Chirurgie de l’artère rénale Lésions athéromateuses associées aortiques et rénales de l’adulte Cours de Chirurgie
Introduction
:
Le vieillissement de la population, le développement et la
multiplication des méthodes diagnostiques non invasives, la prise
en charge globale maintenant admise du polyvasculaire ont fait
qu’aujourd’hui, et demain plus encore, un nombre croissant de
lésions athéromateuses des artères rénales seront traitées le plus
souvent par angioplastie percutanée, même si la validation de
beaucoup d’indications reste encore à démontrer.
Cette emprise
endovasculaire fait que la chirurgie a maintenant presque
exclusivement pour objet les lésions complexes, en particulier
aortiques et rénales associées que ne peuvent prendre en charge les
angioplasticiens.
Le pontage aortorénal simple a pratiquement
disparu des programmes opératoires.
En revanche, cette
confrontation permanente à des lésions lourdes, chez des malades
fragiles, volontiers âgés, impose une rigueur technique et une
collaboration très étroite entre les chirurgiens et les anesthésistes-réanimateurs.
Lésions athéromateuses associées
aortiques et rénales de l’adulte :
Certaines de ces lésions bénéficient aujourd’hui d’un traitement
combiné endovasculaire aortique et rénal.
D’autres sont confiées au
chirurgien car les conditions locales rendent leur traitement
percutané hasardeux, dangereux, voire impossible.
Parmi les lésions
aortiques qui relèvent d’une approche sanglante avec réparation
simultanée d’une ou des deux artères rénales, il faut mentionner les
lésions athéromateuses étendues de l’aorte abdominale et de ses
branches, les thromboses chroniques de l’aorte
abdominale remontant au ras des rénales, les coarctations
acquises de l’aorte sus-rénale avec protrusion endoaortique du gros
bourgeon calcaire, les aortites avec ulcération diffuse de l’aorte
sous-diaphragmatique ou thoracoabdominale, les
anévrysmes de l’aorte sus-rénale associés à une sténose rénale,
les sténoses ostiales multiples avec artère polaire en « canon de
fusil ».
Les anévrysmes de l’aorte sous-rénale avec sténose d’une ou des
deux artères rénales ne constituent pas une situation imposant la
chirurgie comme pour les cas précédents.
Certains peuvent être
traités par endoprothèse aortique et angioplastie rénale, d’autres par
chirurgie aortique isolée et angioplastie rénale préalable.
Cependant, il nous semble préférable de tout traiter en un temps
compte tenu de la faible mortalité actuelle de cette chirurgie combinée et de la meilleure perméabilité à long terme des
réparations chirurgicales comparées à celles de l’angioplastie.
Les solutions chirurgicales proposées sont multiples mais ont toutes
en commun :
– de concerner des malades plus âgés, porteurs d’une maladie
athéromateuse volontiers diffuse, avec une atteinte coronarienne
fréquente.
Ceci explique un risque opératoire plus lourd que celui
observé dans la chirurgie des lésions congénitales ou
dysplasiques ;
– d’obtenir des résultats moins bons sur l’hypertension que ceux
mentionnés dans les lésions congénitales et les dysplasies de l’adulte
jeune.
Cependant, cette gravité supplémentaire et ces moins bons résultats
sur l’hypertension ne doivent pas faire renoncer à la pratique de ces
reconstructions complexes compte tenu de l’évolution spontanée
particulièrement péjorative des lésions non traitées et des menaces
emboliques cruoriques ou de cholestérol qu’elles font peser sur les
viscères et sur les membres inférieurs.
Sur le plan technique, six types d’intervention permettent de
solutionner les différents cas de figures auxquels on peut être
confronté.
A - ENDARTÉRIECTOMIE RÉNALE ISOLÉE
:
Elle est généralement réalisée par laparotomie et implique une
dissection du carrefour rénal avec libération et mobilisation de la
veine rénale gauche pour clamper l’aorte sus-rénale.
Le jour obtenu
sur la région opératoire est rarement très bon, sauf chez les gens
très maigres.
La place obtenue pour mettre le clamp aortique susrénal
dépasse rarement 2 à 3 cm.
En cas d’obésité, d’implantation
basse de la mésentérique supérieure, la distance dépasse rarement
1 à 2 cm.
L’endartériectomie est alors de réalisation délicate, voire
hasardeuse.
L’arrêt de l’intima distale se fait rarement sous contrôle
visuel.
Une fois la désobstruction rénale faite, l’aorte est refermée,
les artères rénales sont remises en charge.
Les contraintes
anatomiques locales font qu’il s’agit dans notre expérience d’une
intervention peu pratiquée.
Les quelques malades qui ne sont pas
dilatés sont traités par réimplantation directe ou pontage à partir de
la prothèse.
B - REVASCULARISATIONS RÉNALES
À PARTIR DE L’AORTE SOUS-RÉNALE :
L’atteinte rénale associée peut être uni- ou bilatérale, parfois étendue
aux artères digestives.
Le traitement de la lésion aortique se fait le
plus souvent par prothèse droite ou bifurquée.
La revascularisation
rénale peut être effectuée selon deux modalités différentes.
1- Pontage
:
Il constitue la technique la plus souvent utilisée.
Il est en général
réalisé de façon rétrograde, à partir du corps prothétique.
La veine
saphène n’a pas la primauté dans cette indication et beaucoup
d’auteurs préfèrent utiliser un matériel synthétique, Dacront ou
polytétrafluoroéthylène (PTFE).
La raison essentielle provient d’un
meilleur positionnement du greffon avec diminution du risque de
plicature.
Il s’agit de greffons courts, fixes, à haut débit se dégradant
peu dans le temps à l’inverse des veines saphènes qui peuvent se
dilater ou se fibroser.
