Les anomalies de la statique du rachis dans le plan sagittal
répondent à plusieurs étiologies bien distinctes chez l’enfant et
l’adolescent.
Les anomalies malformatives sont surtout mises en
évidence lors de la petite enfance, avant même que la station debout
soit acquise.
La maladie de Scheuermann, ou dystrophie rachidienne
de croissance, touche électivement l’adolescent.
Enfin, les anomalies
de la charnière lombosacrée se traduisent par une spondylolyse et
un éventuel spondylolisthésis.
Dans tous les cas, les clichés simples
constituent la première approche, permettant d’objectiver l’anomalie
de la statique, d’envisager un diagnostic étiologique et de guider les
éventuelles explorations complémentaires nécessaires.
Techniques d’imagerie
:
A - RADIOGRAPHIES SIMPLES
:
L’examen radiographique standard du rachis constitue la première
exploration à réaliser.
En fonction de l’âge de l’enfant, du siège de la
déformation clinique, il faut explorer à la fois la statique globale du
rachis et les anomalies morphologiques associées au niveau des
vertèbres.
Avant l’âge de la marche, la réalisation de clichés
d’ensemble du rachis, de face et de profil en décubitus constitue la
première approche.
Chez l’enfant plus grand, le bilan initial
comprend des radiographies du rachis dans son ensemble : face
debout et profil debout.
Des clichés centrés sur l’anomalie, des
obliques, des épreuves dynamiques peuvent le cas échéant être
nécessaires.
1- Radiographies d’ensemble du rachis
:
Chez l’enfant capable de tenir debout et l’adolescent, ces
radiographies peuvent être pratiquées selon différentes techniques.
L’exposition sur cassette 30
X 90 cm ou 30 X 120 cm avec une grande
distance focale (2 m), est aujourd’hui largement concurrencée par
les techniques numériques.
Celles-ci peuvent faire appel à
l’utilisation de plusieurs écrans radioluminescents à mémoire
disposés dans une grande cassette, mais surtout à l’utilisation d’une
table télécommandée, avec déplacement synchrone du tube à rayons
X et de l’amplificateur de brillance.
Après plusieurs expositions
séquentielles étagées couvrant l’ensemble de la région à étudier, une
reconstruction 2D sur console par assemblage et fusion d’images est
pratiquée pour obtenir une vue d’ensemble de la colonne vertébrale.
Pour l’incidence de profil, cette technique numérique
présente l’avantage d’éviter les erreurs de parallaxe, en particulier
au niveau du bassin : la superposition des têtes fémorales est
possible sans différence dans le facteur d’agrandissement des côtés
droit et gauche, du fait de la faible distance focale.
Il faut se souvenir
que ces clichés d’ensemble du rachis sont irradiants, de l’ordre de
0,09 mSv à 0,16 mSv pour une incidence de face chez un patient de
50 kg (43 à 87 cGy.cm2 pour une mesure du produit dose-surface) ;
les premières études dosimétriques comparatives entre la méthode
sur film traditionnel et la technique numérique avec acquisition
séquentielle sont en défaveur de la seconde.
L’optimisation de
cette technique doit permettre de diminuer cette irradiation, en
limitant la fenêtre d’exposition, le nombre de clichés, en optimisant
la sensibilité du système de contrôle d’exposition, voire en utilisant une image scopique plutôt que graphique. l’usage raisonné des
contrôles évolutifs doit également contribuer à limiter l’irradiation
délivrée.
Les clichés doivent couvrir le corps depuis le conduit auditif externe
jusqu’à la région sous-trochantérienne.
Par convention
internationale, le cliché de face doit être marqué, vu de dos, comme
pendant l’examen clinique.
Ce marquage doit être complet, en
particulier il doit comporter l’indication du côté, la position du
patient.
La lecture du cliché de face permet d’analyser différents points.
L’existence de courbures dans le plan frontal, définies par leur côté
et leur amplitude, s’apprécie par la méthode de Cobb.
Il faut définir
la vertèbre sommet (la moins inclinée et la plus rotée sur l’axe
vertical) et les vertèbres limites qui sont celles qui, à la limite
supérieure et à la limite inférieure de la courbure, présentent le
maximum d’inclinaison par rapport à l’horizontale et le minimum
de rotation.
L’amplitude de la courbure est définie par la valeur en
degrés de l’angle formé dans la concavité de la courbure par les
lignes droites prolongeant le plateau supérieur de la vertèbre limite
supérieure, et le plateau inférieur de la vertèbre limite inférieure.
Le
degré de rotation des vertèbres par rapport à un axe vertical doit
également être évalué.
L’équilibre du rachis s’apprécie en abaissant
la verticale passant par l’épineuse de C7, qui doit passer par le
milieu du sacrum.
La statique du bassin (inclinaison par rapport à
l’horizontale) et la hauteur comparée des têtes fémorales doivent
enfin être notées.
Le cliché de profil debout permet d’évaluer la cyphose dorsale, la
lordose lombaire et la statique pelvirachidienne.
La cyphose dorsale se mesure par l’angle formé par la tangente au
plateau inférieur de T12 et la tangente au plateau supérieur de la
première vertèbre dorsale visible (T4 ou T5).
La valeur normale est
en principe inférieure à 33° mais des variations individuelles
peuvent exister, avec une angulation pouvant aller jusqu’à 50°.
La lordose lombaire se mesure par l’angle formé par la tangente au
plateau supérieur de L1 et au plateau supérieur de S1.
L’équilibre pelvirachidien global est très important à évaluer :
– l’équilibre global du rachis s’apprécie en fonction de la verticale
abaissée par le conduit auditif externe qui doit passer par le centre
des têtes fémorales.
Ceci permet d’apprécier l’existence d’un
déséquilibre antérieur ou postérieur.
Le centre de gravité du rachis,
qui correspond au centre de gravité du poids supporté par les têtes
fémorales, se situe en moyenne en T9.
Le paramètre qui l’explore est
la gîte sagittale de T9 qui correspond à l’angle formé par la verticale
passant par le centre des têtes fémorales et la ligne joignant ce centre
au centre du corps vertébral de T9.
La valeur moyenne est de 12° ;
– la version pelvienne (normale, antéversion, rétroversion) s’analyse
à partir de plusieurs paramètres ; elle est appréciée par :
– l’angle sacré a formé par la tangente à la plaque sacrée par rapport
à l’horizontale ;
– l’angle de version pelvienne b correspond à l’angle formé par la
verticale passant par le centre des têtes fémorales et la ligne joignant
ce centre au milieu de la plaque sacrée ;
– l’incidence sacrée est l’angle entre la perpendiculaire au plateau
sacré en son centre, et la droite joignant le centre du plateau sacré
au centre des têtes fémorales.
