L’exophtalmie ou protrusion du globe oculaire est définie
par un déplacement anormal du globe oculaire dans un
plan antéro-postérieur.
Par analogie, ce déplacement
peut siéger dans les trois plans de l’espace, sous forme
d’un déplacement horizontal ou d’un déplacement vertical.
On parle alors de dystopie oculaire dans un des trois
plans de l’espace.
Diagnostic
:
A - Diagnostic positif :
1- Aspect clinique :
De face, elle s’objective par la perte des rapports
normaux entre les paupières et l’oeil.
La paupière supérieure ne cache plus la partie supérieure
de la cornée.
La paupière inférieure n’affleure plus le limbe comme
normalement, découvrant ainsi la conjonctive.
De profil, l’exophtalmie est souvent plus apparente.
Elle se mesure à l’exophtalmomètre (type Hertel). Elle
est normalement o à 18 mm. Elle peut atteindre des
chiffres considérables (25 à 30 mm au Hertel).
2- Examens complémentaires :
Ils permettent d’affiner le diagnostic d’une exophtalmie,
d’en faire la mesure précise et d’orienter l’enquête
étiologique.
Parmi les techniques d’imagerie médicale,
on peut citer l’échographie, l’écho-doppler couleur, le
scanner et l’imagerie par résonance magnétique.
Un bilan biologique (T3, T4, TSH [thyroid stimulating
hormone], dosage d’anticorps…) peut compléter les
investigations en fonction de l’examen clinique et
radiologique.
• L’examen tomodensitométrique quantifie l’exophtalmie
en mesurant la protrusion du globe oculaire par rapport
à la ligne bi-canthale externe dans un plan axial nommé
plan neuro-oculaire passant par le cristallin et le canal
optique :
– grade I : plus des deux tiers de la longueur du globe
oculaire se projettent en avant de la ligne bi-canthale
externe ;
– grade II : la ligne bi-canthale externe passe à l’aplomb
du pôle postérieur du globe oculaire ;
– grade III : le globe oculaire est projeté en avant de la
ligne bi-canthale externe.
Combinée à une reconstruction en 3 dimensions, la
tomodensitométrie permet d’analyser les parois
osseuses de l’orbite.
C’est la méthode de référence pour
toute lésion osseuse, traumatique, congénitale, tumorale
mais aussi inflammatoire.
• L’imagerie par résonance magnétique permet une
bonne approche de la caractérisation tissulaire orbitaire,
supérieure aux possibilités du scanner.
• L’échographie doppler couleur est la superposition
d’une image en mode B et d’une image des flux vasculaires
par effet doppler.
Elle a comme principal avantage
d’être un examen dynamique en temps réel, donnant des
informations morphologiques et fonctionnelles (caractérisation
tissulaire et étude de la vascularisation).
B - Diagnostic différentiel : les fausses
exophtalmies
Il faut éliminer les fausses exophtalmies dues à :
• l’augmentation du volume de l’oeil comme on l’observe
au cours de la myopie forte, au cours des glaucomes
congénitaux évolués (buphtalmie) ;
• des malpositions palpébrales notamment des rétractions
palpébrales soit d’origine musculaire avec
asynergie oculo-palpébrale vers le bas, caractéristique
des orbitopathies dysthyroïdiennes mais aussi à
la suite de paralysie faciale voire de rétraction
cutanée consécutive à des brûlures palpébrales ou à
des traumatismes ;
• une énophtalmie unilatérale controlatérale qui
est la plupart du temps liée à des lésions des
parois de l’orbite : traumatisme, asymétrie faciale,
brèche osseuse, rarement syndrome de Claude
Bernard-Horner et encore plus rarement une cicatrisation
post-traumatique, post-radique ou postinflammatoire.
C - Approche diagnostique :
L’objectif de l’examen est de préciser par une excellente
étude clinique et radiologique les points suivants : caractère
de l’exophtalmie (uni- ou bilatéralité, réductibilité
ou non à la pression, topographie de l’exophtalmie dans
les 3 plans de l’espace à savoir exophtalmie dans un
plan antéro-postérieur, dystopie verticale ou dystopie
horizontale) mais aussi localisation, évolution, caractère
inflammatoire, retentissement fonctionnel et nature de
la lésion.
