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Ophtalmologie
Dystrophies héréditaires de la macula
Cours d'Ophtalmologie
 
 
 

Maladie de Best (dystrophie maculaire vitelliforme) :

En 1905, Best décrivait tous les stades de la dystrophie maculaire héréditaire à partir de huit patients apparentés dans une grande famille comprenant 59 individus et donnait son nom à la maladie.

Zanen compara la lésion à un aspect d’« oeuf sur le plat » et introduisit le terme de disque vitelliforme en 1950.

La fréquence exacte de l’affection reste difficile à préciser, différente selon les diverses études.

Elle serait responsable de 4 % de l’ensemble des dystrophies rétiniennes.

A - ASPECTS GÉNÉTIQUES :

La maladie de Best se transmet exclusivement sur le mode autosomique dominant.

La pénétrance est incomplète, l’expressivité est variable et nombreux sont les cas sporadiques.

En 1992, le gène de la maladie de Best a été localisé sur le bras long du chromosome 11, en 11q12-q13.

Ce gène a ensuite été identifié : le gène VMD2 (vitelliform macular dystrophy-2), dit bestrophin.

Il existe plusieurs mutations de ce gène responsables de la maladie de Best.

La protéine bestrophin joue un rôle dans les canaux ioniques transmembranaires.

B- HISTOLOGIE :

On connaît en fait peu d’études anatomopathologiques de lésions vitelliformes, à l’exception de celle de Weingeseist et al.

Ils retrouvaient au stade de remaniement de la lésion vitelliforme une anomalie diffuse de l’épithélium pigmentaire rétinien.

La plupart des autres publications portent sur des formes de l’adulte et observent des cellules pigmentées, des macrophages chargés en lipofuscine et une atrophie de l’épithélium pigmentaire dans l’aire maculaire entourée par un épithélium pigmentaire hypertrophique.

Des plaques de collagène fusiforme ont pu être observées entre l’épithélium pigmentaire atrophique et la membrane de Bruch.

Les photorécepteurs adjacents à l’épithélium pigmentaire atrophique étaient désorganisés, avec une atrophie de la couche nucléaire interne et des segments internes et externes des photorécepteurs.

Les études morphologiques n’ont pas permis de trancher sur la localisation du matériel vitellin.

Il a longtemps été débattu d’une localisation entre le neuroépithélium et l’épithélium pigmentaire, ou entre l’épithélium pigmentaire et la membrane de Bruch.

L’analyse des coupes en tomographie à cohérence optique (OCT) permet d’observer dans bon nombre de cas un dédoublement du complexe membrane de Bruch-épithélium pigmentaire, évoquant une localisation du matériel pseudovitelliforme à la partie basale de l’épithélium pigmentaire.

Il est intéressant de noter que la protéine bestrophin est localisée à la membrane basolatérale de l’épithélium pigmentaire.

C- ASPECTS CLINIQUES :

L’âge d’apparition est le plus souvent compris entre 7 et 12 ans.

Les circonstances de découverte les plus fréquentes sont une baisse de l’acuité visuelle centrale, uni- ou bilatérale, un flou visuel, des métamorphopsies.

Toutefois, la découverte d’une lésion vitelliforme à l’examen du fond d’oeil peut être fortuite ou s’inscrire dans le cadre d’une enquête familiale.

1- Différentes phases évolutives à l’examen du fond d’oeil :

Avant l’apparition de la lésion typique vitelliforme, il est difficile d’individualiser une lésion maculaire.

Tout au plus, on distingue dans certains cas un aspect en relief, bulleux, translucide, dans l’aire maculaire.

Il s’agit du stade prévitelliforme.

* Stade vitelliforme :

La durée de ce stade est variable, persistant en général durant l’adolescence.

Durant les premiers mois de l’apparition du disque vitelliforme, il peut être asymptomatique, sans baisse d’acuité visuelle.

On observe un aspect de lésion jaune, parfois orangée, arrondie.

Cet aspect caractéristique est encore décrit comme « oeuf sur le plat » : c’est le disque vitellin.

Les dimensions du disque vitellin sont variables, de 0,5 à deux diamètres papillaires.

La lésion est le plus souvent centrée par la fovéa.

Un ressaut des vaisseaux rétiniens sur les bords du disque donne une impression de relief.

Le reste de l’examen de la rétine, au pôle postérieur et en périphérie, est strictement normal.

Les couches internes du neuroépithélium sont en général respectées à ce stade.

Les lésions sont le plus souvent bilatérales, mais peuvent être asymétriques, avec des différences de stades évolutifs entre les deux yeux.

À ce stade, l’acuité visuelle est le plus souvent encore bonne, souvent comprise entre 6/10 et 10/10.

