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Radiologie
Tumeurs endocrines du pancréas
Cours de Radiologie
 

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Introduction :

L’intérêt porté aux tumeurs endocrines du pancréas ne se dément pas depuis près de 20 ans.

Le biologiste y trouve un remarquable modèle de recherche sur la physiologie des sécrétions hormonales.

Le clinicien, armé des nouvelles méthodes de diagnostic biologique, s’aperçoit que cette pathologie peut être bien plus fréquente qu’il ne le soupçonnait jusque-là (gastrinome), et acquiert de nouvelles armes thérapeutiques (somatostatine).

L’anatomopathologiste développe sur ce modèle des théories qui vont bien au-delà de la pathologie purement pancréatique et même digestive.

L’imagier, qui se heurte depuis toujours aux difficultés d’exploration du pancréas, s’est forgé de nouvelles armes (échographie peropératoire et endoscopique, méthodes fonctionnelles de localisation radioendocrinologiques) particulièrement adaptées aux problèmes de détection que posent ces tumeurs.

Généralités :

A - Terminologie :

La désignation de tumeur endocrine du pancréas a supplanté celle de tumeur du pancréas endocrine (ou tumeur insulaire) qui sous-entendait à tort que la tumeur ne pouvait se développer qu’à partir des cellules des îlots de Langerhans.

On sait en effet que ces tumeurs peuvent aussi se développer à partir de cellules endocrines pluripotentes (nésidioblastes) situées le long des canalicules excréteurs pancréatiques.

On rencontre encore dans la littérature les termes d’adénome (ou de carcinome) endocrine du pancréas et de nésidioblastome ; ce dernier est souvent réservé (à tort) aux tumeurs endocrines du pancréas non sécrétantes.

L’usage a consacré la dénomination des tumeurs sécrétantes par une déclinaison de leur sécrétion cliniquement parlante : insulinome, gastrinome, somatostatinome, vipome (vasoactive intestinal peptide), etc.

Dans la mesure où ces tumeurs semblent souvent multisécrétantes et où les cellules qui les composent sont pluripotentes, il serait plus juste de ne pas être aussi restrictif ; néanmoins, pour des raisons de simplification, nous en resterons à la dénomination consacrée.

B - Système APUD (amine precursor uptake decarboxylase), crête neurale, tumeurs neuroendocrines :

Certaines des tumeurs endocrines du pancréas sécrètent une hormone élaborée par le pancréas normal (insuline ou glucagon par exemple).

On les dit orthoendocrines.

D’autres sécrètent plusieurs hormones, soit à partir d’une même lésion, soit dans de multiples tumeurs intrapancréatiques.

D’autres enfin peuvent sécréter des hormones dont l’élaboration normale est extrapancréatique (gastrine par exemple) : elles sont nommées paracrines.

Cette variété sécrétoire peut s’expliquer si l’on admet que les tumeurs endocrines du pancréas se développent à partir de cellules souches parfaitement totipotentes (nésidioblastes) et aptes à se différencier vers des activités sécrétoires variées.

Ce concept est également supporté par les théories de système, telle que la théorie de Pearse qui fait dériver les cellules endocrines des éléments constitutifs de la crête neurale.

Bien que cette théorie ait subi des fortunes diverses au cours des dernières années, elle reste suffisamment didactique pour continuer de mériter droit de cité ; elle présente en particulier le mérite essentiel de souligner la grande similitude des hormones et des neurotransmetteurs ainsi que des fonctions physiologiques du système nerveux et celles du système endocrine digestif.

Les cellules endocrines digestives, dont les cellules langerhansiennes et les nésidioblastes, avaient, d’après Pearse, une origine neuroectodermique ; certaines groupées en amas (système endocrinien disséminé) comme les cellules langerhansiennes ; d’autres diffuses le long du tube digestif (système endocrinien diffus) tels les nésidioblastes.

Toutes ces cellules provenant de cellules ectodermiques ayant colonisé l’endoderme sont dites argentaffines en raison de leur capacité de réduire les sels d’argent qu’elles ont absorbés.

Les cellules argentaffines ont en commun avec certaines cellules sécrétrices spéciales extradigestives (tels les phéochromocytes) la propriété de prélever dans le sang les précurseurs d’amines biogènes et de les décarboxyler ; cette fonction est à l’origine du nom donné au système qui regroupe ces différentes cellules : le système APUD.

Les tumeurs développées à partir de cellules qui appartiennent à ce vaste système sont généralement dénommées « apudomes ».

Au début des années 1990, il a été démontré que les cellules neuroendocrines du tube digestif, du pancréas et de l’appareil respiratoire n’étaient pas d’origine neuroectodermique mais endodermique, ainsi d’ailleurs que les cellules conjonctives de la face.

Le concept de systèmeAPUDest donc actuellement abandonné au profit du terme « neuroendocrine ».

De nombreux neuropeptides ont pu être isolés de ces différents tissus puis séquencés, dosés et identifiés par immunohistochimie.

Plus récemment encore, la caractérisation phénotypique des cellules neuroendocrines est devenue possible et permet par exemple dans certaines des pathologies neuroendocrines familiales de mettre en évidence le gène de prédisposition et d’individualiser dans chaque famille les sujets avec ou sans risque.

Les tumeurs neuroendocrines familiales peuvent être ubiquitaires ou s’intégrer dans le cadre d’autres maladies (maladie de von Hippel-Lindau, neurofibromatose de type I) ou encore être associées à d’autres tumeurs, neuroendocrines ou non.

Dans ce cadre qui dépasse donc largement le cadre du pancréas, les néoplasies endocriniennes multiples de type I (NEM I) associent par exemple tumeurs de l’hypophyse, des parathyroïdes et du pancréas ; ainsi, le syndrome de Wermer associe typiquement adénome hypophysaire à prolactine, adénome parathyroïdien et tumeur endocrine du pancréas.

C - Épidémiologie :

Les tumeurs endocrines du pancréas sont des tumeurs rares.

L’insulinome et le gastrinome (syndrome de Zollinger-Ellison [SZE]) en sont de loin les plus fréquentes (de l’ordre de 1 cas par million d’habitants par an), devant le glucagonome et le vipome, de l’ordre de 100 à 200 cas décrits dans la littérature.

Le SZE, initialement considéré comme d’une grande rareté, apparaît maintenant comme une lésion assez fréquente depuis que le dosage de la gastrine est largement accessible : potentiellement 4 à 6 000 cas en France, ce qui est très loin du chiffre effectivement rapporté et laisse donc entendre que les formes frustes sont largement méconnues.

D - Anatomopathologie :

1- Malignité :

Toutes les tumeurs endocrines du pancréas sont potentiellement malignes.

Il ne s’agit cependant pas d’une malignité cellulaire, ni même tissulaire locale, au sens habituel du terme.

Seule la constatation de métastases, généralement ganglionnaires locorégionales ou hépatiques, permet de se prononcer avec certitude.

Rien ne permet en effet la plupart du temps, à l’examen « conventionnel » de la tumeur pancréatique, de différencier une forme « bénigne » d’une forme maligne métastasée.

Le pronostic d’une tumeur neuroendocrine dépend actuellement assez étroitement du degré de différenciation et passe aussi par l’étude immunohistochimique des marqueurs de prolifération.

La plus grande prudence est de toute façon de rigueur dans ce domaine car, de surcroît, l’évolution des formes malignes (même métastatiques) peut être d’une extrême lenteur (plus de 10 ans).

Tous les types de tumeurs endocrines du pancréas n’ont cependant pas le même potentiel d’évolution maligne.

L’insulinome est presque toujours d’évolution bénigne, le gastrinome présente des critères de malignité dans environ deux tiers des cas, le glucagonome est presque constamment malin d’emblée. Les métastases elles-mêmes ne présentent pratiquement pas de critères histologiques de malignité.

De plus, elles peuvent fort bien se différencier de la lésion primitive par des sécrétions hormonales, voire une réponse au traitement, différentes.

2- Caractères macroscopiques :

La taille tumorale au moment du diagnostic est variable d’un type tumoral à l’autre ; elle conditionne les difficultés de mise en évidence par les examens morphologiques.