L’incidence sacrée est ainsi égale à la
somme des angles d’inclinaison de la plaque sacrée et de version
pelvienne (a + b = c).
C’est le paramètre le plus utilisé et l’on parle
de troubles de la statique sagittale à forte incidence (sacrum
horizontal avec antéversion) ou à faible incidence (sacrum vertical
avec rétroversion) ;
– le porte-à-faux d correspond à la distance sagittale entre le centre
de l’axe vertical bicoxofémoral et le centre de la plaque sacrée.
Tous ces paramètres nécessitent, pour une bonne évaluation, une
superposition des têtes fémorales qu’il est impossible d’obtenir sur
les grandes cassettes et les systèmes avec écrans radioluminescents
à cause des erreurs de parallaxe.
La meilleure technique est dans ce
cas l’acquisition numérique séquentielle.
2- Clichés complémentaires
:
Des radiographies localisées peuvent être nécessaires pour mieux
analyser un segment rachidien : recherche d’une malformation,
étude des disques intervertébraux, de l’arc postérieur, clichés en
oblique pour mettre en évidence une lyse isthmique...
Dans certains
cas, des épreuves dynamiques sont utiles pour apprécier la stabilité
ou la réductibilité d’une déformation.
Les cyphoses organiques sont
peu ou non réductibles.
L’existence d’une réductibilité traduit plutôt
une cyphose de type « asthénique », soit simplement d’attitude, soit
d’origine neuromusculaire.
B - AUTRES EXPLORATIONS
:
1- Échographie médullaire
:
À la période néonatale, l’échographie médullaire peut apporter des
éléments de valeur sur le contenu du canal rachidien.
Elle est
réalisée par voie postérieure à cet âge.
Elle permet d’apprécier
l’alignement des corps vertébraux et surtout elle montre la moelle et
les racines dans le sac dural.
La voie antérieure est possible, en
passant au travers des disques, mais l’analyse reste alors
segmentaire.
2- Tomodensitométrie
:
Elle est surtout utile pour préciser la nature d’une anomalie osseuse,
lorsque les clichés simples sont insuffisants.
Ceci est particulièrement
utile pour les malformations rachidiennes, la mise en évidence d’une spondylolyse.
L’examen nécessite l’acquisition de coupes fines
permettant des reconstructions 2D, multiplanaires, ou 3D,
volumiques.
Sur les appareils permettant ces reconstructions, il n’est
pas nécessaire d’incliner le statif pour réaliser les coupes dans un
plan de référence particulier.
Il s’agit d’une technique irradiante et
ses indications doivent être posées en fonction des renseignements
attendus.
L’étude de la pathologie discale est également possible, mais on lui
préfère le plus souvent l’imagerie par résonance magnétique (IRM),
qui permet une meilleure étude des rapports avec les éléments
nerveux.
3- Imagerie par résonance magnétique
:
L’IRM est indiquée chaque fois qu’un trouble de la statique peut
retentir sur le contenu du canal rachidien ou sur les racines
nerveuses.
Les acquisitions pondérées en T1 et en T2 dans le plan
sagittal constituent les séquences de base, complétées par des plans
de coupe complémentaires en fonction des anomalies recherchées.
Dans les malformations rachidiennes, l’IRM permet également de
faire un bilan plus complet et appréciant la morphologie des corps
vertébraux, l’aspect des disques intervertébraux ; elle doit rechercher
d’éventuelles anomalies malformatives intracanalaires associées.
Étiologies des troubles
de la statique sagittale :
Les cyphoses et les lordoses isolées sont rares.
Elles peuvent en
revanche être associées aux scolioses.
Elles peuvent être d’origine
congénitale, malformatives, ou en rapport avec une pathologie du
rachis en croissance : maladie de Scheuermann.
Elles peuvent être secondaires à une lésion focale avec constitution
d’une cyphose par atteinte du corps vertébral.
L’existence d’une spondylolyse et d’un spondylolisthésis au niveau
lombosacré est plus fréquemment l’apanage de l’adolescent et de
l’adulte jeune.
A - CYPHOSES ET LORDOSES CONGÉNITALES
:
1- Étiologie
:
Elles sont dues à un déséquilibre de développement entre l’arc
antérieur et l’arc postérieur, en rapport avec un défaut de formation
(type 1) ou de segmentation (type 2), essentiellement de l’arc
antérieur.
L’association des deux processus correspond au type 3.
Cette classification permet de distinguer les malformations
suivantes.
* Absence partielle ou totale de l’arc antérieur
:
Elle intéresse une, voire plusieurs vertèbres, et constitue la forme la
plus fréquente des défauts de formation.
Cette hypoplasie corporéale peut être totale ou partielle, avec une vertèbre « en coin »
responsable de la cyphose. Une néoarticulation peut se constituer
entre la partie antérieure des vertèbres sus- et sous-jacentes.
L’équilibre est conditionné par l’état de l’arc postérieur. Si l’arc
postérieur est respecté, le rachis est en principe stable, mais il va
exister une aggravation progressive de la cyphose.
Un defect
antérieur pur et symétrique est responsable d’une cyphose angulaire
pure, avec le plus souvent une aggravation progressive mais avec
maintien au niveau de l’arc postérieur.
Il peut également exister une luxation vertébrale congénitale, en
rapport avec l’absence partielle d’un corps vertébral et une perte de
l’alignement au niveau de l’arc postérieur du fait d’un défaut de
développement associé à ce niveau, ce qui ne permet plus un
« verrouillage » postérieur.
Ceci se traduit par un « rachis luxé
congénital », avec un décalage dans l’alignement des corps vertébraux, donnant un aspect en « marche d’escalier ».
Le risque
neurologique est ici important, avec une décompensation qui peut
être brutale.
Ces anomalies peuvent être isolées ou plus souvent associées à un
défaut de développement antérolatéral plus complexe, responsable
d’une scoliose associée.
Dans ce cas, il existe une absence complète
de l’hémiarc antérieur d’un côté et un hémicorps postérolatéral
controlatéral.
Il s’associe donc un effet rotatoire sur le rachis, avec
une angulation sévère et un risque neurologique important.
La forme la plus sévère d’agénésie vertébrale correspond au
syndrome de régression caudale, dans lequel le sacrum est absent et
où il existe le plus souvent une cyphose entre le rachis restant et le
bassin.