* Stade de remaniement :

Il correspond à la disparition progressive du matériel vitellin, avec apparition de remaniement atrophique de l’épithélium pigmentaire.

À ce stade, l’acuité visuelle commence à diminuer.

Classiquement, on distingue deux types évolutifs du matériel vitellin.

+ Aspect de « pseudohypopion » :

Cet aspect correspond à la sédimentation du matériel vitellin sous l’effet de la pesanteur.

Un niveau horizontal est alors visible, avec le matériel vitellin dans la partie inférieure et des remaniements de l’épithélium pigmentaire dans la partie supérieure.

En demandant au patient de positionner sa tête sur le côté pendant 1 à 2 heures, on peut parfois voir migrer le matériel vitellin vers la position verticale.

+ Aspect d’« oeuf brouillé » :

Il correspond à une dispersion inhomogène du matériel vitellin.

Ce matériel prend alors un aspect fragmenté, toujours dans les limites de l’aire du matériel vitellin.

Les bords de la lésion sont surélevés.

* Stade atrophique :

Il correspond au stade ultime de l’évolution de la maladie.

En l’absence d’antécédent familial ou d’examen antérieur, il est extrêmement difficile de porter le diagnostic de maladie de Best à ce stade.

L’examen du fond d’oeil révèle une plage atrophique centromaculaire.

L’atrophie peut être plus ou moins profonde.

Elle peut se limiter aux couches superficielles de la rétine, incluant essentiellement l’épithélium pigmentaire, avec un aspect central « poivre et sel ».

L’atrophie peut être plus profonde et concerner également la choriocapillaire, laissant alors voir au travers la vascularisation choroïdienne.

* Stade fibroglial :

Un aspect particulier, dit « rétractile », peut être observé.

Il ne s’agit pas du stade ultime inéluctable de l’évolution de la maladie, mais plutôt d’une forme d’évolution alternative à l’évolution atrophique.

L’aspect au biomicroscope est fibreux, de couleur jaunâtre, et peut être confondu avec le matériel vitellin, bien que plus rigide, plus figé.

Il correspond à une évolution fibrogliale de la maladie.

À ce stade, l’acuité est le plus souvent inférieure ou égale à 3/10.

2- Angiographie à la fluorescéine :

On retrouve les trois phases évolutives, corrélées à l’aspect du fond d’oeil.

* Stade vitelliforme :

Les clichés monochromatiques sont particulièrement importants à ce stade.

Sur le cliché en lumière verte, on retrouve le disque vitellin d’aspect semblable à celui du fond d’oeil, aux contours bien marqués, saillant, aux bords duquel on distingue la courbure des fins vaisseaux dans l’aire maculaire.

Sur le cliché en lumière rouge, ce disque est toujours visible, mais aux limites plus floues.

En revanche, il est important de noter que le disque disparaît sur le cliché en lumière bleue, suggérant que le matériel vitelliforme est en fait plus profond que ce qu’il pouvait paraître, du fait de la sensation de relief qu’il produit.

En effet, la longueur d’onde bleue explore essentiellement les couches superficielles de la rétine.

Juste avant l’injection de fluorescéine, il faut penser à prendre des clichés, de façon à mettre en évidence l’autofluorescence constante du matériel vitellin.

Ces deux derniers éléments, la disparition du disque en lumière bleue et son autofluorescence, sont particulièrement utiles en cas de doute diagnostique.

Aux temps choroïdiens et artériels précoces, le disque vitelliforme peut être encore visible du fait de son autofluorescence.

Rapidement, le disque se manifeste par une hypofluorescence, par effet masque, ne laissant pas voir la vascularisation choroïdienne.

Aux temps très tardifs, l’hypofluorescence apparaît moins marquée et une relative hyperfluorescence peut même être parfois visible, en relation avec un effet fenêtre dû à des altérations de l’épithélium pigmentaire plus ou moins importantes à ce stade.

On retient donc une autofluorescence laissant place à une hypofluorescence par effet masque en angiographie à la fluorescéine.

+ Stade de remaniement :

On peut observer ces deux types de remaniements du matériel vitellin.

+ Aspect de « pseudohypopion » :

Le contraste entre les deux niveaux se traduit par une normo- ou hyperfluorescence dans la partie supérieure et une hypofluorescence dans la partie inférieure.

L’hyperfluorescence relative de la partie supérieure est due à des altérations irrégulières de l’épithélium pigmentaire, provoquant un effet fenêtre.

L’hypofluorescence inférieure est due à l’effet masque du matériel vitellin sédimenté.

Les altérations de l’épithélium pigmentaire situées en regard du matériel vitellin ne sont pas visibles dans la partie inférieure, elles aussi masquées par le matériel vitellin.

