Chirurgie des cancers de l’oesophage Cours de Chirurgie
Plan
:
A - VOIES D’ABORD :
– Abord abdominal
– Abord thoracique
– Abord cervical
B - POINTS TECHNIQUES COMMUNS
AUX DIFFÉRENTES INTERVENTIONS :
– Exploration
– Gastrolyse
– Gastroplastie
– Pyloroplastie
– Libération de l’oesophage dans le thorax
– Anastomose oesogastrique
C - INTERVENTIONS D’INDICATION FRÉQUENTE
:
– Choix de la technique
– OEsophagectomie par double abord abdominal et thoracique
(intervention de Lewis-Santy)
– OEsophagectomie par double abord abdominal et cervical
(oesophagectomie sans thoracotomie ou oesophagectomie par voie
transhiatale)
– OEsophagectomie par triple abord abdominal, thoracique et
cervical
D - POINTS TECHNIQUES PARTICULIERS
:
– Estomac tubulisé ou entier ?
– Étendue du curage médiastinal et cervical
– Chirurgie vidéoassistée
E -
INTERVENTIONS D’INDICATION RARE
:
– Coloplastie
– OEso-pharyngo-laryngectomie totale
– Intervention de Sweet
– OEsogastrectomie polaire supérieure par voie abdominale
– Autres plasties
Voies d’abord
:
Du fait du siège cervical, thoracique et abdominal de l’oesophage, la
chirurgie du cancer de l’oesophage nécessite en règle une double ou
une triple voie d’abord.
La multiplicité des voies d’abord complique
le choix de la technique chirurgicale, augmente l’importance du
retentissement respiratoire de l’intervention et augmente le risque
des complications postopératoires.
Les voies d’abord et donc finalement le type d’intervention sont
choisies en fonction de la hauteur du pôle supérieur de la tumeur,
de son type histologique (il faut sectionner plus haut l’oesophage
au-dessus du pôle supérieur de la tumeur en cas d’adénocarcinome),
de l’état général et de la fonction respiratoire de l’opéré, ainsi que
de l’expérience et des préférences du chirurgien.
En pratique :
– un abord abdominal est presque toujours nécessaire ;
– un double abord abdominothoracique ou abdominocervical est
fréquemment utilisé ;
– un triple abord permettant l’exposition et la dissection de la
totalité de l’oesophage est une technique plus rarement utilisée.
A - ABORD ABDOMINAL
:
Un abord abdominal permet la dissection de l’oesophage abdominal,
l’exérèse des chaînes ganglionnaires abdominales drainant
l’oesophage et la préparation de l’organe remplaçant l’oesophage.
Ce
dernier point explique que l’abord abdominal est presque toujours
nécessaire, la seule exception étant l’intervention de Sweet faite par
une thoracotomie gauche associée à une phrénotomie.
En cas de
cancer du cardia ou de l’oesophage inférieur, une voie d’abord
abdominale associée à une ouverture de l’hiatus peut
exceptionnellement être utilisée pour réséquer la tumeur et faire une
anastomose dans le médiastin inférieur ; toutefois, la section
oesophagienne porte alors à proximité de la tumeur et l’anastomose
est de réalisation difficile, même en utilisant une pince à suture
mécanique.
La voie d’abord la plus utilisée est une incision médiane susombilicale,
éventuellement agrandie en sous-ombilicale chez les
malades corpulents. Une valve autostatique (type valve de Rochard)
est indispensable pour rétracter l’auvent costal vers le haut et
donner du jour sur l’étage sus-mésocolique.
Cet écarteur doit
idéalement pouvoir être mobilisé dans le sens latéral pour améliorer
l’exposition sur l’hypocondre gauche lors de la section des vaisseaux
courts gastrospléniques, et sur l’hypocondre droit lors du
décollement duodénopancréatique et de la confection de la
pyloroplastie.
La mise en place d’un deuxième écarteur autostatique
dans le sens transversal (type écarteur de Ricard ou de Gosset)
améliore encore l’exposition.
Chez les malades obèses ou dont l’auvent costal est large, une
incision bi-sous-costale peut être préférée.
Il est alors utile de placer
un écarteur autostatique de chaque côté pour ouvrir, en le rétractant,
l’auvent costal.
L’incision bi-sous-costale est réputée moins
douloureuse et amputant moins la fonction respiratoire que
l’incision médiane sus-ombilicale.
Cependant, à notre connaissance,
cet avantage n’est démontré par aucune étude contrôlée.
Le
risque d’éventration est plus faible après incision bi-sous-costale.
Pour obtenir un jour suffisant sur la région hiatale, il faut mobiliser
le lobe gauche du foie en le réclinant vers le haut et la droite, le plus
souvent après avoir sectionné le ligament falciforme, le ligament
triangulaire gauche et le petit épiploon.
Lors de la section du
ligament triangulaire gauche, il faut veiller à ne pas blesser la veine
hépatique gauche dans laquelle s’abouche habituellement la veine
phrénique inférieure gauche.
Si le petit épiploon contient une artère
hépatique gauche, il faut palper le pédicule hépatique à la recherche
d’une artère hépatique moyenne ou d’une artère hépatique droite :
en cas d’absence d’artère dans le pédicule hépatique (disposition de
type artère hépatique gauche-foie total, observée dans 1 % des cas)
ou si l’artère palpée dans le pédicule est de très petite taille, il faut
préserver l’artère hépatique gauche et l’artère gastrique gauche en
amont de celle-ci.