* Défauts de segmentation de l’arc antérieur
:
Ils peuvent être antérieurs purs ou antérolatéraux.
Ils peuvent être
responsables d’une cyphose ou d’une cyphoscoliose.
Un défaut de segmentation antérieur pur (barre antérieure) peut être
reconnu à un âge variable.
Il existe des formes précoces, avec fusion
de deux ou trois corps vertébraux, responsables d’une cyphose
dorsale haute ou dorsolombaire le plus souvent ; l’angulation peut
être marquée, mais elle est en principe moins aiguë que dans les
défauts de formation de l’arc antérieur.
Ces blocs peuvent siéger aux
différents étages : cervical, thoracique, lombaire.
Certaines formes
sont plus tardives, la fusion intervenant au cours ou à la fin de la
période pubertaire, et posant un problème de diagnostic différentiel
avec une affection acquise, postinfectieuse ou post-traumatique.
Lorsqu’il existe un défaut de segmentation antérolatéral, plus rare,
il est alors responsable d’une cyphoscoliose.
La croissance corporéale
controlatérale entraîne une rotation tandis que le bloc antérieur
provoque la cyphose.
L’association des deux mécanismes (agénésie corporéale et défaut
de segmentation, type 3) est responsable d’une cyphose d’autant
plus grave qu’il existe une scoliose malformative avec une
dislocation rotatoire au sommet des courbures, et un risque
neurologique important.
* Lordoses congénitales
:
Elles sont rares, généralement sévères.
Elles sont en rapport avec
une fusion au niveau de l’arc postérieur, avec présence d’une barre,
alors que les corps vertébraux continuent à grandir.
Ceci peut être
associé à des synostoses costales qui contribuent aux troubles de la
statique.
2- Imagerie
:
Elle a plusieurs rôles :
– mesurer l’importance des différentes courbures ;
– faire le diagnostic étiologique et morphologique précis ;
– apprécier la stabilité et l’évolutivité de la déformation ;
– juger du retentissement en particulier sur l’axe nerveux ;
– rechercher des lésions associées, en particulier s’il existe des
troubles neurologiques.
* Mesure de la déformation
:
Les clichés simples constituent toujours la première étape.
Le cliché
de profil permet de mesurer le degré de la cyphose, en prenant
l’angle défini par les tangentes aux plateaux des vertèbres les plus
inclinées par rapport à l’horizontale.
* Analyse de la malformation
:
L’étude morphologique est capitale pour définir au mieux le type
de malformation.
Les clichés simples peuvent être complétés par une
étude « en coupe », tomodensitométrie avec reconstruction 3D.
Il
faut, à chaque niveau, analyser le corps vertébral et l’arc postérieur,
localiser le defect éventuel, le niveau et le site de fusion si cela est le
cas.
La reconnaissance d’un bloc vertébral corporéal est aisé : il existe
une disparition du disque intervertébral, une absence de mobilité à
ce niveau.
Au niveau de l’arc postérieur, la mise en évidence d’une
fusion est plus difficile, en particulier chez le jeune enfant chez qui
les structures vertébrales ne sont pas encore ossifiées en totalité.
Le
disque intervertébral doit être également analysé ; chez le petit
enfant, la réalisation complémentaire d’une IRM peut aider cette
étude, en particulier sur les coupes pondérées en T2 car le disque,
très hydraté à cet âge, est aisé à reconnaître.
* Recherche des facteurs d’instabilité
:
Il faut apprécier :
– l’importance de l’angulation, qui va accroître le risque de luxation
secondaire ;
– la perte de l’alignement de deux segments adjacents : elle peut
être étudiée en position « indifférente » ou lors d’épreuves
dynamiques ; il existe une instabilité lorsque ces clichés
mettent en évidence une mobilité anormale objectivée entre deux
points de repère vertébraux normalement alignés.
Ceci correspond
au rachis luxé congénital ;
– l’existence d’un « vide osseux » en regard d’un defect antérieur ;
si le cliché en hyperextension montre une relative mobilité, ceci
constitue à la fois un facteur de risque d’instabilité, mais également
un élément important dans la conduite thérapeutique car ceci
permet d’envisager une réduction de la cyphose ;
– la qualité du « verrouillage » postérieur, en particulier la
superposition des articulaires postérieures est le dernier point à
apprécier ; celui-ci est à la fois musculaire, ligamentaire et ostéoarticulaire.
L’examen tomodensitométrique avec des
reconstructions sagittales peut aider à reconnaître les différents
éléments notamment l’empilement des apophyses articulaires
postérieures ;
– le dernier point favorisant l’instabilité est le degré de la cyphose
elle-même, le point d’application du poids du corps se projetant plus
ou moins en avant de la superposition des corps vertébraux et
favorisant ainsi l’aggravation du déséquilibre.
* Anomalies associées et retentissement sur la moelle
:
Pour la recherche d’anomalies associées sur l’axe neural, les
explorations complémentaires doivent tenir compte de la présence
ou non de signes neurologiques, voire de malformations neurales
associées, de leur aggravation brutale.
– La présence de signes de compression médullaire aiguë doit faire
réaliser une IRM en urgence, mais l’interprétation peut être difficile
devant l’importance des courbures.
Un myéloscanner peut dans
cette situation apporter des éléments complémentaires.
– Les dysraphismes occultes sont plus rares dans les cyphoses pures
que dans les scolioses.
L’IRM est de nouveau l’examen de référence
pour leur recherche.
– Les myéloméningocèles dorsales peuvent être responsables de
cyphose grave, par absence d’arc postérieur.
Le tableau clinique est
connu depuis la naissance, la surveillance évolutive est essentielle,
car il n’y a pas d’élément prédictif permettant d’apprécier le risque
évolutif vers une cyphose grave.
Dans les myéloméningocèles, l’IRM doit permettre de faire un bilan précis des malformations
intracanalaires, de situer le niveau où se termine la moelle, de
rechercher une cavité syringomyélique associée.
B - CYPHOSES ET LORDOSES ASSOCIÉES AUX SCOLIOSES
IDIOPATHIQUES OU MALFORMATIVES :
Dans le cadre des scolioses idiopathiques, la déformation prédomine
dans le plan frontal.
L’association à des déformations dans le plan
sagittal est possible, en particulier dans les formes sévères.
Cette
déformation complémentaire joue un rôle dans le pronostic, dans la
mesure où elle peut aggraver le retentissement de la scoliose, en
particulier sur le plan respiratoire, et compliquer la prise en charge
thérapeutique.