Il n’y a pas de corrélation directe entre la taille de la lésion et l’intensité de l’hypersécrétion et donc des symptômes.

L’insulinome mesure moins de 15 mm environ deux fois sur trois ; les gastrinomes sont généralement encore plus petits ; les autres types tumoraux sont en revanche en règle beaucoup plus volumineux au moment du diagnostic et leur mise en évidence ne pose, sauf exception, aucun problème.

Les formes occultes, où une lésion microscopique n’est découverte qu’après examen minutieux de dizaines de coupes de la pièce d’exérèse, ne sont donc pas exceptionnelles, surtout depuis que l’imagerie fonctionnelle permet de localiser les tumeurs indépendamment de leur taille.

Ces différences sont liées à l’efficacité plus ou moins grande des mécanismes compensateurs suscités par l’hypersécrétion hormonale anormale : le glucagonome est volumineux car les mécanismes compensateurs de l’hypersécrétion de glucagon sont efficaces, le gastrinome est parlant dès le stade microscopique car l’hypersécrétion de gastrine n’a pas de compensation, les tumeurs non sécrétantes, sauf découverte fortuite, sont évidemment très volumineuses.

Le caractère éventuellement multiple des lésions tumorales intrapancréatiques est à prendre en compte.

Le SZE s’accompagne par exemple de tumeurs multiples, sinon diffuses, une fois sur deux ; inversement, insulinome, vipome, glucagonome sont en règle uniques et évoluent très rarement dans un contexte de NEM.

La localisation de la tumeur dans la glande pancréatique, quel qu’en soit le type, peut aussi bien être céphalique que corporéale ou caudale, ce qui interdit définitivement les résections chirurgicales à l’aveugle dans les formes « occultes », en particulier dans l’insulinome qui se trouve avec une égale fréquence dans la tête ou dans la queue.

L’existence de localisations ectopiques est possible mais d’importance variable : exceptionnelle pour l’insulinome, une fois sur cinq environ pour le gastrinome ou le vipome.

La tumeur proprement dite peut être encapsulée (surtout dans les formes de petite taille), ou non.

Elle est superficielle (voire parfois pratiquement de développement exopancréatique) ou au contraire profonde et très difficile à repérer à la palpation chirurgicale.

Les tumeurs les plus volumineuses adhèrent souvent aux organes de voisinage et correspondent à des carcinomes.

Diagnostic :

A - Clinique :

Quand elles sont sécrétantes, ces tumeurs ont en commun de se révéler par des symptômes très courants, conséquence de l’hypersécrétion anormale : diarrhée, ulcère, troubles neuropsychiques, diabète… dont ce n’est que l’intensité ou le caractère résistant aux traitements habituels qui alarme et finit par attirer l’attention vers une étiologie aussi rare.

Il est ainsi tout à fait remarquable de se trouver en présence d’une pathologie tumorale dont l’expression clinique n’est pratiquement jamais le syndrome tumoral.

Quand elles sont non sécrétantes, le syndrome tumoral est alors révélateur.

Comme pour toutes les tumeurs du pancréas, on se trouve souvent d’emblée devant une lésion extrêmement volumineuse.

Ceci est d’autant plus vrai que les tumeurs endocrines du pancréas, même très grosses et céphaliques, ont peu ou pas de retentissement biliaire.

La lenteur de l’évolution clinique, y compris dans certaines formes malignes et métastatiques, a déjà été soulignée.

B - Diagnostic biologique :

La confirmation du diagnostic des formes sécrétantes repose toujours sur la constatation d’une hypersécrétion hormonale permanente et autonome.

Les examens radiologiques n’ont d’intérêt que localisateur et il n’est pas concevable de leur accorder un rôle dans le diagnostic positif ; autrement dit, les explorations morphologiques ne peuvent en aucun cas précéder le temps incontournable du diagnostic biologique.

En corollaire, il faut savoir qu’une hypersécrétion hormonale ne suffit pas à elle seule à affirmer le diagnostic de tumeur endocrine du pancréas, aussi bien que la normalité des sécrétions ne l’exclut pas.

Le radiologiste doit donc être averti des principales causes d’hyperhormonémie, autres que tumorales pancréatiques.

1- Diagnostic localisateur préopératoire :

Le traitement idéal étant chirurgical, la localisation précise des lésions tumorales, si possible en préopératoire, revêt une grande importance.

2- Imagerie morphologique : techniques et sémiologie

* Abdomen sans préparation (ASP) :

Du fait de leur petite taille, ces tumeurs sont peu parlantes, les syndromes de masse étant généralement trop discrets pour être mis en évidence sur un ASP.

De même, les calcifications qui traduisent des remaniements hémorragiques anciens ne surviennent que dans des tumeurs suffisamment volumineuses.

Des calcifications ont été décrites de façon exceptionnelle dans de grosses tumeurs malignes ou leurs métastases : elles prennent un aspect grossier, nodulaire et localisé qui doit les différencier d’une pancréatite.

* Opacifications du tube digestif et des voies biliaires :

Leurs indications sont exceptionnelles en dehors du SZE où le transit oesogastroduodénal et le transit du grêle mettent en évidence les conséquences de l’hypersécrétion gastrique acide.

Il ne faut pas oublier que certains SZE se présentent comme une diarrhée apparemment isolée et il convient donc d’être à même d’évoquer le SZE sur les signes radiologiques qui en sont évocateurs.

Les opacifications biliaires n’ont pratiquement plus cours.

En tout état de cause, le faible retentissement biliaire des tumeurs endocrines du pancréas sur la voie biliaire principale, même lorsqu’elles sont volumineuses (car elles sont peu infiltrantes), est remarquable et fait que l’ictère y est exceptionnel.

* Échographie :

Les tumeurs les plus petites se présentent généralement sous la forme de nodules bien limités, de structure homogène, hypoéchogènes, arrondis ou ovalaires.

Sauf exception, l’échographie ne détecte que les lésions dont le diamètre est supérieur ou égal à 10 mm.

Parfois, une fine capsule hyperéchogène peut être mise en évidence dans les insulinomes. Exceptionnellement, l’aspect peut être trompeur : des formes kystiques ont été en particulier rapportées.

Dans les formes plus volumineuses, la structure échographique est généralement hétérogène et des zones de nécrose liquidienne ou d’hémorragies peuvent être visibles.

La sensibilité de l’échographie, de 25 à 65 %, dépend étroitement de l’expertise de l’opérateur ; en revanche, sa spécificité reste médiocre en l’absence d’informations cliniques évocatrices de tumeur endocrine.

L’examen échographique doit également s’attacher à rechercher des adénopathies duodénopancréatiques, coeliomésentériques et du pédicule hépatique, ainsi que des métastases hépatiques.

L’aspect des métastases, lorsqu’elles sont de petite taille, est volontiers hyperéchogène, pouvant simuler un hémangiome.

Très volumineuses, elles présentent souvent une nécrose centrale importante, parfois avec un niveau liquide-liquide.

Les métastases ganglionnaires ont un aspect échographique identique à celui des petits adénomes, la différenciation ne pouvant être faite que sur des arguments topographiques, ce qui n’est pas toujours facile, certaines adénopathies étant au contact de la glande et certaines tumeurs se développant de façon presque pédiculée.

L’étude des gros troncs veineux péripancréatiques doit être systématique, à la recherche d’un envahissement qui signerait la malignité, de même qu’exceptionnellement, le développement d’un bourgeon tumoral endoveineux.

* Échoendoscopie :

La sonde d’échographie est solidaire de l’extrémité d’un endoscope à vision latérale.

Pour faciliter la transmission, l’estomac est rempli d’eau et, pour améliorer le contact sonde/muqueuse, un ballon gonflable à l’eau recouvre le transducteur.

La rotation du transducteur, de fréquence 7,5 à 12,5 MHz, donne des images axiales sur 360°, perpendiculaires au grand axe de l’endoscope.