L’ensemble de ces informations, avec l’aide de l’imagerie
et, la plupart du temps, de l’histologie, peut préciser le
dernier point : quelle est la cause ?
1- Moyen de localisation :
La localisation de la lésion peut être évidente d’emblée,
surtout s’il s’agit d’une lésion très antérieure, unilatérale,
aiguë, sans signe inflammatoire associé.
Elle peut être
beaucoup plus difficile si la lésion est plus profonde,
bilatérale, chronique et masquée par une réaction
inflammatoire importante.
2- Évolution :
Une évolution extrêmement rapide en quelques heures
évoque une hémorragie dans une lésion préexistante,
une inflammation fulminante.
Une évolution plus lente,
mais rapidement progressive en quelques jours, évoque
un processus inflammatoire ou une néoplasie de haut
grade de malignité.
Une évolution insidieuse se voit
dans les tumeurs bénignes ou de bas grade ou dans les
inflammations à bas bruit.
Les variations dans le temps sont également contributives.
Certaines inflammations se traduisent par un
renforcement matinal de l’oedème palpébral, de
l’exophtalmie et de la diplopie, lié au décubitus.
Dans
les angiodysplasies veineuses (varice orbitaire), la
manoeuvre de Valsalva entraîne une hyperpression
dans les voies aériennes qui se transmet au système
veineux distensible entraînant une augmentation de
l’exophtalmie.
3- Caractère inflammatoire
:
L’inflammation est présente dans près de 60 % des
affections orbitaires.
L’exophtalmie s’accompagne alors
souvent d’un oedème palpébral, d’un chémosis et de
douleurs.
Trois types de réaction inflammatoire peuvent
être distingués.
• La réaction inflammatoire intense est dominée par
les cellulites orbitaires infectieuses, les inflammations
aiguës non spécifiques, les inflammations oculaires
aiguës et certaines néoplasies fulminantes (rhabdomyosarcome).
L’évolution est rapide en quelques jours.
• La réaction inflammatoire modérée se traduit par un
effet de masse, d’injection, des douleurs sourdes, une
baisse de la fonction visuelle.
La cause la plus fréquente
est l’orbitopathie dysthyroïdienne, les mycoses orbitaires,
les inflammations orbitaires non spécifiques,
certaines inflammations aiguës oculaires.
• La réaction inflammatoire à bas bruit présente une
évolution lente et insidieuse.
Cette dernière présentation
se rencontre essentiellement dans les syndromes lymphoprolifératifs,
l’orbitopathie dysthyroïdienne, les néoplasies
primaires et secondaires, les vascularites, les
inflammations orbitaires sclérosantes idiopathiques, les
affections granulomateuses.
4- Retentissement fonctionnel :
Toutes les structures présentes dans l’orbite peuvent être
affectées par un processus lésionnel comptant différents
mécanismes : compression, ischémie, érosion, infiltration.
Selon la structure atteinte, le retentissement sera
donc visuel, sensitif, oculomoteur, oculo-palpébral,
sécrétoire et vasculaire.
5- Lésions du nerf optique :
Les lésions du nerf optique sont étudiées par les explorations
fonctionnelles (acuité visuelle, sensibilité aux
contrastes, vision des couleurs, champ visuel, potentiels
évoqués visuels).
L’examen du fond d’oeil précise l’état
de la papille (oedème, atrophie), mais aussi l’existence
de pli choroïdien pouvant traduire une compression du
pôle postérieur par une masse intra-orbitaire rétrobulbaire.
6- Troubles oculomoteurs :
Les troubles oculomoteurs se traduisent par une diplopie
quels qu’en soient la cause ou le mécanisme.
Cette diplopie
est au mieux étudiée par un bilan orthoptique avec
test de Hess-Lancaster.
7- Signes hémodynamiques :
Les signes hémodynamiques dépendent de l’intensité du
flux sanguin.
La présence d’un frémissement (thrill) à la
palpation de l’orbite et d’un souffle vasculaire à l’auscultation
de la région orbitaire oriente vers une angiodysplasie
de haut débit type fistule artério-veineuse.
La
majoration d’une exophtalmie lors de la compression
jugulaire ou d’une manoeuvre de Valsalva oriente vers
une angiodysplasie veineuse de type varice orbitaire.
