Cancers de la vésicule biliaire Technique chirurgicale Cours de Chirurgie
Introduction
:
Tumeur de la femme âgée 78 % des patients sont des femmes et
76 % ont plus de 60 ans, le cancer de la vésicule biliaire a un
pronostic sévère : la survie globale à 5 ans varie de 5 à 15%,
atteignant 26 % si la résection a été curative.
Du fait de sa latence, son diagnostic est tardif, et dans plus de 75 %
des cas aucun geste curateur n’est possible.
La survie globale dépend de l’âge, meilleure pour les patients de
moins de 60 ans, du stade TNM (tumour-node-metastasis), de
l’acte opératoire : la survie médiane des patients traités d’une
tumeur stade IV, passe de 144 jours après by-pass à 489 jours après
résection curative, des survies dépassant 10 ans ont été
rapportées.
La morbidité et la mortalité périopératoires dépendent également
de ces trois facteurs que sont l’âge, le stade tumoral et la technique
opératoire.
Le taux de mortalité postopératoire après 70 ans atteint
27 % versus 15 % pour les patients de moins de 70 ans. Leur prise
en compte est donc indispensable à toute décision thérapeutique.
Enfin, même si l’état général du patient et le stade tumoral
permettent une chirurgie extensive avec une mortalité
postopératoire quasi nulle, il ne faut pas oublier que la morbidité
postopératoire est élevée et allonge la durée d’hospitalisation,
diminuant ainsi la qualité de la survie.
Bases du traitement chirurgical
:
Les cancers de la vésicule biliaire peuvent siéger au niveau du fond,
du corps, du collet ou du canal cystique.
Environ 98 % de ces cancers sont des carcinomes, les
adénocarcinomes représentant 84 % de cet effectif.
Actuellement, la classification TNM, qui classe ces carcinomes en
fonction de leur stade évolutif, est la plus utilisée. Les classifications
cliniques T et N et histopathologiques pT et pN sont
superposables.
Toutefois, une tumeur ne peut être
classée pN0, absence d’atteinte histologique ganglionnaire, que si
au moins trois adénopathies régionales ont pu être examinées.
Dans la quatrième édition de la classification TNM de l’Union
internationale contre le cancer (UICC) (1997) apparaît un stade N2,
correspondant au stade N1b de la classification TNM 1991.
Plus
récemment, Shimada, s’appuyant sur la survie à 5 ans des patients
opérés curativement, a proposé de stratifier le stade N2 en pN2
proximal, atteinte des ganglions pancréatiques, duodénaux, portaux,
et pN2 distal, atteinte des ganglions mésentériques, para-aortiques
et interaorticocaves.
Dès 1962, Fahim avait démontré que ces carcinomes se propageaient
selon trois modes : par contiguïté aux organes de voisinage (estomac,
duodénum, angle colique droit, paroi abdominale), par voie
veineuse vers le système sus-hépatique et dans une moindre mesure
vers le système porte et rétropéritonéal, par voie lymphatique et
nerveuse vers le pédicule hépatique.
Quant à la propagation
hépatique, elle peut se faire par les trois voies.
La propagation de ces cancers est facilitée par les caractéristiques
anatomiques et histologiques de la vésicule biliaire.
C’est un organe
constitué de trois parties : le fond, le corps et le collet où s’abouche
le canal cystique ; l’inflammation chronique de la vésicule peut être
à l’origine de la formation d’un diverticule à la jonction collet-canal
cystique : le diverticule de Hartmann.
Les parois de la vésicule
sont constituées de quatre couches : une muqueuse, une musculaire
lisse, une sous-séreuse (le tissu conjonctif périmusculaire) et une
séreuse constituée par le péritoine.
En regard du lit vésiculaire,
l’absence de séreuse met le tissu conjonctif périmusculaire
directement au contact du parenchyme hépatique, et dans 10 % des
cas des diverticules de Luschka, canaux biliaires aberrants,
s’incrustent dans le foie.
Si la vascularisation artérielle est assurée par l’artère cystique, branche de l’artère hépatique, le retour veineux
s’effectue par un réseau situé dans le tissu conjonctif périmusculaire
en continuité avec le plexus veineux péricholédocien, drainant le
sang veineux directement vers le système sus-hépatique grâce à des
réseaux capillaires superficiels et profonds.
En plus du plexus
veineux cystique, cheminent dans le conjonctif périmusculaire des
filets nerveux et les canaux lymphatiques vésiculaires.
