Colectomies pour maladie diverticulaire
(Suite) Cours de Chirurgie
Colectomie gauche par laparotomie
:
La chirurgie ouverte garde encore des indications.
Dans les équipes
qui pratiquent la chirurgie laparoscopique, le pourcentage d’exérèses
effectuées par laparotomie a diminué depuis 1995, date à laquelle
l’intervention laparoscopique a été codifiée.
Cette voie d’abord est
réservée aux contre-indications d’ordre général à une exérèse
laparoscopique, aux malades « multibalafrés » de l’abdomen, aux obèses après tentative et échec d’un abord laparoscopique, aux
exérèses impossibles par laparoscopie pour pseudotumeurs
inflammatoires difficiles à mobiliser, aux équipes ou aux opérateurs
qui ne maîtrisent pas encore les techniques de chirurgie colique
laparoscopique.
Les temps opératoires sont identiques à ceux décrits, mais
dans un ordre différent en raison de la réalisation d’une dissection
centripète.
En effet, l’axe de vision préférentiel du chirurgien sur le
côlon gauche lors d’une laparotomie est orienté de dehors en
dedans, c’est-à-dire des accolements coliques vers les insertions
vasculaires.
De plus, le contrôle premier des vaisseaux n’étant pas
obligatoire en pathologie inflammatoire comme en cancérologie, cet
axe de vision est privilégié par la grande majorité des opérateurs.
1- Voie d’abord
:
La laparotomie médiane sous-ombilicale prolongée au-dessus de
l’ombilic est la voie d’abord préférentielle.
Certains lui préfèrent une
laparotomie transversale sous-ombilicale en raison du moindre
risque d’éventration.
2- Exposition
:
Le grêle est positionné et maintenu dans le flanc et l’hypocondre
droit par des lames malléables.
Le chirurgien est placé à gauche du
malade, le premier aide à droite du malade et l’instrumentiste entre
les jambes du patient.
La position dite en « double équipe » n’est
pas utilisée si une anastomose manuelle est préalablement décidée.
L’instrumentiste se positionne dans ce cas en face de l’opérateur.
En
cas d’anastomose mécanique, cette position est obligatoire.
3- Décollements
:
Ils sont effectués de la périphérie vers le centre du champ opératoire.
Ils vont permettre de mobiliser le côlon gauche avant d’effectuer les
sections vasculaires.
L’aide expose le côlon sigmoïde par une traction
entre ses deux mains alors que le chirurgien effectue l’ouverture de
la racine secondaire du mésocôlon sigmoïde au ciseau.
Le plan de
section est représenté par des accolements naturels entre le sigmoïde
et la paroi.
Ces accolements sont majorés en cas de lésions
inflammatoires refroidies.
Le sigmoïde est verticalisé et médialisé
par l’aide. L’opérateur repère l’uretère gauche et les vaisseaux
génitaux au niveau du croisement des vaisseaux iliaques gauches.
En cas de tumeur inflammatoire collée sur le plan postérieur, le
repérage de l’uretère doit être effectué plus haut après décollement
du fascia de Toldt gauche dans une zone non concernée par les
problèmes infectieux.
Dans l’ordre sont effectués l’ouverture du péritoine pariétal
postérieur au niveau de la gouttière pariétocolique gauche et le
décollement coloépiploïque.
* Ouverture du péritoine pariétal postérieur au niveau
de la gouttière pariétocolique gauche
:
Ce temps est débuté au niveau du côlon sigmoïde, puis prolongé
vers le haut en direction de l’angle gauche.
L’aide tend entre ses
mains le côlon gauche vers la partie médiane de l’abdomen et
l’opérateur ouvre la racine secondaire du mésosigmoïde.
Les
décollements sont effectués de dehors en dedans.
Le fascia de Toldt
est décollé dans sa partie basse après repérage de l’uretère gauche
et des vaisseaux génitaux.
Ce décollement se fait au tampon monté
ou aux ciseaux, assez facilement sauf en cas de persistance de
phénomènes inflammatoires.
Il est poursuivi le plus haut possible
en vue de préparer la mobilisation de l’angle gauche.
