Il existe de nombreuses incidences permettant d’étudier l’extrémité
supérieure de l’humérus.
Certaines nécessitent idéalement l’aide de
la radioscopie.
La face en double obliquité, le profil transthoracique,
le profil dans le plan de l’omoplate, le profil axillaire et la vue
apicale oblique sont parmi les incidences les plus utilisées.
La plupart prennent l’omoplate comme plan de référence afin
d’enfiler l’interligne articulaire et de dégager l’humérus de la cage
thoracique.
Ainsi, le cliché de face stricte, le patient le dos contre la
plaque et le rayon perpendiculaire à la plaque, n’a guère d’intérêt et
favorise la méconnaissance d’une luxation postérieure.
Il en est de
même du profil transthoracique qui analyse l’épaule blessée à
travers la cage thoracique sur un patient de profil dont le bras
opposé est en élévation.
Les superpositions sont nombreuses
rendant l’interprétation difficile.
Le cliché de face classique en double obliquité, obliquité de 20° du
patient par rapport à la plaque (épaule opposée soulevée sur un
patient en décubitus) et obliquité de 20° du rayon vers les pieds du
patient pour enfiler la voûte acromiale, doit être pris en rotation
neutre.
Il peut être complété par des clichés en rotation interne puis
en rotation externe.
Il est plus difficile de choisir entre les nombreux
profils.
Le cliché de profil de l’omoplate de Neer ou profil de Lamy enfile
horizontalement l’écaille de l’omoplate.
Il se distingue du profil de
coiffe, plus approprié à la pathologie de la coiffe des rotateurs,
obtenu sous scopie dont le rayon, également postéroantérieur, est
incliné par rapport au plan horizontal de 15° en bas et en avant.
Le cliché de profil axillaire est réalisé l’épaule en abduction, en
position assise avec un rayon vertical ou en décubitus dorsal avec
un rayon entrant par l’aisselle, horizontal et oblique, perpendiculaire
à la plaque placée au-dessus du moignon de l’épaule.
L’épaule
traumatisée peut être mise en abduction beaucoup plus facilement
qu’on ne le pense en écartant doucement et prudemment le bras du
corps.
L’importance des renseignements apportés par cette
incidence, à tort peu pratiquée en urgence, suffit à justifier la
présence du traumatologue en radiologie.
Néanmoins, la douleur
reste un obstacle et a fait proposer le cliché suivant.
La vue apicale oblique, cliché dit « profil de Garth », repose sur le
même principe que l’incidence de Velpeau.
Tous les deux ont
l’avantage de pouvoir être réalisés le bras en écharpe en rotation
interne coude au corps. Pour le profil de Velpeau, l’incidence est
verticale sur un patient ayant le tronc incliné en arrière de 45° vers
une plaque horizontale.
Pour le profil de Garth, le rayon est incliné
de 45° vers le bas sur un patient debout vers une plaque verticale.
Le profil glénoïdien de Bernageau, destiné à l’étude de la partie
antéro-inférieure de la glène, n’est pas utilisé dans les fractures de
l’extrémité supérieure de l’humérus.
Enfin, le cliché de profil de Bloom et Obata, réalisé avec un rayon
ascendant de 35° et qui a été présenté comme l’incidence élective
des luxations postérieures, n’est pratiquement plus utilisé.
Dans la pratique quotidienne, les clichés demandés sont encore trop
souvent une face et un profil transthoraciques d’intérêt médiocre, en
dehors du cas particulier du polytraumatisé où ce sont parfois les
seuls clichés réalisables.
La série traumatologique de Neer a le
mérite de comprendre plusieurs incidences orthogonales : une face
vraie, un profil de Lamy et un profil axillaire.
Dans la majorité des cas, ces clichés standards bien réalisés
permettent de poser un diagnostic précis.
Mais il est des cas dans
lesquels une imagerie standard de bonne qualité ne permet pas de
conclure.
L’étude de la Sofcot nous a montré que son intérêt
principal est de préciser l’état du trochin et d’analyser les luxationsfractures
postérieures.
La réalisation de coupes jointives ou
l’acquisition hélicoïdale permettent d’obtenir des reconstructions biet
tridimensionnelles dont la résolution s’améliore avec les progrès
techniques de l’imagerie.
La TDM, toutefois, ne doit en aucun cas se
substituer à des clichés imparfaits, d’autant qu’elle ne pallie pas
toutes les insuffisances de la radiographie standard.
Elle se heurte à
une difficulté qui rend son interprétation parfois délicate : les coupes
sont réalisées dans le plan horizontal alors que les fragments ne sont
pas en position anatomique.
Il faut encore insister sur la fausse luxation inférieure, fréquemment
observée sur les clichés précoces.
Elle est le plus souvent due à la
sidération musculaire liée à la fracture, tout comme une épaule
normale présente sous anesthésie générale un certain degré de subluxation inférieure.
Il s’agit d’un épiphénomène qui régresse
toujours, plus ou moins rapidement, après rééducation des muscles
longs.
Elle ne nécessite aucun geste thérapeutique spécifique.
Néanmoins, elle s’observe également en cas de paralysie circonflexe
et son évolution dépend de la gravité de la lésion nerveuse.
Traitement
:
A - MÉTHODES THÉRAPEUTIQUES
:
L’idéal est la restitution complète et indolore des amplitudes
articulaires de l’épaule.
Le risque de capsulite rétractile est
particulièrement important et commun à toutes les fractures, incitant
à la mobilisation la plus précoce possible.
Les cals vicieux et les nécroses céphaliques ont la réputation d’être
bien tolérés à l’épaule.
Il existe en fait un certain parallélisme entre
la qualité de la réduction à consolidation et le résultat fonctionnel,
justifiant des ostéosynthèses exactes.
Par ailleurs, la survenue d’une nécrose est péjorative, même si elle
peut être bien tolérée lorsque la réduction est anatomique ou
presque.
Les risques de cal vicieux et de nécrose sont plus
élevés dans les fractures articulaires, dont le pronostic fonctionnel
est donc plus sombre.
Les nombreuses propositions thérapeutiques témoignent des
difficultés rencontrées.
Elles vont du traitement orthopédique à la
prothèse humérale en passant par différents types d’ostéosynthèse.