La tête du pancréas est explorée à travers le duodénum, alors que le corps et la queue sont bien examinés à travers la face postérieure de l’estomac.

La résolution élevée et l’absence d’interposition gênante permettent de mettre couramment en évidence des lésions de 6 mm ; des lésions de 2-3 mm ont même pu être vues.

La détection s’avère la plus difficile quand la tumeur est inférieure à 10 mm, pédiculée ou isoéchogène au parenchyme pancréatique.

La paroi duodénale peut également être finement étudiée, particulièrement à la recherche des gastrinomes extrapancréatiques.

Les appareils les plus récents permettent aussi de pratiquer des biopsies guidées à l’aiguille fine qui doivent encore réduire le taux de faux positifs.

En revanche, la profondeur d’exploration reste limitée à 6-8 cm de la sonde, ce qui ne permet pas d’explorer convenablement les tumeurs volumineuses (et généralement non sécrétantes).

De même, le bilan d’extension à distance des lésions malignes ne peut être pris en charge par cette méthode d’imagerie strictement locorégionale.

La sémiologie échographique est comparable à celle de l’échographie transabdominale.

La finesse des images obtenues permet toutefois de mettre plus souvent en évidence de petites calcifications, des hétérogénéités de structure interne ou, en cas de lésions malignes, des irrégularités de contour ou des adénopathies péripancréatiques.

L’échoendoscopie a démontré sa supériorité sur l’échographie transabdominale, le scanner et l’artériographie.

Pour les équipes expérimentées, son taux de détection des tumeurs endocrines du pancréas est de 82 à 87 % et sa spécificité proche de 95 % lorsque la clinique est parlante.

* Tomodensitométrie :

L’examen scanographique doit bien explorer toute la glande, particulièrement au niveau de la tête dont l’étude ne doit s’arrêter vers le bas que lorsque le troisième duodénum a été concerné par les coupes.

L’opacification gastroduodénale est essentielle au bon repérage des éléments du bloc duodénopancréatique et à la recherche d’un envahissement digestif.

Le foie devra toujours être totalement exploré, à la recherche de métastases, souvent synchrones en cas de formes malignes ou de tumeurs volumineuses (sécrétantes ou non).

Sans injection de produit de contraste, les petites tumeurs sont généralement isodenses.

La constatation de petites calcifications punctiformes est possible mais rare.

Les tumeurs plus volumineuses sont volontiers hétérogènes avec des zones hypodenses de nécrose.

Le diagnostic de la tumeur repose sur sa mise en évidence après injection intraveineuse de produit de contraste.

L’injection en bolus rapide avec étude dynamique (quatre à six coupes sur le même niveau, en 30 secondes environ, débutées 15 à 20 secondes après le début de l’injection) permet de mettre en évidence le caractère hypervasculaire de la plupart des tumeurs.

Les petites tumeurs sont le plus souvent hyperdenses homogènes ; quelquefois, la lésion se présente sous forme d’une image hypodense entourée d’un anneau hyperdense.

Le choix du niveau de coupe adéquat est évidemment de première importance.

La détection préalable d’une lésion ou d’une zone suspecte par échographie peut aider à choisir ce niveau.

Lorsque la lésion est suffisamment volumineuse, ou suffisamment périphérique pour déformer le contour de la glande, on dispose également d’une orientation utile pour conduire l’examen.

Après injection, les petites tumeurs endocrines pancréatiques présentent le plus souvent un renforcement homogène mais transitoire (de l’ordre de 1 à 2 minutes), si bien que sur des coupes un peu trop tardives, la lésion peut être redevenue parfaitement isodense.

Lorsque plusieurs injections successives sont nécessaires, le renforcement de la tumeur tend à diminuer, car le parenchyme pancréatique normal se sature progressivement en contraste et rehausse sa densité.

Le diagnostic différentiel des tumeurs non sécrétantes volumineuses est difficile ; leur aspect de nécrose centrale entourée d’une couronne hypervasculaire se rencontre également dans les adénocarcinomes macrokystiques, les carcinomes à cellules acineuses et certaines métastases ; la constatation d’une infiltration péripancréatique et la précocité de l’obstruction canalaire (biliaire ou pancréatique) sont plutôt en faveur d’une tumeur d’origine exocrine.

L’utilisation d’un scanner spiralé ou hélicoïdal surmonte la difficulté de choisir le bon niveau de coupes.

En revanche, dans la mesure où le pancréas est exploré en totalité en 15 secondes, il est plus difficile de choisir le temps de coupe après injection qui corresponde au meilleur renforcement tumoral.

Il faut en particulier veiller, chez un sujet âgé et/ou à circulation un peu lente, à ne pas avoir coupé tout le pancréas avant le début du renforcement.

L’injection intra-artérielle de contraste (artérioscanner dynamique) vise à améliorer la détection tumorale au prix de l’injection d’une faible quantité de contraste.

Les aspects rapportés sont assez variables : hyperdense, hypodense, hypodense avec halo hyperdense.

Cette technique permettrait entre autres de mieux détecter les rares formes relativement hypodenses.

L’expérience reste toutefois trop limitée pour pouvoir actuellement définir clairement la place de cette exploration, du moins tant qu’elle ne pourra pas être considérée comme le complément simple et naturel d’une exploration artérielle indiquée par ailleurs (artériographie diagnostique ou test de stimulation intraartériel).

À défaut d’injecter simultanément le tronc coeliaque et la mésentérique supérieure (ce qui alourdit singulièrement la technique), le remplissage partiel du pancréas (et les fausses images qu’il induit) restera néanmoins une limite à la méthode.

* Imagerie par résonance magnétique (IRM) :

L’IRM a été en mesure de mettre en évidence quelques cas de petites tumeurs endocrines du pancréas.

Néanmoins, après quelques publications anciennes et ponctuelles intéressantes, l’expérience reste encore trop limitée et les résultats trop modestes pour accorder actuellement une place prépondérante à l’IRM dans l’exploration de ces tumeurs.

L’aspect le plus fréquemment rencontré semble être un hyposignal modéré sur les séquences en écho de spin pondérées en T1 et un signal iso-intense ou discrètement hyperintense sur les séquences pondérées en T2.

Le contraste de l’image tumorale est renforcé quand le pancréas est lipomateux.

Les difficultés rencontrées tiennent à la petite taille des lésions associées et aux nombreux artefacts de volume partiel dans cette région, liés aux mouvements respiratoires et digestifs.

L’injection en bolus de gadolinium-DTPA (acide diéthylène triamine penta-acétique) au cours d’acquisitions rapides (de type flash, turboflash…) peut permettre de mettre en évidence le caractère hypervasculaire, intense et transitoire, de la plupart de ces tumeurs.

En l’absence d’un syndrome sécrétoire évocateur, le diagnostic différentiel est aussi difficile que pour le scanner, et repose sur la même analyse.

* Octréoscan :

À la multiplicité des fonctions, des localisations et des formes moléculaires de la somatostatine correspond une diversité de sous-types (sst) de récepteurs.

Les gènes de cinq sous-types ont été séquencés et clonés (sst 1 à 5).

Un analogue de la somatostatine, l’octréotide, marqué par In111 DTPA-D-Phe, peut être détecté par scintigraphie (octréoscan).

Sa fixation sur un tissu exprime donc la présence en quantité suffisante des sous-types pour lesquels il a une affinité importante : avant tout sst 2 (et à un bien moindre degré sst5 et peut-être sst 3).

Les récepteurs de la somatostatine sont présents dans les tumeurs endocrines du pancréas (y compris dans les tumeurs non sécrétantes) mais l’expression de chaque sous-type varie selon le type tumoral ; sst 2 est ainsi rencontré dans 73 % des tumeurs carcinoïdes et 80 % des tumeurs non fonctionnelles des îlots de Langerhans ; sur de petites séries étudiées, sa présence dans les insulinomes a été plus faible que dans les gastrinomes ; il a également été rencontré dans les glucagonomes.

En dehors des tumeurs carcinoïdes et du bilan d’extension des formes métastatiques où l’intérêt de l’octréoscan est admis par la plupart des équipes, le rôle de cet examen dans la détection des petites tumeurs semble très faible.