*
Décollement coloépiploïque :
Ce temps opératoire est souvent plus facile lorsque l’opérateur se
place à la droite du malade et son aide du côté gauche.
Le
décollement est débuté, au niveau de la partie médiane du
transverse, à la coagulation et aux ciseaux jusqu’à ouverture de
l’arrière-cavité des épiploons.
L’aide soulève avec deux pinces le
grand épiploon et l’opérateur abaisse de sa main gauche le côlon
transverse en suivant le plan d’accolement du grand épiploon et des
franges épiploïques coliques.
Ce geste supprime toute traction sur
la rate et les risques de décapsulation.
La main gauche de l’opérateur saisit les deux jambages du côlon
transverse et du côlon gauche, tandis que la main droite sectionne au ciseau le sustentaculum lienis, l’insertion du mésocôlon
transverse au bord inférieur du pancréas.
C’est l’abaissement de la
racine du mésocôlon transverse qui donne l’allongement nécessaire
au côlon gauche pour être abaissé en vue d’une anastomose sans
traction.
4- Dissection du rectosigmoïde
:
L’opérateur se place à gauche du malade, le premier aide en face.
Ce temps peut être réalisé avant ou après la mobilisation de l’angle
gauche.
Le sigmoïde étant verticalisé par la section première de sa
racine secondaire, la racine primaire est sectionnée au ciseau ou à la
coagulation.
Pour cela, l’opérateur saisit le sigmoïde dans sa main
gauche et l’aide tend le péritoine pariétal par une pince atraumatique.
Le péritoine latéropelvien est ainsi sectionné, à droite
comme à gauche, jusqu’au cul-de-sac de Douglas.
En avant, le cul-de-sac de Douglas est ouvert au ciseau, l’exposition étant assurée
par une valve sus-pubienne qui refoule la vessie ou l’utérus.
La
dissection rétrorectale est possible en passant la main en arrière du
rectosigmoïde.
Le puits médian postérieur est ouvert et la partie
haute du rectum est mobilisée.
Ce geste est différent selon le type
de section vasculaire qui est effectué.
5- Sections vasculaires
:
Elles sont effectuées dans le mésocôlon à distance des pédicules
artériels et veineux mésentériques inférieurs.
La veine mésentérique
inférieure est sectionnée sous l’angle duodénojéjunal pour donner
une plus grande longueur au segment abaissé.
Certains préfèrent la
respecter, de même que l’artère colique supérieure gauche.
On
sectionne le tronc des vaisseaux sigmoïdiens, les vaisseaux coliques
gauches moyens inconstants. Le côlon gauche et sigmoïde étant
mobilisé et verticalisé, les sections vasculaires sont effectuées dans
le méso.
L’opérateur saisit le mésocôlon sigmoïde dans sa main
gauche afin de repérer les axes vasculaires dans le méso souvent
épaissi.
La section des vaisseaux est effectuée entre deux pinces
hémostatiques.
Le pédicule hémorroïdal supérieur est conservé pour
certains de manière systématique ou, si possible, selon l’importance
des phénomènes inflammatoires.
La dissection se fait au plus près
de la paroi rectale.
L’artère colique supérieure gauche est la corde
autour de laquelle s’effectue la rotation de l’angle gauche abaissé.
Sa section est souvent nécessaire pour assurer une bonne descente
du côlon mobilisé.
Chez le sujet âgé, il est préférable de vérifier la
persistance d’un pouls artériel au niveau de l’arcade bordante après
épreuve de clampage de l’artère colique supérieure gauche.
L’arcade
colique est sectionnée au niveau de la zone de section du côlon
gauche, en dehors de tout diverticule et de phénomène
inflammatoire.
Cette section porte le plus souvent dans la région sous-angulaire gauche.
6- Sections coliques et rectales
:
La section rectale passe en dessous de la charnière rectosigmoïdienne.
Le rectum est nettoyé du celluleux qui l’entoure,
le mésorectum est circonscrit puis sectionné après hémostase au fil
ou à la coagulation.