Dans la suite des travaux de Fahim, Caplan a mis en évidence les
voies rétropancréatiques et coeliaques de dissémination lymphatique.
Depuis, plusieurs auteurs ont complété ces études.
Que
deux ou trois voies de dissémination lymphatique aient
été décrites, la diffusion se fait dans tous les cas à partir des relais
cystiques et cholédociens, en direction des ganglions para-aortiques.
À noter que certains collecteurs de la vésicule traversent le
parenchyme hépatique des secteurs IV, V, et parfois VI.
Cette
diffusion lymphatique semble se faire sans « saut ganglionnaire ». Yokoyama a mis en évidence par immunohistochimie des
micrométastases dans des ganglions apparemment sains sur des
coupes histologiques classiques : ces techniques remettent en
question l’hypothèse d’un envahissement N2 sans atteinte des
ganglions N1 pédiculaires.
L’envahissement lymphatique semble très précoce, survenant
avant l’envahissement hépatique.
Il est corrélé à l’envahissement
pariétal du cholécyste : absence de métastase ganglionnaire
décelable par histologie classique ou immunohistochimie
pour les tumeurs pT1, alors que la fréquence de l’envahissement
ganglionnaire des tumeurs pT2 et pT3/4 est estimée respectivement
à 61,9 et 81,3 %.
L’envahissement des relais ganglionnaires N1 et
N2 est également corrélé à l’envahissement pariétal.
La
dissémination lymphatique est la première étape de la diffusion à
distance.
Le traitement chirurgical des cancers de la vésicule biliaire est
conditionné par l’extension locale et la dissémination à distance de
la tumeur.
Les cancers du collet se développent classiquement vers
le pédicule hépatique, les cancers de la face inférieure vers le
duodénum et les cancers de la face supérieure dans le parenchyme
hépatique.
Chirurgie curative
:
Elle associe à l’exérèse tumorale, un curage ganglionnaire.
Le but
est d’effectuer une résection de type R0, c’est-à-dire sans résidu
tumoral macro- (type R2) ou microscopique (type R1).
A - CURAGE GANGLIONNAIRE
:
Il débute par un curage N1 : exérèse en bloc du tissu cellulolymphatique du ligament hépatoduodénal.
La veine porte,
l’artère hépatique et le cholédoque sont squelettisés.
La lymphadénectomie se poursuit en direction des relais N2 : la
mobilisation du côlon droit et du bloc duodénopancréatique par
manoeuvre de Kocher permet d’aborder la veine cave et l’aorte
abdominale.
Sont ainsi réséqués de bas en haut, les relais
ganglionnaires para-aortiques, mésentériques, coeliaques puis les
relais rétroduodénopancréatiques et péricholédociens.
Certains
auteurs tels Shimada et Shirai proposent d’effectuer ce curage,
des relais préaortiques au ganglion cystique, en systématisant
chaque groupe ganglionnaire, l’atteinte des ganglions préaortiques
ne permettant plus une chirurgie d’exérèse curative.
B - CHOLÉCYSTECTOMIE SIMPLE
:
Sa technique est identique à celle préconisée pour le traitement
d’une lithiase.
C - CHOLÉCYSTECTOMIE ÉLARGIE AU PARENCHYME
HÉPATIQUE PÉRIVÉSICULAIRE :
1- Cholécystectomie élargie au lit vésiculaire
:
Préconisée par Glenn, elle emporte la vésicule biliaire, la totalité du
canal cystique et le parenchyme hépatique du lit vésiculaire.
Cette
résection se fait aux dépens des segments IV et V, sur une épaisseur
d’environ 3 cm.
Un curage de type N1 lui est associé.
L’épaisseur du parenchyme hépatique réséqué dépend en fait de la
distance séparant la vésicule des éléments glissoniens, les distances
les plus courtes se situant au niveau du collet : 1,6 ± 0,7 mm du
collet au canal hépatique droit, 5,9 ± 1,3 mm du collet à la
convergence des canaux sectoriels droits.
2- Cholécystectomie avec bisegmentectomie IV-V
:
C’est une exérèse hépatique périvésiculaire réglée, enlevant la
totalité du segment V et la partie antérieure du segment IV (segment
IVb).
Elle comprend les trois temps suivants :
– ouverture de la scissure du ligament rond, à droite de celui-ci,
avec ligature des éléments vasculobiliaires antérieurs du segment
IV ;
– section parenchymateuse dans la scissure portale droite avec
ligature des éléments vasculobiliaires du segment V ;
– section parenchymateuse postérieure avec ligature de la veine sushépatique
médiane.
