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Ophtalmologie
Correction des amétropies par lentilles de contact
Cours d'Ophtalmologie
 
 
 

Introduction :

Les amétropies peuvent être corrigées de différentes façons : par des verres correcteurs, par des lentilles de contact ou par chirurgie réfractive.

Les lentilles présentent des avantages optiques par rapport aux verres, tels l’agrandissement du champ du regard, et dans les cas d’amétropies myopiques importantes, une amélioration importante de l’acuité visuelle.

Elles correspondent également à une demande esthétique chez beaucoup de patients et à des demandes pratiques, notamment chez les sportifs et chez les porteurs de lunettes travaillant en extérieur.

Par ailleurs, elles sont le seul moyen de récupérer une bonne acuité visuelle en cas d’astigmatisme cornéen irrégulier et lors d’anisométropie importante (supérieure à 3 dioptries).

Les avantages des lentilles par rapport à la chirurgie réfractive sont essentiellement la possibilité de modifier la puissance dioptrique nécessaire à chaque amétrope au cours de sa vie, de donner une acuité visuelle optimale.

De plus, ce mode de correction est réversible, à la différence de la majorité des techniques chirurgicales utilisées qui traitent la zone cornéenne centrale.

Un port de lentilles dans de bonnes conditions nécessite :

– un examen médical éliminant certaines causes rares de contre-indications ;

– une adaptation soigneuse ;

– un suivi médical ;

– une information du patient ;

– des règles d’hygiène et un respect des consignes d’entretien et de renouvellement des lentilles.

Évolution des lentilles de contact :

A - INDICATIONS DE PORT DE LENTILLES DE CONTACT :

Elles se sont considérablement élargies avec les années.

Si au moment de leur découverte elles n’étaient réservées qu’à des indications d’ordre médical, et plus particulièrement à équiper les kératocônes dont l’acuité visuelle en verres correcteurs était insuffisante, les indications actuelles sont représentées pour leur grande majorité par des indications d’ordre cosmétique.

 

On estime que le nombre de porteurs de lentilles dans le monde en 2000 est de 80 millions.

C’est aux États-Unis que ce nombre est le plus élevé, puisque 12 % de la population porte des lentilles de contact, soit 33 millions d’Américains.

En France, le nombre de porteurs de lentilles dans la population est de l’ordre de 4 % et représente en nombre environ 2,5 millions d’individus.

La pénétration de ce mode de correction des amétropies est moins importante que dans certains pays européens comme le Royaume-Uni (6 %) ou les Pays-Bas (10 %).

B - ÉVOLUTION DANS LE MODE DE PORT DES LENTILLES :

L’évolution du profil du porteur est manifeste en 20 ans : de plus en plus de jeunes et d’adolescents sont équipés, les presbytes s’y intéressent de plus en plus et le concept même du port a évolué.

Actuellement, le choix n’est plus lentilles ou lunettes, mais souvent une alternance du port des deux en fonction des envies ou des activités.

L’apparition de la première lentille souple jetable en 1987 a profondément bouleversé les habitudes des porteurs.

La possibilité de garder une lentille 7 jours consécutifs a entraîné un regain du port permanent dont l’utilisation était jusque-là le plus souvent réservée à ceux ayant des difficultés manifestes de manipulation.

Cependant, différentes publications ont commencé à rapporter une incidence de complications infectieuses plus importante que lors de port journalier, et équivalente à celle rapportée avec le port permanent traditionnel.

L’espoir escompté d’un taux significativement moindre de kératites infectieuses du fait du remplacement hebdomadaire des lentilles s’infirmait.

Néanmoins, l’idée qu’un renouvellement plus fréquent des lentilles constituait un bénéfice pour le porteur apparut.

Ces nouvelles possibilités technologiques d’augmentation majeure de production et de coût moindre des lentilles se sont alors orientées vers la fabrication de lentilles dédiées à un port journalier et dont la fréquence de remplacement, au début trimestrielle, est vite devenue mensuelle et peut être quotidienne.

Le remplacement fréquent en lentilles date donc d’une dizaine d’années et supplante de plus en plus le remplacement dit « traditionnel ».

Toutes les publications concordent pour rapporter une diminution de la fréquence globale des complications liées aux lentilles lorsque les lentilles sont changées plus souvent.

Les lentilles jetables journalières, disponibles depuis 5 ans, s’avèrent avoir le taux de complications le plus bas, confortant cette notion de sécurité augmentée avec un renouvellement très rapide.

Ces lentilles jetables journalières représentent, pour un nouveau groupe de la population, une réponse adaptée à ses désirs de porteur occasionnel.

Le port permanent reste toujours d’un grand intérêt auprès des amétropes qui apprécient l’absence de manipulation et d’entretien inhérents au port des lentilles.

Le développement de nouveaux matériaux souples et l’évolution majeure de leurs performances en termes d’oxygénation cornéenne devrait assurer une meilleure sécurité cornéenne.

De nombreuses études en cours, débutées depuis 1999, apporteront certainement les réponses à ces interrogations.

Par ailleurs, la correction de la presbytie en lentilles connaît un essor tout particulier avec les lentilles disponibles à remplacement fréquent.

Aux États-Unis, notamment, le nombre d’adaptations a augmenté de 300 % en 1999.

C - ÉVOLUTION DES MATÉRIAUX :

Comme tous les biomatériaux utilisés actuellement, les lentilles de contact ont bénéficié bien évidemment de l’évolution des connaissances concernant la chimie des composés et la physiologie cornéenne.

L’amélioration des techniques de fabrication, la robotisation, la précision micrométrique des outils de fabrication ont également concouru à une meilleure finition des lentilles, à une reproductibilité excellente de celles-ci, et enfin, à une diminution de leur coût, facilitant ainsi leur diffusion à l’usager.

1- Matériaux des lentilles souples :

C’est Otto Wichterlé, en 1961, qui eut le premier l’idée d’utiliser de l’hydroxyéthyl-méthacrylate (HEMA) pur ou 2-HEMA pour réaliser des lentilles.

Cette découverte fut à l’origine du véritable développement de la contactologie, par le confort immédiat que procurent ces lentilles au porteur.

Ce monomère est très stable, a une bonne mouillabilité et son taux d’hydratation est de 38 %.

Actuellement, les lentilles souples hydrophiles sont surtout des copolymères obtenus par polymérisation.

Selon la composition des monomères utilisés, on obtient des propriétés physiques et chimiques différentes pour les lentilles, concernant notamment leur hydrophilie, leur perméabilité à l’oxygène (Dk), leur résistance mécanique.

Les monomères les plus utilisés sont :

– l’HEMA ;

– le N-vinyl pyrrolidone (NVP) : matériau très hydrophile permettant d’augmenter l’hydrophilie de la lentille et donc son Dk et conférant un caractère ionique à celle-ci ;

– le glycéryl-méthacrylate (GMA) : matériau à faible hydrophilie mais ayant une bonne résistance aux dépôts et une bonne mouillabilité ;

– l’alcool polyvinylique (PVA) : très hydrophile, très résistant aux dépôts, avec une bonne résistance mécanique ;

– le méthyl-méthacrylate (MMA) : très hydrophile, conférant un caractère ionique à la lentille.

La variété des copolymères utilisés par les différents fabricants a conduit la Food et Drug Administration (FDA) à demander une classification des matériaux souples hydrophiles portant sur les deux paramètres essentiels que sont l’hydrophilie de la lentille et son caractère ionique ou non.

Avec des polymères hydrophiles, l’augmentation de l’hydrophilie va de pair avec l’augmentation du Dk du matériau.

Cependant, une très forte hydrophilie augmente la fragilité de la lentille et rend celle-ci plus apte à la formation de dépôts.

Par ailleurs, une lentille peut avoir ou non une charge électrique : si elle est électriquement neutre, elle est dite non ionique ; autrement, elle est ionique.

C’est la formulation chimique qui est responsable de cette caractéristique et, dans la plupart des cas, cette charge est globalement négative, ce qui peut affecter la compatibilité avec certaines solutions et la formation des dépôts.

On peut ainsi observer dans des solutions un peu acides des modifications dimensionnelles de la lentille, voire même une altération du matériau.

Quant aux dépôts, ils sont plus volontiers attirés par la charge négative de la lentille, car les substances provenant des larmes sont essentiellement chargées positivement.

On distingue ainsi quatre groupes, selon la classification de la FDA :

– groupe 1 : hydrophilie inférieure à 50 %, non ionique (par exemple : téfilcon, tétrafilcon A, polymacon, hioxifilcon B, balafilcon A, iotrafilcon ...) ;

– groupe 2 : hydrophilie supérieure à 50 %, non ionique (par exemple : omafilcon A, lidofilcon A et B, surfilcon A, nétrafilcon A, nelfilcon A, hefilcon C…) ;

– groupe 3 : hydrophilie inférieure à 50 %, ionique (par exemple : bufilcon A, phemfilcon A, ocufilcon A…) ;

– groupe 4 : hydrophilie supérieure à 50 %, ionique (par exemple : bufilcon A, étafilcon A, ocufilcon B et C, vifilcon A, tétrafilcon B...).