En cas d’anastomose manuelle : le rectum est sectionné au ciseau
froid après mise en place d’un clamp digestif sur le côlon d’amont
et de deux fils tracteurs repères assurant l’exposition.
Le rectum est
lavé sur table avec du sérum bétadiné dès son ouverture.
En cas d’anastomose mécanique, le rectum est sectionné après
fermeture par une agrafeuse linéaire coupante.
Le rectum est saisi
dans la main gauche, la pince est passée de droite à gauche autour
du rectum avant d’être fermée.
Il est important de vérifier que
l’extrémité de la pince n’ait pas pincé des structures vasculaires ou
nerveuses du pelvis.
Le rectum est sectionné au bistouri froid.
La section colique est effectuée différemment selon que l’on réalise
une anastomose latéroterminale ou terminoterminale.
7- Anastomose
:
L’anastomose peut être effectuée de manière mécanique ou
manuelle, en terminoterminal ou en latéroterminal.
* Anastomose terminoterminale
:
Le côlon est sectionné après mise en place de deux fils repères.
L’anastomose est effectuée par deux hémisurjets de fil à résorption lente.
Le plan postérieur, noué à l’intérieur, est un surjet effectué en
plan total permettant un bon affrontement mucomuqueux.
Le plan
antérieur, noué à l’extérieur, est réalisé par un surjet de points extramuqueux.
Certains préfèrent utiliser des sutures à points
séparés, passés selon le même principe.
* Anastomose latéroterminale
:
Cette technique a la préférence de certains chirurgiens, surtout en
cas d’incongruence des deux extrémités digestives.
Le côlon est
sectionné par agrafage linéaire et enfouissement de la rangée
d’agrafes.
L’anastomose est effectuée comme précédemment, après réalisation
d’une colotomie sur une bandelette colique et mise en place de deux
fils repères.
* Anastomose mécanique
:
La technique est identique à celle décrite pour l’abord laparoscopique.
L’anastomose mécanique trans-suturaire a la
préférence de beaucoup d’opérateurs.
Dans ce cas, le rectum est
sectionné après agrafage mécanique linéaire, évitant ainsi les temps
septiques.
8- Fermeture et drainage
:
L’intervention est terminée par une péritonisation afin d’éviter les
risques d’incarcération d’anses intestinales dans des brèches
mésentériques.
Le grand épiploon abaissé est positionné dans la
gouttière pariétocolique gauche jusqu’à la zone anastomotique qui
s’en trouve renforcée.
Le drainage n’est pas obligatoire.
Si un
drainage est mis en place, le drain doit être positionné dans le pelvis
et sortir par une contre-incision iliaque gauche.
La fermeture est
effectuée plan par plan par des surjets de fil de résorption lente
après alignement des anses grêles.
Chirurgie en urgence de la maladie diverticulaire :
aspects techniques
Nous ne ferons que citer la colostomie-drainage, rarement réalisée,
pour insister sur les aspects techniques de l’intervention de
Hartmann.
Intervention de Hartmann
:
Depuis la description princeps par Hartmann en 1921, cette
intervention garde de larges indications dans la sigmoïdite perforée
lorsque l’état inflammatoire de la paroi colique et/ou rectale rend
impossible, voire dangereux, un rétablissement de la continuité
digestive.
Plusieurs objectifs doivent guider cette intervention.
Le geste doit
être rapide, limité aux zones pathologiques, le plus sûr possible et
en vue de rétablir le plus facilement la continuité ultérieure.
1- Voie d’abord
:
L’exérèse se fait par une voie d’abord médiane en raison de
l’incertitude des lésions rencontrées et des adaptations peropératoires possibles.
2- Exérèse
:
L’importance des remaniements inflammatoires rend ce geste
toujours difficile.
La reconnaissance des structures anatomiques est
souvent imprécise, rendant toute dissection prudente.
Les décollements sont effectués souvent au doigt ou à l’aspirateur
en raison de leur caractère hémorragique et de l’aspect succulent
des parois digestives.
Ils sont limités au côlon sigmoïde.
L’exérèse
correspond le plus souvent à une colectomie segmentaire sigmoïdienne avec mobilisation a minima du tube digestif en vue
de réaliser la colostomie.
