Étude clinique de la carie
Cours de Médecine Dentaire
Introduction
:
La carie dentaire est la pathologie la plus répandue
dans le monde.
Jusqu’à une période très récente,
presque tous les individus avaient fait l’expérience
de cette pathologie au moins une fois dans leur vie.
Cette maladie infectieuse se traduit par une déminéralisation
successive des tissus durs de la dent.
Ce processus aboutit, à plus ou moins long terme, à
une perte de substance irréversible.
Les acides organiques qui en sont responsables
proviennent du métabolisme bactérien.
En effet, le
milieu buccal est un écosystème riche et varié dans
lequel s’établit une flore complexe composée, entre
autres, de plus de 300 espèces bactériennes.
Un
équilibre remarquable s’établit entre la masse bactérienne,
en constante multiplication et en constant
apport, et les facteurs de contrôle de cette masse, qu’ils soient propres au milieu buccal ou liés
à la compétitivité entre micro-organismes.
Cependant,
dans certaines conditions, les mécanismes de
défense locaux peuvent être débordés, et une
croissance opportuniste de certaines espèces bactériennes
être à l’origine des pathologies de la
dent.
C’est ainsi que la rupture de l’homéostasie
microbienne par un facteur environnemental (augmentation
de l’apport en hydrates de carbone fermentescibles
par exemple) va conduire à la prolifération,
voire la prédominance de micro-organismes
cariogènes.
Les micro-organismes impliqués dans le processus
carieux appartiennent à trois genres bactériens
:
• le groupe des Streptococcus mutans, impliqué
dans l’initiation de la lésion carieuse
;
• le genre Lactobacillus, impliqué dans la progression
de la lésion carieuse ;
• le genre Actinomyces, impliqué plus particulièrement
dans les caries radiculaires.
Si la carie dentaire ne peut pas être considérée
comme une maladie de la nutrition, elle résulte
pourtant de l’effet d’un déséquilibre dans l’apport
journalier en hydrates de carbone fermentescibles.
Ce n’est pas tant la quantité globale de sucres
ingérés qui est primordiale mais bien la fréquence
d’ingestion.
Une diminution de la prévalence de la carie est
observée dans les pays industrialisés.
Mais il existe
encore de grandes variations entre les populations
de niveaux socioéconomiques différents.
La maladie
carieuse reste un problème de santé publique,
puisque 80 % des atteintes sont retrouvées chez
20 % de la population.
L’indice CAO permet de mettre en évidence le
degré d’atteinte carieuse d’une population.
Cet
indice est la somme du nombre de dents cariées
(C), du nombre de dents absentes pour cause de
caries (A) et du nombre de dents obturées (O).
L’indice de la population étudiée est la moyenne
des indices des sujets.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS)
s’était fixé pour objectif, en 2000, un CAO moyen
de 3 à l’âge de 12 ans.
En France, cet objectif a
été atteint avant cette date, puisqu’en 1998
l’Union française de la santé buccodentaire
(UFSBD) a mis en évidence un CAO moyen, chez les
enfants de 12 ans, de 1,94.
Un diagnostic clinique de la carie permet de
mettre en oeuvre des techniques de soin et de
restauration adaptées.
Caries coronaires
:
Elles s’observent principalement chez l’enfant et
l’adulte jeune.
Deux classifications principales existent à
l’heure actuelle : la classification de Black, et le
concept SISTA, qui englobe également les caries
radiculaires.
Elles sont valables pour les deux dentitions.
A - Classification de Black modifiée
:
Elle répartit les atteintes carieuses en six classes :
• classe I : caries des puits et fissures (dents
antérieures et postérieures) ;
• classe II : caries proximales des dents postérieures ;
• classe III : caries proximales des dents antérieures
sans atteinte du bord incisif ;
• classe IV : caries proximales des dents antérieures
avec atteinte du bord incisif ;
• classe V : caries cervicales (antérieures et postérieures) ;
• classe VI : caries des bords incisifs et du sommet
des cuspides.
Cette classification indique la localisation de
l’atteinte carieuse, mais pas le niveau atteint par
cette atteinte.
Il faut donc distinguer, au sein des
différentes classes, atteintes de l’émail et atteintes
de la dentine.