Les déformations les plus fréquemment rencontrées
sont les cyphoses thoraciques et les lordoses thoracolombaires, avec
inversion de la courbure dorsale physiologique.
L’appréciation du
retentissement au niveau thoracique peut être aidée par la
tomodensitométrie.
C - CYPHOSES ET SCOLIOSES DYSPLASIQUES
:
Les troubles de la statique du rachis peuvent être la conséquence
d’une maladie osseuse constitutionnelle, ou traduire le
retentissement d’une maladie métabolique.
Dans un autre domaine,
les cyphoscolioses associées à la neurofibromatose sont la
conséquence de plusieurs facteurs associés : lésions dysplasiques,
pathologie tumorale...
1- Maladies osseuses constitutionnelles
:
De nombreuses maladies osseuses constitutionnelles peuvent
s’accompagner de troubles de la statique rachidienne.
Ces anomalies
représentent, soit un élément caractéristique de la maladie, soit une
complication évolutive.
Dans toutes ces pathologies, le rachis ne
constitue souvent qu’un élément parmi les anomalies osseuses
présentes.
Le bilan radiologique doit savoir aller au-delà des clichés
du rachis, dès lors qu’il existe des anomalies morphologiques
étagées faisant suspecter une atteinte plus diffuse.
L’analyse précise
de ces anomalies, l’étude des antécédents doivent permettre une
approche plus précise du diagnostic.
Toutes ces affections ne sont
pas décrites ici, seules quelques maladies doivent être évoquées.
Dans l’achondroplasie, l’hypotonie axiale initiale est responsable
d’une cyphose dorsolombaire chez le nourrisson.
Plus tard, avec
l’acquisition de la station debout, il existe une hyperlordose
lombaire.
Ces troubles de la statique aggravent le retentissement du
rétrécissement du canal rachidien et le risque de compression ou de
décompensation.
L’IRM est indiquée pour faire le bilan le plus précis
possible en cas de signes neurologiques.
Le nanisme diastrophique s’accompagne de troubles importants de
la statique rachidienne, scoliose, cyphoscoliose ou hyperlordose
lombaire.
Il peut également exister une cyphose cervicale spécifique,
avec aspect cunéiforme des corps vertébraux cervicaux.
La
cyphoscoliose de la dysplasie métatropique doit également être citée,
avec une platyspondylie étagée.
Les autres maladies de découverte précoce qu’il faut savoir évoquer
sont la dysplasie spondyloépiphysaire congénitale (aspect ovoïde
des corps vertébraux), la maladie de Kniest (cyphose dorsolombaire
avec réduction de hauteur des corps vertébraux).
Lors de la
croissance, la mise en évidence d’un trouble de la statique vertébrale,
avec le plus souvent une cyphose, associée à des altérations
morphologiques des vertèbres doit faire évoquer les dysplasies spondyloépiphysaires ou spondylométaphysaires.
L’ostéogenèse imparfaite s’accompagne également d’une cyphose
plus ou moins prononcée, en rapport avec les tassements vertébraux
multiples témoignant de la fragilité osseuse constitutionnelle.
La
déformation des corps vertébraux en lentille biconcave associée à
une déminéralisation diffuse est caractéristique.
2- Maladies de surcharge
:
Ces maladies d’origine métabolique peuvent s’accompagner de
cyphoses plus ou moins marquées, associées à des déformations des
corps vertébraux.
Dans ce groupe, les mucopolysaccharidoses sont
les plus fréquentes.
Elles correspondent à un défaut de dégradation
des glycosaminoglycanes, qui s’accumulent dans les tissus.
Il en
existe plusieurs types, selon le trouble métabolique.
La maladie de
Hurler (type 1 A) s’accompagne fréquemment d’une cyphose
dorsolombaire.
Celle-ci est en rapport avec une aplasie partielle de
la partie antérosupérieure d’un corps vertébral, T12, L1 ou L2 ; cette
anomalie est responsable d’un aspect en « éperon » ou en « sabot »
du corps vertébral.
Ceci peut aboutir à une véritable subluxation rachidienne en rapport avec l’instabilité ainsi induite.
De même, dans la maladie de Morquio (type IV), il existe une
platyspondylie évolutive avec déformation des corps vertébraux en
« languette », une hypoplasie corporéale lombaire haute, une
cyphose résultante.
Dans les autres types, les anomalies vertébrales
peuvent également être présentes, mais à un moindre degré ;
l’atteinte d’une des deux premières vertèbres lombaires est le plus
souvent évocatrice.
Dans les autres maladies de surcharge suivantes, l’atteinte des
premières vertèbres lombaires est également possible : mannosidose,
mucolipidose, maladie de Gaucher...
3- Neurofibromatose
:
La maladie de Recklinghausen s’accompagne fréquemment de
troubles de la statique du rachis.
Une cyphose cervicale est très
évocatrice de neurofibromatose de type 1.
Les vertèbres cervicales
sont le siège d’une dysplasie sévère, avec un festonnement antérieur
et postérieur, des angles aigus au niveau des contours du corps
vertébral.
Cette déformation, fréquente chez l’adulte, peut
débuter dans l’enfance.
À l’inverse, il peut exister une exagération
de la lordose cervicale, une lordose dorsale.
Dans les cyphoscolioses,
la présence d’une cyphose marquée associée à une rotation des
vertèbres sur leur axe est un facteur de mauvais pronostic.
Si
un traitement chirurgical est envisagé, il faut réaliser une IRM
préopératoire, en particulier pour les cyphoscolioses d’origine
dysplasique, afin de rechercher une anomalie endocanalaire associée
pouvant se décompenser à l’occasion de l’intervention.
Il en est
de même pour toute modification ou apparition de symptomatologie
apparaissant dans le cadre d’une cyphoscoliose connue, qui doit
faire rechercher l’apparition d’une tumeur pararachidienne.
D - CYPHOSES ET LORDOSES ACQUISES
:
Elles ont des étiologies multiples ; les plus fréquentes sont
infectieuses, traumatiques ou iatrogènes.
Dans ces différents cas, le
diagnostic repose sur l’anamnèse, les radiographies appréciant ces
différentes anomalies morphologiques et permettant le suivi
évolutif.
1- Cyphoses d’origine infectieuse
:
Elles font suite le plus souvent à une spondylodiscite à germe banal
(staphylocoque).
La cicatrisation des lésions peut se faire avec
constitution d’un bloc acquis en cyphose.