Le lobe hépatique gauche doit être maintenu
récliné vers le haut et la droite par une valve solidarisée à l’écarteur
pariétal.
La dissection de l’hiatus commence par l’ouverture du péritoine à la
face antérieure de l’oesophage.
Latéralement, le péritoine est incisé
aux bords antérieurs du pilier droit sur toute sa longueur et du pilier
gauche à sa partie haute.
L’espace inframédiastinal est ouvert après
incision du ligament phréno-oesophagien.
L’oesophage est disséqué
au doigt et chargé avec les deux nerfs pneumogastriques.
Le passage rétro-oesophagien est plus aisé, si on l’effectue à la partie haute des
piliers.
En cas de cancer du cardia ou de l’oesophage abdominal, il
est souhaitable de laisser une collerette d’hiatus au contact de
l’oesophage et de la tumeur en incisant les piliers dans leur
épaisseur.
L’oesophage est mis sur lacs avec les deux nerfs
pneumogastriques et attiré vers le bas.
Deux cas doivent alors être
distingués :
– si l’on a choisi d’effectuer une oesophagectomie avec thoracotomie,
il n’est pas nécessaire d’agrandir davantage l’orifice hiatal pour
poursuivre la dissection vers le haut ; l’abord déjà obtenu permet de
visualiser la face postérieure du péricarde, les deux plèvres médiastinales et la face antérieure de l’aorte descendante ;
l’agrandissement l’hiatus par section partielle du pilier droit, plus
ou moins complétée par l’incision du bord antérieur l’hiatus jusqu’à
la veine phrénique inférieure, n’est nécessaire qu’en fin
d’intervention, pour éviter une compression de la gastroplastie et
de son pédicule gastroépiploïque ;
– une oesophagectomie sans thoracotomie (ou très rarement une
résection limitée à l’oesophage inférieur avec anastomose médiastinale basse par voie abdominale) a été choisie : il faut alors
ouvrir largement l’hiatus à son bord antérieur après avoir décollé
au doigt le péricarde du diaphragme et avoir sectionné, entre deux
ligatures serties, la veine phrénique inférieure ; une ouverture
diaphragmatique de 7 à 10 cm est habituellement suffisante pour
obtenir un jour satisfaisant jusqu’au bord inférieur des deux
bronches souches ; la visualisation de celles-ci nécessite une parfaite
exposition en refoulant le massif cardiaque par une valve métallique,
si possible de forme plane ; cette manoeuvre est souvent mal tolérée
au plan cardiovasculaire et doit être régulièrement interrompue pour
permettre à l’opéré de récupérer une hémodynamique satisfaisante.
En fin d’intervention, l’hiatus doit être reconstitué lâchement autour
de la gastroplastie en suturant la partie incisée du diaphragme
d’avant en arrière à points séparés de fil monobrin non résorbable.
Il faut laisser un passage pour deux doigts à frottement doux entre
la plastie et l’hiatus, pour éviter de stranguler la plastie et son
pédicule.
À l’inverse, une fermeture insuffisante expose au risque
de hernie diaphragmatique qui peut survenir précocement ou à
distance de l’intervention.
Le drainage est en théorie utile pour éliminer le pneumopéritoine
postopératoire et faciliter ainsi la mobilité diaphragmatique en
postopératoire.
Deux drains aspiratifs de type Redon (un dans la
région sous-phrénique gauche et un dans la région sous-hépatique)
sont suffisants.
Il n’est pas démontré que ce type de drainage soit
indispensable. Le drainage de la pyloroplastie est inutile.
B - ABORD THORACIQUE
:
1- Thoracotomie droite
:
L’incision habituelle est une thoracotomie postérolatérale droite
sectionnant le muscle grand dorsal et empruntant le cinquième ou
le sixième espace intercostal.
Le malade est alors placé en décubitus
latéral gauche avec un billot transversal placé à l’aplomb de la
pointe de l’omoplate.
Si l’on souhaite disposer préférentiellement
d’une bonne exposition sur le médiastin supérieur, il faut laisser le
membre supérieur droit pendant vers l’avant, ce qui ouvre l’angle
entre le bord postérieur de l’omoplate et le rachis, et permet de
prolonger l’incision vers l’arrière jusqu’à débuter la section du
muscle rhomboïde et inciser le cinquième espace intercostal.
Le muscle dentelé est sectionné après ligature de son pédicule vasculonerveux ou partiellement désinséré à sa partie basse en
sectionnant ses insertions costales.
Si l’on souhaite disposer préférentiellement d’une bonne exposition
sur le médiastin inférieur, il faut inciser le sixième espace intercostal.
Le membre supérieur droit est laissé pendant vers l’avant ou placé
au-dessus de la tête de l’opéré dans un berceau ou fixé à un arceau.
Dans ce dernier cas, la section du muscle dentelé est plus
facile que sa désinsertion.
La résection d’une côte est généralement inutile.
L’écarteur autostatique (de type Finochietto ou Lortat-Jacob) est installé avec
sa crémaillère placée vers l’aide.
Il faut ouvrir progressivement la
thoracotomie en désinsérant les muscles intercostaux au bord
supérieur de la côte inférieure sur toute la longueur de l’espace pour
limiter les risques de plaie des vaisseaux intercostaux et de fracture
de côte.