Il faut aussi noter, contrairement à ce qu’on aurait pu espérer, qu’il n’existe pas de corrélation entre la probabilité de répondre au traitement par octréotide ou somatostatine et la positivité de l’octréoscan.

* Artériographie :

Les tumeurs endocrines du pancréas sont généralement considérées comme un des grands succès de l’artériographie diagnostique, certaines courtes séries allant jusqu’à faire état de 100 % de positivité.

S’il est vrai que les signes peuvent en être particulièrement caractéristiques, la réalité sur toutes les séries de plus de 50 cas est toute autre, ne dépassant certainement pas 50 % de positivité.

Lorsque la tumeur est volumineuse, elle est le plus souvent globalement hypervasculaire avec des zones hypodenses centrales ; ce n’est sans doute pas dans ces cas que l’artériographie est la plus contributive mais elle y a malgré tout le mérite de différencier assez clairement une tumeur endocrine non sécrétante d’un adénocarcinome pancréatique.

Quand la tumeur est de petite taille, les signes les plus caractéristiques en sont :

– l’opacification précoce à partir d’une vascularisation périphérique (c’est un adénome) qui réalise un petit syndrome de masse très localisé ; ce corbeillage peut être identifié assez facilement s’il concerne des vaisseaux intrapancréatiques, car seules les branches artérielles qui contournent un bord du pancréas sont susceptibles à l’état normal de présenter des boucles.

Le corbeillage est un signe essentiel, présent même si la lésion est hypo- ou isodense ;

– au temps capillaire, l’opacification de la lésion est homogène, parfaitement bien limitée et plus ou moins hypervasculaire en fonction de sa nature propre et du degré de sélectivité de l’injection artérielle ;

– sur les temps tardifs, l’hypervascularisation s’efface souvent assez rapidement et peut avoir disparu à la 15e seconde.

Les principaux faux positifs sont : une rate accessoire (son mode de vascularisation est de type hilaire ; elle reste hyperdense plus longtemps, sa dynamique se rapprochant de celle de la rate normale), une adénopathie métastatique (rien ne permet de la différencier de l’adénome, ce qui n’est pas sans poser un grave problème dans le SZE), une lésion ulcéreuse du duodénum, fréquente dans le SZE (volontiers hypervasculaire mais sans syndrome de masse), la simple visualisation en enfilade d’une queue de pancréas à direction antéropostérieure.

Les faux négatifs, outre les lésions trop petites et trop peu vasculaires pour être visualisées, sont le plus souvent le fait d’erreurs d’interprétation anatomique qui conduisent sans le savoir à n’opacifier le pancréas que partiellement.

Il faut à ce sujet insister sur l’importance d’opacifier systématiquement au moins le tronc coeliaque et l’artère mésentérique supérieure car certaines tumeurs (comme certaines têtes de pancréas) peuvent n’être vascularisées que par la mésentérique supérieure…

Insistons aussi sur le fait que des prodiges de sélectivité de cathétérisme sont loin d’être garants d’un meilleur diagnostic s’ils précèdent les injections plus globales : générateurs de spasmes, ils peuvent à l’occasion conduire au contraire à masquer la lésion…

3- Imagerie fonctionnelle :

* Test au calcium intra-artériel :

Le principe de cet examen est de localiser la région où se trouve une lésion sécrétante en identifiant le pédicule artériel qui, sélectivement perfusé d’un sécrétagogue, stimule la sécrétion tumorale et élève donc significativement, et au premier passage, le taux circulant du produit sécrété.

Le sécrétagogue est injecté successivement et sélectivement dans les différentes artères vascularisant le pancréas : au moins splénique, gastroduodénale, mésentérique supérieure, et si possible pancréatique dorsale, pancréatique transverse, arcades céphaliques.

En cas de suspicion de métastases hépatiques, l’artère hépatique propre doit également être infusée. Le sécrétagogue utilisé pour la localisation du gastrinome est la sécrétine, à la dose de 20-30 unités diluées dans 5 mL de sérum physiologique.

En cas d’insulinome, le calcium est choisi à la dose de 0,01 (chez les patients obèses) à 0,025 mEq de Ca2+ /kg (chez un patient non obèse), sous forme de gluconate de calcium dilué en quantité ad hoc dans 5 mLde sérum physiologique.

Des doses plus faibles, de 0,00625 mEq de Ca2+ /kg, se sont aussi révélées efficaces, tout en réduisant le risque d’hypoglycémie pendant le geste.

Les prélèvements veineux sont effectués dans la veine sus-hépatique droite ou gauche ; pour explorer efficacement le premier passage, les prélèvements sont faits avant injection puis 30, 60, 90 et 120 secondes après.

L’intérêt du dosage à 120 secondes est discuté par certains ; néanmoins, dans notre expérience, le gradient maximal était noté à 120 secondes dans un tiers des cas.

Dans le SZE, le test est généralement considéré positif dans une artère quand l’élévation du taux de gastrine dépasse 120 % après 40 secondes ou quand le gradient post/préinjection est supérieur à 50 %après 30 secondes.

Dans l’insulinome, le test au calcium intraartériel a permis une localisation correcte dans les quatre premiers cas rapportés, le critère de positivité retenu étant un doublement de l’insuline à 30 ou 60 s.

* Localisation par prélèvements veineux pancréatiques :

+ Méthodes :

Les techniques d’abord et de cathétérisme du système porte permettent de réaliser des prélèvements de sang veineux pancréatique efférent pour localiser les tumeurs sécrétantes.

La justification de la méthode tient :

– à la petite taille des tumeurs endocrines pancréatiques les plus fréquentes (insulinome, gastrinome) qui met souvent en défaut les méthodes de localisation morphologiques ;

– à l’existence possible de micropolyadénomatoses ou d’hyperplasie qui sont obligatoirement méconnues par les examens morphologiques.

Les prélèvements veineux pancréatiques contournent ces difficultés en localisant la tumeur non par le volume qu’elle occupe mais par la sécrétion anormale qu’elle produit et qu’elle déverse dans ses veines de drainage, dont nous avons vu que l’intensité était indépendante du volume tumoral.

Cette investigation nécessite donc d’établir une cartographie veineuse pancréatique la plus complète possible pour chaque cas étudié, cartographie sur laquelle seront reportés, point par point, les résultats des dosages hormonaux.

Une connaissance précise de l’anatomie des veines pancréatiques et péripancréatiques est donc indispensable à la réalisation et à l’interprétation de l’examen.

+ Anatomie des veines pancréatiques :

Comme toujours pour les systèmes veineux, les variations individuelles sont fréquentes et imposent une interprétation personnalisée de chaque examen.

Un schéma d’ensemble qui se décompose en trois systèmes : tête, corps et queue, isthme, peut cependant être décrit et servir de référence.

Veines de la tête du pancréas.

Ce système est constitué de trois arcades superficielles (postérieure, antérieure, inférieure) et une arcade intraglandulaire.

Il possède trois veines efférentes principales : les veines pancréaticoduodénales postérosupérieure, antéro-inférieure et postéro-inférieure.

– Veine pancréaticoduodénale postérosupérieure : dans notre expérience, c’est le pédicule de drainage principal de la tête dans 94 % des cas.

Elle se jette dans la face postérodroite des deux tiers inférieurs du tronc porte proprement dit, bien plus rarement dans l’angle qu’il forme avec la veine mésentérique supérieure, et de façon exceptionnelle dans la veine mésentérique supérieure.

Du fait de l’importance fonctionnelle de cette veine dans le drainage de la tête, les tumeurs céphaliques sécrétantes, quel que soit leur siège, se drainent de façon élective dans ce pédicule plus d’une fois sur quatre ; son cathétérisme est donc impératif.

– Veine pancréaticoduodénale antéro-inférieure : elle se jette généralement dans le tronc gastrocolique.

Rappelons que ce dernier n’est pas constant et que ses branches de formation peuvent se jeter individuellement, ou incomplètement réunies, dans la veine mésentérique supérieure.