À gauche, la section parenchymateuse ouvre la scissure du ligament
rond à droite de celui-ci et permet le contrôle des éléments vasculobiliaires situés au bord droit du récessus ombilical et au bord
postérieur du lobe carré.
À droite, la section parenchymateuse passe dans le plan de la
scissure latérale droite.
Elle commence au bord antérieur du foie, à
mi-distance de la vésicule biliaire et de l’angle antérieur droit du
foie.
Elle chemine parallèlement à la scissure principale, jusqu’à
l’aplomb du hile et s’incline derrière le collet vésiculaire pour arriver
au milieu du pédicule portal droit.
L’ouverture du parenchyme à ce
niveau permet de reconnaître un gros pédicule antéropostérieur qui
est le pédicule sectoriel paramédian droit dont seule la partie
antérieure est liée.
La section parenchymateuse postérieure est le temps le plus délicat
de l’intervention.
Sur la face antérosupérieure du foie, la section
capsulaire se fait à l’aplomb du hile.
En commençant par les angles,
on sectionne le parenchyme hépatique.
Les pédicules provenant de
la partie postérieure du foie sont liés.
À une profondeur variable, on
rencontre la veine sus-hépatique sagittale qui est le plus gros
élément vasculaire de cette tranche.
Sa ligature et sa section
permettent de rejoindre facilement le bord antérieur du hile.
3- Cholécystectomies avec plurisegmentectomies
:
Ce sont des variantes plus extensives de l’intervention précédente :
– trisegmentectomie IV-V-VIII, proposée en raison des risques de
propagation à la totalité du segment IV et des difficultés de repérage
entre les segments V et VIII ;
– trisegmentectomie IVb-V-VI, proposée dès 1957 par Couinaud, en
raison d’un possible drainage veineux du cholécyste dans le
segment VI.
4- Cholécystectomie avec hépatectomie droite élargie au
segment IV
:
Préconisée dès 1955 par Pack, carcinologiquement très
satisfaisante, elle ne peut être réalisée que si le lobe gauche
représente plus de 15 à 20 % du volume total du foie.
Elle commence
par le temps hilaire : repérage et contrôle de la branche porte droite
et de la branche droite de l’artère hépatique.
Après libération du
foie droit, repérage de la veine cave inférieure et si possible de la
veine sus-hépatique droite, les pédicules portaux du segment IV
sont abordés par dissection du bord droit du ligament rond dans la
scissure ombilicale.
La dissection passe sur le bord droit du pédicule glissonien gauche.
À la face inférieure du foie, l’incision suit le flanc
droit de la scissure ombilicale ; de sagittale elle devient frontale,
s’infléchit vers la droite en passant en avant du bord postérieur du
lobe carré en longeant le versant antérieur du sillon transverse
hilaire.
On rejoint ainsi la dissection des éléments droits du hile.
Après clampage du pédicule portal droit, l’incision
parenchymateuse est poursuivie sur le bord droit du ligament
suspenseur jusqu’à son triangle postérieur, se recourbe pour
atteindre le bord droit de la veine cave inférieure puis descend le
long de celle-ci.
À la face inférieure du foie, la section
parenchymateuse amorcée en avant du bord postérieur du lobe carré
se poursuit dans un plan frontal incliné en bas.
À l’aplomb du bord
droit de la veine cave, elle redevient sagittale.
Le foie ouvert, sont liés successivement : le pédicule du foie droit, la
veine sus-hépatique médiane en respectant la veine sus-hépatique
gauche, la veine sus-hépatique droite et d’éventuelles veines sushépatiques
accessoires.
Cette hépatectomie peut être réalisée sous simple clampage
pédiculaire ou sous exclusion vasculaire totale.
D - CHOLÉCYSTECTOMIE ET BI- OU TRISEGMENTECTOMIE
ÉLARGIE AUX ORGANES DE VOISINAGE
:
Cette résection peut emporter en plus du cholécyste, et de plusieurs
segments hépatiques, le bloc duodénopancréatique selon la
technique de Whipple, le côlon droit ou transverse, l’antre gastrique.
Elle a pour but d’effectuer une résection de type R0, c’est-àdire
sans résidu tumoral macro- ou microscopique.
Chirurgie palliative
:
La place des techniques chirurgicales palliative a nettement diminué
au profit des méthodes endoscopiques et de radiologie interventionnelles.