Le temps rénal est effectué après la cure des lésions aortiques par
tube droit ou prothèse bifurquée.
L’anastomose du greffon sur le
corps prothétique est faite en premier pour diminuer le temps
d’ischémie rénale.
Lorsque l’on réalise l’anastomose périphérique, il
convient d’hépariner le pontage ou de laisser la prothèse aortique clampée latéralement.
En effet, un clamp au ras de celle-ci favorise
la thrombose secondaire du pontage par dépôt de fibrine sur
l’anastomose proximale.
Ces dépôts ne sont pas toujours faciles à
laver avant le déclampage.
En cas de sténose étendue de l’artère rénale droite, mieux vaut éviter
de disséquer l’artère juste en aval de la lésion, c’est-à-dire dans sa
portion rétrocave.
Il est plus facile d’aller directement en zone saine
au niveau du hile par décollement duodénopancréatique.
En cas de revascularisation bilatérale, l’anastomose d’un seul tube
perpendiculaire au corps prothétique est confectionnée ex vivo avant
tout clampage.
Une découpe en « quartiers d’orange » de quelques
millimètres de large et de 2 cm de long est réalisée à la face
antérieure du tube aortique.
Cette ouverture est anastomosée avec
un tube de calibre 6 préalablement incisé à sa face postérieure.
2- Réimplantation directe
:
Il s’agit d’un procédé de choix, insuffisamment utilisé à notre avis.
Cette technique a pourtant un triple avantage : le temps d’ischémie
rénale est court, l’absence de greffon et la section de l’artère rénale
en zone saine éliminent pratiquement tout risque de malfaçon, et
surtout, nous avons noté de très rares cas de dégradation à long
terme, avec des contrôles angiographiques et scintigraphiques
satisfaisants car, à l’inverse de l’enfant, l’anastomose a d’emblée son
diamètre définitif.
Le premier temps opératoire concerne la restauration aortique par
tube droit ou prothèse aortique bifurquée.
L’anastomose proximale
est faite au ras des artères rénales pour faciliter la réimplantation
ultérieure.
À gauche, après avoir lié la veine génitale et récliné la
veine rénale, l’artère rénale est libérée jusque dans le hile.
À
droite, après ablation des ganglions interaorticocaves, l’artère rénale
est libérée sur toute sa portion rétrocave.
Trois hémoclips assurent la fermeture du moignon rénal au ras de
l’aorte.
L’artère est sectionnée en zone saine, juste en aval de la
sténose, puis dilatée avec une bougie n° 5 ou n° 6.
Elle est ensuite
réclinée vers le bas et amenée au contact de la prothèse au niveau
de laquelle a été réalisée une ouverture circulaire d’un diamètre
approprié.
Cette anastomose est située 4 ou 5 mm sous la ligne de
suture aortique.
Les gains conjugués de longueur obtenus par la
mobilisation de l’artère et de la prothèse rendent cette technique
réalisable chez pratiquement tous les malades en dehors des rares
cas de sténoses étendues au hile.
L’anastomose est faite sans traction ni suture sous tension.
Sa durée
est de 10 minutes environ.
L’augmentation de temps de clampage
aortique qui en résulte est minime et n’a pas d’incidence sur
l’ischémie des membres inférieurs.
Surtout, la remise en charge
simultanée de la prothèse et de l’artère rénale évite tout clampage
au ras de celle-ci, facteur de turbulence et de thrombose murale.
Les artères polaires sont aussi réimplantées directement lorsque leur
diamètre atteint ou dépasse 3 mm.
Les négliger fait courir au malade
un risque d’hypertension artérielle (HTA) rénovasculaire pouvant
conduire à une néphrectomie polaire secondaire comme nous
l’avons observé chez deux malades.
À la différence du tronc principal, on peut bénéficier ici de la
découpe d’une pastille de paroi aortique qui facilite l’anastomose.
L’intima d’aval n’est pas toujours facile à arrêter lorsqu’on doit
pratiquer une endartériectomie de cette pastille.
Dans ce cas, nous
préférons sectionner l’artère polaire en zone saine et la réimplanter
directement dans le corps prothétique ou indirectement au moyen
d’un greffon saphène, mieux adapté par son calibre que les
prothèses.
C - ENDARTÉRIECTOMIE DE LA PLAQUE VISCÉRALE
:
Elle s’adresse aux lésions du segment IV de l’aorte avec atteinte
ostiale des artères rénales.
Parfois, cette atteinte se prolonge en sousrénal.
Le geste d’endartériectomie de la plaque viscérale peut alors
être complété par une prothèse sous-jacente anastomosée en dessous
des artères rénales.
La voie d’abord est une thoraco-phrénolombotomie
gauche.
Elle débute dans le 10e espace intercostal
gauche et se termine à l’aplomb de l’ombilic.
Après décollement
complet du mésogastre postérieur et bascule du rein gauche en
avant et à droite, le jour obtenu est excellent.
Une hypotension
contrôlée à 100 mmHg permet de clamper l’aorte sus-diaphragmatique puis l’aorte sous-rénale sans risque de déchirure.
L’aortotomie est faite sur toute la longueur des lésions qui sont
clivées et enlevées à ciel ouvert.
Vers le haut, la plaque est découpée
aux ciseaux de Potts sans qu’il soit nécessaire de la fixer.
Vers le bas,
si son arrêt ne se fait pas en pente douce, il faut mettre quelques
points de fixation sous-rénaux.
Lorsque l’atteinte se prolonge
loin en sous-rénal, après remise en charge de la plaque viscérale et
des artères rénales, le geste est complété par une prothèse sousjacente.
