Bloc suprahépatique (syndrome de Budd-Chiari) Cours d'Hépatologie
Introduction
:
L’obstruction des veines hépatiques principales ou de la veine cave inférieure
supra-hépatique est responsable d’un bloc supra-hépatique.
Le bloc supra-hépatique doit être distingué du bloc intrahépatique postsinusoïdal dans
lequel il y a une obstruction diffuse des veinules hépatiques sans atteinte des
veines hépatiques principales.
Cette dernière entité est habituellement, mais
non constamment, due à un type particulier d’atteinte non thrombotique des
veinules hépatiques appelée maladie veino-occlusive qui ne sera pas
envisagée dans cet article.
Les lésions qui obstruent les principales veines
hépatiques ou la veine cave inférieure supra-hépatique incluent la compression
par une lésion expansive, l’invasion luminale par une tumeur et des lésions
veineuses primitives incluant la thrombose et la sténose fibreuse ou
membraneuse.
La sténose fibreuse ou membraneuse peut être une séquelle
d’une thrombose antérieure.
Cependant, avant qu’il ne soit définitivement
établi que cette séquence explique tous les cas de sténoses fibreuses ou
membraneuses, l’obstruction non tumorale des veines hépatiques ne doit pas
être totalement assimilée à la thrombose des veines hépatiques.
Les termes de
« maladie de Chiari » ou de « syndrome de Budd-Chiari » ont été utilisés avec
des définitions variées et parfois ambiguës ; il est souhaitable de les éviter.
Conséquences physiopathologiques
et histopathologiques du bloc supra-hépatique :
Une portion importante du réseau veineux hépatique doit être occluse pour
que se développent des manifestations cliniques.
L’obstruction d’une seule veine hépatique principale ne détermine pas de manifestation clinique et n’est
reconnue qu’à la nécropsie.
L’obstruction de deux ou trois veines
hépatiques a deux principaux effets :
– la pression sanguine augmente dans les sinusoïdes correspondantes ;
– le débit sanguin à travers ces sinusoïdes diminue.
L’augmentation de la pression sinusoïdale a plusieurs conséquences.
– En premier lieu, elle induit une dilatation sinusoïdale et une congestion,
prédominant dans la région centrale du lobule hépatique.
La manifestation
clinique correspondante est l’augmentation de volume du foie.
L’augmentation de la pression sinusoïdale augmente la filtration de liquide
interstitiel.
Quand les capacités de drainage des lymphatiques hépatiques sont
dépassées, le liquide interstitiel est filtré à travers la capsule hépatique, ou
sourd des canaux lymphatiques rompus.
Le fluide filtré a une concentration
élevée en protéines en raison de la haute perméabilité des parois sinusoïdales.
Malgré cela, la concentration en protéine du liquide d’ascite est souvent
inférieure à 25 g/L.
Cette concentration relativement basse en protéines
peut être attribuée à deux facteurs : une diminution progressive de la
perméabilité des parois sinusoïdales aux protéines et le mélange avec un
liquide pauvre en protéines d’origine mésentérique.
La production rapide et
massive de liquide d’ascite peut induire une hypovolémie et une insuffisance
rénale fonctionnelle secondaire.
– En second lieu, l’augmentation de la pression sinusoïdale est transmise à la
veine porte et conduit à une hypertension portale.
– En troisième lieu, l’augmentation de la pression sinusoïdale dans les zones
obstruées du foie induit le développement d’une circulation veineuse
collatérale microscopique et macroscopique entre les zones obstruées et les
zones contiguës bien drainées ou les territoires hépatiques, pariétaux ou
diaphragmatiques.
Le réseau en « toile d’araignée », aspect initialement
décrit sur les clichés d’angiographie, correspond à ces vaisseaux collatéraux intrahépatiques et extrahépatiques.
Ces veines collatérales peuvent
finalement faire diminuer la pression sinusoïdale et ainsi prévenir le
développement des manifestations cliniques.
L’ischémie due à la diminution de la perfusion sinusoïdale est inconstante.
Plus l’obstruction est brutale, plus l’ischémie est marquée.
La nécrose
ischémique se manifeste par une disparition des hépatocytes centrolobulaires.
L’insuffisance hépatique résultant de la nécrose
ischémique est rarement fulminante.
Les conséquences de l’ischémie sont
habituellement transitoires.
La réversibilité peut s’expliquer par le
développement de la circulation collatérale entre les zones obstruées et les
zones voisines perméables.
Le développement de la circulation collatérale est
un déterminant majeur du pronostic.
Dans les semaines qui suivent l’obstruction des veines hépatiques, une fibrose centrolobulaire se développe, conséquence de l’hypertension sinusoïdale et
de l’ischémie.
Dans les mois qui suivent l’obstruction, une régénération
nodulaire peut prendre place, principalement dans la région périportale.
Une fibrose portale modérée puis une cirrhose peuvent se constituer.
Les
lésions de fibrose et de régénération nodulaire peuvent s’observer en
l’absence de thrombose des grosses veines hépatiques dans plusieurs
maladies thrombogènes.
De ce fait, il est parfois difficile d’en faire la
conséquence de la seule obstruction des veines hépatiques.
La régénération
nodulaire est l’un des mécanismes expliquant l’augmentation de volume du
foie.
Dans environ la moitié des cas d’obstruction des grosses veines hépatiques,
le segment I est hypertrophié.
Cette hypertrophie peut être très marquée,
expliquant une compression de la veine cave inférieure.
L’hypertrophie du
segment I s’explique par l’anatomie de ses voies de drainage veineux
constituées de plusieurs veines se terminant directement dans la veine cave
inférieure, en amont de l’ostium des principales veines hépatiques.