Grands syndromes étiopathogéniques
:
On distingue par ordre de fréquence les exophtalmies
d’origine thyroïdienne, volontiers bilatérales, et les
exophtalmies tumorales le plus souvent unilatérales.
Parmi les autres causes, on peut citer les exophtalmies
inflammatoires, les traumatiques, les vasculaires et
celles dues à des malformations orbitaires.
A - Exophtalmies endocriniennes au cours
des dysthyroïdies :
Ce sont les plus fréquentes des exophtalmies.
Elles sont
en règle générale bilatérales, mais les formes unilatérales
(20 % des cas) ne sont pas rares.
Ces exophtalmies
surviennent dans un contexte d’orbitopathie (l’ensemble du contenu orbitaire est touché) et on préfère actuellement
utiliser le terme de dysthyroïdie car la plupart
des manifestations de l’orbitopathie surviennent dans un
contexte thyroïdien qui peut être avant tout hyperthyroïdien
mais aussi hypothyroïdien et euthyroïdien
(syndrome de Saint-Yves).
1- Signes cliniques :
L’exophtalmie est liée à l’augmentation du volume du
contenu orbitaire par un gonflement des muscles et (ou)
une augmentation du compartiment graisseux orbitaire.
Elle peut être de plusieurs grades I, II ou III. Elle s’accompagne
de façon variable : d’anomalies inflammatoires
sous forme d’oedème conjonctival (chémosis), d’une
hypertrophie de la glande lacrymale, d’un oedème et
d’un gonflement des paupières avec parfois aggravation
des douleurs et inconfort, à la pression du globe oculaire.
Ces troubles peuvent s’accompagner de fatigue oculaire.
D’autres signes doivent être recherchés.
• La rétraction palpébrale supérieure spasmodique ou
permanente (signe de Dalrymple) laisse découvrir le
limbe supérieur.
Elle est responsable d’une asynergie oculo-palpébrale dans le regard vers le bas (signe de
Degraefe) : la paupière supérieure ne suit pas ou suit
avec retard le globe oculaire.
• Une diplopie est provoquée le plus souvent par fibrose
d’un muscle oculomoteur, en particulier le muscle droit
inférieur, sous forme d’une hypotropie avec limitation
de l’élévation.
• Une atteinte cornéenne par lagophtalmie est un signe
à rechercher.
• Un déficit de la fonction visuelle centrale et périphérique
par neuropathie optique compressive parfois
vu à l’examen tomodensitométrique systématique.
Celui-ci permet d’étudier le volume des masses musculaires
au niveau de l’apex orbitaire expliquant la
compression.
Le traitement, parfois en urgence, fait
appel à la corticothérapie générale à fortes doses par
voie veineuse, associée ou non à une radiothérapie
orbitaire ou à une décompression orbitaire.
2- Examen tomodensitométrique :
L’examen tomodensitométrique est indispensable.
Il
permet de mesurer le degré d’exophtalmie, de mettre en
évidence l’augmentation du volume des muscles, de la
graisse et dans le même temps d’étudier les parois
osseuses, la taille des sinus et leur clarté en vue d’une
éventuelle décompression orbitaire.
3- Diagnostic :
Le diagnostic d’exophtalmie endocrinienne repose sur
des critères cliniques et paracliniques (hypersécrétion
thyroïdienne avec augmentation de T3 libre, T4 libre,
effondrement de la TSH, présence d’anticorps antirécepteurs
de TSH).
Cette exophtalmie endocrinienne
survient la plupart du temps dans le cadre d’une maladie
de Basedow (goitre, exophtalmie, tachycardie, troubles
nerveux, troubles gastro-intestinaux) chez la femme à
l’époque de la ménopause.
Plus rarement, il s’agit d’exophtalmie et surtout de syndromes palpébraux
rétractiles dans le cadre d’une thyroïdite d’Hashimoto,
d’un adénome toxique.
Enfin, cette exophtalmie peut
survenir aussi bien dans un contexte d’hypothyroïdie
que dans un contexte d’euthyroïdie (syndrome de Saint-
Yves).
L’exophtalmie peut inaugurer la maladie de Basedow ou
précéder les autres signes de plusieurs mois ou années.