Cette chirurgie qui a montré son
efficacité et sa fiabilité dans le temps présente cependant deux
inconvénients.
– Chez certains malades, la plaque viscérale est calcifiée, avec des
spicules calcaires qui pénètrent l’adventice.
Le plan
d’endartériectomie aortique est très externe.
Si l’on poursuit sur les
artères rénales, l’arrêt de plaque devient difficile, aléatoire.
Avant de
pénétrer leur ostium, il faut donc repasser dans un plan moyen afin
de traiter la sténose sans laisser de ressaut important.
Ce
changement de plan, guidé par les conditions pariétales locales, n’est
pas toujours facile à réaliser et peut être la cause de thrombose
postopératoire.
– La voie rétropéritonéale gauche avec décollement du mésogastre
postérieur donne un excellent jour sur l’ostium de l’artère rénale
droite, situé juste en face de l’axe de vision de l’opérateur.
En
revanche, le contrôle de cette artère s’avère limité à quelques
centimètres du fait de la présence de la veine cave inférieure.
Cette contrainte associée à la profondeur du champ fait que
l’endartériectomie transaortique par voie gauche est contre-indiquée
lorsque l’artère rénale droite présente une lésion longue dépassant
la veine cave inférieure.
Il est dans ces cas préférable de proposer
un pontage.
D - REVASCULARISATION À PARTIR
DE L’AORTE SUPRACOELIAQUE :
La revascularisation à partir de l’aorte coeliaque offre l’avantage
important de pouvoir réaliser une revascularisation simultanée des
membres inférieurs, des artères digestives et rénales par simple
laparotomie.
L’aorte à ce niveau est le plus souvent saine, peu ou
pas calcifiée, de bonne qualité et offre un flux prothétique excellent.
Elle a, en revanche, deux inconvénients :
– elle est d’accès beaucoup plus profond que l’aorte ascendante ou
descendante.
Ceci est particulièrement vrai chez les malades
longilignes avec un auvent costal étroit ;
– elle n’est pas utilisable en cas d’obésité ou lorsqu’on veut éviter
l’ouverture de la cavité abdominale.
Le malade est installé en décubitus dorsal avec un léger billot sous
la base du thorax.
L’abord de l’aorte se fait par voie abdominale
pure : laparotomie médiane xiphopubienne ou laparotomie
transversale bi-sous-costale.
L’appendice xiphoïde est réséqué avant
la mise en place d’une valve qui relève l’auvent costal.
Le lobe
gauche du foie est libéré après section du ligament triangulaire
jusqu’à la veine sous-hépatique gauche puis récliné vers la droite
par une valve.
Le petit épiploon est ouvert verticalement au bord
droit de l’oesophage en respectant une éventuelle artère hépatique
gauche.
L’oesophage et le pneumogastrique droit sont séparés du
pilier droit du diaphragme que l’on sectionne.
Ce geste permet de
refouler les culs-de-sac pleuraux et d’aborder l’aorte thoracique
descendante, facilement clivable au sein du médiastin inférieur. Un
segment aortique de 6 à 7 cm de long est ainsi exposé.
Sa paroi est
généralement saine, sans calcification ni athérome et se prête au clampage et à la suture.
L’anastomose proximale est toujours latéroterminale.
Pour éviter tout risque de dissection et faciliter
l’anastomose, l’aorte supracoeliaque est clampée en totalité avec un
clamp de Satinsky placé transversalement après hypotension
contrôlée aux alentours de 100 mmHg de maxima.
Ce type de clampage est préférable à l’utilisation d’un clamp droit qui, même
tenu verticalement par un aide, réduit le champ de vision de
l’opérateur et le gêne dans ses mouvements.
Un clamp à angle placé
juste au-dessus du tronc coeliaque contrôle le reflux distal.
Le temps d’anastomose aortique excède rarement 20 à 30 minutes et
il n’a que peu ou pas de conséquence sur la fonction rénale.
Lorsque l’on pratique un pontage simple aortorénal antérograde à
partir de l’aorte coeliaque, trois détails techniques sont importants à
respecter :
– on a intérêt à utiliser un tube de Dacront prédécoupé dans une
prothèse bifurquée de façon à réaliser une anastomose aortique
« patchante » ;
– il faut donner une courbure harmonieuse au pontage pour éviter
une plicature à son origine.
À cet égard, on a intérêt à le tunnelliser
pontage en charge après l’avoir rempli d’héparine afin de définir le
meilleur trajet possible ;
– du fait de son trajet, le pontage va se retrouver en arrière de
l’estomac lors des revascularisations de l’artère rénale gauche et en
arrière du duodénum dans les revascularisations de l’artère rénale
droite.
Ces deux trajets au contact des viscères impliquent une épiplooplastie.
En ce qui concerne les revascularisations combinées, la tunnellisation
de la prothèse peut être faite au contact de l’aorte native chez le sujet maigre au tissu celluleux facilement décollable, en arrière du
pancréas.
Toutefois, cette tunnellisation ne met pas à l’abri d’une
rupture de canalicule pancréatique avec formation d’un faux kyste
du pancréas dont les conséquences peuvent être redoutables.
Aussi,
préférons-nous faire passer le pontage dans l’arrière-cavité des
épiploons, en arrière de l’estomac et en avant du pancréas.
Ce trajet met la prothèse au contact d’un plus grand nombre de viscères creux
de voisinage, mais l’interposition en fin d’intervention du grand
épiploon évite les risques de fistule secondaire.
L’implantation basse de la prothèse, en position aortique, iliaque ou
fémorale est réalisée sur les modalités habituelles.
La ou les artères rénales pathologiques ont été disséquées au
préalable de façon à évaluer la longueur dont on va disposer pour
les réimplanter.