Si les contraintes que représentent une bonne mouillabilité, des propriétés mécaniques et optiques satisfaisantes ont été atteintes, l’objectif d’une transmissibilité à l’oxygène (Dk/e [e : épaisseur de la lentille]) proche des matériaux rigides gaz perméables n’a pas été atteint avec les matériaux souples hydrophiles.

La recherche s’est donc concentrée depuis quelques années vers l’élaboration de matériaux souples gardant tous les avantages des hydrogels en termes de confort, de résistance, de qualité optique, mais ajoutant ce paramètre indispensable d’un excellent Dk/e, garant de la suppression de toute la symptomatologie et des complications liées à l’hypoxie sous lentille.

Ces nouveaux matériaux sont des silicohydrogels.

Le silicone est bien connu pour son incomparable Dk (de l’ordre de 300 ´ 10-11).

L’incorporation d’éléments structurels, de gomme de silicone dans des hydrogels, a permis une considérable augmentation (quatre à six fois plus) des propriétés de transmission à l’oxygène du matériau (car l’oxygène est beaucoup plus soluble dans le silicone que dans l’eau).

L’hydrophilie de ces nouvelles lentilles est donc relativement faible et ne dépasse pas 40 %.

Le Dk peut varier entre 80 et 150 ´ 10-11. Sur le plan chimique, deux concepts de fabrication sont utilisés : soit l’utilisation de monomères de silicone contenant de la fluorine, soit l’utilisation de macromères de siloxane.

Ces lentilles doivent impérativement avoir un traitement de surface en raison d’une attraction importante de dépôts lipidiques.

Ce traitement est réalisé avec la technique de gaz plasma par oxydation ou par coating selon le fabricant.

Deux lentilles sont actuellement disponibles :

– Pure Visiont (Bausch et Lomb), composée de monomères de carbonate et de carbamate de vinyle (balafilcon A), matériau à 35 % d’hydrophilie et de Dk 110 ;

– Focus Night et Dayt (Cibavision), composée de macromères de fluoroéther (lotrafilcon A), matériau à 24 % d’hydrophilie et de Dk 140.

2- Matériaux des lentilles rigides :

Le développement des matériaux rigides gaz perméables datent des années 1980.

Auparavant, les lentilles rigides étaient constituées de polyméthyl-méthacrylate (PMMA) qui était imperméable à l’oxygène.

Les premiers matériaux perméables furent en silicoacrylate.

Ces copolymères ont des éléments de silicone branchés sur la chaîne polymérique principale de carbone, laissant des espaces libres entre eux permettant ainsi le passage de l’oxygène.

Des agents mouillants et de liaison sont également associés de façon à régler les problèmes d’hydrophobie et de flexibilité du silicone.

Les agents mouillants utilisés sont essentiellement le NVP et l’acide méthacrylique.

Les agents de liaison augmentent la rigidité du matériau, leur inconvénient est de diminuer le Dk de la lentille s’ils sont trop importants en proportion.

Malgré l’incorporation de ces agents, des problèmes de dépôts importants sur ces lentilles ont pu être observés, ainsi que des troubles de mouillabilité, des déformations de la lentille par flexion de celle-ci, et même des phénomènes de cracking du matériau.

Pour encore augmenter la Dk et pallier ces inconvénients, la fluorine fut ajoutée au silicoacrylate, augmentant ainsi la résistance aux dépôts du matériel, avec comme corollaires un meilleur confort de port pour le porteur et une meilleure stabilité dimensionnelle des paramètres de la lentille.

Ces lentilles en fluorosilicoacrylate peuvent avoir, soit des Dk de valeur moyenne (de 25 à 50 ´ 10-11) et elles sont largement utilisées pour le port journalier, soit des Dk beaucoup plus élevés (de 60 à 200 ´ 10-11), les Dk les plus forts étant alors choisis pour le port permanent.

D’autres matériaux comme les fluorocarbones, composés de polyperfluoroéther associés à de la NVP pour obtenir une bonne mouillabilité, ont des qualités comparables. Les matériaux de dernière génération sont les polystyrènes.

Ces copolymères d’alkylstyrènes ont un index réfractif élevé (i = 1,59) et sont de faible densité (ils flottent sur l’eau).

Ces copolymères étant hydrophobes, ils nécessitent un traitement de surface.

Leur Dk est très élevé (supérieur à 100) : ils constituent la classe des « hyper haut Dk » selon la classification de Benjamin.

Tous ces nouveaux matériaux ont de plus bénéficié des avancées technologiques de fabrication et l’épaisseur totale de la lentille, du fait de l’utilisation d’index réfractifs plus élevés, a pu être réduite, augmentant ainsi la Dk/e, diminuant le poids total de la lentille, améliorant donc son centrage sur la cornée, ceci apportant un gain de confort de port.

Les techniques de taillage des palets sous contrôle de tours numériques permettent une finition parfaite des bords.

Le polissage s’est sophistiqué lui aussi avec les années, concourant à une finition parfaite.

D - EFFET DES LENTILLES DE CONTACT SUR LA PHYSIOLOGIE CORNÉENNE :

L’apport en oxygène au niveau de la cornée provient de celui contenu dans les larmes, dans l’air environnant, et pour une partie plus faible, par les vaisseaux limbiques.

La présence d’une lentille sur la cornée va modifier ces rapports, et ce de façon d’autant plus importante qu’elle est de grande taille et que le matériau la composant est peu perméable à l’oxygène.

L’hypoxie sous lentille va retentir au niveau des différentes structures cornéennes.

Par ailleurs, la pression partielle en oxygène les yeux ouverts est de 20,9 %.

Celle-ci tombe à 8 % les yeux fermés.

Les phénomènes hypoxiques sont donc majorés lors de port permanent de lentilles.

Des seuils critiques minimaux évitant l’hypoxie ont été mesurés par Holden et Metz, montrant que le Dk/e d’une lentille devait être au moins de 24 ´ 10-9 pour le port journalier et de 87 ´ 10-9 pour le port permanent.

La diminution d’apport en oxygène au niveau de la cornée induit des modifications métaboliques, avec passage en anaérobiose, source de production de lactates induisant eux-mêmes une acidose stromale.

L’acidose diminue la fonction de pompe aqueuse des cellules endothéliales.

1- Retentissement épithélial :

L’hypoxie joue un rôle important dans les mécanismes des kératites infectieuses par le retentissement épithélial induit par le port de lentilles : diminution de l’activité mitotique des cellules épithéliales, altération de leur perméabilité épithéliale, fragilité épithéliale et augmentation de l’adhérence microbienne sur ces cellules.

2- Retentissement stromal :

Après une nuit de port de lentilles souples en hydrogels, l’augmentation de l’épaisseur cornéenne peut atteindre 10 à 15 %.

La valeur de l’oedème est inversement proportionnelle au Dk/e de la lentille.

Le temps de récupération de la cornée (retour à l’épaisseur antérieure) est plus rapide en lentilles rigides qu’en lentilles souples.

Il existe cependant des variations interindividuelles importantes, et il y aurait de plus un certain état d’adaptation métabolique cornéen chez les porteurs de lentilles.

En effet, Cox a montré que les anciens porteurs de lentilles avaient moins d’augmentation d’épaisseur cornéenne au réveil que de nouveaux porteurs qui testaient le même matériau.

La puissance de la lentille portée intervient également.

Ainsi, Holden a montré que pour les lentilles souples de forte puissance myopique, l’augmentation de l’épaisseur cornéenne centrale était plus importante que pour les mêmes lentilles de puissance myopique faible.

Si l’épaisseur cornéenne est légèrement augmentée au début du port de lentilles, en plusieurs mois on observe le plus souvent une diminution de celle-ci de l’ordre de 30 à 50 μm avec des variations interindividuelles et liées aux caractéristiques des lentilles portées.

Une hypoxie chronique peut être également source de modification réfractive, avec des modifications de la forme cornéenne qui tend à être plus sphérique ou plus aplatie si elle est astigmate.

Ces déformations cornéennes ou corneal warpage sont bien identifiables en vidéotopographie et sont particulièrement évocatrices : un astigmatisme irrégulier, la perte de la symétrie cornéenne radiaire, une inversion de l’aspect topographique normal qui consiste en un aplatissement progressif du centre vers la périphérie.

Elles se normalisent à l’arrêt du port des lentilles ou lors de rééquipement avec des matériaux plus perméables à l’oxygène.

3- Retentissement endothélial :

Il existe des phénomènes transitoires et des modifications non transitoires survenant après plusieurs années de port de lentilles.

Les « blebs » sont des phénomènes transitoires décrits pour la première fois en 1977 : ils apparaissent sous la forme de petites zones sombres à la partie postérieure des cellules endothéliales, en microscopie spéculaire.

Ils surviennent chez les nouveaux porteurs de lentilles après un port de 10 minutes environ, puis disparaissent spontanément en 2 heures, la lentille restant en place sur l’oeil.

Le nombre de ces blebs observés est inversement proportionnel au Dk/e de la lentille ; ainsi, sous des lentilles en silicone pur, on n’en observe pas.

Schoessler et Woloschak ont mis en évidence l’existence d’anomalies morphologiques endothéliales non transitoires dès 1981 chez des porteurs de lentilles en PMMA.