Ces techniques ont pour but de permettre
l’écoulement de la bile dans le tube digestif. Deux techniques
peuvent être employées : les drainages prothétiques ou les
dérivations biliodigestives.
Elles sont identiques aux techniques de
dérivation proposées pour les cancers de la portion supérieure des
canaux biliaires.
Elles sont employées si l’envahissement
locorégional contre-indique l’exérèse de la lésion au cours d’une
laparotomie ou s’il existe une contre-indication d’ordre local ou
général à une méthode endoscopique ou de radiologie interventionnelle.
A - DRAINAGES PROTHÉTIQUES
:
1- Drainage interne-externe par intubation
transtumorale (technique de Praderi)
:
Par une cholédocotomie effectuée sur une portion libre, la masse
tumorale obstruant le cholédoque est forée par un tuteur métallique,
malléable, boutonné, type Béniqué.
Après franchissement de la zone
tumorale, le tuteur, poussé dans les voies biliaires intrahépatiques
dilatées, passe à travers le parenchyme hépatique et perfore la
capsule de Glisson.
Cette tunnellisation est effectuée sous contrôle
manuel.
La perforation de la capsule de Glisson doit se situer sur la
face supérieure du foie, loin des pédicules portes et sus-hépatiques.
Un drain plastique multiperforé est alors introduit dans ce tunnel ;
une extrémité est sous-sténotique, l’autre extériorisée en
transcutanée.
Le drain peut ainsi être changé en cas d’obstruction,
mais les risques de surinfection biliaire sont majorés.
2- Intubation transtumorale à drain perdu
:
Après cholédocotomie sous-sténotique, la zone tumorale
intracanalaire est forée par l’intermédiaire d’une pince de Bengoléa
ou d’un dilatateur.
L’issue d’un flot de bile blanche signe le
franchissement de l’obstacle.
Un drain de Redon (diamètre 5 ou
6 mm) est introduit en transtumoral ; la cholédocotomie est refermée
sur celui-ci.
Dans la mesure du possible, il est préférable de drainer
les deux foies.
3- Prothèse de Kron
:
Ce sont des prothèses siliconées à extrémité supérieure conique.
Il
existe des prothèses courtes pour intubation transtumorale et
réimplantation cholédocienne, des prothèses en « Y » pour drainer
les deux foies, des prothèses longues pour ponter les voies biliaires.
Lors d’intubation transtumorale et réimplantation cholédocienne,
l’étanchéité est assurée par des ligatures circulaires sans chercher à
refermer la cholédocotomie.
Lors de pontage biliaire, l’extrémité
supérieure de la prothèse est placée dans la portion canalaire dilatée
sus-anastomotique, et son extrémité inférieure réintroduite à la
Witzel dans l’estomac, le duodénum ou le grêle.
B - ANASTOMOSES BILIODIGESTIVES
:
Elles sont réalisées entre une portion dilatée de l’arbre biliaire et un
segment digestif, le plus souvent une anse jéjunale montée en « Y ».
1- Anastomose extrahépatique
:
Elles sont rarement réalisables du fait de l’envahissement pédiculaire
et hilaire de contiguïté fréquent.
Ces anastomoses hépaticojéjunales,
latérolatérales ou de préférence terminolatérales, doivent être
réalisées à distance de la masse tumorale afin de retarder leur
envahissement.
2- Anastomose intrahépatique
:
Le drainage de 30 % du parenchyme hépatique suffit pour obtenir la
régression de l’ictère et la disparition du prurit.
* Anastomose intrahépatique gauche
:
C’est la plus utilisée. Le canal biliaire du segment III, situé audessus
et en avant du bord supérieur de la veine porte du segment
III, est abordé par ouverture de la scissure ombilicale.
Ayant été
repéré par ponction à l’aiguille fine, il est ouvert longitudinalement
sur 1 à 2 cm.
L’anastomose sur anse en « Y » est en général latérolatérale.
* Anastomoses intrahépatiques droites
:
Elles sont utilisées lorsqu’il existe une atrophie du lobe gauche et
portent alors sur le canal hépatique du segment V ou du segment VI
Les anastomoses intrahépatiques droite et gauche sont
confectionnées sur les segments III d’une part, et IV-V d’autre part.
Ces hépatojéjunostomies, simples ou doubles, peuvent compléter un
drainage endoscopique incomplet ou inefficace ou être elles-mêmes
complétées par un drainage endoscopique ou extrahépatique.
