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Hépatologie
Diagnostic de la cirrhose du foie
Cours d'Hépatologie
 


 

Introduction :

Il y a deux principales présentations de la cirrhose : patente lorsqu’elle est compliquée (ascite par exemple), on dit alors qu’elle est décompensée.

Le diagnostic est alors relativement aisé mais quelques erreurs sont encore possibles.

Dans la majorité des cas, la cirrhose est latente ou non compliquée ou compensée.

Le diagnostic est a priori moins aisé ; c’est dans ces circonstances que le diagnostic positif prend une place prépondérante.

De nouveaux moyens diagnostiques sont désormais à la disposition du plus grand nombre.

Il y a deux types de diagnostic : académique ou histologique et pragmatique ou non invasif.

Le diagnostic de référence de la cirrhose est l’examen histologique puisque la définition de la cirrhose est histologique : transformation de l’architecture normale par un processus diffus caractérisé par de la fibrose concentrique isolant des nodules d’hépatocytes de régénération.

Il y a deux grandes causes de cirrhose : l’alcool et les virus ; il en découle des présentations et des circonstances de découverte souvent différentes.

Dans cette mise au point, l’accent est mis sur les éléments de diagnostic positif précoce de la cirrhose et les signes ayant la meilleure valeur informationnelle.

Circonstances de découverte :

Le diagnostic est souvent tardif ou méconnu.

La cirrhose est une affection au début qui est souvent pas (forme latente) ou peu symptomatique.

Les signes cliniques précoces sont soit fréquents mais aspécifiques, soit plutôt spécifiques du foie mais assez rares.

Ceci explique que la cirrhose est souvent diagnostiquée au stade des complications lorsque l’hépatopathie chronique n’était pas connue.

En effet, au moment du diagnostic, on note une ou plusieurs complications chez 63 à 66 % des malades.

D’un autre point de vue, parmi l’ensemble des complications de la cirrhose, l’hémorragie digestive révélerait la cirrhose une fois sur trois et le carcinome hépatocellulaire une fois sur deux.

Il semble cependant possible de dépister de façon plus précoce la cirrhose puisque dans une étude italienne sur la cirrhose au sein de la population générale, la cirrhose était asymptomatique dans 85 % des cas.

Dans deux études, danoise et américaine, 33 et 40 %, respectivement, des cirrhoses étaient méconnues au moment du décès.

Diagnostic précoce de la cirrhose :

La question qui se pose au clinicien est triple : quand, comment et pourquoi diagnostiquer précocement la cirrhose ?

A - QUAND ?

Le plus tôt possible, le mieux étant même avant le stade de cirrhose.

L’alcool représente en France la principale cause de cirrhose. Selon plusieurs enquêtes, environ 20 % de la population française adulte mâle a une consommation alcoolique à risque ou excessive.

Dans cette population, le risque de développer une cirrhose serait de 19 % selon la moyenne de cinq études.

Ce risque étant significatif à partir de 45 ans, une vigilance accrue devrait être réalisée chez tous les consommateurs excessifs dès l’âge de 40 ans.

Le même seuil est observé au cours des hépatites virales.

Il y a deux circonstances chronologiques :

– un diagnostic rétrospectif : la cirrhose révèle l’hépatopathie chronique, il s’agit alors de prouver la cirrhose et c’est dans ce contexte que la ponction-biopsie hépatique (PBH) est proposée (diagnostic positif et étiologique) ;

– un diagnostic prospectif : l’hépatopathie chronique étant connue, il s’agit de dépister l’apparition de la cirrhose, les moyens non invasifs ont alors davantage de place.

À quel rythme doit être fait ce dépistage ?

Pour l’hépatite C évolutive (sans rémission), la recommandation des consensus est une PBH tous les 3 à 5 ans.

Dans ce contexte, les moyens non invasifs ont deux intérêts : ils peuvent être répétés plus fréquemment (par exemple, un test biologique sanguin annuel) et leur rythme peut être adapté à l’évolutivité individuelle de l’hépatopathie.

B - COMMENT ?

Par les moyens les plus simples en termes d’acceptabilité.