Il s’agit d’un polymégatisme (diversité de la taille cellulaire) et d’un pléiomorphisme (diversité de la morphologie cellulaire) endothéliaux.

Ces aspects sont très bien évalués en microscopie spéculaire et en confocal.

L’importance du polymégatisme est exprimée par le coefficient de variation (C/V) calculé par le rapport de la déviation standard des surfaces cellulaires observées sur la moyenne arithmétique des surfaces cellulaires d’une superficie identique témoin de référence.

La valeur du C/V est habituellement de 0,26 ; chez des porteurs anciens de lentilles en PMMA, elle peut atteindre 0,9.

Le pléiomorphisme s’exprime en pourcentage de cellules hexagonales.

Un endothélium normal compte en moyenne 71 % de cellules hexagonales ; chez un ancien porteur de lentilles, cette valeur va diminuer d’autant plus que le port est ancien et que les lentilles ont un mauvais Dk.

Ces modifications morphologiques sont d’installation longue et de régression lente (au moins 5 ans à l’arrêt du port).

Lors de rééquipement en lentilles rigides gaz perméables après plusieurs années de port de lentilles en PMMA, une amélioration morphologique en 15 mois a pu être observée.

Il semble donc que l’hypoxie soit responsable de ces modifications.

Lors de l’examen histopathologique de l’endothélium de trois cornées de patients porteurs de lentilles, Bergmanson a montré que le volume cellulaire endothélial ne variait pas, mais que l’orientation des cellules était différente, expliquant ces aspects retrouvés lors de l’examen spéculaire.

Il n’existe pas de perte de densité cellulaire endothéliale chez les porteurs de lentilles.

Si deux études ont mis en évidence l’existence d’une légère diminution de la densité cellulaire centrale par rapport à la périphérie, toutes les autres convergent vers une absence de perte cellulaire qui a pu être objectivée après 20 ans de port de lentilles en PMMA.

La densité cellulaire endothéliale d’un patient âgé, ancien porteur de lentilles, est similaire à celle d’un patient du même âge non-porteur : la diminution observée est corrélée à l’âge.

L’évaluation de la fonction endothéliale des cornées présentant pléiomorphisme et polymégatisme a été réalisée à la recherche de modifications.

L’étude comparative de récupération de l’épaisseur cornéenne antérieure après induction d’un oedème stromal ne montre pas de différence entre les cornées présentant un polymégatisme et les cornées normales.

L’étude de la perméabilité cellulaire endothéliale à la fluorescéine n’a pas montré de différence entre porteurs et non-porteurs ; la perméabilité augmente avec l’âge mais n’est pas corrélée aux antécédents de port de lentilles.

Cependant, l’hypothèse d’une moins bonne réponse à un stress cornéen a été évoquée.

L’absence de complications (à type de décompensations cornéennes spontanées ou secondaires à tout geste chirurgical sans facteur de risque associé) publiées chez les patients équipés avec des lentilles non perméables à l’oxygène, l’évolution des matériaux vers de hautes perméabilités, laissent à penser que ces modifications morphologiques n’ont pas de facteurs de gravité.

Néanmoins, la prudence consiste à l’heure actuelle à réaliser des équipements avec des matériaux performants pour minimiser ces aspects observés.

4- Sensibilité cornéenne :

Elle peut être diminuée après plusieurs années de port, et notamment avec des matériaux peu perméables à l’oxygène.

Le développement des nouveaux matériaux en contactologie a nettement amélioré le respect de la physiologie cornéenne.

L’utilisation de nouveaux moyens d’exploration, comme la microscopie confocale qui permet in vivo un véritable examen histologique, sera certainement source d’informations supplémentaires chez les porteurs de lentilles.

Indications :

Les indications des lentilles de contact sont très variées : optiques, cosmétiques et prothétiques, thérapeutiques.

A - OPTIQUES :

1- Myopie :

La myopie est l’amétropie la plus corrigée parce que aucun effort accommodatif ne peut la compenser.

Sa correction en lentilles réduit la distance verre-oeil, grandit l’image rétinienne, élargit le champ visuel en supprimant les aberrations prismatiques périphériques.

Mais les lentilles perturbent la syncinésie accommodationconvergence en majorant l’effort d’accommodation et de convergence.

Tous les âges sont concernés.

Chez l’enfant, c’est la lutte contre l’amblyopie liée à une anisométropie forte unilatérale, des troubles de la vision binoculaire et un refus de l’enfant de porter sa correction.

C’est également la myopie forte.

La meilleure qualité visuelle que les lentilles procurent aide au développement global de l’enfant. Les myopies évolutives avec perte de 1 dioptrie tous les ans.

Pour de nombreux auteurs, le port de lentilles rigides freine l’évolution de la myopie.

L’adolescent, comme l’adulte, est demandeur de lentilles pour des raisons esthétiques, sportives et de confort de vie.

2- Hypermétropie :

Amétropie courante, souvent bien tolérée et ignorée, elle peut se révéler précocement par des troubles moteurs tel un strabisme accommodatif, au cours de la scolarité ou de la vie professionnelle par des signes fonctionnels : douleurs, picotements oculaires, brouillard à la lecture, céphalées, ou plus tardivement par l’apparition d’une presbytie précoce.

Les principales indications sont le strabisme accommodatif, les hypermétropies fortes inesthétiques et gênantes, la presbytie précoce.

La correction par les lentilles réduit la distance verre-oeil, améliore la syncinésie accommodation-convergence, le champ visuel périphérique.

Sa correction totale est bien tolérée. Seule la réduction de la grandeur d’image peut être un inconvénient.

3- Astigmatismes :

Il existe deux sortes d’astigmatisme : congénitaux réguliers ; acquis, réguliers ou irréguliers.

* Astigmatismes congénitaux :

L’astigmatisme congénital est une amétropie non sphérique répandue puisque 45 % de la population est astigmate d’au moins 0,75 dioptrie, que 69 % d’astigmates sont compris entre 0,50 et 1 dioptrie, et que 31 % sont égaux ou supérieur à 1 dioptrie.

Les astigmatismes congénitaux sont réguliers, souvent bilatéraux et symétriques.

Trente-deux pour cent sont associés à une amétropie sphérique.

Il existe des astigmatismes cornéens, internes ou mixtes.

Les astigmatismes conformes à la règle représentent 60 %, les inverses 26 % et les obliques 14 %.

Tous les astigmatismes, dès 0,75 dioptrie, peuvent être corrigés avec des lentilles rigides ou souples.

* Astigmatismes acquis :

Ils sont souvent irréguliers et asymétriques, parfois très importants et toujours difficiles à gérer.

Dans ce type d’indication, les lentilles sont souvent la seule solution.

Ce sont les astigmatismes :

– postopératoires : après chirurgie du segment antérieur, chirurgie réfractive, greffe de cornée ;

– post-traumatisme : séquelle de plaie, d’ulcération ;

– évolutifs comme le kératocône (indication majeure des lentilles).

C’est l’acuité visuelle insuffisante obtenue avec des lunettes qui détermine l’indication du passage aux lentilles.

4- Presbytie :

L’espérance de vie a doublé en un siècle, passant à 80 ans pour les femmes et 74 ans pour les hommes.

Nous allons être presbytes la moitié de notre vie.

La motivation esthétique vient en tête, mais le côté pratique dans la vie quotidienne, le sport, les loisirs, joue un rôle important.

Il existe une solution, quel que soit l’âge, pour toutes les amétropies.

5- Aphakie :

Les indications sont plus rares depuis la microchirurgie et les implants intraoculaires.

Elles vont du simple renouvellement chez des patients opérés de longue date aux yeux non implantables, après de lourds traumatismes ou chirurgie compliquée.

Il s’agit de cornées déformées, associées à des plaies de cornée, avec des iridectomies plus ou moins larges.

Chez l’enfant, le pronostic fonctionnel est en cause et dépend de la nature de la cataracte, de la précocité de l’acte chirurgical et de la précocité de la compensation optique.

Plus l’enfant est jeune, plus vite il faut l’équiper pour éviter une amblyopie de déprivation en cas d’aphakie unilatérale.

Certains chirurgiens implantent d’emblée les cataractes congénitales, mais cela reste une minorité.

Chez l’adulte, le problème de l’amblyopie ne se pose pas et l’équipement est pratiqué sur un oeil calme.

6- Cas particuliers :

* Chirurgie réfractive :

Lorsque les résultas obtenus sont insuffisants et les retouches peu conseillées (sous-correction, surcorrection, astigmatisme résiduel irrégulier, décentrement de zone d’ablation, problème de capot), les lentilles rigides apportent des solutions.

Les lentilles souples à haut Dk sont utilisées lorsque la chirurgie est non incisionnelle.

* Greffe de cornée :

Ce sont les erreurs réfractives mal corrigées en lunettes qui amènent à prescrire des lentilles après greffe.

Il est conseillé d’équiper en lentilles lorsque les sutures sont retirées. Statistiquement, les adaptations se font entre 5 mois et 18 mois après la greffe. Occasionnellement, pour des raisons professionnelles, il est nécessaire d’équiper plus tôt.