+ Aspect d’« oeuf brouillé » :

Au stade précoce de la séquence angiographique, il existe une parfaite superposition entre les zones de persistance du matériel vitellin et une hypofluorescence.

Le reste de la lésion, dans l’aire du disque, apparaît comme globalement hyperfluorescent, du fait des altérations de l’épithélium pigmentaire.

Au stade plus tardif de la séquence angiographique, l’ensemble de l’aire du disque s’imprègne de fluorescence.

* Stade atrophique :

Le cliché en lumière rouge est particulièrement contributif pour apprécier l’importance de l’atrophie de l’épithélium pigmentaire.

Dès le stade précoce de la séquence angiographique, la lésion atrophique apparaît hyperfluorescente, le plus souvent d’aspect inhomogène.

Au stade ultime de la maladie, l’atrophie concerne non seulement l’épithélium pigmentaire, mais également la choriocapillaire, et laisse voir les troncs vasculaires choroïdiens, fréquemment associée à des dépôts pigmentés.

* Stade fibroglial :

Dans ces formes « rétractiles », on observe une nette hyperfluorescence du matériel fibroglial.

Cette hyperfluorescence permet faire la différence en cas de doute diagnostique entre du matériel vitellin hypofluorescent et une lésion fibrogliale hyperfluorescente.

3- Électro-oculogramme (EOG) :

Chez le sujet sain, on observe une diminution d’amplitude pendant l’adaptation à l’obscurité jusqu’à une valeur minimale (D) après 10 minutes d’obscurité et une augmentation d’amplitude pendant l’adaptation à l’éblouissement jusqu’à une valeur maximale (L) après 10 minutes d’éblouissement.

Le rapport d’Arden (L/D ´ 100 %) est normalement supérieur à 185 %.

L’EOG est un examen fondamental pour le diagnostic de maladie de Best, avec un rapport d’Arden inférieur à 145.

De plus, l’EOG peut être utilisé à un stade préclinique et peut se révéler contributif avant l’apparition du disque vitelliforme, ou encore sur l’oeil apparemment sain dans des formes apparemment unilatérales.

4- Tomographie à cohérence optique (OCT) :

Cet examen, d’apparition relativement récente, est contributif tant pour le diagnostic que pour le suivi des patients.

Au stade prévitelliforme, on retrouve parfois un dédoublement du complexe membrane de Bruch-épithélium pigmentaire, avec un espace optiquement vide entre les deux.

Au stade vitelliforme, on observe un aspect surélevé juste en dessous du plan de l’épithélium pigmentaire, avec une hyperréflectivité de la couche de l’épithélium pigmentaire.

Sur certaines coupes, le matériel semble situé entre l’épithélium pigmentaire et la membrane de Bruch.

Les couches les plus internes sont épargnées, des photorécepteurs à la limitante interne, ce qui explique la conservation de l’acuité visuelle à ce stade.

Au stade de remaniement, on distingue plus aisément la duplication de la couche épithélium pigmentaire-membrane de Bruch.

Il existe une hyperréflectivité du matériel résiduel et une hyporéflectivité dans les zones de résorption du matériel, laissant place à une zone optiquement vide.

Similairement, dans les formes de pseudohypopion, la partie supérieure, qui correspond au matériel vitelliforme résorbé, se traduit par une zone hyporéflective entre l’épithélium pigmentaire et la membrane de Bruch.

La partie inférieure du pseudohypopion, qui correspond à la sédimentation du matériel vitelliforme, se manifeste en OCT par un comblement hyperréflectif de cet espace au-dessous du plan de l’épithélium pigmentaire.

Au stade atrophique, on observe une atteinte sévère des couches plus internes de la rétine, avec un amincissement allant des photorécepteurs au neuroépithélium.

Dans les formes évolutives fibrogliales, l’examen en OCT permet d’objectiver une masse hyperréflective localisée dans les couches profondes, qui étire et amincit les couches internes de la rétine.

Cette lésion saillante se différencie aisément de l’aspect observé au stade vitelliforme et permet ainsi le diagnostic dans les cas douteux à l’examen au biomicroscope.

5- Autres techniques d’investigation :

* Angiographie au vert d’infracyanine :

Peu utile dans le contexte de disque vitelliforme, elle peut être indiquée en cas de doute sur une complication néovasculaire choroïdienne.

L’angiographie au vert d’infracyanine permet de faire la différence entre une lésion fibrogliale et une lésion néovasculaire choroïdienne.

Ces lésions sont toutes deux hyperfluorescentes en angiographie à la fluorescéine, mais seules les lésions néovasculaires choroïdiennes sont hyperfluorescentes au stade tardif de l’angiographie au vert d’infracyanine.