Un bloc vertébral peut
secondairement apparaître, avec disparition du disque et fusion des
vertèbres adjacentes.
Les déformations sont d’autant plus sévères
que l’enfant est jeune lors de l’atteinte initiale.
L’atteinte
tuberculeuse est devenue rare chez l’enfant ; l’atteinte à plusieurs
étages est classique.
Si cette cyphose est très évolutive, les signes
d’instabilité rachidienne apparaissent assez tôt au cours de
l’évolution et doivent permettre une prise en charge adaptée.
2- Cyphoses traumatiques
:
Les séquelles traumatiques constituent la seconde étiologie des
cyphoses secondaires.
Il s’agit de fractures cunéiformes avec
impaction du corps vertébral.
Là encore, un bloc vertébral
secondaire peut se constituer lors de la poursuite de la croissance.
Lorsqu’il existe des troubles neurologiques associés, l’IRM permet
de faire la preuve d’une éventuelle cavité syringomyélique associée
au niveau de la moelle, séquelle médullaire post-traumatique.
3- Troubles de la minéralisation osseuse
:
En dehors de l’ostéogenèse imparfaite, déjà évoquée et d’origine
congénitale, l’ostéoporose juvénile idiopathique peut se traduire par
une cyphose douloureuse.
Les clichés simples montrent les
déformations cunéiformes des corps vertébraux et permettent
d’apprécier le degré de cyphose.
Lorsque le diagnostic n’est pas
connu, l’augmentation de la transparence osseuse constitue le
premier signe d’alerte qui doit faire pratiquer un bilan plus complet
pour permettre le diagnostic.
En l’absence d’argument étiologique
évident, l’existence d’une infiltration leucémique diffuse avec
tassements vertébraux multiples constitue le principal
diagnostic différentiel : la réalisation d’un hémogramme ou d’une
biopsie ostéomédullaire est capitale pour en permettre le diagnostic.
Le rachitisme est devenu exceptionnel dans sa forme majeure ; au
niveau du rachis, l’hypotonie axiale responsable d’une cyphose
pouvait être majorée par des tassements vertébraux.
4- Cyphoses d’origine neuromusculaire
:
Les myopathies et les affections neuromusculaires se compliquent
fréquemment, au cours de leur évolution, d’un déséquilibre
progressif du rachis, qui se produit dans les différents plans, frontal
et sagittal.
Ce trouble nécessite le plus souvent un appareillage,
corset ou autre, pour permettre de conserver une attitude en position
de fonction et limiter le retentissement sur la fonction respiratoire.
Les clichés radiographiques doivent être réalisés dans la position
d’équilibre du sujet, le cas échéant en position assise, pour apprécier
le mode de correction le plus adéquat.
5- Cyphoses iatrogènes
:
Les troubles de la statique en rapport avec le traitement d’une
affection maligne sont secondaires, soit à une radiothérapie, soit à
une chirurgie au niveau de l’arc postérieur.
Dans le cadre des néphroblastomes, la radiothérapie est plus souvent responsable de
scoliose que de cyphose (7 % des cas).
Les interventions par
laminectomie postérieure pour lever une compression médullaire
aiguë sont également pourvoyeuses de cyphoses graves, d’autant
plus que l’enfant est jeune ; c’est en particulier le cas dans les neuroblastomes avec extension foraminale, des tumeurs
intracanalaires primitives.
Enfin, le traitement d’une lésion
osseuse primitive du rachis peut également se compliquer d’un
trouble de la statique, le plus souvent cyphotique.
E - OSTÉOCHONDROSE JUVÉNILE DU RACHIS : MALADIE
DE SCHEUERMANN ET ÉQUIVALENTS
La maladie de Scheuermann est une dystrophie rachidienne
traumatique de croissance qui provoque une cyphose douloureuse.
De nombreuses autres appellations ont été utilisées : cyphose
juvénile, épiphysite vertébrale, ostéochondrose juvénile dorsale,
cyphose des adolescents, mais l’usage a imposé le terme de maladie
de Scheuermann en rapport avec sa description initiale.
1- Pathogénie
:
L’étiologie traumatique est aujourd’hui reconnue : la maladie est
secondaire à des microtraumatismes répétés (poids du corps,
contraintes mécaniques surtout sportives) sur le complexe discoépiphysaire et sur un os vertébral fragilisé par une croissance
rapide.
Des facteurs génétiques peuvent jouer un rôle compte tenu
de l’existence de cas familiaux, vraisemblablement par leur influence
sur la résistance mécanique des corps vertébraux.
Les contraintes
axiales exercées sur le nucleus pulposus se transforment en
pressions positives exercées sur le plateau cartilagineux et le centre
du corps vertébral.
Cette distraction verticale est équilibrée par une mise en tension horizontale de l’annulus qui provoque par
l’intermédiaire des fibres de Sharpey (les plus externes) une force de
traction sur le listel.
Il se crée ainsi un gradient de pression avec une
force de compression centrale et une force de traction périphérique
sur le limbus qui explique certains troubles du modelage vertébral,
la possibilité de protrusion axiale du nucleus et d’arrachement
périphérique du listel.
2- Clinique
:
La fréquence est de 0,5 à 10 %, ce qui traduit une fréquence élevée.
La maladie survient durant la période de croissance pubertaire du
rachis entre 13 et 17 ans et il y a une prédominance de garçons.
Le
sport intensif est un facteur d’aggravation des lésions. La maladie
peut être totalement asymptomatique et découverte sur des
radiographies de profil du thorax.
Les signes cliniques habituels prédominent sur le rachis dorsal bas
et associent :
– des douleurs de type mécanique d’intensité variable ;
– une cyphose qui peut être :
– thoracique moyenne (75-80 %) avec un apex en T7-T8
correspondant à une exagération de la cyphose physiologique
avec souvent une composante asthénique et une association avec
une hyperlordose lombaire ;
– thoracolombaire (20-25 %) plus rare, centrée sur T12 avec un
effacement de la lordose lombaire et une verticalisation sacrée
(5 %).
Cette déformation est réductible au début, mais peut devenir
progressivement fixée par la contracture qui accompagne la
douleur ;
– une scoliose thoracolombaire qui est associée dans 15 à 20 % des
cas.
Les signes neurologiques sont rares. Une paraparésie par
compression médullaire au sommet de la cyphose est exceptionnelle.
Les complications neurologiques des atteintes lombaires ont une
fréquence qui augmente compte tenu du développement du sport
de haut niveau chez les adolescents : sciatique souvent à bascule,
syndrome de la queue de cheval, claudication intermittente non
vasculaire.