1- Atteintes de l’émail :
La lésion initiale se forme au niveau de la subsurface
et est recouverte d’une couche d’émail apparemment
intacte.
Il existe deux types de carie de la surface de
l’émail :
• à évolution rapide : tache blanchâtre à la surface
de l’émail ;
• à évolution lente : tache brune (pigmentée)
colorée par des substances d’origine salivaire
ou bactérienne.
Ces lésions sont réversibles.
Quand l’émail s’effondre, une cavité apparaît et
les espérances de reminéralisation deviennent faibles
: c’est la carie avec cavitation.
2- Atteintes de la dentine :
La carie dentinaire se présente sous la forme d’un
cône carieux (avant effondrement de l’émail) dont
la base se situe au niveau de la jonction émail
dentine.
Trois zones sont décrites :
• dentine opaque : zone la plus superficielle ;
• dentine transparente : dentine sclérosée ;
• dentine apparemment normale.
B -
Dents temporaires et permanentes jeunes
et maladie carieuse :
Les particularités anatomiques et physiologiques
des dents temporaires (émail mince et peu minéralisé,
profondeur des puits et fissures) et permanentes
jeunes (émail immature) les rendent particulièrement sensibles à la carie et en conditionnent les
formes cliniques :
• concernant la denture temporaire, du fait de
la faible épaisseur d’émail, en particulier au
niveau du tiers cervical des faces proximales,
les caries jumelles sont la forme carieuse la
plus fréquente ;
• concernant la denture permanente jeune, la
situation postérieure de la première molaire au
niveau de l’arcade, son éruption précoce et
son émail immature en font la dent la plus
fréquemment atteinte par le processus carieux.
Dans une enquête effectuée chez des
enfants âgés de 12 ans, une atteinte de cette
dent a été mise en évidence dans 35 % des cas.
Les premières molaires permanentes représentent
73 % de l’indice CAO des enfants de
12 ans.
Caries radiculaires
:
Les caries radiculaires apparaissent lorsque le cément
est mis à nu à la suite de récessions gingivales.
Elles sont plus fréquentes chez le sujet âgé.
Aux États-Unis, elles affectent 22 % de la population.
Une classification histopathologique proposée
par Westbook permet de différencier les niveaux
d’atteinte :
• atteinte du cément ;
• atteinte dentinaire sans destruction de la dentine intercanaliculaire ;
• atteinte dentinaire avec destruction de la dentine intercanaliculaire ;
• atteinte pulpaire.
Billings a, plus récemment, proposé une classification
clinique dans laquelle il décrit quatre stades
:
• stade I : lésion initiale ;
• stade II : lésion superficielle ;
• stade III : lésion cavitaire ;
• stade IV : lésion avec atteinte pulpaire. Nyvad et Fejerskov décrivent deux phases dans
le développement de la carie radiculaire :
• lésion active : couleur jaune ou marron clair.
Au sondage, le tissu est crayeux.
Il peut y avoir
ou non cavitation ;
• lésion arrêtée : couleur marron foncé à noire.
Au sondage, la surface est dure.
Le diagnostic différentiel avec les mylolyses est
basé essentiellement sur la présence de dépôts de
plaque dentaire abondants.
Concept SISTA (SItes, STAdes)
:
Une meilleure compréhension du processus carieux
et donc une mise au point de techniques de prévention
plus efficaces, ainsi que l’avènement de nouveaux
matériaux adhésifs ont rendu la classification
de Black, qui correspond à des préparations pour
restaurations à l’amalgame, obsolète.
Une nouvelle
classification a donc été mise au point par Mount et
Hume suivant les sites et les stades des lésions
carieuses.
Cette classification ne tient compte que
des lésions avancées nécessitant une intervention
chirurgicale.
C’est pourquoi Lasfargues a proposé
le concept SISTA, permettant de mettre en oeuvre
des méthodes de prophylaxie.
Ce concept inclut un
stade 0 correspondant à une lésion initiale pouvant
être traitée par des méthodes non invasives (application
de fluor).
Il est à noter que cette classification n’intéresse
que les dents pouvant être conservées vivantes, et
ne prend pas en considération l’état de santé pulpaire.