Dans des formes de dispersion inhomogène du matériel vitelliforme, l’angiographie au vert d’infracyanine permet d’objectiver l’atrophie de l’épithélium pigmentaire en laissant voir la vascularisation choroïdienne.

Par ailleurs, l’angiographe confocal permet de réaliser des images en autofluorescence, élément fondamental dans le diagnostic positif de disque vitelliforme.

* Examen du champ visuel :

Le champ visuel périphérique est normal.

Le champ visuel automatisé explorant les 10° centraux peut retrouver un scotome central, relatif ou absolu selon le stade de l’évolution de la maladie.

* Électrorétinogramme (ERG) :

L’ERG est normal dans la maladie de Best au stade vitelliforme.

Au stade plus tardif de l’évolution, stade atrophique ou fibroglial, l’ERG fovéolaire peut être perturbé.

D - FORMES CLINIQUES :

1- Complications néovasculaires :

L’évolution naturelle de la maladie de Best peut se compliquer d’une néovascularisation choroïdienne.

Cette néovascularisation peut apparaître à tous les stades de l’évolution de la maladie, plus souvent au stade atrophique ou fibroglial.

Elle doit être redoutée en cas d’aggravation de métamorphopsies ou d’un scotome central brutal.

À l’examen du fond d’oeil, on peut observer des hémorragies rétiniennes ou un décollement séreux rétinien, évocateurs de néovaisseaux choroïdiens.

La suspicion de lésion néovasculaire choroïdienne doit faire pratiquer une angiographie à la fluorescéine et une angiographie au vert d’infracyanine.

Si les néovaisseaux sont bien individualisables et extrafovéolaires, une photocoagulation focale au laser monochromatique peut être réalisée.

Elle nécessite une surveillance angiographique rapprochée afin de vérifier tout d’abord son efficacité, puis l’absence de récidive.

2- Formes unilatérales :

Les formes unilatérales de la maladie de Best ne sont pas rares. Elles correspondent souvent à une asymétrie d’évolution de la maladie.

L’EOG peut être utile pour témoigner de l’atteinte infraclinique de l’oeil apparemment indemne.

Chez certains patients, la maladie reste unilatérale tout au long de l’évolution.

3- Formes multifocales :

Ces formes sont plus rares ; elles correspondent à la coexistence de plusieurs disques vitelliformes visibles au pôle postérieur.

Plusieurs critères doivent être réunis pour poser le diagnostic de maladie de Best à foyers multiples : bilatéralité, taille des disques vitelliformes comprise entre un et deux diamètres papillaires, disparition des lésions sur les clichés en lumière bleue, autofluorescence des lésions et effet de masquage à l’angiographie à la fluorescéine.

4- Forme de l’adulte :

Il existe une forme tardive de la maladie de Best, dite « pseudo- Best », pseudovitelliforme ou encore maladie de Gass.

Depuis la description par Gass en 1974, la dystrophie fovéomaculaire vitelliforme de l’adulte pose la question du continuum entre certaines dystrophies maculaires de l’enfance et des atteintes maculaires de l’adulte, voire liées à l’âge (DMLA).

Elle concerne l’adulte, le plus souvent entre 35 et 55 ans.

L’acuité visuelle est conservée, entre 6/10 et 8/10, et les circonstances de découverte peuvent être la présence d’un scotome relatif, de métamorphopsies, ou simplement une découverte fortuite lors d’une consultation pour presbytie.

À l’examen du fond d’oeil, elle est caractérisée par une lésion vitelliforme de 0,5 à 1 diamètre papillaire de diamètre, en relief, jaunâtre.

Les contours sont le plus souvent réguliers et homogènes.

L’atteinte est souvent unilatérale.

En angiographie à la fluorescéine, la lésion se comporte exactement comme dans la forme typique de l’enfant, avec une atténuation du matériel vitelliforme sur les clichés en lumière bleue, une autofluorescence, un effet de masquage à la phase précoce de la séquence en angiographie à la fluorescéine.

La lésion s’imprègne toutefois de colorant et devient plutôt hyperfluorescente aux stades intermédiaires et tardifs de la séquence.

L’hypofluorescence précoce par effet de masquage et l’absence de diffusion du colorant permettent de différencier cet aspect d’une membrane néovasculaire choroïdienne à type de néovaisseaux visibles rétrofovéolaires.

Cette lésion vitelliforme est fréquemment entourée de drusen miliaires.

L’examen en OCT retrouve une lésion située au-dessus du plan de l’épithélium pigmentaire.

L’évolution spontanée est lente et se fait vers la dispersion du matériel vitelliforme, puis vers l’atrophie centromaculaire.