L’exposition peut être améliorée vers le haut ou vers le bas
par la section du col de la côte, respectivement sus- ou sous-jacente.
La fermeture est faite plan par plan au fil résorbable. Les points
rapprochant les côtes peuvent être passés au travers de la côte
inférieure pour éviter de traumatiser le nerf intercostal sous-jacent à
l’incision.
Le drainage pariétal n’a pas d’intérêt, sauf en cas de pneumolyse difficile ayant entraîné une fuite aérienne importante
pour laquelle on craint un emphysème pariétal malgré le drainage
thoracique.
2- Thoracotomie gauche
:
La thoracotomie gauche est actuellement utilisée de façon
exceptionnelle pour aborder l’oesophage thoracique.
Deux cas sont à distinguer :
– la thoracotomie gauche est choisie en raison de l’impossibilité
d’utiliser une thoracotomie droite (antécédent de chirurgie ou de
tuberculose pleuropulmonaire droite) ou parce qu’il faut explorer
chirurgicalement une lésion thoracique gauche (nodule pulmonaire
par exemple) : l’incision est alors une thoracotomie postérolatérale
gauche empruntant le cinquième ou le sixième espace intercostal ;
l’installation de l’opéré et l’incision pariétale ont les mêmes particularités que la thoracotomie droite ; toutefois, la mobilisation
de l’oesophage (qui nécessite un décroisement avec la crosse de
l’aorte) et la confection d’une anastomose intrathoracique susaortique
(qui est gênée par la présence de la crosse de l’aorte et de
l’artère sous-clavière gauche) demandent une excellente exposition
sur le médiastin supérieur ; en pratique, il est souvent plus facile,
après thoracotomie gauche, de faire une anastomose cervicale ;
– la thoracotomie gauche constitue la voie d’abord exclusive pour
traiter un cancer de la jonction oesogastrique ou un adénocarcinome
de l’oesophage inférieur ; l’incision est une thoracotomie empruntant
le septième espace, sectionnant le rebord chondrocostal qui doit
être réséqué partiellement pour éviter la constitution d’une
pseudarthrose douloureuse et associée à une phrénotomie ; en
arrière, il est souvent nécessaire de prolonger assez loin l’incision en
sectionnant le muscle grand dorsal pour disposer d’une bonne
exposition sur la région sous-aortique ; si la pointe de l’omoplate
vient cacher la partie postérieure de la thoracotomie, elle doit être
rétractée vers le haut avec un lacs fixé à un crochet ; la
phrénotomie peut être soit une phrénotomie radiée ouvrant l’orifice
hiatal en sectionnant le pilier gauche, soit une phrénotomie périphérique sans
section du pilier gauche qui a l’avantage de moins traumatiser
le diaphragme et les branches de division du nerf phrénique,
mais complique la dissection et la réalisation de l’anastomose
au bord inférieur de la crosse de l’aorte.
C -
ABORD CERVICAL :
1- Cervicotomie latérale
:
L’abord cervical usuel est une cervicotomie présterno-cléidomastoïdienne
gauche.
Le côté gauche est préféré parce que
l’oesophage est légèrement dévié latéralement à gauche et parce que
le nerf récurrent, situé dans l’angle dièdre trachéo-oesophagien,
parallèle à l’oesophage, n’est pas mis en tension par l’ouverture large
de l’espace situé entre l’axe jugulocarotidien et l’axe viscéral.
Si le
côté gauche n’est pas utilisable (antécédent chirurgical oto-rhinolaryngologique
ou vasculaire), une incision droite est possible mais
expose à un risque accru de paralysie récurrentielle, en particulier
par traction excessive lors de l’exposition à la partie basse de
l’incision ou si l’on étend la dissection vers le médiastin.
L’opéré est installé en décubitus dorsal, le cou en hyperextension
grâce à un billot transversal placé sous les omoplates.
Chez
les malades âgés ou ayant une arthrose cervicale, il faut éviter toute hyperextension forcée et veiller à ce que la tête reste en appui
pendant la durée de l’intervention.
Le cou est tourné du côté opposé
à l’incision, sans être placé dans une position forcée qui aurait pour
inconvénient de faire recouvrir la gouttière jugulocarotidienne par
le muscle sterno-cléido-mastoïdien (SCM).
L’incision est oblique au bord antérieur du muscle SCM.
Elle est
centrée par le repère de la bouche oesophagienne que constitue le
cartilage cricoïde.
La partie basse de l’incision est soit prolongée
dans le même axe jusqu’à la fourchette sternale, soit transversale 1 à
2 cm au-dessus de la fourchette sternale.
Cette dernière
variante permet de mieux récliner l’axe trachéodigestif vers la
gauche et d’améliorer ainsi l’exposition sur l’oesophage
cervicomédiastinal.
L’incision intéresse la peau, le muscle peaucier et l’aponévrose
cervicale superficielle.
La section de la veine jugulaire externe et
d’une veine jugulaire antérieure est nécessaire.
L’aponévrose
cervicale moyenne est incisée au ras du muscle SCM et la gouttière
est ouverte en passant en avant de ce muscle.
La branche
descendante du XII peut être sectionnée sans inconvénient à la partie
haute de l’incision.
Les sections du muscle omohyoïdien, de la veine
thyroïdienne moyenne au ras de la veine jugulaire interne, puis de
l’artère thyroïdienne inférieure, sont indispensables.