Le chirurgien doit garder à l’esprit un certain nombre de
considérations propres au membre supérieur :
– il n’est pas porteur, mais suspendu à la ceinture scapulaire et la
simple traction due à la pesanteur a tendance à aligner les
fragments ;
– la contention d’une fracture ne nécessite pas une stabilité parfaite
sous réserve qu’il existe un contact suffisant entre les fragments ;
– le membre supérieur travaille isolément et il n’y a donc pas de
problème d’inégalité de longueur ;
– les cals vicieux extra-articulaires de l’humérus sont mieux tolérés
que ceux du fémur ;
– les problèmes d’ostéosynthèse du membre supérieur sont
différents de ceux du membre inférieur ; à l’épaule, la récupération
de la mobilité est plus difficile : il faut donc privilégier les solutions
chirurgicales autorisant une rééducation rapide ;
– l’épaule est une articulation particulièrement fragile : toute
ostéosynthèse doit être la moins agressive possible ; les abords
extensifs et les ostéosynthèses massives peuvent avoir un
retentissement fonctionnel grave.
Il est en fait difficile de trouver un compromis entre une
ostéosynthèse légère nécessitant une immobilisation et une
ostéosynthèse massive autorisant une rééducation précoce.
1- Traitement orthopédique
:
La réduction des fractures déplacées par manoeuvres externes ne
permet en fait que d’aligner la diaphyse sous l’épiphyse.
On ne peut
en effet agir sur les trois autres segments : le trochiter, le trochin et
la tête.
Ces manoeuvres doivent être prudentes car elles peuvent
aggraver les lésions osseuses ou entraîner des complications vasculonerveuses.
La réduction d’une luxation associée à une fracture, simple en cas
de luxation antéro-interne avec fracture du trochiter, est beaucoup
plus difficile, voire impossible en cas de fracture avec tête
désengrenée, ou dangereuse lorsqu’une fracture comportant un
fragment céphalique est engrenée.
Le relâchement musculaire
doit être obtenu sous anesthésie générale avec traction lente et
progressive dans l’axe du membre en utilisant éventuellement une
contre-extension axillaire.
La tête est refoulée manuellement, voire
à l’aide d’un poinçon percutané dont le maniement nous paraît
dangereux.
La contention des fractures est assurée dans la grande majorité des
cas par un bandage de type Dujarier, qui a le mérite de la facilité.
Le
positionnement du bras est guidé par l’alignement de la fracture.
L’abduction est en règle nocive et une discrète adduction permise
par une antéflexion et une rotation interne amenant le poignet sur la
région épigastrique est souvent souhaitable.
Cette immobilisation est
effectuée par de larges bandes Velpeaut renforcées par une bande
collante circulaire après un contrôle radiographique de la réduction.
Des bandages du même type sont actuellement disponibles dans le commerce ; ils ont le mérite d’un plus grand confort, et permettent
de réduire le risque de mycose du creux axillaire, plus fréquente
l’été.
L’immobilisation de type Mayo Clinic à l’aide d’un jersey tubulaire
est de réalisation rapide et aisée.
Malheureusement, elle est
beaucoup moins stricte et trop permissive. Son inconvénient majeur
est la possibilité d’une rétropulsion humérale en décubitus dorsal,
source de déplacement secondaire.
Pour diminuer le risque d’enraidissement de l’épaule en adduction,
certains utilisent des attelles d’abduction ou l’appareil de Pouliquen,
voire un plâtre thoracobrachial, pour immobiliser en élévation de
45 à 80° dans le plan de l’omoplate.
Cette position est parfois
incompatible avec un alignement satisfaisant.
Ces appareillages sont
en outre générateurs de compression cutanée ou nerveuse,
notamment du nerf cubital au coude, mais ont le mérite d’éviter
l’enraidissement coude au corps et de faciliter ainsi la rééducation.
La traction continue par broche transcubitale, qui impose une
immobilisation stricte au lit, est anecdotique.
Le plâtre pendant brachio-antibrachio-palmaire n’aligne la fracture qu’en position
assise et n’immobilise pas l’épaule.
2- Traitement chirurgical
:
* Ostéosynthèses
:
Il faut opposer les ostéosynthèses classiques à foyer ouvert et celles
plus récentes à foyer fermé.
+ Ostéosynthèses à foyer fermé
:
Les plus récentes, elles s’appliquent essentiellement aux fractures extra-articulaires ou à des fractures articulaires peu complexes, telles
que les fractures céphalotuberculaires de type II.
Elles ont deux
mérites essentiels : réduire le risque infectieux et éviter l’abord direct
et ses conséquences (dévascularisation osseuse et des parties molles,
adhérences postopératoires).
Pratiquées sous amplificateur de
brillance, elles comportent une réduction le plus souvent manuelle
mais parfois à l’aide de crochets, spatules ou poinçons introduits
par voie percutanée, suivie de fixation par clou centromédullaire,
broches ascendantes centromédullaires, voire brochage direct.
Un enclouage centromédullaire par clou de Postel, de Seidel ou de
Rush peut être pratiqué par un court abord externe, à travers la
coiffe, en sachant son retentissement possible sur la mobilité de
l’épaule, notamment en cas de saillie immédiate ou secondaire du
clou dans l’espace sous-acromial.
L’embrochage ascendant, à l’aide d’au moins trois broches
divergeant en « palmier » dans l’épiphyse, lui est préféré car il
n’expose pas à ce risque.
Pour obtenir cette divergence qui assure
une plus grande stabilité, les broches doivent être incurvées à leur
extrémité.
Il existe plusieurs modalités d’introduction des broches.
Au niveau du coude, Vichard a recommandé un double abord
par l’épitrochlée et l’épicondyle, et Hackethal un abord médian
sus-olécranien.
Les deux peuvent retentir sur la mobilité du coude
et notamment limiter l’extension.
L’abord à la pointe du V deltoïdien
proposé par Kapandji met à l’abri de cet inconvénient.
En
revanche, il est plus difficile d’obtenir une bonne divergence épiphysaire des broches, en raison du trajet moins direct des broches
qui « rebondissent » sur la corticale interne.
Enfin, il expose, en cas
d’abord trop postérieur, à la lésion du nerf radial, lors de la pose
des broches comme de leur ablation.
Plus récemment, certains ont proposé le brochage direct à l’aide de
deux ou trois broches croisées dans l’espace pour assurer une
stabilité suffisante.