De ce fait,
en cas d’obstruction des grosses veines hépatiques, le drainage veineux du
segment I est préservé, ce qui permet son hypertrophie compensatrice.
De
plus, les veines du segment I peuvent servir de débouché aux veines
collatérales intrahépatiques.
Quand l’obstruction des veines hépatiques est
asynchrone, l’atrophie des segments les plus anciennement atteints peut
coexister avec l’élargissement congestif des territoires les plus récemment
atteints. Un remaniement majeur de la forme du foie en résulte souvent.
Causes des blocs
supra-hépatiques :
A -
Compression par une lésion expansive
:
Les lésions expansives infectieuses sont plus souvent la cause d’une
obstruction des veines hépatiques que les tumeurs néoplasiques bénignes ou
malignes.
Les processus inflammatoires locaux et systémiques accompagnant
les abcès amibiens et à pyogène pourraient contribuer à la formation de
la thrombose des veines hépatiques. Dans l’hydatidose, il peut se produire une
compression par les kystes de plus grande taille ou les kystes multiples.
Dans
l’échinococcose alvéolaire, l’invasion directe de la lumière des veines
hépatiques par le parasite contribue également à l’obstruction. Les métastases
hépatiques sont une cause très rare de bloc supra-hépatique.
La compression par un anévrisme aortique a été rapportée. Dans la polykystose rénale de l’adulte, la compression des veines hépatiques par les
kystes de grande taille ou par les kystes infectés est la cause de l’hypertension
portale parfois rencontrée dans cette maladie.
Les veines hépatiques peuvent
être comprimées par un hématome intrahépatique à la suite d’un traumatisme
fermé de l’abdomen.
La ligature d’une veine hépatique au cours d’une
résection hépatique peut être suivie d’une insuffisance hépatique lorsque
l’obstruction asymptomatique des veines restantes avait été méconnue.
B - Invasion endoluminale par une tumeur
:
Cette complication est spécifique aux tumeurs malignes.
Elle est caractérisée
par l’invasion de leur voie de drainage veineux jusqu’à atteindre la veine cave
inférieure.
Lorsque la croissance du bourgeon tumoral a atteint l’ostium des
veines hépatiques, il se produit une forme aiguë ou fulminante de bloc
supra-hépatique.
Les tumeurs malignes responsables incluent le néphroblastome, l’adénocarcinome rénal, le carcinome hépatocellulaire, le
corticosurrénalome malin, et le léiomyosarcome de la veine cave inférieure.
Le myosarcome de l’oreillette droite peut obstruer la veine inférieure par un
mécanisme similaire quoique rétrograde.
Dans tous ces cas, le bourgeon
tumoral endoluminal peut habituellement être clivé des parois veineuses.
Cela autorise
les opérations urgentes pour supprimer l’obstruction.
Cependant, le
pronostic est mauvais en raison de métastases pulmonaires
pratiquement constantes.
Des rémissions
prolongées ou des guérisons n’ont été observées que lorsqu’un
traitement efficace par chimiothérapie ou irradiation pouvait être
administré.
C -
Thrombose :
Les prévalences relatives présentées
dans ce tableau sont tirées de notre expérience.
1- Syndromes myéloprolifératifs primitifs
:
Un bloc supra-hépatique peut compliquer les syndromes myéloprolifératifs
primitifs et en être la manifestation initiale.
Dans une étude nécropsique, la
thrombose des grosses veines hépatiques a été observée chez huit des
137 patients atteints de syndrome myéloprolifératif.
De fait, les syndromes myéloprolifératifs sont la cause de la moitié ou des deux tiers des cas de
thromboses des veines hépatiques dans les études prospectives
récentes.
Cette prévalence élevée n’a été mise en évidence que par la
reconnaissance des syndromes myéloprolifératifs occultes.
Les syndromes myéloprolifératifs évidents sont caractérisés par des modifications du sang
périphérique : le diagnostic requiert l’association de plusieurs critères et
en particulier une augmentation des globules rouges ou des plaquettes dans le
sang périphérique.
Chez les patients ayant un syndrome myéloprolifératif
occulte, les modifications du sang périphérique ne sont pas caractéristiques
mais une anomalie spécifique peut être démontrée : la formation spontanée
de colonies érythroblastiques lorsque la culture des progéniteurs
érythropoïétiques est effectuée sur un milieu pauvre en érythropoïétine.
La
sensibilité de ce test n’est probablement pas de 100 %. Sa spécificité est
considérée comme excellente.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer l’absence
de modification du sang périphérique au cours des syndromes myéloprolifératifs accompagnés de thrombose des veines hépatiques :
– l’augmentation du volume globulaire total peut être masquée par une
augmentation parallèle du volume plasmatique ;
– une carence martiale d’origine imprécise peut interférer avec
l’érythropoïèse.
Chez la plupart des patients ayant un syndrome myéloprolifératif occulte
démontré par la formation spontanée de colonies érythroblastiques, d’autres
anomalies évocatrices de syndrome myéloprolifératifs sont présentes : la
biopsie ostéomédullaire peut montrer des mégacaryocytes dystrophiques ; la
biopsie hépatique ou l’examen de la rate, lorsqu’une splénectomie a été
effectuée, peuvent montrer une métaplasie myéloïde.
Alors que d’une façon
générale les syndromes myéloprolifératifs primitifs affectent principalement
les hommes de plus de 50 ans, ceux qui se compliquent de l’obstruction des
veines hépatiques affectent principalement les femmes en dessous de 40 ans.
2- Hémoglobinurie paroxystique nocturne
:
Il s’agit d’une affection clonale acquise des cellules sanguines caractérisée
par un déficit en résidu glycosyl-phosphatidyl-inositol, résidu par lequel
plusieurs protéines de surface sont ancrées dans la membrane cytoplasmique.