Des néovaisseaux peuvent apparaître et une angiographie au vert d’infracyanine permet de distinguer les néovaisseaux choroïdiens du matériel vitelliforme constamment hypofluorescent en angiographie au vert d’infracyanine.

E - DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL :

* Choriorétinopathie séreuse centrale :

Au stade prévitelliforme ou au stade de résorption du matériel, l’aspect de bulle pourrait se confondre avec une bulle de choriorétinopathie séreuse centrale.

L’angiographie à la fluorescéine permet de distinguer ces deux entités.

* Dystrophie réticulée :

Au stade de remaniement du matériel, la question du diagnostic différentiel peut parfois se poser, devant une alternance de zones hyperfluorescentes et hypofluorescentes confluentes.

* Autres dystrophies maculaires :

Au stade terminal atrophique, l’aspect peut se confondre avec une maladie de Stargardt ou encore avec une dystrophie des cônes évoluée.

* Décollement de l’épithélium pigmentaire drusénoïde :

Certains décollements de l’épithélium pigmentaire drusénoïdes peuvent prendre un aspect arrondi à bords homogènes qui peut parfois se confondre en biomicroscopie avec une forme de l’adulte de maladie de Best.

Les clichés en autofluorescence et l’angiographie à la fluorescéine aident au diagnostic différentiel, le décollement de l’épithélium pigmentaire drusénoïde n’étant pas autofluorescent et constamment hyperfluorescent lors de la séquence angiographique.

Maladie de Stargardt :

Décrite en 1909 par Stargardt, cette atteinte maculaire se révèle dès l’enfance et conduit rapidement à une perte de la vision centrale avec un champ visuel périphérique conservé.

La perte de l’acuité visuelle survient classiquement entre 7 et 12 ans.

Le syndrome de fundus flavimaculatus décrit par Franceschetti en 1963, qui débute par des taches blanc jaunâtre dites flavimaculées, avant l’apparition de la maculopathie, est d’apparition souvent plus tardive.

A - ASPECTS GÉNÉTIQUES :

Le mode de transmission le plus fréquent est autosomique récessif, dans plus de 90 % des cas.

Les formes à transmission autosomique dominante sont plus rares et il n’existe pas de formes liées à l’X.

Il faut donc rechercher la notion d’une consanguinité parentale à l’interrogatoire, qui oriente vers une transmission autosomique récessive et peut aider au conseil génétique.

Le gène de la maladie de Stargardt, dans ses formes classiques et dans ses formes à début tardif, a été localisé sur le bras court du chromosome 1, en 1p21- p13, par Kaplan en 1993.

Ce gène a ensuite été identifié par Allikmets en 1997 et nommé ABCR.

Il s’agit d’un gène de la famille ABC (ATP-binding transporter gene) codant pour des protéines transmembranaires impliquées dans le transport énergiedépendant de nombreux substrats au travers de membranes cellulaires.

En travaillant sur cette superfamille de gènes, il est apparu que l’un d’entre eux était exprimé exclusivement sur la rétine, le retina specific ABC (ABCR).

Ce gène est impliqué dans la maladie de Stargardt, mais aussi dans des formes de rétinite pigmentaire ou de cone-rod dystrophy.

De plus, il a été suggéré que certaines mutations à l’état hétérozygote puissent constituer des facteurs de prédisposition génétique pour la DMLA.

La protéine ABCR, spécifique des photorécepteurs, est impliquée dans le transport transmembranaire des rétinoïdes.

La protéine mutante donne lieu à une accumulation de N-rétinylidène-PE dans les segments externes des photorécepteurs.

Le A2-E, sous-produit du N-rétinylidène-PE, s’accumule dans les cellules de l’épithélium pigmentaire rétinien et est toxique pour ces dernières.

Il semble que les photorécepteurs meurent secondairement, suite à l’atteinte de l’épithélium pigmentaire rétinien.

Il existe une autre localisation chromosomique, en 6q11-q15, qui correspond au gène ELOVL4, spécifique des photorécepteurs.

Ce gène est impliqué, de façon moins prépondérante, dans quelques formes de maladie de Stargardt à transmission autosomique dominante.

B - HISTOLOGIE :

Il existe très peu d’études anatomopathologiques contributives, hormis celle de Klein et Krill, qui ont analysé une rétine atteinte de syndrome de fundus flavimaculatus sur un oeil énucléé après un traumatisme.

Ils ont conclu à la présence de dépôts d’acide mucopolysaccharidique (acide hyaluronique).

Eagle et al retrouvaient peu de coloration positive d’acide hyaluronique, mais surtout une accumulation massive de lipofuscine (qui est composée de A2-E) dans les cellules de l’épithélium pigmentaire.