Le côlon est sectionné sur le versant iliaque
du côlon sigmoïde, dans une zone bien vascularisée et suffisamment
mobilisée pour être ascensionnée à la peau.
Les ligatures vasculaires sont effectuées dans le méso au plus près
de la paroi digestive par de larges prises qu’il faut doubler en raison
de leur épaisseur et des risques de saignement ultérieur lors de la
poussée hypertensive du réveil.
3- Section rectale
:
Elles porte sur la jonction rectosigmoïdienne sur un rectum que l’on
souhaite le moins inflammatoire possible.
La section rectale est
effectuée par application d’une agrafeuse mécanique linéaire dont
l’enfouissement n’est pas toujours possible en raison de la fragilité
des tissus.
Dans certaines circonstances, l’épaisseur de la paroi
rectale rend ce type de fermeture dangereux et il est préférable de
fermer le moignon rectal par des points séparés de fil résorbable.
La
section rectale doit porter sur le rectum intrapéritonéal.
Il faut éviter
une dissection sous-péritonéale dans un contexte septique.
4- Colostomie
:
Ce geste simple est parfois difficile à réaliser car la paroi est épaisse
et le segment colique de fort calibre par l’importance des franges épiploïques.
Nous préconisons de faire une colostomie terminale intrapéritonéale directe car plus facile à réaliser et surtout à défaire
lorsque le rétablissement est effectué.
5- Drainage
:
C’est un temps important de l’intervention.
Le nombre et la place
des drains sont fonction de l’intensité et du siège des lésions
inflammatoires et/ou de la péritonite.
Nous ne parlons ici que du
drainage pelvien qui nous paraît essentiel en raison du risque de
lâchage du moignon rectal.
Un drainage-lavage aspiratif est
préconisé avec irrigation au sérum bétadiné pendant plusieurs jours
postopératoires.
Certains préfèrent utiliser des sacs de Mikulicz qui
minimisent les conséquences d’une désunion secondaire du
moignon rectal.
Rétablissement de la continuité
après intervention de Hartmann
:
Les chances de rétablissement après intervention de Hartmann sont
de 60 %.
Elles varient avec l’étiologie de la pathologie qui a conduit
à sa réalisation.
Dans la sigmoïdite diverticulaire, les chances de
rétablissement sont de 70 à 90 %.
Ce geste n’est pas dénué de
complications : la mortalité varie de 0 à 4 % et la morbidité moyenne
est de 25 à 30 %.
Le rétablissement de la continuité peut être réalisé par laparotomie
ou par laparoscopie.
1- Rétablissement par laparoscopie
:
Cette intervention est rapidement devenue une bonne indication de
la chirurgie colique laparoscopique, même si l’expérience la plus
large rapportée à ce jour fait état de 18 cas avec un taux de réussite
de 78 %.
La probabilité de réussite est plus grande si un délai de
4 à 6 mois a été respecté entre les deux temps opératoires, si le
moignon rectal n’a pas été laissé trop long, si une recoupe colique
n’est pas nécessaire, si l’angle gauche ne doit pas être mobilisé.
* Démontage de la colostomie
:
Ce temps est réalisé en premier. Une collerette de 2 mm cutanée péristomiale est sectionnée au bistouri électrique et le côlon est
disséqué dans la paroi abdominale jusqu’au plan aponévrotique
dont il est libéré.
Le côlon est ascensionné hors du ventre, recoupé
si nécessaire.
Après réalisation d’une bourse, la tête de la pince
circulaire est mise en place dans l’extrémité colique après recoupe
de la collerette cutanéodigestive.
L’extrémité colique est ensuite
réintroduite dans la cavité abdominale.
Ce temps permet de libérer
au doigt les adhérences digestives et épiploïques à la cicatrice
médiane.
L’introduction du trocart de 10 mm pour l’optique peut
être effectuée en toute sécurité sur la ligne médiane libérée de tout
phénomène adhérentiel.
L’ancien orifice de colostomie est utilisé
pour mettre en place un deuxième trocart de 10 mm, utile pour
débuter l’intervention.