Il faut
éviter d’ouvrir la gaine vasculaire en séparant la veine jugulaire
interne de l’artère carotide.
Ceci permettra ensuite de récliner de
façon atraumatique l’artère carotide en chargeant la veine jugulaire
et la gaine avec l’écarteur.
La section de l’artère thyroïdienne
inférieure doit être faite à distance du lobe thyroïdien pour éviter
toute lésion du nerf récurrent gauche.
L’oesophage est exposé après
avoir extériorisé le pôle inférieur du lobe thyroïdien, geste qui
nécessite en règle la section au moins partielle des muscles soushyoïdiens
(sterno-cléido-hyoïdien et sternothyroïdien).
Un
écarteur autostatique de type Beckman est placé sur le lobe
thyroïdien d’une part, et sur la veine jugulaire interne recouverte de
la gaine vasculaire et le muscle SCM d’autre part.
Il est impératif
d’éviter d’appuyer tout écarteur dans l’angle trachéo-oesophagien
pour ne pas léser le nerf récurrent.
La section des vaisseaux
thyroïdiens supérieurs n’est pas nécessaire pour disposer d’un jour
satisfaisant sur la bouche oesophagienne.
Si l’on souhaite s’exposer
davantage sur la paroi pharyngée postérieure, il peut être nécessaire
de lier ces vaisseaux en préservant soigneusement le nerf laryngé
supérieur et sa branche, le nerf laryngé externe, qui assurent la
motricité et la sensibilité du larynx et de la margelle pharyngolaryngée.
Pour améliorer l’exposition à la partie basse de l’incision ou dans le
défilé cervicomédiastinal, il est possible de sectionner le chef sternal du muscle SCM 1 cm au-dessus du sternum.
Ce chef musculaire est
alors reconstitué par des points en « X » ou en « U » de fil résorbable
lors de la fermeture.
L’oesophage est abordé par son bord postérogauche.
Il existe, en
arrière de l’oesophage, un plan prévertébral celluleux lâche qui peut
être facilement décollé au doigt jusque dans le défilé
cervicomédiastinal et en arrière du pharynx.
Le nerf récurrent
gauche est repéré et progressivement séparé du bord gauche de
l’oesophage.
Il existe à ce niveau des artérioles tendues entre le bord
gauche de la trachée et celui de l’oesophage, dont l’hémostase est
facilitée par des clips ou une coagulation bipolaire.
La face
antérieure de l’oesophage est ensuite progressivement séparée de la
membraneuse trachéale. Le plan séparant l’oesophage de la
membraneuse est avasculaire.
En revanche, il existe, le long du bord
droit, des artérioles identiques à celles présentes du côté gauche
dont l’hémostase doit être faite par coagulation bipolaire ou clips.
La présence de ces vaisseaux, le point fixe que constitue la bouche
oesophagienne et la proximité du nerf récurrent droit si l’on est très
proche de la bouche oesophagienne, expliquent pourquoi le tour de
l’oesophage cervical est plus facile au niveau du défilé cervicomédiastinal.
La fermeture de l’incision est faite en deux plans : muscle peaucier
(surjet ou points séparés de fil résorbable 3/0) et peau (fil ou
agrafes).
On peut également reconstituer un plan plus profond en
réinsérant les muscles sterno-cléido-hyoïdien et sternothyroïdien à
la face profonde du muscle SCM.
L’intérêt du
drainage cervical est discuté.
2- Cervicotomie en « U »
:
Cette incision est indiquée lorsqu’on veut procéder à un curage
ganglionnaire cervical extensif ou en cas de pharyngolaryngectomie.
La tête est droite, en hyperextension, mais peut être tournée
facilement vers la droite ou la gauche. Latéralement, l’incision est
située en avant de chaque SCM et remonte à hauteur de l’os hyoïde.
Sur la ligne médiane, les deux incisions sont reliées par une courte
incision horizontale située 1 à 2 cm au-dessus de la fourchette
sternale.
Si l’on souhaite confectionner un trachéostome
définitif au travers du lambeau inférieur, la partie horizontale de
l’incision doit être placée plus haut.
Il faut décoller le lambeau musculoaponévrotique inférieur jusqu’à la fourchette sternale et le
lambeau supérieur jusqu’à 1 ou 2 cm au-dessus de l’os hyoïde.
Ces
deux lambeaux doivent être réclinés par un écarteur autostatique ou
quelques points de suture chargeant les téguments du thorax et du
menton.
Les creux sus-claviculaires peuvent être abordés en passant en avant
et/ou en arrière des muscles SCM. Pour améliorer l’exposition dans
le défilé cervicomédiastinal, il est possible de sectionner les deux
chefs sternaux des muscles SCM et de les reconstituer lors de la fermeture.
Du fait de
l’importance de la dissection cervicale, il est souhaitable de
mettre en place un drainage aspiratif de type Redon avant la
fermeture qui est faite en deux plans (muscle peaucier et peau).
Chez un
malade ayant eu une radiothérapie, une suture cutanée par fils
est préférable à l’utilisation d’agrafes.
3- Cervicomanubriotomie
:
Cette incision peut être utile pour améliorer l’exposition sur
l’oesophage cervicomédiastinal (tumeur située à hauteur du défilé cervicomédiastinal, réintervention).
La partie cervicale de l’incision
est située en avant du SCM gauche.
Cette incision est prolongée vers
le bas par une incision médiane dépassant légèrement vers le bas les
limites du manubrium.