3- Imagerie
:
* Indication des examens
:
Le diagnostic repose sur les cliches simples du rachis de profil.
Le
rachis dorsal doit être exploré par un cliché de profil réalisé debout.
En cas de forme symptomatique, le cliché simple du rachis dorsal
de profil doit être complété par deux clichés du rachis dans son
ensemble pour analyser la statique.
Quand l’amplitude de la
cyphose est supérieure à 50°, il peut être réalisé un test de
réductibilité par un cliché de profil en décubitus dorsal, à rayon
horizontal, le sommet de la cyphose appuyant sur un billot.
Les
contrôles de l’évolution reposent sur des radiographies simples de
profil.
En cas de signes neurologiques ou de signes atypiques, l’IRM
représente le complément parfait des clichés simples.
L’examen
tomodensitométrique n’est indiqué qu’en cas de hernie intraspongieuse prémarginale postérieure pour ne pas méconnaître
une fracture ostéochondrale du listel.
Les critères de diagnostic habituellement retenus ne sont pas
satisfaisants.
Il faudrait, pour poser ce diagnostic, une atteinte d’au
moins trois vertèbres contiguës, chacune présentant une cunéiformation de 5° ou plus.
Ces critères ne sont pas idéaux car ils
excluent les lésions des plateaux vertébraux sans cunéiformation,
les formes disséminées et les atteintes lombaires isolées.
* Signes radiologiques
:
La cyphose est en général supérieure à 50°.
La scoliose
souvent associée est une courbure thoracolombaire, plutôt droite à
grand rayon et faible amplitude, sans rotation des corps vertébraux
sur leur axe.
Les plateaux vertébraux supérieurs et inférieurs ont un aspect
irrégulier, « ondulé » ou « feuilleté ».
Les corps vertébraux qui se
situent au sommet de la cyphose présentent une déformation
antérieure en « coin ».
L’importance de cette déformation s’évalue
par l’angle formé par la tangente aux deux plateaux, l’angle étant
pathologique quand il est supérieur à 5°.
Au début, le disque intervertébral peut apparaître bombant et
biconvexe avec un plateau vertébral déprimé et aminci en regard du
nucleus pulposus, ce qui est lié à la compression du cartilage par le
nucleus turgescent, gênant son ossification normale.
Le pincement
discal est tardif et inconstant.
Il traduit toujours une dégénérescence
discale.
Il peut s’accompagner d’un phénomène du gaz intradiscal.
Plus fréquemment, un petit liseré gazeux est visible en regard du
bord antérieur du plateau vertébral et il traduit une lésion
dégénérative de l’annulus en regard d’un arrachement des fibres de
Sharpey.
La dégénérescence discale précoce ne peut être diagnostiquée que
par l’IRM sur deux signes : la perte du signal du disque par rapport
aux disques normaux traduisant une perte d’eau, parfois associée à
des hypersignaux périphériques traduisant des lésions de l’annulus.
La protrusion discale est plus rare, mais toujours associée à une
dégénérescence.
Les hernies intraspongieuses centrales sont diagnostiquées sur les
clichés simples : elles apparaissent comme une petite lacune claire,
au contact du plateau vertébral, entourée d’un liseré de
condensation plus ou moins épais.
La tomodensitométrie et l’IRM
ne sont pas nécessaires au diagnostic.
Les hernies rétromarginales
antérieures et latérales sont visibles sur les clichés simples, surtout
le profil ; avant l’ossification du listel marginal, il existe une
amputation de l’angle antérosupérieur ou antéro-inférieur d’une
vertèbre, avec un bord irrégulier, souligné d’un liseré de
condensation plus ou moins épais.
Une diminution de
hauteur de la partie antérieure du disque est souvent associée, liée à
la migration du matériel discal.
L’angle de la vertèbre opposée est
normal, ce qui est un bon signe de diagnostic différentiel avec les spondylodiscites.
Après l’ossification du listel marginal, le fragment arraché apparaît
comme un petit ossicule triangulaire ou linéaire se projetant dans la
concavité de la lacune de l’angle vertébral, dépassant l’alignement
antérieur des corps vertébraux.
L’évolution se fait vers la constitution d’une vertèbre limbique
antérieure typique avec un ossicule triangulaire plus ou moins
hypertrophique, accolé à l’angle antérosupérieur ou inférieur de la
vertèbre avec une condensation des deux bords ou une fusion
complète.
Le disque est pincé en regard avec apparition
possible du phénomène du gaz intradiscal, favorisé par l’extension,
au contact des lésions, traduisant l’aggravation des phénomènes
dégénératifs et l’évolution vers l’arthrose.
La fusion antérieure des
deux corps vertébraux par un gros ostéophyte en pont, ou par fusion
directe du tiers antérieur des deux corps vertébraux est plus rare.
Cette évolution est responsable d’une cyphose fixée.
Sur le plan statique, l’existence d’une cyphose dorsale peut entraîner
une hyperlordose lombaire compensatrice.
Cette hyperlordose est
elle-même génératrice de déséquilibre au niveau de la charnière
lombosacrée, qui doit alors être évaluée par l’étude de la statique
du bassin.
Les autres complications possibles de la dystrophie rachidienne de
croissance sont constituées par les hernies rétromarginales
postérieures, plus rares.
Le diagnostic est au mieux fait par la
tomodensitométrie avec reconstruction de coupes sagittales.
F - SPONDYLOLYSES ET SPONDYLOLISTHÉSIS
:
La spondylolyse ou lyse isthmique correspond à une solution de
continuité de l’isthme articulaire de la vertèbre.
Elle est inhérente à
la station verticale dans l’espèce humaine, aggravant la lordose
lombaire.
Le spondylolisthésis est secondaire à une spondylolyse
bilatérale. Il correspond à un glissement antérieur (listhésis) d’un
corps vertébral par rapport au corps vertébral sous-jacent.
La spondylolyse peut être unilatérale et le spondylolisthésis secondaire
est alors plutôt rotatoire.
L’activité sportive correspond au pic de fréquence le plus élevé de
cette pathologie qui se situe pendant l’adolescence.
Elle est
particulièrement fréquente chez ceux qui pratiquent des sports
provoquant des déséquilibres musculaires du tronc et/ou des contraintes exagérées en hyperlordose lombaire (gymnastique,
plongeon, lutte, haltérophilie, judo, saut à la perche et en
hauteur...).
L’atteinte de L5 est la plus fréquente.