4- Évolution :
L’évolution naturelle de l’exophtalmie dysthyroïdienne
passe le plus souvent par une période d’augmentation,
de stabilisation puis de diminution sur une période de
3 mois à 3 ans.
Elle peut être influencée par la corticothérapie
au début en phase inflammatoire ; au stade de
séquelles, elle est indépendante du traitement cortisonique
et du traitement antithyroïdien.
5- Traitement :
Le traitement comporte l’équilibre thyroïdien par les
antithyroïdiens de synthèse, iode 131 ou la thyroïdectomie.
Selon le caractère inflammatoire ou non et compressif
ou non, un traitement de l’exophtalmie peut être institué :
corticothérapie, radiothérapie et éventuellement décompression
orbitaire.
6- Exophtalmie oedémateuse maligne :
L’exophtalmie oedémateuse maligne, complication
redoutable exceptionnelle, survient après une thyroïdectomie
ou quelquefois après un traitement par l’iode.
Elle
se traduit par une exophtalmie majeure, très inflammatoire,
avec malocclusion palpébrale, ophtalmoplégie,
kératite.
Le pronostic se situe à 2 niveaux : au niveau de
la cornée (risque d’ulcération et d’abcès) et au niveau du
nerf optique (compression du nerf optique, papillite
oedémateuse).
Le traitement doit être entrepris en urgence,
basé sur la corticothérapie générale à fortes doses par
voie veineuse, la radiothérapie orbitaire et éventuellement
une décompression orbitaire.
B - Exophtalmies tumorales
:
Les exophtalmies tumorales sont habituellement irréductibles
et souvent se traduisent par un déplacement
dans un des 3 plans de l’espace (dystopie horizontale,
verticale ou sagittale).
Elles s’accompagnent volontiers
au cours de leur évolution d’une diplopie avec limitation
des mouvements, d’une ophtalmoplégie plus ou moins
totale par syndrome de la fente sphénoïdale, parfois
d’une baisse d’acuité visuelle ou d’une cécité en cas de
syndrome de l’apex (compression du nerf optique).
Dans de rares cas, le diagnostic est facilité par la présence
d’une tumeur palpable associée à l’exophtalmie : tumeur
de l’angle supéro-interne évoquant une mucocèle du
sinus frontal, un ostéome frontal à consistance osseuse
et plus rarement une méningocèle molle ; une masse de
l’angle supéro-externe orientant vers une tumeur de la
glande lacrymale.
Mais très souvent, une exophtalmie
isolée et unilatérale nécessite un bilan ORL et tomodensitométrique orbitaire.
En dernier ressort, c’est la
biopsie, lorsque la lésion est accessible, qui permet
d’affirmer le diagnostic.
1- Tumeurs orbitaires de l’enfant :
Elles sont rares chez le nourrisson et l’enfant, en particulier
les formes néonatales et les formes secondaires
métastatiques.
Les tumeurs bénignes surtout kystiques
représentent 50 à 80 % des cas.
Les seules véritables tumeurs de l’orbite fréquentes qui
se présentent avec une exophtalmie au premier plan de
leur tableau clinique sont le rhabdomyosarcome et le
gliome du nerf optique.
• Le rhabdomyosarcome est la tumeur maligne la plus
fréquente chez l’enfant. D’origine mésenchymateuse,
elle peut revêtir plusieurs aspects cliniques : soit
exophtalmie non axile, non douloureuse, souvent à
développement supéro-nasal, soit parfois tuméfaction
rougeâtre entre le rebord orbitaire et le globe oculaire
avec chémosis qui fait protrusion entre les paupières.
L’exophtalmie s’accompagne très souvent d’un déficit
des mouvements du globe oculaire.
Le diagnostic est
confirmé par la biopsie.
Le traitement repose sur la
chimiothérapie et la radiothérapie.
Le pronostic a été
transformé ces dernières années grâce à un traitement
précoce et bien conduit.
• Le gliome du nerf optique est une tumeur bénigne qui
se rencontre avant l’âge de 10 ans, elle se traduit par une
exophtalmie axile, lentement progressive, irréductible,
accompagnée parfois d’un strabisme.
Le fond d’oeil
peut montrer une atrophie optique avec un déficit de la
fonction visuelle.
