissement de la continuité par une anastomose gastroduodénale (selon Péan ou Billroth I)
:
L’anastomose gastroduodénale selon Péan est une anastomose
terminoterminale, entre la partie distale de l’estomac restant et le
duodénum.
Il est impératif que le duodénum soit sain, bien
vascularisé et que la suture puisse être réalisée sans tension.
Ce
procédé a comme avantage principal d’être simple, rapide et facile à
réaliser.
Il rétablit le circuit digestif physiologique.
À l’inverse, la
localisation même de l’anastomose rend une fistule à ce niveau
particulièrement grave, empêchant toute réalimentation.
La
réalisation d’un rétablissement selon Péan ne devrait être proposée
le plus souvent qu’après antrectomie.
En raison du risque de
persistance de cellules sécrétantes dans la partie restante de
l’estomac, il est impératif d’associer ce geste à une vagotomie
tronculaire.
La suture manuelle est notre méthode de choix dans cette indication.
En effet, les sutures mécaniques n’apportent pas ici de bénéfice et
risquent de léser un duodénum fragile ou court et de compromettre
sa vascularisation.
La suture est réalisée avec du fil résorbable, à
résorption lente, décimale 2 ou décimale 3.
Il est également possible
d’utiliser des fils monofilaments (Maxon ou PDS) dans les mêmes
décimales.
L’anastomose se fait entre la partie gauche de l’estomac et le
duodénum.
L’ouverture de l’estomac est exécutée d’une taille
équivalente au diamètre du duodénum.
Si une agrafeuse mécanique
a été préalablement utilisée sur l’estomac, la zone agrafée est
sectionnée jusqu’à obtention d’une ouverture d’un diamètre
correspondant au diamètre du duodénum.
Si la section de l’estomac
a été réalisée au bistouri, sa fermeture est effectuée sur une longueur
préservant une ouverture de même diamètre.
Ainsi, on se trouve en
présence d’une raquette, dont le cadre est anastomosé à la recoupe
duodénale.
Un champ est placé en arrière de la zone anastomotique
pour protéger le pancréas.
La suture à points séparés a notre faveur.
Le plan postérieur est réalisé en premier. Deux points d’angles sont
passés et mis sur pincette en attente.
Ils délimitent les plans
antérieur et postérieur.
Le plan postérieur est réalisé en premier.
Les
fils sont passés dans l’estomac de dedans en dehors, puis dans le
duodénum de dehors en dedans.
Ils sont ensuite mis en attente sur
des pinces fines.
Lorsque tous les points du plan postérieur sont
passés, ils sont noués après rapprochement de l’estomac et du
duodénum, les noeuds étant en intraluminal.
Une dizaine de
points est nécessaire pour réaliser ce plan postérieur.
Il est alors
possible d’effectuer le plan antérieur.
Les points sont passés dans
l’estomac de dehors en dedans, puis dans le duodénum de dedans
en dehors, toujours en extramuqueux.
Ces points peuvent être noués
immédiatement, car il n’y a pas de problème d’exposition.
L’angle supérieur de l’anastomose, correspondant à la jonction du
manche et du cadre de la raquette, doit être minutieusement enfoui
afin de prévenir toute fistule à ce niveau.
Idéalement, il faut réaliser
un point en « U » d’enfouissement.
Pendant tout le temps de la
suture, l’assistant tient à proximité de l’anastomose un aspirateur
pour éviter de souiller le champ opératoire.
À la fin de la suture, la
sonde nasogastrique est mise en place sous contrôle digital en regard
de l’anastomose. Un drainage réalisé par un Redon ou par une lame
de Delbet est placé en regard de l’anastomose.
La sonde nasogastrique est maintenue en aspiration douce pour une durée de
2 à 5 jours, puis retirée et l’alimentation est reprise, après un éventuel contrôle de l’anastomose par un transit oesogastroduodénal
à la Gastrografinet.
La lame est retirée après mobilisation le
cinquième jour postopératoire.
* Variantes
:
Une variante propose de réaliser une anastomose gastroduodénale
terminoterminale sur toute la tranche (opération de von Haberer).
Elle nécessite un large décollement duodénopancréatique pour
affronter les berges.
Sans avantage notable, elle est à ce jour peu
pratiquée.
Les autres variantes proposent l’utilisation de pinces mécaniques
pour la confection de l’anastomose.
+ Agrafage par agrafeuse circulaire
:
L’utilisation d’une pince à agrafage circulaire est une alternative qui
ne semble pas apporter de bénéfice significatif pour le patient.