A - Sites :
Trois sites sont distingués :
• site 1 : lésions occlusales (lésions des puits,
sillons, fosses, fossettes de toutes les dents y
compris le cingulum des dents antérieures) ;
• site 2 : lésions proximales (lésions concernant
les faces proximales de toutes les dents) ;
• site 3 : lésions cervicales (lésions carieuses
débutant au niveau cervical (émail ou cément)
sur toutes les faces de toutes les dents).
Les érosions et abrasions ne sont pas incluses
dans cette classification.
• stade 1 : microcavitations en surface atteignant
le tiers externe de la dentine ;
• stade 2 : cavité de taille moyenne atteignant le
tiers médian de la dentine sans affaiblir les
cuspides ;
• stade 3 : cavité de taille importante atteignant
le tiers profond de la dentine et pouvant fragiliser
les cuspides ;
• stade 4 : cavité atteignant la zone parapulpaire
et ayant détruit une partie des cuspides.
1- Lésions occlusales :
Elles correspondent au site 1 du concept SISTA :
• SISTA 1.0 : tache blanche opaque de déminéralisation
(leucome), au fond ou sur les berges des sillons, ne pouvant être détectée qu’après
un séchage correct de l’émail.
• SISTA 1.1 : opacité ou coloration de surface
(visible sans séchage) associée à des microcavitations
localisées ;
• SISTA 1.2 : cavité de l’émail et/ou coloration
grisâtre due à la présence de dentine ramollie
sous-jacente ;
• SISTA 1.3 : cavité franche de l’émail accompagnée
de coloration grisâtre, sans perte de cuspide
ou de crête marginale ;
• SISTA 1.4 : cavitation large, dentine ramollie
exposée, destruction de cuspides ou de crêtes
marginales.
2- Lésions proximales :
Elles correspondent au site 2 du concept SISTA :
• SISTA 2.0 : absence de cavitation cliniquement
décelable mais présence d’une altération de
translucidité de l’émail, détectable par transillumination.
Présence de taches de déminéralisation interproximales, si l’anatomie de
l’embrasure autorise leur visibilité ;
• SISTA 2.1 : opacité ou coloration de l’émail
proximal, associée à des microcavitations ;
• SISTA 2.2 : cavitation décelable de
l’émail proximal au niveau de la surface de
contact, et/ou coloration grisâtre accompagnée
ou non de fissure de la crête marginale ;
• SISTA 2.3 : cavitation franche de
l’émail proximal si la crête est effondrée, ou
présence d’un cerne grisâtre dû à l’extension
de la dentine ramollie sous la crête marginale,
avant l’effondrement de celle-ci ;
• SISTA 2.4 : cavitation franche avec
effondrement de la crête marginale et destruction
associée des cuspides.
3- Lésions cervicales :
Elles correspondent au site 3 du concept SISTA :
• SISTA 3.0 : absence de cavitation, que la lésion
soit coronaire (émail) ou radiculaire (cément) ;
• SISTA 3.1 : cavitation superficielle associée à
des colorations visibles sans séchage ;
• SISTA 3.2 : cavitation de l’émail ne concernant
qu’une seule face (vestibulaire ou linguale) ;
• SISTA 3.3 : cavitation franche mettant à nu la
dentine cariée.
La lésion atteint l’émail et le
cément, et au moins deux faces sont concernées
;
• SISTA 3.4 : carie étendue à tout le pourtour
radiculaire avec risque de fracture.
C - Caries secondaires
:
Selon Baume, la carie secondaire est une « lésion
carieuse se développant aux marges d’une restauration
existante ».
À l’heure actuelle, les termes de
récidive carieuse ou de carie récurrente sont préférés
à celui de carie secondaire.
Il s’agit, en fait, d’une lésion cliniquement et
radiologiquement similaire à une carie primaire
apparaissant dans des zones de stagnation de plaque
dentaire.
Il existe deux indicateurs de récidive carieuse :
• un ramollissement des tissus au niveau des
limites du matériau, détectable à l’aide d’une
sonde ;
• la présence d’un hiatus important ( 0,4 mm)
au niveau des limites du matériau d’obturation.
Ce défaut d’étanchéité est associé à un
très fort degré de colonisation par des bactéries
cariogènes.