Pour des raisons inconnues, la thrombose des veines hépatiques est une
complication très fréquente de cette maladie exceptionnelle.
Les
modifications sanguines caractéristiques de l’hémoglobinurie paroxystique
nocturne peuvent être absentes au moment où le bloc supra-hépatique survient
ou est reconnu.
Les manifestations et le pronostic sont liés à l’étendue de
l’obstruction des veines hépatiques : les manifestations sont absentes ou
transitoires lorsque la thrombose est limitée aux veinules hépatiques ; une
ascite chronique accompagne l’occlusion partielle des principales veines
hépatiques ; une évolution fatale est la conséquence d’une obstruction
complète des grosses veines hépatiques.
3- Syndrome des antiphospholipides
:
Cette entité a deux caractéristiques :
– des anticorps sériques mis en évidence par des tests utilisant des
phospholipides, d’une part ;
– un risque augmenté de thrombose artérielle veineuse et d’avortement
spontané, d’autre part.
Cette entité a initialement été décrite chez des patients atteints de lupus
érythémateux systémique, de connectivite, ou de tumeurs malignes.
Elle peut
également être rencontrée en l’absence de ces affections.
Le syndrome des antiphospholipides rend compte de presque 20 % des cas de thromboses des
veines hépatiques.
Dans la plupart des cas rapportés, les critères du
diagnostic de lupus systémique de l’American Rhumatism Association
n’étaient pas remplis.
Souvent, l’apparition ou l’exacerbation des
manifestations du bloc supra-hépatique a succédé à l’interruption du
traitement anticoagulant.
4- Anomalies de la coagulation et de la fibrinolyse
:
Plusieurs anomalies de la coagulation, des inhibiteurs de la coagulation, ou
de la fibrinolyse sont rencontrées chez les patients atteints de thrombose, en
général.
Cependant, de façon un peu surprenante, les déficits en
antithrombine III, en protéine C ou en protéine S semblent rarement en cause
au cours de l’obstruction des veines hépatiques.
L’insuffisance hépatique en
soi induit une diminution non spécifique du taux sérique de ces facteurs qui
doit être distinguée d’une anomalie primitive.
La résistance à la protéine C
activée, due à une mutation dite Leiden du facteur V, est observée dans
25 % des cas de thrombose des veines hépatiques.
Il s’agit donc du facteur
étiologique le plus fréquent après les syndromes myéloprolifératifs.
Des
anomalies du facteur II et du métabolisme de l’homocystéine peuvent
également être relevées.
5- Médicaments
:
Les traitements par dacarbazine peuvent induire une forme fulminante
d’occlusion des veines hépatiques.
La lésion vasculaire pourrait être une
atteinte immunoallergique des veines hépatiques de petits et moyens
calibres.
L’extension de la thrombose aux veines hépatiques principales a
été rapportée.
L’utilisation des contraceptifs oraux augmente le risque
d’occlusion des veines hépatiques par un facteur II.
6- Grossesse et post-partum
:
Plusieurs cas d’occlusion des veines hépatiques survenant pendant la
grossesse ou les suites de couches, ont été rapportés.
Dans la plupart des
cas, il s’y associait une affection thrombogène comme une hémoglobinurie
paroxystique nocturne, un syndrome myéloprolifératif primitif, ou un
facteur V Leiden.
Une affection thrombogène sous-jacente doit donc être
suspectée à chaque fois qu’une thrombose des veines hépatiques se constitue
au cours ou au décours d’une grossesse.
7- Affections thrombogènes systémiques diverses
:
La maladie de Behçet peut se compliquer de thrombose des veines
hépatiques.
Chez la plupart des patients, l’occlusion des veines
hépatiques accompagne une thrombose de la veine cave inférieure dont elle
est probablement la conséquence.
La colite ulcéreuse peut se compliquer de
thrombose des veines hépatiques en raison de l’hypercoagulabilité qui résulte
du syndrome inflammatoire, de la diminution de l’antithrombine III et de
l’augmentation du facteur VIII.
L’association d’un bloc supra-hépatique et
d’une maladie coeliaque a été rapportée.
Cette association est mal
expliquée.
La sarcoïdose est une cause très rare d’obstruction des grosses
veines hépatiques ; une atteinte granulomateuse des veinules hépatiques
en l’absence d’obstruction des grosses veines est plus fréquente ; dans
certains cas, elle pourrait être sensible à un traitement corticoïde.
Chez
quelques patients atteints de connectivite, une occlusion des veines
hépatiques s’est constituée alors qu’il n’y avait ni anticoagulant lupique ni
anticorps antiphospholipides.
Des cas de vascularites immunoallergiques
sans cause évidente se sont également accompagnés d’obstruction des veines
hépatiques.
Quelques cas de bloc supra-hépatique ont été décrits au cours du
syndrome hyperéosinophilique idiopathique.
La toxicité endothéliale de
certains constituants des éosinophiles a été incriminée.
8- Association d’affection thrombogène
:
On admet généralement que l’association de deux affections thrombogènes
et un facteur déclenchant sont nécessaires pour qu’une thrombose veineuse
se développe.
Cette hypothèse a été partiellement confirmée par des
observations isolées comme par une étude systématique récente.
9- Bloc
supra-hépatique de cause inconnue
:
Quand tous les
tests sont mis en oeuvre, la proportion des cas idiopathiques
descend à moins de 10 %.
10- Obstruction membraneuse de la veine cave inférieure
:
L’obstruction membraneuse de la veine cave inférieure est la principale
cause de bloc supra-hépatique enAfrique du Sud, au Japon et, à un moindre
degré, en Inde.