La suture de l’aponévrose autour de ce
trocart assure la pneumostase pendant le temps de l’intervention.
* Adhésiolyse
:
C’est souvent le temps le plus long de l’intervention.
C’est la
principale cause d’échec et de conversion en laparotomie.
Les
adhérences dans le flanc et la fosse iliaque droite sont libérées en
priorité afin d’introduire les trocarts de travail qui vont permettre
de se positionner comme dans une chirurgie colique gauche élective.
L’adhésiolyse est poursuivie dans le pelvis où les anses intestinales
se sont agglutinées sur le moignon rectal.
La libération doit être
prudente, au ciseau ou à l’aspirateur en fonction de l’intensité et de
la fraîcheur des phénomènes inflammatoires.
* Libération du moignon rectal
:
Le moignon rectal est repéré par introduction d’une bougie par
l’anus.
Il est libéré a minima.
Il faut préparer la face antérieure du
moignon rectal afin de ne pas risquer de le perforer.
Ce temps
opératoire est parfois rendu difficile par la sclérose du moignon
rectal dont le diamètre rétréci rend l’introduction de la pince
circulaire difficile.
Le risque de perforation ou de déchirure de la
paroi rectale est une source de conversion qui peut conduire à la
réalisation d’une anastomose manuelle dans des conditions parfois
difficiles.
En cas de moignon rectal long, une recoupe peut s’avérer
nécessaire afin de réséquer la zone d’hyperpression rectosigmoïdienne.
Dans ce cas, un trocart de 12 mm doit être mis
en place dans la fosse iliaque droite afin de pouvoir introduire une
agrafeuse linéaire coupante.
*
Libération de l’angle gauche :
Ce temps est souvent nécessaire pour effectuer une anastomose sans
traction.
La libération de l’angle gauche obéit aux mêmes principes
déjà évoqués pour la chirurgie élective.
Ce temps n’est possible que
si la colostomie a été préalablement défaite.
Ce temps est plus
difficile que pour un geste électif en raison des séquelles adhérentielles de l’épisode infectieux initial.
* Confection de l’anastomose
:
Elle est réalisée comme en chirurgie réglée.
Les deux conditions de
base doivent être respectées, à savoir une mobilisation suffisante du
segment colique d’amont pour permettre une anastomose
mécanique sans traction, une libération du moignon rectal des
adhérences grêles.
L’anastomose est réalisée à la pince mécanique
circulaire.
En cas de rétrécissement scléreux du moignon rectal, des
dilatations sont nécessaires mais parfois insuffisantes pour permettre
une anastomose mécanique.
Il faut alors avoir recours à une courte
laparotomie sous-ombilicale pour réaliser une anastomose manuelle
classique.
Le malade conserve en partie le bénéfice de l’abord laparoscopique.
2- Rétablissement par laparotomie
:
La voie d’abord reprend la laparotomie réalisée en urgence lors de
la première intervention.
L’entrée dans le ventre est parfois difficile
en raison des phénomènes adhérentiels sur la cicatrice médiane.
Les
temps chirurgicaux sont superposables à ceux de la chirurgie laparoscopique.
Les adhérences grêles dans le pelvis sont libérées
en premier, exposant le moignon rectal parfois repéré par une
bougie.
La colostomie est démontée, un segment colique est réséqué
afin de mettre en continuité un segment colique non inflammatoire.
L’angle gauche est mobilisé de dehors en dedans, comme nous
l’avons décrit dans le chapitre consacré à la chirurgie élective.
Le
plus souvent, une anastomose mécanique trans-suturaire est réalisée
pour des raisons de simplicité et de sécurité.
Parfois, le recours à
une anastomose manuelle est nécessaire.
Colectomies pour maladie diverticulaire : indications chirurgicales
Les objectifs de la colectomie pour maladie diverticulaire
compliquée sont différents selon que l’intervention est réalisée en
urgence ou de manière élective réglée.
En situation élective, l’objectif
est de réaliser une colectomie avec rétablissement de la continuité
digestive en un temps, en préservant le capital pariétal et le résultat
fonctionnel à long terme.