Un défaut d’étanchéité inférieur à 0,4 mm est le
signe d’une carie secondaire débutante ; en revanche,
une simple décoloration n’est pas suffisante
pour poser un diagnostic de carie secondaire.
Des études histologiques ont décrit deux zones
au niveau des caries secondaires :
• une lésion externe se formant à la surface de
l’émail à proximité d’une obturation ;
• une lésion apparaissant au niveau des murs de
la cavité quand il y a une perte d’étanchéité.
Chez les adultes et les personnes âgées, la récidive
fait partie des pathologies carieuses dominantes.
Elle constitue la raison principale de réfection
ou de remplacement des restaurations.
D - Évaluation du risque carieux :
Le développement des méthodes de traitement non
invasives des caries débutantes, justifiant la classification SISTA, rend indispensable l’évaluation du
risque carieux individuel pour le choix de la méthode
de traitement.
Cependant, cette évaluation
n’a de sens que si l’on peut compter sur la collaboration
du patient.
L’évaluation du risque carieux permet de détecter
les individus hautement susceptibles de développer
des lésions carieuses.
Elle aboutit en outre à
un diagnostic personnalisé permettant de déterminer
quelles mesures préventives seront efficaces, si
les lésions peuvent être traitées de manière non
invasive, et quels matériaux utiliser pour la restauration.
Les facteurs de risque carieux sont de plusieurs
ordres :
• facteurs liés à l’hôte ;
• préexistence de lésions carieuses et restaurations
;
+ dents
antérieures, particulièrement les incisives inférieures
;
• anatomie dentaire, qualité de l’émail : présence
de sillons anfractueux, émail immature,
faible exposition au fluor ;
• facteurs familiaux : ils regroupent des facteurs
génétiques et environnementaux ;
• débit salivaire, pouvoir tampon : une diminution
du débit salivaire (débit non stimulé inférieur
à 0,25 ml/min) est un facteur de risque
certain ;
• habitudes d’hygiène inefficaces, présence de
plaque en excès ;
• conditions socioéconomiques : le risque carieux
est plus élevé dans des populations présentant
un faible niveau socioéconomique, la
race et l’ethnie jouent également un rôle ;
• facteurs médicaux aggravants : certaines pathologies
et certaines thérapeutiques comme
l’anorexie, le syndrome de Gougerot-Sjögren,
le diabète, la prise de neuroleptiques, une
radiothérapie, peuvent augmenter le risque
d’apparition de caries ;
• facteur microbien : le taux de microorganismes
cariogènes (Streptococcus mutans
et Lactobacillus sp.) peut être évalué à l’aide
de tests microbiens.
Il faut noter toutefois le
manque de sensibilité et de spécificité des
tests actuellement disponibles ;
• facteur alimentaire : la consommation de sucres
cariogènes est un facteur de risque primordial,
la forme et la fréquence de cette
consommation étant directement liées au risque
carieux.
E - Méthodes de diagnostic :
1- Examen visuel
:
Avant d’entreprendre tout examen visuel, il
convient de nettoyer et de sécher correctement les
surfaces dentaires.
Le praticien doit s’attacher à mettre en évidence
des changements de teinte, de translucidité ou de
structure des tissus dentaires.
Les lésions initiales sont plus difficiles à évaluer.
L’utilisation de la transillumination peut permettre
un meilleur diagnostic.
* Sondage :
Le sondage est utilisé pour permettre d’évaluer la
consistance des tissus dentaires.
Cette méthode est à utiliser avec prudence dans
le cas de lésions initiales, car elle peut être iatrogène.
Elle reste toutefois utile pour détecter la
perméabilité dentinaire dans des lésions cavitaires.
D’autre part, cette technique peut favoriser la
contamination de surfaces saines en transportant
des bactéries d’un site à un autre.
* Radiographie :
Cet examen complémentaire est utilisé en particulier
pour la détection des lésions proximales, mais
sa fiabilité reste faible dans les cas où l’épaisseur
de tissu minéralisé est importante, et son interprétation
doit se faire avec prudence.
Une des erreurs
les plus fréquentes est d’assimiler une image radioclaire
à une cavité.