La veine cave inférieure est obstruée au niveau ou
juste au-dessus de l’abouchement des veines hépatiques.
Une des veines
hépatiques reste habituellement perméable et se draine dans le segment
de la veine cave inférieure situé en amont de l’obstacle.
Le sang cave
inférieur retourne à l’oreillette droite par de larges veines collatérales
lombaires et azygos.
Les autres veines hépatiques principales sont
habituellement obstruées.
Cette lésion a longtemps été considérée
d’origine congénitale en raison de sa forme très régulière et de la
complexité du développement embryonnaire de la partie terminale de la
veine cave inférieure.
Cependant, plusieurs arguments indirects
suggèrent que les obstructions membraneuses de la veine cave inférieure
sont acquises :
– la circulation collatérale cavocave, très marquée, se développe
habituellement à l’âge adulte, ce qui n’est pas compatible avec une origine
congénitale ;
– lorsqu’elle est systématiquement cherchée, une affection thrombogène
sous-jacente est habituellement trouvée.
Dans la plupart des autres cas
d’obstruction membraneuse de la veine cave inférieure, les explorations
visant à identifier une affection thrombogène sous-jacente n’avaient pas été
systématiques ;
– chez un
patient ayant un anticoagulant lupique, une thrombose de la veine
cave inférieure s’est transformée en obstruction membraneuse ;
– l’étude
microscopique de la membrane obstruant la veine cave suggère
fortement une origine thrombotique ;
– l’obstruction des veines hépatiques qui accompagne la lésion
membraneuse de la veine cave est de type très varié : la terminaison d’une, de
deux ou des trois veines hépatiques, peut être oblitérée.
L’ostium des veines
hépatiques peut être situé au-dessus ou au-dessous de l’obstruction
membraneuse.
Une telle diversité est moins compatible avec une
malformation congénitale qu’avec une origine acquise.
Manifestations
:
La prévalence des principales manifestations de bloc
supra-hépatique, dans une série de 87 malades admis à l’hôpital
Beaujon.
Les manifestations diffèrent selon la date à laquelle les patients ont
été vus, car les techniques plus récentes d’imagerie non invasive ont permis
la reconnaissance des cas qui étaient auparavant méconnus.
Quatre formes
cliniques peuvent être séparées.
A - Forme asymptomatique
:
Cette entité a été individualisée récemment.
Elle est caractérisée par
l’absence d’ascite, d’hépatomégalie et de douleur abdominale.
L’obstruction
des veines hépatiques est découverte soit fortuitement par des examens
d’imagerie faits pour une autre raison, soit à la suite de l’exploration de tests
hépatiques anormaux.
La perméabilité d’une des grosses veines hépatiques
ou le développement de très grosses veines collatérales explique
probablement l’absence de signe clinique chez ces patients.
Environ 20 %des
cas de bloc supra-hépatique vus depuis 1990 rentrent dans cette catégorie.
B - Forme fulminante
:
Cette entité est caractérisée par la constitution en quelques jours d’une
insuffisance hépatique fulminante avec insuffisance rénale et augmentation
marquée des transaminases.
Cette entité est très rare.
C - Forme aiguë/ subaiguë
:
Cette entité est caractérisée par la constitution rapide d’une ascite avec
hépatomégalie, insuffisance rénale fonctionnelle et ictère.
L’augmentation des transaminases dépasse cinq fois la limite supérieure de
la norme.
Le taux de prothrombine est inférieur à 40 %.
Les manifestations
datent généralement de moins de 2 mois quand le diagnostic est fait.
Environ
20 % des cas de bloc supra-hépatique rentrent dans cette catégorie.
D - Forme chronique
:
Cette entité est caractérisée par l’accumulation progressive d’une ascite en
2 mois ou plus.
Les transaminases sont discrètement augmentées ou
normales.
Il n’y a pas d’ictère. Le taux de prothrombine est supérieur à 40 %.
Une insuffisance rénale fonctionnelle n’est présente que dans la moitié des
cas.
Environ 60 % des cas de bloc
supra-hépatique rentrent dans cette
catégorie.
L’histoire naturelle n’est pas bien connue car une grande partie des patients
des séries récentes ont subi une intervention chirurgicale.
On décrit des
régressions spontanées de manifestations aiguës sévères.
Trois
complications principales peuvent survenir :
– le développement rapide d’une insuffisance hépatique est rare ;
– une hémorragie digestive survient chez environ 15 % des patients ; cette
complication était responsable de la plupart des décès des séries anciennes ;
– l’ascite est la principale complication ; dans un tiers des cas l’ascite est
d’emblée résistante au traitement médical ou s’accompagne d’une
insuffisance rénale fonctionnelle ; dans un tiers des cas l’ascite est
initialement contrôlée par un traitement médical et, en moins de 6 mois, elle
devient réfractaire ; dans un tiers des cas, l’ascite est et reste facilement
contrôlée par le traitement médical.
Quand l’ascite est contrôlée par le
traitement médical, une survie prolongée peut être observée.
Dans les séries récentes incluant des patients non sélectionnés, opérés et non
opérés, le taux de mortalité après 3 ans de suivi était de 30 à 50 %.
La mortalité
était très faible par la suite.
Les obstructions membraneuses de la veine cave inférieure se distinguent des
obstructions des veines hépatiques par plusieurs caractéristiques.
– Les manifestations cliniques se constituent beaucoup plus insidieusement ;
l’ascite est habituellement absente ; la circulation veineuse collatérale souscutanée
thoracique, lombaire et abdominale est habituellement marquée ;
toutes ces manifestations sont généralement présentes de longue date lorsque
le patient vient consulter.