L’examen tomodensitométrique et
l’imagerie par résonance magnétique précisent la lésion,
sa topographie et son extension.
La tumeur est encapsulée,
sans métastase mais l’extension peut se faire vers le
chiasma.
Le traitement, essentiellement chirurgical,
dépend de la topographie et de l’extension de la lésion.
Certaines formes avec extension vers le chiasma peuvent
bénéficier d’une irradiation.
Une maladie de
Recklinghausen doit toujours être recherchée.
• Les tumeurs vasculaires sont principalement des angiodysplasies orbitaires ou orbito-palpébrales qui
peuvent se manifester par une exophtalmie.
D’évolution
bénigne, elles sont parfois volumineuses et, dans ce cas,
entraînent une occlusion palpébrale ou une déviation
du globe oculaire susceptible d’engendrer une amblyopie.
On peut distinguer l’hémangiome immature du
nouveau-né qui régresse spontanément avec le temps ou
favorisé par une corticothérapie, le lymphangiome dont
le diagnostic est histologique et qui est souvent de très
mauvais pronostic du fait des récidives fréquentes.
• Le kyste dermoïde de l’orbite est une tumeur bénigne,
congénitale, siégeant dans l’angle supéro-externe de
l’orbite, ne s’accompagnant d’aucun trouble visuel ni
oculomoteur. L’exophtalmie est rare et traduit une
extension postérieure.
• Les autres tumeurs orbitaires de l’enfant sont très
rares.
Il s’agit de tumeurs d’allure kystique : soit primitives
comme les kystes congénitaux de l’orbite avec microphtalmie ; soit propagées comme la méningocèle ou
méningo-encéphalocèle.
Il s’agit d’un kyste contenant
du liquide céphalo-rachidien par hernie des méninges
dans l’orbite.
La masse siège dans l’angle supéro-interne,
elle est molle, parfois expansive avec les cris, refoulant
l’oeil en bas et en dehors.
Le diagnostic est radiologique.
Le traitement est neurochirurgical.
• Le kyste hydatique de l’orbite se traduit par une
exophtalmie unilatérale, rapide et douloureuse.
Le
diagnostic préopératoire est assuré par la sérologie et
par l’imagerie.
• Parmi les autres tumeurs rencontrées chez l’enfant,
on peut citer le granulome éosinophile, tumeur bénigne
qui rentre dans le cadre des histiocytoses X, les tumeurs
orbitaires métastatiques d’origine hématologique
comme une leucémie ou les métastases d’un neuroblastome,
exceptionnellement la propagation orbitaire
d’un rétinoblastome.
2- Tumeurs orbitaires chez l’adulte :
Elles sont actuellement dominées dans leur fréquence
par les syndromes lymphoprolifératifs.
L’exophtalmie
est d’évolution lente, irréductible, isolée.
La fonction
visuelle est rarement altérée.
La masse orbitaire peut
être très antérieure et fait alors saillie dans le cul-de-sac
conjonctival déformant les paupières.
L’imagerie permet
d’évoquer le diagnostic, de préciser l’importance des
lésions et l’extension postérieure.
Le diagnostic est fait
par la biopsie qui permet de classer le syndrome lymphoprolifératif
selon son grade : bas, intermédiaire, selon le
type de cellules.
Le traitement repose sur la radiothérapie,
la chimiothérapie selon le degré d’extension locale et
générale.
Nous en rapprochons les hémopathies à
localisation orbitaire comme la maladie de Hodgkin,
les leucémies ou les myélomes.
• Les tumeurs de la glande lacrymale peuvent prendre
l’aspect d’une exophtalmie indolore, progressive, déplaçant
l’oeil en bas, sans trouble oculomoteur, bien limitée
en imagerie et évoquant avant tout une tumeur mixte ou
un adénocarcinome qui doit imposer l’exérèse en totalité
sans rupture de capsule.
• Les tumeurs propagées sont chez l’adulte essentiellement
des tumeurs sinusiennes en particulier les mucocèles,
plus rarement des tumeurs malignes comme les
carcinomes épidermoïdes du sinus maxillaire et des
adénocarcinomes siégeant le plus souvent au niveau de
l’ethmoïde (vus classiquement chez les travailleurs du
bois).