Cette réimplantation, doit se faire prothèse clampée
pour faciliter la suture.
La réimplantation directe des deux artères
rénales dans la prothèse n’est généralement pas possible.
Celle-ci
passe en effet en avant de la veine rénale gauche.
Elle est donc très
antérieure par rapport aux artères rénales qui sont issues des faces postérolatérales de l’aorte native.
Le déficit de longueur atteint
volontiers 2 à 3 cm.
On peut le compenser en décalant la prothèse vers la gauche où il est plus facile de libérer l’artère rénale distale.
Le gain de longueur obtenu permet alors l’anastomose directe du
corps de prothèse et de cette artère.
À droite, on est barré par la veine cave, et il n’est pas possible de
faire monter suffisamment l’artère rénale native pour l’anastomoser
avec la prothèse.
On réalise donc une réimplantation indirecte au
moyen d’un court segment de prothèse que l’on anastomose en latéroterminal sur le pontage aortique et en terminoterminal avec
l’artère rénale qui a été sectionnée en zone saine.
E - REVASCULARISATION À PARTIR
DE L’AORTE THORACIQUE DESCENDANTE :
Le malade est installé en position hélicoïdale avec rotation du tronc
de 45° par rapport au plan du bassin.
Une fixation au niveau des
omoplates et des crêtes iliaques permet de donner du roulis à la
table et de faciliter l’exposition peropératoire des différentes zones
abordées.
La voie d’abord est une thoracolaparotomie dans le 7e ou
8e espace intercostal juste au-dessus de la coupole diaphragmatique
gauche.
La laparotomie se fait dans le prolongement de l’incision
thoracique.
L’utilisation d’une sonde de Carlens n’est pas utile.
Le refoulement
du lobe inférieur gauche du poumon se fait sans difficulté sous
couvert d’une pression d’insufflation basse.
Pour éviter tout
traumatisme des artères intercostales, seule la réflexion pleurale de
l’aorte est incisée sur 5 à 6 cm.
Celle-ci est alors clampée sous hypotension contrôlée aux alentours de 100 mmHg.
Une aortotomie
de 3 cm environ va permettre l’anastomose prothétique.
Le
renforcement de la suture par une attelle de Téflont peut être
souhaitable.
La position à 45° du malade refoule les viscères
abdominaux vers la droite.
Le décollement de l’angle colique gauche
et l’ouverture de l’arrière-cavité des épiploons permettent de
récupérer le corps prothétique au travers d’un orifice pratiqué en
réséquant une pastille de diaphragme.
La prothèse est ensuite
amenée au bord inférieur du pancréas puis tunnellisée par voie
rétropéritonéale selon le schéma classique.
Comme dans les
revascularisations à partir de l’aorte supracoeliaque et pour les
mêmes raisons, la réimplantation directe des deux artères rénales
dans le corps prothétique n’est pas possible.
Seule l’artère rénale
gauche est généralement réimplantée directement tandis que l’artère
rénale droite est revascularisée au moyen d’un segment
intermédiaire de prothèse en Dacront ou PTFE.
F - REVASCULARISATION AORTORÉNALE
À PARTIR DE L’AORTE ASCENDANTE :
Elle impose un scanner préopératoire pour s’assurer de l’absence de
calcifications aortiques.
Le malade est installé en décubitus dorsal.
La voie d’abord est une sternolaparotomie médiane.
Après
ouverture péricardique, une hypotension contrôlée aux alentours de
80 mmHg de pression systolique permet un clampage latéral de
l’aorte ascendante.
Son ouverture est faite sur 3 cm environ, à la
partie moyenne de sa face latérale droite.
Il importe de bien palper
l’aorte avant le clampage pour éviter toute incision en regard d’une
plaque calcifiée qui favoriserait une déchirure ou une dissection
locale.
En cas de tissu fragile, il est souhaitable de renforcer le
pourtour anastomotique par une bandelette de feutre.
On veille
également à pratiquer une purge soigneuse de la prothèse pour
éviter tout embole gazeux lors du déclampage aortique.
La courbure
donnée au corps de prothèse doit être suffisamment large pour
éviter toute compression de l’oreillette droite.
La tunnellisation du
corps prothétique en direction de l’abdomen se fait au moyen d’un
orifice circulaire, de diamètre égal à la prothèse, réalisé à la partie
antérieure droite du centre phrénique au niveau de la zone de
réfection pleuropéricardique.
La prothèse arrive alors sur le
dôme du lobe gauche du foie.
On rejoint ensuite la région sousrénale
au travers de l’arrière-cavité des épiploons et du mésocôlon
transverse.
Pour les raisons déjà indiquées, nous évitons les tunnellisations rétropancréatiques.
Le trajet anatomique classique est
ensuite repris en avant de l’aorte sous-rénale pour gagner selon le
type de lésion la terminaison aortique, les vaisseaux iliaques ou
fémoraux.
Comme pour les interventions précédentes, la
revascularisation directe est difficile à droite.
On interpose le plus
souvent un court pontage.
À gauche, la réimplantation est faite
directement. En fin d’intervention, il faut, dans sa portion
thoracique, isoler la prothèse des structures cardiaques, pulmonaires
et osseuses adjacentes.
À cet effet, on découpe un lambeau de plèvre médiastinale droite qui va permettre d’enrober le Dacront et de
l’isoler complètement.
Vers le bas, la prothèse est isolée de l’oesophage, de l’estomac et de l’intestin au moyen d’une double épiplooplastie sus-et sous-mésocolique comme dans les pontages à
partir de l’aorte coeliaque.
Ce type de revascularisation à partir de l’aorte ascendante est
particulièrement utile dans les lésions ulcérées, diffuses de l’aorte thoracoabdominale, volontiers responsables d’embolie de cholestérol
avec insuffisance rénale.