Il est possible d’individualiser dans la population générale des populations à risque selon deux approches :

– d’après le diagnostic de la cause, en premier lieu l’alcoolisme dont on connaît les difficultés diagnostiques et en deuxième lieu les populations à risque d’hépatite virale : antécédents de transfusions ou de toxicomanie ;

– selon une découverte « fortuite » d’une anomalie clinique ou biologique hépatique à l’occasion d’un bilan de santé ou pratiqué pour une autre raison.

En effet, la plupart des maladies chroniques du foie, surtout celles s’accompagnant d’une cytolyse, sont susceptibles d’évoluer vers une cirrhose.

En pratique, entrent dans ce cadre les augmentations chroniques de l’activité sérique des aminotransférases supérieures à 1,5 fois la limite supérieure de la normale (N).

Cependant, un dépistage de masse non ciblé, à partir de tests fonctionnels hépatiques, chez des sujets asymptomatiques, n’est pas actuellement recommandé en raison de leurs faibles sensibilité et spécificité.

D’autre part, le coût d’exploration des faux positifs est jugé prohibitif.

Enfin, la question la moins résolue est celle des faux négatifs. Il est classique de dire que 20 % des cirrhoses auraient des tests biologiques normaux.

En amont, on dispose également de peu de données sur le taux de faux négatifs pour le diagnostic biologique sanguin de maladie alcoolique du foie chez l’alcoolique.

Ce taux serait de 40 % pour l’alanine aminotransférase (ALAT) et l’aspartate aminotransférase (ASAT).

Ce taux semble supérieur pour l’hépatite C mais on sait que, en cas d’ALAT normale, la vitesse de progression de la fibrose est deux fois moindre.

C - POURQUOI ?

Pour une raison essentielle : la cirrhose est une lésion en principe irréversible et elle diminue l’espérance de vie du fait de ses complications.

Mais l’intérêt de ce diagnostic ne serait pas tant pronostique que thérapeutique.

Ceci peut être apprécié d’après le traitement de la cause et des complications de la cirrhose.

L’abstinence au cours de la cirrhose alcoolique diminue de moitié la mortalité à 5 ans.

Toutefois, il semble que le sevrage est d’autant plus facile à obtenir qu’il y a une complication de la cirrhose.

Le traitement de la cause est également efficace au cours de l’hémochromatose génétique et des maladies auto-immunes au stade de cirrhose.

En revanche, il est difficile d’arrêter la réplication d’un virus responsable d’une cirrhose.

D’autre part, un dépistage précoce permet de prévenir certaines complications.

Il est actuellement bien démontré que l’on peut diminuer l’incidence de la première hémorragie digestive de la cirrhose par les bêtabloquants.

De plus, le risque est maximal au cours des premières années d’évolution de la cirrhose.

L’endoscopie participe donc à la fois au diagnostic précoce de la cirrhose et au traitement préventif.

En revanche, le dépistage du carcinome hépatocellulaire tel qu’il est pratiqué actuellement (échographie et dosage de l’alphafoetoprotéine semestriels) semble peu rentable.

La connaissance d’une cirrhose permet de diminuer de nombreux autres risques dont les risques iatrogènes (par exemple, encéphalopathie hépatique induite par les sédatifs).

Enfin, outre l’amélioration de la survie, un dépistage précoce en agissant sur plusieurs facteurs (traitement de la cause de la cirrhose et prévention de ses complications) pourrait permettre de réduire le coût économique de cette maladie.

L’impact d’une maladie peut être mesuré par les années de vie productives perdues (AVPP) avant l’âge de 65 ans qui quantifient le décès et l’incapacité avant l’âge de la retraite et les limites de productivité de travail.

Chaque cas de cirrhose représente en moyenne 12 AVPP contre trois AVPP pour les maladies coronariennes et quatre AVPP pour le cancer.

Bien que les deux dernières maladies causent davantage de décès, l’impact économique de la cirrhose survenant plus tôt dans la vie, durant les années de vie productives et entraînant de nombreuses hospitalisations, est donc de trois à six fois plus grand par cas que les autres affections précitées.

Moyens diagnostiques :

A - MOYENS INVASIFS :

1- La ponction-biopsie hépatique est-elle fiable ?

L’examen histopathologique d’un fragment hépatique, le plus souvent prélevé par ponction-biopsie, est l’examen de référence.