En urgence, l’objectif principal est de
réduire la mortalité, l’objectif secondaire d’éviter la colostomie.
Indication chirurgicale en situation
élective
:
Elle s’adresse aux malades qui ont évolué favorablement sous
traitement médical à l’issue d’une ou de plusieurs poussées.
Il faut
prévenir le malade qu’il n’y a aucun facteur prédictif fiable du risque de récidive des poussées.
Le signal d’alarme doit être tiré
lors de la première poussée. Globalement, seulement un tiers des
malades faisant une poussée aiguë doivent être opérés en urgence.
Pour les deux tiers restants, la sanction chirurgicale doit être
envisagée de manière élective en essayant de répondre à trois
questions : quels malades doit-on opérer ?
Quand faut-il les opérer ?
Quel est le geste chirurgical le mieux adapté ?
* Quels malades faut-il opérer ?
L’étude de l’histoire naturelle de la maladie permet de répondre à
cette question.
Sur une série prospective de 226 malades ayant fait
une première poussée, 160 ont été traités médicalement et suivis
pendant 2 ans ; 25 % d’entre eux ont récidivé dans les 2 ans, et ce
d’autant plus qu’ils avaient moins de 50 ans.
Ce risque est également
accru chez les malades qui ont des facteurs favorisants,
corticothérapie ou anti-inflammatoire non stéroïdien.
Sur une série anglo-saxonne de 120 malades suivis pendant 5 ans,
77 (65 %) ont été opérés et 43 non opérés ont été suivis
médicalement.
Dans le groupe opéré, deux malades ont récidivé et
un est décédé d’une complication.
Parmi les 43 malades non opérés,
37 ont récidivé (85 %) et neuf (20 %) sont décédés de
complications.
* Quand faut-il opérer ?
Le consensus semble établi pour la chirurgie élective au-delà de la
deuxième poussée de sigmoïdite, alors que tous les experts
s’accordent à penser qu’il n’y a pas d’indication de colectomie
prophylactique chez un malade asymptomatique.
Il paraît sage de
recommander une colectomie élective au-delà de la première
poussée sévère nécessitant une hospitalisation, d’autant plus
volontiers que le malade est jeune (< 50 ans), qu’il a des facteurs de
risque (immunodépression chronique), qu’il a des signes locaux
importants sur l’échographie ou le scanner.
* Quel type de chirurgie proposer ?
L’intervention de choix en chirurgie élective est la résection
anastomose en un temps.
Exceptionnellement, la discordance entre
la clinique et l’intensité des lésions anatomiques conduit à une
intervention de Hartmann ou, mieux, à une résection-anastomose
protégée.
La colectomie gauche laparoscopique est devenue aujourd’hui
l’intervention de référence de la maladie diverticulaire dans de
nombreux centres experts.
Certes, aucune étude randomisée n’a été
publiée.
Les études comparatives ont montré un bénéfice pour les
malades opérés par laparoscopie sur plusieurs paramètres : douleur
postopératoire et son corollaire, la réduction de la durée et de la
prise d’antalgiques, reprise plus précoce du transit et de la
réalimentation, réduction de la durée d’hospitalisation, maintien du
capital pariétal et réduction des complications de paroi (abcès,
éventrations).
Deux paramètres sont à ce jour en défaveur de l’abord laparoscopique : la durée d’intervention qui est significativement
plus longue dans toutes les séries, le surcoût du geste opératoire en
rapport avec l’utilisation du matériel à usage unique.
La durée
opératoire décroît avec l’expérience des opérateurs : dans une série
prospective de 100 colectomies gauches laparoscopiques, la durée
opératoire est passée de 225 minutes pour les 20 premiers malades à
150 minutes pour les 20 derniers.
Il est probable qu’avec l’expérience
et dans des cas sélectionnés, les durées opératoires sont voisines de
celles de la chirurgie ouverte.
Il est probable que, comme pour la
cholécystectomie ou la chirurgie antireflux, il faille attendre
plusieurs années avant de démontrer les avantages de l’abord
laparoscopique pour le malade ; on peut penser que la technique
laparoscopique va s’imposer avant d’avoir été scientifiquement
évaluée.