C - ASPECTS CLINIQUES :

Dans sa forme classique, la maladie se manifeste entre l’âge de 8 et 12 ans par une baisse de l’acuité visuelle centrale.

Paradoxalement, l’enfant se déplace parfaitement et il se peut même qu’il reconnaisse certains détails.

À ce stade initial, l’examen du fond d’oeil est souvent normal.

Se pose alors le diagnostic différentiel avec une simulation devant une plainte fonctionnelle subjective et un examen ophtalmoscopique normal.

Il ne faut pas hésiter à répéter l’examen ophtalmologique car les lésions apparaissent le plus souvent en quelques mois.

L’examen de la vision des couleurs révèle un axe deutan (rouge-vert), ce qui est exceptionnel pour les atteintes maculaires héréditaires et contribue donc au diagnostic.

À un stade plus évolué, la dyschromatopsie devient anarchique.

Le champ visuel périphérique reste normal tout au long de l’évolution de la maladie. ¦

1- Examen du fond d’oeil :

À l’examen du fond d’oeil, la macula est peu ou non modifiée au début de la maladie de Stargardt.

En quelques mois, on distingue une perte du reflet fovéolaire et un aspect granité de l’épithélium pigmentaire.

Cet aspect est parfois décrit dans la littérature comme « aspect vermillon », « aspect dépoli » ou encore en « bave d’escargot ».

Ces lésions évoluent ensuite vers une atrophie de l’épithélium pigmentaire parafovéolaire, classiquement ovale.

Des taches blanchâtres dites flavimaculées, ou encore appelées flecks, peuvent être observées discrètement autour de la fovea, plus à distance autour de l’aire maculaire, ou encore plus loin au pôle postérieur ou en périphérie rétinienne.

Elles sont très polymorphes, arrondies, fusiformes, lancéolées, pisciformes, géantes, en ailes de papillon ou encore en X (dystrophie flavimaculée en X de Puech).

Elles apparaissent en relief, à limites bien définies, blanc jaunâtre.

Plus tard, en quelques années, ces taches flavimaculées se désagrègent, sont moins en relief, ont des contours moins bien limités, prennent une coloration plus grisâtre et laissent place à des altérations de l’épithélium pigmentaire.

Au stade final de l’évolution de la maladie de Stargardt, il n’existe qu’une vaste plage d’atrophie choriorétinienne centrale.

Les taches flavimaculées sont difficilement individualisables à ce stade.

2- Angiographie à la fluorescéine :

Sur le cliché monochromatique en lumière verte, les taches flavimaculées sont bien visibles, ainsi que l’atrophie maculaire centrale. Ces taches ne disparaissent pas sur les clichés en lumière bleue, à la différence du dépôt de matériel vitelliforme.

Le cliché en lumière rouge permet de visualiser des plages d’atrophie choriorétinienne maculaires profondes.

Un cliché en autofluorescence doit être réalisé en cas de suspicion de maladie de Stargardt.

Il permet de démontrer le caractère autofluorescent des taches blanches flavimaculées.

La séquence angiographique fluorescéinique est particulièrement contributive pour porter le diagnostic de maladie de Stargardt, avec une triade sémiologique.

* Maculopathie en « oeil de boeuf » :

Il s’agit sans doute du signe le plus fréquent à la phase d’état de la maladie.

Elle correspond à une alternance de trois zones en « cible », dites en « cocarde », qui sont :

– une hypofluorescence centrale par effet de masquage, liée à la présence du pigment xanthophylle ;

– une hyperfluorescence en couronne par effet fenêtre, liée aux altérations de l’épithélium pigmentaire ;

– une hypofluorescence relative en deuxième couronne, par effet de contraste avec la couronne hyperfluorescente.

Cette maculopathie n’est pas spécifique de la maladie de Stargardt ; elle peut être observée dans plusieurs autres pathologies, telles que la dystrophie des cônes, l’intoxication aux antipaludéens de synthèse, le syndrome de Bardet-Biedl, certaines mitochondriopathies, le syndrome de Hallervorden-Spatz, etc.

Elle ne représente pas non plus un critère obligatoire pour le diagnostic de maladie de Stargardt ; les atteintes de l’épithélium pigmentaire étant cliniquement hétérogènes, la couronne d’hyperfluorescence en angiographie à la fluorescéine l’est donc également.

* « Silence choroïdien » :

Ce terme désigne une raréfaction de la visibilité du pommelé choroïdien avec aspect sombre de la choroïde.

Ce silence choroïdien correspond à un effet masque par accumulation diffuse de lipofuscine dans l’épithélium pigmentaire.

Il s’associe à une accentuation de la visibilité des fins vaisseaux rétiniens et de leurs ramifications.