On peut même les remplacer par des vis
canulées guidées par ces broches.
Il s’agit d’interventions difficiles nécessitant le contrôle
radioscopique peropératoire de face et de profil de la réduction,
parfois instable ou imparfaite, et de la bonne position des broches.
Celles-ci peuvent faire issue dans l’articulation ou par un trait de
fracture, d’emblée ou secondairement, par migration des broches ou
impaction de la fracture.
Elles peuvent également reculer, toutes
complications qui nécessitent l’ablation précoce des broches en
cause.
La stabilité du foyer fracturaire obtenue est souvent
imparfaite et en tout cas insuffisante pour permettre une
mobilisation précoce, surtout en rotation.
Une immobilisation
complémentaire est habituellement nécessaire.
En cas de difficultés
de réduction ou d’introduction des broches, il ne faut pas s’obstiner
à foyer fermé et aborder le foyer, ce que l’installation doit permettre.
+ Ostéosynthèses à foyer ouvert
:
Voie d’abord : la voie d’abord deltopectorale, la plus utilisée, permet
l’ostéosynthèse de la grande majorité des fractures.
Elle ne procure
qu’un jour limité sur le tubercule majeur, qui peut être amélioré en
portant le bras en abduction et rotation interne.
Elle peut être élargie
à son extrémité inférieure en désinsérant la branche antérieure du
V deltoïdien.
La désinsertion haute du deltoïde antérieur est
déconseillée.
L’ostéosynthèse du tubercule majeur ne nécessite
qu’une courte voie transdeltoïdienne externe.
En cas de nécessité,
ces deux voies peuvent être associées mais on peut également, par
une incision cutanée un peu plus latérale que l’incision deltopectorale, accéder en dedans au sillon deltopectoral et en
dehors à la partie moyenne du deltoïde pour un abord
complémentaire du tubercule majeur.
D’autres voies sont employées
comme la voie supéroexterne avec détachement du deltoïde
acromial, la voie transacromiale ou la voie deltotrapézienne.
Elles
procurent une bonne exposition de l’épiphyse mais un accès limité à
la diaphyse.
Des voies postérieures ont été proposées pour les fractures-luxations postérieures. Elles n’offrent qu’un jour limité,
notamment sur la diaphyse.
Abord du foyer : il doit dévasculariser le moins possible les fragments
osseux et notamment le fragment porteur du segment céphalique.
Les sections musculaires et capsulaires doivent être évitées ou
réduites au strict minimum.
Il faut également proscrire les
ostéotomies tuberculaires qui dévascularisent le fragment
céphalique.
La règle pour exposer le foyer est d’écarter les fragments
osseux en respectant les parties molles qui s’y insèrent.
Ainsi, dans
les fractures céphalotuberculaires, l’abord du fragment céphalique
est intertubérositaire en écartant les deux tubérosités séparées l’une
de l’autre, ou plus rarement sous-tubérositaire lorsqu’elles sont
situées sur le même fragment. Les fragments osseux, souvent
fragiles et refendus, doivent être manipulés avec précaution.
Ostéosynthèses : plusieurs types d’ostéosynthèse sont utilisés depuis
la synthèse a minima par ostéosutures au fil non résorbable jusqu’à
la plaque épiphysaire ou ses dérivés (clous-plaques ou lamesplaques
de petite taille), en passant par les clous, cerclages, broches,
haubans, vis, agrafes.
Les cerclages au fil métallique sont
déconseillés en raison du risque de rupture et de migration, parfois intra-articulaire.
Ces ostéosynthèses peuvent être diversement
associées.
Citons encore le remodelage du moignon diaphysaire
encastré dans le fragment épiphysaire en « bilboquet » ou
l’enchevillement diaphysoépiphysaire à l’aide d’un greffon
iliaque.
Le plus difficile est d’assurer le raccordement épiphysodiaphysaire,
surtout lorsque le fragment proximal est peu volumineux et fragile.
La plaque et ses dérivés sont des ostéosynthèses extensives
nécessitant une large exposition qui risque d’aggraver la dévascularisation osseuse.
Elles exposent à l’issue intra-articulaire
de vis trop longues.
Leur point faible est la prise parfois médiocre
du matériel dans le spongieux épiphysaire et, en cas de nécrose
céphalique, ce matériel peut faire issue dans l’articulation et entrer
en conflit avec la glène.
Il est essentiel que le bord supérieur de la
plaque ne dépasse pas le bord supérieur du trochiter.
Son
positionnement doit encore tenir compte de la proximité de la berge
externe de la coulisse bicipitale où chemine l’artère ascendante antéroexterne. Les enclouages ou embrochages descendants ont
l’inconvénient de fragiliser la coiffe et de pouvoir entrer en conflit
avec la voûte, notamment en cas de recul.
Il est possible de leur
associer un cerclage en huit prenant appui sur le matériel en haut et
sur la diaphyse en bas, réalisant un hauban.
* Arthroplasties humérales
:
La prothèse humérale simple scellée est le recours ultime en cas
d’ostéosynthèse impossible techniquement ou de fracture exposant
à un risque de nécrose important.
L’abord articulaire se fait en règle
par écartement des tubérosités en sectionnant la capsule entre supraspinatus et subscapularis (abord intertubérositaire) ou en
soulevant les deux tubérosités ensemble (abord sous-tubérositaire)
lorsque les deux tubérosités sont situées sur un même fragment ou
solidarisées par des attaches périostées.
Cet abord facilite peut-être
la reconstruction métaphysaire mais il nécessite la rupture des
attaches périostées à la diaphyse et donne un jour limité sur
l’articulation.
La reconstruction humérale doit être la plus exacte
possible.
Ceci nécessite le rétablissement de la longueur humérale,
une rétroversion prothétique correcte, le rétablissement de la largeur épiphysaire, une fixation prothétique stable et une ostéosynthèse
solide des tubérosités.
Certaines lésions associées nécessitent des
gestes spécifiques comme la suture d’une rupture de coiffe, le
cerclage d’une extension diaphysaire de la fracture, voire un geste
vasculaire dans d’exceptionnelles lésions artérielles.
Dans une fracture-luxation, il est logique de pratiquer
l’ostéosynthèse d’une fracture de la glène, la suture d’une déchirure
capsulaire ou la réinsertion d’un décollement capsulopériosté, afin
de réduire le risque de luxation postopératoire.