Celui-ci est incisé au ciseau à frapper
ou à la scie oscillante, après avoir décollé au doigt les éléments du
médiastin antérieur (loge thymique, tronc veineux innominé).
L’écartement est fait par un écarteur de type Beckman au niveau
cervical et un écarteur de type Tuffier au niveau sternal.
La ligature
du tronc veineux innominé gauche peut être nécessaire.
Lors de la fermeture, le manubrium est suturé par deux fils d’acier
et les téguments thoraciques reconstitués en deux plans.
Points techniques communs
aux différentes interventions :
A - EXPLORATION
:
1- Exploration abdominale
:
En cas de cancer épidermoïde, même localisé au bas oesophage, la
carcinose péritonéale est exceptionnelle et l’exploration abdominale
doit essentiellement rechercher des métastases hépatiques ou des
adénopathies métastatiques qui ne contre-indiquent formellement
une résection que lorsqu’elles sont fixées.
Le mauvais pronostic
carcinologique des métastases ganglionnaires coeliaques (et non
gastriques gauches) peut inciter à prélever systématiquement ces
ganglions pour une analyse histologique extemporanée et à contreindiquer
l’oesophagectomie si les ganglions sont métastatiques,
surtout en cas de cancer du tiers moyen ou du tiers supérieur.
En cas d’adénocarcinome du cardia ou du bas oesophage, le risque
de carcinose péritonéale est réel et il est indispensable d’examiner le
péritoine de la totalité de la cavité abdominale, y compris l’arrièrecavité
des épiploons.
L’exploration de la cavité abdominale peut également être effectuée
par laparoscopie qui permet la détection des petites métastases
hépatiques (quelle que soit l’histologie de la tumeur oesophagienne)
et des métastases péritonéales (en cas d’adénocarcinome).
L’exploration par laparoscopie est d’autant plus rentable que le bilan
d’imagerie préopératoire est de qualité imparfaite et permet d’éviter
une laparotomie inutile chez 10 à 30 % des malades.
Toutefois,
cette exploration méconnaît des métastases hépatiques ou
péritonéales chez environ 3 % des malades.
2- Exploration thoracique
:
La recherche de métastases pulmonaires ou l’exploration de nodules
millimétriques, parfois dépistés mais non caractérisés par la
tomodensitométrie (TDM) préopératoire, est faite au mieux sur un
poumon exsufflé, à l’aide d’une sonde d’intubation sélective.
L’exposition complète du médiastin nécessite la section du ligament
triangulaire (qui contient une artériole dont il faut s’assurer de
l’hémostase) et la ligature-section de la crosse de la grande veine
azygos.
En l’absence de radiothérapie préopératoire, une dissection
de l’oesophage sus- et sous-tumoral n’entraîne pas d’ischémie
pariétale oesophagienne et peut constituer une manoeuvre utile pour
mieux apprécier la résécabilité de la tumeur.
Cependant, il est
préférable, pour limiter le risque de lymphorrhée, de faire porter la
dissection directement sur la zone où la résécabilité apparaît
douteuse et de procéder éventuellement à un examen histologique
extemporané.
L’intervention est parfois indiquée pour une tumeur initialement
volumineuse et traitée par radiochimiothérapie avec une bonne
réponse.
Dans ce cas, si l’on craint une extension tumorale
persistante aux structures médiastinales pouvant contre-indiquer
une résection, il est souhaitable de ne pas mobiliser de façon
extensive l’oesophage sus- et sous-tumoral, afin de ne pas
dévasculariser la tumeur et d’éviter ainsi la nécrose de celle-ci, si
elle est finalement laissée en place.
Pour un cancer épidermoïde, quelle que soit sa hauteur, ou un
adénocarcinome du cardia ou de l’oesophage inférieur, la découverte
d’adénopathies médiastinales métastatiques ne contre-indique pas
l’exérèse de la tumeur.
Toutefois, le mauvais pronostic des adénocarcinomes du cardia ou
de l’oesophage avec adénopathies récurrentielles ou latérotrachéales
métastatiques peut inciter à débuter l’intervention par l’exérèse
des ganglions suspects situés dans ces territoires et récuser
l’intervention si l’on souhaite éviter une chirurgie palliative.
3- Exploration cervicale
:
S’il existe un doute sur une extension trachéale par contiguïté, il est
souhaitable de ne pas disséquer de façon circonférentielle
l’oesophage au-dessus de la tumeur avant d’avoir réussi à séparer
celle-ci de la trachée.
En effet, le mauvais jour dont on dispose sur le
bord droit de l’oesophage dans cette circonstance expose à un risque
accru de plaie de l’oesophage ou de lésion récurrentielle droite.
L’exploration ganglionnaire ne pose en règle guère de problème. Les
deux seules difficultés sont :
– éviter une plaie du canal thoracique ou d’une de ses racines lors
de l’exérèse d’un ganglion sus-claviculaire, surtout s’il est situé en
arrière du confluent jugulo-sous-clavier ; si l’on dissèque cette zone,
quel que soit le côté (il existe des variantes anatomiques de terminaison du canal thoracique), il faut rechercher attentivement
un écoulement lymphatique en fin d’intervention et le ligaturer au
fil monobrin fin ;
– éviter un traumatisme du nerf récurrent gauche en réalisant
l’exérèse d’un ganglion situé à son contact ; dans ce but, l’utilisation
de la coagulation bipolaire ou de clips peut être utile.