Elle
est plus facilement effectuée lors de la réalisation d’une antrectomie,
où le tissu gastrique disponible est plus important.
L’anastomose se
fait à la face postérieure du moignon gastrique. Comme
décrit précédemment, le moignon duodénal est sectionné après mise
en place d’une pince à bourse.
L’enclume d’une pince à
anastomose circulaire est placée dans le duodénum et la bourse est
serrée.
La mise en place de l’enclume de la pince à
anastomose circulaire impose un long segment de duodénum
disponible, situation rarement obtenue dans la chirurgie de l’ulcère.
L’une des extrémités de la rangée d’agrafes de section de l’estomac
est ouverte et une pince circulaire est introduite dans la lumière
gastrique.
L’axe de la pince circulaire perfore la face postérieure de
l’estomac et après encliquetage de l’enclume, l’anastomose est
effectuée.
L’orifice d’introduction est refermé par une application
d’agrafes par une pince linéaire.
Il existe, par ce procédé, un risque
de pincement postérieur du cholédoque ou risque pour la papille.
Nous ne recommandons pas ce procédé.
+ Variante
:
Il est possible d’effectuer cette anastomose avant section de
l’estomac.
L’antre est conservé ; la pince à agrafage est introduite
par le pylore.
La pince perfore comme décrit ci-dessus la
face postérieure de l’estomac, puis la suture est réalisée
entre l’estomac et le duodénum.
La résection gastrique est
alors effectuée après la confection de l’anastomose par application
d’agrafes par une pince automatique TAt 90.
2- Rétablissement de la continuité par une anastomose gastrojéjunale (selon Billroth II)
:
Ce type de rétablissement est privilégié lorsque le rétablissement
selon Péan risque d’entraîner une tension de l’anastomose.
Bien
entendu, le chirurgien respecte la règle selon laquelle l’exérèse
gastrique doit être menée sans préjuger du type de rétablissement
de continuité.
Le principal avantage de cette anastomose est qu’elle
est toujours réalisable.
Elle n’a quasiment aucun inconvénient, en
dehors du fait de réaliser un geste en sous-mésocolique.
Elle est
rapide et donne de bons résultats fonctionnels.
Pour cette raison,
nous privilégions ce mode de rétablissement de la continuité.
Les
techniques décrites dans la littérature font état de plusieurs petites
différences de présentation et d’anastomose.
Toutefois, les grands
principes sont toujours les mêmes et permettent d’obtenir des
anastomoses satisfaisantes.
L’anastomose respecte, dans la mesure du possible, certains
principes :
– l’anastomose peut être réalisée manuellement ou par agrafage
mécanique. Nous préférons l’agrafage mécanique malgré un surcoût
lié au matériel ;
– l’anastomose est latérolatérale, entre la face postérieure de
l’estomac et la première anse jéjunale ;
– l’anse jéjunale servant à l’anastomose est courte, entre 20 et 40 cm,
pour respecter la physiologie du circuit digestif ;
– l’anastomose est anisopéristaltique, c’est-à-dire que l’anse afférente
est placée du côté de la petite courbure de l’estomac.
Ainsi, les
sécrétions biliopancréatiques arrivent au niveau de la petite
courbure, et l’estomac s’évacue par son point le plus déclive, au
niveau de la grande courbure ;
– l’anastomose est sous-mésocolique, pour éviter une sténose de
l’anse au travers du passage du mésocôlon.
Les temps de réalisation de l’anastomose sont les suivants :
l’estomac a été réséqué, agrafé à l’aide d’une pince à agrafage
linéaire de 90 mm.
Deux fils repères ont été placés de part et d’autre
de l’estomac.
Le côlon transverse est soulevé et extériorisé par l’aide.
Un assistant place l’éclairage à contre-jour afin de repérer une zone avasculaire dans le mésocôlon, située entre l’arcade de Riolan et la
racine du mésocôlon.
L’opérateur peut réaliser alors une brèche
verticale de 5 à 7 cm dans la racine du mésocôlon transverse.
La
zone anastomotique sur l’estomac est repérée dans l’arrière-cavité
des épiploons et sa partie déclive est abaissée au travers de la
brèche.
La première anse grêle est identifiée et la zone d’anastomose
choisie.
Elle vient sans tension se placer au contact de l’estomac.
Le
côlon est basculé vers le haut et maintenu par l’aide.
L’estomac est
présenté à l’aide de pinces de Babcock, placées sur la ligne
d’agrafage, sous la brèche mésocolique.