– Veine pancréaticoduodénale postéro-inférieure : elle se jette le plus souvent dans la première veine jéjunale ; parfois, son abouchement glisse jusqu’à la deuxième jéjunale.

– Arcade veineuse céphalique postérieure : elle est tendue entre la branche interne de la veine postérosupérieure et la branche supérieure de la veine postéro-inférieure.

Elle circule à la face postérieure de la glande et des vaisseaux mésentériques supérieurs.

Elle est généralement facile à identifier, nettement en dedans des autres arcades de la tête, d’autant que contrairement à ces dernières, elle est souvent rectiligne ou seulement discrètement concave en haut et à gauche.

Elle reçoit peu de veines duodénales comparé à l’arcade antérieure.

– Arcade veineuse céphalique inférieure : elle est tendue entre la branche interne de la veine antéro-inférieure et la branche inférieure de la veine postéro-inférieure.

Elle longe le processus unciné du pancréas et le duodénum ascendant dont elle reçoit respectivement des branches.

Elle passe en arrière des vaisseaux mésentériques supérieurs.

Elle est facile à identifier par sa situation très inférieure, longeant très précisément le bord duodénal, décrivant une concavité supérieure très marquée.

– Arcade veineuse céphalique antérieure : elle est tendue entre la branche externe de la veine postérosupérieure et la branche externe de la veine antéro-inférieure.

Elle contourne le cholédoque par en dehors.

Il s’agit de l’arcade céphalique la moins facile à identifier clairement sur les phlébographies en raison de ses superpositions avec les multiples et volumineux pédicules duodénaux qu’elle reçoit, ainsi qu’avec les veines antrales et pyloriques qui se drainent dans la gastroépiploïque droite.

Sa disposition générale est plutôt verticale, légèrement concave à gauche ; c’est généralement l’arcade la plus externe sur presque tout son trajet.

– Arcade veineuse céphalique intrapancréatique : elle est tendue entre la branche moyenne de la veine postérosupérieure et la branche moyenne de la veine antéro-inférieure.

Elle descend entre le cholédoque et le canal pancréatique, et entre les deux canaux pancréatiques.

Elle n’est que rarement clairement identifiable en angiographie ; elle se projette alors verticalement entre les arcades antérieure (plus externe) et postérieure (plus interne).

– Anastomoses des veines céphaliques : outre leurs anastomoses avec les veines pancréatiques isthmiques et corporéales, les veines céphaliques sont anastomosées avec les veines coliques moyennes, les veines gastriques, les veines biliaires et le système porte intrahépatique. Veines du corps et de la queue du pancréas.

Deux systèmes veineux s’associent dans le drainage corporéal et caudal du pancréas : de multiples veines à disposition plutôt verticale qui se jettent dans la veine splénique, homologues des artères pancréatiques corporéales, et un axe veineux à disposition horizontale, homologue de l’artère pancréatique transverse.

– Veines pancréatiques corporéales : elles sont constantes et se jettent dans la veine splénique.

La veine gastrique gauche reçoit parfois à sa terminaison une importante veine pancréatique qui draine la partie droite du corps.

La veine gastroépiploïque gauche reçoit pour sa part une ou plusieurs petites veines qui drainent l’extrémité gauche de la queue, homologues des artères pancréatiques caudales.

En fonction des rapports de la veine splénique et du pancréas, elles peuvent avoir aussi bien un trajet descendant qu’ascendant ; au niveau de la partie droite du corps, elles ont plus souvent un trajet ascendant presque vertical, la veine splénique étant généralement située plus crânialement que le pancréas.

À la partie moyenne et gauche du corps, leur trajet est habituellement nettement oblique vers la gauche, et se rapproche de l’horizontale.

– Veine pancréatique transverse : elle représente l’axe de drainage longitudinal du corps et de la queue. Nous avons trouvé une ou plusieurs veines pancréatiques transverses bien individualisées dans 56 cas sur une série de 100 phlébographies complètes.

Dans trois cas, deux veines transverses d’égale importance coexistaient.

La veine pancréatique transverse se jette dans la veine mésentérique inférieure une fois sur deux, mais semble-t-il seulement lorsque cette dernière se draine très à droite, dans la veine mésentérique supérieure ou l’angle qu’elle fait avec la veine splénique ; dans les autres cas, elle se draine avant tout dans la terminaison de la veine splénique.

– Anastomoses : les veines corporéales sont largement anastomosées entre elles ainsi qu’à la veine pancréatique transverse.

Quand cette dernière n’est pas clairement individualisée, les anastomoses longitudinales des veines corporéales entre elles en constituent l’équivalent.

Les deux systèmes veineux sont anastomosés aux autres veines pancréatiques, isthmiques et céphaliques.

Comme les artères homologues, elles sont anastomosées aux veines coliques moyennes et aux veines de l’angle colique gauche, aux veines gastriques et aux veines épiploïques, selon un trajet homologue à celui des anastomoses artérielles.

Veines de l’isthme.

Elles constituent avant tout un pont anastomotique entre les systèmes céphalique et corporéal.

Il existe cependant un drainage isthmique assez souvent bien individualisé, par l’intermédiaire de deux veines isthmiques.

Sur les phlébographies pancréatiques, une veine isthmique est identifiée par sa topographie médiane et ses anastomoses aussi bien avec les arcades céphaliques qu’avec le système veineux corporéal.

– Veine isthmique supérieure : elle se jette dans la terminaison de la veine splénique, généralement sur son bord supérieur.

Nous avons également vu son abouchement glisser sur la veine gastrique gauche ou la veine mésentérique supérieure.

– Veine isthmique postérieure : elle se jette dans la veine mésentérique inférieure, généralement très près de sa terminaison.

Elle se jette parfois dans la veine mésentérique supérieure, juste sous l’angle qu’elle fait avec la splénique, dans une veine colique moyenne accessoire se drainant dans la mésentérique supérieure, voire dans la veine splénique.

+ Technique et méthodologie :

La technique d’abord du système porte est largement décrite dans la littérature.

Pour des raisons de confort, l’examen est généralement réalisé sous anesthésie générale ; dans ce cas, il est important de s’assurer de l’absence d’interférence entre les drogues utilisées et le métabolisme des hormones dosées.

La technique des prélèvements est assujettie à des règles qui permettent de limiter les artefacts et les erreurs d’interprétation :

– il est indispensable de réaliser des prélèvements pancréatiques sélectifs car les dosages effectués dans les gros troncs exposent à des erreurs d’interprétation très graves du fait de l’écoulement systématiquement laminaire du sang à leur niveau ;

– la présence de produit de contraste iodé dans l’échantillon sanguin peut perturber le dosage radio-immunologique hormonal au-delà d’un certain seuil (30 % dans l’échantillon prélevé pour la gastrine).

Ceci peut être évité en réalisant les prélèvements, soit avant toute injection locale, soit après aspiration soigneuse du contraste ;

– dans notre expérience, la localisation des insulinomes et des gastrinomes n’a pas bénéficié de la pratique de tests de stimulation ou de sensibilisation.

En cas d’insulinome, il semble en revanche essentiel de maintenir le patient en état de glycémie basse et stable, ce qui implique un monitoring précis durant l’examen.

Le but en est de déprimer préférentiellement la sécrétion physiologique puisque la sécrétion tumorale est en principe peu sensible au stimulus glucose.

Les médications hyperglycémiantes doivent être interrompues au moins 2 jours avant l’examen ; en cas de gastrinome, le traitement anti-H2 est en revanche poursuivi puisqu’il ne modifie pas la sécrétion gastrinique et que son arrêt fait courir un risque d’aggravation de la maladie ;

– ces précautions étant prises, les erreurs d’interprétation persistantes sont liées d’une part à l’anatomie (erreurs par défaut), et d’autre part à une connaissance imparfaite de la cartographie sécrétoire normale (risque d’erreurs par excès).

+ Indications :

Rappelons que cet examen ne doit être proposé qu’à titre purement localisateur chez des patients dont le diagnostic est par ailleurs formellement établi.