D’après le prélèvement, on peut considérer la cirrhose comme :

– certaine en présence d’au moins un nodule régénératif entouré de fibrose ;

– probable en présence d’au moins deux des critères suivants : fragmentation du spécimen, fibrose entourant la plus grande partie du fragment, distorsion du réseau de réticuline, signes de régénération ;

– possible en présence d’une architecture remaniée ou d’une fibrose intralobulaire.

La fiabilité de la PBH est prise en défaut pour le diagnostic de cirrhose.

Le taux de faux négatifs est en moyenne de 24 %. Pour les biopsies effectuées sous le contrôle de la vue au cours d’une laparoscopie, ce taux est en moyenne de 25 %.

La laparoscopie a elle aussi un taux de faux négatifs de 20 % mais le cumul de l’examen macroscopique et de la PBH sous laparoscopie réduit ce taux à 2 %.

Quand le fragment est recueilli par voie transjugulaire, le diagnostic de cirrhose est plus difficile car requérant plus d’expérience.

Ainsi, si dans les centres de référence le fragment hépatique était jugé adéquat dans 81 à 97 % des cas, le spécimen était non fragmenté ou assez long pour un diagnostic chez seulement 64 % des malades avec fibrose ou cirrhose.

Cependant, la voie transjugulaire est souvent nécessaire au cours de la cirrhose dans les circonstances suivantes : troubles significatifs de la coagulation, ascite et atrophie.

Ainsi, la biopsie hépatique, qui représente le gold standard en termes de diagnostic de cirrhose, a ses limites.

Une estimation récente a même suggéré que la biopsie serait moins performante qu’une échographie-doppler pour le diagnostic de cirrhose avec une sensibilité respective de 62 et 87 %.

2- La ponction-biopsie hépatique est-elle acceptable ?

Le caractère vulnérant de la PBH (morbidité de 0,3 % et mortalité de 1/10 000), l’inconfort (la douleur) ainsi que la contrainte d’une hospitalisation et son coût, font que cette technique est inadaptée au dépistage précoce de la cirrhose ou au diagnostic ambulatoire.

3- La ponction-biopsie hépatique est-elle indispensable ?

Cette question récurrente est débattue.

En fait, la question actuelle est de savoir si les moyens non invasifs peuvent réellement supplanter la PBH pour le diagnostic de cirrhose.

B - MOYENS NON INVASIFS :

1- Clinique :

Les signes cliniques de la cirrhose sont la conséquence des modifications morphologiques du foie, de l’insuffisance hépatique et de l’hypertension portale.

Le foie n’est pas toujours hypertrophié ; sa consistance ferme et son bord inférieur tranchant sont caractéristiques de la cirrhose.

L’insuffisance hépatique peut se manifester par un ictère, une encéphalopathie hépatique ou des troubles endocriniens (aménorrhée, impuissance) ou des troubles cutanés (angiomes stellaires, érythrose palmaire).

L’hypertension portale se manifeste par une ascite, une circulation veineuse collatérale abdominale et une splénomégalie.

2- Biologie :

On distingue :

– les marqueurs de la conséquence de la cirrhose, essentiellement ceux de l’insuffisance hépatique ; ce sont donc des marqueurs indirects de cirrhose ;

– ceux de la cause histologique de la cirrhose, la fibrose.

Les marqueurs de fibrose peuvent être des molécules impliquées dans les processus dynamiques de la fibrose au sein de la matrice extracellulaire : fibrogenèse et fibrolyse ; ce sont les marqueurs directs de fibrose.

Par opposition, le clinicien distingue les marqueurs indirects de fibrose car reflets mais non partie intégrante de la fibrose.

* Marqueurs indirects :

De très nombreuses anomalies biologiques on été décrites au cours de la cirrhose dont les plus communes sont indiquées ci-après.

Parmi les tests hépatiques conventionnels, une valeur diagnostique significative a été observée pour les tests sanguins suivants : albumine, taux de prothrombine (TP), gammaglobulines, plaquettes.

Le TP a une très bonne performance diagnostique (proportion de malades correctement classés = vrais positifs et négatifs) de cirrhose (86 %), non influencée par d’autres variables telles que l’existence d’une hépatite alcoolique et par ailleurs son dosage est reproductible.

L’apolipoprotéine A1 (Apo-A1) est un bon marqueur de fibrose hépatique et de cirrhose chez les malades alcooliques.