Voie d’abord laparoscopique
:
La découverte d’un adénocarcinome de la vésicule biliaire au cours
ou au décours d’une cholécystectomie laparoscopique constitue l’un
des problèmes majeurs soulevés par cette technique.
Lors de cancer
de la vésicule biliaire, la voie laparoscopique semble majorer le
risque de dissémination péritonéale et d’envahissement pariétal au
niveau des orifices de trocarts, comme le suggèrent plus de 60 cas
publiés.
Parmi les patients ayant eu une cholécystectomie laparoscopique,
l’incidence de cancer méconnu en préopératoire varie de 0,34 à 0,6 %
, comparable au taux de 0,3 % classiquement rapporté pour les
cholécystectomies par laparotomie.
Le risque d’envahissement pariétal sur les orifices de trocarts existe
lors de l’exérèse laparoscopique de toutes les tumeurs malignes.
Toutefois, la plupart des cas ont été signalés après cholécystectomie.
Dans une revue récente de la littérature, parmi les 69 cas colligés
d’envahissement pariétal après chirurgie laparoscopique pour lésion
maligne, 59 étaient secondaires à une cholécystectomie pour cancer
méconnu de la vésicule.
Dans une autre étude, l’incidence des
récidives tumorales au niveau des orifices de trocarts a été évaluée à
14 %.
L’effraction de la paroi vésiculaire constituait un facteur
favorisant la récidive pariétale, celle-ci atteignant 40 % versus 9 %
en l’absence d’ouverture de la vésicule.
En revanche, le stade
histologique des tumeurs ne semblait pas être un facteur favorisant,
les récidives s’étant produites avec la même fréquence pour les
tumeurs de stades T1 et T2 que pour les tumeurs de stades T3 et
T4.
Le délai de diagnostic des récidives varie de 21 jours à 47 mois après
l’intervention.
La plupart des publications font état d’un délai
de diagnostic inférieur à 1 an, la médiane étant de 10 mois.
Tous les
malades présentant une récidive pariétale, avaient des métastases
viscérales associées, hépatiques, péritonéales, pulmonaires ou surrénaliennes et en sont décédés 12 à 35 mois après la
cholécystectomie.
La laparoscopie favoriserait également la dissémination métastatique intrapéritonéale.
Ces métastases seraient précoces, certaines ayant
été diagnostiquées 47 jours après la cholécystectomie.
Ces disséminations métastatiques semblent plus fréquentes après
laparoscopie qu’après laparotomie.
La laparoscopie pourrait
aggraver le pronostic du cancer de la vésicule biliaire, et en
particulier celui des tumeurs de stades Tis ou T1 potentiellement
curables par une exérèse adaptée.
Il est donc nécessaire de
rechercher de principe un cancer, en pré- et en peropératoire.
L’examen anatomopathologique extemporané s’impose s’il existe
une tumeur infiltrant la totalité de la paroi vésiculaire ou si
l’ouverture du cholécyste révèle une tumeur.
Cette analyse
histologique est discutable s’il s’agit d’une lésion du fond vésiculaire infracentimétrique qui n’impose pas, même s’il s’agit d’un
carcinome, de geste sur le parenchyme hépatique.
Toutefois, le
diagnostic macroscopique est difficile surtout s’il s’agit de lésion
infiltrante.
Le risque de méconnaître un cancer lors d’une cholécystectomie
devrait inciter à ne pas ouvrir la vésicule biliaire, à placer celle-ci
dans un sac protecteur dès la fin de la dissection de manière à éviter
son contact direct avec le péritoine et la paroi abdominale lors de
son extraction, et à effectuer l’exsufflation du CO2 en fin
d’intervention trocarts en place, afin de limiter le contact entre des
cellules en suspension dans le gaz et les berges des orifices
d’introduction des trocarts.
QUE FAIRE EN CAS DE DÉCOUVERTE D’UN CANCER ?
1- Lors de la cholécystectomie
:
Il est recommandé de convertir en laparotomie afin d’élargir
l’exérèse vers le lit vésiculaire et d’effectuer une lymphadénectomie
pédiculaire selon les principes classiques de la chirurgie
carcinologique.
Au niveau des orifices de trocarts, une excision
pariétale a pour but de limiter le risque de récidive pariétale.
Elle
doit emporter tous les plans pariétaux : péritoine, aponévroses,
muscle, tissu sous-cutané et peau, en passant à 1 cm de la plaie
précédente. Le péritoine doit être soigneusement suturé afin d’éviter
de laisser des zones cruentées propices à la fixation des cellules
néoplasiques.