– La congestion centrolobulaire n’est pas aussi marquée qu’en cas
d’obstruction limitée aux veines hépatiques ; une fibrose portale et une
cirrhose sont fréquentes.
– Une infection chronique par le virus de l’hépatite B est fréquemment
associée en Afrique du Sud ; mais cette association n’a pas été retrouvée
dans les autres pays.
– Le carcinome hépatocellulaire se développe chez 6 à 50% des patients
atteints d’obstruction membraneuse de la veine cave inférieure. Le
mécanisme de cette association n’a pas été éclairci.
Le carcinome
hépatocellulaire pourrait résulter de la transformation maligne d’un nodule
originellement bénin.
Cette transformation maligne serait d’autant plus
fréquente que l’évolution de la maladie est prolongée.
Histopathologie
:
Les lésions des veines hépatiques ont été bien précisées par les études nécropsiques.
En cas d’obstruction non tumorale, la lésion la plus
fréquente est un épaississement concentrique de la paroi de la veine par une
fibrose sous-intimale non inflammatoire.
Le résultat en est une réduction
importante du calibre de la veine ou une oblitération.
Cette lésion peut
atteindre toute la longueur d’une veine hépatique principale qui réapparaît
alors comme un cordon fibreux.
Dans d’autres cas, l’épaississement fibreux
est limité à la région terminale, juxtaostiale, des grosses veines hépatiques,
formant des sténoses courtes ou des membranes.
Enfin, dans un petit
nombre de cas, seul l’ostium des veines hépatiques est occlus.
Des thrombi
récents et anciens (c’est-à-dire organisés et recanalisés) se superposent aux
lésions fibreuses.
La thrombose pure est rare. La question de savoir quel était
l’événement initial, la thrombose ou la fibrose de la paroi veineuse, a été
débattue.
La discussion a été obscurcie par l’insuffisance de l’étude
étiologique dans la plupart des études nécropsiques.
Les sténoses courtes
de la partie terminale des veines hépatiques sont aussi souvent associées à une
affection thrombogène que les autres types d’obstruction.
La libération
d’agents fibrosants par les plaquettes tel que le PDGF (platelet-derived
growth factor) a été documentée au cours des syndromes myéloprolifératifs
et pourrait rendre compte de la constitution de la myélofibrose.
La fibrose sous-endothéliale des lésions athéromateuses a été attribuée à la libération du
PDGF par les plaquettes adhérant à la surface endothéliale endommagée.
L’adhérence des plaquettes anormales aux zones de lésion endothéliale de la
portion terminale des veines hépatiques et leur libération de PDGF, pourraient
être responsables des lésions fibreuses ; une cause hypothétique de lésion de
l’endothélium pourrait être la distorsion mécanique qui se produit au niveau
de la partie terminale des veines hépatiques lorsque le diaphragme descend
au cours des mouvements inspiratoires.
Les lésions des veines hépatiques de petit calibre sont variées.
On peut
observer l’absence de lésion ou une dilatation, une thrombose, une fibrose,
une endophlébite ou une disparition des petites veines hépatiques.
L’examen histopathologique des membranes obstruant la veine cave
inférieure montre que la structure de base de la paroi veineuse est conservée
avec transformation de l’intima en une structure fibreuse lamellaire, des
thrombi organisés d’âges variés, une recanalisation et des calcifications.
Comme cela a été mentionné plus haut, de forts arguments étayent
l’hypothèse d’une origine acquise, thrombotique, de ces lésions fibreuses ou
membraneuses.
Diagnostic
:
Le diagnostic de bloc
supra-hépatique doit être suspecté chez tout malade
présentant :
– une ascite, une augmentation de volume du foie et des douleurs
abdominales hautes survenant simultanément ;
– avec une maladie chronique du foie, ascite dont le caractère intraitable
contraste avec l’intensité modérée des anomalies des tests d’insuffisance
hépatique ;
– une maladie du foie et une affection thrombogène ;
– une insuffisance hépatique fulminante accompagnée d’une augmentation
de volume du foie et d’une ascite ;
– une maladie chronique du foie inexpliquée après que l’alcoolisme, les
hépatites chroniques virales, l’auto-immunité, la surcharge en fer, la maladie deWilson, et le déficit en alpha-1 antitrypsine, ont été exclus.
Dans la presque totalité des cas, les procédés d’imagerie non invasive
montrent l’obstruction des voies de drainage veineux hépatique.
Lorsque les
procédés d’imagerie non invasive ne permettent pas d’établir le diagnostic,
une biopsie hépatique doit être effectuée.
Ce n’est que rarement que
l’opacification des veines hépatiques est nécessaire.
A - Échographie-doppler
:
Dans plus de 75 % des cas, l’obstruction des principales veines hépatiques
peut être reconnue par la seule échographie-doppler.
Les signes
spécifiques sont : un matériel hypoéchogène remplissant une veine
élargie, une sténose avec une dilatation en amont, un cordon hyperéchogène
remplaçant l’une des principales veines hépatiques, des voies de dérivation
collatérales intrahépatiques.
La concordance entre ces anomalies
échographiques et les données de la nécropsie ou de la veinographie est
excellente, excepté lorsque l’occlusion est limitée à un ostium d’une veine
hépatique et peut donner un aspect faussement normal de cette veine ;
l’échographie-doppler pulsé et couleur montre alors, au site de la sténose,
une augmentation importante des vitesses circulatoires et, en amont de la
sténose, une démodulation du flux remplaçant la morphologie triphasique
habituelle.
Des veines hépatiques non visibles, tortueuses ou de calibre réduit,
sont d’observation fréquente ; comme ces anomalies sont également
rencontrées en cas de cirrhose sans obstruction des veines hépatiques, elles
ne peuvent être utilisées comme argument diagnostique.