À partir de la gammaglutamyl-transpeptidase (cGT), du TP et de l’Apo-A1 a été étudiée la valeur diagnostique d’un index appelé PGA où chacune de ces trois variables est représentée par un score de 0 à 4 selon son résultat.

Cet index permettait de bien classer 66 % des sujets.

Quand l’index était inférieur ou égal à 2, la probabilité de cirrhose était de 0 % et, supérieur ou égal à 9, elle était de 86 %.

L’intérêt de cet index a été confirmé par deux autres équipes et sa performance a été améliorée par l’adjonction d’autres marqueurs tels que le peptide du procollagène III ou de l’alpha-2 macroglobuline.

Toutefois, son utilité a été contestée et sa performance semble actuellement dépassée.

* Marqueurs directs :

Les marqueurs sériques de fibrose les plus étudiés ont été le propeptide du procollagène III, l’acide hyaluronique, le propeptide du collagène IV, la laminine et le fragment 7S du collagène IV.

Le marqueur sérique direct de fibrose le plus performant semble être l’acide hyaluronique (ou hyaluronate).

Cette performance diagnostique est probablement liée au fait que ce constituant de la matrice n’est corrélé qu’à la fibrose et n’est que peu influencé par les autres variables histopathologiques telles que l’activité et la nécrose, contrairement au PIIINP par exemple.

Ont été également étudiés, les molécules fibrolytiques, comme les matrix metalloproteinases (MMP) ou leurs inhibiteurs, les tissue inhibitor of metalloproteinases (TIMP).

La MMP-2 serait aussi performante que le hyaluronate dans les hépatopathies chroniques virales.

3- Endoscopie :

Dans une étude française récente, la performance diagnostique des varices oesophagiennes pour la cirrhose était de 77 %.

La performance diagnostique des varices oesophagiennes pour la cirrhose a été peu étudiée.

Paradoxalement, la valeur de la gastropathie d’hypertension portale, dont le principal signe est la mosaïque, a été plus étudiée.

La sensibilité de la gastropathie était très variable.

Dans tous les cas, la spécificité était de plus de 90 %.

Dans une étude française récente, l’intérêt respectif des signes gastriques et oesophagiens a été évalué de façon indépendante : si l’évaluation des varices oesophagiennes permettait de bien classer 88 % des malades avec hépatopathie chronique, la mosaïque gastrique permettait un petit gain diagnostique significatif à 92%.

La performance diagnostique de l’échoendoscopie est inférieure à celle de l’endoscopie.

4- Imagerie radiologique :

De nombreux examens radiologiques (artériographie, échographie, scanner, imagerie par résonance magnétique) du foie ont une sémiologie qui permet d’évoquer le diagnostic de cirrhose.

Toutefois, seul l’intérêt de l’échographie pour le diagnostic de cirrhose a été évalué.

Il y a deux catégories de signes qui permettent d’évoquer la cirrhose :

– les signes directs des anomalies morphologiques hépatiques : l’hypertrophie du lobe caudé (segment I), l’hétérogénéité diffuse du parenchyme et la surface nodulaire diffuse ;

– les signes d’hypertension portale : ascite (l’échographie permet de détecter une minime quantité d’ascite insoupçonnée par l’examen clinique), splénomégalie, circulation collatérale et dilatation de la veine porte.

Dans les différentes études réalisées, la valeur informationnelle de cette sémiologie était évaluée de façon controversée, notamment pour la sensibilité qui variait de 12,5 à 95 %.

Il est donc nécessaire d’avoir recours à d’autres études, ce d’autant que la meilleure sensibilité a été observée avec une sémiologie relativement sophistiquée et fastidieuse telle que la mesure de trois dimensions du lobe caudé, dont la concordance interobservateurs est médiocre.

En revanche, la spécificité de cette sémiologie était généralement excellente.

La plupart de ces études avaient des biais.

Une étude récente prenant en compte ces biais a montré une performance diagnostique de 84 %.

Cependant, la performance diagnostique diminuait de 7 % pour le signe le plus performant lorsqu’on tenait compte de l’absence de recueil du signe (pour des raisons anatomiques : gaz...).

Dans l’ensemble, il semble que l’échographie permette de bien classer trois malades sur quatre pour le diagnostic de cirrhose.

L’échographie-doppler est un examen potentiellement très intéressant pour le diagnostic de cirrhose vu la multiplicité des anomalies vasculaires.