Il est en revanche
illogique d’augmenter la rétroversion en cas de luxation antérieure
et de la diminuer en cas de luxation postérieure, ce qui modifie la
position des tubérosités et sollicite exagérément la fixation de celle
qui se trouve attirée trop en avant ou en arrière, exposant aux
démontages, pseudarthroses et cals vicieux.
Certaines fractures
glénoïdiennes comminutives posent un problème particulier.
En
effet, l’impossibilité de fixer les fragments détachés expose à
l’instabilité prothétique et on peut, dans ce cas, discuter une butée
ou la totalisation de la prothèse.
Cependant, ces gestes alourdissent
l’intervention et il vaut mieux les éviter dans ce contexte
traumatique.
Hormis ce rare cas ou celui d’importantes altérations
du cartilage glénoïdien préexistantes au traumatisme, la prothèse
totale n’est pas justifiée dans les fractures récentes.
3- Rééducation
:
Elle est capitale et conditionne en partie le résultat final.
À l’issue
du traumatisme et d’une éventuelle intervention, toutes les
conditions sont réunies pour aboutir à une raideur de l’épaule :
hémarthrose, source de fibrose intra-articulaire ; hématome
périarticulaire, source de coalescence des bourses séreuses ;
contusion musculaire, source d’hypotonie et ensuite de rétraction ;
parfois déchirure capsulaire, source d’instabilité et ensuite de fibrose
capsulaire.
Le chirurgien doit expliquer au rééducateur et au patient
le principe et les buts de la rééducation.
Les doigts, le poignet et le
coude doivent être mobilisés activement le plus tôt possible mais la
mobilisation de l’épaule ne peut être que passive jusqu’à obtention
de la consolidation :
– elle commence par les exercices pendulaires brefs mais répétés
dans la journée ;
– l’élévation est rééduquée par une automobilisation en décubitus
dorsal, le coude tendu, avec des élévations lentes de la plus grande
amplitude possible ;
– les rotations sont travaillées les coudes au corps fléchis à 90°, à
l’aide d’un bâton tenu dans les deux mains mais seulement mobilisé
par le membre supérieur sain.
Les séances doivent être répétées dans la journée.
L’idéal est de rééduquer passivement l’épaule le plus tôt possible,
dans des secteurs de mobilité précisés par l’opérateur en fonction
de la stabilité de l’ostéosynthèse.
Une rééducation précoce et
agressive peut être néfaste dans les ostéosynthèses a minima ou
insuffisamment stables, par le biais d’un déplacement secondaire.
Cette règle s’applique également aux prothèses humérales où les
modalités de la rééducation dépendent de la solidité de
l’ostéosynthèse tuberculaire.
Chaque fois qu’une ostéosynthèse
paraît insuffisante, la rééducation est débutée plus tardivement,
après une période d’immobilisation, au mieux en abduction aux
alentours de 45°.
Les exercices actifs sont différés jusqu’à
constatation radiographique de la consolidation, soit habituellement
à 6 ou 8 semaines.
Un programme complet d’exercices d’étirement
et de renforcement musculaires est alors débuté.
Les exercices
quotidiens doivent être poursuivis pendant au minimum 6 mois,
pour corriger les déficits résiduels de mobilité ou de force.
Cette rééducation idéale ne peut cependant s’appliquer à tous les
cas.
Certains patients très âgés ou à l’état général et intellectuel altéré
ne peuvent coopérer à ce programme.
En cas d’ostéoporose et de comminution importantes, la mobilisation précoce expose au
démontage et à la pseudarthrose.
Dans ces cas, la rééducation doit
être prudente et au besoin débuter une fois la fracture consolidée.
B - INDICATIONS
:
Elles sont discutées.
Nos orientations découlent de l’analyse
statistique des résultats de la série du symposium de la Sofcot
1997.
1- Fractures extra-articulaires
:
*
Fractures tuberculaires :
+ Fractures du tubercule majeur ou trochiter
:
L’indication dépend de l’importance du déplacement supérieur ou
postérieur.
La limite du déplacement acceptable est de 10 mm, le
traitement orthopédique restant indiqué en deçà.
La position
d’immobilisation est discutée.
L’abduction et la rotation externe
détendent les muscles insérés sur le fragment détaché.
Toutefois, il
n’est pas prouvé que cette position permette de réduire le
déplacement.
En cas de luxation antéro-interne associée, il faut
privilégier la cicatrisation capsuloligamentaire antérieure par une
immobilisation en rotation interne et éventuellement légère
élévation.
Cette position expose à une aggravation du déplacement
postérieur qu’il est impossible d’apprécier sur des clichés standards.
Dans de rares cas, une TDM peut être nécessaire.
Dans tous les cas,
des radiographies de contrôle sont nécessaires en raison du risque
de déplacement secondaire.
L’ostéosynthèse par un abord transdeltoïdien externe est indiquée
en cas de déplacement supérieur ou postérieur de plus de 10 mm,
de luxation irréductible par interposition du tendon du long biceps
ou de luxation incoercible.
Il est difficile de fixer le fragment,
souvent fragile et refendu, parfois limité à une fine écaille corticale
amincie par l’ostéoporose. Le choix du matériel est conditionné par
le caractère mono- ou plurifragmentaire de la fracture.
Un
volumineux fragment monobloc et solide se prête au vissage appuyé
sur rondelle.
En cas de fragment refendu et de fragilité
osseuse, la tenue des vis est très incertaine.
La suture ou un laçage transosseux au fil non résorbable prenant appui sur le tendon
terminal du supraspinatus est une technique plus sûre.
Il faut y
associer la suture de la déchirure de la coiffe située entre les muscles supraspinatus et subscapulaire.
Une immobilisation en élévation
dans le plan de l’omoplate pour détendre la coiffe et soulager la
suture est nécessaire pendant 3 à 4 semaines, avec rééducation
passive précoce si l’ostéosynthèse l’autorise.
Le délai de prise en
charge chirurgicale est un paramètre important.
Les résultats
modestes des traitements chirurgicaux tardifs trouvent une probable
explication dans la rétraction rapide de la coiffe rendant difficile la
réduction et sollicitant la fixation.
L’intervention doit être pratiquée
avant 10 jours, une fois l’indication opératoire posée.