L’échographie
permet habituellement de reconnaître l’invasion tumorale intraluminale et la
compression des veines hépatiques.
La perméabilité de la veine porte et de la veine mésentérique supérieure est
bien évaluée par l’échographie-doppler.
Cette information est essentielle pour
le pronostic et le choix du traitement.
B - Tomodensitométrie
:
La tomodensitométrie a peu d’intérêt au cours des blocs
supra-hépatiques.
Les lésions sténosant les veines hépatiques sont mal visibles.
Seuls les signes
indirects comme le remaniement de la forme du foie, l’ascite, et une parenchymographie hétérogène après injection de produit de contraste
orientent vers le diagnostic.
La tomodensitométrie est utile pour caractériser
les blocs supra-hépatiques secondaires aux tumeurs du foie ou du
rétropéritoine.
C - Imagerie par résonance magnétique
:
Les grosses veines hépatiques sont bien étudiées par l’imagerie par résonance
magnétique.
Cette technique semble aussi performante que l’échographie
pour mettre en évidence l’obstruction des veines hépatiques et la circulation collatérale intrahépatique.
Elle pourrait être supérieure à l’échographie pour
étudier la veine cave inférieure.
La thrombose vasculaire donne un signal
élevé dans les séquences en écho de spin et l’absence de signal en écho de
gradient.
Le parenchyme hépatique est habituellement le siège d’un hypersignal lors des séquences pondérées en T2 à la phase aiguë, et d’un
hyposignal en T2 à la phase chronique, peut-être en raison de la fibrose.
D - Biopsie hépatique
:
Dans la moitié des cas environ, les anomalies de la coagulation empêchent
d’effectuer une ponction-biopsie hépatique ; mais dans 90 % des cas, les
résultats des procédés d’imagerie non invasifs permettent de se passer de la
biopsie.
Les lésions histologiques caractéristiques, en particulier la
congestion centrolobulaire, peuvent être absentes d’un prélèvement à
l’aiguille, tout particulièrement lorsque le bloc supra-hépatique est compliqué
de cirrhose.
E - Angiographie
:
L’opacification des veines hépatiques peut être obtenue par ponction transpariétale transcapsulaire à l’aiguille fine, par canulation rétrograde des
veines hépatiques à partir de la veine cave supérieure ou inférieure.
Le
premier procédé est préféré au second car il donne une meilleure image des
lésions veineuses.
En cas d’anomalies sévères de la coagulation ou d’ascite
massive, le seul procédé utilisable est la canulation rétrograde.
Les anomalies
indiquant un bloc supra-hépatique sont :
– l’oblitération segmentaire ou la sténose d’une veine hépatique principale ;
– des lacunes endoluminales ;
– l’opacification du réseau collatéral.
L’échec de canulation de l’ostium d’une veine hépatique n’est qu’un
argument de présomption de l’occlusion de cette veine.
La canulation
rétrograde fait courir le risque d’aggraver une thrombose ou de déloger un
caillot récent.
La perméabilité de la veine cave inférieure est un déterminant important du
traitement.
Une cavographie inférieure doit être effectuée lorsque la
perméabilité ne peut pas être clairement démontrée par les procédés non
invasifs.
L’opacification doit être couplée à une mesure de la pression
sanguine dans la veine cave inférieure, afin de préciser les conséquences
hémodynamiques de la compression par le segment I hypertrophié.
La prévention de l’insuffisance rénale induite par les produits de contraste est
un point essentiel lorsqu’une thrombolyse pharmacologique est envisagée ;
les procédés d’angiographie invasive ne doivent pas être mis en oeuvre.
Traitement
:
Le traitement vise quatre buts : l’éradication ou le contrôle de la cause, la
prévention des thromboses veineuses, le contrôle des manifestations par les
mesures non spécifiques, et le rétablissement du drainage veineux hépatique
à basse pression.
A - Traitement de la cause
:
Cette partie essentielle de la stratégie thérapeutique dépasse le cadre de cet
article.
B - Prévention des autres thromboses veineuses
:
La prévention de la constitution d’une thrombose dans les veines hépatiques
restées perméables, la veine cave inférieure ou la veine porte, comme dans
les autres territoires veineux, est de la plus haute importance.
Cette prévention
est justifiée chez les patients ayant une affection thrombogène identifiée.
Elle
est également justifiée lorsque aucune cause n’a été identifiée en faisant
l’hypothèse qu’une affection thrombogène est probablement présente mais a
été méconnue.
Les héparines de bas poids moléculaire à la phase précoce et,
dès que possible, un antagoniste de la vitamineK peuvent être utilisés sans
danger évident.
La surveillance d’une éventuelle thrombopénie induite par
l’héparine doit être particulièrement vigilante. Les syndromes myéloprolifératifs évidents doivent être traités en urgence.
Une justification supplémentaire du traitement anticoagulant est l’observation
que le traitement par héparine seul peut s’accompagner d’une reperméabilisation de veines hépatiques thrombosées
ou d’une thrombose combinée de la veine porte et des veines
hépatiques sans nécessiter le
recours à une intervention.
C - Contrôle des manifestations par les moyens
non spécifiques
:
1- Traitement de l’ascite
:
Le contrôle de l’ascite peut habituellement être obtenu par les diurétiques.
Quand les diurétiques sont inefficaces, la ponction d’ascite avec perfusion de
macromolécules ou d’albumine est indiquée.
Les valves péritonéoveineuses
ne devraient être mises en place que lorsque l’ascite est réfractaire au
traitement médical ou qu’une anastomose portosystémique n’est pas
réalisable.