En effet, la radiotranslucidité
est liée à une déminéralisation qui ne s’accompagne
pas obligatoirement d’une cavitation.
Une
étude de Pitts et Rimmer a mis en évidence que la
majorité des images radioclaires sur des faces
proximales correspondent à des lésions non cavitaires
et sont donc susceptibles d’être traitées chimiquement.
L’utilisation de cette méthode de diagnostic doit
être limitée à la détection de cavités de petite
taille.
Les recommandations de L’Agence nationale
d’analyse et d’évaluation des soins (Anaes)
concernant l’utilisation de la radiographie sont les
suivantes :
• lors d’une première visite :
+ chez un enfant en denture temporaire, un
examen rétrocoronaire des régions distales si
les surfaces proximales des dents ne sont ni
visibles ni sondables ;
+ chez un enfant en denture mixte, des clichés rétrocoronaires postérieurs, accompagnés
ou non de clichés occlusaux,
+ en denture permanente, des clichés rétrocoronaires
des régions distales ;
• lors des visites suivantes, en présence de caries
cliniques ou d’un risque carieux élevé :
+ chez un enfant en denture temporaire ou
mixte, un examen rétrocoronaire des régions
distales tous les 6 mois, ou jusqu’à disparition
de toute lésion carieuse ;
+ chez les adolescents, c’est-à-dire avant
éruption des dents de sagesse, des clichés rétrocoronaires des régions distales, tous les
6 à 12 mois, ou jusqu’à disparition de toute
lésion carieuse ;
+ chez les adultes, des clichés rétrocoronaires
des régions distales tous les 12 à 18 mois, ou
jusqu’à disparition de toute lésion carieuse ;
• lors des visites suivantes, en l’absence de carie
clinique ou d’un risque carieux élevé :
+ chez un enfant en denture temporaire ou
mixte, un examen rétrocoronaire des régions
distales tous les 12 à 24 mois si les surfaces
proximales des dents ne sont ni visibles ni
sondables ;
+ chez les adolescents, c’est-à-dire avant
éruption des dents de sagesse, des clichés rétrocoronaires des régions distales tous les
18 à 36 mois ;
+ chez les adultes, des clichés rétrocoronaires
des régions distales tous les 24 à 36 mois.
2- Radiovisiographie :
Les techniques de radiovisiographie peuvent également
être utilisées dans le diagnostic carieux.
Cependant,
certaines études ont mis en évidence une
sensibilité moindre de ces techniques.
Ces différents outils de diagnostic sont d’autant
plus efficaces qu’ils sont utilisés en association.
Toutefois, la fiabilité de ces tests augmente lorsque
l’on est en présence de cavitation.
Or les thérapeutiques
non invasives ne peuvent être mises en oeuvre
que si un diagnostic précoce est posé.
C’est pourquoi d’autres techniques de diagnostic
sont étudiées.
3- Autres techniques de diagnostic :
Actuellement, deux méthodes sont utilisées, la
fluorescence des dents ainsi que la spectroscopie
électrochimique de l’impédance (ECM).
La méthode
de fluorescence se divise en deux parties,
l’autofluorescence quantitative (QLF) et la fluorescence
exaltée par colorant (DELF).
* Autofluorescence quantitative
:
La QLF est utilisée principalement pour la détection
des lésions carieuses sur des surfaces lisses des
dents et l’ECM pour des surfaces occlusales et
proximales.
Elle comporte plusieurs branches se
différenciant principalement par la longueur
d’onde d’excitation de fluorescence (entre 488 et
655 nm).
L’excitation à des longueurs d’ondes courtes
(488, 511 nm) permet de révéler des zones de
dents déminéralisées par la réduction d’intensité
de fluorescence.
La QLF, utilisant l’excitation à
632 et 655 nm (exemples : DIAGNOdent®, KaVo),
détecte une augmentation de concentration de matière
organique dans les lésions, par augmentation
d’intensité de fluorescence des structures moléculaires
basées sur des porphyrines présentes à forte
concentration dans les bactéries.
La QLF est principalement
applicable sur des surfaces lisses des
dents, car la référence de fluorescence (intensité
de fluorescence des tissus sains des dents) ne doit
pas être affectée par la forme topologique de la
surface fluorescente.