L’extension orbitaire se traduit par une exophtalmie
tardive, une douleur oculaire mal systématisée, une baisse
d’acuité visuelle, une diplopie, un épiphora et parfois
un ptosis.
Le diagnostic repose sur la confrontation de
l’examen clinique et des données radiologiques.
• Les tumeurs métastatiques sont les plus fréquentes en
comparaison des cancers orbitaires primitifs.
Par ordre
de fréquence, l’origine de la tumeur primitive est avant
tout le cancer du sein chez la femme dans 42 % des cas,
puis les cancers broncho-pulmonaire, prostatique, le
mélanome et le cancer du rein.
Ces métastases sont à l’origine d’exophtalmie importante, douloureuse avec chémosis et déficit oculomoteur.
Le traitement repose
sur la radiothérapie et la chimiothérapie.
• Les tumeurs neurogènes sont dominées par le
méningiome du nerf optique et le méningiome sphénoorbitaire
propagé à l’orbite.
L’exophtalmie est lentement
progressive, souvent axile, parfois latéralisée.
Elle s’accompagne
de déficits oculomoteurs et d’une baisse
d’acuité visuelle.
L’imagerie permet la plupart du temps
de faire le diagnostic. Le traitement est essentiellement
chirurgical.
• Les autres tumeurs de l’orbite sont plus rares :
ostéome du sinus frontal ou de l’ethmoïde, histiocytose
notamment tumeur osseuse de la maladie de Hand-
Schüller-Christian avec granulome éosinophile, exophtalmie,
diabète.
C - Exophtalmies inflammatoires :
On distingue les inflammations orbitaires non spécifiques
et spécifiques.
1- Inflammations orbitaires non spécifiques :
Ces anciennes pseudo-tumeurs inflammatoires peuvent
évoluer sur un mode aigu ou subaigu.
La présentation
clinique complétée par l’imagerie permet de distinguer
différentes catégories selon la localisation : myosite,
dacryo-adénite, forme antérieure, apicale et diffuse. Le
diagnostic repose sur la biopsie montrant une infiltration
polymorphe de cellules inflammatoires.
Le traitement
comporte la corticothérapie.
2- Inflammations orbitaires spécifiques :
Elles sont secondaires à des entités pathologiques :
infections, vascularites, granulomatose…
Parmi les inflammations spécifiques de l’orbite, il faut
signaler les exophtalmies dans le cadre de la cellulite
orbitaire.
Elles peuvent se développer aux dépend des
sinus de la face ou de l’oro-pharynx, à la suite d’une
plaie pénétrante de l’orbite, d’un corps étranger orbitaire,
d’une infection oculaire ou comme complication d’une
septicémie. Les affections bactériennes sont les plus
fréquentes mais on décrit aussi des affections virales et
parasitaires.
Chez l’enfant, il peut s’agir d’une ethmoïdite
aiguë et chez le nourrisson d’une ostéomyélite du
maxillaire supérieur.
L’exophtalmie est douloureuse, peu réductible, d’apparition
brutale, s’associant à un chémosis, à un oedème
chaud et rouge des paupières, une atteinte de l’état
général avec fièvre et syndrome biologique (vitesse de
sédimentation élevée, polynucléose).
Le diagnostic
repose sur l’examen oto-rhino-laryngologique (présence
de pus au niveau du méat moyen) et sur l’imagerie orbitocranio-sinusienne qui va montrer une opacité du sinus,
une érosion osseuse et une infiltration de la graisse orbitaire.
Il est indispensable de vérifier l’absence de thrombophlébite
du sinus caverneux dont les signes évocateurs
sont l’augmentation du calibre de la veine ophtalmique
supérieure de façon bilatérale, l’élargissement des muscles oculomoteurs, l’élargissement du sinus caverneux
avec éventuellement image d’infarctus de l’artère
cérébrale.
Ces sinusites, chez l’enfant, sont liées la plupart du
temps à Hæmophilus influenzæ avant 4 ans alors que
chez l’adulte ce sont des infections polymicrobiennes
fronto-ethmoïdiennes associant des gram-positifs, des
gram-négatifs et des anaérobies.