* Amblyopie :

Chez l’enfant, certains utilisent des lentilles opaques pour pratiquer des occlusions.

Elles peuvent aussi être utilisées chez un amétrope amblyope uniou bilatéral pour conserver le champ visuel.

* Anomalies maculaires :

Lorsqu’il existe une anomalie maculaire, quelle qu’en soit l’origine (dégénérescence maculaire liée à l’âge [DMLA], tache de Fuchs, choroïdite maculaire séquellaire), les lentilles permettent de restituer la vision périphérique beaucoup mieux que les verres correcteurs.

B - COSMÉTIQUES ET PROTHÉTIQUES :

Les indications cosmétiques sont purement à visée esthétique.

Modifier la couleur des yeux est un souhait fréquemment exprimé.

Mais la frontière avec les indications prothétiques est mince.

Cela va d’harmoniser des yeux de couleur différente (hétérochromies de Fuchs), à camoufler des opacités et dystrophies cornéennes, des lésions de l’iris, iridectomie large ou multiple entraînant une diplopie, une aniridie, à masquer une pupille blanche ou déformée, un délabrement plus important.

L’albinisme et les colobomes sont également de bonnes indications.

C - THÉRAPEUTIQUES :

Une lentille thérapeutique est, par définition, une lentille placée sur la cornée dans le but de participer au traitement d’une affection.

Les indications sont de plus en plus limitées, car le risque iatrogène est important. Elles sont le plus souvent utilisées de façon ponctuelle, dans l’attente d’un acte chirurgical.

Quand aucun acte chirurgical n’est envisagé, les lentilles à haut Dk/e représentent un apport nouveau dans ce domaine.

1- Rôle de protection de l’épithélium cornéen :

– Kératites aiguës ou chroniques d’origine mécanique liées à une malposition congénitale ou acquise des cils : entropion, trichiasis, malformation du rebord palpébral.

La lentille soulage l’irritation en attendant la chirurgie.

– Kératites d’exposition par fermeture incomplète des paupières : ptosis opéré, blépharoplastie, lagophtalmie.

– Symblépharon associé à un oeil sec comme le pemphigus : il peut bénéficier d’une lentille de protection associée à un anneau conjonctival de contention.

– Douleurs secondaires à des irritations mécaniques : coup d’arc, ophtalmie des neiges, suite immédiate de photokératectomie réfractive (PRK), surtout en cas d’intervention concomitante sur les deux yeux.

– Kératites filamenteuses.

– Kératites en bandelettes.

Avant ou après chirurgie laser, c’est un moyen de détourner les dépôts de calcaire sur la lentille.

– Kératalgies récidivantes : en attendant le traitement laser.

– Après chirurgie du segment antérieur : fils mal enfouis, surjet de greffe précocement relâché.

2- Rôle de bandage :

– Sur une plaie de cornée.

Il est fréquent d’avoir recours à une lentille de contention.

Elle assure une bonne étanchéité et une cicatrisation régulière : plaie punctiforme sans Seidel spontané, plaie plus importante et déchiquetée, plaie intéressant l’axe optique.

– Sur une cornée perforée avec une chambre antérieure effacée en attendant la greffe.

– En postopératoire immédiat après une greffe, devant un retard de cicatrisation, des sutures desserrées avec Seidel, une simple déhiscence, une chambre antérieure étroite après intervention filtrante associée, dans l’attente d’une reprise chirurgicale.

– Devant une athalamie postopératoire, après cataracte, greffe ou intervention filtrante, une lentille de grand diamètre (de 15 à 17 mm) permet en quelques heures la reconstitution de la chambre antérieure, en attendant la reprise chirurgicale.

3- Rôle antioedème :

L’indication est la dystrophie endoépithéliale de Fuchs.

L’amélioration des douleurs sur cet oeil inflammatoire est constante, mais l’amélioration visuelle médiocre.

L’indication d’une greffe de cornée s’impose, mais le manque de greffon exclut les patient âgés.

Les lentilles souples provoquent des néovascularisations.

Les lentilles rigides perméables aux gaz (LRPG) procurent une meilleure acuité en évitant les néovascularisations.

Un espoir est possible avec les lentilles souples à haut Dk.

Contre-indications :

Elles sont d’ordre général ou local.

A - CONTRE-INDICATIONS GÉNÉRALES :

1- Absolues :

Patient débile, sans hygiène.

2- Relatives ou momentanées :

– Diabète, hyperthyroïdie, immunodépression, grossesse, sinusite et rhinite chroniques, herpès buccal, problèmes dermatologiques.

– Prise de certains médicaments (Roaccutanet, bêtabloquants, antihistaminiques, antidépresseurs...).

– Environnement climatisé, enfumé, altitude.

– Métiers en contact avec des foyers de chaleur, émanations chimiques, poussière.

– Psychologiques : refus d’accepter l’idée d’une lentille sur l’oeil, du moindre inconfort ; impossibilité de manipuler.

B - CONTRE-INDICATIONS OCULAIRES :

Elles découlent de l’examen clinique.

1- Contre-indications spécifiques des lentilles souples :

* Contre-indications visuelles :

– Amétropie trop faible avec un petit astigmatisme.

– Acuité inférieure aux lunettes.

– Myopie évolutive.

– Astigmatisme cornéen irrégulier.

– Besoin d’une vision très précise.

* Contre-indications sensitives. Cornée ou paupières hyperesthésiques :

* Contre-indications relatives ou momentanées :

– Blépharites.

– Conjonctivites.

– Séquelles de kératite virale non herpétique.

– Néovaisseaux limbiques et cornéens.

* Contre-indications absolues :

– Sécheresse oculaire avérée.

– Ptérygion, pinguecula proéminente, nævus, dermoépithéliome de Parinaud, séquelles d’ulcération herpétique.

2- Contre-indications spécifiques des lentilles rigides :

Avec les lentilles rigides, les contre-indications sont moins nombreuses.

Certaines sont communes aux lentilles souples, d’autres sont spécifiques.

– Trop grande sensibilité palpébrale.

– Exposition à la poussière.

– Port occasionnel.

– Cosmétique.

– Échecs précédents.

Correction des amétropies en lentilles souples :

Les lentilles souples sont les lentilles les plus répandues.

Elles représentent 85 % des adaptations.

La lentille souple a une situation cornéoscérale.

La règle de base est d’obtenir une relation complémentaire entre la lentille, la face antérieure de la cornée, le limbe et la conjonctive.

A - LENTILLES SOUPLES ET GÉOMÉTRIES :

Elles sont réalisées dans différents matériaux.

Quels sont les avantages ?

– Confort immédiat et possibilité d’un port discontinu « à la carte ».

– Déformations de la cornée exceptionnelles, avec passage lentilleslunettes sans problème.

– Corrigent les amétropies sphériques et toriques.

Leur zone optique large permet d’éviter les halos.

– Les matériaux les plus récents en silicohydrogel autorisent un port prolongé.

– Utiles pour la pratique du sport, peuvent changer la couleur des yeux, protèger des ultraviolets (UV) et de l’éblouissement avec les lentilles solaires.

Elles sont utilisées à titre thérapeutique, comme pansement, bandage, à visée fonctionnelle pour rééduquer les amblyopies, prothétiques dans un but esthétique.

Elles présentent cependant des inconvénients :

– les petits astigmatismes sont mal corrigés ;

– l’acuité varie en fonction de l’hydratation ;

– elles sont exposées aux déchirures et coups d’ongle, et plus sensibles aux dépôts ;

– leurs paramètres sont difficiles à vérifier et le passage des larmes sous la lentille est dix fois moins bon qu’avec des lentilles rigides.

1- Lentilles traditionnelles :

Le renouvellement est prévu chaque année.

En perte de vitesse, elles sont utilisées en cas d’amétropies et de kératométries extrêmes, ou dans des matériaux spécifiques.

Le vieillissement du matériau est en partie responsable de la survenue de conjonctivites gigantopapillaires.

Leur entretien doit être rigoureux.

Chaque fois que cela est possible, elles sont remplacées par des lentilles à remplacement fréquent.

2- Lentilles à remplacement fréquent :

La fréquence de remplacement est variable : 1 jour, 1 semaine, 2 semaines, 1 mois, 3 mois. Elles sont disponibles immédiatement, la gamme de correction de plus en plus large, l’entretien réduit, voire inexistant, et les dépôts rares.

Seul inconvénient : le choix réduit des paramètres (rayon, diamètre et puissance).

3- Géométrie des lentilles souples :

Les lentilles souples ont deux faces et des dégagements périphériques.

Ces deux faces peuvent avoir des géométries différentes.

– Face postérieure : sphérique monocourbe, bicourbe et tricourbe, asphérique, elliptique, torique.

– Face antérieure : sphérique monocourbe, bicourbe, tricourbe, asphérique et torique.

– Dégagements périphériques ou zones d’allègements : asphériques.

B - EXAMEN CLINIQUE INITIAL :

Tout examen clinique débute par un interrogatoire : motivation ; objectifs ; profession et conditions de travail : en air climatisé, à la poussière ; activité de loisirs ; antécédents médicaux et chirurgicaux ; prise de médicaments ; notion de terrain allergique.