Dans la plupart des séries publiées, 15 % des
malades doivent bénéficier d’une laparotomie de conversion, le plus
souvent en raison de l’intensité des phénomènes inflammatoires
résiduels, pseudotumeurs inflammatoires et abcès périsigmoïdien.
À ce jour, aucun facteur prédictif préopératoire de faisabilité d’une
colectomie laparoscopique n’a été démontré.
Seule l’exploration laparoscopique permet de savoir si le geste est mené à bien sous
laparoscopie en totalité ou risque d’être converti.
C’est pourquoi
beaucoup d’équipes, dont nous sommes, préconisent d’effectuer le
temps haut de la colectomie gauche laparoscopique en premier
avant de disséquer la région pathologique d’abord parfois difficile.
Ainsi, si une conversion doit être réalisée, le préjudice pariétal est
réduit au minimum puisque l’angle gauche est déjà mobilisé.
Car la
réalisation d’une colectomie gauche pour sigmoïdite nécessite le plus
souvent une mobilisation de l’angle gauche afin que l’anastomose
soit effectuée sans traction et, surtout, que la résection du segment
pathologique emporte le côlon sigmoïde dans sa totalité.
Les
diverticules siègent souvent sur la totalité du cadre colique, mais ne
justifient pas de résection extensive.
Tous les diverticules ne doivent
pas être réséqués.
La résection-anastomose par laparotomie reste préconisée par
certaines équipes avec d’excellents résultats.
Dans une série
rétrospective de 100 colectomies électives pour maladie diverticulaire sans mortalité opératoire, la morbidité est faible : 14 %,
dont 8 % pour la morbidité chirurgicale, avec un seul cas de fistule
postopératoire.
Tous les malades bénéficiaient d’une anastomose terminoterminale manuelle en surjet.
Parmi les critères qui peuvent influer sur la décision technique, le
choix du type d’anastomose est important.
L’anastomose mécanique
est obligatoire en cas de résection laparoscopique, alors qu’une
anastomose manuelle peut être réalisée en cas de résection par
laparotomie.
Une méta-analyse regroupant 13 essais prospectifs
de résections colorectales avec anastomose manuelle ou mécanique
a permis de conclure que les deux méthodes étaient identiques sur
le taux de fistules, d’infections postopératoires et sur la mortalité
globale.
Seul le taux de sténose anastomotique était supérieur dans
le groupe d’anastomoses mécaniques, variant de 0 à 16%.
Il était
précisé que le résultat fonctionnel de ces malades était peu altéré
car les sténoses étaient facilement dilatables et, par voie de
conséquence, sans retentissement sur la qualité de vie des patients.
Certains chirurgiens considèrent ce problème suffisant pour effectuer
une anastomose manuelle chaque fois qu’elle est techniquement
possible. Dans ce cas, seule une colectomie par laparotomie est
réalisable.
Certains effectuent une chirurgie coelioassistée, en
réalisant l’anastomose manuelle par une courte laparotomie suspubienne
d’extraction de la pièce opératoire.
Choisir le mode
d’anastomose détermine donc, en partie, le type de voie d’abord qui
est réalisée.
Les facteurs limitant l’abord laparoscopique sont :
– l’obésité du malade et la difficulté de repérage des vaisseaux au
sein des mésos ;
– la difficulté de mobilisation du sigmoïde en raison des
phénomènes adhérentiels inflammatoires ;
– la distension du grêle due à une préparation colique trop tardive,
rendant l’exposition du champ opératoire impossible.
Il est
impossible d’agir sur le premier de ces trois paramètres ; on peut en
revanche influer sur les deux autres : le respect d’un délai de 2 à
3 mois entre la dernière poussée réduit les phénomènes
inflammatoires ; une bonne préparation colique réduit les difficultés
d’exposition.
Indications chirurgicales en urgence
:
La comparaison des techniques de prise en charge suppose une
évaluation précise des malades lors de l’intervention.
Plusieurs classifications sont utilisées pour analyser ces paramètres.
La classification de Hinchey en quatre stades évalue l’état local
des lésions sans prendre en compte l’état général et/ou septique du
malade.