La classification des spondylolisthésis proposée par Wiltse
individualise six types, dysostosiques (I), avec spondylolyse (II),
dégénératifs (III), traumatiques (IV), par fragilisation osseuse diffuse
(V), et iatrogènes (VI).
Les types retrouvés chez l’enfant sont les
types II et I et plus rarement le type VI.
Parmi les spondylolisthésis
avec lésion isthmique, que nous allons développer, on distingue trois
sous-types :
– type II A par lyse isthmique ;
– type II B par allongement isthmique ;
– type II C par fracture traumatique aiguë de l’isthme.
1- Pathogénie
:
L’existence de facteurs génétiques prédisposants est probable.
Les spondylolyses prédominent chez le sujet jeune entre 10 et 30 ans.
Cette fréquence augmente dans la population sportive atteignant
30 % chez certaines catégories d’athlètes avec une prédominance
masculine.
Il n’y a pas d’argument pour une origine congénitale de
la spondylolyse.
La spondylolyse siège sur L5 dans 90 à 96 % des cas, et sur L4 dans
4 à 10 %.
L’atteinte de L3 est exceptionnelle.
L’atteinte est bilatérale
dans 85 % des cas. Celle de deux, voire de trois niveaux est très rare.
La spondylolyse correspond à une fracture de fatigue de l’isthme.
À
l’étage L5, l’isthme qui est le plus horizontal est pris en tenaille lors
des mouvements d’hyperextension, entre l’apophyse articulaire
inférieure de L4 et l’apophyse articulaire supérieure de S1.
Cette
contrainte est exagérée en cas d’hyperlordose, ou d’horizontalisation
sacrée avec antéversion du bassin : l’étude de l’équilibre du pelvis
et de la version pelvienne est ici importante.
Rarement, la fracture isthmique peut être aiguë, à la suite d’un seul
épisode traumatique (type II C).
Le plus souvent, il s’agit de
microtraumatismes répétés entraînant une fracture de fatigue (type II A).
Cette fracture peut évoluer vers une pseudarthrose avec une
solution de continuité qui s’élargit, ou consolider avec un cal
hypertrophique et irrégulier.
Ces fractures peuvent se répéter et
aboutir, après des consolidations itératives, à un allongement de
l’isthme (type II B) qui a longtemps été interprété comme un isthme
dysplasique.
En fonction des contraintes mécaniques liées au poids du corps, le
corps vertébral sus-jacent va glisser en avant en cas de lyse bilatérale, ou va présenter un glissement modéré avec rotation en
cas de lyse unilatérale.
Le spondylolisthésis dysostosique ou dysplasique est dû à une
anomalie congénitale (hypoplasie ou agénésie) des apophyses
articulaires de S1 et/ou de l’arc postérieur de L5 avec une
subluxation importante.
L’ isthme est intact.
Ce type est très rare.
2- Clinique
:
Les manifestations cliniques sont variables.
Les lyses isthmiques sont
le plus souvent asymptomatiques et découvertes à l’occasion d’un
examen systématique ou d’une recherche préventive (accession aux
métiers du sport).
L’exercice sportif est susceptible d’induire la
décompensation douloureuse plus fréquemment et plus
précocement, ce qui explique la plus grande fréquence dans cette
population.
Les lombalgies aiguës sont beaucoup plus rares et doivent faire
rechercher une fracture récente.
Elles sont plus fréquentes chez
l’adolescent.
Les radiculalgies sont peu fréquentes.
Elles peuvent
correspondrent à une sciatique radiculaire franche, ou atypique,
tronquée ou à bascule, sans anomalie des réflexes, évoquant plutôt
une pathologie des facettes articulaires.
3- Imagerie
:
L’imagerie a plusieurs objectifs :
– analyser la pathologie de l’isthme ;
– apprécier l’importance et le type du glissement ;
– apprécier la stabilité du glissement, évaluer la statique du
complexe rachis-bassin ;
– analyser le retentissement sur le disque et sur les foramens.
L’importance des moyens d’investigation engagés dépend de la
symptomatologie.
Les clichés simples représentent toujours la
première étape, pour juger de la nécessité d’explorations
complémentaires.
* Analyse de la pathologie de l’isthme
:
Spondylolisthésis avec lyse isthmique bilatérale (type II A).
L’incidence de profil est fondamentale : la lyse isthmique apparaît
comme une ligne claire, oblique en bas et en avant, grossièrement
perpendiculaire à l’axe des facettes articulaires, allant de l’angle postérosupérieur à l’angle antéro-inférieur du massif articulaire.
L’incidence de face, même sensibilisée par un rayon
ascendant à 30°, ne montre la lyse que dans un petit nombre de cas
(20 à 30 %) ; elle est peu contributive.
Les obliques ne sont pas
systématiques quand le profil fait le diagnostic.
Elles montrent une
solution de continuité au niveau du « cou du petit chien ».
L’examen tomodensitométrique est indiqué dans les cas difficiles ; il
permet de mieux voir l’isthmolyse que sur les clichés simples.
Les coupes axiales parallèles au plan du disque sont peu
contributives, les lyses isthmiques étant souvent confondues avec
l’interligne interarticulaire.
Les coupes ou les reconstructions 2D
axiales doivent être réalisées dans le plan parallèle à l’arc neural
postérieur.
Les reconstructions sagittales 2D paramédianes sont
très intéressantes, permettant d’obtenir les mêmes images qu’en
tomographie conventionnelle.
Les lyses isthmiques apparaissent comme des solutions de continuité hypodenses de l’arc postérieur, à bords irréguliers, sinueux avec des
berges inégalement condensées, situées en avant de l’interligne
articulaire, avec un axe grossièrement coronal.
Cette lyse isthmique
doit être différenciée de l’interligne interfacettaire.
L’IRM n’est pas intéressante pour l’analyse de l’isthmolyse.
Elle
est, en revanche, très utile pour l’analyse du retentissement des spondylolisthésis en cas de symptomatologie radiculaire associée.
Le cliché de face montre une hypertrophie et une
condensation du pédicule opposé (anisocorie pédiculaire) :
hyperostose de l’hémiarc postérieur sain qui subit toutes les
contraintes mécaniques, ou cal en rapport avec la consolidation d’une fracture de fatigue controlatérale antérieure à l’épisode actuel.
Elle peut également se voir en cas de dysostose avec agénésie ou
hypoplasie de l’hémiarc controlatéral.
La tomodensitométrie montre
l’isthmolyse unilatérale, la condensation et l’hypertrophie de
l’hémiarc opposé au sein duquel on peut retrouver un trait de
fracture plus ancien.