1- Réfraction :

Après un passage derrière le réfractokératomètre et le Javal, la réfraction doit être soigneuse, récente, utilisant la méthode du brouillard en monoculaire puis en binoculaire, affinée avec le cylindre de Jackson, confirmée par les tests duochromes, complétée par une étude de la vision binoculaire et un dépistage d’hétérophories.

2- Examen du globe et des annexes :

– Paupières : ouverture de la fente palpébrale, tension des paupières. Recherche de dermatose de la peau, irrégularités des bords, blépharite, vésicules au niveau des bords, concrétions, glandes de Meibomius engorgées.

– Cornée : recherche de kératite ponctuée superficielle (KPS), d’infiltrats, de taies, de néphélions, de nodules sous-épithéliaux.

– Limbe : recherche d’une néovascularisation, d’un amincissement périphérique, d’un ptérygion.

– Conjonctive :

– au niveau de la conjonctive bulbaire : hyperhémie, dessèchement, pinguecula, cicatrices postchirurgicales, bulles de filtration ;

– au niveau de la conjonctive tarsale, après retournement de la paupière supérieure : cicatrice, irrégularités, follicules, papilles, conjonctivite gigantopapillaire.

– Clignement : fréquence et qualité.

3- Étude de la fonction lacrymale dans sa quantité et sa stabilité :

La quantité s’évalue de deux manières : le Shirmer et l’étude de la rivière lacrymale.

Le papier millimétré est irritant et source d’erreur.

Il permet cependant de déterminer la présence ou l’absence du réflexe de larmoiement.

Ce test n’est plus guère utilisé par les contactologues qui lui préfèrent l’étude de la rivière lacrymale, encore appelée prisme de larmes.

Cette rivière lacrymale contient 90 % du volume des larmes.

Sa hauteur doit être de 0,2 à 0,4 mm au centre et 0,1 à 0,2 mm en périphérie.

Trop haute, elle traduit une stagnation des larmes, trop basse une insuffisance.

La stabilité est étudiée par le temps de rupture du film lacrymal : BUT (break up time).

Après instillation d’une goutte de fluorescéine, on mesure le temps de rupture du film après un clignement.

Il est normalement de 15 secondes, mais seules les variations importantes sont à prendre en considération car les causes d’erreurs sont fréquentes.

Il est intéressant de laisser le patient cligner normalement et de noter si le film se rompt entre chaque clignement.

La zone de la première rupture est importante à noter car elle peut supposer un dessèchement à ce niveau.

Le Tearscopet (Guillon) est une méthode non invasive qui utilise une lumière froide.

Cet instrument permet l’étude du film lacrymal et de la couche lipidique.

Lorsqu’une sécheresse est suspectée, l’examen peut être complété par une coloration des cellules mortes par le rose bengale ou le vert de lissamine.

4- Topographie cornéenne :

C’est l’examen topographique en détail de la surface cornéenne.

Elle est indispensable face à des cornées déformées, irrégulières, kératoconiques.

C - CORRECTION DES AMÉTROPIES SPHÉRIQUES :

Le choix de la première lentille est fonction du mode de port envisagé (ponctuel, régulier, prolongé), de la réfraction (petit astigmatisme associé), de la qualité des larmes et des conditions d’environnement.

1- Choix des paramètres :

* Diamètre :

Le diamètre des lentilles souples actuelles se situe entre 13 et 15 mm.

Face à une petite cornée, une petite ouverture palpébrale ou une difficulté de manipulation, un petit diamètre est choisi.

Il doit rester plus grand que le diamètre horizontal de l’iris (0,50 à 0,75 mm de plus), pour que la lentille recouvre le limbe sans créer d’irritation.

Face à de grandes cornées, une large ouverture palpébrale, des bords de paupières ou un limbe sensibles, de fortes amétropies, le choix se porte sur un grand diamètre.

* Rayon :

Le R0 des lentilles est de 0,30 à 1 mm supérieur au K le plus plat.

Avec les LRF, le choix du R0 est réduit, puisque le plus souvent, le rayon et le diamètre sont imposés.

Cependant, leurs géométries permettent de couvrir des kératométries de 740 à 820.

Pour les kératométries hors normes ou de fortes excentricités limbiques, il faut recourir aux lentilles traditionnelles.

Pour un diamètre total inférieur ou égal à 13 mm, le R0 est de 0,30 supérieur à K ; pour 14 mm, il est de 0,60 à 0,80 mm supérieur à K ; pour 15 mm, il est de 1 à 1,20 mm supérieur à K.

* Puissance :

Elle doit respecter le principe de la distance verre-oeil.

* Matériau :

En cas de sécrétion lacrymale limite ou d’environnement desséchant, il existe un encrassement rapide des lentilles.

Les LRF sont préférées :

– lentille fine à faible hydrophilie qui se déshydrate peu ;

– lentille épaisse à forte hydrophilie qui sert de réservoir d’eau ;

– lentille en silicohydrogel, fine, faiblement hydrophile, à très haut Dk ;

– lentille en matériau à hydratation constante (Hioxifilcon A) et matériau biocompatible à base de phosphorylcholine.

Pour le port prolongé, seules les lentilles de nouvelle génération en silicohydrogel procurent un Dk/e compatible avec un port en toute sécurité (Dk/e supérieur à 87 ´ 10-9 : coefficient de Holden).

* Épaisseur :

Un astigmatisme cornéen direct d’une dioptrie peut être absorbé par une lentille épaisse, mais le Dk/e de cette lentille s’en trouve réduit.

L’effet est nul sur un astigmatisme inverse.

2- Évaluation de l’adaptation :

Les grands principes d’une bonne adaptation sont :

– la cornée parfaitement recouverte avec une bonne vision et un bon confort.

Ce contrôle peut être évalué selon différents paramètres :

– l’idéal est une lentille centrée, mobile à chaque clignement de 1 mm verticalement dans le regard primaire et pas plus de 1,5 mm dans le regard en haut et latéral ;

– le push test permet d’évaluer la mobilité sans faire intervenir le clignement.

L’examinateur pousse le bord inférieur de la lentille à travers la paupière inférieure.

Une lentille bien adaptée bouge facilement et reste confortable dans toutes les positions ;

– la vision est bonne et stable entre chaque clignement et la puissance est corrélée à la réfraction lunettes.

Au kératomètre, les mires sont stables et nettes ;

– la région limbique est libre d’irritation, d’hyperhémie et d’empreinte conjonctivale.

* Adaptation trop serrée :

– Le confort initial est bon et le centrage satisfaisant, bien que certaines lentilles de petit diamètre puissent être décentrées et fixes.

La mobilité est nulle ou très réduite au clignement et en regard latéral (inférieure à 0,50 mm).

– La vision est décevante, instable après chaque clignement, et la puissance plus négative que la réfraction lunettes.

Les mires du kératomètre sont déformées.

– Il existe une irritation du limbe au bout de quelques heures et une empreinte conjonctivale.

* Adaptation trop plate :

Le confort n’est pas bon et la lentille très mobile, mal centrée.

À l’extrême, le bord de la lentille se soulève.

Au clignement, le mouvement dépasse 2 mm à 3 mm dans les regards latéraux.

L’acuité visuelle est variable, et les mires du kératomètre varient avec les mouvements de la lentille.

Une lentille en position haute est la conséquence d’une paupière supérieure trop tonique ou d’irrégularités sur sa face interne (papille, follicule, chalazion, cicatrice).

Ce décentrement n’est pas acceptable si le limbe inférieur est découvert et irrité.

Une lentille en position basse est la conséquence d’une lentille trop petite ou trop plate qui entraîne un inconfort palpébral, ou d’une paupière lourde qui appuie sur la partie supérieure de la lentille.

Même si le confort initial est correct, cela prend des allures de serrage après plusieurs heures, avec l’apparition au niveau du limbe supérieur d’une zone arciforme fluo+ et d’un oedème par insuffisance de circulation lacrymale.

Une lentille décentrée latéralement est le signe d’une lentille trop petite, trop plate, ou d’une jonction cornéosclérale atypique.

Si le limbe est couvert, on surveille.

S’il est découvert, le choix d’un plus grand diamètre ou d’une autre géométrie est nécessaire. Rappel : un changement de 0,50 mm de diamètre impose un changement de rayon de 0,30 mm.

D - CORRECTION DE L’ASTIGMATISME EN LENTILLES SOUPLES :

1- Astigmatisme régulier :

* Rappel des conventions :

La lettre K désigne le méridien le plus plat, la lettre k le méridien le plus cambré.

K et k sont exprimés en rayon de courbure en millimètres, ou mieux en puissance dioptrique cornéenne associée aux axes correspondants.

Toute formule sphérocylindrique s’exprime en cylindre négatif.

Une formule sphérocylindrique a toujours un équivalent sphérique où la puissance du cylindre est égale à la moitié de la puissance sphérique.

Par exemple : –2 (-2 à 180°).

Le cylindre de 2 dioptries a son équivalent sphérique de 1 dioptrie : l’équivalent sphérique de cette formule sphérocylindrique est donc de -2 + (-1) = -3.