À cet égard, il faut souligner que si une sécrétion pancréatique de gastrine est en soi anormale (encore que la distinction entre une sécrétion duodénale et pancréatique céphalique soit pratiquement impossible), il n’en est pas de même pour l’insuline.

Par ailleurs, les taux normaux sont obligatoirement plus élevés dans les veines de la queue (qui ne drainent que le pancréas) que dans les veines de la tête (où le sang pancréatique est dilué par du sang en provenance du duodénum).

Dans notre expérience, les patients porteurs de tumeurs sécrétant de l’insuline présentaient toujours des taux périphériques élevés pendant l’examen (systématiquement effectué en état de glycémie basse), à l’inverse des sujets normaux.

Au contraire, certains patients avec insulinome avaient un taux d’insuline, dans la veine de drainage de la lésion, inférieur en valeur absolue aux chiffres parfois rencontrés au même endroit chez le sujet normal.

+ Résultats d’ensemble :

L’efficacité localisatrice des prélèvements veineux se situe, suivant les séries, entre 90 et 100 %.

Notre expérience nous amène à proposer une stratégie différente suivant le type de tumeur sécrétante à localiser.

Nous rapportons ces résultats plus loin pour chaque type tumoral.

C - Localisation peropératoire :

1- Palpation chirurgicale :

L’inspection et la palpation chirurgicales échouent dans le repérage des petites tumeurs dans 15 à 50 % des cas selon les séries et le type tumoral.

2- Échographie peropératoire :

L’exploration peropératoire du pancréas nécessite l’ouverture chirurgicale de l’arrière-cavité des épiploons.

Après libération du pancréas, qui permet une exploration adéquate du corps et de la queue, la cavité abdominale est remplie de sérum, et le pancréas est exploré par des coupes sagittales et longitudinales à l’aide d’une sonde généralement de 10 MHz.

L’étude optimale de la tête, du crochet et de la paroi duodénale nécessite une mobilisation manuelle de ces structures, et donc un large décollement.

Les lésions sont généralement hypoéchogènes, souvent avec un bord discrètement échogène.

Parfois, la lésion apparaît isoéchogène ou hyperéchogène avec un halo périphérique hypoéchogène, en particulier chez l’enfant où le tissu pancréatique normal est volontiers moins échogène.

Des limites tumorales peu nettes, l’occlusion du Wirsung sont des signes en faveur de la malignité.

La sensibilité est élevée, des tumeurs de seulement 3 mm ayant pu à l’occasion être détectées.

L’association échographie/palpation peropératoire améliore la sensibilité.

La détection des insulinomes est meilleure que celle des gastrinomes, dont les fréquentes formes ectopiques de la paroi duodénale sont difficilement vues.

La sensibilité diminue également en cas d’insulinomes multiples de petite taille, comme on en rencontre au cours des NEMI.

Dans une étude de 44 patients opérés pour suspicion de tumeur endocrine pancréatique, la sensibilité de l’échographie peropératoire était de 86 % pour les insulinomes et de 83 % pour les gastrinomes ; en revanche, le taux de faux positifs était de 25 %, habituellement dû à du tissu pancréatique ectopique ou à des ganglions lymphatiques.

L’échographie peropératoire est particulièrement utile au chirurgien chez les patients ayant des antécédents de chirurgie pancréatique où la palpation est perturbée par la réaction inflammatoire.

De même, l’étude des rapports précis avec les canaux pancréatique et biliaire ou la constatation de signes de malignité peuvent aider utilement au choix du type de résection.

À l’opposé, cette exploration allonge la durée de l’intervention, n’est pas très fiable pour la détection des lésions extrapancréatiques et explore difficilement la queue avec finesse sans sa mobilisation, ainsi que celle de la rate, en dehors du rétropéritoine.

Enfin, les duodénopancréatectomies entraînées par un faux positif non palpé dans la tête ont une morbidité et une mortalité élevées, jusqu’à 30 % pour certains.

3- Dosages veineux peropératoires :

Dans les cas où la lésion n’est pas repérée pendant l’exploration chirurgicale, certains ont proposé des exérèses gauches étendues vers la droite tant que la preuve biologique que la tumeur avait été emportée n’était pas obtenue (augmentation de la glycémie dans les 30 ou 90 minutes suivant l’exérèse, ou chute de l’insulinémie plus récemment, pour l’insulinome ; chute de l’hyperacidité gastrique très rapide pour le gastrinome).

Plus récemment ont été proposés des dosages hormonaux extemporanés qui ont permis à certains de réaliser des prélèvements veineux péripancréatiques peropératoires étagés, éventuellement sous clampage de l’artère splénique.

Quand on connaît la multiplicité des facteurs qui peuvent interférer sur l’interprétation des résultats de prélèvements sélectifs et parfaitement repérés, on ne peut que mettre le chirurgien en garde contre les erreurs qu’il va fatalement commettre s’il accorde trop de valeur à ce moyen de localisation (d’autant plus que la simple palpation de la tumeur est susceptible d’entraîner une libération hormonale massive).

4- Scintigraphie peropératoire :

La détection scintigraphique peropératoire de l’octréotide marqué est envisageable en peropératoire, à l’aide d’une sonde manuelle déplacée à la demande dans le champ opératoire.

Les études préliminaires ont montré que cette méthode pouvait permettre de réséquer des lésions occultes de gastrinome.

Il s’agit néanmoins pour l’instant d’une technique de mise en oeuvre relativement complexe.

5- Combinaison test au calcium-injection de bleu :

Un test au calcium intra-artériel peut être effectué en préopératoire pour identifier le vaisseau alimentant la tumeur, lequel est alors injecté en peropératoire avec du bleu de méthylène qui est susceptible de colorer la tumeur et ainsi de faciliter son repérage chirurgical.

Cette technique a été exclusivement rapportée en cas de gastrinome.

Principes du traitement :

Le traitement se doit, avec une importance relative variable selon le type tumoral, de contrôler la sécrétion anormale pour vérifier les symptômes, et de contrôler le syndrome tumoral dans un but carcinologique.

Dans l’insulinome, le contrôle de l’hyperinsulinisme est vital alors que le problème carcinologique est exceptionnellement au premier plan. Un contrôle médical quand il est possible, ou une simple énucléation sont donc parfaitement justifiés.

À l’opposé, dans le SZE, on a vu que le problème carcinologique était souvent la préoccupation majeure.

Principaux syndromes tumoraux :

A - Insulinome :

1- Clinique :

Les manifestations cliniques sont très polymorphes mais avant tout d’ordre neuropsychique.

Leur caractère est si peu évocateur que 25 % des patients ont un passé clinique depuis plus de 5 ans au moment du diagnostic.

La corrélation des signes avec un jeûne prolongé ou un effort est le point le plus caractéristique.

2- Diagnostic :

Le diagnostic repose avant tout sur l’épreuve de jeûne codifiée de 48 heures, avec dosages simultanés de la glycémie et de l’insulinémie.

L’abaissement de la glycémie au-dessous de 0,5 g/L signe la nature organique de l’hypoglycémie ; la mise en évidence du caractère non suppressible de l’hyperinsulinémie signe sa nature tumorale.

Un rapport de Turner (glycémie [en mg/100 mL] / insulinémie [en mU/mL]) inférieur à 4 est la traduction de ce caractère et est considéré comme positif à 100 % à la 72e heure de l’épreuve.

L’augmentation du peptide C circulant (qui traduit celle de la pro-insuline dont la proportion s’accroît au cours de l’insulinome) est également un excellent signe.

Il permet aussi le diagnostic différentiel avec les hypoglycémies factices par prise d’insuline ou de sulfamides hypoglycémiants dans lesquelles l’insuline est élevée mais le peptide C effondré.

3- Localisation de la tumeur :

Le taux de succès de l’échographie varie de 25 à 65 % ; celui du scanner semble de l’ordre de 25 à 30 %.

La performance de l’artériographie (inférieure à 60 %) n’est pas aussi élevée que dans les courtes séries initialement publiées, d’autant plus que 25 %des insulinomes diagnostiqués sont peu ou pas hypervasculaires.