+ Fractures du tubercule mineur ou trochin
:
L’ostéosynthèse, par vissage ou suture, est indiquée en cas
de déplacement, de fracture détachant une partie importante de la
surface articulaire ou de luxation postérieure incoercible.
Les risques
de déplacement secondaire, de pseudarthrose, de cal vicieux avec
limitation de la rotation interne, de pathologie du long biceps, voire
d’instabilité antérieure, justifient d’opérer la quasi-totalité des fractures déplacées.
En cas de luxation postérieure, il peut être
nécessaire de relever une fracture-tassement céphalique antérieure
associée à la fracture tuberculaire.
L’abord est deltopectoral.
* Fractures sous-tuberculaires
:
+ Fractures sous-tuberculaires isolées
:
Un grand nombre de ces fractures, souvent engrenées et peu
déplacées, est traité orthopédiquement par une immobilisation de
3 semaines, au prix de cals vicieux extra-articulaires modérés en
règle bien tolérés.
Les cals vicieux métaphysaires en varus le sont
moins, mais il ne nous a pas été possible de déterminer l’importance
de l’angulaire acceptable.
L’ostéosynthèse est indiquée en cas d’échec immédiat ou secondaire
du traitement orthopédique, de fracture à grand déplacement, de
complication artérielle, chez les polytraumatisés et en cas de
traumatisme étagé du membre supérieur.
L’ostéosynthèse par plaque épiphysaire permet une réduction
anatomique mais elle suppose un os spongieux résistant et un
fragment proximal suffisamment volumineux.
Du ciment permet
d’améliorer la tenue des vis, mais cette technique ne saurait être
utilisée que chez des sujets âgés et fait craindre d’importantes
difficultés en cas d’infection.
L’enclouage à foyer fermé est plus sûr en cas de fragilité osseuse ou
de fragment proximal peu volumineux.
Le matériel est introduit à la
jonction de la tête humérale et du trochiter par une courte incision
de la coiffe après un abord externe transdeltoïdien vertical.
On peut
utiliser un clou de Postel à tête plate ou deux clous de Rush, moins
volumineux.
Cette ostéosynthèse ne bloque pas les rotations.
Pour
pallier ce défaut, on peut y associer un agrafage ou mieux un
cerclage en huit appuyé en haut sur le matériel et en bas sur la
diaphyse (dans un orifice transversal ou sur la saillie d’une tête de
vis), réalisant un hauban d’une grande stabilité.
Le matériel peut
reculer lors de l’impaction du foyer et entrer en conflit avec la voûte,
nécessitant une ablation de matériel dès la consolidation acquise.
Le
clou de Seidel, qui peut désormais être verrouillé à ses deux
extrémités grâce à un récent trou de vis plus proximal, est une autre
solution.
L’enclouage fasciculé, au mieux à foyer fermé sous contrôle
radioscopique, favorise la récupération fonctionnelle.
La technique
de Kapandji est souvent préférée aux techniques par voie basse car
elle respecte le coude.
Elle est déconseillée en cas de fracture
diaphysaire associée située à proximité du point d’entrée des
broches.
En cas de difficulté, l’abord du foyer facilite la réduction et
l’introduction des broches.
+ Fractures sous-tuberculaires avec fracture
du tubercule majeur ou mineur
:
Fractures sous-tuberculaires et du tubercule majeur : la fracture du
tubercule majeur complique l’ostéosynthèse de la fracture soustuberculaire.
La plaque épiphysaire doit fixer les deux fractures ou
être associée à une ostéosynthèse séparée du trochiter.
Les
enclouages descendants sont critiquables car le clou ou les broches
doivent être introduits dans la surface articulaire.
L’embrochage
fasciculé est difficile car les broches risquent de sortir par la fracture tuberculaire.
Celle-ci nécessite en outre une réduction et un brochage
percutanés difficiles en cas de déplacement.
L’enclouage à l’aide de
deux clous de Rush et d’un cerclage en huit nous paraît plus sûr.
Nous n’avons pas l’expérience du laçage de Hawkins,
qui ne semble pas assurer une stabilité suffisante.
Chez les sujets
âgés ostéoporotiques, les auteurs anglo-saxons ont proposé une prothèse humérale d’emblée ou en cas d’ostéosynthèse difficile.
Cette indication doit être réservée à des cas exceptionnels.
Fractures sous-tuberculaires et du tubercule mineur : la fracture du
tubercule mineur ne complique pas l’ostéosynthèse soustuberculaire
mais nécessite, par un abord deltopectoral, une
ostéosynthèse séparée du trochin.
2- Fractures articulaires
:
* Fractures du col anatomique
:
Il est bien difficile de codifier le traitement d’une fracture aussi rare.
Les indications suivantes, à défaut d’être basées sur l’expérience,
ont le mérite de la logique :
– dans les formes engrenées, le traitement orthopédique est d’autant
plus légitime que le contact est important ;
– le traitement doit être en revanche chirurgical en cas de
déplacement important dans les fractures désengrenées, les fractures-luxations et peut-être en cas d’engrènement avec contact
inférieur à 50 %.
Chez le sujet âgé, le risque de nécrose céphalique incite à la prothèse
humérale d’emblée.
Chez le sujet jeune, l’ostéosynthèse paraît licite en raison des incertitudes des prothèses et on a le choix entre ostéosuture, broches et vis, mais dans cette éventualité il faut retirer
le matériel intracéphalique rapidement.
Le risque de nécrose
est en effet important et le matériel peut entrer en conflit avec la
glène.
Une prothèse de seconde intention peut être pratiquée dans
de bonnes conditions car les tubérosités sont intactes.
* Fractures céphalotuberculaires
:
Le recours à la prothèse peut se justifier dans ces fractures par le
risque élevé de nécrose céphalique.
La nécrose peut compliquer
l’évolution d’une fracture engrenée de type II ou même I, mais
encore plus celle des fractures désengrenées des types III et IV.
L’artère antéroexterne est interrompue par le trait de fracture du col
anatomique.
La vascularisation céphalique peut encore être assurée
par des connexions capsulaires postéro-internes, insérées sur le
fragment céphalique lorsque le trait de fracture passe au moins 1 cm
sous le cartilage.
Dans les fractures engrenées, le risque de
nécrose est moins élevé car la tête peut être encore vascularisée par
des connexions périostées internes avec la diaphyse, respectées
lorsqu’il n’existe pas de translation entre la diaphyse et le fragment
céphalique.
