Sur le plan physiologique, la voix est produite par le larynx
au niveau des cordes vocales.
Le larynx possède aussi une
fonction sphinctérienne lors de la déglutition ; il protège
les voies aériennes inférieures. Enfin, il intervient dans la
respiration et le réflexe de toux.
L’émission de la voix est
un phénomène neurophysiologique complexe.
Le vibrateur
laryngé produit un son fondamental au niveau des
cordes vocales par l’action de la soufflerie pulmonaire.
Il
est ensuite modifié par les cavités de résonance situées audessus
du larynx (les cavités pharyngées, buccales et nasosinusiennes),
et les articulateurs (le voile du palais, la
langue et les lèvres) pour acquérir les propriétés de la voix
et de la parole.
La voix se traduit schématiquement selon
3 paramètres : la fréquence, le timbre et l’intensité.
Elle
peut être évaluée par un jury d’écoute, et surtout par des
logiciels informatiques analysant le signal acoustique et
les différents paramètres de la parole enregistrés.
Diagnostic positif
:
A - Interrogatoire :
Il peut à lui seul orienter vers une étiologie.
Il analyse dans
un premier temps la dysphonie.
Il recherche son ancienneté.
Toute dysphonie se prolongeant plus de trois semaines doit
être considérée comme une dysphonie chronique.
L’interrogatoire précise l’horaire et le caractère permanent ou transitoire
de la dysphonie.
On évalue à l’écoute si l’altération
de la voix porte sur le timbre, l’intensité ou la fréquence.
Dans un deuxième temps, on recherche systématiquement
un contexte infectieux associé, et d’autres signes fonctionnels
pouvant orienter vers une cause précise : une otalgie
unilatérale évoquant un cancer pharyngo-laryngé, une
dysphagie, une gêne pharyngée, une odynophagie, une
expectoration sanglante, une douleur laryngée, une dyspnée
laryngée.
Dans un troisième temps, l’interrogatoire recherche des
antécédents laryngés et généraux : une intubation laryngotrachéale
lors d’une anesthésie générale et une trachéotomie
orientant vers une sténose laryngo-trachéale, une
intervention chirurgicale cervicale (thyroïdectomie par
exemple) ou thoracique orientant vers une paralysie laryngée,
un traumatisme cervical ou laryngé, un traitement antérieur
par radiothérapie cervicale évoquant un cancer de la
glande thyroïde ou une ankylose crico-arytéroïdienne, un
reflux gastro-oesophagien, une maladie générale : sarcoïdose,
polyarthrite rhumatoïde, tuberculose, syphilis, endocrinopathie,
maladie de Wegener.
L’interrogatoire recherche des facteurs de risque : intoxications
tabagique et alcoolique évoquant un cancer du
larynx, ou une laryngite précancéreuse.
On définit enfin si
le patient appartient au groupe des professionnels de la
voix : acteur, chanteur, enseignant, profession avec contact
avec le public.
Cet élément interviendra dans le choix du
traitement.
B - Examen du larynx :
1- Inspection cervicale :
Elle recherche une déformation, une cicatrice de trachéotomie,
de thyroïdectomie, de cervicotomie ou d’abord du
larynx.
2- Palpation cervicale :
La palpation cervicale avec mains protégées par des gants
analyse : l’os hyoïde, les cartilages thyroïde et cricoïde, les
membranes thyro-hyoïdienne et crico-thyroïdienne à la
recherche d’une déformation et d’une douleur.
La palpation
cervicale se termine toujours par la palpation de toutes
les aires ganglionnaires à la recherche d’une adénopathie
pouvant évoquer un cancer du larynx ou de la glande thyroïde.
La glande thyroïde est toujours palpée à la recherche
d’une augmentation globale de volume de la glande et de
nodules intraglandulaires.
3- Laryngoscopie :
La laryngoscopie peut être réalisée à l’aide d’un miroir
laryngé nécessitant un bon éclairage frontal.
C’est la laryngoscopie
indirecte, pratiquée au besoin après une anesthésie
locale chez les sujets au réflexe nauséeux intense.
Elle
peut aussi être réalisée avec un nasofibroscope introduit
par la fosse nasale ou une optique rigide à 90° introduite
par la bouche, et couplé avec un générateur de lumière
froide.
Grâce à ces examens, il est toujours possible de
visualiser le larynx. Ils permettent de réaliser un éventuel
enregistrement vidéo.
On doit toujours réaliser un schéma,
et au mieux prendre des photographies du larynx.
On étudie
la morphologie laryngée à la recherche d’une anomalie
au niveau des trois étages du larynx : supraglottique,
glottique et sous-glottique.
On évalue la dynamique laryngée,
et en particulier la mobilité des cordes vocales et des
cartilages aryténoïdes.
C - Examen ORL
:
L’examen ORL est toujours complet.
Il apporte des éléments
orientant vers le diagnostic étiologique.
Il étudie systématiquement : la cavité buccale, le pharynx, les fosses
nasales, les pavillons de l’oreille, les conduits auditifs
externes, les tympans, les paires crâniennes.
Il est très rare
qu’il soit impossible de visualiser le larynx par les différentes
techniques de laryngoscopie en consultation.
Chez
certains sujets pusillanimes ou au réflexe nauséeux important,
la laryngoscopie est impossible en consultation.
En
présence d’une dysphonie chronique chez les sujets à risque
de cancer, il faut toujours réaliser une endoscopie (microlaryngoscopie
directe en suspension) sous anesthésie générale
pour visualiser l’ensemble du larynx et pratiquer une
biopsie au moindre doute.