Il existe d’autres cellulites bactériennes mais aussi
mycosiques comme la mucormycose rhino-orbitaire de
pronostic gravissime, les aspergilloses, d’autres affections
comme la tuberculose, la syphilis, les infections
parasitaires.
D - Exophtalmie traumatique :
Elle est rare et est due à :
• un hématome orbitaire en rapport avec une fracture
de l’orbite ou une plaie pénétrante plus ou moins associée
à un corps étranger intra-orbitaire ; la résorption
demande 10 jours ;
• un emphysème orbitaire témoignant d’une fracture
orbitaire faisant communiquer sinus et orbite ; la présence
d’air avec crépitation de la paupière à la palpation
est caractéristique ; l’exophtalmie augmente de
volume lors du mouchage ;
• une cellulite orbitaire après fracture ouverte ou corps
étranger intra-orbitaire méconnu.
Elle peut être pulsatile due à une fistule carotidocaverneuse
ou une communication entre cerveau et orbite
par le biais d’une fracture du toit.
Dans tous les cas, l’imagerie est indispensable.
E - Exophtalmies vasculaires
:
Les lésions vasculaires de l’orbite peuvent être classées
en 3 catégories : hémangiomes immatures, malformations
vasculaires, tumeurs vasculaires.
1- Hémangiomes immatures :
Ce sont les plus fréquents chez l’enfant et ils subissent
une régression spontanée sur plusieurs années (voir :
tumeurs de l’enfant).
2- Malformations vasculaires :
Elles peuvent être sous-divisées anatomiquement
selon le type de vaisseau préférentiellement impliqué
en malformations capillaires, veineuses, artérielles,
lymphatiques voire associatives.
Elles peuvent aussi être
différenciées sur le plan hémodynamique en
malformations à haut débit, ce qui se traduit souvent par
une exophtalmie pulsatile et qui comprend les malformations
artérielles, les anévrismes, les fistules artérioveineuses
mais aussi les malformations à faible débit
(malformations capillaires, veineuses, lymphatiques
et lymphangiomes).
En pratique, l’exophtalmie pulsatile s’accompagne de
céphalées rétro-orbitaires, d’un souffle intracrânien,
parfois d’une diplopie.
L’exophtalmie est réductible,
pulsatile avec un thrill à la palpation et un souffle à
l’auscultation.
Il existe une dilatation des vaisseaux
conjonctivaux, une hypertonie oculaire parfois une paralysie
du VI et du III.
Le diagnostic le plus fréquent est
une fistule artério-veineuse d’origine traumatique.
Le
diagnostic est confirmé par l’imagerie notamment l’artériographie.
Le traitement repose à l’heure actuelle sur
la neuroradiologie interventionnelle qui permet le traitement
endovasculaire par occlusion du sinus
caverneux.
Devant un syndrome d’énophtalmie-exophtalmie avec
variation et, en particulier, augmentation de l’exophtalmie
en procubitus et lors de la compression des jugulaires, il
faut penser à une angiodysplasie veineuse comme des
varices orbitaires qui sont confirmées par l’imagerie
notamment la phlébographie orbitaire.
3- Tumeurs vasculaires proprement dites :
Deux grandes causes sont à évoquer : l’hémangiome
caverneux et l’hémangiopéricytome.
Devant une exophtalmie non pulsatile, axile, non
douloureuse, sans retentissement fonctionnel oculaire,
il faut penser à un angiome caverneux dont le diagnostic
est souvent porté par l’imagerie.
Le traitement discutable
est purement chirurgical.
Le principal diagnostic
différentiel dans ce contexte est une lésion lymphangiomateuse.
L’hémangiopéricytome, véritable tumeur d’origine
vasculaire, est beaucoup plus rare.
F - Exophtalmies dans les malformations cranio-faciales :
Il s’agit de dysostose crânienne et craniofaciale avec
synostose.
Il existe une modification de la configuration
anatomique de l’orbite avec réduction du contenant responsable
d’une exophtalmie qui peut être monstrueuse.
C’est donc une dysharmonie entre un contenant orbitaire
diminué et un contenu orbitaire resté identique.
Les exophtalmies se rencontrent surtout dans la maladie
de Crouzon, dans le syndrome d’Apert, mais aussi dans
certaines malformations craniofaciales, type fente faciale
et cranio-faciale.