Nous disposons actuellement de plusieurs études sur les performances diagnostiques de la vitesse circulatoire de la veine porte et/ou l’index de pulsatilité de l’artère hépatique.

La sensibilité pour le diagnostic de cirrhose est de 66 % et la spécificité de 90 % en utilisant la mesure de la vitesse circulatoire de la veine porte.

Récemment, une étude comportant 212 malades avec hépatopathie compensée vient de conforter ces données en montrant que deux variables indépendantes, surface nodulaire et vitesse du flux portal, permettaient le diagnostic de cirrhose avec une sensibilité de 87 % et une spécificité de 98 %.

L’étude doppler concomitante de l’artère hépatique et de la veine porte améliore également les performances de l’échographie-doppler pour le diagnostic de cirrhose avec une sensibilité de 97 % et une spécificité de 93 %.

L’apport du doppler pour le diagnostic de cirrhose mérite donc d’être développé, sous réserve d’un apprentissage rigoureux de la technique et de la prise en compte des facteurs de reproductibilité.

Dans notre expérience, nous n’avons pas retrouvé d’indices informationnels aussi élevés avec la vélocimétrie portale.

Une nouvelle sémiologie a été récemment évaluée.

La mesure du temps de transit hépatique aurait une excellente performance diagnostique.

De même, l’analyse du spectre des veines hépatiques serait performante.

5- Ensemble des examens cliniques et paracliniques :

Nous venons de voir que nombre de signes avaient une bonne spécificité mais une sensibilité médiocre.

Il n’y a donc pas d’examen permettant à lui seul le diagnostic de cirrhose.

Il était donc licite de s’intéresser à plusieurs examens à la fois. Nous disposons de six études dont trois italiennes.

– La première étude, française, a été réalisée chez 779 malades alcooliques.

La technique utilisée (arbres décisionnels et analyse discriminante) a permis de sélectionner neuf des 50 variables cliniques et biologiques étudiées : ascite, splénomégalie, angiomes stellaires, âge, TP, Apo-A1 et b + c-globulines.

La performance diagnostique de ces neuf variables pour la cirrhose était de 93 %, la valeur prédictive positive de 89 % et la valeur prédictive négative de 94 %.

– La deuxième étude, déjà citée, a été réalisée chez 277 malades avec ASAT supérieure à 2 N et sans décompensation de l’hépatopathie.

Les signes ayant une valeur diagnostique indépendante étaient : foie ferme, thrombopénie (plaquettes < 140 G/L) et un diamètre de veine porte supérieur ou égal à 13 mm avec absence de variation respiratoire des vaisseaux portes.

Un score établi à partir de ces trois variables permettait une sensibilité de 50 % et un classement correct de 70 % des malades pour le diagnostic de cirrhose.

– La troisième étude, rétrospective, a été réalisée chez 412 malades atteints d’hépatopathie compensée à l’aide de 18 variables.

Dans chaque type d’examen, les variables qui avaient la meilleure valeur prédictive étaient les suivantes, en analyse univariée : clinique : hauteur splénique supérieure à 18 cm, surface hépatique irrégulière ; biologie sanguine : plaquettes inférieures ou égales à 110 G/L, gammaglobulines supérieures ou égales à 24 g/L ; échographie : absence de variation respiratoire des vaisseaux portes, diamètre de la veine porte supérieur ou égal à 14 mm.

À l’aide d’une combinaison de cinq variables, le pourcentage de malades bien classés était de 70 %.

– La quatrième étude, prospective, réalisée chez 114 malades avec ALAT supérieure à 2 N a individualisé trois variables prédictives indépendantes : plaquettes, longueur splénique et vitesse maximale du flux portal ; la valeur prédictive positive de deux signes était de 98 % et la valeur prédictive négative des trois signes (tous normaux) était de 96 %.

La performance diagnostique de la vitesse maximale du flux portal était de 88 %, prise isolément, et de 95 % en association des deux autres variables.

– La cinquième étude, française, réalisée chez 243 malades atteints d’hépatopathies virales ou alcooliques, a testé 63 variables cliniques, biologiques, échographiques et endoscopiques.

En analyse multivariée, trois variables (acide hyaluronique, varices oesophagiennes et fermeté du foie) avaient une performance diagnostique pour la cirrhose de 92 %, avec une valeur prédictive positive de 98 % et une valeur prédictive négative de 86 %.