En revanche, l’échoendoscopie donne actuellement le meilleur taux de succès de tous les examens morphologiques (de l’ordre de 85 %), et constitue l’examen morphologique de base de l’exploration de toutes les tumeurs endocrines du pancréas.

Dans les séries les plus récentes, la localisation correcte était établie par le test au calcium intra-artériel dans 33 à 88 % des cas.

En tant que méthode de localisation fonctionnelle, le test au calcium peut être positif alors que tous les examens morphologiques préopératoires sont négatifs ; dans une publication récente, il a ainsi été positif dans une série de sept cas consécutifs avec imagerie négative, modifiant la technique chirurgicale dans trois cas sur sept.

Comparé aux prélèvements veineux pancréatiques (PVP) dans des études prospectives, le test au calcium semble un peu supérieur pour localiser les tumeurs uniques, et un peu inférieur quand les hyperplasies diffuses sont incluses dans la série étudiée.

Trop peu de données sont actuellement disponibles pour préciser la spécificité du test au calcium dans la détection et la différenciation des hyperplasies diffuses et des tumeurs multiples, aussi bien entre elles qu’avec les formes uniques.

On peut toutefois noter que dans la littérature déjà citée, la plupart des 14,5 %de faux positifs ou de résultats incomplets correspondaient précisément à de telles présentations inhabituelles.

Il convient donc à ce sujet de rester encore prudent dans l’interprétation des résultats.

À ces réserves près, il paraît néanmoins évident que le test au calcium intra-artériel mérite d’être inclus dans l’arsenal des méthodes de localisation, ne serait-ce qu’en raison de son caractère fonctionnel et relativement peu invasif.

Les PVP sont les plus performants dans l’insulinome quand on inclut hyperplasies et formes multiples, dont le diagnostic constitue précisément l’indication de pratiquer des explorations fonctionnelles.

Tant que la réelle fiabilité du test au calcium dans ces formes ne sera pas établie, les PVP nous paraissent donc rester indispensables dans l’exploration préopératoire des insulinomes.

De plus, il s’agit en effet d’une pathologie tellement rare, ne récidivant pratiquement jamais, tellement bénigne après exérèse complète et tellement grave après exérèse pancréatique inappropriée, qu’il nous paraît futile de discuter un quelconque algorithme d’exploration, toutes les méthodes n’étant pas de trop pour s’assurer d’une localisation de certitude.

La laparotomie exploratrice dans la série de 1 067 cas colligés par Stefanini et al trouve la tumeur dans 76 % des cas à la première exploration et 11 % à la deuxième ; 7 % ne sont jamais retrouvés.

Les meilleurs résultats de l’échographie peropératoire qui sont rapportés font état de 84 à 90 % de sensibilité dans la détection d’insulinomes de 14 mm de diamètre en moyenne, sans faux positif.

En connaissance des examens radiologiques préopératoires, il semble donc que le chirurgien voit, palpe et/ou détecte par échographie la lésion dans 80 à 90 % des cas.

Il lui reste donc au moins 1 cas sur 10 où il va devoir pratiquer l’exérèse sur la seule foi des examens radiologiques morphologiques, voire seulement fonctionnels.

4- Traitement :

Le traitement de choix est chirurgical, si possible par simple énucléation, ce qui sous-entend une localisation précise.

La mortalité opératoire reste faible (6 %).

Dans les rares cas de malignité, on peut faire appel aux drogues cytotoxiques (streptozotocine) par voie générale ou locale hépatique.

Quand la chirurgie est récusée, le diazoxide, un sulfamide hyperglycémiant qui bloque la sécrétion d’insuline induite par le glucose, peut parfois contrôler la situation.

L’insulinome est donc le plus souvent une affection bénigne quand elle est diagnostiquée avant un accident grave, source de séquelles neurologiques, et quand la tumeur peut être extirpée chirurgicalement après une localisation correcte où le rôle du radiologiste est primordial.

B - Gastrinome : syndrome de Zollinger-Ellison

1- Clinique :

Les deux signes clés sont la diarrhée et les ulcères digestifs hauts. Les ulcères sont présents dans 85 % des cas.

Ils sont souvent multiples et peuvent toucher le tube digestif, de l’oesophage au jéjunum.

Le diagnostic de SZE mérite d’être évoqué lorsque ces ulcères présentent l’un des caractères distinctifs suivants : survenue chez une femme, un individu jeune ou présentant un caractère familial, résistance particulière au traitement médical, survenue de complications itératives, association à une diarrhée, existence de vomissements sans qu’une sténose digestive l’explique, siège à proximité de l’angle de Treitz, éventualité rare mais caractéristique.

La diarrhée est un élément essentiel du syndrome ; elle est présente dans environ 70 % des cas ; elle reste isolée ou précède les manifestations ulcéreuses dans 50 % des cas.

2- Diagnostic :

Le diagnostic repose sur la démonstration de l’hypersécrétion gastrique acide qui est responsable des signes radiologiques caractéristiques de l’affection : ulcérations oesophagiennes et oesophagite, ulcères gastriques développés sur un estomac à gros plis et hypersécrétant, ulcérations et épaississement du plissement au niveau du duodénum et du jéjunum proximal.

La preuve biologique est apportée par l’augmentation du débit acide basal au-dessus de 15 mmol/h et/ou de la concentration acide de base au-delà de 100 mmol/L.

L’hypergastrinémie est le second élément du diagnostic biologique, en sachant toutefois que les causes d’augmentation de la gastrine, à des taux cependant généralement plus limités qu’au cours du SZE, sont nombreuses.

Ce signe peut être sensibilisé par l’injection de sécrétine qui normalement diminue le taux de gastrine alors qu’au contraire elle l’augmente au cours du SZE.

3- Localisation de la tumeur :

Concernant l’artériographie; comme Mills et al, nous avons rencontré environ 30 % de faux positifs, essentiellement dus à une confusion entre le gastrinome et une adénopathie métastatique.

Quand l’imagerie préopératoire était négative, l’exploration chirurgicale a retrouvé une lésion macroscopique dans 77 % des cas dans l’expérience de Bichat mais trois fois sur quatre, il s’agissait d’une tumeur ectopique (duodénale avant tout).

L’indication des PVP est très discutable en cas de SZE.

En effet, les tumeurs sont multiples dans la majorité des cas, et plus ou moins sécrétantes.

Seules les tumeurs suffisamment sécrétantes au moment des prélèvements sont parlantes.

Dans notre expérience, la localisation sécrétoire est pancréatique céphalique ou duodénale dans près de 90 % des cas.

Ceci oblige donc à discuter neuf fois sur dix une duodénopancréatectomie céphalique puisque, quatre fois sur dix, la tumeur, trop petite, n’est pas retrouvée en peropératoire.

Cette intervention paraît d’autant plus lourde que dans plus de 50 % des cas, des localisations corporéales alors non sécrétantes seront laissées en place, et que l’on sait que dans 25 % des cas, le SZE évolue dans le cadre d’une NEM.

Plus récemment, le test au calcium intra-artériel a permis de localiser les lésions dans sept cas sur 13 explorés et, dans un cas, de différencier hémangiome et métastase hépatique.

Dans ces mêmes cas, l’artériographie, le test au calcium et les PVP étaient respectivement positifs dans 36, 54 et 46 %.

De plus, la valeur combinée de l’artériographie et du test au calcium était de 77 % ce qui, compte tenu du caractère moyennement invasif de la méthode, mérite d’être souligné.

Dans une étude prospective, le test au calcium s’est révélé plus sensible que les PVP pour localiser les gastrinomes duodénaux (respectivement 78 et 31 %).

Dans une autre étude, il était contributif dans des cas sélectionnés de suspicion de métastases hépatiques pour lesquels un résultat positif (élévation de gastrine d’au moins 25 % à 20 secondes ou de 50 % à 30 secondes) modifiait utilement la décision thérapeutique chez 22 % des patients.

4- Traitement :

L’hypersécrétion acide peut constituer un danger vital ; elle doit donc être contrôlée en priorité.