La proportion entre l’amétropie sphérique et l’amétropie cylindrique est une notion importante.

Les conséquences visuelles d’un même astigmatisme de 1 dioptrie associé à une sphère de 1 dioptrie ou à une sphère de 10 dioptries ne sont pas les mêmes.

Dans le premier cas, il doit être corrigé ; dans le second, il peut être négligé.

* Bilan réfractif :

L’astigmatisme total (AT) à corriger est celui donné par le réfractomètre.

Il est égal à la somme algébrique de l’astigmatisme cornéen (AC) et de l’astigmatisme interne (AI) : AT = AC + AI.

Plusieurs cas de figures sont possibles.

– Astigmatisme total égal à l’astigmatisme cornéen.

Le choix d’une lentille rigide est le choix le plus logique.

En lentilles souples, des solutions sont possibles :

– une lentille un peu épaisse qui peut absorber un astigmatisme direct inférieur à 1 dioptrie ;

– au-delà de 1 dioptrie, une lentille torique postérieure ou antérieure.

– Astigmatisme total nul mais oeil amétrope.

L’astigmatisme cornéen est compensé par un astigmatisme interne de même valeur.

L’indication est une lentille souple sphérique ultrafine qui ne perturbe pas cet équilibre.

– Astigmatisme total différent de l’astigmatisme cornéen.

Les lentilles rigides doivent être toriques antérieures ou bitoriques, mais les lentilles souples toriques sont des solutions plus simples.

Tous les astigmatismes à partir de 0,75 dioptrie peuvent être corrigés avec les lentilles souples toriques, et plus particulièrement les astigmatismes cornéens inverses lorsque les lentilles rigides sont instables, les astigmatismes internes, les astigmatismes mixtes.

* Lentilles souples toriques :

À chaque clignement, sous l’effet des paupières, une lentille tourne de 1/8e de tour dans le sens inverse des aiguilles d’une montre pour l’oeil droit (SIAM) et dans le sens des aiguilles d’une montre pour l’oeil gauche (SAM).

Cette rotation a un effet délétère sur l’acuité visuelle et doit être neutralisée.

Éléments de stabilisation des lentilles

– Diamètre.

Plus il est grand, plus la lentille est stable.

Il va de 13,50 mm à 15 mm, aussi bien pour les lentilles à renouvellement fréquent que pour les lentilles traditionnelles.

– Toricité.

Une lentille souple torique interne épouse mieux une toricité cornéenne et peut être un élément de stabilisation à partir de 2,5 dioptries de toricité.

– Systèmes de stabilisation.

Ils sont au nombre de quatre, souvent combinés les uns aux autres.

– Facettes d’allègements. Presque toutes les lentilles à renouvellement fréquent en disposent.

Les parties supérieures et inférieures de la lentille sont amincies.

Elle se cale ainsi entre les paupières qui jouent un rôle d’étau.

L’efficacité est d’autant plus grande que la différence d’épaisseur est significative.

C’est le cas des astigmatismes directs et des fortes myopies.

Pour les puissances positives et les astigmatismes obliques, la stabilisation est insuffisante.

– Prisme Ballast.

Le but est de lester la lentille afin que la base du prisme se maintienne vers le bas.

Le prisme a une puissance entre 0,75 et 1,50 dioptrie.

Si le prisme est situé dans la zone optique, il peut induire un effet prismatique gênant en cas d’astigmatisme unilatéral.

– Troncature et ovalisation.

La lentille est coupée, dans sa partie inférieure, d’un segment de cercle qui repose sur le bord de la paupière inférieure.

Souvent associée à un prisme ballast, elle procure une grande stabilité pour corriger les astigmatismes forts.

Même avec un bord chanfreiné, elle est moins utilisée parce que source d’inconfort.

– Bossages.

Ce sont deux petits plots, situés horizontalement, qui forment une surépaisseur.

Les paupières exercent une pression de part et d’autre et maintiennent l’équilibre de la lentille.

Ce système est volontiers associé à des facettes d’allègement, à une toricité interne, ce qui rend la lentille très stable et permet de corriger de fort astigmatismes.

Points de repères

Ils permettent d’évaluer le positionnement de la lentille.

Ces repères sont variés :

– un plot unique placé à 6 h ;

– un trait vertical unique ou associé à deux traits horizontaux à 3h et 9h ;

– trois traits verticaux à 6h lorsqu’il existe un prisme, espacés de 10°, 20° ou 30° ;

– trois traits horizontaux à 3h et 9h.

+ Principes et adaptation :

L’adaptation ne diffère pas d’une adaptation en lentille souple.

Le choix de la lentille se fait en fonction du type d’astigmatisme, de son importance et des systèmes de stabilisation proposés.

Un astigmatisme oblique, fort, des paupières très toniques, vont plutôt faire choisir une lentille disposant de plusieurs systèmes de stabilisation ; un astigmatisme cornéen direct des facettes d’allègements.

Les lentilles à renouvellement fréquent couvrent actuellement 80 % des adaptaptions.

– Choix du diamètre et du rayon. Il est imposé avec les LRF.

Pour les kératométries ou les amétropies extrêmes, le recours aux lentilles traditionnelles est nécessaire.

– Puissance.

Pour la sphère, le principe de la distance verre-oeil est appliqué.

Pour le cylindre, il est classique de sous-corriger un astigmatisme direct et de corriger complètement un inverse.

Lorsque les amétropies sphériques et cylindriques sont élevées, la règle de la distance verre-oeil s’applique.

Par exemple : (-4 à 180°) -12.

Deux valeurs : -16 et -12. Si l’on applique la règle distance verre-oeil : > 13,25 et 12 > 10,50.

L’astigmatisme à corriger n’est plus de 4 dioptries mais de 13,25 - 10,50 = 2,75. Après 20 minutes de port, il faut évaluer sa position et sa stabilité :

– la lentille est stable, en bonne position à chaque clignement et l’acuité est bonne : prescription ;

– la lentille est stable, les traits de repères sont en bonne position, mais l’acuité est mauvaise : il existe vraisemblablement une erreur de réfraction.

Un contrôle au réfractomètre et une nouvelle réfraction précisent les choses ;

– la lentille est stable mais le trait de repère a tourné : il existe plusieurs éventualités possibles : l’acuité est satisfaisante et on conserve la même lentille ; l’acuité est insuffisante : il faut modifier l’axe de la lentille en tenant compte de l’angle de rotation ; la lentille est stable en apparence mais s’éloigne de plus de 20° de l’axe idéal.

Les systèmes de stabilisations ne sont plus efficaces : il faut changer de lentille ;

– la lentille est instable et oscille à chaque clignement d’environ 5 à 10° autour de son axe idéal : une autre lentille de diamètre plus grand ou possédant de meilleurs systèmes de stabilisation peut convenir.

Astigmatismes irréguliers

Ce sont les kératocônes, les cornées post-traumatiques ou postgreffe de cornée.

Les lentilles rigides sont la règle et l’utilisation des lentilles souples est généralement une procédure de seconde intention lorsqu’il existe un inconfort ou une instabilité.

Avec les lentilles toriques, les résultats visuels sont souvent médiocres.

Meilleurs sont ceux obtenus avec des systèmes combinés piggy back ou lentille rigide encastrée dans une souple.

La stabilité, l’acuité et le confort sont bien meilleurs, mais le Dk/e est mauvais et l’apparition de néovaisseaux limbiques est rapide et fréquente.

* « Piggy back » :

Le piggy back, proposé pour la première fois en 1970, consiste à interposer entre la cornée et la lentille rigide une lentille souple, sorte de socle qui garantit le centrage et le confort.

La technique d’adaptation est simple :

– lentille souple : elle doit être la plus perméable à l’oxygène, la plus fine possible et à renouvellement fréquent.

Si l’équipement en lentille rigide a déjà été effectué, la lentille souple sera de puissance plan et la lentille rigide sera aplatie de 0,05 à 0,10 mm.

D’autres auteurs choisissent plutôt une lentille de puissance positive (+ 4) sur laquelle la lentille rigide se stabilise plus facilement ;

– lentille rigide : le mieux est un petit diamètre autour de 8,50 mm et un R0 à peine plus plat que le K donné par la kératométrie sur la lentille souple.

* Combinées rigides et souples :

Elles comportent deux parties : l’une centrale, constituée d’un matériau rigide perméable au gaz, de Dk 14, de diamètre 7 mm ; l’autre périphérique, en HEMA 25 % souple.

Les deux portions sont soudées par polymérisation.

Le R0 de la première lentille est choisi K + 0,20 mm.

Pour une adaptation optimale, la partie périphérique ou « jupe » doit « bâiller » légèrement pour favoriser le passage des larmes.

Elle peut être réalisée avec une géométrie plus serrée pour certains kératocônes.

E - ADAPTATION DE LENTILLES SOUPLES CHEZ LE PRESBYTE :

1- Conditions d’adaptation :

L’oeil a vieilli.

La capacité d’adaptation à des lentilles est plus longue.

Quatre points sont importants :

– entretien préliminaire : il permet de déterminer les objectifs à atteindre et le degré de motivation.