La lèvre postérieure de la
brèche mésocolique est d’emblée suturée à la face postérieure de
l’estomac, à environ 4 cm de la ligne d’agrafes afin de ménager
suffisamment de tissu pour réaliser l’anastomose.
La fixation de la
lèvre postérieure de la brèche doit se faire à ce moment, car il n’y a
plus d’accès à cet endroit après la suture du grêle à l’estomac.
* Anastomose mécanique selon Finsterer
:
Une incision de 1 cm est réalisée dans la paroi gastrique et dans
l’anse grêle, en regard l’une de l’autre.
Les deux mors d’une
agrafeuse à anastomose et section (GIA ou TLC) sont introduits
par ces orifices et une anastomose latérolatérale est effectuée.
La pince est retirée et l’anastomose est brièvement éversée
pour s’assurer de l’absence de saignement sur les tranches de
section.
L’orifice d’introduction est alors refermé, soit par des points
séparés de suture résorbable, soit par une agrafeuse linéaire
de 55 mm placée en triangulation.
Notre choix est habituellement
de fermer cet orifice par quelques points séparés.
Enfin, la lèvre
antérieure de la brèche mésocolique est refermée en avant de
l’anastomose sur l’estomac.
Ainsi, l’estomac peut remonter mais
l’anastomose reste sous-mésocolique.
* Anastomose manuelle
:
Bien entendu, cette anastomose est réalisable de façon classique, par
une suture manuelle.
L’anastomose peut être réalisée sur toute la
largeur de la section de l’estomac (technique de Polya), soit sur une
partie de celle-ci (technique de Finsterer).
Le principe technique reste
le même, la différence essentielle réside en la réalisation d’une
raquette comme décrit précédemment en cas de réalisation d’une
anastomose partielle.
Nous décrivons l’anastomose la plus longue,
sans raquette, et en variation les particularités de l’anastomose
partielle.
L’estomac est totalement disséqué, la zone de section repérée, mais
l’estomac non sectionné.
Après réalisation et suture de la berge
postérieure de la brèche mésocolique, l’anse grêle est présentée au
contact de l’estomac.
Un premier surjet séromusculaire solidarise
l’anse grêle et l’estomac. Pendant sa réalisation, l’estomac et l’anse
grêle restent fermés. Les deux extrémités du surjet sont présentées
tendues.
Le grêle et l’estomac sont ouverts de part et d’autre de ce
surjet d’adossement.
Un second surjet réalisé au fil résorbable
décimale 3 est réalisé de la petite à la grande courbure, à points
totaux : c’est un surjet d’hémostase.
La section de l’estomac est alors
complétée. Un premier surjet à points totaux est à nouveau réalisé
entre l’estomac et le bord antérieur du grêle.
La suture est achevée
par la réalisation d’un second surjet antérieur, séroséreux.
L’anastomose est placée en position sous-mésocolique par la
réalisation de la suture du mésocôlon à la face antérieure de
l’estomac.
Variante : ce type d’anastomose peut également être réalisé à la face
postérieure de l’estomac.
Après section de l’estomac par une
agrafeuse linéaire de 90 mm, la face postérieure de l’estomac est
présentée en regard du grêle comme pour l’anastomose mécanique.
La suture latérolatérale est alors réalisée en quatre plans.
Cette anastomose n’est habituellement pas drainée.
Une sonde
gastrique peut être passée au travers de l’anastomose et maintenue
quelques jours jusqu’à reprise du transit.
* Variantes
:
De nombreuses variantes de cette anastomose sont retrouvées dans
la littérature.
Pour notre part, nous nous en tenons à l’anastomose
mécanique sous-mésocolique anisopéristaltique.
On cite pour mémoire :
– les anastomoses isopéristaltiques ;
– les anastomoses réalisées en précolique, qui nécessitent parfois la
réalisation d’une omentectomie complémentaire.
Ces anastomoses entrent souvent dans le cadre d’interventions palliatives, lorsque
l’arrière-cavité des épiploons est inaccessible ;
– les anastomoses sur anse en « Y », qui sont en général réservées
aux diversions duodénales totales ;
– les anastomoses réalisées sur la face antérieure de l’estomac,
moins fonctionnelles, parfois utilisées dans des exérèses de propreté
hors du cadre des gastrectomies pour lésions bénignes ;
– l’anastomose selon Finsterer : elle est également réalisée en sousmésocolique.
Sa principale variation par rapport à l’anastomose
selon Polya est sa longueur.