B - GASTROLYSE
:
Le but de la gastrolyse est de mobiliser l’estomac tout en préservant
les vaisseaux gastroépiploïques droits qui assurent sa
vascularisation.
La gastrolyse débute par une large ouverture de l’arrière-cavité des
épiploons par décollement coloépiploïque.
Celui-ci est plus facile s’il
est débuté à la partie gauche de l’arrière-cavité.
Chez les
malades obèses, il peut être plus simple de lui substituer la section
du ligament gastrocolique, dont l’hémostase est faite à prises
séparées en restant toujours à 2 ou 3 cm des vaisseaux
gastroépiploïques ; avec cette technique, la partie caudale du
grand épiploon reste habituellement bien vascularisée, mais elle
devient parfois ischémique et doit alors être réséquée.
Le décollement coloépiploïque (ou la section du ligament
gastrocolique) est poursuivie vers la droite, en avant de la tête du
pancréas.
La veine gastroépiploïque droite doit être soigneusement
repérée et préservée dès que l’on visualise la veine colique droite
et/ou la veine colique moyenne.
Notre habitude est de ne
disséquer la veine gastroépiploïque droite jusqu’à sa terminaison
qu’après avoir procédé au décollement duodénopancréatique pour
éviter toute traction intempestive sur cette veine lors de ce
décollement.
Le décollement duodénopancréatique doit être complet
et sa réalisation peut être facilitée par un décollement partiel de la
partie droite du mésocôlon transverse.
Le décollement duodénopancréatique est suffisant si le pylore peut être ascensionné
à l’orifice hiatal ; pour obtenir ce résultat, il faut inciser largement le
péritoine au bord inférieur de l’hiatus de Winslow, en arrière du
pédicule hépatique et en avant de la veine cave inférieure.
Une fois
supprimée toute traction sur le bloc duodénopancréatique, on peut
terminer d’exposer la veine gastroépiploïque droite jusqu’à sa
terminaison dans le tronc veineux gastrocolique. Seul le bord
inférieur de la veine doit être exposé.
Il est même souhaitable de
laisser un feutrage dans la convergence des deux veines coliques et
de la veine gastroépiploïque droite afin d’éviter une plaie lors de
l’ascension de la plastie, en particulier si celle-ci est faite à l’aveugle
lors du temps thoracique d’une intervention de Lewis-Santy.
L’artère gastroépiploïque droite est en situation plus crâniale et ne doit pas
être disséquée.
Notre habitude est de terminer ce temps par la pyloroplastie (en protégeant le champ opératoire avec des champs
imbibés de solution antiseptique).
L’intérêt d’une cholécystectomie
systématique est discuté : ce geste supprime le risque de cholécystite
postopératoire, de lithiase biliaire à distance, et permet sans doute
d’allonger légèrement le pédicule hépatique en incisant le péritoine
sur son bord droit.
Il nous paraît légitime de procéder en un temps à l’ensemble des
gestes nécessaires dans la région entourant l’origine du pédicule gastroépiploïque droit.
En effet, si un traumatisme de ce pédicule
survient lors de sa dissection, il est préférable de ne pas avoir
préalablement sectionné les autres pédicules vasculaires de l’estomac
et de poursuivre l’intervention soit par une coloplastie dont
l’anastomose distale porterait sur l’estomac, soit si on en maîtrise
la technique par une gastroplastie tubulisée anisopéristaltique
vascularisée par les vaisseaux gastroépiploïques gauches selon la
technique de Gavriliu.
La gastrolyse est poursuivie à gauche en complétant le décollement
coloépiploïque : si la section du ligament gastrocolique a été
préférée, il faut veiller, lors de ce temps, à préserver le maximum
d’arcade gastroépiploïque.
La corne épiploïque gauche est
sectionnée, puis on procède à la section entre ligatures du pédicule
gastroépiploïque gauche.
Les vaisseaux courts sont
sectionnés de bas en haut entre des clips ou des ligatures.
À
la partie basse du ligament gastrosplénique, ce geste peut être facilité
par la mise en place d’un champ derrière la rate.
À la partie haute
du ligament gastrosplénique, il est souvent nécessaire d’enlever ce
champ pour disposer d’une bonne exposition et d’avoir préalablement disséqué et mis sur lacs l’oesophage abdominal.
La face postérieure de la grosse tubérosité est ensuite séparée du bord
supérieur du pancréas en liant le pédicule gastrique postérieur à
son origine sur les vaisseaux spléniques, et du pilier gauche en liant
ou en clippant une branche de l’artère phrénique inférieure gauche.
La gastrolyse est terminée par la section, à leur origine, des
vaisseaux gastriques gauches (coronaire stomachique).
Il est
préférable de procéder d’abord à la section veineuse au ras du bord
supérieur du pancréas, puis à la section artérielle au ras du tronc
coeliaque.
Ces ligatures séparées facilitent l’exérèse des
ganglions gastriques gauches, mais aussi celle des ganglions situés
au bord supérieur et de chaque côté du tronc coeliaque.
Au cours de
ce curage, l’usage de ligatures et de clips semble préférable à celui
de l’électrocoagulation pour assurer une hémostase et une lymphostase efficaces.
Au cours de ce temps, il faut repérer en
permanence l’artère splénique dans sa portion proximale : une artère
splénique sinueuse peut, au niveau d’une boucle, être confondue
avec l’artère gastrique gauche et être ainsi malencontreusement
interrompue.