L’obstruction de la valve et la thrombose de la veine réceptrice sont
habituelles et dues à la richesse en protéine du liquide d’ascite et aux
affections thrombogènes fréquemment associées.
Lorsque le contrôle de
l’ascite nécessite un traitement diurétique permanent, une intervention visant
à rétablir un drainage veineux hépatique à basse pression doit être envisagée.
2- Traitement des hémorragies digestives dues à l’hypertension portale
:
Les procédés dont l’efficacité a été prouvée chez les patients atteints de
cirrhose peuvent être employés chez les patients atteints de thrombose des
veines hépatiques avec les particularités suivantes.
Au cours d’une
hémorragie active, le tamponnement ou le traitement endoscopique devraient
être préférés aux agents vasoconstricteurs, aux motifs théoriques que la
réduction du débit sanguin splanchnique pourrait précipiter la constitution
d’une thrombose portale ou mésentérique, ou un infarctus intestinal lorsque
l’affection thrombogène est présente.
La prévention de la première
hémorragie comme de la récidive pourrait reposer en premier lieu sur les
agents bloquants bêta-adrénergiques parce que le traitement anticoagulant
pourrait rendre les traitements endoscopiques plus délicats.
Lorsqu’une
hémorragie récidive ou est difficile à contrôler, une intervention visant à
rétablir un drainage veineux hépatique à basse pression doit être envisagée.
D - Rétablissement d’un drainage veineux hépatique
à basse pression :
Cet aspect essentiel du traitement vise à corriger l’hypertension sinusoïdale
et portale et, ce faisant, à contrôler l’ascite et à prévenir les hémorragies
digestives. Un second objectif est de réduire l’ischémie hépatique et donc la
sévérité de l’insuffisance hépatique.
Il y a trois moyens de rétablir le drainage
veineux hépatique : la reperméabilisation des voies de drainage obstruées, la
dérivation portosystémique et la transplantation.
1- Reperméabilisation des voies de drainage veineux obstruées
:
La thrombolyse pharmacologique a donné de bons résultats dans des cas
sélectionnés.
Cependant, des échecs ont également été rapportés.
Des
séries de cas consécutifs sont nécessaires pour mieux évaluer cette technique.
Ce traitement devrait être utilisé tôt, seulement lorsque le caractère récent
d’une thrombose peut être bien établi.
Le critère du caractère récent pourrait
être une augmentation de l’activité des transaminases à plus de cinq fois la
limite supérieure de la norme.
La perfusion in situ d’agents thrombolytiques
a permis d’obtenir une reperméabilisation d’une thrombose de la veine cave
inférieure chez des patients atteints d’hémoglobinurie paroxystique
nocturne.
Quand une thrombolyse pharmacologique est envisagée, les
procédés diagnostiques invasifs doivent être évités.
L’angioplastie a été tentée chez les patients ayant une sténose courte des
veines hépatiques en utilisant la voie percutanée endoluminale.
Bien
qu’une levée immédiate de l’obstacle ait été obtenue dans la plupart des cas,
la récidive était habituelle, excepté lorsqu’un tuteur métallique expansible
(stent) avait été mis en place.
Plusieurs procédés ont été utilisés pour le
traitement direct des membranes obstruant la veine cave inférieure : la membranotomie transcardiaque, l’angioplastie percutanée transluminale en
utilisant une dilatation par ballonnets ou le laser.
La récidive de la sténose
peut survenir mais elle peut être prévenue par la mise en place d’un tuteur
métallique expansible.
Une grande variété de procédés de reconstruction
obligeant à l’utilisation d’une circulation extracorporelle a été proposée,
mais la préférence est maintenant donnée à l’angioplastie percutanée.
Ces
procédés sont justifiés seulement lorsque l’une des veines hépatiques
principales reste perméable et se draine dans le segment de la veine cave
inférieure situé en amont de l’obstacle.
La mortalité est élevée, atteignant
20 % ; cependant le taux de survie chez les patients opérés semble meilleur
que dans l’histoire naturelle.
La résection dorsocrâniale du foie avec anastomose hépatoatriale directe a été
proposée à la suite de l’observation que les veines hépatiques sont
habituellement occluses dans leur portion terminale.
Les derniers résultats
sont superposables à ceux des dérivations portosystémiques chez les malades
dont la veine porte est perméable mais dont la veine cave est occluse ou
comprimée.
Les résultats chez les patients dont la veine porte est thrombosée
sont moins impressionnants.
2- Dérivations portosystémiques
:
La transformation de la veine porte en une voie efférente est la justification
théorique de la dérivation portosystémique.
Les dérivations portocaves
latérolatérales et les dérivations mésocaves ont donné les meilleurs résultats.
L’interposition d’un greffon veineux est généralement
nécessaire. La mortalité hospitalière est comprise entre 0 et 30 %.
La plupart
des patients n’ont pas d’ascite au terme de 1 an de suivi.
La thrombose du
shunt survient chez 25 % des patients environ et est habituellement une
complication précoce.
Les suites opératoires sont simples si la fibrose
hépatique est peu marquée.
Cependant, une ascite massive peut se constituer.
Le syndrome d’hypercinésie circulatoire qui suit l’ouverture de la dérivation
peut être mal toléré.
L’ascite et l’insuffisance cardiaque ont été responsables
directement ou indirectement de décès postopératoires dans certaines
séries.
Les tests hépatiques immédiatement préopératoires et le niveau de
pression dans la veine cave inférieure ont peu de valeur pour prédire les
difficultés postopératoires.
Cependant, une pression dans la veine cave
inférieure supérieure à 20 mmHgcontre-indique généralement une dérivation
portocave ou mésocave.