Les avantages sont faciles à cerner :
– traitement complet du foyer emboligène car, dans ce type de
pathologie, l’aorte ascendante est plus souvent saine ;
– l’abord de l’axe donneur est aisé, par simple sternotomie.
L’anastomose proximale se fait sans difficulté sur un gros vaisseau
superficiel dont le débit est idéal.
La qualité du jour donné par la sternolaparotomie permet une réparation facile, simultanée de
l’aorte, des artères viscérales et rénales.
Enfin, l’absence de clampage
total, de manipulation de l’aorte thoracoabdominale élimine tout
risque de paraplégie ou d’embolie de cholestérol au cours de la
procédure.
En revanche, deux inconvénients peuvent aboutir à des
situations secondaires délicates :
– chez ces malades athéromateux, l’association d’une pathologie
coronarienne est fréquente.
Cette voie d’abord rend plus complexe
la réalisation ultérieure de pontage aortocoronarien sous
circulation extracorporelle si l’évolution de la maladie le rendait
nécessaire.
Les revascularisations à coeur battant sont dans ces cas
tout à fait utiles.
Dans tous les cas, une coronarographie
préopératoire est impérative ;
– en cas d’infection primitive ou secondaire de la prothèse, la
contamination de l’aorte ascendante va constituer une situation
difficile sur le plan stratégique, redoutable sur le plan pronostique.
Occlusions de l’artère rénale
:
Qu’elles soient aiguës ou chroniques, les occlusions de l’artère rénale
constituent deux situations totalement différentes pouvant amener à
proposer une revascularisation pour sauver le rein affecté et
améliorer le contrôle tensionnel du malade.
A - OCCLUSIONS AIGUËS
:
Elles relèvent de contextes cliniques et étiologiques très variés qui
empêchent une approche globale du problème et obligent le
chirurgien à raisonner au cas par cas.
1- Occlusions aiguës traumatiques
:
Elles surviennent à l’occasion d’un traumatisme dorsolombaire ou thoracoabdominal responsable d’une rupture sous-intimale de
l’artère rénale souvent accompagnée d’une fracture du rein.
Cette
atteinte rénale entre volontiers dans le cadre d’un polytraumatisme
grave qui contre-indique toute thrombolyse et recanalisation
percutanée.
Chez ces malades, la pratique systématique au service
d’urgence d’une échographie ou d’un scanner abdominal conduit
rapidement au diagnostic.
Ce contexte général, surtout si le rein
controlatéral est normal, ne pousse guère dans le cadre de l’urgence
à une réparation chirurgicale.
Les difficultés d’hémostase à
l’ouverture de la loge rénale, d’incertitude quant au résultat de la
revascularisation, incitent la majorité des équipes à temporiser.
À
distance, si le malade devient hypertendu, en raison d’une hypoperfusion rénale par le réseau collatéral, peut se discuter une
néphrectomie.
En cas de traumatisme sur rein anatomiquement ou
fonctionnellement unique, le pronostic est bien sûr différent et
demande au contraire en urgence un sauvetage du rein affecté.
L’échodoppler et le scanner avec injection, voire l’imagerie par
résonance magnétique (IRM), objectivent l’occlusion artérielle,
l’hypodensité parenchymateuse d’aval et les zones de contusion
rénale.
L’artériographie, lorsqu’elle est réalisée, objective la
localisation précise de la rupture sous-intimale.
La réparation, pour
avoir des chances réalistes de succès, doit être faite ex vivo et ceci
pour trois raisons majeures.
– En cas de rupture sous-intimale de l’artère rénale, l’extension
antérograde du thrombus peut atteindre les branches de division de
l’artère rénale.
La phase de thrombectomie distale est difficile à
réaliser rein en place, dans une loge contuse suintante.
Elle nécessite
une désobstruction ex vivo dont les résultats peuvent être
médiocres, surtout si le malade est opéré trop tardivement.
– Même si le rein ne montre pas de fracture franche, au scanner ou
en échographie, il peut exister une contusion ou une fissure
capsulaire qui, lors de la reperfusion, peut entraîner une hémorragie
grave avec possible néphrectomie d’hémostase secondaire.
– La réparation des fractures rénales implique un encollage de
celles-ci.
Cet encollage, pour être efficace, doit être fait à sec en
laissant prendre la colle au moins 10 minutes à l’air libre avant tout
contact avec le sang.
Cette manoeuvre n’est possible dans de bonnes
conditions que si le rein est sorti.
Après refroidissement et lavage à
l’Euro Collins, on rapproche les tranches de section au moyen de
points patchés sur attelle de feutre.
Les foyers de fracture sont alors
remplis de colle. Une fois l’ensemble solidifié, le rein est entouré
d’une gaze hémostatique, elle-même encollée à la capsule pour
diminuer au maximum le risque hémorragique consécutif à la reperfusion rénale.
Une fois la fracture réduite et le rein réparé, on procède à la
restauration artérielle selon les techniques habituelles de chirurgie
ex vivo.
Pendant tous ces différents temps, un tamponnement de la
loge rénale est laissé en place de façon à contrôler le suintement
hémorragique consécutif à la contusion lombaire.
2- Occlusions aiguës emboliques
:
Elles sont rares et ne représentent que moins de 5 % de l’ensemble
des embolies.
Elles peuvent passer inaperçues en cas de rein
controlatéral normal et aboutir à la destruction silencieuse du rein embolisé.
Les indications opératoires sont aujourd’hui
exceptionnelles, moins de 1 % de l’ensemble de nos opérés ; la
plupart des emboles artériels rénaux, lorsqu’ils sont diagnostiqués,
sont traités par cathétérisme sélectif et thrombolyse in situ avec des
résultats satisfaisants.