Le but à atteindre est d’être 80 % du temps à l’aise sans nécessité de rajout en lunettes ;

– examen des paupières : les paupières jouent un rôle important dans les équipements en lentilles rigides ;

– production lacrymale : sa quantité et sa stabilité, toutes deux étant perturbées à ces âges.

– réfraction : temps capital pour toute adaptation du presbyte.

Cette étude doit être récente et précise et comporte trois temps forts :

– réfraction par la méthode du brouillard en monoculaire puis en binoculaire, avec des verres sphériques ;

– calcul de l’addition minimale à laquelle il faut rajouter la réserve accommodative pour lire à la distance voulue. Par exemple, à 33 cm : 1dioptrie ;

– recherche des dominances par la méthode clinique du « flou réfractif » (interposition d’un verre de + 0,75 dioptrie alternativement devant chacun des deux yeux pour déterminer la situation la moins pénalisante).

2- Méthodes de correction :

Elles sont au nombre de trois : la monovision, l’hypermétropie saturée, les lentilles multifocales.

Toutes ces méthodes peuvent être utilisées seules ou combinées les unes aux autres.

* Monovision :

Le principe est simple.

Un oeil corrigé pour la vision de loin, l’autre pour la vision de près, en appliquant la règle des dominances.

Quand l’inversion de dominance ne se fait pas, il faut choisir.

On choisit pour la vision de près l’oeil le plus astigmate, le plus myope, le moins hypermétrope, le moins performant en vision de loin.

Cette méthode est destinée aux jeunes presbytes, afin de commencer avec une anisométropie faible et augmenter progressivement, par pas de 0,25 dioptrie.

Avantages

Simplicité, flexibilité, coût.

Inconvénients

Les perturbations de la vision binoculaire et stéréoscopique deviennent gênantes bien avant 2 dioptries d’anisométropie, mais au-delà c’est l’impasse.

Facteurs favorables

Emmétropie, anisométropie, absence de vision binoculaire.

Facteurs défavorables Vision binoculaire médiocre ; hétérophories ; presbytie supérieure à 2 dioptries ; amblyopies uni- ou bilatérales, même modérées.

L’incidence sur les fonctions visuelles n’est pas négligeable :

– diminution de la profondeur de champ à distance et absence de sommation binoculaire qui entraînent des modifications de l’acuité visuelle avec une chute de 7 à 8/10e sur l’oeil de près pour une anisométropie de 2 dioptries ;

– gêne importante en vision nocturne, avec halos impliquant des lunettes complémentaires pour la conduite de nuit ;

– baisse de la sensibilité aux contrastes et perturbation relative du champ visuel.

Cette technique n’est pas une technique d’avenir car elle repose sur un déséquilibre volontaire des fonctions visuelles et est limitée dans le temps.

À partir de 2 dioptries, un changement d’équipement est nécessaire et souvent laborieux.

La monovision « aménagée » consiste à placer sur l’oeil de près une lentille multifocale et sur l’autre la correction de loin.

Un certain parcours accommodatif est restitué avec des plages de sommation binoculaire.

Méthode plus physiologique, elle peut être commencée dès le début de la presbytie, et obligatoire lorsque l’anisométropie devient perturbante.

* Hypermétropie saturée :

C’est une technique qui s’adresse aux hypermétropes jeunes presbytes.

Le dispositif convexe nécessaire pour corriger l’hypermétrope en lunettes grossit l’image rétinienne dans les trois dimensions.

L’effort accommodatif qu’il doit fournir en lentilles pour mettre au point en vision de près est moindre grâce à la diminution du grossissement.

Elle consiste à saturer l’hypermétropie jusqu’à la chute d’acuité, oeil par oeil, puis en binoculaire, et à placer des lentilles de puissance + 0,75 supérieure aux valeurs calculées.

Si la vision de loin est perturbée, il faut interposer des verres négatifs oeil par oeil, par pas de 0,25 dioptrie, en commençant par l’oeil de loin.

L’hypermétrope ainsi corrigé conserve une vision à distance confortable, et lit P 2 avec aisance.

Cette technique est simple et réalisable avec toutes les lentilles.

C’est une méthode de correction plutôt destinée aux jeunes hypermétropes presbytes et aux forts hypermétropes quel que soit leur âge.

3- Lentilles multifocales :

Elles sont très utilisées en Europe et notamment en France.

Leur intérêt majeur est le respect de la vision et de la sommation binoculaire.

* Concepts :

Elles fonctionnent selon deux principes différents : la vision alternée et la vision simultanée.

+ Vision alternée :

La lentille présente deux parties : une supérieure ou centrale pour la vision de loin, l’autre inférieure ou périphérique pour la vision de près.

La discrimination vision de loin-vision de près est volontaire.

C’est le patient qui choisit la zone optique utile selon la position du regard.

La vision alternée n’est possible qu’avec les lentilles rigides : lentilles à segments et lentilles concentriques à vision de loin centrale.

+ Vision simultanée :

En vision simultanée, tous les rayons lumineux convergent sur la fovea.

Toutes les images s’empilent au niveau du cerveau qui doit effectuer un tri pour supprimer les images parasites et conserver les images nettes.

Ce temps d’apprentissage est indispensable.

Toutes les lentilles souples fonctionnent selon ce principe.

Les caractéristiques de la vision simultanée sont : la pupillodépendance, la vision de près centrale, la diminution de la sensibilité aux contrastes.

– Pupillodépendance.

Le rôle que joue la pupille est essentiel dans les équipements en lentilles multifocales, a fortiori en vision simultanée.

Partant du principe que c’est la pupille qui sélectionne la partie de la lentille utilisée, ses rapports avec la zone optique centrale de la lentille vont conditionner le résultat final.

Deux points sont importants : sa position par rapport à la zone optique centrale, et sa taille.

La position la plus fréquente de la pupille par rapport à l’apex cornéen est décentrée en nasal inférieur (0,28 ± 0,13 mm en nasal pour Chissadon et Guillon) et les lentilles, dans plus de 70 % des cas, se décentrent en temporal (aplatissement cornéen temporal).

Ces deux décentrements s’effectuent en sens contraire, et s’ils sont importants, les chances de succès sont faibles.

La taille de la pupille varie en fonction de trois paramètres principaux : l’âge, la luminance, la distance du stimulus.

En lumière photopique, la pupille est en moyenne de 5 mm à 20 ans et de 2,5 mm à 80 ans.

La pupille se contracte à la lumière et se dilate à l’obscurité.

Plus le stimulus se rapproche, plus la pupille se contracte : c’est le myosis accommodatif.

Le fonctionnement des lentilles multifocales est directement lié à ces trois paramètres.

– Vision de près centrale.

Pour obtenir une vision simultanée, il faut que l’ensemble des zones optiques utiles se trouvent simultanément face à la pupille, et que selon la dilatation pupillaire, une des deux visions soit privilégiée.

Ce peut être une zone optique de près ou un réseau alternatif.

– Vision des contrastes.

Quelles que soient les lentilles à vision simultanée, elles perturbent à des degrés divers la vision des contrastes.

Ces perturbations sont d’autant plus importantes que la luminance est basse et l’addition élevée, et ce aussi bien en vision de loin que de près.

* Lentilles :

+ Lentilles pupillo-indépendantes :

Une seule lentille répond à ce critère : la lentille diffractive, lentille bifocale, apparue en 1989. Son principe est fondé sur la diffraction.

Elle comporte un réseau d’échelettes très fines placé sur la face interne permettant une immersion homogène dans un milieu d’indice constant.

La profondeur des échelettes est très faible, de l’ordre 0,033 mm, pour n’avoir aucun effet délétère sur l’épithélium cornéen.

Le diamètre de la zone optique est égal à deux fois la racine carrée de l’inverse de l’addition souhaitée.

La vision de loin se fait selon un mode réfractif et la vision de près selon un mode diffractif.

Le principal avantage du principe diffractif est son indépendance de la pupille.

La vision de loin est privilégiée.

Le principal inconvénient tient directement à sa conception optique.

La séparation des rayons entraîne une perte d’énergie de 20 %.

Les 80 % restants sont répartis par moitiés pour la vision de loin et pour la vision de près.

La perte est surtout ressentie en vision de près.

La nuit, lorsque la pupille est en mydriase, la zone des anneaux est perceptible et provoque des sensations de halos autour des sources lumineuses.

Bifocale, elle prive d’une vision intermédiaire, ce qui oblige souvent à utiliser des additions différentes sur chacun des deux yeux.

La vision des contrastes est plus perturbée qu’avec les autres lentilles.

Cette lentille traditionnelle, un peu en perte de vitesse, rend pourtant de grands services pour les patients en myosis ou à motricité pupillaire réduite.

Elle est utile pour optimiser des équipements médiocres en association avec un autre concept.

+ Lentilles indépendantes du centrage :

Ce sont les lentilles bifocales concentriques à cercles multiples.

Le principe est une alternance de cinq cercles concentriques de puissance correspondant successivement à la vision de loin et à la vision de près.

Ces variations de puissance sont obtenues par des variations minimes, de l’ordre du micromètre de l’épaisseur de la lentille.