Cet aspect est quasi pathognomonique dans ce contexte.

Il n’est pas toujours bien visible au pôle postérieur de la rétine en raison des multiples altérations de l’épithélium pigmentaire qui laissent place à une hyperfluorescence par effet fenêtre.

Aussi, il faut réaliser des clichés en périphérie rétinienne à la recherche d’un silence choroïdien dès que l’on évoque une dystrophie maculaire de Stargardt.

Il existe toutefois quelques formes sans silence choroïdien.

Notons que le silence choroïdien peut ne pas être bien visible au début de l’évolution de la maladie de Stargardt et qu’il peut être difficile à mettre en évidence au stade très tardif si les altérations de l’épithélium pigmentaire sont trop diffuses.

* Taches « flavimaculées » :

Elles se manifestent constamment en angiographie à la fluorescéine par une hypofluorescence par effet masque au début de leur apparition.

Cette hypofluorescence contraste avec l’hyperfluorescence des bords liée aux altérations de l’épithélium pigmentaire adjacentes.

Plus tard, lorsque les taches flavimaculées se désagrègent, cet aspect laisse place à une discrète hyperfluorescence inhomogène, à limites mal définies, qui ne correspond plus qu’aux altérations résiduelles de l’épithélium pigmentaire.

Là encore, on retrouve l’extrême hétérogénéité et le polymorphisme de ces taches : petites ou géantes, périfovéolaires ou diffuses, arrondies ou lancéolées.

3- Angiographie au vert d’infracyanine :

Cet examen est également très contributif pour le diagnostic positif de maladie de Stargardt et doit être réalisé en cas de doute diagnostique.

Il permet en fait de distinguer parfaitement les taches flavimaculées, constamment hypofluorescentes, visibles entre la quinzième et la trentième minute de la séquence angiographique selon les appareils et les techniques d’acquisition d’images.

Lorsque les taches blanches flavimaculées ne sont plus individualisables en angiographie à la fluorescéine à cause de l’hyperfluorescence globale liée aux multiples altérations de l’épithélium pigmentaire, l’angiographie au vert d’infracyanine permet encore de les distinguer avec précision.

Il en est ainsi dans des formes très évoluées de la maladie ; lorsque le patient atteint depuis son enfance consulte à un âge plus avancé, l’angiographie au vert d’infracyanine est souvent le seul examen à pouvoir distinguer des flecks flavimaculés.

De même, dans des formes avec de petits flecks périfovéolaires, l’angiographie au vert d’infracyanine permet d’individualiser les petites taches hypofluorescentes.

Un autre signe contributif est la présence de pin-points, petits points hyperfluorescents en tête d’épingle, localisés préférentiellement sur les bords des taches hypofluorescentes flavimaculées au stade tardif de l’examen.

Ils constituent un aspect dit « granité ».

Une couronne hyperfluorescente péripapillaire a parfois pu être observée chez certains patients.

Sa signification reste inconnue.

Notons également que les appareils d’acquisition confocale d’images permettent de réaliser des clichés en autofluorescence, qui objectivent les taches blanches flavimaculées.

4- Examen en tomographie à cohérence optique :

Cet examen n’est pas utile pour le diagnostic de maladie de Stargardt.

Dans certaines formes de taches flavimaculées géantes, il peut permettre de préciser la localisation de ces taches, en avant du plan de l’épithélium pigmentaire.

5- Électrorétinogramme :

Il est le plus souvent normal au début de la maladie.

En cas de doute, devant une baisse de la vision centrale associée à un aspect en oeil de boeuf en angiographie à la fluorescéine, l’ERG normal permet de faire le diagnostic différentiel avec une dystrophie des cônes.

Ce n’est qu’à un stade plus avancé, lorsque la macula revêt un aspect atrophique, que l’on peut enregistrer une atteinte des cônes.

L’ERG en mode flicker se révèle plus sensible pour détecter de minimes anomalies électrorétinographiques dans la maladie de Stargardt.

D - FORMES DE L’ADULTE :

La maladie peut apparaître plus tardivement dans la vie, entre la deuxième et quatrième décade.

Elle débute alors souvent par l’apparition des taches blanches flavimaculées autour de la macula, sans atrophie centrale et sans baisse de vision centrale.

Il s’agit de la description de Franceschetti en 1963, qui constitue le syndrome de fundus flavimaculatus.

L’évolution est le plus souvent lentement progressive.

Elle se fait vers une atteinte centrale à type d’atrophie de l’épithélium pigmentaire, puis vers une atrophie plus profonde choriorétinienne, entraînant un scotome central.

L’avancée des travaux de biologie moléculaire a permis de démontrer qu’il s’agissait en fait d’une seule et même entité avec la maladie de Stargardt de l’enfant.