Si l’anastomose selon Polya est une
anastomose à bouche totale, effectuée sur la quasi-totalité de la
tranche gastrique, l’anastomose selon Finsterer est à bouche partielle, réalisée
sur la partie gauche de la tranche de section gastrique.
La tranche de section gastrique est partiellement fermée
par des points séparés à partir de la petite courbure, réalisant ainsi
une raquette, comparable à celle réalisée pour une anastomose selon
Péan.
Ce qui caractérise l’anastomose selon Finsterer est l’accolement
de l’intestin grêle au « manche » de la raquette gastrique, ce qui
créerait une coudure s’opposant au reflux biliaire dans l’estomac.
Pour cela, trois ou quatre points sont passés et noués, chargeant
successivement la face antérieure puis postérieure de l’estomac et
l’intestin grêle.
L’anastomose entre la première anse
jéjunale et le moignon gastrique distal est ensuite réalisée selon les
mêmes étapes que l’anastomose selon Polya : adossement du
péritoine sous-mésocolique à la face postérieure de l’estomac ;
réalisation du plan postérieur entre l’extrémité de la raquette
gastrique et l’anse jéjunale ; ouverture du jéjunum ; réalisation du plan antérieur ; adossement du mésocôlon à la face
antérieure de l’estomac.
Cette technique est aujourd’hui délaissée
au profit des anastomoses postérieures à bouche totale, mécaniques,
qui sont rapides et sûres.
* Évolution
:
Ce type d’anastomose (Polya ou Billroth II) est particulièrement sûr
et les désunions anastomotiques sont exceptionnelles.
Après
anastomose mécanique, on peut observer des chutes d’escarre avec
méléna et éventuellement anémie transitoire.
Parfois, il peut être
nécessaire de réintervenir pour compléter l’hémostase d’une tranche
de section.
H - CONCLUSION
:
Les gastrectomies pour pathologies bénignes sont devenues rares,
leur utilité étant même mise en doute pour certains auteurs.
Elles restent toutefois d’actualité dans la pathologie ulcéreuse,
surtout dans les régions où le coût et la disponibilité du traitement
médical restent aléatoires.
Leurs indications doivent être mesurées
en fonction des troubles fonctionnels marquant la vie de ces
patients, en particulier le dumping syndrome.
Gastrectomies atypiques
:
La qualité des bilans d’imagerie (examens échographiques,
tomodensitométriques et imagerie par résonance magnétique) ainsi
que les progrès de la fibroscopie ont permis d’accroître la mise en
évidence de tumeurs bénignes.
Devant ce diagnostic se pose le
problème d’une éventuelle indication opératoire pour en réaliser
l’exérèse.
L’absence de diagnostic histologique exact, les risques
éventuels de dégénérescence, la répétition des examens de
surveillance et l’inquiétude des patients ou des médecins traitants
amènent ces patients à décider l’ablation de leur lésion.
Celle-ci est alors réalisée par résections gastriques partielles ou, souvent,
atypiques. Les gastrectomies atypiques sont des gastrectomies qui
ne suivent pas de repères stricts.
Elles ont pour but de réséquer des
tumeurs avec une marge de sécurité minimale et suffisante, en
préservant au maximum le réservoir gastrique. Habituellement, elles
préservent au moins une des deux courbures gastriques afin de
respecter la vascularisation de l’estomac.
Les procédés anciennement
décrits (procédé de Wangensteen, 1940) réséquant la grande
courbure, ou la réalisation de tubulisations gastriques pour
oesophagoplastie réalisant, par agrafage, la résection de la petite
courbure, permettent l’ablation de la plupart des lésions gastriques.
Il est admis que l’estomac accepte toute forme de résection atypique.
Ces méthodes ont ouvert la voie à de nombreuses formes de
résections partielles.
Tout au plus faut-il respecter certaines règles,
comme la réalisation d’une pyloroplastie en cas de sacrifice des nerfs
vagues, afin de prévenir un trouble de la vidange gastrique pouvant
entraîner un lâchage précoce des sutures.
L’utilisation des agrafeuses
linéaires a rendu ces résections partielles rapides et sûres.
L’avènement de la chirurgie mini-invasive laparoscopique,
éventuellement associée à une endoscopie haute permet
aujourd’hui de procéder à de multiples gestes de façon miniinvasive.
Depuis 1991, de nombreuses publications rapportent des
exérèses laparoscopiques et nous traitons ces aspects dans un
chapitre spécifique.
Nous limitons ce chapitre aux principales techniques, simples, qui
permettent de procéder à l’ablation de toute tumeur de l’estomac.