Les dérivations portoatriales et mésoatriales, en utilisant de longues prothèses
synthétiques, sont une solution logique pour traiter à la fois l’occlusion des
veines hépatiques et l’occlusion de la veine cave inférieure lorsque la veine
porte est perméable.
Les résultats initiaux avaient été décevants, mais les
séries plus récentes font état de résultats similaires à ceux des dérivations portocaves ou mésocaves.
L’anastomose de la veine porte à la veine
innominée a été proposée pour éviter l’ouverture du péricarde et les risques
de tamponnade postopératoire qui lui sont liés.
Aucune étude contrôlée n’a pour l’instant été effectuée pour étayer un
éventuel bénéfice de survie chez les patients traités par la dérivation portosystémique.
L’interprétation des séries rétrospectives, même lorsque les
cas ne sont pas sélectionnés, est rendue difficile par le manque d’informations
sur la gravité initiale.
Dans notre expérience, après ajustement sur les
principaux facteurs pronostiques (âge, classification de Child-Pugh, caractère
réfractaire de l’ascite, créatininémie), il n’a pu être démontré de bénéfice de
survie chez les patients traités par dérivation.
3- Transplantation hépatique
:
La transplantation a été utilisée soit à la place de la dérivation portocave ou
mésocave, soit après échec de celle-ci.
Les résultats globaux sont
similaires à ceux des anastomoses portosystémiques mais la comparaison est
rendue difficile par le manque d’informations sur l’état des malades au
moment du traitement.
Trois questions relatives à la transplantation hépatique
méritent discussion.
La première question est celle du risque de thrombose
des anastomoses vasculaires et de la récidive des thromboses des veines
hépatiques.
Ce risque a été maîtrisé par l’administration postopératoire
précoce systématique d’anticoagulants.
La seconde question est celle du
risque d’exacerbation du syndrome myéloprolifératif en raison du traitement
immunosuppresseur. Jusqu’à présent, il n’y a aucune donnée pour justifier
cette crainte.
La troisième question, encore non parfaitement résolue, est celle
de savoir si la transplantation hépatique est un concurrent de la dérivation portosystémique, une intervention de secours après échec de la dérivation, ou
une intervention à proposer d’emblée chez les patients pour lesquels on peut
prévoir de mauvais résultats de la dérivation.
Dans la mesure où la dérivation portocave ou mésocave a donné de bons résultats chez les patients sans
atteinte sévère du foie, la transplantation hépatique devrait être réservée aux
patients ayant une cirrhose sévère ou une insuffisance hépatique fulminante.
Les excellents résultats (65 % de survie à 10 ans) dans la série de 209 cas du
registre européen de transplantation, autorise un élargissement des indications
à des patients atteints d’insuffisance hépatique marquée, mais non terminale.
E - Indications thérapeutiques
:
Les indications du procédé thérapeutique dépendent de trois éléments : la
présence ou l’absence de manifestations cliniques de la maladie, la
perméabilité de la veine cave inférieure et de la veine porte, la présence ou
l’absence d’insuffisance hépatique sévère.
Chez les patients sans
manifestations ou chez lesquels les manifestations sont facilement maîtrisées,
aucune intervention n’est justifiée.
Quand un traitement permanent est rendu
nécessaire par l’existence d’une ascite ou d’une récidive d’hémorragie
digestive, un traitement radiologique ou chirurgical doit être envisagé.
1- Veine cave inférieure perméable
:
* Veine porte perméable
:
Chez les patients sans insuffisance hépatique, une angioplastie des veines
hépatiques ne doit être tentée qu’en cas de sténose localisée.
Lorsqu’elle n’est
pas possible, une dérivation portocave ou mésocave devrait être effectuée.
En cas d’insuffisance hépatique sévère, une transplantation devrait être
envisagée.
Dans la forme fulminante, l’apparition de l’encéphalopathie
devrait conduire à une transplantation en urgence.
Dans les formes aiguës et
subaiguës, la réversibilité des signes d’insuffisance hépatique peut
généralement être espérée.
Dans la forme chronique, les signes d’insuffisance
hépatique justifient l’inscription sur la liste d’attente de transplantation.
* Veine porte thrombosée
:
En cas de thrombose étendue du système porte, ni la dérivation
portosystémique ni la transplantation hépatique ne peuvent être effectuées.
Une reperméabilisation des veines hépatiques ou de la veine cave inférieure
doit donc être tentée, en particulier par une anastomose hépatoatriale.
Cependant, l’expérience en est si limitée que son intérêt ne peut pas être
évalué.
2- Obstruction des veines hépatiques et de la veine cave inférieur
:
*
Veine porte perméable :
Chez les patients sans insuffisance hépatique, les procédés d’angioplastie
percutanée doivent être tentés en premier lieu lorsqu’ils sont réalisables.
Ces procédés ne peuvent pas être entrepris chez des patients ayant des
sténoses étendues, ni chez les patients chez lesquels aucune veine hépatique
principale ne se draine en amont de l’obstacle cave.
Quand l’angioplastie
percutanée est impossible, une dérivation mésoatriale ou méso-innominée
devrait être faite.
En cas d’insuffisance hépatique sévère, l’occlusion limitée à la portion
supra-hépatique de la veine cave ne contre-indique pas la transplantation
hépatique.
* Veine porte thrombosée
:
Dans cette situation, le choix thérapeutique est très réduit.
L’angioplastie
percutanée ou chirurgicale et l’anastomose hépatoatriale peuvent être tentées
quand l’obstruction de la veine cave supra-hépatique est limitée en étendue.
Une dérivation cave-cave peut avoir un intérêt chez certains patients en
permettant à une circulation collatérale portocave plus importante de se
développer.