Le fundus flavimaculatus et la maladie de Stargardt diffèrent par l’âge d’apparition et la vitesse d’évolution, mais sont toutes deux causées par des mutations sur le gène ABCR.

Il existe également des formes d’apparition très tardive, après l’âge de 55 ans, parfois bien plus tard.

Ces formes posent le problème d’une double définition : celle d’une dégénérescence maculaire liée à l’âge, et celle d’une dystrophie maculaire de Stargardt.

Ces formes ont été appelées syndrome de fundus flavimaculatus lié à l’âge ou encore dystrophie maculaire de Stargardt liée à l’âge (DMSLA).

Chez ces patients, on observe en effet tous les critères angiographiques de maladie de Stargardt : flecks hypofluorescents et silence choroïdien en angiographie fluorescéinique, et flecks hypofluorescents avec aspect granité hyperfluorescent en angiographie au vert d’infracyanine.

L’évolution se fait vers la constitution de zones d’altérations de l’épithélium pigmentaire dans des zones de dégradation des taches flavimaculées, puis lentement vers la constitution de plages d’atrophie choriorétinienne plus profondes.

Ces dernières sont responsables du scotome central avec perte de la vision centrale et cécité légale.

Il a également été observé des complications néovasculaires sur ces formes d’apparition très tardive de maladie de Stargardt. Sans angiographie, bon nombre de ces cas pourraient être considérés comme de simples dégénérescences maculaires liées à l’âge atrophiques ou exsudatives.

L’analyse du gène ABCR a permis de confirmer que ces formes de dégénérescences maculaires liées à l’âge sont bien apparentées à la maladie de Stargardt.

Il a en effet été retrouvé des mutations stop à l’état hétérozygote, aboutissant à une protéine ABCR tronquée, responsable du phénotype tardif.

E - DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL :

1- Dystrophie réticulée :

Dans certains cas, particulièrement lorsque la dystrophie apparaît à l’âge adulte, les taches flavimaculées peuvent présenter un aspect confluent ou stellaire.

Cet aspect a été décrit de façon remarquable par Puech sous le nom de dystrophie maculaire en X flavimaculée.

L’hérédité est souvent autosomique dominante.

L’évolution est lente et la rétine prend un aspect plus typique de maladie de Stargardt avec les années, avec dispersion diffuse de taches flavimaculées, silence choroïdien, etc.

Ces formes sont également liées au gène ABCR.

C’est dans cet aspect que la maladie de Stargardt peut poser le problème du diagnostic différentiel avec une dystrophie réticulée.

Les antécédents familiaux, la présence d’un silence choroïdien ou l’évolution spontanée peuvent aider à départager entre ces deux entités.

2- Dystrophie des cônes :

Une baisse de la vision centrale avec une maculopathie en oeil de boeuf bilatérale chez un sujet jeune peut correspondre indifféremment à une dystrophie des cônes ou à une maladie de Stargardt.

À l’interrogatoire, il faut tout d’abord éliminer l’hypothèse d’une intoxication aux antipaludéens de synthèse.

En faveur de la dystrophie des cônes, on retient une forte photophobie, une perte de l’épaisseur fovéolaire en OCT, mais surtout une atteinte sévère des cônes à l’ERG.

En faveur d’une maladie de Stargardt, on recherche attentivement un silence choroïdien et la présence de taches flavimaculées.

Au besoin, on s’aide d’une angiographie au vert d’infracyanine pour identifier ces taches flavimaculées et un aspect granité.

3- Rétinite ponctuée albescente :

Il s’agit en fait d’une rétinite pigmentaire à laquelle se surajoutent des taches blanches au fond d’oeil.

Ces taches sont peu en relief.

La triade sémiologique à l’examen du fond d’oeil (papille pâle, vaisseaux graciles, dépôts de pigment), associé à l’examen du champ visuel et à l’ERG, permet aisément le diagnostic.

Le pronostic est alors plus sévère, avec une cécité totale à la fin de l’évolution de la maladie.

4- « Flecks » bénins familiaux diffus :

Cette entité, rarement décrite, correspond à l’accumulation de taches blanches, planes, très diffuse sur toute la rétine.

Ces taches confluent progressivement pour donner un aspect tigré à la rétine.

En angiographie à la fluorescéine, on observe tout au plus un aspect poivre et sel diffus.

L’examen du champ visuel et l’ERG sont strictement normaux.

Le patient est asymptomatique et la découverte en est fortuite.

L’évolution est favorable et le patient reste fonctionnellement sain malgré l’aspect impressionnant à l’examen du fond d’oeil.

L’hérédité se fait sur le mode autosomique dominant.

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