– La sixième étude, publiée uniquement sous forme de résumé, a évalué de façon rétrospective la valeur informationnelle de variables cliniques et biologiques chez 191 malades atteints d’hépatopathies chroniques non alcooliques.

L’élaboration d’un score CDS (cirrhosis discriminant score) prenant en compte l’existence d’ascite, d’angiomes, le taux de plaquettes, le rapport ALAT/ASAT et le TP permettait, avec un score de 7,5, de classer correctement les malades avec cirrhose dans 75 % des cas et les malades sans cirrhose dans 86 % des cas.

La probabilité d’avoir une cirrhose était supérieure à 90 % lorsque le score CDS était supérieur ou égal à 10, inférieure à 7 % lorsque le score était inférieur ou égal à 5.

– Une étude doit être envisagée à part car ayant évalué uniquement des variables cliniques et biologiques conventionnelles dans une population de 101 malades atteints d’hépatite chronique active sévère avec ou sans décompensation sans analyse multivariée : la présence simultanée d’une thrombopénie (< 100 G/L), d’un coma et d’une ascite avait une sensibilité de 56 % et une spécificité de 85 % pour la cirrhose ; l’adjonction d’un allongement du temps de prothrombine (> 3 s) permettait une sensibilité de 74 % et une spécificité de 72 %.

En définitive, la valeur diagnostique indépendante d’un foie ferme, d’une thrombopénie, d’une baisse du TP, d’une augmentation du diamètre du tronc porte et de la splénomégalie est retrouvée dans plusieurs de ces six études.

Toutefois, l’intérêt des variables suivantes, peu étudiées, semble être important : vitesse du flux portal et surface nodulaire hépatique en échographie-doppler hépatique, varices oesophagiennes et gastropathie en endoscopie, et marqueurs sériques de fibrose tels que l’acide hyaluronique.

En synthèse, il semble possible de bien classer 80 à 95 % des malades avec hépatopathie par rapport au diagnostic de cirrhose par des moyens non invasifs.

Perspectives :

Le diagnostic de la cirrhose ne peut progresser qu’à deux conditions.

En premier lieu, il faut maîtriser les problèmes des faux négatifs de la PBH comme l’ont proposé Gaïani et al en définissant les faux négatifs par des données échographiques et cliniques évolutives.

En d’autres termes, il n’y aurait plus d’examen de référence, la PBH, mais une combinaison de critères.

En deuxième lieu, il faut associer la sémiologie la plus performante (et non la plus classique) tels les nouveaux marqueurs biologiques de fibrose et l’imagerie doppler.

Enfin, un diagnostic précoce et non invasif performant devrait permettre un dépistage de la cirrhose dans les populations à risque.

Diagnostic selon la cause :

Il semble que la valeur diagnostique d’un signe soit fonction de la cause de l’hépatopathie.

Ainsi, la thrombopénie serait plus performante dans les hépatopathies virales, notamment C.

Des modèles prédictifs de fibrose sévère ont été développés pour l’hépatite chronique virale B.

Dans une étude récente, ne comportant que des malades atteints d’hémochromatose génétique (homozygotes C282Y), le taux sérique d’ASAT, la ferritinémie et l’hépatomégalie permettaient de prédire l’existence d’une fibrose sévère chez 93 % des malades avec une sensibilité de 83 % et une spécificité de 97 %.

Conclusion :

La sémiologie de la cirrhose est très riche mais seuls quelques signes sont utiles comme critères diagnostiques.

Le diagnostic de référence était l’examen histopathologique mais il a des limites.

Il semble désormais possible de pouvoir s’affranchir de la PBH, du moins dans certaines circonstances.

Il est désormais possible d’approcher 90 % de précision pour le diagnostic de cirrhose chez les malades avec hépatopathie chronique, par des moyens non invasifs.

Les signes les plus performants semblent être, pour la clinique : un foie ferme, pour la biologie : la thrombopénie, la diminution du TP, et le hyaluronate, pour l’échographie-doppler : l’augmentation du diamètre de la veine porte, la vélocimétrie portale et pour l’endoscopie : les varices oesophagiennes (mais c’est un examen « semi-invasif »).

D’autres données issues de l’échographie-doppler ou de la biologie de la fibrose semblent prometteuses.

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