En cas de contre-indication à une
thrombolyse, l’embolectomie est alors réalisée chirurgicalement.
Après abord direct de l’artère rénale et de la division de ses branches
principales, l’artère est ouverte transversalement.
L’embolectomie
proximale est réalisée avec une sonde de Fogarty n° 3 ou 4.
L’embolectomie distale est réalisée avec une sonde de Fogarty n° 2.
Celle-ci doit être passée de façon très prudente en périphérie et ne
pas dépasser le 1er cm du hile rénal.
En cas de sonde de Fogarty
introduite trop loin ou de ballonnet gonflé trop fort, le risque est
celui d’une contusion des artères intrarénales avec survenue d’une
fistule artério-urinaire qui conduit généralement à la néphrectomie.
3- Occlusions aiguës iatrogènes
:
Ces accidents surviennent lors des cathétérismes sélectifs réalisés à
titre diagnostique ou à titre thérapeutique au décours d’une
angioplastie.
Les indications de dilatation aujourd’hui bien codifiées,
la qualité des nouveaux matériaux, la possibilité de « rattrapage »
avec mise en place d’un stent en cas de dissection font que le
chirurgien vasculaire n’est aujourd’hui qu’exceptionnellement
appelé pour traiter une occlusion aiguë survenant au décours d’une
artériographie ou d’une angioplastie rénale.
Dans ces situations, tout le tronc de l’artère rénal est généralement
endommagé.
S’il persiste à l’artériographie une réinjection avant les
branches de division de l’artère rénale, il faut sectionner celle-ci au
niveau de sa division et réaliser par lombotomie ou laparotomie un
pontage aortorénal.
Si les branches de division ne sont pas
visualisées, il faut, comme pour les traumatismes, sortir le rein,
pratiquer une thrombectomie sélective de la division rénale.
Celle-ci permet un lavage du rein sous pression, voire une
thrombolyse locale ex vivo.
Il nous a en effet été donné, à
plusieurs reprises, d’observer non seulement une thrombose des
branches artérielles, mais également une thrombose veineuse intrarénale que seule une thérapeutique thrombolytique sous haute
pression peut espérer récupérer.
Le rein est ensuite autotransplanté.
4- Occlusions aiguës sur dissection spontanée de l’aorte
ou de l’artère rénale :
Certaines dissections de l’aorte s’accompagnent d’une occlusion
d’une ou des deux artères rénales.
Le tableau clinique est univoque.
Il associe une HTA maligne difficile ou non contrôlée malgré la
prescription de trois ou quatre hypotenseurs, à une dégradation de
la fonction rénale.
Le mécanisme en est une oblitération des artères
rénales par le faux chenal aortique.
Dans ce contexte, le scanner avec
injection, l’IRM ou l’angiographie sélective confirment le diagnostic
objectivant un retard ou un arrêt circulatoire au niveau du hile rénal
avec une ischémie parenchymateuse d’aval.
Le traitement actuel
proposé de première intention est une fenestration du faux chenal
au moyen d’un ballonnet de 12 à 14 mm introduit par voie fémorale.
La rupture ainsi obtenue de la membrane interne permet une reperfusion rénale à partir du vrai et du faux chenal que le ballonnet
a mis en communication.
Cette procédure n’est pas
toujours aisée.
Le flap intimal peut bloquer l’ostium ou le tronc de
l’artère rénale, entraîner une thrombose de celle-ci et empêcher la
reperfusion malgré une ouverture aortique de bon diamètre.
Dans ces cas, si la situation clinique reste précaire, il faut proposer
une revascularisation chirurgicale.
Le pontage aortorénal est contreindiqué
en phase aiguë des dissections aortiques du fait de la
médiocrité de la paroi.
On peut, en revanche, faire un pontage extraanatomique
rétrograde iliorénal, car la dissection aortique
s’étend exceptionnellement simultanément sur les deux artères
iliaques.
Si c’est le cas, on se doit de réséquer un segment d’aorte sous-rénale ou d’artère iliaque, que l’on reconstruit avec un tube
prothétique sur lequel seront implantés le ou les pontages
aortorénaux.
Dans les dissections aortiques, le flap intimal
dans notre expérience ne s’est jamais étendu sur les branches de
division de l’artère rénale.
Celle-ci est sectionnée juste avant sa
division.
On pratique alors une anastomose terminoterminale entre
le greffon et l’artère réceptrice distale.
Les dissections aiguës spontanées de l’artère rénale surviennent dans
un contexte différent, généralement chez le jeune, associant une
colique néphrétique et une hématurie.
À ce tableau trompeur,
évocateur d’une lithiase, s’associe presque toujours une HTA sévère
qui fait redresser le diagnostic.
Si ce n’est pas le cas, l’échographie à
la recherche d’une lithiase n’objective aucun calcul ni aucune
dilatation des voies excrétrices.
Il faut alors pratiquer un doppler ou
une angiographie de l’artère rénale qui va faire le diagnostic
généralement chez les adultes jeunes sans passé pathologique
particulier, sans hypertension.
Les aspects angiographiques de ces
dissections sont très variables, allant de l’occlusion aiguë complète à
l’anévrysme disséquant avec toutes les possibilités intermédiaires
associant des segments sténosés et ectasiques.
Comme pour les
carotides, en phase aiguë, le traitement chirurgical est exclu.
Les
différentes expériences réalisées ont conduit le plus souvent à une
néphrectomie.
En effet, à l’inverse des dissections aortiques étendues
à l’artère rénale, les dissections spontanées de l’artère rénale se
propagent très souvent aux branches de celle-ci.