C - GASTROPLASTIE
:
Le but de la gastroplastie est de permettre un allongement de
l’estomac en réséquant sa courbure la plus courte et de procéder à
l’ablation des ganglions de la partie verticale de la petite courbure
qui peuvent être envahis quelle que soit la localisation de la tumeur
sur l’oesophage thoracique.
L’estomac est le plus souvent utilisé
en isopéristaltique, sa vascularisation étant alors assurée de façon
prédominante par les vaisseaux gastroépiploïques droits et, de façon accessoire, par les vaisseaux gastriques droits (pyloriques).
La résection de la petite courbure et donc la tubulisation de
l’estomac a pour avantage d’allonger l’estomac en lui donnant une
longueur plus proche de celle de la grande courbure, et pour
inconvénient de sacrifier une partie de la vascularisation intramurale
de l’estomac qui assure, par collatéralité, une part importante de la
vascularisation du sommet du transplant gastrique.
Ces points
expliquent les débats persistants à propos de la meilleure technique
de gastroplastie à adopter.
En revanche, un fort consensus existe en
faveur de l’utilisation de sutures mécaniques de type GIA ou
TLC.
La tubulisation gastrique précède l’exérèse de l’oesophage au cours
d’une intervention de Lewis-Santy, ou lui succède au cours d’une
oesophagectomie sans thoracotomie ou par triple voie.
Dans le
premier cas, la tubulisation est faite du bas vers le haut et peut être
facilitée par l’utilisation d’agrafeuses de faible longueur (60 mm)
plus faciles à manier chez un sujet obèse ou profond.
Dans les deux
autres cas, elle peut également être faite après section de l’oesophage
du haut vers le bas et à l’aide d’agrafeuses plus longues (75 ou
90 mm).
Sur la petite courbure, la tubulisation gastrique débute au niveau de
l’angle de la petite courbure, soit en dessous de la quatrième ou de
la cinquième branche de division de l’artère gastrique gauche.
L’arcade vasculaire de la petite courbure est sectionnée entre
deux ligatures.
La section des vaisseaux gastriques droits au bord
supérieur du pylore n’est pas souhaitable car elle n’allonge pas
clairement le tube gastrique.
En revanche, elle ne supprime qu’une
partie négligeable de sa vascularisation.
La tubulisation doit être
débutée parallèlement aux vaisseaux issus de l’arcade de la petite
courbure, soit presque perpendiculairement à la grande courbure.
Le premier chargeur doit interrompre environ 50 % de la distance
séparant les deux courbures gastriques.
Le deuxième chargeur
d’agrafes doit décrire un angle par rapport au précédent, angle qui
s’ouvrira complètement en procurant un très net gain de longueur
lors de l’ascension de la plastie.
Pour l’application du deuxième chargeur et des suivants selon le
même axe, deux options sont possibles :
– un tube gastrique « large » empruntant la ligne verticale située à
mi-distance des deux courbures dans leur portion verticale, voire
plus à proximité de la petite courbure ; ce tube permet de
conserver une vascularisation sous-muqueuse efficace dans le
territoire gastrique gauche et limite le risque d’ischémie au sommet
de la plastie ; or l’arcade gastroépiploïque est toujours plus courte
que la grande courbure gastrique, puisque la longueur de la
première représente, selon les sujets, 47 à 80 % de la longueur de la
deuxième ; de plus, l’arcade artérielle gastroépiploïque est
incomplète (absence d’anastomose directe entre les artères
gastroépiploïques droite et gauche) dans environ 30 % des cas ;
en revanche, la longueur totale de ce transplant gastrique est
« intermédiaire » entre celle de sa « néo » petite courbure et celle de
sa grande courbure ;
– un tube gastrique « étroit » mesurant environ 3 cm de diamètre
et permettant un gain de longueur supérieur puisque la
longueur finale du tube est presque identique à celle de la grande
courbure.
La première technique (tube gastrique « large ») nous semble
suffisante et préférable pour une intervention de Lewis-Santy : pour
cette intervention, le gain maximal de longueur n’est pas obligatoire,
mais il faut ménager une largeur du tube suffisante pour permettre
une introduction facile par le sommet de la plastie ou sa partie
moyenne de la pince mécanique servant à confectionner
l’anastomose oesogastrique ; cette variante de tube gastrique doit
cependant être indiquée avec prudence en cas d’adénocarcinome du
bas oesophage envahissant le cardia.
À l’inverse, le tube gastrique « étroit » nous semble préférable en
cas d’adénocarcinome du bas oesophage, surtout s’il envahit le
cardia, ou au cours d’une oesophagectomie sans thoracotomie au
cours de laquelle une gastroplastie large risque d’être comprimée
dans le médiastin supérieur et dans le défilé cervicomédiastinal
ou par triple voie.
Lors de ces deux interventions, un gain de
longueur maximal est souhaitable et le faible calibre du transplant
gastrique permet de confectionner une anastomose oesogastrique
cervicale de type terminolatéral (l’anastomose est faite sur la grande
courbure en aval du sommet de la plastie, celui-ci étant fixé à la
paroi pharyngée postérieure) ou, comme nous le préférons, de
type terminoterminal après avoir réséqué un éventuel excès de
longueur.