Dans les fractures désengrenées, il n’y a plus de
connexions périostées et les éventuelles connexions capsulaires
risquent fort d’être rompues, surtout en cas de luxation.
Dans les fractures-luxations engrenées, les connexions capsulaires risquent de
l’être également.
La nécrose céphalique est radiologiquement visible
avant 36, voire 24 mois, mais elle peut n’être que partielle et surtout
son retentissement fonctionnel est variable.
Parfois invalidante, elle
est souvent compatible avec une fonction acceptable lorsque la
réduction épiphysaire à consolidation est bonne et lorsque
l’effondrement n’est pas massif.
Son évolution à long terme est
mal connue mais se fait vraisemblablement vers l’omarthrose avec
enraidissement progressif de l’épaule.
Les indications dépendent de
l’âge et du type fracturaire.
+ Âge :
Les résultats fonctionnels des prothèses sont inconstants et leur
avenir menacé d’usure de la glène, de rupture secondaire de la
coiffe, voire de descellement.
Ces incertitudes incitent à les réserver
à des patients de plus de 60 ou 65 ans et à traiter les sujets jeunes
par ostéosynthèse, au prix d’un risque élevé de nécrose céphalique.
Celle-ci, en effet, peut être bien tolérée, sous réserve d’une réduction épiphysaire exacte.
Cette attitude doit cependant être nuancée.
D’une part, le respect des impératifs techniques permet d’espérer de
meilleurs résultats fonctionnels et peut-être une plus grande
longévité des prothèses.
D’autre part, l’ostéosynthèse n’est pas
dénuée de complications : cal vicieux et raideur qui compliquent une
reprise par prothèse dont le résultat est moins bon que celui d’une
prothèse de première intention.
La décision dépend de la confiance
que l’on a dans les prothèses, et celle-ci est moins importante en
Europe que chez les auteurs anglo-saxons, de la qualité et de la comminution osseuses, qui se prêtent mal à l’ostéosynthèse chez les
sujets âgés, et du risque de nécrose céphalique, qui dépend du type
fracturaire.
+ Type fracturaire
:
Formes engrenées
Les fractures du type I, très peu ou non déplacées, relèvent d’une
simple immobilisation dans un bandage de Dujarier pendant 3
semaines.
Le traitement des fractures du type II est très discuté.
Le traitement
orthopédique a le mérite de la simplicité, diminue pour certains le
risque de nécrose céphalique en laissant la tête impactée, mais il
laisse persister les déplacements céphalique et tuberculaire.
Le rôle
pathogène de l’horizontalisation céphalique n’est pas prouvé.
En
revanche, le déplacement postérieur du trochiter peut limiter la
rotation externe par conflit avec le bord postérieur de la glène et le
déplacement interne du trochin peut limiter la rotation interne, par
conflit avec le bord antérieur de la glène.
De plus, l’ascension
relative du trochiter fait craindre une limitation de l’élévation par
conflit avec la voûte.
Ce cal vicieux peut être bien toléré, mais
inconstamment et de manière imprévisible, et son traitement est
difficile.
En l’absence de nécrose céphalique, une ostéotomie avec
abaissement et avancement du trochiter peut améliorer la mobilité
mais elle fait craindre une dévascularisation céphalique.
En cas de
nécrose céphalique associée, la prothèse est difficile en raison du cal
vicieux tubérositaire associé.
Les résultats de la série du symposium
sont en faveur du traitement chirurgical des fractures dont l’angle
d’inclinaison frontale du fragment céphalique est inférieur à 20°, le
déplacement du tubercule majeur supérieur à 5 mm ou celui du
trochin supérieur à 10 mm.
Les rares fractures engrenées en varus
sont de mauvais pronostic et grevées d’un taux de nécrose élevé.
Il paraît licite de rétablir l’anatomie chez les sujets jeunes et de
recourir d’emblée à la prothèse chez les sujets âgés.
Chez les sujets jeunes, une réduction anatomique laisse espérer la
récupération d’une bonne fonction et, en cas de nécrose céphalique
invalidante, l’absence de cal vicieux tuberculaire simplifie la reprise
par prothèse.
Par voie deltopectorale ou antéroexterne, la réduction
consiste à relever le fragment céphalique impacté, autour d’une
charnière interne qu’il faut respecter.
La hauteur du relèvement est
déterminée par la réduction du tubercule majeur entre la diaphyse
en bas et la tête humérale en haut. Un brochage temporaire
maintient la réduction.
Il n’est pas démontré que le relèvement
céphalique aggrave le risque de nécrose.
Le vide créé par le
relèvement céphalique est effacé en grande partie par les tubercules
mais il peut paraître logique de le combler par une greffe osseuse
spongieuse ou corticospongieuse.
Cette dernière peut même
assurer une stabilité suffisante pour se passer d’ostéosynthèse.
L’ostéosynthèse par plaque est difficile en raison de la taille réduite
du fragment céphalique et elle est accusée d’aggraver la dévascularisation céphalique.
L’enclouage à travers le fragment
céphalique est critiquable.
L’embrochage fasciculé expose à l’issue
des clous par les traits détachant les tubérosités ou même à travers
la calotte humérale souvent fragile.
Le resanglage tuberculaire est
souvent suffisant pour maintenir le relèvement céphalique.
Le
tubercule majeur peut être fixé par vissage mais mieux par un
cerclage en huit au fil non résorbable, prenant appui en haut sur la
terminaison du supraspinatus et en bas à travers ou autour de la
diaphyse.
Le tubercule mineur est fixé séparément si nécessaire.
Cette technique se rapproche de celle proposée dans les fractures sous-tuberculaires avec fracture du trochiter, qui recommande un
cerclage en huit appuyé en haut sur le sommet du trochiter et en
bas sur la diaphyse (dans un tunnel transosseux ou autour de la
saillie d’une tête de vis).
Pratiquée sous amplificateur de brillance, l’ostéosynthèse à foyer
fermé comporte une réduction à l’aide de crochets, spatules ou
poinçons introduits par voie percutanée, suivie de fixation par des
broches ou des vis.
Toutefois, la réduction peut être difficile, le
matériel n’a que peu de prise dans l’os sous-chondral et peut faire
issue par les traits de fracture ou à travers le fragment céphalique
très mince.