D - Examens complémentaires :
Ils sont demandés en fonction du caractère aigu ou chronique
de la dysphonie et de l’étiologie.
Une laryngoscopie
simple pratiquée en consultation est en règle suffisante dans
les dysphonies aiguës inflammatoires de l’adulte s’intégrant
dans le cadre d’une laryngite aiguë virale. Un bilan
précis est par contre indispensable dans les dysphonies
chroniques : vidéo-laryngo-stroboscopie analysant les
vibrations et les ondulations de la muqueuse cordale, et
analyse acoustique informatisée du signal vocal.
D’autres
examens peuvent être demandés dans le cadre d’un bilan préthérapeutique ou d’une recherche étiologique particulière,
ils ne sont pas systématiques : électroglottographie,
électromyographie laryngée, mesures aérodynamiques
laryngées, tomodensitométrie laryngée et cervicale, bilan
pulmonaire.
Diagnostic différentiel
:
Une dysphonie doit être distinguée d’une rhinolalie ouverte
ou fermée, secondaire à une modification des cavités de
résonance (oropharynx, cavité buccale, cavités rhino-sinusiennes,
voile du palais).
La dysphonie doit être différenciée
des modifications de la voix secondaires à un trouble
des articulateurs (langue, voile du palais, lèvres).
Les dysarthries
sont un trouble de la parole pouvant comporter un
dysphonie.
Diagnostic étiologique
:
1- Dysphonies aiguës :
La laryngite aiguë est l’étiologie la plus fréquente des dysphonies.
Elle est d’origine virale ou bactérienne.
Il s’agit
d’une inflammation des cordes vocales.
La dysphonie persiste
quelques jours puis disparaît totalement. Les autres
dysphonies aiguës sont secondaires à un traumatisme du
larynx, soit interne après une intubation laryngo-trachéale
lors d’une anesthésie générale, soit externe par traumatisme
laryngé avec ou sans plaie cervicale (hématome laryngé,
fracture des cartilages du larynx, luxation crico-aryténoïdienne).
2- Dysphonies chroniques de l’adulte :
Les causes des dysphonies de l’adulte appartiennent à 4
groupes principaux : les atteintes morphologiques de la
corde vocale, les immobilités laryngées secondaires à une
paralysie laryngée, les immobilités laryngées d’origine
mécanique, les dysphonies fonctionnelles en l’absence
d’anomalie morphologique et de la mobilité laryngée.
Parmi ces causes, les laryngites chroniques précancéreuses,
le cancer du larynx, et les paralysies laryngées sont les
affections les plus importantes à connaître.
• Les laryngites précancéreuses leucoplasiques (dépôt
blanc de kératine sur la corde vocale), et érythroplasiques
(aspect inflammatoire rouge de la muqueuse cordale) surviennent
chez les sujets à risque (tabac).
Elles imposent
une endoscopie sous anesthésie générale avec biopsie pour
éliminer un cancer.
L’arrêt du tabac doit être définitif et la
surveillance régulière pour dépister précocement la survenue
d’un cancer.
Le carcinome épidermoïde est le plus fréquent des cancers
du larynx.
La dysphonie est le signal d’appel. Une endoscopie
(micro-laryngoscopie en suspension) sous anesthésie
générale est systématique.
Elle permet de préciser le
siège de la tumeur et ses extensions. Les biopsies sont systématiques.
• Parmi les paralysies laryngées, les paralysies récurrentielles
sont les plus fréquentes. Elles sont isolées ou s’intègrent
dans le cadre d’une paralysie complète du nerf
pneumogastrique.
La dysphonie de la paralysie récurrentielle
est la classique voix bitonale.
La majorité des paralysies
laryngées sont de cause périphérique.
Les causes les
plus fréquentes des paralysies récurentielles unilatérales
sont : le traumatisme chirurgical du nerf récurrent (thyroïdectomies,
parathyroïdectomies, chirurgie de l’oesophage
cervical, chirurgie thoracique), et les traumatismes cervicaux.
Les causes endothoraciques sont à l’origine d’une
paralysie récurrentielle gauche.
Les paralysies récurrentielles
idiopathiques représentent environ 30 % des causes ; elles sont
souvent spontanément résolutives.
Les paralysies récurrentielles bilatérales sont
plus rares (diplégie laryngée).
Le signe fonctionnel principal
est une dyspnée laryngée dans les paralysies bilatérales
en adduction (fermeture).
Le signe fonctionnel principal
est une dysphonie sans dyspnée dans les paralysies
bilatérales en adbuction (ouverture).
Les causes des paralysies récurrentielles bilatérales sont périphériques : cancer
de la région cervicale (thyroïde, oesophage, trachée) ;
chirurgicales (thyroïdectomie, parathyroïdectomie, chirurgie
de l’oesophage ou de la trachée) ou centrales : inflammatoires
(poliomyélite, syphilis, syndrome de Guillain et
Barré, méningite) ; vasculaires ; tumorales ; dégénératives :
syringobulbie et sclérose latérale amyotrophique malformatives
: syndrome d’Arnold-Chari.
La
dysphonie spasmodique est une entité clinique à différencier des
paralysies laryngées.
Elle se caractérise par un trouble de la voix secondaire à un
hyperfonctionnement des muscles adducteurs ou abducteurs.
Certaines modifient la
morphologie de la corde vocale expliquant que l’on
retrouve des pathologies communes aux deux groupes. Les
dysphonies fonctionnelles sont un diagnostic d’élimination,
le traitement est la rééducation vocale.