* Spondylolisthésis avec fracture traumatique de l’isthme (type II C).
Cette circonstance est rare.
Le patient se présente avec un dos
douloureux et raide en rapport avec une contracture des muscles
lombaires, après un traumatisme ou un effort prolongé.
Il a parfois
ressenti une sensation de craquement précédant l’installation du
syndrome douloureux.
Les clichés simples sont souvent difficiles à
lire et le trait de fracture isthmique peut être méconnu à ce stade de
début.
La scintigraphie est intéressante pour donner un niveau
lésionnel et permettre la réalisation d’un examen
tomodensitométrique centré, avec reconstruction sagittale 2D, qui
va montrer la solution de continuité.
Le trait de fracture est
classiquement plus fin avec des bords irréguliers sans condensation,
mais cette fracture peut survenir sur un isthme préalablement
densifié par une fracture antérieure, ou par une exagération des
contraintes.
Ce type de lésion est susceptible de guérir par
consolidation avec un traitement orthopédique.
* Spondylolisthésis avec allongement des isthmes (type II B).
Les clichés simples montrent deux types d’anomalies :
– un allongement des isthmes.
Ils sont étirés, amincis, parfois
condensés avec une horizontalisation et quelquefois un aspect
incurvé qui se moule sur la déformation en dôme de la plaque
sacrée.
Ces isthmes allongés, qui sont interprétés comme des
séquelles de fracture de fatigue répétées, peuvent présenter une
fracture récente au moment de l’examen ;
– des signes de dysplasie associant :
– une déformation du corps vertébral de L5 qui prend un aspect
trapézoïdal avec un bord postérieur moins haut que le bord
antérieur.
L’index lombaire (rapport entre la hauteur du bord
postérieur et celle du bord antérieur) permet de quantifier cette
déformation ;
– une déformation de la plaque sacrée qui devient arrondie,
convexe vers le haut, déformée en dôme. L’index de convexité
permet là aussi de quantifier cette déformation.
Ces déformations ont fait évoquer une dysplasie, d’où le nom de
cette forme.
Elles sont en fait dues au caractère très chronique et
progressif de ce glissement, avec un remodelage de croissance de
L5 et de S1.
Dans la forme majeure, il peut exister une spondyloptose de L5 sur S1 ; celle-ci peut être congénitale.
L’examen tomodensitométrique avec reconstruction sagittale, et à un
degré moindre l’IRM en coupe sagittale paramédiane permettent de
bien analyser l’allongement isthmique et ces déformations.
* Appréciation de l’importance et du type de glissement
:
Le glissement est apprécié sur les clichés simples qui sont suffisants.
L’importance du glissement est appréciée selon la classification de Meyerding.
La plaque sacrée est divisée en quatre quarts et
le glissement est évalué en fonction de la position de la tangente au
bord postérieur de L5.
Le type de glissement (olisthésis) est intéressant à préciser.
Il
s’apprécie en fonction du type de rotation sagittale :
– l’olisthésis est axial quand le glissement est parallèle à l’axe du
disque L5-S1 ;
– l’olisthésis est en flexion quand le corps de L5 bascule en bas et
en avant.
C’est le type le plus fréquent ;
– l’olisthésis est en extension quand le corps de L5 glisse en avant
et vers le haut.
Ce type d’olisthésis est le plus agressif pour le disque
à cause du pincement postérieur et pour le foramen.
Cette rotation du corps vertébral pendant le glissement peut être
appréciée par l’angle de glissement formé par la tangente au bord
inférieur de L5 et la perpendiculaire au bord postérieur de S1.
* Appréciation de la stabilité du glissement
:
Les clichés simples en flexion et en extension permettent d’apprécier
la stabilité ou l’instabilité du glissement et d’apprécier ainsi la
mobilité du disque olisthésique (pincement-bâillement).
Le
déplacement s’apprécie par rapport à une ligne tendue entre le bord
antérieur du plateau sacré et l’angle antérosupérieur de la première
vertèbre saine.
La position du bord antérieur de la vertèbre
pathologique ne doit pas changer en flexion et en extension.
Une
variation révèle une mobilité excessive.
Ces clichés sont réalisés assis
pour optimiser cette mobilité potentielle.
L’équilibre du complexe rachis-bassin conditionne la stabilité globale
et le risque évolutif.
Si L5 glisse en avant, il apparaît une
rétroversion du bassin avec verticalisation du sacrum.
* Appréciation de l’équilibre pelvirachidien
:
L’équilibre pelvien est capital à évaluer en cas de spondylolisthésis
et l’on oppose classiquement :
– les spondylolisthésis à incidence pelvienne forte avec une
hyperlordose lombaire, une incidence forte et une horizontalisation
du sacrum avec comme conséquence une antéversion pelvienne ;
– les spondylolisthésis à incidence pelvienne faible, avec une
cyphose lombosacrée, une incidence pelvienne faible, une
verticalisation du sacrum avec comme conséquence une rétroversion
pelvienne.
* Évaluation du retentissement sur le disque et le foramen
:
L’IRM permet de faire parfaitement l’analyse du disque et des
foramens.
La dégénérescence discale se manifeste par un hyposignal discal sur
les séquences en écho de spin pondérées T2.
La distorsion discale correspond à la découverture postérieure du
disque sous-jacent à la vertèbre qui glisse, alors qu’il reste aligné
avec la vertèbre sous-jacente.
L’olisthésis en extension est
responsable d’un pincement discal postérieur qui aggrave la
distorsion.
Les hernies discales favorisées par les olisthésis en flexion se font en
L5-S1 ou L4-L5 en cas de spondylolisthésis de L5 sur S1, et en L4-L5
en cas de spondylolisthésis de L4 sur L5.
Les sténoses foraminales responsables de radiculalgies relèvent de
plusieurs facteurs plus ou moins associés :
– l’horizontalisation du foramen ;
– la distorsion latérale du disque et parfois une hernie foraminale ;
– le nodule de Gill qui correspond à une pseudarthrose fibreuse de
la fracture de l’isthme, plus ou moins hypertrophique et parfois
calcifié ;
– le crochet qui correspond à l’angle antéro-inférieur du fragment
supérieur de l’isthme fracturé, qui entraîne la racine en avant,
surtout en cas d’olisthésis en extension.
Tous ces éléments participent à la compression de la racine entre le
disque distordu ou hernié en avant et le nodule et le crochet en
arrière, dans un foramen déjà réduit de calibre.