La gastrectomie totale est actuellement presque toujours évitée grâce aux drogues à effet anti-H2 dont l’efficacité est pratiquement absolue.

Dans un second temps, le traitement du syndrome tumoral est une préoccupation de plus en plus fréquente, facilitée en cela par les possibilités de localisation tumorale.

Cette approche carcinologique du traitement est supportée par l’existence de guérisons apparemment définitives après certaines exérèses et par le fait que l’hypergastrinémie pourrait entraîner à terme l’apparition de tumeurs carcinoïdes fundiques.

Le traitement idéal est chirurgical mais l’exérèse n’est en fait justifiée qu’en cas de geste simple : tumeur de la queue, de la paroi duodénale, ou tumeur très superficielle qui peut être énucléée.

La mortalité opératoire des pancréatectomies droites chez les sujets porteurs de SZE est en effet très élevée (de l’ordre de 35 % dans certaines séries de référence) et la probabilité que l’exérèse soit néanmoins complète est trop faible pour qu’une duodénopancréatectomie céphalique soit proposée sans réserve, même dans les cas où tout laisse croire que les lésions sont limitées à la tête.

Inversement, une attitude très agressive pourrait être proposée, compte tenu de la malignité avérée de la maladie deux fois sur trois, et conduire à proposer dans certains cas une pancréatectomie totale dans une optique carcinologique.

En cas de syndrome malin, particulièrement avec métastases hépatiques, une chimiothérapie (IV, IA ou par chimioembolisation) est généralement proposée, à base de streptozotocine et/ou 5-FU et/ou adriamycine ; les taux de réponse sont de 40 à 60 % dont la moitié de réponses complètes.

5- Pronostic :

Le mauvais pronostic du SZE est la conséquence de sa fréquente évolution maligne, et ce malgré une progression souvent lente (des évolutions de plus de 15 ans sont possibles, même au cours de formes avec métastases hépatiques).

La survie actuarielle à 5 ans est de 65 % ; elle reste stable à 50 % après 10 ans.

La meilleure survie à 5 ans est associée aux tumeurs ectopiques (69 %) et aux formes où la laparotomie exploratrice est négative (67 %).

Les survies les moins bonnes sont associées aux formes avec métastases hépatiques (27 % à 5 ans) et celles qui évoluent dans le cadre d’une néoplasie endocrinienne multiple (48 %).

La cause du décès est une fois sur quatre une complication postopératoire et presque une fois sur deux la conséquence des métastases hépatiques.

C - Glucagonome :

1- Clinique :

Dans 70 % des cas, le syndrome cutanéomuqueux est révélateur de la maladie : il s’agit d’un érythème nécrolytique migrateur, siégeant aux zones de frottement, associé à des manifestations muqueuses (en particulier la glossite).

La pathogénie de ce syndrome n’est pas claire mais une diminution du taux de glucagon entraîne souvent sa disparition rapide et spectaculaire en quelques jours.

Lorsque la maladie est constituée, ce syndrome ne manque qu’une fois sur dix.

Les autres signes sont : le diabète sucré, l’anémie, des signes de cachexie éventuellement associés à des signes directs de tumeur pancréatique et assez souvent une diarrhée.

Le diagnostic repose sur la constatation d’un taux élevé de glucagon ; il existe également une diminution des acides aminés plasmatiques.

2- Localisation de la tumeur :

Elle ne pose habituellement pas de problème majeur, la lésion étant volumineuse au moment du diagnostic.

Dans de rares cas où le diagnostic paraît suffisamment probable mais où les examens morphologiques localisateurs sont négatifs ou discordants, on peut être amené à réaliser des PVP.

Parmi six patients ainsi explorés, nous avons pu faire la preuve et localiser trois glucagonomes dont deux tumeurs de moins de 5 mm dont une sans signes de malignité dont on peut espérer une guérison définitive.

Dans tous les cas de glucagonome avéré, le gradient hormonal dans la région pathologique était de plus de dix fois la valeur périphérique.

Il convient néanmoins d’être réservé dans l’interprétation des résultats, car il existe fréquemment des métastases sécrétantes régionales ou ganglionnaires qui rendent délicate l’analyse de la cartographie hormonale.

3- Traitement :

Le traitement idéal est chirurgical. La lenteur habituelle d’évolution de la tumeur justifie de proposer parfois une chirurgie incomplète de réduction tumorale.

Cette lenteur explique qu’au moment du diagnostic, la tumeur progresse certainement depuis des années et rend compte de sa malignité presque constante à ce stade.

Elle plaide aussi en faveur des tentatives de localisation précoces dont la réussite améliore à l’évidence l’efficacité du traitement chirurgical comme dans l’un de nos cas.

Une chimiothérapie est proposée aux formes malignes avec métastases (streptozotocine, 5-FU, Déticènet) par voie générale ou locale.

Nous avons pu, dans un cas, contrôler l’évolution tumorale et le syndrome clinique par chimioembolisation avec adriamycine.

La somatostatine parvient généralement à contrôler l’hypersécrétion de glucagon de façon transitoire.

D - Vipome (choléra pancréatique, syndrome de Verner et Morrison) :

1- Clinique :

Par définition, l’affection se caractérise par une diarrhée chronique.

Il s’agit d’une diarrhée hydroélectrolytique, afécale, sécrétoire (persistant même pendant le jeûne prolongé), avec des débits journaliers qui peuvent, pendant les poussées, atteindre 10 L.

Les autres signes sont avant tout les conséquences de la déshydratation qui accompagne ces pertes hydriques majeures.

La survenue de flushes n’est pas exceptionnelle ; en revanche, les hémorragies digestives ne sont pas fréquentes.

2- Diagnostic :

Il repose sur la mise en évidence du caractère sécrétoire de la diarrhée, en l’absence de lésion organique du tube digestif ainsi que d’hypersécrétion gastrique acide.

Dans ces conditions, les principaux diagnostics différentiels sont les tumeurs carcinoïdes s’accompagnant de métastases hépatiques, le cancer médullaire de la thyroïde et certains phéochromocytomes ou ganglioneuro(blasto)mes.

L’augmentation du taux de VIP est sensible et spécifique mais elle peut manquer, en particulier au cours des hyperplasies.

3- Localisation de la tumeur :

Les remarques concernant le glucagonome sont applicables aux vipomes.

La phlébographie ne paraît pas avoir jamais été contributive.

Elle reste néanmoins le seul examen pouvant faire espérer une localisation, voire un diagnostic précoce de ces tumeurs, avant qu’elles n’atteignent une taille où la malignité est la règle.

4- Traitement :

Il repose sur les mêmes principes que celui des autres tumeurs avec lesquelles le vipome partage la lenteur d’évolution.

Seules les tumeurs extirpées en totalité et sans métastases hépatiques peuvent espérer une guérison complète : elles représentent environ 50 % des cas.

Certaines hyperplasies ont pu guérir après chirurgie mais la mortalité opératoire y atteint 30 %.

E - Somatostatinome :

La clinique en est peu spécifique.

Elle est le résultat de l’effet inhibiteur de la somatostatine sur les sécrétions endocrines de gastrine, d’insuline, de cholécystokinine, de glucagon.

C’est cet effet inhibiteur qui est mis à profit pour traiter les autres tumeurs endocrines pancréatiques par des analogues de la somatostatine.

Les signes le plus souvent rencontrés sont l’altération de l’état général, le diabète et la lithiase biliaire ; les autres signes peuvent être une diarrhée avec stéatorrhée, une anachlorhydrie gastrique. Toutefois, la tumeur paraît souvent multisécrétante, ce qui agrémente la symptomatologie de signes imprévus : hypersécrétion de thyrocalcitonine, d’ACTH (adrenocorticotrophic hormone), de GRH (gonadotropin-releasing hormone), de gastrine...

Le taux de somatostatine circulante s’élevait à plusieurs milliers de fois la normale dans les cas rapportés.

La localisation lésionnelle ne se distingue pas de celle des autres tumeurs volumineuses.

Les principes du traitement, chirurgie si possible et chimiothérapie sinon, sont classiques.

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