Elle est recommandée par la Société américaine
de chirurgie colorectale.
Ce paramètre paraît mieux appréhendé
par le score APACHE II (Acute Physiology And Chronic Health
Evaluation).
Un score APACHE supérieur à 30 est associé
à un taux de mortalité de 70 %.
Plusieurs notions dominent la prise en charge du malade en
urgence.
Elles ont été
récemment validées par la conférence de consensus de l’EAES.
Les malades classés stade I de Hinchey relèvent le plus souvent d’une
thérapeutique médicale. Les germes le plus souvent en cause sont
ceux à Gram négatif et les anaérobies dont le Bacteroides fragilis,
présent dans 65 à 94 % des cas).
Une antibiothérapie intraveineuse
couvrant le spectre par un ou deux antibiotiques est associée à une
diète alimentaire.
Elle assure le plus souvent une résolution de la
poussée en 48 heures et doit être poursuivie en cas d’efficacité.
En
cas d’échec, l’heure de la chirurgie ne doit pas être différée.
Dans le stade II de Hinchey, le traitement médical doit être associé à
un drainage de l’abcès.
C’est la situation idéale pour réaliser un
drainage percutané sous échographie ou scanner.
En cas
d’impossibilité technique ou logistique, un drainage chirurgical est
nécessaire.
Si une laparotomie est réalisée, le geste doit être réalisé
dans la même logique que pour les stades III et IV.
Dans les stades III, une laparotomie en urgence est nécessaire.
Plusieurs options thérapeutiques peuvent être envisagées entre
l’intervention de Hartmann, la résection-anastomose avec ou sans
protection.
Le geste dépend de la précocité du diagnostic, de l’état
du sepsis intra-abdominal et de l’état inflammatoire des parois
colique et rectale.
Aucun consensus ne pouvant être établi, il y a
place pour un essai thérapeutique.
Dans les stades IV, le taux de décès est de 10 à 22 % selon le terrain
de survenue, le type de péritonite et son ancienneté.
Dans cette
situation, l’intervention de Hartmann avec résection du segment
pathologique et colostomie terminale est le procédé recommandé.
Ce choix thérapeutique expose à un risque de mortalité de 12 %
alors que la mortalité était de 28 % si le geste consistait en une colostomie-drainage laissant en place le segment infecté
pathologique.
Dans les péritonites par perforation (Hinchey III et
IV), le taux de décès paraît plus lié à la gravité du sepsis (score
APACHE II > 15) qu’au geste réalisé qui paraît peu influencer la
survie.
Dans les stades I, II et III de Hinchey avec un score
APACHE II bas, la résection-anastomose avec ou sans colostomie de
protection est une attitude de plus en plus utilisée.
L’intervention de
Hartmann paraît devoir être réservée en priorité aux stades IV de Hinchey ou aux stades II et III associés à un score APACHE élevé,
ou aux malades ayant des tissus inflammatoires qui ne permettent
pas un rétablissement de la continuité digestive en un temps.
La colostomie-drainage, dont la mortalité est de 59 %, doit être réservée
aux cas extrêmes ayant un score APACHE II très élevé.
Nous
devons nous rappeler que, chaque fois que le malade peut le
supporter, la résection du segment pathologique infecté
(intervention de Hartmann) doit être préférée à la simple colostomiedrainage.
Chaque fois que l’état des segments digestifs le permet, le
rétablissement de la continuité digestive est effectué en un temps
avec ou sans colostomie de protection.
Dans les stades III, avec péritonite purulente non stercorale, certains
auteurs ont montré la faisabilité d’une toilette sous laparoscopie avec
drainage, associée ou pas à une colostomie de protection.
Contreindiquée
dans les péritonites stercorales, cette stratégie
thérapeutique permet d’amener les malades à une chirurgie
secondaire à froid en réduisant le préjudice pariétal et, parfois, en
évitant une colostomie.
Paradoxalement, la résection colique laparoscopique qui est effectuée 2 mois après la première
laparoscopie ne pose pas plus de problèmes techniques que pour les
malades qui ont été pris en charge médicalement.