En cas d’arcade gastroépiploïque incomplète, le gain de
longueur procuré par ce type de gastroplastie permet en règle de
sectionner l’oesophage en une zone bien vascularisée car située à
proximité de l’interruption constitutionnelle de l’arcade.
Cette
dernière est en effet toujours proche des vaisseaux gastroépiploïques
gauches.
Au cours de la tubulisation, le rôle de l’aide est de maintenir fixe un
point de l’estomac lors de l’application de chaque chargeur de
l’agrafeuse mécanique. Ainsi, l’opérateur peut simultanément
contrôler le trajet de la tubulisation et tracter l’estomac pour
permettre un gain maximal de longueur.
Dans tous les cas, il est
nécessaire de renforcer les rangées d’agrafes soit par des points
d’enfouissement, soit par des points chargeant la paroi
gastrique immédiatement en dessous de la ligne d’agrafes.
En
l’absence de suture de renforcement, la ligne d’agrafes peut s’ouvrir
lors de l’ascension de la plastie.
Ce geste permet également de
parfaire l’hémostase au niveau de la ligne d’agrafes.
Le risque de ce
geste est de diminuer la longueur du tube si les agrafes sont
renforcées par un surjet, même de type passé.
Notre habitude est
d’utiliser des points séparés, sauf au cours d’une intervention de Lewis-Santy chez un malade ayant un estomac
constitutionnellement allongé ; toutefois, même dans ce cas, des
points séparés doivent être faits à la partie haute du tube qui sera
réséquée si elle sert à l’introduction de la pince mécanique assurant
la confection de l’anastomose.
S’il y a eu un décollement coloépiploïque, le grand épiploon doit
généralement être réséqué car son volume peut comprimer le
poumon droit en cas d’oesophagectomie avec thoracotomie, ou le
transplant gastrique dans le défilé cervicomédiastinal en cas
d’oesophagectomie sans thoracotomie.
Il faut veiller, durant ce
temps, à rester à distance de l’arcade gastroépiploïque et à ne pas
brider, par des ligatures massives, la longueur de l’épiploon.
En cas
d’interruption constitutionnelle nette de l’arcade, il n’est pas
démontré que la conservation de la totalité de l’épiploon permette
d’obtenir une meilleure vascularisation du sommet du transplant ;
la confection d’un tube gastrique « large » apparaît plus adaptée à
cette situation.
Si le tube est de longueur insuffisante, il faut :
– vérifier l’absence d’accolements péritonéaux anormaux,
constitutionnels ou adhérentiels, à la face postérieure de l’estomac ;
– vérifier que le décollement duodénopancréatique est complet
(ouverture de l’hiatus de Winslow, décollement coloépiploïque ou
section du ligament gastrocolique complets devant le bloc
duodénopancréatique) ;
– et, si nécessaire, décoller complètement le mésentère et le mésocôlon droit : ce geste permet un gain de longueur de 3 à 4 cm,
en modifiant l’orientation du pédicule mésentérique supérieur
auquel sont solidarisés le troisième duodénum et le crochet du
pancréas.
Si le sommet du tube est mal vascularisé, il s’agit, dans la majorité
des cas, d’une stase veineuse prédominant au sommet de la plastie ;
il faut en premier lieu éliminer une torsion du pédicule gastroépiploïque, mais une sténose par étirement excessif de ce
pédicule est également possible. Dans ce dernier cas, la simple
diminution de la tension exercée sur la plastie peut améliorer la
situation.
Si la zone ischémique est limitée à la partie haute de la
plastie, il est possible de la réséquer.
Si la majorité de la plastie reste ischémique, malgré un réchauffement du champ opératoire ou la
correction d’éventuelles anomalies hémodynamiques, il y a très
probablement eu blessure ou ligature intempestive du pédicule gastroépiploïque : il faut alors réséquer la totalité de la gastroplastie
et faire une coloplastie.
D - PYLOROPLASTIE
:
La réalisation d’une pyloroplastie ou du moins d’un geste
améliorant la vidange gastrique est recommandée car :
– deux études contrôlées ont montré que l’absence de pyloroplastie augmente le risque de complications respiratoires
postopératoires ; ces complications sont secondaires à la
régurgitation de liquide gastrique et peuvent être très graves ; dans
cette optique, la pyloroplastie semble particulièrement importante si
l’estomac est utilisé entier, sans tubulisation ;
– à distance de l’intervention, environ 10 % des malades n’ayant pas
eu de pyloroplastie sont très gênés par des troubles de la vidange
gastrique qui sont corrigés par une pyloroplastie ou une dilatation
endoscopique du pylore ;
– et, dans les premiers mois suivant l’intervention, le confort
alimentaire semble meilleur après pyloroplastie qu’en son absence ;
toutefois, cette différence s’estompe avec le temps.
La pyloroplastie est faite par une incision longitudinale de 1 à 1,5 cm
de long, centrée sur la face antérieure du pylore.
Cette incision est
fermée transversalement par points séparés ou par surjet.
Une incision de cette taille ne diminue pas la longueur totale du
transplant gastrique.
L’efficacité de la pyloroplastie semble identique à celle de la
pyloromyotomie extramuqueuse.
Toutefois, dans notre expérience
et dans la littérature, des réinterventions pour sténose fibreuse sont
parfois nécessaires après pyloromyotomie.
Certains auteurs
préfèrent réaliser une dilatation peropératoire du pylore ou une
pyloroclasie qui semblent donner des résultats équivalents à ceux
d’une pyloroplastie.