La spécificité et la sensibilité
du laser pour le diagnostic des caries s’élève à plus
de 80 %.
* Fluorescence exaltée par colorant :
La DELF est une méthode très sensible de détection
des lésions carieuses, mais nécessite un apport de
molécules fluorescentes exogènes (colorants) sur
les surfaces dentaires (une étude de réaction allergique
du patient est indispensable).
D’autre part,
la DELF ne permet pas de quantifier le degré de
déminéralisation.
Des artefacts de détection, liés à
des déviations morphologiques des dents, et des
concentrations des colorants dans des structures
biologiques qui ne sont pas liées à une carie, réduisent
considérablement la possibilité d’application
de la DELF dans le diagnostic de carie.
* Spectroscopie électrochimique de l’impédance :
L’ECM est une technique de diagnostic de carie
potentiellement très sensible (93 % à 96 % de sensibilité
selon les examinateurs).
Mais, en raison de la
nature des mesures électriques qu’elle implique,
elle est sujette aux erreurs de préparation des
surfaces des dents pour recevoir les électrodes
(sondes).
Ainsi, les variations de pH intrabuccal, la
variation de composition chimique salivaire ou les
différents types de dents affectent les mesures de
l’impédance et, en même temps, réduisent la fiabilité
de cette méthode.
D’autre part, l’ECM n’est
pas une méthode visuelle et donc son utilisation
demande une grande expérience de la part du
praticien.
4- Adaptation des techniques de diagnostic aux
différents types de lésions :
* Lésions de site 1 (puits et sillons) :
L’examen visuel reste prépondérant dans le cas de
cavitations franches.
Il peut être amélioré grâce à l’utilisation d’une loupe ou d’un microscope opératoire,
et ceci en particulier au niveau des sillons
anfractueux.
Dans le cas des lésions initiales, l’utilisation de la
sonde est contre-indiquée et la radiographie insuffisante.
Pour ce type de lésions, les méthodes
électriques semblent les plus appropriées.
La sensibilité
et la spécificité de détection des caries occlusales est de 80 % pour les atteintes dentinaires
et 70 % pour les atteintes de l’émail.
La radiographie
n’est une technique fiable que dans le cas de
lésions avancées.
* Lésions de site 2 (faces proximales) :
L’examen radiographique est recommandé bien
qu’insuffisant dans le cas de lésions initiales.
L’examen visuel est peu sensible et peu spécifique
dans le cas de ce type de caries.
Il peut être
nettement amélioré par des techniques de transillumination.
D’autre part, afin de rendre ces sites plus accessibles
à l’examen visuel, il est possible de réaliser
un écartement des dents à l’aide de coins interdentaires
ou d’élastiques séparateurs utilisés en orthodontie.
Enfin, la présence d’une restauration proximale
sur la dent adjacente est un indicateur très fort de
risque de lésion.
* Lésions de site 3 (zones cervicales) :
Au niveau coronaire, un examen visuel permet de
mettre en évidence ces lésions même au stade
initial de la tache blanche.
Les lésions évoluées sont mises en évidence par
un changement de couleur et/ou la présence de
cavitation.
Au niveau radiculaire, l’examen par sondage accompagné
d’un examen visuel permettent une
bonne détection (changement de couleur et de
consistance).
Indications thérapeutiques
:
Les indications des techniques thérapeutiques sont
corrélées aux stades des lésions carieuses :
• stade 0 : ce stade correspond à la mise en
oeuvre de techniques prophylactiques de reminéralisation
(exemple : vernis fluorés) ou de
sealants.
De plus, un suivi régulier du patient
est indispensable ;
• stade 1 : il convient d’effectuer des cavités
très conservatrices et d’utiliser des matériaux
d’obturation adhésifs injectés.
Ceci doit s’accompagner
d’un traitement prophylactique
des surfaces adjacentes à la lésion ;
• stade 2 : la préparation d’une cavité en vue
d’une obturation adhésive doit être relativement
conservatrice ;
• stade 3 : la préparation cavitaire doit préserver
et renforcer les structures dentaires résiduelles
affaiblies ;
• stade 4 : la préparation est effectuée en vue
d’une obturation indirecte et doit protéger par
recouvrement les structures dentaires résiduelles.