Cette zone bifocale est répartie sur une surface de 8 mm de diamètre.

Son fonctionnement est indépendant du centrage par rapport à la pupille, mais les variations de sa taille favorisent l’une ou l’autre des deux visions. Ses performances sont évidentes en vision de près.

Elle pénalise un peu la vision de loin, et il est fréquent de devoir utiliser une addition plus faible sur l’oeil de loin pour réduire cette pénalisation. Les zones de transition en « rondeur », de puissance variable, procurent un certain degré de vision intermédiaire.

Son adaptation est simple : peu saturer l’hypermétrope, ne pas sous-corriger le myope et choisir l’addition minimale.

+ Lentilles pupillodépendantes :

Elles sont bifocales, asphériques progressives, et/ou toriques.

– Lentilles bifocales concentriques.

Le fonctionnement de ces lentilles est fondé sur la discrimination des images obtenues à partir de deux zones circulaires concentriques de puissance dioptrique différente.

Le système optique forme, sur la rétine, concomitamment une image issue de la vision de loin et une image issue de la vision de près.

Ces deux images sont transmises au cerveau.

Le choix est aidé par la motricité pupillaire et le myosis accommodatif en vision de près.

Le myosis va favoriser la zone centrale, au détriment de l’autre vision.

De loin, la pupille se dilate, et c’est le phénomène inverse qui se produit.

Ces lentilles sont le plus souvent constituées d’une zone optique circulaire centrale destinée à la vision de près et d’une zone périphérique pour la vision de loin.

Certaines sont proposées avec des tailles de zone optique modulables.

Pour favoriser la vision de loin, on choisit une petite surface de zone optique centrale, et pour favoriser la vision de près, une grande zone optique.

Ceci permet d’équilibrer les énergies VL et VP en binoculaire.

Certaines de ces lentilles sont également proposées toriques.

Il est désormais possible de corriger efficacement des patients présentant trois amétropies différentes.

L’avantage principal de ces lentilles est la bonne vision de près pour un diamètre pupillaire inférieur à 3 mm.

La discrimination cérébrale est facilitée par la différence très tranchée entre les deux images.

Des inconvénients existent : perception du scotome central ; absence de vision intermédiaire ; sensation fréquente de diplopie liée au « saut d’image » au niveau de la jonction des deux zones optiques, entraînant la perception concomitante des deux images VL et VP.

Ces phénomènes peuvent disparaître en quelques semaines, mais sont un handicap au bon déroulement de la période d’adaptation.

Pour toutes ces raisons, ces lentilles, très dépendantes de la pupille, ne peuvent être équipées devant des pupilles serrées, peu mobiles, et doivent être parfaitement centrées.

L’existence d’opacités centrales cornéennes ou cristalliniennes rend cet équipement impossible.

La plupart sont proposées en mode traditionnel, ce qui freine leur utilisation.

Leur méthode d’adaptaption est simple : réfraction précise, l’hypermétrope peu saturé, le myope en correction lunettes, et surcorrection de + 0,50 de l’addition de près.

L’optimisation se fait soit en modifiant la taille des zones optiques de près (si la lentille le permet), soit comme d’habitude.

– Lentilles asphériques progressives.

L’asphéricité d’une lentille induit une variation de la focalisation point par point de la puissance.

La conséquence est la complexité des trajets lumineux à travers une surface asphérique.

La courbure asphérique peut être placée sur la face externe ou sur la face interne de la lentille.

Le centre de la lentille est plutôt destiné à la vision de près.

Ces lentilles peuvent être toriques et corriger tous les types d’astigmatismes jusqu’à 5 dioptries.

Pour une même correction, les variations d’addition sont obtenues en faisant varier le profil de la lentille.

Plus l’addition de près est forte, plus la surface de zone optique de près diminue, évoluant parallèlement à la diminution du diamètre pupillaire avec l’âge.

Plusieurs autres principes de géométrie ont été conçus pour tenter d’affiner les résultats visuels :

– géométrie sphéroasphérique avec bouton central sphérique se poursuivant par un profil asphérique qui génère la progression.

Ce bouton central peut tout à fait correspondre, soit à une vision de près, soit à une vision de loin ;

– géométrie concentrique asphérique faisant alterner sur la face antérieure des surfaces pour la vision de loin, la vision de près et la vision intermédiaire.

Le résultat est un continuum de surfaces asphériques concentriques dont les variations entre elles ne sont que de l’ordre du micromètre.

La reconstitution cérébrale est favorisée par la sommation des images émanant des cercles concentriques homologues.

Cette géométrie favorise plutôt la vision intermédiaire, sans pour autant dégrader les deux autres.

– Avantages : leur fonctionnement se rapproche du système physiologique habituel de l’accommodation.

On obtient une répartition monomodale en fonction des variations du diamètre pupillaire et une absence de rupture entre la vision de loin et de près avec une bonne vision intermédiaire.

– Inconvénients : elles sont pupillodépendantes, donc sensibles au centrage (mais cependant moins que les bifocales concentriques).

Parfois, une image en relief peut apparaître, témoin de l’empilement des images nettes et floues au niveau du cerveau.

Il existe une perte d’acuité des contrastes, surtout en faible luminance.

– Méthode d’adaptation : avec les lentilles à vision de près centrale, il faut saturer l’hypermétropie, sous-corriger le myope et ne jamais surévaluer l’addition.

L’optimisation se fait selon le mode habituel.

– Lentilles toriques multifocales.

Elles sont asphériques progressives ou bifocales.

+ Lentilles asphériques progressives et toriques :

Une multiasphéricité sur la face antérieure au centre de la lentille assure la vision de près.

La face postérieure est torique, et la lentille est munie de système de stabilisation dont un prisme ballast.

La gamme n’a pas de limites puique tous les astigmatismes et toutes les amétropies peuvent être corrigés.

+ Lentilles bifocales et toriques :

Le principe est le même et la zone de vision de près centrale est stabilisée et proposée de taille différente pour l’oeil de loin et celui de près.

* Adaptation :

Le choix tient en quatre points : le respect de l’équipement précédent ; l’étude des objectifs à atteindre ; l’examen clinique ; la réfraction soigneuse.

Il n’est pas possible d’équiper tout le monde de la même façon.

L’emmétrope se voit plutôt proposer une monovision simple ou aménagée, parce que sa vision de loin doit être respectée.

L’hypermétrope, quel que soit son âge, débute par une hypermétropie saturée.

En fonction du résultat obtenu, c’est vers des lentilles multifocales à vision centrale de près qu’il faut l’orienter.

En cas d’échec, il faut changer ou panacher les géométries.

L’hypermétrope est sans aucun doute le plus facile à équiper de lentilles multifocales, et la monovision simple ou aménagée ne doit être utilisée qu’en dernière intention.

Chez le myope, il existe deux cas de figure : le porteur et le nonporteur de lentilles.

Le myope déjà équipé a une accommodation dynamique.

L’accommodation du non-porteur qui retire ses lunettes pour lire est passive et l’exigence de près est telle que les lentilles multifocales avec forte addition d’emblée, complétées d’une bascule, sont souvent nécessaires.

Toutes les lentilles peuvent être utilisées, mais les réseaux alernatifs ou la vision de loin au centre, utilisés en première intention, donnent de très bons résultats.

L’astigmate est à traiter en fonction des caractéristiques de son astigmatisme.

Inférieur à 1 dioptrie et direct, il est possible de le négliger. Les lentilles souples toriques permettent de réaliser de la monovision et de l’hypermétropie saturée.

Les lentilles rigides multifocales permettent de corriger des astigmatismes cornéens jusqu’à 3 dioptries.

Les lentilles souples multifocales et toriques corrigent tous les astigmatismes jusqu’à 5 dioptries et tous les degrés de presbytie.

Comment optimiser ?

Dans 30 % des cas, le premier équipement est le bon.

Au patient de faire son apprentissage.

Pour les 30 % suivants, il faut appliquer les règles simples.

Il reste 40 %, pour lesquels la situation est plus compliquée.

L’écoute des plaintes formulées par le patient est l’étape importante.

L’objectif à atteindre n’est pas fondé sur les critères de l’adaptateur, mais sur ceux du patient.

Il existe trois axes principaux.

Dans l’ordre d’efficacité :

– pratiquer des bascules ;

– modifier les additions ;

– panacher les lentilles :

– changer la géométrie de la zone optique centrale (de la vision de près centrale vers des réseaux alternatifs) ;

– panacher les lentilles d’addition différente de géométrie proche ;

– panacher les lentilles de principes optiques différents.

Par exemple :

– une lentille est proposée avec la vision de loin au centre pour les myopes et les emmétropes, et la vision de près au centre pour les hypermétropes ;

– une lentille est actuellement proposée avec la vision de loin au centre pour l’oeil de loin et la vision de près au centre pour l’oeil adelphe ;

– un nouveau concept importé des États-Unis utilise le principe de la monovision aménagée tout en conservant l’équilibre bioculaire.

La vision de chaque oeil est autonome, construite progressivement de l’infini à la vision intermédiaire pour un oeil, et de la vision de près à intermédiaire pour l’autre.

Ainsi, un parcours accommodatif complet est reconstitué.

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