En effet, la gastrectomie polaire inférieure (antrectomie et
gastrectomie des deux tiers) permet de procéder à l’ablation des
tumeurs inférieures.
Nous décrivons ci-après une technique simple
de résection partielle de la partie supérieure de l’estomac, ainsi que
les techniques de résection cunéiformes.
1- Gastrectomie supérieure
:
La résection de la partie supérieure de l’estomac fait classiquement
appel à la technique de gastrectomie polaire supérieure.
Nous
préférons réaliser, dans cette indication, l’équivalent d’un geste de tubulisation gastrique.
Celui-ci permet de procéder à la résection de
la petite courbure et de la partie supérieure de la grosse tubérosité
de l’estomac.
Il reprend exactement les principes de
l’oesophagectomie selon Santi-Lewis, sans oesophagectomie associée
et donc sans temps thoracique.
Dans un premier temps, l’estomac est libéré de ses attaches au
niveau de la grosse tubérosité.
L’arcade gastroépiploïque constituée
des artères gastroépiploïques droite et gauche est conservée au
contact de l’estomac car elle assure sa vascularisation.
La
mobilisation de la grosse tubérosité est poursuivie jusqu’au contact
du bord gauche de l’oesophage en liant tous les vaisseaux courts de
la rate.
L’estomac est mobilisé sur sa face postérieure vers le haut.
L’artère gastrique gauche est libérée et liée à son origine.
La
dissection se termine par la mobilisation de l’oesophage abdominal.
La petite courbure de l’estomac est réséquée par applications
successives d’agrafes par plusieurs chargeurs d’une pince à
anastomose et section linéaire (de type GIA ou TLC) : la première
rangée d’agrafes débute 3 à 4 cmen avant du pylore et la réalisation
d’un tube est poursuivie jusqu’à la partie moyenne de la grosse
tubérosité.
L’agrafage doit emporter la lésion bénigne, mais le tube
n’a pas besoin de monter dans le thorax et peut rester court.
Les agrafes sont enfouies par un surjet. L’oesophage intra-abdominal
est sectionné sur une bourse. L’enclume d’une pince à agrafage
circulaire est introduite et nouée.
Une anastomose gastrooesophagienne
est réalisée par la pince à anastomose circulaire avant
ablation de la pièce opératoire par application d’une agrafeuse
linéaire (TAt 55 ou TX) puis section de la pièce opératoire.
Une pyloroplastie complète le geste en raison du risque de trouble de
vidange gastrique.
Les indications de ces gestes pour lésions bénignes sont
exceptionnelles.
Le principal inconvénient de cette reconstruction est
de laisser l’oesophage à proximité du duodénum après suppression
du pylore, avec un risque de reflux biliaire et une possible
oesophagite peptique.
Pour cette raison, les indications de ces
procédures sont discutées.
Dans les reconstructions pour cancer, il
n’est le plus souvent pas indiqué de conserver la grosse tubérosité
et des montages incluant des systèmes de prévention du reflux
(interposition iléocæcale, résection avec conservation pylorique) sont
proposés (voir gastrectomies pour cancer).
2- Résection atypique par agrafage
:
Il est admis que toute forme de résection cunéiforme, réalisée par
une ou plusieurs applications d’agrafeuses linéaires, permet de
réaliser l’exérèse d’une partie de la paroi gastrique.
La
lésion peut éventuellement être repérée au cours de l’intervention
par endoscopie, de façon à préserver au maximum la vascularisation
de la paroi gastrique.
Les seules règles qui guident ces résections
sont une conservation d’au moins un pédicule vasculaire de bonne
qualité sur l’estomac.
Les indications de ce type de résections restent
rares.
En fait, ces techniques ont trouvé des indications privilégiées
en chirurgie mini-invasive.
Dans ces techniques, l’absence de
palpation impose de repérer les lésions par d’autres moyens
(endoscopie peropératoire, gastroscopie coelioscopique
transpariétale).
Conclusion
:
Les gastrectomies pour lésions bénignes sont devenues rares. Les
indications liées à la maladie ulcéreuse sont exceptionnelles et les
tumeurs bénignes, qui représentent moins de 2 % des tumeurs
gastriques, sont le plus souvent silencieuses.
Les progrès diagnostiques
permettent parfois de les mettre en évidence et ce sont alors les moyens
et techniques mini-invasifs qui sont utilisés pour réaliser leur exérèse.
Les gastrectomies réglées pour lésions gastriques bénignes ont par
ailleurs largement bénéficié de l’apport des systèmes d’agrafage
automatiques, permettant la réalisation standardisée de résections
rapides et sûres.