La dissection
dépasse le hile, intéresse les branches intrarénales et ne peut être
réparée.
Il est théoriquement possible de recoller immédiatement le
faux chenal par la mise en place d’un stent en urgence.
Le risque de
cette procédure est celui d’une occlusion complète du vaisseau avec
perte du rein, sans possibilité de sauvetage chirurgical.
Elle est donc
à réserver aux situations particulièrement sévères comme les HTA
non contrôlées par le traitement médical.
Ces réserves sont d’autant plus légitimes que l’évolution de ces
dissections est souvent favorable.
L’autre solution conservatrice est de traiter médicalement le patient,
avec héparinothérapie suivie au bout de quelques jours d’un relais
aux antivitamines K (AVK).
Comme pour les carotides, un certain
nombre de dissections se recanalisent progressivement et permettent
la récupération d’une bonne perfusion rénale.
Aussi, pratiquonsnous
systématiquement, entre le 3e et 6e mois postdissection, une
angiographie sélective de contrôle.
Celle-ci peut objectiver, dans près
d’un cas sur deux, un résultat tout à fait satisfaisant avec un
remodelage de la zone disséquée sans lésion résiduelle significative.
Dans d’autres cas, la lésion peut évoluer sur le mode
d’un anévrisme ou d’une sténose serrée ou des deux à la fois.
Il
peut y avoir alors une indication opératoire secondaire, à distance
de l’épisode initial, lorsque la sclérose de l’artère disséquée permet
de la suturer sans risque.
Le patient bénéficie d’un pontage aortorénal ou d’angioplastie lorsque la lésion critique est située sur
le tronc de l’artère rénale et qu’il y a eu un remodelage satisfaisant
des branches distales.
Si, en revanche, celles-ci restent altérées, ou
s’il existe un anévrysme, il vaut mieux intervenir en chirurgie ex
vivo.
Les possibilités d’angioplastie sont en effet aléatoires
au niveau des branches intrahilaires, même cicatrisées.
Dans tous
les cas, l’indication opératoire reste fonction de l’état clinique du
malade, en particulier de la valeur de sa fonction rénale et des
difficultés qu’il existe ou non à contrôler sa tension artérielle.
Beaucoup de patients, malgré un aspect nettement pathologique de leur artère rénale disséquée, gardent en effet une fonction rénale
normale et sont facilement contrôlés sur le plan tensionnel.
B - OCCLUSION CHRONIQUE DES ARTÈRES RÉNALES
:
La revascularisation des occlusions chroniques de l’artère rénale a
été proposée depuis de nombreuses années pour permettre un
meilleur contrôle de la tension artérielle et une amélioration de la
fonction rénale globale.
En 1988, Novick énumérait les conditions
prédictives d’un bon résultat postopératoire :
– une taille du rein supérieure à 9 cm ;
– une réinjection tronculaire distale visible à l’angiographie ;
– une créatinine inférieure à 250 µmol/L.
D’autres auteurs incluaient en outre une biopsie rénale témoignant
de la viabilité glomérulaire préopératoire.
Tous ces critères
assurent, lorsqu’ils sont réunis, une situation tout à fait favorable
avec un risque d’échec limité.
Cependant, 15 ans plus tard, ils
apparaissent comme restrictifs et doivent être redéfinis pour deux
raisons.
– Les propositions de 1988 étaient faites sur la base des résultats
observés durant les années 1970 à 1980, à une époque où beaucoup
d’éléments de l’expertise actuelle n’existaient pas ou étaient à leurs
premiers balbutiements tels le scanner, l’échodoppler rénal, l’analyse
des fonctions rénales séparées en scintigraphie.
– L’insuffisance rénale d’origine vasculaire, en particulier chez le
sujet âgé, constitue actuellement un réel problème de santé.
Le profil
du dialysé n’est plus celui d’un insuffisant rénal terminal postrhumatismal ou d’un malade multiopéré pour uropathie
malformative.
Dans plus de 25 % des cas, il s’agit aujourd’hui de
malades arrivés en dialyse en raison d’une néphropathie diabétique,
hypertensive ou interstitielle, voire en raison d’atteintes artérielles
négligées qui, par le biais d’une thrombose ou d’emboles de
cholestérol, aboutissent à la destruction du rein.
Chez ces malades, la protection du capital néphronique, en levant
un obstacle tronculaire, est devenue prioritaire pour certains.
Pour d’autres, le bénéfice reste incertain, ce d’autant que ces données
n’ont pas encore été validées de façon scientifique.
L’étude Anparia actuellement en cours a été conçue dans ce but et devrait
apporter des précisions au cours des prochaines années.
Cette
protection n’est certes pas définitive, l’atteinte parenchymateuse rénale évoluant pour son propre compte.
Néanmoins, la cure
d’une sténose critique du tronc de l’artère rénale laisse supposer
qu’elle évite un accident occlusif ou des microembolisations répétées
et qu’elle retarde le passage en dialyse.
De même le traitement d’une
occlusion du tronc de l’artère rénale, lorsque la néphroangiosclérose
n’est pas trop évoluée, laisse espérer une amélioration de la fonction
rénale.
Cette nouvelle approche a été d’autant plus facilitée que la
nouvelle imagerie et l’angioplastie lui conféraient un caractère peu
invasif.
La taille du rein ne constitue pas un critère absolu à respecter, en
particulier parce qu’elle varie avec la taille des individus et leur
surface corporelle. Plus que la taille, c’est l’index corticomédullaire
analysé en échographie qui apparaît important.
Cet index corticomédullaire, normalement égal à 1, est le reflet de la masse de
glomérules fonctionnels.