Chez les sujets âgés, la prothèse humérale permet de rééduquer
rapidement l’épaule et assure l’indolence et une mobilité active
souvent compatible avec les exigences fonctionnelles.
Elle paraît
d’autant plus indiquée que le déplacement est important.
Formes désengrenées et luxées
Le traitement orthopédique semble dépassé.
Il a été utilisé
principalement chez le sujet âgé ou en mauvais état général avec
des résultats objectifs mauvais mais dont les plus âgés se contentent
parfois.
En fait, sa place se discute surtout dans les fracturesluxations.
Des tentatives de réduction de fracturesluxations/fractures désengrenées ont été proposées par certains.
Les chances de succès sont très incertaines et ces manoeuvres
peuvent même aggraver les lésions osseuses ou entraîner des
complications vasculonerveuses.
Au mieux, elles permettent
d’aligner la diaphyse sous l’épiphyse, aboutissant ainsi à un cal
vicieux métaphysoépiphysaire.
La tentative de réduction se discute
avant tout dans les fractures-luxations antérieures engrenées.
Si l’on
parvient à réduire la luxation sans désengrener la fracture, on se
trouve ramené à une fracture céphalotubérositaire de type II dont le
déplacement dicte la suite du traitement.
Le risque de
désengrènement est majeur et, dans cette éventualité, la nécrose
est quasi constante.
Un embrochage à foyer fermé préalable à la
réduction de la luxation peut être discuté.
Il peut éviter le
désengrènement, mais n’assure pas une réduction satisfaisante de la
fracture.
Nous n’en avons pas l’expérience.
Le traitement chirurgical est le plus souvent nécessaire.
La difficulté
est de choisir entre ostéosynthèse et prothèse. L’étude des résultats
des ostéosynthèses montre que le facteur pronostique essentiel est
la qualité de la réduction à consolidation.
Celle-ci est rarement
anatomique au-delà de 60 ans, ce qui peut s’expliquer par la
mauvaise tenue du matériel et la plus grande complexité des
fractures chez les sujets âgés à l’os porotique.
Cette constatation, à
laquelle s’ajoute un risque élevé de nécrose céphalique, incite à la
prothèse chez les sujets âgés.
L’existence d’une luxation (type IV) ne
nous paraît pas être un argument supplémentaire en faveur de la
prothèse.
Chez le sujet jeune ou à l’os solide, l’ostéosynthèse paraît légitime
sous réserve d’une réduction satisfaisante.
Il est difficile de réduire
exactement ces fractures en raison de la perte de substance métaphysoépiphysaire et de la fréquente comminution des
tubérosités.
L’instabilité est plus importante que dans les fractures
du type II car il n’y a plus aucune connexion entre le fragment
céphalique, la diaphyse et les tubérosités, et il est donc nécessaire
d’assurer un raccordement épiphysodiaphysaire stable.
La fixation à
foyer fermé est difficile et incertaine.
Elle fait appel à l’embrochage
ascendant dans les fractures-luxations, après réduction
orthopédique ou à ciel ouvert, ou à l’embrochage direct percutané.
La fixation à foyer ouvert est plus sûre.
La voie préférentielle
est deltopectorale avec abord intertubérositaire.
Dans les fracturesluxations
postérieures, d’autres voies, supérieure ou
postérieure, ont été proposées.
Elles procurent un accès
satisfaisant aux tubérosités et à la calotte céphalique, mais limité à
la diaphyse avec pour conséquence des difficultés de fixation.
Les
plaques exposent au déplacement secondaire en raison de la
mauvaise tenue épiphysaire des vis.
Un haubanage appuyé sur des
broches centromédullaires plutôt que sur un clou de Postel implique
une lésion iatrogène du cartilage céphalique et expose à la migration proximale du matériel, mais nous paraît être la moins mauvaise
solution.
Le vissage isolé ou le brochage direct, associé à des laçages
ou sutures osseuses des tubercules, est souvent insuffisant.
Actuellement, l’évolution se fait vers une fixation stable mais la
moins invasive possible.
En cas de nécrose céphalique
invalidante, la reprise par prothèse est possible, sous réserve que la
réduction à consolidation soit anatomique.
Lorsque la réduction ou
une fixation stable s’avère impossible, il vaut mieux passer d’emblée
à la prothèse plutôt que d’accepter un cal vicieux dont la
reprise par prothèse est difficile et le résultat très incertain.
Cette attitude, nuancée selon l’âge, diffère de celle des auteurs
américains, partisans de la prothèse à tout âge en raison de la
fréquence des échecs d’ostéosynthèse et des moins bons résultats
des prothèses de deuxième intention.
* Fractures issues des encoches céphaliques
:
+ Fractures céphalométaphysaires secondaires
aux luxations antérieures
:
La tête reste vascularisée par ses attaches capsulaires et le muscle subscapularis inséré sur le tubercule mineur.
Le fragment céphalométaphysaire est désolidarisé de la diaphyse et ne peut, en
règle, être réduit orthopédiquement.
L’ostéosynthèse est la règle.
La
voie d’abord deltopectorale est conseillée, mais ensuite la libération
du fragment céphalométaphysaire doit être la moins
dévascularisante possible.
Il ne faut pas couper le subscapularis ni
dépérioster de façon extensive l’éperon cervical ou en désinsérer la
capsule.
Le caractère très vertical expose à un défaut de réduction
avec un chevauchement résiduel, donnant un faux aspect de cal
vicieux du trochiter.
La pointe de cet éperon guide la réduction.
L’ostéosynthèse doit être stable. Un vissage ou une plaque sont
préférables aux broches.
Une immobilisation de 3 semaines coude
au corps est nécessaire pour obtenir la cicatrisation des lésions capsuloligamentaires dues à la luxation antérieure.
Moyennant une
ostéosynthèse exacte sans dévascularisation du fragment
céphalométaphysaire, le pronostic est bon.
Il n’existe pas
d’indication de prothèse dans ces fractures.
+ Fractures céphalométaphysaires secondaires
aux luxations postérieures
:
En cas de luxation irréductible ou de déplacement inacceptable
après réduction, l’intervention s’impose mais elle ne doit pas être
systématique.
En effet, la réduction orthopédique de la luxation et
en même temps de la fracture peut être obtenue dans certaines
fractures simples et, dans cette éventualité, donner un
excellent résultat après immobilisation en rotation neutre pendant
4 semaines.