2- À distance de la cholécystectomie
:
Se pose le problème de la réintervention.
Celle-ci a pour but d’élargir
l’exérèse au lit vésiculaire, ou d’effectuer une résection hépatique
réglée et d’exciser les orifices de trocarts.
S’il ne semble pas y avoir
actuellement d’attitude scientifiquement définie, la plupart des
auteurs recommandent la réintervention chez les patients ne
présentant pas de risque opératoire prohibitif en raison de leur état
ou de leur âge.
D’autres méthodes thérapeutiques ont été proposées au niveau des
orifices de trocarts, telles la photocoagulation laser des berges ou
la radiothérapie externe, mais l’efficacité de ces méthodes n’a pas
été démontrée.
En conclusion, en l’état actuel de nos connaissance le cancer de la
vésicule biliaire constitue une contre-indication à la laparoscopie.
En
cas de découverte d’un cancer non suspecté en préopératoire, il est
recommandé de convertir en laparotomie afin d’effectuer une
exérèse large et d’exciser les orifices de trocarts.
En cas de
découverte postopératoire, la réintervention est souhaitable chez les
patients pouvant bénéficier d’une exérèse curative.
Traitement prophylactique
:
L’échographie est l’examen de première intention dans le bilan d’une
douleur biliaire.
La découverte de lésions polypoïdes ou d’un épaississement de la
paroi vésiculaire doit faire évoquer de principe une pathologie
maligne, de même que la présence d’une lithiase de plus de 2 cm de
diamètre.
En effet, même si la cancérogenèse biliaire reste incomplètement
déterminée, plusieurs lésions précancéreuses sont reconnues :
– la cholécystite chronique lithiasique, où le risque de cancer est lié
à la taille des calculs : il atteint 10,4 % chez les patients porteurs de
calculs de plus de 3 cm de diamètre ;
– les lésions polypoïdes sessiles, où le risque de cancer peut
atteindre 1,7 % : 45 % des lésions supérieures à 15 mm sont des
carcinomes ;
– les calcifications diffuses (vésicule porcelaine) associées à un
carcinome dans 10 à 25 % des cas.
La cholécystectomie prophylactique se justifie dans ces situations, la
voie coelioscopique étant pour certains contre-indiquée si le diamètre
de la lésion dépasse 1 cm.
Conclusion
:
Les indications du traitement chirurgical des cancers de la vésicule
biliaire dépendent avant tout de l’âge du patient et du stade tumoral.
Près de 75 % des lésions sont au-dessus de tout geste curateur au
moment de leur diagnostic.
S’il existe un ictère par compression ou
envahissement de la voie biliaire principale, un drainage biliaire
s’impose.
Ce drainage n’est effectué chirurgicalement que s’il existe une
contre-indication formelle d’ordre local ou général à une technique de
drainage endoscopique ou de radiologie interventionnelle.
Environ 15 % des cancers sont macroscopiquement évidents, mais
limités au cholécyste ou au foie périvésiculaire, c’est-à-dire stade I, II ou
III, et peuvent être traités curativement.
La voie coelioscopique est contre-indiquée ; si le cancer est découvert au cours d’une coelioscopie,
il faut convertir en laparotomie et exciser les orifices de trocarts avant
de poursuivre le geste.
L’acte chirurgical débute par le prélèvement et
l’examen histologique extemporané des ganglions préaortiques, leur
envahissement contre-indiquant un geste curateur.
Si ce relais est
indemne de tout envahissement, le patient peut bénéficier d’un geste
curateur : curage ganglionnaire et résection hépatique antérieure IV-V,
voire, chez les sujets jeunes à faible risque chirurgical, hépatectomie
droite élargie au segment IV si le lobe gauche représente plus de 15 à
20 % du volume total du foie.
Près de 10 % des cancers sont découverts en postopératoire : la
cholécystectomie simple suffit s’il s’agit de cancers « in situ », mais les
orifices de trocarts doivent être excisés s’il s’agissait d’une intervention
par voie coelioscopique ; tous les autres stades imposent la
réintervention pour curage ganglionnaire et résection antérieure
hépatique de principe pour tout sujet de moins de 70 ans.
L’examen
macroscopique systématique, qui permet de diriger sur les lésions
muqueuses suspectes l’examen histologique extemporané, devrait
contribuer à faire diminuer ce taux.