En cas de rétraction corticale, d’infarctus
corticaux multiples, les chances de récupération fonctionnelle après
chirurgie sont modestes ou nulles. Inversement, un petit rein ayant
conservé une bonne corticalité peut, après revascularisation,
entraîner une remontée significative de la clairance de la créatinine.
Outre l’épaisseur corticale calculée en échographie, l’analyse de
l’hémodynamique intrarénale apparaît comme intéressante pour
retenir ou non une indication de revascularisation.
En cas de
thrombose proximale de l’artère rénale, bien suppléée par la
collatéralité, il existe une diminution physiologique des résistances
à l’écoulement au niveau des artères interlobulaires.
Cette
diminution de résistance a pour but d’améliorer la perfusion distale.
En cas de néphroangiosclérose associée, les résistances périphériques
restent élevées.
L’index de résistance rénale normalement à 0,6 reste
haut, supérieur à 0,8.
Dans ces cas, les bénéfices de la
revascularisation rénale sur la fonction rénale sont pratiquement
nuls.
Ainsi, plus que la taille du rein, c’est son aspect échographique et
l’analyse de l’hémodynamique intrarénale qui apparaissent
déterminants dans la décision chirurgicale.
La nécessité de visualiser une réinjection tronculaire apparaît
également excessive. Plusieurs arguments vont à l’encontre d’une
telle restriction.
– La réinjection peut être non visualisée alors qu’elle existe.
Pour
être vue, elle peut nécessiter des angiographies sélectives des artères
lombaires surrénales ou diaphragmatiques.
Ces angiographies hypersélectives ne sont pas toujours réalisées, aboutissant ainsi à un
diagnostic par défaut.
– L’angiographie peut conclure à l’absence de réinjection distale
alors que la scintigraphie isotopique ou l’échodoppler vont montrer
qu’il existe un rein fonctionnel perfusé.
Ces faux négatifs sont le
plus souvent le fait de clichés d’aortographie globale, avec des temps
trop précoces non complétés par des angiographies sélectives du
réseau collatéral.
Ainsi, une valeur fonctionnelle rénale du côté de
la thrombose supérieure à 15 % de la valeur fonctionnelle globale en
scintigraphie au diéthylène triamine penta-acétique (DTPA) nous
incite actuellement à proposer une revascularisation même s’il n’y a
pas de réinjection tronculaire.
Cette proposition reste
subordonnée à l’aspect morphologique et hémodynamique du rein
étudié au paragraphe précédent.
Le degré d’insuffisance rénale ne constitue pas en soi une contreindication
à la revascularisation d’une occlusion de l’artère rénale.
Plusieurs publications ont même fait état de malades chroniques qui
ont pu être autonomisés après plusieurs mois d’hémodialyse grâce
à une revascularisation chirurgicale.
Là encore, c’est l’ensemble
des paramètres morphologiques, hémodynamiques qui doivent
guider ou non le chirurgien vers la revascularisation rénale ou
l’abstention.
Ainsi, plusieurs travaux se démarquent aujourd’hui des critères
définis par Novick en 1988 et conduisent à proposer les critères
suivants pour décider d’une revascularisation rénale en cas
d’occlusion chronique de celle-ci :
– épaisseur corticale conservée ou peu diminuée en échographie,
scanner ou IRM ;
– absence de néphroangiosclérose ou néphroangiosclérose modérée
avec un index de résistance rénale inférieur à 0,3 ;
– valeur fonctionnelle rénale calculée en scintigraphie isotopique au DTPA supérieure à 15 % de la fonction globale avant chirurgie ;
– réinjection distale des branches de l’artère rénale ou du tronc
visibles, soit après artériographie conventionnelle, soit après
angiographie sélective du réseau collatéral artériel rénal.
Sur le plan chirurgical, les revascularisations des occlusions
chroniques de l’artère rénale relèvent des différentes techniques
précédemment décrites.
Dans les occlusions courtes, segmentaires
du tronc, que l’on peut considérer comme des « supersténoses »,
l’angioplastie avec mise en place d’un stent est la méthode prônée
par beaucoup d’équipes, même si les résultats à moyen et plus long
termes sont mal connus.
Cette approche avec mise en place d’un stent de première intention doit laisser sa place à la chirurgie en cas
d’échec ou de résultat insuffisant.
Le taux de succès est en effet
nettement moins bon que celui-ci observé en chirurgie sanglante.
Par ailleurs, les résultats observés en chirurgie se maintiennent dans
le temps alors que le taux de récidive après recanalisation
percutanée des occlusions de l’artère rénale est nettement
supérieur.
Si le malade est opéré, la réimplantation directe de l’artère rénale
dans l’aorte n’est généralement pas possible.
La longueur de la zone
occluse réséquée empêche le raccord direct.
On s’oriente le plus
souvent vers la réalisation d’un pontage aortorénal ou d’une
revascularisation à partir des artères digestives si l’on ne veut pas
clamper l’aorte : pontage hépato- ou splénorénal.
Lorsque la réinjection se fait au niveau des branches de l’artère
rénale occluse, la réparation ex vivo avec autotransplantation est la
technique la plus fiable.
Conclusion
:
La multiplicité des techniques chirurgicales permettant de traiter les
lésions complexes aortiques et rénales associées est telle qu’aujourd’hui, il
est possible d’opérer ce type de pathologie avec une morbimortalité tout à
fait basse sans comparaison avec le pronostic spontané de l’affection.
Cette
sécurité chirurgicale doit être mise en exergue à l’heure où beaucoup de
ces malades n’ont qu’un traitement endovasculaire partiel de la composante
rénale de la maladie.
Cette prise en charge a minima souvent immédiatement
efficace ne résout aucun des problèmes à moyen terme et amène
à réintervenir à l’occasion de situations cliniques beaucoup plus graves.