Cette réduction doit être obtenue facilement, sans
manoeuvres de force.
Nous ne sommes pas partisans des
manipulations percutanées du fragment luxé à l’aide d’un poinçon.
La tentative de réduction orthopédique n’est pas dangereuse dans
ces fractures déjà désengrenées par le traumatisme.
Nous n’avons aucune expérience de l’abord postérieur, recommandé
par Vichard.
Il permet de réduire la luxation et de réparer les
lésions capsulaires mais il ne procure qu’un jour limité qui rend
l’ostéosynthèse difficile, voire impossible, en cas de fracture associée
du col chirurgical et ne permet pas d’agir sur l’encoche ni sur une
fracture du trochin.
Enfin, il n’autorise pas le passage à la prothèse
humérale en cas de nécessité.
D’autres ont recommandé un abord
supérieur transacromial.
Nous recommandons la voie deltopectorale avec section du
subscapularis à proximité de son insertion, sauf en cas de fracture
du trochin qui est un équivalent de cette section.
Après réduction
du fragment céphalique luxé en arrière selon une manoeuvre de
« démonte-pneu », le vissage est souvent possible, sauf en
cas de fracture du col chirurgical associée, où la plaque est le plus
souvent nécessaire.
L’encoche céphalique des luxations postérieures, quasi constante, est
une véritable fracture-tassement.
Elle peut nécessiter à elle seule un
traitement chirurgical.
Les indications dépendent de l’importance de
l’encoche.
En cas d’encoche intéressant moins de 30 % de la surface articulaire,
la réduction orthopédique est suffisante.
Elle est suivie d’une
immobilisation en rotation neutre pendant 4 semaines.
De 30 à 50 %,
le traitement est chirurgical et conservateur : relèvement avec
éventuel comblement par de l’os spongieux, suture du subscapularis
dans l’encoche selon Mac Laughlin ou vissage du trochin dans
l’encoche selon Neer et Hawkins.
Un fragment d’allogreffe fémorale
vissée pourrait être nécessaire en cas de destruction complète d’un
croissant ostéocartilagineux, mais cette technique est surtout
indiquée dans les cas anciens.
Ce n’est que dans de rares
destructions céphaliques de plus de 50 %, très rares, que
l’arthroplastie humérale peut être nécessaire.
Dans cette éventualité,
il faut veiller à ce que la rétroversion ne dépasse pas 20° pour
minimiser le risque de luxation postérieure postopératoire.
Il faut surtout insister ici sur le risque des tentatives de réduction
des luxations postérieures pures qui doivent être très prudentes car
l’encoche est pratiquement constante et peut être le point de départ
d’une fracture du segment céphalique incarcéré derrière la glène.
Il
peut même exister un trait de refend céphalique non déplacé que
nous avons déjà observé sur une TDM et qui favorise à l’évidence
cette complication.
C’est pourquoi il est préférable de réduire à foyer
ouvert si l’importance de l’encoche, appréciée par TDM, impose un
traitement chirurgical.
Conclusion
:
En présence d’une fracture de l’extrémité supérieure de l’humérus, la
première étape est diagnostique et repose sur l’imagerie car seule
l’identification correcte du type fracturaire et d’une éventuelle luxation
associée permet d’établir un plan thérapeutique précis conduisant à un
traitement adapté.
Les radiographies réalisées en urgence dans des conditions souvent
difficiles, en raison des douleurs, expliquent l’identification souvent
imprécise de ces fractures.
Il faut néanmoins exiger la série traumatique
complète avec un profil axillaire ou une incidence de Garth.
Si ces
clichés ne sont pas assez explicites, un examen TDM avec éventuelle
reconstruction tridimensionnelle est demandé.
Il peut être réalisé sans
mobiliser le membre supérieur et permet d’apprécier l’état et le
déplacement des tubérosités et notamment du trochin, d’affirmer
l’existence d’une luxation postérieure, de dépister les encoches et les
traits transcéphaliques.
Il pallie au moins une partie des insuffisances
des radiographies standards et devrait permettre de réduire la fréquence
des erreurs diagnostiques.
La deuxième étape est thérapeutique.
Les éléments du choix entre
ostéosynthèse et prothèse sont essentiellement l’âge, le risque de nécrose
céphalique, qui dépend directement du type fracturaire et la solidité
osseuse.
Les fractures extra-articulaires ne menacent pas la vitalité
céphalique.
Elles relèvent de l’ostéosynthèse et la restauration de
l’anatomie laisse espérer la récupération d’une fonction normale.
Seules
de rares fractures sous-tuberculaires avec fracture du tubercule majeur
pourraient nécessiter une prothèse chez les sujets âgés à l’os
ostéoporotique fragile.
Les fractures articulaires menacent la vitalité
céphalique à des degrés divers.
Leur traitement chirurgical est difficile,
les complications plus fréquentes et les résultats souvent imparfaits.
Dans les fractures du col anatomique et céphalotuberculaires, la
discussion est ouverte, selon l’âge et l’importance du déplacement, entre
la prothèse humérale et l’ostéosynthèse.
Celle-ci doit être anatomique, en raison des difficultés de reprise et des résultats incertains des
prothèses de seconde intention.
Dans les fractures issues des encoches
céphaliques, l’ostéosynthèse est la règle, sauf dans de rares encoches
antérieures compliquées de très rares destructions céphaliques
importantes.
La qualité du résultat fonctionnel final dépend non seulement du
résultat anatomique après traitement mais également de la qualité de la
rééducation postopératoire.
Quelle que soit la fracture et son traitement,
l’idéal est une rééducation précoce passive dans des secteurs de mobilité
précisés par le chirurgien.
La date de début de rééducation dépend plus
de la solidité du montage que de la technique utilisée.
En cas de fragilité
osseuse, une orthèse en élévation de 45° peut protéger l’intervention et
autoriser une rééducation précoce et, en cas de doute, la rééducation est
différée.
Les erreurs diagnostiques, stratégiques et techniques n’en restent pas
moins fréquentes, se cumulent et on peut en décrire de nombreuses.
La
connaissance de l’anatomopathologie, un examen clinique et
notamment vasculonerveux systématique, une imagerie adaptée et
analysée avec rigueur, des indications raisonnées et le respect des
principes thérapeutiques permettent d’en éviter beaucoup.